Au pays de Jolo

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Michel Gratton COLLECTION « Je veux quon parle de no u s » 15 Une visite à l’École élémentaire catholique J.-L.-Couroux Au pays de Jolo

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Michel Gratton

ColleCtion « Je veux qu’on parle de nous »   15

Une visite à l’École élémentaire catholique

J.-L.-Couroux

Au paysde Jolo

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Une visite à l’École élémentaire catholique J.-L.-Couroux

Michel Gratton

Au paysde Jolo

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Nous tenons à remercier sincèrement la direction, le personnel et les élèves de l’École élémentaire catholique J.-L. Couroux d’avoir rendu cet ouvrage possible.

L’un des plus beaux voyages...

La lecture des livres de cette belle collection m’épate. Mais elle ne m’étonne pas.

Ce que je revis en lisant ces livres n’est que fidèle à ce que j’ai vécu au cours des 30 dernières années de ma vie. Ce que je ressens, ce sont cette même joie et cette même fierté que j’ai toujours ressenties à circuler dans les corridors et les classes de nos écoles. Comme enseignant, comme directeur, comme surintendant ou, aujourd’hui, comme directeur de l’éducation.

Ce que je revois, ce sont les visages de gens qui ont comblé ma vie, des élèves ayant une soif d’apprendre, la collaboration de personnes passionnées et le dépassement quotidien de mes collègues de travail.

J’entends leurs voix et leurs rires. Et je ressens toutes les espérances de tous ces passagers partant ensemble pour l’un des plus beaux voyages. Celui de l’éducation et de la réussite de chaque enfant qui entre chez nous.

Ce 20e récit de la collection « Je veux qu’on parle de nous » se termine ici pour son auteur Michel Gratton, qui s’est éteint le 13 janvier 2011. Avec sa simplicité et son émerveillement, Michel a su nous raconter l’esprit et la vitalité qui règnent au sein des 20 écoles qui lui ont ouvert leurs portes. Sa belle sensibilité conjuguée à son grand talent d’écrivain laisse à notre conseil scolaire le souvenir d’un homme de cœur engagé, heureux d’être parmi les siens, les francophones de l’Ontario. Merci Michel. 

Bernard Roydirecteur de l’éducation

Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE)

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— « Je pouvais prendre mon temps, ce matin. Je n’avais pas à partir de bonne heure. »

— « Ah, oui… »

Il est 7 h du matin. Le milieu de ma nuit. J’ai du mal à croire que le soleil est levé. Enfin, presque levé.

Mais Madame Jessica, elle, est en retard sur son horaire habituel. Grâce à moi, passager d’un jour. En temps normal, elle est déjà presque rendue au travail à cette heure-là. Mais elle a eu la gentillesse de venir me cueillir en chemin.

Le travail, c’est loin pour elle qui vit à Orléans. Carleton Place est quelque part dans la campagne ontarienne du sud d’Ottawa, le long de la route 7, à mi-chemin vers Guelph. Il faut se payer le Queensway pratiquement d’un bout à l’autre. C’est un voyage d’une quarantaine de minutes, dit-elle. Ouais… sur les ailes d’un ange, peut-être. Chose certaine, c’est du kilométrage.

Et ça, jour après jour, pour être la joyeuse enseignante de maternelle de l’école J.-L.-Couroux. Bonne humeur essentielle à l’emploi. Oui, il y a bel et bien une école de langue française et catholique ici. Il n’y a pas si longtemps, on aurait vu ses occupants comme de dangereux subversifs. Mais aujourd’hui, les gens de J.-L.-Couroux sont une partie intégrante de cette communauté. On souligne leurs exploits régulièrement dans le journal local et la popularité de l’école auprès des familles grandit d’année en année.

Il fallait y croire…

En entrant, je suis accueilli par un message écrit à la craie sur un tableau vert. On me souhaite la bienvenue, avec un point d’exclamation.

