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Marie-Thérèse de Mallmann VIII. Un aspect de Sarasvatï dans le tântrisme bouddhique In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 63, 1976. pp. 369-374. Citer ce document / Cite this document : de Mallmann Marie-Thérèse. VIII. Un aspect de Sarasvatï dans le tântrisme bouddhique. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 63, 1976. pp. 369-374. doi : 10.3406/befeo.1976.3892 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1976_num_63_1_3892

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Marie-Thérèse de Mallmann

VIII. Un aspect de Sarasvatï dans le tântrisme bouddhiqueIn: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 63, 1976. pp. 369-374.

Citer ce document / Cite this document :

de Mallmann Marie-Thérèse. VIII. Un aspect de Sarasvatï dans le tântrisme bouddhique. In: Bulletin de l'Ecole françaised'Extrême-Orient. Tome 63, 1976. pp. 369-374.

doi : 10.3406/befeo.1976.3892

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UN ASPECT DE SARASVATI

DANS LE TÂNTRISME BOUDDHIQUE

PAR Marie-Thérèse de MALLMANN

Le but de cette communication n'est pas de présenter une étude sur Sarasvatï : la déesse a déjà fait l'objet de travaux divers1 qui ont précisé son origine, son évolution, son iconographie. Je voudrais simplement attirer l'attention sur l'un des aspects qu'elle revêt dans le Tântrisme bouddhique, aspect qui semble avoir été négligé jusqu'à présent bien qu'il prouve la remarquable continuité de la tradition indienne.

Nous savons tous que Sarasvatï, déesse qui personnifie originellement une rivière sacrée, a très tôt été identifiée à Vâc2, la Parole, et singulièrement la Parole du Sacrifice, la « louange sacrale »3. Dans la mythologie post-védique, Sarasvatï devient la déesse de l'éloquence et de la sagesse ou du savoir4 ; à ce titre, elle est considérée comme l'épouse de Brahmâ, lui-même personnifiant le Sacrifice5. Sarasvatï est alors fréquemment désignée par les noms de Vagïsvari Souveraine de la Parole, Vâgadhi- devatâ Divinité suprême de la Parole, Vidyâdevï déesse du Savoir, etc.6, appellations qu'elle reçoit aussi bien dans l'Hindouisme que dans le Jinisme. Elle est en outre Lipidevï, la « déesse écriture », dont le « corps »

(1) Cf. entre autres N. K. Bhattasali, Iconography of Buddhist and Brahmanical Sculptures in the Dacca Museum, Dacca 1929, p. 181-186 ; P. K. Gode, « Hamsa- Váhaná and Mayura- Vâhanâ Sarasvatï », JISOA IX (1941, p. 133-140 ; L. Renou et collaborateurs, V Inde classique, I, Paris 1947-1949, § 653 p. 328 et § 1112 p. 540 ; A. Lommel, « Anahita-Sarasvatï », Asiatica (Festschrift Friedrich Weller), Leipzig 1954, p. 405-413 ; J. N. Banerjea, The Development of Hindu Iconography, 2e édition, Calcutta 1956, p. 376-380, et aussi p. 496 sur Mahasarasvatï ; M. T. de Mallmann, Les enseignements iconographiques de V Agnipurâna, Paris 1963, p. 189- 195 et n. , etc.

(2) A. A. Macdonell, Vedic Mythology, Strasbourg 1897, p. 87 et 124 : réf. à la Vâjasaneyi S. XIX. 12, au Šalapatha Br. III.9.17, à VAitareya Br. III.l.

(3) Renou, op. cit., § 653. (4) Macdonell, op. cit., p. 87. (5) Renou, op. cit., I, § 1025-1026 p. 499-500 ; Banerjea, op. cit., p. 510-519. (6) Réf. dans Mallmann, op. cit., p. 191 et n.

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370 MARIE-THÉRÈSE DE MALLMANN

se compose des « cinquante lettres »1. Toutes ces notions sont symbolisées par les attributs qu'elle porte dans ses deux ou ses quatre mains : la vïnà, instrument de musique à cordes qui accompagne le chant rituel ; le livre (pustaka) qui contient les formules du Sacrifice ; le rosaire ou guirlande de grains (aksamálá) correspondant aux « cinquante lettres »2. A ces objets s'ajoutent parfois la fleur de lotus (padma ; peut-être un rappel de l'origine fluviale?)3 ou l'aiguière (kamandalu) qui est un attribut de Brahmâ4. De plus, la monture ou le véhicule (váhaná) de Sarasvatï est tantôt le lion symbole de la voix et de la prédication5 ; l'anser (hamsa), oiseau aquatique et monture de Brahmâ6 ; le bélier, animal sacrificiel7 ; mais aussi, plus tardivement, lemakara8 ou le paon9. La couleur de Sarasvatï est généralement le blanc10; elle n'a qu'une seule face, et deux ou quatre mains.

