Article flow décembre 2015

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La logistique urbaine s'intéresse à la circulation des marchandises et biens dans le cceur des agglomérations : leur acheminement, leurtraitement, leur distribution aux entreprises, institutions et particuliers, ainsi que la gestion des flux retours (produits renvoyés, à recycler et déchets). Le transport de marchandise en ville peut être effectué par des professionnels pour compte d'autrui (45o/o), ou en compte propre (55 %). Outre les entreprises et commerces acheminant leurs propres biens, cette dernière catégorie inclut également les déplacements d'achats des particuliers. En moyenne, chaque emploi dans une aggloméraiion urbaine française génère une livraison ou un enlèvement par semaine. Les envois de marchandise ayant tendance à se fractionner, le nombre de mouvements* pour une même quantité de marchandises augmente. Le e-commerce accentue ce processus même s'il évite certains déplacements de particuliers. Bien que plus vertueux, économique et proportionnellement moins important que le transport en compte propre*, le transport professionnel sur le dernier maillon de la chaîne logistique est le plus visible aux yeux des consommateurs et le plus coûteux pour les chargeurs : environ 20% du coût du transport pour 1% de la distance parcourue. En effet, I'espace urbain, qui rassemble une grande partie de la consommation, est celui la circulation des marchandises est la plus difficile et complexe. Activité privée se déroulant en grande partie sur l'espace public, la logistique urbaine implique un grand nombre de parties prenantes (institutions, professionnels, citoyens... ). Si elle engendre des externalités négatives telles que la pollution, le bruit, la congestion, elle est indispensable au bon fonctionnement économique. social, et culturel de la ville. Optimiser la circulation des flux de produits en zone dense est donc nécessaire et passe par un changement des comportements, une meilleure coordination des acteurs privés et publics et l'émergence de nouveaux modes d'organisation anticipant les évolutions sociétales. GLOSSAIRE I Big Data : Iittéralement « grosses données », ou mégadonnées. Terme désignant des ensembles de données que l'on qualifie souvent de « volumineux, véloce » qui peuvent être rassemblées grâce aux nouveaux outils numériques. Dépassant les capacités de traitement des outils classiques de gestion de base de données ou de gestion de I'information, le Big Data s'accompagne du développement d'applications à visée analytique, qui les traitent pour en tirer du sens (prédictibilité notamment). a gzG, B.2B, C2C: vente ou distribution de I'entreprise au consommateur (business to consummer, B2C) de l'entreprise à une autre entreprise (business to business, B2B) du consommateur au consommateur (consumer to consumer, c2c). I Canal (multicanal, omnicanal) lnterface par lequel un client réalise son achat. On peut différencier achat en magasin, achat à distance via appel téléphonique ou commande papier, et achat sur internet, via une connexion par un ordinateur ou des objets mobiles (m-commerce, smartphone, tablettes, lunettes etc.). § C«lmpte propre : le transport en compte propre est réalisé par des particuliers ou des entreprises, dont le transport n'est pas le cceur de métier, pour déplacer leur marchandise avec leurs propres moyens. Sauf dans le cas d'entreprises traitant des flux impodants (par exemple certaines entreprises de grande distribution), celui-ci est généralement sous-opiimisé. § Msuvesæent {de marehandisc} : pour traiter des données quantitatives en logistique urbaine, on parle de mouvement pour désigner une livraison ou un enlèvement. x Prinô,pe du 8Ol2§ : parfois appelé principe de Pareto en matière de gestion des ventes. Appliqué à la gestion des ventes, il implique que B0% des ventes sont réalisées grâce à 20o/o des références présentées- § Remanufaet*rimg : reconstruction d'un produit à l'état du neuf en utilisant une combinaison de composants réutilisés, réparés, ou neufs. Qu'est-ce que la Iogistique urbaine ? Ƨ , ,ræ a!

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La logistique urbaine s'intéresse à la circulation des marchandises et biens dans le cceur des agglomérations : leuracheminement, leurtraitement, leur distribution aux entreprises, institutions et particuliers, ainsi que la gestion des flux retours(produits renvoyés, à recycler et déchets).

