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LIBYE Après quarante-deux ans de dictature, la mort de Mouammar Kadhaouvre la voie aux ambitions de tout bord et à une possible guerre de succession Le mensuel du monde arabe et de la francophonie Belgique 4.46 - Luxembourg 4.74 - Suisse 8 FS - Grèce 4.11 - Antilles 6.86 - Réunion 6.86 - Canada 7.95 $ C - USA 5.90 $US - Maroc 25 DH Tunisie 2.5 DT - Liban 5 000 L - Arabie Saoudite 25 SR - E.A.U 25 DH - Koweït 2.75 DK - Côte-d’Ivoire 2 000 CFA - Sénégal 2 000 CFA - Mali 2 000 CFA Gabon 2 000 CFA - Guinée 6.86 - Afrique zone CFA 2 000 CFA - Comores 2 000 CFA - Djibouti 5.19 - Allemagne 6.20 - Italie 5.17 - Algérie 120 DA Nouvelle donne Monde arabe ALGÉRIE Syndicats et salariés sont les grands perdants d’une tripartite qui a privilégié les entreprises MAROC À l’aube des législatives, le prochain budget de l’État n’est toujours pas xé. Polémiques… Élections brûlantes en Tunisie et en Égypte, succession chaotique de Kadhafi en Libye, relève des troupes américaines en Irak, ambitions démesurées du Qatar… L’avenir se joue aujourd’hui LIBYE Après quarante-deux ans de dictature, la mort de Mouammar Kadhaouvre la voie aux ambitions de tout bord et à une possible guerre de succession 3:HIKNNB=^UYZUV:?k@m@j@f@a; M 03319 - 295 - F: 4,50 E INTERVIEW EXCLUSIVE Ministre des Affaires étrangères et européennes, Alain Juppé revient sur le retour en force de la diplomatie française dans un monde arabe en pleine mutation Élections brûlantes en Tunisie et en Égypte, succession chaotique de Kadhafi en Libye, relève des troupes américaines en Irak, ambitions démesurées du Qatar… L’avenir se joue aujourd’hui INTERVIEW EXCLUSIVE Ministre des Affaires étrangères et européennes, Alain Juppé revient sur le retour en force de la diplomatie française dans un monde arabe en pleine mutation

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LIBYE Après quarante-deux ans de dictature, la mort de

Mouammar Kadhafi ouvre la voie aux ambitions de tout bord et à une possible guerre de successionLe mensuel du monde arabe et de la francophonieN

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Belgique 4.46 - Luxembourg 4.74 - Suisse 8 FS - Grèce 4.11 - Antilles 6.86 - Réunion 6.86 - Canada 7.95 $ C - USA 5.90 $US - Maroc 25 DH

Tunisie 2.5 DT - Liban 5 000 L - Arabie Saoudite 25 SR - E.A.U 25 DH - Koweït 2.75 DK - Côte-d’Ivoire 2 000 CFA - Sénégal 2 000 CFA - Mali 2 000 CFA

Gabon 2 000 CFA - Guinée 6.86 - Afrique zone CFA 2 000 CFA - Comores 2 000 CFA - Djibouti 5.19 - Allemagne 6.20 - Italie 5.17 - Algérie 120 DA

Nouvelle donneMonde arabe

ALGÉRIESyndicats et salariés sont les grands perdants d’une tripartite qui a privilégié les entreprises

MAROCÀ l’aube des législatives, le prochain budget de l’État n’est toujours pas fixé. Polémiques…

Élections brûlantes en Tunisie et en Égypte, succession chaotique de Kadhafi en Libye, relève des troupes américaines en Irak, ambitions démesurées du Qatar…L’avenir se joue aujourd’hui

LIBYE Après quarante-deux ans de dictature, la mort de

Mouammar Kadhafi ouvre la voie aux ambitions de tout bord et à une possible guerre de succession

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INTERVIEW EXCLUSIVEMinistre des Affaires étrangères et européennes,

Alain Juppé revient sur le retour en force de la diplomatiefrançaise dans un monde arabe en pleine mutation

Élections brûlantes en Tunisie et en Égypte, succession chaotique de Kadhafi en Libye, relève des troupes américaines en Irak, ambitions démesurées du Qatar…L’avenir se joue aujourd’hui

INTERVIEW EXCLUSIVEMinistre des Affaires étrangères et européennes,

Alain Juppé revient sur le retour en force de la diplomatiefrançaise dans un monde arabe en pleine mutation

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SOMMAIRE

Novembre 2011 Arabies I 3

4 Points de vueQue se passe-t-il à Téhéran ?

Les ingrédients d’une explosion généralisée

8 RepèreL’eau, nouvel enjeu stratégique

10 Coulisses

12 Interview exclusive : Alain JuppéMinistre d’état, ministre des Affaires étran-gères et européennes, Alain Juppé analyse le retour en première ligne de la France en Libye et dans un monde arabe en pleine effervescence…

16 Libye : d’une guerre à l’autre ?Dans les prochaines semaines, le nouveau pouvoir émergent devrait avoir totalement « libéré » les dernières villes qui résistent : Syrte et Bani Walid. Mais à quel prix et pour quelles conséquences ?

22 Tunisie : la Grande Muette veut se faire entendre Marginalisée sous Ben Ali, l’armée est en quête de reconnaissance après avoir retrouvé sa dignité en accompagnant la révolution

60 ExpositionParis et l’Art contemporain arabe : rencon-tres avec Elie Bourgély et Mahi Binebine

63 En bref

64 événement : la Francophonie à TunisRencontre avec Colombe Anouilh d’Har-court, présidente du concours Philippe-Sen-ghor

66 Entre nous

POUVOIR

AVOIR SAVOIR

SOMMAIRE

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16

38 Arabies éco

40 Sociétés ManagersAbdelwahab ben Ayed, Tunisie. Anas Se-frioui, Maroc. Mohamed Laksaci, Algérie. Mohamed Safadi, Liban

42 Algérie : priorité aux entreprises !Outre quelque 200 nouvelles mesures éco-nomiques qui satisfont surtout le patronat, le salaire minimum a été revalorisé de 20 %. Largement insuffisant pour des syndicats qui ne veulent pas en rester là…

48 Maroc : Loi de finances 2012, le grand videAdopté en Conseil des ministres puis retiré le jour même où il devait être débattu au Parlement, le texte qui doit fixer le prochain budget de l’état soulève des polémiques à quelques semaines des législatives…

54 Algérie : des entreprises XXLL’Algérie compte de solides en-treprises dont les performances ne sont plus à prouver. Publiques ou privées, elles contribuent à l’essor de l’éco-nomie.

58 Communication

et en sécurisant le processus de transition démocratique.