Dans les textes descriptifs du Tântrisme bouddhique, la déesse revêt des formes et des couleurs diverses11. Toutefois, les aspects blancs paraissent être les plus nombreux ; l'on retrouve en ceux-ci les caractéristiques principales de son iconographie traditionnelle12, bien que l'une de ces formes blanches soit à peu près pareille à l'une de celles de Prajnâpâramitâ13, la Sagesse parfaite, déesse personnifiant l'ouvrage de ce nom et dont elle porte un exemplaire.

(1) Ibid., p. 190-191. (2) Cf. le tableau comparatif in Bhattasali, op. cit., p. 189. (3) Renou, op. cit., § 653 ; Macdonell, op. cit., p. 87. Les deux autres déesses fluviales,

Gangâ et Yamunâ, portent des lotus : réf. textuelles in Mallmann, op. cit., p. 202-203. (4) Banerjea, op. cit., p. 377. (5) Pour des images de Sarasvatï sur un lion : A. Foucher, L'art gréco-bouddhique du

Gandhâra, H/1, Paris 1918, fig. 340 p. 71 ; cf. aussi Dr Ernst Hauswedell (Hambourg), Catalogue Aukiion 156, 20 novembre 1967, n° 276 (reproduit). Sur le lion et son « rugissement » : A. Foucher, Étude sur Viconographie bouddhique de VInde, II, Paris 1905, p. 31.

(6) Réf. in Mallmann, op. cit., p. 230-231. Cf. Bhattasali, op. cit , pi LXIII (7) Réf. in Mallmann, op. cit., p. 229. Cf. R. C. Majumdar, History of Bengal, I, Dacca

1943, pi. LXXII fig. 175. (8) Cf. p. ex. : a) pour l'Inde méridionale, les sculptures en bois du Musée Guimet,

n° MG 502, 2463, 2601, 14005 ; b) pour le Nepal, Encyclopaedia Universalis 11, Paris 1971, s.v. « Népal », pi. I en bas.

(9) Gode, op. cit. (10) Banerjea, op. cit., p. 377. Mallmann, op. cit., p. 193. (11) En tant que Yaksinï dans les Mandala de Jambhala, elle est jaune : Sadhanamâlâ

(abrév. SM), éd. B. T. Bhattacharyya, Gaekwad's Oriental Series, Baroda, vol. XXVI (1925) et XLI (1928), n° 284 (p. 560-561), 285 (p. 562-563) et 289 (p. 566-568). Dans le Mandala de Bhutadâmara, elle serait verte : Nispannayogâvalï (abrév. NSP), éd. B. T. Bhattacharya, Gaekwad's Oriental Series, Baroda, vol. CIX (1949), p. 72-74; la description de la déesse p. 73, n'indique pas de couleur, le mot éyâmâ ne figurant que dans la version manuscrite du texte, cote « Sanscrit 64 » de la Bibliothèque Nationale, f° 53 a. Selon le Mandala du Durgatiparišodhana {NSP, p. 70), et les Sâdhana SM 162 (p. 329-330), 164 (p. 331-334), 165 (p. 335-336), 166 (p. 337) et 168 (p. 340), elle est blanche. D'après le Mandala de Yamâri {NSP, p. 36), et les Sâdhana SM 161 (p. 326-328), 163 (p. 330-331) et 167 (p. 338-339), elle est rouge. Cf. infra.

(12) Dans les Mandala du Durgatiparišodhana et de Bhutadâmara, elle porte la vïnâ, ainsi que dans SM 165. En SM 162, elle tient un lotus.

(13) Elle est appelée Vajrasarasvatï (ne pas la confondre avec son homonyme rouge), Âryasarasvatî {SM 164), Vajraaàradà {SM 166), Prajnâpâramitâ {SM 168). Cf. les descriptions de Prajùàpàramitâ dans SM 151 (p. 310-311) et 155 (p. 315-317).