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J’ai l’impression d’être un invité d’honneur. Une musique entraînante résonne partout dans l’école. « Ça fait rire les oiseaux… » chante l’artiste sur un rythme antillais. Il paraît que c’est comme ça tous les matins. Tout le monde devrait commencer sa journée ainsi.

Madame Kadian, la directrice, a l’air très contente de me voir. Elle et toute l’école, à vrai dire. Les enfants me saluent comme si j’étais de la grande visite. Et ça ne fait que commencer.

J’ai à peine le temps de lui dire « bonjour » qu’elle m’avertit que les élèves de 4e-5e année ontpréparé quelque chose pour moi.

Le groupe arrive. Ils sont accompagnés d’un enseignant, Monsieur Joël, à la guitare. Et puis, les élèves de la 3e année se pointent aussi, comme spectateurs, je crois. La directrice m’apprend que les élèves de la 4e-5e vont me chanter une ou deux chansons.

« L’arbre est dans ses feuilles, maluron, maluré… » Décidément, c’est un matin pour giguer. Le choix de la chanson a quelque chose à voir avec « l’arbre généalogique » que fera chaque élève de l’école, me dit Madame Kadian. On m’expliquera plus tard.

Parce que le concert n’est pas fini. À mon grand étonnement, j’apprends que l’école J.-L.-Couroux a sa propre chanson-thème. Ils la chantent. Autre surprise, c’est pas mal bon. Je vois que les spectateurs de 3e année chantent aussi. Tout

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le monde la connaît.

« Main dans la main, avec Jolo le Loup… » Avec qui? On n’avait qu’à dire son nom. Le voilà! Jolo le Loup lui-même. C’est la fière mascotte de J.-L.-Couroux. Une tannante de belle mascotte! Un beau loup souriant, gris et blanc. Jolo le Loup danse au son de la chanson en tapant les mains levées de ses fans.

J’en ai plein la vue. Et je n’ai pas encore mis le pied dans le corridor.

Au premier rang de la chorale, une jeune fille porte un chandail des Canadiens de Montréal. Je dis aux élèves que j’ai une grande nouvelle à leur apprendre : le chandail qu’elle porte est en fait le nouvel uniforme de J.-L.-Couroux.

Ça ne fait pas l’unanimité. « Go, Sens, go! » crie un brave.

Madame Latulippe, aujourd’hui enseignante de sciences, était une mère bénévole dévouée lors de l’ouverture de l’école, en 1996. C’était un événement majeur pour elle qui militait pour la fondation d’une école francophone à Carleton Place depuis son arrivée en 1983. Elle était venue de North Bay. « C’était ridicule, dit-elle. À 30 minutes de la capitale, on n’avait pas d’école de langue française. »

Le conseil scolaire de l’époque, entièrement composé de représentants anglophones, n’a rien fait pour faciliter les choses. « On a proposé d’ouvrir une école française à Smiths Falls, puis à Brockville, puis à Merrickville… » J.-L.-Couroux voyait finalement le jour 13 ans plus tard, dans des conditions qu’elle et les autres militants francophones du temps n’oublieront jamais.

« Au cours du premier mois, on disait aux élèves que l’on était en pique-nique. »

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Il fallait bien leur dire quelque chose. N’importe quoi. Pour leur expliquer la situation déroutante dans laquelle ils se retrouvaient. Après tout, une belle école de langue anglaise toute neuve venait d’ouvrir ses portes dans le village, avec des ordinateurs et tout l’équipement scolaire dernier cri.

Mais les élèves de l’école de langue française se retrouvaient dans un hangar. On pouvait lui donner le nom que l’on voulait sur la nouvelle affiche, ce n’était qu’un immense garage. Ils auraient pu entrer dans l’école dans leur autobus. En fait, deux autobus de large par les portes géantes à l’avant du bâtiment.

Ils avaient une brasserie et des usines comme voisins. Un terrain vague recouvert de gravier comme cour de récréation. Pas de gymnase, évidemment.