28 Qatar : l’émirat qui joue à cash-cashLe minuscule émirat a misé sur sa puissance financière pour s’imposer parmi les grands acteurs internationaux. Un grain de sable qui irrite… 32 Irak : toujours sur la case départDepuis l’avènement du gouvernement de Nouri al-Maliki, le 21 décembre 2010, rien ne semble avancer au plan politique ni au niveau socio-économique. Et la corruption est toujours là…

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4 I Arabies Novembre 2011

Jusque récemment, l’Iran avait quitté les radars de la Communauté interna-tionale. Le printemps arabe, que ce

soient les révolutions pacifiques en Tuni-sie et en égypte, la guerre en Libye ou les conflits sanglants en Syrie, au Yémen et à Bahreïn, occupe la scène depuis de longs mois. Cet été, le conflit israélo-palestinien a connu une de ses nouvelles poussées de fièvre avec l’offensive diplomatique de Mahmoud Abbas à l’ONU, qui lui a per-mis, faute de mieux, de redorer son blason vis-à-vis de la population palestinienne. Mi-octobre, la libération croisée de l’otage Guilad Shalit et de 477 prisonniers pales-tiniens a marqué les esprits, même s’il est prématuré d’affirmer, comme certains l’ont fait, que cela ouvre la voie à des discussions entre Israël et le Hamas.

Pendant ce temps, le pouvoir iranien s’est fait discret, pris à contre-pied par le prin-temps arabe qui lui rappelait les frayeurs de la révolution verte, et fragilisé par les difficultés de son allié historique, la Syrie. Alors que beaucoup d’analystes, adeptes de « l’arc chiite », s’étaient plu à voir la main de Téhéran derrière chaque événement au Proche et Moyen-Orient, voire en Afrique du Nord, il a fallu se rendre à l’évidence : l’influence iranienne avait été surestimée.

Pour autant, nous ferions une grave erreur de mésestimer ce qui se passe à Téhéran. De ce point de vue, les nouvelles qui nous proviennent de ce pouvoir opaque et divisé sont inquiétantes. à la manière de kremli-nologues qui ont fait les riches heures de la guerre froide, les spécialistes les plus infor-més de la république islamique scrutent les moindres soubresauts dans la lutte sourde qui oppose les différentes factions au pou-

voir. C’est en effet une donnée essentielle qui est trop souvent occultée en Occident et ailleurs dans le monde : le pouvoir iranien est loin d’être monolithique, il est pluriel, voire divisé. à la répartition byzantine des pouvoirs, organisée par la Constitution ira-nienne et que ne renierait pas la doctrine américaine du check and balances, se su-rajoute des conflits aigus entre les hommes forts du pouvoir et leurs entourages.

Quelles conséquences tirer de cette frag-mentation ? D’abord, le pouvoir iranien a un besoin existentiel d’un ciment pour tenir et faire face à la contestation sociale qui ne s’est pas éteinte depuis 2009. Assez clas-siquement, le patriotisme ombrageux des Iraniens, que nombre de pays ont pratiqué sous d’autres latitudes, offre un semblant de légitimité et de solidarité au régime en place. La question nucléaire est le véhicule technique de ce nationalisme assez large-ment partagé dans la population.

Ensuite, le pouvoir iranien vit dans la peur obsidionale de l’étranger. Il se pense et agit comme une forteresse assiégée qui doit se méfier de l’extérieur. Ce sentiment est renforcé par l’échec de l’exportation de la révolution islamique, dont les sous-produits que sont le Hezbollah et le Hamas ont gagné une certaine autonomie, et par le printemps arabe qui ébranle les rares alliés fidèles de Téhéran et ravive dans la jeunes-se la volonté d’en finir avec ce régime.

Enfin, certaines factions du pouvoir ira-nien qui seraient en difficulté peuvent être tentées par une fuite en avant pour rétablir leurs positions. C’est à cette aune qu’il faut interpréter, en attendant que les enquêtes nous en disent plus, le prétendu complot

iranien contre l’ambassadeur saoudien à Washington. Cette affaire est digne des meilleurs romans d’espionnage. Nous ne pouvons exclure que le complot ait réel-lement existé, mais on ne peut pas exclure non plus qu’il s’agisse d’une manipulation. Dans l’éventualité où ce complot a bien été mené, il faudra le condamner avec la plus vive fermeté tout en étant attentif aux réactions iraniennes. S’agirait-il d’une ini-tiative isolée ? D’une politique délibérée et partagée jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir ? Nul n’est en mesure de l’affirmer aujourd’hui.

Patriotisme ombrageux, peur obsidio-nale de l’étranger, tentation de la fuite en avant : le cocktail auquel nous devons faire face est potentiellement explosif. Dans ces conditions, que faut-il faire ? Il faut prendre garde à ce que l’Occident et la Commu-nauté internationale, en particulier les pays arabes, n’auto-alimentent pas les schémas de pensée qui ont cours au sein du régime iranien. En adoptant des postures rigides et des déclarations comminatoires, nous ne ferions que valider les analyses qui en-couragent les dirigeants iraniens à pour-suivre leur politique actuelle. Il faudrait au contraire engager une véritable politique de main tendue, sans compromission et sans condition. Le président Obama s’était en-gagé dans cette voie. La révolution verte, qui a hélas échoué, avait montré que l’intui-tion était juste. Tout l’enjeu aujourd’hui est de poursuivre cette politique qui seule peut donner des résultats. La France, qui se dis-tingue depuis plusieurs années par une pos-ture plus rigide, doit faire preuve de plus de souplesse, en un mot, de diplomatie. n

Président de la chambre de commerce franco-arabe, ancien ministre des Affaires étrangères

Que se passe-t-il à Téhéran ? Par Hervé DE CHARETTE

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6 I Arabies Novembre 2011

I l existe deux dossiers qui, s’ils ne sont pas traités au mieux et au plus vite, embraseront prochainement la pla-

nète : tout d’abord, la crise économique mondiale avec à l’horizon une récession plus grave que celle de 1929. Et ensuite, le conflit israélo-palestinien.

Que dire sur le premier dossier, sinon que le fait que l’ensemble de nos diri-geants n’ait pas voulu réagir en 2007, lors des premiers symptômes de la crise, a été criminel ?

On assiste aujourd’hui à un phéno-mène croissant de « Madoffisation » de la planète. Le problème de la crise actuel-le, c’est qu’on a un marché global sans état de droit avec une mondialisation qui pourrait aisément ressembler à l’un des pires états : la Somalie.

J’en viens au second dossier : le conflit israélo-palestinien, qui vient de tenir en haleine l’assemblée générale des Na-tions unies durant quatre jours, du 20 au 23 septembre dernier.

Au moment où le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, vient de présenter à la face du monde sa demande unilatérale de proclamation de la création d’un état palestinien indépendant, avec vote à la clé des 15 membres du Conseil de sécurité, une première observation s’impose : le président américain Barack Obama qui, il y a un an encore, dans cette même enceinte des Nations unies, plai-dait farouchement pour la création d’un état palestinien, est obligé aujourd’hui de renier sa démarche pour des raisons purement électoralistes.