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UN ASPECT DE SARASVATÏ DANS LE TANTRISME BOUDDHIQUE 371

D'après la Sâdhanamâlâ, il existe cependant un aspect bouddhique de Sarasvatï où elle est douée de trois faces et de six mains. On l'appelle toujours Vajrasarasvatï. Elle est de couleur rouge, avec les faces latérales noire ou bleue, et blanche1. Ses mains originelles portent à droite le couperet (kartri), à gauche le bol (patra) ou la coupe faite d'une calotte crânienne (kapala)2. Les autres mains droites tiennent le lotus et l'épée ; les gauches, le joyau et la roue. Selon deux des trois Sâdhana qui la décrivent, cette forme serait celle de Vajrasarasvatï d'après le Tantra du Yamâri noir3.

Si l'on passe des descriptions de Sarasvatï dans la Sâdhanamâlâ à celle du Mandala de Yamâra noir dans la Nispannayogâvalï*, l'on trouve une simple mention de Vajrasarasvatï, placée au N.O., et « pareille à Râgakâlâri »5. Or Râgakâlâri et Râgayamâri sont deux surnoms d'Amitâbha, le Tathâgata occidental, sous l'aspect farouche qu'il revêt dans ce Mandala — au même titre que Mohayamâri, Dvesakâlâri et îrsyâyamâri désignent respectivement Vairocana, Aksobhya et Amogha- siddhi6. Selon la description d'Amitâbha/Râgakâlâri7 qui lui sert de modèle, Vajrasarasvatï doit donc avoir trois faces et six mains, et être de couleur rouge ; les faces latérales sont noire à droite, blanche à gauche ; les mains originelles portent le couperet et la calotte crânienne, tout en enlaçant le partenaire masculin ou Upâya8 ; les mains secondaires tiennent à droite le lotus et l'épée ; à gauche, le joyau et la roue. L'attitude fendue vers la droite est celle de l'escrimeur (pratyâlïdha9).

L'aspect emprunté à Amitâbha/Râgakâlâri, et la place occupée par Vajrasarasvatï au N.O. du Mandala, font d'elle un substitut de Pândarâ (ou Pândaravâsinï), la Svâbhaprajnâ ou « déesse-réplique » habituelle du Tathâgata occidental. Ceci est confirmé par le premier

(1) SM 161 et 163 : face de droite bleue ou noire, face de gauche blanche ; SM 167, face de droite blanche, face de gauche noire.

(2) SM 161 : patra ; SM 163 : kapala ; SM 167 : brahmakapâla. Si l'on ne considère pas le brahmakapâla comme la tête coupée du dieu Brahmâ, mais comme une coupe crânienne, cette coupe et le bol sont, iconographiquement, très semblables.

(3) Colophon de SM 167 : « krsnayamâritantroddhrtavajrasarasvatïsâdhanam ». Cf. SM 161 : « arïmatkrsnayamàritantranihità ».

(4) Édition, p. 36-37. (5) « vâyavye vajrasarasvatï râgakàlârir iva ». (6) Sur les associations des divers Buddha avec la Stupidité (moha), l'Animosité (dvesa),

la Lubricité (ràga), l'Envie (ïrsyd) et la Malveillance (paiéunga), cf. réf. in D. L. Snell- Grove, Buddhist Himalaya (Londres 1957), p. 64-67 et 74-75 ; et The Hevajra Tantra (Londres 1959), I, p. 129 tableau VIII. Dans le Mandala de Yamâri, les Buddha sont assimilés à des aspects de Yamâri ou Kâlâri, l'« ennemi de la mort » ; les Prajnà empruntent leurs noms à l'Hindouisme : Vajra-Carcikâ, Vajra-Vârâhï (ne pas la confondre avec son homonyme, la partenaire de Hevajra et de Sambara), Vajra-Sarasvatï, Gauri.

(7) Ed. p. 36 : « pascime'mitâbho raktah raktakrsnasitatrimukhah savyâbhyâm padmâsï vâmâbhyâm manicakre bibhrânah ». Il ne s'agit que des mains secondaires, la description des mains originelles, commune aux quatre Tathâgata, est donnée quelques lignes plus loin : « kartrikarotabhrtpradhânasavyetarapânibhyâm âlingitasvâbhavarnâbhâh » (sur ce dernier composé, cf. Г errata en fin de volume).

(8) E . p. 36 : « vajracarccikâdyâh sasvabhopàyâh ». (9) Sur cette attitude : Foucher, Étude sur Viconographie bouddhique de VInde, II, p. 38.