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Ils n’avaient ni livres, ni pupitres, ni quelque matériel scolaire que ce soit. Quarante-cinq élèves, de la maternelle à la 8e année. Comme dans une bonne vieille école de campagne, mais sans le charme et la chaleur de la petite maison dans la prairie.

La directrice d’alors, Gisèle Neil, et son mari avaient eux-mêmes érigé un mur au milieu du hangar pour séparer les élèves de la 1re à la 3e année des élèves de 4e et 5e. Le Lanark-Carleton Separate School Board avait refusé de dépenser de l’argent pour le construire. Une école française était toujours considérée comme une extravagance vouée à l’échec.

Les élèves, les enseignants et les parents de J.-L.-Couroux ont très vite compris qu’ils étaient tous dans le même bateau et que leur seule chance d’arriver à bon port était de ramer fort ensemble. « Les premiers parents étaient motivés, raconte Madame Nathalie, enseignante de 6e année. Ils s’étaient fait dire que nous n’aurions jamais suffisamment d’élèves pour soutenir une école de langue française. »

Ils sont devenus compagnons dans l’adversité. Le genre d’alliances qui durent toute la vie.

Cette expérience a créé une fierté et une solidarité parmi tous les élèves de l’école qui continuent à se perpétuer, plus d’une décennie plus tard. Par exemple, on a formé un groupe d’élèves chargé de planifier des activités qui sont bonnes pour tout le monde à l’école.

« On veut que les décisions viennent d’eux » dit la directrice.

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« Nous ne voulions pas nous établir ici parce qu’il n’y avait pas d’école française. » Madame Nathalie devait déménager dans la région après avoir accepté une offre d’emploi dans une école d’immersion de Merrickville. Carleton Place était un endroit pittoresque situé à proximité. Mais, sans école française pour les enfants, pas question de s’établir ici.

Et puis on a appris l’ouverture imminente de J.-L.-Couroux. Madame Nathalie faisait plus que s’établir à Carleton Place. Elle devenait l’une des trois premières enseignantes de la première école de langue française de l’histoire du village.

« Je suis là depuis nos premiers jours dans l’entrepôt, dit-elle de leur emplacement original. On l’aimait bien notre petit hangar! Les enseignantes voulaient enseigner. » Elles étaient trois, plus la directrice. Une enseignante pour la maternelle et le jardin, une autre de la 1re à la 4e année et Madame Nathalie comme enseignante de la 5e à la 8e.

« On jouait au ballon avec les enfants dans notre cour en gravier » raconte-t-elle.

« Quand l’école a commencé à grossir, on a ajouté des portatives. C’était le grand luxe d’être dans une portative! »

Ayant survécu à leur première année scolaire, les élèves, la directrice, les enseignants et les parents bénévoles de J.-L.-Couroux posaient un geste devenu symbolique des liens qui les unissent. Comme activité de fin d’année, ils se rendaient tous ensemble aux glissades d’eau du Mont-Cascades. On ne faisait aucune distinction d’âge : « Tous y étaient, de la directrice au dernier élève » dit Madame Latulippe.

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Cette année-là, ils s’étaient aussi impliqués dans le défilé du père Noël de Carleton Place en montant leur propre char allégorique. Privés d’installations sportives, les élèves devenaient également des adeptes d’un sport qui se pratique rarement dans les écoles francophones de la province : le curling. « Les jeunes sont devenus pas mal bons. »

C’était aussi le début d’une autre solide tradition : ne pas craindre de s’afficher comme francophones dans tout ce que l’on fait, peu importe que l’on se retrouve entre francophones ou entre francophones et anglophones.

La promotion active de la langue, ainsi que de la culture et de l’histoire franco-ontariennes, est une priorité dans toutes les écoles du Centre-Est. Mais à J.-L.-Couroux, on sent un enthousiasme particulier devant cette mission. Une urgence d’être à la hauteur de l’énorme responsabilité qui incombe à l’école dans un contexte fortement minoritaire.