à quatorze mois de l’élection prési-dentielle, il est l’otage du lobby pro-is-

raélien. Je n’ai pas été surpris d’entendre à New York de nombreux représentants arabes déclarer : « Obama ne peut plus se présenter comme le défenseur des mou-vements de libération arabes en cours et refuser dans le même temps de répondre aux aspirations du peuple palestinien. »

L’étude de la demande palestinienne pourrait prendre quelques semaines. Mais qu’on ne se berce pas d’illusions, même si les Palestiniens espèrent obtenir au moins 9 des 15 voix du Conseil de sécurité, ils se heurteront au veto américain, ce qu’a annoncé haut et fort Barack Obama.

Pendant ce temps, le Quartet (le grou-pe qui réunit les états-Unis, l’Union européenne, l’ONU et la Russie) fait tout pour amener Israéliens et Palestiniens à reprendre des négociations directes.

Le Premier ministre israélien, Benja-min Netanyahou, a déclaré récemment qu’il était prêt à emboîter le pas du Quartet et à reprendre des négociations directes, mais il a décidé dans le même temps de poursuivre sa politique de colo-nisation.

De qui se moque-t-il ? D’Obama, on le sait depuis longtemps ; et, pire encore, de la Communauté internationale.

M. Netanyahou n’a toujours pas com-pris que ni son comportement ni le temps ne travaillent en faveur d’Israël.

L’anticipation des faits est facile. Quand le Conseil de sécurité aura dit non à la démarche politique palestinienne, Mahmoud Abbas demandera alors le vote des 193 états membres de l’assemblée générale des Nations unies où il n’y a pas de droit de veto.

Bref, la grande majorité des états de la Communauté internationale épousera alors la proposition de compromis écha-faudée par Nicolas Sarkozy, qui stipule qu’après un vote majoritaire les Palesti-niens passeront du statut de simple obser-vateur à celui d’état observateur, ce qui leur donnera le droit de faire partie des grandes instances internationales comme la Cour pénale internationale, l’Unesco et le FMI. Cela sera un statut intermédiaire avant que l’on ne se penche plus tard sur un statut final.

On en est loin, mais soyons réalistes. Le statu quo qui semble satisfaire Ben-jamin Netanyahou et son gouvernement rend la situation un peu plus explosive chaque jour. La frustration extrême des Palestiniens et leur manque de confiance en un Obama qui les a déçus, le Hamas qui refuse toujours de reconnaître le droit à l’existence d’Israël ou encore le man-que de courage et de volonté politique de part et d’autre : voilà qui peut conduire à une explosion généralisée. n

Spécialiste de politique étrangère, consultant pour CNN, NBC, MSNBC, BBC, BBC World, Al-Arabiyawww.christian-malard.com

Les ingrédients d’une explosion généraliséePar Christian mAlArd, éditorialiste sur France 3

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8 I Arabies Novembre 2011

Par Damien GArs

L’eau, nouvel enjeu stratégique

l’offre, qui sont limités à plusieurs sec‑teurs : grande hydraulique, pompages et nouvelles offres, notamment aux plans du dessalement et de la réutilisation des eaux usées.

Les intervenants des deux sessions sui‑vantes ont abordé le manque d’eau dans les principaux bassins géographiques, qui devrait tôt ou tard engendrer des conflits… Car pendant que les stocks di‑minuent progressivement, la consomma‑tion dépasse toujours les limites raison‑nables. Et Al‑Tayar de souligner que les plus importants fleuves arabes trouvent leurs sources hors des pays arabes. Ainsi l’égypte et le Soudan, qui dépendent des eaux du Nil, se trouvent‑ils aujourd’hui confrontés à des obstacles dressés par certains voisins africains. C’est aussi le cas de la Syrie et de l’Irak, qui doivent composer avec les exigences de la Tur‑quie concernant les eaux du Tigre et de l’Euphrate. Idem pour la Palestine, la Jordanie, la Syrie et le Liban face à Is‑raël.

De fait, Irina Bokova estime que le problème de l’eau constitue l’un des principaux enjeux de ce XXIe siècle, aussi bien en termes de développement

L ’eau, source de vie ou de conflits, tel était le thème choisi par le Cen‑tre d’études euro‑arabe (CEEA) et

l’Institut euro‑méditerranéen pour leur forum du 29 septembre dernier, organisé dans le cadre du Dialogue de Paris.

Une première session, intitulée « Les ressources en eau et les défis de de‑main », a évoqué l’eau et la paix ; le droit international du partage de l’eau ; et les risques de conflits liés au partage des sources et cours d’eau. Autant de sujets qui sont à l’ordre du jour partout dans le monde, surtout dans les régions du Moyen‑Orient et du Bassin méditer‑ranéen.

Outre l’orateur principal, Pierre‑Fré‑déric Ténière‑Buchot (gouverneur du Conseil mondial de l’eau), Pierre Blanc (rédacteur en chef de la revue Confluen-ces Méditerranée) et Mahmoud Abou Zeid (président du Conseil arabe de l’eau) ont chacun présenté ces problè‑mes et leurs différents aspects. Pour Sa‑leh Bakr al‑Tayar, président du CEEA, ce forum vise à trouver des suggestions qui pourraient être utiles aux décideurs, notamment au Moyen‑Orient. Cela dans le but d’éviter de nouvelles guerres po‑tentielles dont l’eau serait l’enjeu.

Dans son intervention, Irina Bokova, directrice générale de l’Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), a révélé que la ré‑gion du Moyen‑Orient et le monde arabe ne profitent que de 1 % de l’eau potable renouvelée, alors que la population de ces pays ne bénéficie même pas du trai‑tement des eaux usées…

Parallèlement, Pierre Blanc s’est foca‑lisé sur la crise de l’eau en Méditerranée qui, selon lui, se concentre sur les quatre éléments suivants : rareté, dégradation, pauvreté et violences hydrauliques. Pour ce qui concerne les disponibilités mon‑diales en eau douce, il considère que les émirats arabes unis sont le pays dont les ressources sont les plus faibles. Blanc a aussi parlé des progrès de la politique de

durable que de sauvegarde de la paix dans le monde.

Concernant le dessalement de l’eau de mer – qui demeure le principal problème des régions privées d’eau –, les pays du Golfe occupent la première place dans le monde, produisant 70 % de leur eau douce avec ce système. L’Arabie Saou‑dite dispose ainsi de 27 stations de des‑salement d’eau de mer pour une produc‑tion de 3,36 millions de mètres cubes par jour. Des chiffres qui devraient encore s’améliorer, les états du Moyen‑Orient ayant annoncé leur intention de consa‑crer 20 milliards de dollars aux projets de dessalement d’eau de mer en 2016. Un investissement qui devrait monter à 50 milliards en 2026.