Le transport de marchandise enville peut être effectué par desprofessionnels pour compte d'autrui(45o/o), ou en compte propre (55 %).Outre les entreprises et commercesacheminant leurs propres biens, cettedernière catégorie inclut égalementles déplacements d'achats desparticuliers.

En moyenne, chaque emploidans une aggloméraiion urbainefrançaise génère une livraisonou un enlèvement par semaine.Les envois de marchandise ayanttendance à se fractionner, le nombrede mouvements* pour une mêmequantité de marchandises augmente.

Le e-commerce accentue ceprocessus même s'il évite certainsdéplacements de particuliers.

Bien que plus vertueux, économiqueet proportionnellement moinsimportant que le transport en comptepropre*, le transport professionnelsur le dernier maillon de la chaînelogistique est le plus visible aux yeuxdes consommateurs et le plus coûteuxpour les chargeurs : environ 20%du coût du transport pour 1% de ladistance parcourue. En effet, I'espaceurbain, qui rassemble une grandepartie de la consommation, est celuioù la circulation des marchandises estla plus difficile et complexe.

Activité privée se déroulant en grandepartie sur l'espace public, la logistiqueurbaine implique un grand nombrede parties prenantes (institutions,professionnels, citoyens... ). Si elleengendre des externalités négativestelles que la pollution, le bruit, lacongestion, elle est indispensableau bon fonctionnement économique.social, et culturel de la ville.Optimiser la circulation des fluxde produits en zone dense estdonc nécessaire et passe par unchangement des comportements, unemeilleure coordination des acteursprivés et publics et l'émergence denouveaux modes d'organisationanticipant les évolutions sociétales.

GLOSSAIRE

I Big Data : Iittéralement « grosses données », oumégadonnées. Terme désignant des ensembles de données quel'on qualifie souvent de « volumineux, véloce » qui peuvent êtrerassemblées grâce aux nouveaux outils numériques. Dépassantles capacités de traitement des outils classiques de gestion debase de données ou de gestion de I'information, le Big Datas'accompagne du développement d'applications à viséeanalytique, qui les traitent pour en tirer du sens (prédictibiliténotamment).

a gzG, B.2B, C2C: vente ou distribution de I'entreprise auconsommateur (business to consummer, B2C) de l'entreprise àune autre entreprise (business to business, B2B) duconsommateur au consommateur (consumer to consumer,c2c).

I Canal (multicanal, omnicanal) lnterface par lequel un clientréalise son achat. On peut différencier achat en magasin, achatà distance via appel téléphonique ou commande papier, et achatsur internet, via une connexion par un ordinateur ou des objetsmobiles (m-commerce, smartphone, tablettes, lunettes etc.).

§ C«lmpte propre : le transport en compte propre est réalisépar des particuliers ou des entreprises, dont le transport n'estpas le cceur de métier, pour déplacer leur marchandise avecleurs propres moyens. Sauf dans le cas d'entreprises traitantdes flux impodants (par exemple certaines entreprises degrande distribution), celui-ci est généralement sous-opiimisé.

§ Msuvesæent {de marehandisc} : pour traiter desdonnées quantitatives en logistique urbaine, on parle demouvement pour désigner une livraison ou un enlèvement.

x Prinô,pe du 8Ol2§ : parfois appelé principe de Pareto enmatière de gestion des ventes. Appliqué à la gestion des ventes,il implique que B0% des ventes sont réalisées grâce à 20o/o desréférences présentées-

§ Remanufaet*rimg : reconstruction d'un produit à l'état duneuf en utilisant une combinaison de composants réutilisés,réparés, ou neufs.

Qu'est-ce que la Iogistique urbaine ?

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I

La logistique urbaine existe depuis... qu'il y a des villes ! Jérôme Libeskind revient pour nous en quelques dates sur son Histoire enFrance, développée dans son ouvrage « Logistique urbaine, les nouveaux modes de consommation et de livraison ».L'occasion de découvrir et redécouvrir certaines pratiques qui, délaissées hier, sont maintenant présentées comme les solutionsde demain.