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Mandala de la Nispannayogâvalï1, celui de Maňjuvajra : Pândarâ, qui est au N.O., doit être « pareille à Amitâbha »2 et, selon sa description, celui-ci a trois faces et six mains ; il est rouge, avec les faces latérales noire à droite et blanche à gauche ; les bras originels enlacent la Prajuâ3 ; les deux autres mains droites tiennent le lotus et l'épée ; les gauches, le joyau et la roue. L'on observe deux légères différences entre les descriptions d'Amitâbha et de « Râgakâlâri » (et donc, de Pândarâ et de Vajrasarasvatï) : alors que, dans le Mandala de Maňjuvajra, les divinités sont assises dans l'attitude aux jambes étroitement croisées (vajra- paryaňka) et ne portent pas d'attributs dans leurs mains originelles4, les personnages du Mandala de Yamâri sont debout et fendus vers la droite, et portent dans leurs mains originelles le couperet et la calotte crânienne. Ces différences proviennent simplement du caractère paisible des divinités dans le Mandala de Maňjuvajra, et de leur caractère farouche dans le Mandala de Yamâri5.

Quoi qu'il en soit, l'assimilation — ou plutôt l'identification — de Vajrasarasvatï à Pândarâ s'intègre exactement à la logique de la tradition indienne : l'on se rappelle qu'Amitâbha, « modèle » des deux déesses, est — pour tout le Tântrisme bouddhique — la personnification du Verbe ou de l'Oral. Appelé Vâk ou Vâgvajra dans la Sâdhanamâlâ6, Vâgîsa dans la Nispannayogâvalï1 et dans la Yogaratnamâld6, il est le Maître du Vâkcakra, Cercle de la Parole, dans les Mandala de Sambara et de Vajravârâhï9 ; et dans le Mandala que le Yogin suscite en son propre corps, la localisation d'Amitâbha est toujours la bouche, la gorge, ou la langue10. Plutôt qu'au Bodhisattva Manjusrî11, c'est donc à Amitâbha/ Vâgîsa que la déesse Sarasvatî — identifiée à Vâc, Vâgîsï, Vâgïsvarî —

(1) Traduction et transcription dans M. T. de Mallmann, Étude iconographique sur Manjuérî, Paris 1964, p. 69-74, 216-220.

(2) Ed. p. 3 : « vâyavyâm pândarâ amitâbhasamà ». (3) Ibid. : « paacimâyâm amitâbho rakta (lire : raktah) padmâsimanicakradharah...

krsnasitasavyetaravaktrah ». Comme le Maňjuvajra central, les Tathâgata possèdent six bras ; de leur paire de mains originelles, ils font le même geste que le Souverain du Mandala : « pradhânabhujâbhyâm svâbhaprajnàlingitâh » (p. 3) ; les déesses sont « svâbham upàyam (â'ingitâh) ».

(4) Pour la mention de l'attitude, cf. Édition, p. 3. (5) Concernant leur aspect général, les quatre Tathâgata sont pareils au Yamâri central

(qui se tient fendu vers la droite). Édition, p. 36 : « catvaro'pi cakrešalaksanaih krodhâh ». (6) Cf. Mallmann, Étude iconographique..., p. 38-40 ; aussi ibid., p. 202-203 et 205, les

transcriptions des deux Vâksâdhana (SM 66 et 68). (7) Cf. le Mandala de Mahâmâyâ (Édition, p. 22) : šašvatáksobhyaratneáaixigi&žmogha-

siddhayah ». Cf. aussi SM 239 (p. 462). (8) Snellgrove, The Hevajra Tanlra, I, p. 61 n. 2 ; II, p. 117, lignes 27 à 33. (9) Mandala de Sambara (NSP p. 26-29, cf. p. 28) : « kulešas tu ....cittauâftkàyagatânâm

aksobhyâmiiâb/maàsvatàh ». Mandala de Vajravârâhï (SM 218 p. 426-431, cf. p. 427) : « citta- cakrâstâbhih... uâ/rCGfArâstâbhih... kâyacakrâstabhih (devïbhih) nïlara/cfasitavarnâbhih akso- bhyâmiiâb/iavairocanasirodharâbhih arghâdipurahsaram pujayitvâ...

(10) Snellgrove, op. cit., I, p. 28.; Mallmann, Étude iconographique..., p. 39 et n. 7. (11) Cf. p. ex. Foucher, Élude sur Viconographie bouddhique de VInde, II, p. 48 et 89,

et n.

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UN ASPECT DE SARASVATÏ DANS LE TÂNTRISME BOUDDHIQUE 373

a été parfois attribuée comme épouse1. Peut-être est-ce là aussi qu'il faut chercher l'origine de certaines images où Sarasvatï est figurée chevauchant un paon (mayura), véhicule habituel d'Amitâbha2?