Comme l’a indiqué le gouverneur de la Société générale de dessalement de l’eau en Arabie Saoudite, l’objectif est aujourd’hui d’assurer les besoins en eau potable des générations actuelles et futu‑res. C’est même l’un des principaux axes de la stratégie du royaume, dont les be‑soins quotidiens sont estimés à 6,5 mil‑lions de mètres cubes. Une demande qui devrait s’accroître pour avoisiner 9 mil‑lions de mètres cubes en l’an 2030. n

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10 I Arabies Novembre 2011

LIBAN Mikati « protégé »Damas refuse de faire pres‑sion sur le Premier ministre libanais, Najib Mikati. Elle conseille en outre à ses alliés au sein du gouvernement de le ménager, lui laissant ainsi toutes les chances de poursui‑vre sa gouvernance. Et cela malgré des positions qui, dans les circonstances actuelles, ne favorisent guère les intérêts et la stratégie de la Syrie. Pour preuve, on n’a constaté aucune déclaration ou prise de posi‑tion chiite contre Mikati, ni du Hezbollah ni du président du Parlement, Nabih Berri, qui semble faire office de média‑teur entre le palais présidentiel

des Mouhajirine à Damas et le sérail gouvernemental à Bey‑routh. Pour les observateurs dans la capitale libanaise, ce comportement surprenant de la Syrie vise à renforcer la po‑sition de l’actuel chef du gou‑vernement face à son ennemi juré, l’ex‑Premier ministre Saad Hariri. Même si ce der‑nier a quitté le Liban depuis près de sept mois, laissant à ses lieutenants la gestion de son mouvement politique et le soin de s’opposer à la nouvelle majorité. Les Syriens estiment que cet éloignement affaiblit graduellement l’influence du leader sunnite qui, au fil des jours, pourrait se retrouver sur la touche.

LIBYE/QATAR Des tensions grandissantesUne grande partie des Li‑byens n’a pas la même ap‑préciation du rôle joué par le Qatar dans leur pays. Pour preuve, les déclarations éma‑nant d’Ali Tarhouni, ministre du Pétrole et des Finances qui est aussi l’une des figures de proue du Conseil national de transition (CNT). Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 11 octobre dernier à Tripoli, Tarhouni a insisté sur le fait que le CNT compte trai‑ter tous les pays sur un pied

d’égalité, dans le respect de la souveraineté nationale li‑byenne. Il répondait ainsi aux informations publiées dans le Wall Street Journal, quotidien américain qui affirmait que le Qatar avait continué à en‑voyer des aides militaires et financières aux insurgés après la chute de Tripoli. Surprenant l’assistance par sa fermeté, Tarhouni a souligné que tous ceux qui voulent venir en Li‑bye doivent d’abord frapper à la porte, qu’il s’agisse d’amis arabes ou étrangers. Une allu‑sion qui viserait plus précisé‑

ment des Qatariens qui jouent la carte des factions islamis‑tes, à commencer par celle d’Abdelhakim Belhadj, chef du Conseil militaire de Tripo‑li. Mais, aussi bien au sein du CNT que du côté de certains responsables occidentaux, des voix s’élèvent contre ce qu’on qualifie d’ingérence flagrante du Qatar dans les affaires in‑ternes de la Libye. Ce que Doha nie catégoriquement.

IRAkLa menace kurde Le prochain retrait total des for‑ces américaines en Irak suscite les pires craintes des Kurdes, plutôt privilégiés depuis 2004 et le début de l’occupation. Soucieux d’anticiper au mieux cette échéance, les dirigeants kurdes Massoud Barzani et Jalal Talabani, via leurs repré‑sentants au sein du gouverne‑ment régional du Kurdistan d’Irak, ont brandi la menace d’une création unilatérale de leur propre état… Ils espèrent ainsi contraindre le Premier ministre, Nouri al‑Maliki, à faire marche arrière concer‑nant le vote de la nouvelle loi sur le pétrole et le gaz, qui va à l’encontre des intérêts kurdes. Une façon, aussi, de contrer certains projets qui visent à réduire l’influence kurde dans la région de Kirkouk, riche en pétrole. Les Kurdes craignent également une alliance tripar‑tite entre les Arabes – sunnites et chiites – et les Turkmènes. Une coalition qui serait sans

doute soutenue par l’Iran et la Turquie, qui redoutent tous deux les ambitions potentiel‑les d’un Kurdistan autonome qui produirait beaucoup de pétrole… On peut donc s’at‑tendre, dans les prochaines semaines, à des surprises. à moins que l’Irak ne connaisse des confrontations ethniques ou que les parties en conflit parviennent à un compromis.

MAROC/ALGÉRIECoopération antiterroristeLes relations politiques en‑tre les deux pays voisins ne s’améliorent certes pas, mais les frontières terrestres restent hermétiques. Une preuve de bonne coordination en matiè‑re de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Car les services marocains et algériens livrent le même combat contre les islamistes, et pas seulement à l’intérieur de leurs frontières. Cette coordination s’étend maintenant jusqu’à la région du Sahel. Depuis les événe‑ments en Libye, Le Maroc redouble d’efforts en Afri‑que – notamment au Mali et au Niger – pour rassembler toute information qui pourrait aider les Algériens à contenir d’éventuelles infiltrations is‑lamistes. De son côté, Alger a déjà fourni des renseigne‑ments qui ont permis récem‑ment de démanteler plusieurs réseaux proches d’Al‑Qaïda qui s’apprêtaient à commet‑tre des attentats au Maroc. Cette coopération est très appréciée et encouragée par les états‑Unis. Des sources concordantes à Alger et Rabat font d’ailleurs état de réunions tripartites régulières ces der‑nières semaines. L’objectif est de localiser, avec l’aide de la CIA, des leaders marocains et algériens qui se trouveraient actuellement en Libye.

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La France et son président, Ni-colas Sarkozy, ont joué, avec la Grande-Bretagne et les

états-Unis, un rôle déterminant dans le sauvetage de la popula-tion libyenne d’un massacre à grande échelle qu’aurait pu per-pétrer Kadhafi… Aujourd’hui, même si le régime est mort avec un Kadhafi en fuite, l’avenir de ce pays ne vous inquiète-t-il pas avec un Conseil national de tran-

sition (CNT) qui est une mosaï-que de gens originaires de la Cy-rénaïque, de la Tripolitaine, ainsi que des berbères, d’anciens mo-narchistes, des membres de tri-bus divisées islamistes, liées à Al-Qaïda, qui ne s’entendront pas forcément quand il faudra bâtir et diriger une nouvelle Libye ? Toutes les forces que vous évoquez se sont unies pour combattre Kad-hafi. Nous pensons très important

que le CNT forme au plus vite un gouvernement de transition qui de-vra inclure toutes ces composan-tes et qui permettra de conserver l’unité de la révolution jusqu’à la mise en place des institutions d’un état démocratique.

Les Libyens, qui ont démontré leur courage, leur maturité et leur dignité tout au long de cette révo-lution, ont toute notre confiance pour relever ensemble ce défi, et

« Faciliter la modernisation politique »Ministre d’état, ministre des Affaires étrangères et européennes, Alain Juppé analyse le retour en première ligne de la France en Libye et dans un monde arabe en pleine effervescence…

France« La France est à la pointe de la mobili-

sation internationale et poursuivra ses

efforts dans toutes les enceintes… »

Propos recueillis par C. MALARD

12 I Arabies Novembre 2011

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la France restera à leurs côtés pour faciliter la modernisation politique et la relance de l’économie.