LE MOYEN-ÂCE: L',ÉPOQUE DUDEVELOPPEMENT DES VILLES AUTOUR DESFLEUVES

Au Moyen-Âge, les réseaux existants de routes sont peusécurisés et le moyen privilégié pour la distribution desmarchandises est le mode fluvial. D'ailleurs, les villes ontsouvent été fondées au bord d'un fleuve, afin de faciliter leurapprovisionnement. Logistique et approvisionnement de lapopulation sont étroitement liés et sont structurés autour desmarchés et foires. Ces évènements caractérisent l'activitécommerciale des cités.

Le premier réseau de messagerie est celui de la MessagerieRoyale, fondée par Louis Xl en 1479. 1 4 lignes de messagerieont progressivement été développées, avec 250 haltes, lesrelais, positionnées fous les 28 kilomètres.

LE XVII" SIÈCLE : L'INVENTION DES CANAUX

Les premiers canaux français datent du milieu du XVll" siècleet ont pour objectif de relier entre eux les bassins de la Loireet de Ia Seine. ll s'agit donc d'améliorer les réseauxd'approvisionnement de la capitale en structurant sonhinterland. C'est aussi l'époque de la construction du canal duMidi, qui relie Toulouse à Béziers puis à Sète. La secondemoitié du XVll" siècle est également marquée par l'améliorationdes routes reliant des bassins fluviaux entre eux. C'est parexemple le cas de la route Lyon-Roanne.

Les débafs sur ies priorités d'investissement dans lesinfrastructures, que nous connarssons de nos jours, existaientdéjà à cette époque. Les écrlfs de Colbert montrent quel'arbitrage profitait alors souvent aux canaux. En 1681 , ilconseillait de ne pas dépenser inutilement de I'argent àaméliorer Ia route menant à la capitale, « parce que, à l'égarddes vrns, blés, et autres denrées et marchandises qui viennentà Paris, elles viennent par eau ».

LEXVIII"SIÈCIE : LES PREMIERS ENTREPÔTSMULTIMODAUX

Comme aujourd'hui, les flux de marchandises à l'intérieur desgrandes villes françaises sont déséquilibrés, les villes étant

avant tout des pôles de consommation. Comme les citésconnaissent souvent des disettes, le rôle régulateur desentrepôts apparaît à la fin du siècle. Stocker des denrées àproximité des zones de consommation permet en effet demieux faire face aux situations d'urgence.

A la fin du XVlll" siècle, I'approvisionnement de Paris esteffectué à part égale par le mode fluvial et la route.

LE DÉBUT DU x|x" SIÈCLE : L,ÉMERGENCED'UN TROISIÈME MODE DE TRANSPORT LECHEMIN DE FER

Le développement du réseau de canaux s'est intensifié àI'initiative de Napoléon lu'. Nous lui devons aussi l'idée demodernisation des halles, qui sera mise en æuvre bien plustard. C'est en effet au début du XIXème siècle que sont mis enévidence les problèmes d'hygiène, de qualité d'approvision-nement des villes et la nécessité de transformer leséquipements existants : halles, entrepôts, infrastructures.Le chemin de fer est créé pour l'acheminement demarchandises avant d'être imaginé comme un nouveaumoyen de mobilité des personnes. ll apparaît comme unealternative intéressante au mode fluvial.

Sous I'Empire est décidée la création d'entrepôts pour lesvins et les huiles à Paris, quai Saint-Bernard, et d'un entrepôtpour le se/ sur le boulevard Saint-Antoine (aujourd'huiboulevard Beaumarchais). La première pierre de la halle auxvrns esl posée le 15 août 1811. Nous assislons déjà à lacréation de plates-formes multimodales...

LA SECONDE MOMÉ DU XtX" SIÈCTT :

LA TRANSFORMATION DES VILLESET DE LA CONSOMMATION

A partir du '1850, tout évolue. Les villes se peuplent rapidementet s'industrialisent. La nécessité de modernisation s'accentue.La consommation se développe avec l'apparition desmagasins de nouveautés, puis des grands magasins.Le développement du mode ferroviaire permet de modifierprofondément l'origine des produits consommés et leurdiversité. Plus que jamais, consommation et logistique suiventdes évolutions parallèles.