Loin de s’estomper, cet enthousiasme n’a fait que s’intensifier depuis que l’école fait partie du Conseil du Centre-Est. Elle compte maintenant près de 200 élèves et plus de 20 employés, dont 13 enseignants, cinq éducatrices, deux concierges et une secrétaire.

« L’école est le cœur francophone de Carleton Place » dit Madame Nathalie, enseignante de 6e année.

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« C’est plus qu’une école. C’est la seule institution francophone dans toute la région de Lanark-Carleton, ajoute la directrice. Je souhaiterais qu’il se passe quelque chose à l’école tous les soirs. »

L’école offre d’ailleurs un service de garde avant et après les heures de classe. On étudie un projet de garderie de langue française.

« Les francophones commencent à s’afficher dans le coin » dit Madame Kadian. Arrivée à la direction il y a deux ans, elle croit en l’engagement de l’école au sein de la communauté. Elle est d’ailleurs la présidente-fondatrice du Club Optimiste. L’organisme, qui a vu le jour en septembre 2009, compte une dizaine d’employés de l’école parmi ses quelque 30 membres.

« Chaque fois que j’entends la chanson Mon beau drapeau, je suis tellement fier!, me dit Quinn, un élève de 6e, au sujet de l’hymne au drapeau franco-ontarien. Il y a beaucoup d’activités ici, et c’est tout en français! »

« Je parle en français chez moi, dit Justin. Je veux parler en français, car je fais beaucoup de sports, comme le hockey et le soccer, et ça se passe en anglais. »

« J’apprends à mes amis à parler français » affirme Danika.

La fierté franco-ontarienne exprimée spontanément par les élèves est d’autant plus surprenante que la presque totalité d’entre eux sont issus de couples exogames, c’est-à-dire de couples où l’un des conjoints est de langue maternelle française et l’autre, de langue maternelle anglaise.

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C’est un défi que J.-L.-Couroux relève brillamment grâce à un projet très original. Sous le thème « Nos racines… notre fierté! », chaque élève est invité à construire son arbre généalogique, pour souligner ses origines francophones.

Chaque élève, de chaque classe, a son arbre. Chaque arbre est affiché sur un grand tableau à l’entrée principale de l’école. Chaque arbre comporte sept cases vides que l’élève doit remplir avec un nom et une photo. Une case pour lui-même, deux cases pour son père et sa mère et quatre cases pour ses grands-parents maternels et paternels.

L’école a aussi trouvé une façon plutôt astucieuse de régler une question qui aurait pu être épineuse. Comment promouvoir la francophonie chez les élèves, tout en respectant leur héritage anglophone? Ainsi, chaque parent de langue maternelle française est désigné par un petit drapeau franco-ontarien. Par ailleurs, chaque parent anglophone est désigné par un « cœur-franco », un petit cœur indiquant que la personne est francophile.

« On veut que les enfants comprennent d’où ils viennent, dit Madame Kadian. On veut les sensibiliser à leur histoire, pas juste à la langue. On veut leur raconter leur histoire d’une façon qu’ils vont comprendre. »

« Les parents n’ont pas toujours le temps de le faire. »

Je pouvais déjà voir quelques photos dans les arbres des élèves lorsque je leur ai rendu visite. Le projet ne faisait que commencer. Ce qui m’impressionne est que c’est si simple et si profond à la fois. Il fallait y penser. C’est fou les idées de génie que l’on peut avoir quand on est francophone à Carleton Place.

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J’épie la classe de 4e-5e par la fenêtre de la porte. Leur enseignant, Monsieur Joël, est là avec sa guitare. Il me fait signe d’entrer. Je l’espérais, car je les entendais répéter la chanson Mon beau drapeau.

J’en profite pour leur demander si c’est important pour eux de parler français.

« J’adore être francophone » me dit Jessica.

« J’aime chanter en français » dit Émilie.

« Être Franco-Ontarienne apporte beaucoup de fierté dans ma vie » affirme Isabelle.