Les autorités françaises, tout comme l’Administration améri-caine et d’autres pays, considè-rent qu’en Syrie on a atteint le point de non-retour. Ils ont même appelé au départ de Bachar al-Assad… Le président syrien et sa minorité alaouite s’accrochent au pouvoir, la répression se pour-suit… Récemment, il a été dé-claré que, sous couvert de l’ONU, on pourrait intervenir partout dans le monde pour sauver des populations menacées par leur régime. Il y a donc eu une inter-vention en Libye… Pourquoi pas en Syrie, en dépit des veto russe et chinois ?La Communauté internationale doit prendre ses responsabilités et protéger les populations civi-les. La France est à la pointe de la mobilisation internationale. Elle poursuivra ses efforts dans toutes les enceintes, notamment au sein de l’Union européenne, qui a déjà adopté huit trains de sanctions, pour accroître la pression sur le ré-gime syrien en vue de mettre fin à la répression.

Au Conseil de sécurité, nous nous sommes heurtés aux veto russes et chinois et aux réticences de l’Inde, de l’Afrique du Sud, du Brésil et du Liban. Nous ne re-nonçons pas. Aucun veto ne peut donner un blanc-seing à des auto-rités qui ont perdu toute légitimité en assassinant leur propre peuple. Nous continuerons à dénoncer les crimes commis.

Nous sommes en contact perma-nent avec la Ligue arabe, qui suit avec une inquiétude croissante la fuite en avant du régime de Da-mas. Nous poursuivons nos efforts à New York pour que les Nations unies puissent prendre position sur la crise syrienne. Nous conti-nuerons de parler aux Russes et aux Chinois. Nous sommes prêts à

renforcer encore les sanctions européennes. Nous parlons à l’op-position démocratique syrienne qui se structure. Nous apportons notre soutien politique et moral à une population héroïque, qui veut reconquérir sa liberté.

Redoutez-vous une réplique de l’Iran et de son allié le Hezbollah qui conduirait à un embrasement du Moyen-Orient ? On peut toujours agiter des mena-ces, mais on n’arrête pas les aspi-rations des peuples. Je ne crois pas que cela soit de l’intérêt de quicon-que dans la région d’essayer d’aller contre ces aspirations. N’oubliez pas que le peuple iranien, lui aussi soumis depuis trop longtemps à l’oppression, réclame la liberté.

Ces révolutions du printemps arabe ne risquent-elles pas de dé-boucher sur des lendemains qui déchantent ? Nicolas Sarkozy, en-tre autres, s’est félicité que l’on ait « appelé à plus de démocratie, sans crier à bas l’Occident, à bas Israël, à bas les états-Unis »… Pourtant, les récentes manifestations anti-israéliennes du Caire ne laissent

rien présager de bon… En égyp-te, comme en Tunisie ou ailleurs, on le voit bien, les islamistes bien organisés commencent à sortir du bois dans la perspective des prochaines élections…En Tunisie, la campagne électorale se déroule dans le calme et je ne me risquerai pas à essayer de pré-voir les résultats. Mais il est peu probable qu’un parti obtienne la majorité à lui seul.

En égypte, une transition politi-que est également en cours. L’im-portant est que les autorités tien-nent leurs engagements, avec pour objectif le transfert des pouvoirs à des autorités civiles élues en 2012. Les Frères musulmans constituent une des pièces du nouvel échiquier politique. Comme en Tunisie, ils devront accepter les règles du jeu électoral et politique et s’entendre avec d’autres forces.

Je récuse le discours de la fa-talité. Face aux extrémistes, nous appuyons toutes les forces démo-cratiques attachées au pluralisme et au respect des différences.

L’ancien président français Jacques Chirac n’a cessé de

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syrIe« La communauté internationale doit prendre ses responsabilités et protéger les popu-lations civiles »

« Les Libyens, qui ont démontré leur courage, ont toute notre confiance pour relever ensemble le défi de la démocratie. »

InterVIew excLUsIVe POUVOIr

Page 14: Arabies | November 2011

réVOLUtIOns« nous appuyons toutes les forces

démocratiques atta-chées au pluralisme

et au respect des différences »

14 I Arabies Novembre 2011

répéter : « le cancer n° 1 du Moyen-Orient est le conflit israé-lo-palestino-arabe ». Sans doute avait-il raison, car on le voit bien, ce cancer suscite depuis long-temps dans cette région le déve-loppement de métastases qui ont pour noms Hezbollah, Hamas, Djihad islamique, etc. Alors de-vant les récentes initiatives pales-tiniennes à l’ONU, comment fai-re comprendre aux Israéliens, de plus en plus isolés, que l’avenir ne joue pas en leur faveur ? Même Obama et son Administration, alliés fidèles d’Israël, ne peuvent se faire entendre… Le conflit au Proche-Orient n’a que trop duré. Il alimente les frus-trations, voire l’extrémisme. Les Palestiniens réclament leur état. Cette demande, qui est légitime, est admise par toutes les parties. Les pays arabes connaissent des évolutions politiques rapides et sans précédent. Personne ne com-prendrait que le conflit perdure et que les Palestiniens restent un peu-ple sans état. Le statu quo ne joue pas en faveur d’Israël. La Commu-nauté internationale doit aider Is-raël et les Palestiniens à mettre en œuvre la solution des deux états.

à l’ONU, le président de la ré-publique a proposé de changer de méthode, avec une étape intermé-diaire vers une admission pleine de la Palestine : le statut d’état obser-vateur, accompagné d’une reprise des négociations. La création de l’état de Palestine sera pour les Israéliens la meilleure garantie de sécurité pour l’avenir. Tout le Pro-che-Orient aurait à y gagner en ter-mes de stabilité et de croissance.

Pendant ce temps, au milieu de ces nombreuses turbulences l’Iran avance à pas feutrés dans l’élaboration de son programme nucléaire et devient un peu plus chaque jour une menace… Que faut-il faire ? Recourir à des frappes préventives comme l’in-sinue Nicolas Sarkozy ? La crise nucléaire iranienne conti-nue plus que jamais de retenir notre attention. Ses enjeux sont considérables : en poursuivant le développement de capacités nucléaires, l’Iran met en danger le régime de non-prolifération et fait courir le risque d’une brus-que dégradation dans la région. Non seulement ce programme ne répond à aucun objectif civil

identifiable, mais il existe des in-dices graves d’activités liées à la conception et à la fabrication des armes nucléaires.

En 2006, l’Allemagne, la Gran-de-Bretagne et la France, avec le soutien de l’UE, ont convaincu les états-Unis, la Russie et la Chine d’avoir une approche commune et ferme : ouverture au dialogue avec l’Iran, mais pression internationale de plus en plus forte s’il refuse de suspendre ses activités sensibles et de négocier. Le Conseil de sécurité, l’Union européenne, de nombreux états ont déjà adopté des sanctions dont les autorités iraniennes voient les effets. Telle est notre stratégie et nous la poursuivrons, Téhéran ne doit pas douter de notre déter-mination.