N.B. Trois représentations de Vajrasarasvatï ont été publiées. Pour l'ensemble, elles illustrent les descriptions de SM, la déesse étant figurée hors d'un Mandala, et sans partenaire.

1° Raghu Vira et Lokesh Chandra, Л New Tibeto-Mongol Pantheon, vol. 9 (New Delhi 1964), pi. 149 a (texte p. xxn), s.v. « Sarasvatï » : elle est en pratyëlïdha (fendue vers la droite).

2° W. E. Clark, Two Lamaisiic Pantheons ( Harvard -Yenching 1937), vol. II, p. 288, n° 253, s.v. « Sadbhuj a- Vajrasarasvatï » : elle est assise en vámárdhaparyaňka (jambe droite repliée, gauche pendante), et la roue est pourvue d'un long manche.

3° Ibid., vol. II, p. 203, n° 6 A 51, s.v. « Rakta-Sarasvatï (fo-mu) » : elle est assise en sattvaparyaňka (jambes repliées sans être croisées), et la roue est pourvue d'un manche.

(1) L'on se souvient aussi que Sarasvatï personnifie la Sagesse ou le Savoir, et que Pàndarâ fait partie des déesses qualifiées de Prajnâ, Sagesse ou Connaissance.

(2) Gode, op. cit.

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374 MARIE-THERESE DE MALLMANN

Tableau comparatif

Mandala de Manjuvajra (NSP 1)

Amitâbha

Ouest rouge

trois faces : rouge (centre) bleue (droite) blanche (g.) six mains i1 épée joyau2 lotus roue

Prajnâ

vajraparyaňka

Pândarâ

Nord-Ouest

pareille à Amitâbha

(Upâya)

Mandala de Yamâri (NSP 15)

Râgakâlàri (Amitâbha)

Ouest rouge

trois faces : rouge (centre) noire (droite) blanche (g.) six mains :

épée joyau lotus roue couperet crâne

et Prajnâ pratyâlïdha

Vajrasarasvatï

Nord-Ouest

pareille à Râgakâlâri

(et Upâya)3

(1) Sur ce tableau, les attributs des mains sont disposés comme si le personnage faisait face au spectateur, et sont donc inversés par rapport aux descriptions.

(2) Les objets portés par les mains secondaires sont énumérés dans le sens dit pradak- sinam : m. dr. inférieure, m. dr. supérieure, m. g. supérieure, m. g. inférieure.

(3) A l'exception de l'Upâya, qui n'y est pas mentionné, les descriptions de SM confirment exactement l'aspect de Vajrasarasvatï « pareille à Râgakâlâri » ; SM 161 : « tasmàd raktamahâdyutim bhagavatïm sadbhusanàlankrtàm pratyàlïdhapadasthitâm trivadanàm sadbâhubhir bhusitâm // savye nïlamukhàm bibhartti ca kare padmâsikartrïmaca vai vâme auklamukhâm sadratnacakram tathâ / ». SM 163 : « bhagavatïm vajrasarasvatïm trimukhàm sadbhujàm trinayanâm nilasitadaksinavàmamukhïm padmakhadgakartridharadaksinakaràm kapâlaratnacakradhârivàmakaràm pratyàlïdhapadâm... ». SM 167 : « trimukhàm sadbhujâm devîm nânâlankârabhûsitâm pingorddhvakeaïm pratyâlïdhapadena raktacandroparisthitâm vibhâvayet / tasyâh prathamam mukham raktam daksinam áuklam vâmam krsnam pratha- madaksinabhuje kamalam prajnâpâramitâpustakânkitam dvitïye asim trtïye kartrïm prathamavâmabhuje sitacakram astâram dvitïye navâmsaratnam trtiye brahmakapâlam... ». L'on observe, dans ce dernier Sâdhana : a) que les couleurs des faces latérales sont interverties ; b) que le lotus supporte le livre de la Prajnàpâramitâ, ce qui rappelle à la fois le livre attribué à Sarasvatï dans l'iconographie hindoue {supra, p. 1) et la confusion éventuelle de Sarasvatï avec la déesse Prajnâpâramitâ (supra, p. 2 et n. 19) ; c) que l'épée, la roue blanche à huit rayons et le joyau à neuf facettes, sont respectivement les attributs d'Amoghasiddhi, Vairocana et Ratnasambhava.