« J’aime les mots des chansons » ajoute Gabrielle.

« Ma famille adore être francophone » nous apprend Joshuah.

« Je suis chanceux d’être francophone » dit Sean.

« La mentalité de Carleton Place a beaucoup changé » affirme Madame Nathalie. Elle me raconte à ce sujet une petite anecdote révélatrice d’une certaine mentalité qui existait à son arrivée dans la région, il y a plus de 10 ans. « Je parlais à mon enfant en français à l’épicerie locale, dit-elle. Une vieille dame, ennuyée de nous entendre, m’avait dit en anglais : “Qu’est-ce que tu fais là? Ne fais pas ça!” »

En 2009, l’école célébrait de façon toute spéciale la Journée du drapeau franco-ontarien du 25 septembre. Tous les élèves ont revêtu un t-shirt blanc et se sont placés stratégiquement sur la pelouse verte pour reproduire un drapeau franco-ontarien humain. Une photo prise du ciel a été publiée dans l’hebdo local, The Canadian Gazette. Les gens de J.-L.-Couroux sont d’ailleurs des habitués du journal où l’on parle souvent d’eux et où on les voit souvent en photos.

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On semble envier à l’école de langue française le fait que l’on y offre des journées complètes aux enfants de la maternelle et du jardin, ce qui n’est pas le cas dans les écoles anglaises du coin.

En fait, J.-L.-Couroux comptait aussi ses cinq premiers élèves âgés de trois ans dans sa première classe du programme Petits pas à trois, en 2010.

Les élèves de 5e année viennent d’entrer dans la classe de Madame Latulippe, l’enseignante de sciences. Avant de se mettre au travail, ils se mettent tous à faire des gestes bizarres avec leurs mains. Certains semblent faire des tracés en « 8 » avec leurs doigts.

C’est la séance de gymnastique du cerveau (brain gym). « Les élèves de 5e s’y mettent sans même que je le leur demande » dit Madame Latulippe. Elle est l’experte dans le domaine à J.-L.-Couroux, où l’on ne craint jamais d’innover et de tenter de nouvelles choses.

Les fervents de ce type d’exercices maintiennent qu’ils permettent, entre autres choses, d’améliorer la capacité de concentration avant d’entreprendre un travail de lecture ou d’écriture. « C’est une question de favoriser un meilleur équilibre » me dit l’experte.

Faudrait que j’essaye… Tiens, un 8 couché… Oh! j’ai le vertige. Je suis tout mêlé dans mes doigts! Pas si facile que ça…

En 2010, les élèves de 6e année de J.-L.-Couroux étaient parmi les meilleurs du Centre-Est avec des résultats éclatants en mathématiques et en écriture. Le brain gym?

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Même la mascotte de l’école a sa petite histoire. Pourquoi un loup? Parce qu’à J.-L.-Couroux les élèves ont du pouvoir, et que c’est l’animal qu’ils ont choisi.

Mais, surtout, d’où provient le nom inédit de Jolo?!

Histoire drôle que celle-là. Tout a commencé le jour où Madame Nathalie a écrit une lettre à une école de langue anglaise pour demander de réserver leur gymnase en vue d’une pièce de théâtre. (C’était sous l’ancien conseil scolaire, avant l’ajout d’un gymnase à l’édifice actuel par le Conseil des écoles catholiques du Centre-Est.)

Quand la réponse à la lettre est arrivée, l’enveloppe était adressée à l’école « Jolo Couroux ». En écrivant le nom de l’école, Madame Nathalie avait fait des points stylisés ressemblant à des petits cercles après chaque lettre de l’initiale « J.-L. ». La personne qui a répondu a dû tout simplement croire que Jolo Couroux était un de nos héros francophones.

On n’a pas cherché plus loin pour baptiser la mascotte.

Samantha, une élève de 6e, parle avec la directrice des concours de danse auxquels elle participe.