Nous voulons ainsi prévenir le risque d’une crise majeure dont nous ne voulons à aucun prix, et le président de la République a été très clair sur ce point dans son discours devant les ambassadeurs français. La prochaine étape vien-dra, en novembre, d’un nouveau rapport de l’AIEA [Agence inter-nationale de l’énergie atomique] qui nous dira où en est l’Iran et sur la base duquel nous agirons. n

« En égypte, l’important est que les autorités tiennent leurs engagements avec pour objectif le transfert des pouvoirs à des autorités civiles élues en 2012. »

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AU-DELÀ DE L’INFORMATIONL’ACTUALITÉ INTERNATIONALE 24H/24

Page 16: Arabies | November 2011

L ’annonce de la mor t de Mouammar Kadhafi , l e 20 octobre dernier, ne si‑

gnifie pas pour autant la fin du conflit. Témoin, le retour des combats à Tripoli, huit jours plus tôt dans le quartier d’Abou Salim, entre les forces pro‑Kad‑

hafi et celles du Conseil natio‑nal de transition (CNT), qui don‑ne une idée de la stabilité future de la Libye… Cela au moment où s’enracinent les divergences entre les différentes factions du CNT. Car les diverses compo‑santes du futur nouveau pouvoir

– islamistes, laïcs, nationalistes et tribus – n’hésitent pas à revendi‑quer leur part du gâteau. Certains chefs tribaux, voire des régions, ont même demandé la priorité sur la distribution des revenus pé‑troliers extraits sur leur sol. Et le pouvoir de décision quant à une

D’une guerre à l’autre ?Dans les prochaines semaines, le nouveau pouvoir émergent devrait avoir totalement « libéré » les dernières villes qui résistent : Syrte et Bani Walid. Mais à quel prix et pour quelles conséquences ?

RÉSISTANCETout le monde a

été surpris par la reprise des combats

le 12 octobre der‑nier à Tripoli, dans le quartier d’Abou

Salim

Par Samir SOBH

16 I Arabies Novembre 2011

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éventuelle redistribution. Tout cela en parallèle des destructions de villes entières, des massa‑cres et représailles – notamment contre civils et prisonniers – qui font s’insurger, certes sur le tard, les organisations internationa‑les humanitaires et des droits de l’homme.

Le président du CNT, Mustapha Abdeljalil, est celui qui redoute le plus les conséquences de cette si‑tuation, ne cachant pas sa crainte de nouvelles effusions de sang. Même s’il n’est pas issu d’une forte tribu, il connaît les limites à ne pas dépasser au plan tribal. Au sein du nouveau pouvoir émer‑gent, les plus avisés s’inquiètent déjà d’une vengeance post‑Kad‑hafi qui pourrait entraîner la Li‑bye dans un nouveau conflit. Car eux connaissent parfaitement le contexte local pour n’avoir jamais quitté le pays et pour avoir subi la répression de l’ancien régime, sans jamais avoir été parachutés de l’étranger… Honneur tribal. Le problème ne tient plus aujourd’hui à Kadhafi et à ce qui reste de ses forces, car cette page est bel et bien tour‑née. Même si la résistance est encore farouche, notamment à Syrte et à Bani Walid. où Queda‑dfas et Ourfellas – la plus grande tribu de Libye – défendent leur honneur tribal et leurs villes face à des « révolutionnaires » qu’on accuse de tueries arbitraires, de pillages, d’exécutions sommaires des blessés et de viols…

Le tout avec l’aval tacite de l’Occident, qui dénonce la prise en otages des habitants des villes par les « Kadhafistes », notam‑ment à Syrte. Un comble quand on sait que l’intervention de l’Otan, cautionnée par l’ONU, a d’abord été menée au nom de la « protection des civils »… Face aux nombreux cris d’alarme lan‑cés par la Croix‑Rouge et Human Rights Watch, qui qualifiaient de « désespérée » la situation des

civils de Syrte et Bani Walid, les Occidentaux ont préféré fermer les yeux…

Désormais officiellement re‑connu en tant que nouveau pou‑voir légitime libyen par la Com‑munauté internationale, sous la pression des Occidentaux, le CNT semble malgré tout incapa‑ble de gouverner ce riche pays. Avant même que se dessine une victoire finale avec les batailles de Syrte et de Bani Walid, les alliés de circonstance au sein du CNT ont commencé à se déchirer malgré les déclarations apaisan‑tes des uns et des autres.

En atteste l’incapacité à for‑mer un véritable gouvernement de transition depuis la chute de Tripoli, il y a environ trois mois : déjà annoncée à trois reprises, cette échéance a chaque fois été repoussée…

Voilà qui montre l’ampleur des conflits existant entre ces protago‑nistes alliés. Cela témoigne aussi

du degré d’ingérence des forces étrangères, dont chacune soutient ses « amis » politiquement, finan‑cièrement et militairement afin de consolider ses positions sur le terrain.

Une manière, aussi, d’essayer d’imposer ses conditions pour s’emparer de la plus grosse part possible…

Mais que penser des manœu‑vres de cheikh Ali al‑Salabi, lea‑der islamiste vivant au Qatar qui a posé son veto au retour de l’ac‑tuel chef du pouvoir exécutif,

Novembre 2011 Arabies I 17

Secrétaire d’État au commerce extérieur, Pierre Lellouche a mené en Libye une délégation d’entre‑preneurs français, le 12 octobre dernier fr

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LIbyE POUVOIR

MALAISEMalgré les cris d’alarme de la Croix‑Rouge sur la situation « déses‑pérée » des civils de Syrte et bani Walid, l’Occident a fermé les yeux

Différentes factions du CNT, notamment celles issues de Misrata et Benghazi, revendiquent le crédit de la victoire.

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Mahmoud Jibril, avant de faire marche arrière deux semaines plus tard ? Et que dire d’Abdel‑hakim Belhadj, commandant militaire islamiste de Tripoli qui évoque une gouvernance islami‑que modérée ? Même si ces deux leaders islamistes appellent à sou‑tenir les efforts du CNT, le com‑promis n’est pas pour demain…. Surtout qu’il convient d’ajouter à ces éléments troublants les re‑vendications des représentants de la ville de Misrata, qui réclament la part du lion dans le futur gou‑vernement. Ils estiment en effet avoir payé le prix fort et que c’est grâce à leurs combattants que Tripoli est tombée, emportant le régime de Kadhafi… Et le fait est qu’on trouve ces derniers sur tous les fronts, notamment à Syrte et Bani Walid.

De leur côté, les dirigeants de Benghazi, deuxième ville de Li‑bye et point de départ de la rébel‑lion, pointent certaines mouvan‑

ces du CNT qui s’efforceraient de les marginaliser. Pour eux, pas question de céder leurs droits à ceux qui ont rallié la révolution au dernier moment.