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L'histoire de la logistiqueurbaine en 10 dates

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La construction des Halles de Paris est confiée à VictorBaltard. Mais lors du concours d'architecture de 1845, il fautnoter qu'un autre projet parliculièrement innovant est présentépar Hector Horeau. Ce projet consiste en un bâtiment uniquede 63 000 m'(420 m de long et 150 m de profondeur), situéau droit du quai de la Mégisserie. Ce projet bénéficie d'unaccès trimodal et la plate-forme XXL est inventée.

LE TOURNANT DU SIÈCLE : L'INVENTION DELA SOCIÉTÉ OE COUSOMMATION

Le développement très rapide des grands magasins crée unbesoin de consommation et aussi de livraisons à domicile.Les réseaux de transport se modernisent. C'est à cetteépoque qu'apparaît l'utilisation du tramway pour lesmarchandises, avec la création en 1893 de l'Arpajonnais,tramfret de 37 kilomètres de long.

Les grands magasins ont dans /eurs sous-so/s des espacesréservés à la gestion des rendus. ll s'agit de produits achetéset retoumés par les c/ênfs. Ces rendus font I'objet d'unprocess précis de remise en rayon. L'e-commerce n'a pasinventé les retours : ils existaient déià à la fin de XlX siècle.

1.920 L'ÉPOQUE DE LA MOBILffÉELECTRIQUE

Les premiers véhicules électriques datent de la fin du XlX"siècle. Mais c'est dans les années '1920 que cette technologiecommence à se développer. Renault construit ainsi unvéhicule de livraison électrique à cette période.

En 1926, un véhicule électrique Peugeot parvient à effectuer192 kilomètres à une vlfesse moyenne de 23 km/h. Un siècleplus tard, nous constatons que la peiormance en termesd'autonomie des véhicules électiques semble avoir peuprogressé !

LES ANNÉES 1950.1960 : LEDÉVELOPPEMENT DU MODE ROUTIER

Le programme autoroutier date de l'entre-deux guerres maisn'est mis en ceuvre qu'à partir des années 1950. La routeprend progressivement la part de marché dominante quenous lui connaissons, au détriment du mode ferroviaire. C'està cette époque que les grandes gares routières sontimaginées, avec l'objectif de rationaliser la distribution desmarchandises dans les villes.

En 1956, la chaîne de magasins La Laiterie parisiennepossêde prês de 100 véhicules poidsJourds pour la livraisondu lait, ainsi que des fourgons lôlés et des fourgonnettes 2CVpour les autres produits. La livraison du lait est effectuée lanuit : ce mode de livraison est aujourd'hui considéré commeune des solutions pour désengorger les villes la journée.

LESANNÉES 1980

Le développement rapide des zones périurbaines, l'étalementurbain, l'émergence des grandes zones et centres com-merciaux favorisent la modification de la nature même desvilles. En terme d'implantation, les activités de distributionurbaine reculent au rythme de 300 m par an, par rapport aucæur urbain, ce qui participe à I'augmentation sensible desexternalités négatives.

En 1984, La Redoute invente le « 48h Chrono ». Le délaigaranti devient déjà à cette époque un argument commercial.

LES ANNÉES 2O1O

Les années actuelles seront peut-être marquées par la prisede conscience collective de l'importance de la logistiqueurbaine, et de l'impact de la consommation, en particulier due-commerce sur les modes de livraisons.

Consommation et logistique urbaine sont plus que jamaiscontraintes d'évoluer de façon coordonnée.

201 5 : cette année est celle de l'émergence du crowdshippingqui permet à tout particulier d'effectuer des opérations delivraison. C'est aassl /'an née de la première consigne Amazonen France.

LogistiqueUrbaine

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Merci à Jérôme Libeskind d'avoir accepté de nous dresser cesynopsis.

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