« J’apprends la danse depuis l’âge de deux ans, me raconte-t-elle. L’année prochaine, je vais faire partie du club de danse que va fonder Madame Jessica. »

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Elle parle de l’enseignante de maternelle qui m’a joué un tour, ce matin-là. Je suis déjà au courant qu’elle connaît la danse. Avant d’entrer dans sa voiture, elle m’a demandé si j’avais un lien de parenté avec une Valérie du même nom de famille.

« J’ai une fille qui se nomme Valérie… elle est médecin » lui ai-je répondu.

« Je la connais. Elle était mon professeure de danse quand j’avais 10 ans. C’était mon idole! »

Ça ne nous rajeunit pas. Ni moi ni ma fille. D’ailleurs, ce soir-là, Valérie n’en revient pas quand je lui apprends que la petite Jessica est devenue « Madame Jessica », enseignante de maternelle. Ma fille, dans la jeune trentaine, s’apitoie sur son grand âge.

Pour la consoler, j’ajoute : « Mais c’est sa première année comme enseignante… »

À l’entendre, cependant, c’est la première fois que la réalité de la vie me frappe aussi bêtement : les petits enfants que je rencontre aujourd’hui sont vraiment les profs, les médecins, les architectes et les écrivains de demain. Et demain, ce n’est pas tellement loin… Vu sous cet angle, on comprend l’importance de tout ce que l’on fait pour eux à l’école.

Joseph-Lucien Couroux est né à Hull, en 1899. Il déménageait à Carleton Place dès 1920 et allait y rester toute sa vie. Traducteur à la Fonderie Finlay, il a été le premier francophone à siéger au conseil scolaire des écoles séparées de Carleton Place.

L’école conserve une photo de lui, parue dans le journal local. Joseph-Lucien est vu en compagnie de son animal domestique préféré : un loup.

Rien à voir avec le choix de la mascotte, cependant. Et personne ne l’a jamais appelé Jolo…

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« Avant que j’accepte de venir, quelqu’un de l’école m’a dit : “Viens voir. Tu vas tomber en amour avec le paysage…” »

C’est vrai que c’est beau. Un paysage de carte postale. L’une des choses qui explique que Madame Jessica accepte de faire le trajet d’Orléans chaque matin. Mais pas qu’elle soit disposée à donner des heures de plus pour un club de danse après les heures de classe.

C’est peut-être cette énergie positive que l’on ressent entre les murs de ce hangar devenu une institution de savoir respectée.

Les gens savent qui ils sont, ici. Ils savent pourquoi ils sont là, tant le personnel et les parents que les élèves.

Il se perpétue à cette école une tradition de fierté, de conviction, de créativité et de joie, peu importe le temps qu’il fait.

Marie-Josée a laissé cette note sur la Vigne de la paix qui orne le corridor principal de l’école : « Mercià Mikayla, car elle joue avec moi. »

Une autre élève écrit : « Merci à Tieman,il est gentil avec tout le monde dans la classe. »

Une école où il fait bon vivre. Et vivre pleinement.

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Dans la même collection

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14 L’entraide dans l’appartenanceUne visite à l’École élémentaire catholique Des Pionniers

15 Au pays de JoloUne visite à l’École élémentaire catholique J.-L.-Couroux

Conception, mise en pages et impression : Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques, 2011.

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J’avais une petite idée de ce que je cherchais. Mais je ne savais vraiment pasce que j’allais trouver.

J’ai trouvé des écoles en effervescence.

J’ai trouvé des gens d’un dévouement total.

Mais j’ai surtout trouvé des élèves heureux.

Des élèves aux yeux brillants, gonflés d’espoir

en l’avenir et de confiance en eux.

Et j’ai compris.

J’ai compris que c’est possible. Qu’on ne rêve pas lorsqu’on dit que chaque élève peut réussir. Et, qu’aux yeux de mon ordinaire, j’avais peut-être la chance de voir en mouvement les meilleures écoles… au monde.

– Michel Gratton