Dans le même temps, l’insécurité regagne les grandes villes et per‑sonne ne sait plus qui fait quoi… Qui sont les véritables responsables du pays ? Le doute est permis. Il n’est qu’à voir le paiement des sa‑laires des fonctionnaires de l’admi‑nistration, intervenu après des mois de retard de façon assez sélective selon la faction qui dirige chaque ville.anciens « disciples ». En clair, les proches sont servis les premiers… Quant à ceux qui sont catalogués comme d’anciens « disciples » du régime déchu, ils sont ignorés. Cela a soulevé un tollé au sein de la po‑pulation, majoritairement issue des tribus.

« Seul le nouveau drapeau de l’époque de la monarchie est pré‑sent partout. Mais lorsqu’il s’agit

d’assurer les services au minimum, de contrôler la hausse vertigineuse des prix, la défense des droits des citoyens contre les agressions des milices, nous ne trouvons ni le CNT ni les révolutionnaires », s’indignait ainsi avec amertume auprès d’Ara‑bies un professeur de l’université de Tripoli qui fut en son temps limogé par les Comités révolutionnaires de Kadhafi…

Le vol aussi fait désormais partie du quotidien des Tripoli‑tains : voitures, mobilier domes‑tique, électronique, jusqu’aux… poulaillers ! C’est en tout cas ce qu’a écrit, dans un récent rapport adressé à sa chancellerie, un am‑bassadeur européen qui a tenu à garder l’anonymat…

Mais ce qui inquiète le plus, c’est le nombre d’armes qui tran‑sitent entre les mains des jeunes qui, dès la tombée de la nuit, font la loi dans la majorité des gran‑des villes, notamment à Tripoli et Benghazi. Mais Misrata et

18 I Arabies Novembre 2011

bELhADjSoupçonné d’être

l’un des fondateurs du Groupe islami‑

que combattant en Libye (GICL),

Abdelhakim belhadj dirige le Conseil

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Dès la nuit tombée, les bandes armées font la loi dans la majorité des grandes villes, notamment à Tripoli et Benghazi.

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Page 20: Arabies | November 2011

Zaouia sont en revanche bien contrôlés.

Néanmoins, le marché des ar‑mes est florissant dans tout le pays. Il suffit d’avoir de l’argent pour accéder à Kalachnikov et lance‑roquettes, voire missiles… Les acteurs de ces réseaux spé‑cialisés séjournent dans les plus grands hôtels et gèrent ouverte‑ment leurs marchés sous les yeux des représentants du nouveau pouvoir, que la population accuse d’être dans le coup…

Ces ventes massives d’armes commencent même à faire planer un vrai danger sur les pays voi‑sins. L’Algérie a certes anticipé en prenant ses dispositions pour endiguer l’infiltration d’armes via sa longue frontière avec la Li‑bye. Mais la Tunisie et l’égypte sont, jusque‑là, incapables de le garantir. De sources concordan‑tes à Tunis et au Caire, les armes récupérées auprès des salafistes tunisiens et des baltagias (« van‑dales ») qui sèment l’insécurité partout en égypte viendraient de Libye…

Ces éléments ont incité les états‑Unis à mettre en place un

programme spécial pour lutter contre ce phénomène, avec un premier budget de 30 millions de dollars. Dans les semaines à ve‑nir, Washington devrait aussi dé‑pêcher en Libye des experts, pour la plupart anciens officiers de l’US Army, pour aider à retrouver des missiles sol‑air dérobés dans les stocks de l’armée libyenne.

Aussi bien d’un point de vue politique que sécuritaire, cette situation montre que le CNT est encore loin de voir le bout du tunnel. Et que la population devra sans doute attendre bien longtemps avant un retour à la normalisation. Même si un gou‑vernement de transition était im‑posé de l’extérieur. Même si une nouvelle Constitution était mise en place avant l’organisation d’élections législatives et prési‑dentielle transparentes « à l’occi‑dentale », auxquelles la majorité des Libyens ne croit pas…

Par leur comportement, les gouvernements occidentaux qui ont aidé à la chute de la dictature du colonel Kadhafi semblent ne rien voir de ce qui pourrait ad‑venir dans le futur. Ils semblent

croire que les libérations de Syrte et de Bani Walid vont leur ouvrir toutes les portes, dont celle de la manne pétrolière locale. En attes‑tent toutes les délégations com‑merciales étrangères – dont la France – qui se sont récemment précipitées en Libye en quête de contrats. Ce que bon nombre des membres du CNT, et les Libyens en général, trouvent profondé‑ment gênant. « Ces Occidentaux sont arrogants, ne respectent rien. Ils ne voient que leurs in‑térêts… » Tels furent les propos enflammés de l’un des chefs de la tribu Al‑Obeidate, la plus forte de la région Est, lors d’un mee‑ting qui s’est tenu à Benghazi le 15 octobre dernier. Et ce digni‑taire d’ajouter : « Il faut qu’ils sachent que nous ne sommes pas dupes, que nous sommes des bé‑douins qui savons très bien faire le calcul et que la phrase “Nous civilisez‑vous ?” peut s’appliquer ailleurs, mais pas chez les pe‑tits‑enfants d’Omar al‑Mokhtar [le grand symbole de la résistance libyenne contre le colonialisme italien]… » Visées occidentales. Cela signifie que, contrairement aux analyses de certains politiciens et affairis‑tes européens, les Libyens sont parfaitement conscients des vi‑sées occidentales.

Le fait de diversifier leurs par‑tenaires en fonction de leurs inté‑rêts nationaux – un exercice très bien appliqué par Kadhafi – de‑vrait ainsi rester de mise avec le nouveau pouvoir. Tout le monde est donc sur la même ligne de dé‑part dans la course aux contrats, dont les plus prisés touchent aux hydrocarbures et aux infrastruc‑tures. Mais l’attente promet de se prolonger, surtout si la guerre devait s’éterniser et si le pays ve‑nait à s’enliser dans un bourbier tribal, régional et religieux. Dès lors, la promesse d’une nouvelle Libye pourrait céder la place à celle d’une guerre sans fin. n

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AbDELjALIL Malgré les efforts du chef du CNT, la formation du nou‑

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Pour endiguer un trafic d’armes florissant, les états‑Unis ont lancé un programme de 30 millions de dollars.

20 I Arabies Novembre 2011

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Un militaire à la retraite par‑lant de son expérience pas‑sée dans un livre ? Anodin

sous d’autres cieux, l’exercice l’est beaucoup moins en Tunisie… Voilà pourquoi le colonel Boubaker ben Kraïem apparaît aujourd’hui comme un précurseur. Cet ancien chef d’état‑major adjoint de l’ar‑mée de terre écrit en effet un livre dans lequel il relate l’expérience de la « promotion Bourguiba », ce premier groupe de jeunes officiers qui furent envoyés en formation à Saint‑Cyr, en France, après l’indé‑pendance de la Tunisie en 1956.

Inconcevable avant la révolu‑tion, cette prise de parole n’est pas fortuite et ne constitue pas un acte

isolé. Car en déboulant sur la scène publique, cet ancien officier supé‑rieur, aujourd’hui membre – autre nouveauté dans ce pays – de l’As‑sociation des militaires retraités, a endossé également l’habit de por‑te‑parole de l’armée, sans préciser s’il était mandaté officiellement… C’est en cette qualité qu’il a pour la première fois levé le voile sur la manière dont l’armée voit son rôle dans la nouvelle Tunisie – la « Se‑conde République » – et sur ses propositions pour l’avenir.

Marginalisée sous Ben Ali – qui avait pris le pouvoir, le 7 novem‑bre 1987, grâce aux gendarmes et non aux militaires –, l’armée est, depuis le 14 janvier 2011, un acteur

important de la transition vers un régime démocratique.

D’abord parce qu’elle a joué un rôle clé dans la chute du régime en refusant de réprimer les manifes‑tants. Ensuite quand elle a porté seule le fardeau du rétablissement de la sécurité, dans les jours ayant suivi la fuite de l’ancien président et la désertion d’une partie des forces de police – jadis colonne vertébrale du régime de Ben Ali –, qui redou‑taient des représailles de la popu‑lation. Enfin parce qu’elle a clamé haut et fort qu’elle ferait tout pour protéger le peuple et lui permettre d’atteindre ses objectifs en enca‑drant – sans s’y immiscer – le pro‑cessus de transition démocratique

La Grande Muette veut se faire entendreMarginalisée sous Ben Ali, l’armée est en quête de reconnaissance après avoir retrouvé sa dignité en accompagnant la révolution et en sécurisant le processus de transition démocratique. Par Moncef MAhroug

22 I Arabies Novembre 2011

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ben kRaIeMCet ancien colonel

à la retraite est devenu le porte‑pa‑

role d’une armée qui veut participer

activement à la reconstruction

Page 23: Arabies | November 2011

qui doit permettre aux Tunisiens de fonder leur « Seconde Républi‑que »…

Et demain ? Il est certain que l’ar‑mée aurait pu prendre le pouvoir dans les jours suivant la chute du régime Ben Ali et qu’elle n’en a pas profité. Dès lors, on l’imagine mal succomber maintenant à la tentation. Les militaires sont certes intervenus à plusieurs reprises pour maintenir l’ordre et « à chaque fois nous avons réintégré nos casernes, car nous n’avons jamais été tentés par le pouvoir », justifie le colonel Ben Kraïem.

Le désintérêt pour la politique est tel que, lors du débat du 1er octo‑bre 2011, un militaire qui clamait haut et fort son impatience à pou‑voir voter – les membres de l’armée n’ont pas le droit de vote en Tuni‑sie – fut bruyamment désapprouvé par ses camarades présents dans la salle…Une contrepartie. L’institution mi‑litaire, qui a soutenu la révolte, va toutefois « demander une contre-partie », notamment « la prise de dispositions concernant ses rela-tions avec le pouvoir », observe l’universitaire algérien Abdennour Benantar, enseignant à Paris 8, qui trouve légitime que l’armée veuille « des garanties sur la sortie de la phase de transition démocratique, qui pourrait devenir un obstacle au passage à celle de consolidation démocratique ».

Effectivement, Boubaker ben Kraïem a présenté les requêtes de l’armée lors d’une conférence or‑ganisée le 1er octobre dernier par le Centre des études méditerranéen‑nes et internationales (Cémi) et la fondation Konrad Adenauer, en collaboration – encore une grande première – avec le ministère de la Défense.

Selon ce colonel à la retraite, l’armée souhaite d’abord que « la perception des problèmes de dé-fense soit, sous la Seconde Répu-blique, empreinte de responsabi-lité, d’objectivité, de sérieux et de

transparence ». Elle voudrait aussi « avoir sa place dans la société », c’est‑à‑dire être associée « à la réflexion sur toutes les questions d’importance ».

Lors de la fameuse conférence du 1er octobre sur la gestion et le contrôle démocratique des armées, l’institution militaire était repré‑sentée par une bonne vingtaine d’officiers supérieurs issus de tous les corps (armée de terre, armée de l’air et marine) qui ont fougueuse‑ment défendu les demandes formu‑lées par le colonel Ben Kraïem.

Parmi elles, leur volonté que les chefs d’états‑majors siègent au Conseil d’état. En outre, pour une meilleure compréhension des ques‑tions militaires, l’armée souhaite que les hautes instances (présiden‑ce de la République, Premier mi‑nistère, Chambre des députés, etc.) soient dotées de conseillers militai‑res recrutés parmi les officiers à la retraite.

Les militaires prévoient aussi de s’ouvrir davantage sur la société, en communiquant mieux et plus qu’avant. Ils veulent également que

la future Assemblée constituante comble le vide juridique concer‑nant les conditions d’instauration de l’état d’urgence et de l’état de siège. Mais quand on leur fait remarquer que demander à l’armée son avis sur les conditions de proclamation de l’état d’urgence, c’est l’impli‑quer dans une décision politique, les militaires répondent qu’ils atten‑dent seulement « des mécanismes permettant à l’armée de formuler son avis technique ». Pour eux, « il est clair que, dans une démocratie, le pouvoir appartient aux civils ».

Pour démontrer la justesse de leurs propos, ils citent deux exem‑ples qu’ils trouvent pertinents

Novembre 2011 Arabies I 23

L’armée a exprimé ses doléances, le 1er octobre dernier, lors d’une conférence organisée en collabo‑ration avec le minis‑tère de la Défense ac

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L’armée tunisienne encadrant une manifestation à Tunis devant le siège du rCD, parti de l’ex‑président Ben Ali.

Page 24: Arabies | November 2011

concernant leur participation à la réflexion sur des questions stratégi‑ques.

D’abord, en 1985. Encouragé par l’Algérie, qui a proposé d’accorder un crédit à la Tunisie pour financer ce projet, le gouvernement tuni‑sien envisage de creuser un canal reliant la Méditerranée à la plaine du Chott el‑Jerid, toute proche de la frontière algérienne. Mais les mi‑litaires s’opposent à ce projet, qui risque de couper en deux le pays en cas de conflit, et ils le font savoir. « Nous avons expliqué cela aux po-litiques et nous avons été écoutés », rappelle un officier.

Ensuite, quand le gouvernement fait construire le pont mobile de Bizerte, à la fin des années 1970, au grand dam d’une armée qui s’est pourtant prononcée contre cet ouvrage. Les militaires estiment en effet qu’il suffirait de le bombarder pour bloquer le canal reliant cette ville du nord de la Tunisie à la Mé‑diterranée.

Architecte de la conférence du 1er octobre, Ahmed Driss, président et directeur du Cémi, en saisit toute la portée historique. « Nous sommes dans une nouvelle époque dont nous ne rêvions pas et qui nous permet

de nous réunir pour discuter d’un sujet », se félicite ce professeur à la Faculté de droit, des sciences éco‑nomiques et du management.

Ahmed Driss apprécie d’autant plus le moment qu’il avait déjà es‑sayé en 2007, sous couverture du Cémi, de convaincre le ministère de la Défense d’organiser une ma‑nifestation similaire. En vain, car ce département n’avait même pas daigné lui répondre. Ce dont il ne s’étonne guère : « L’armée et les questions militaires étaient un sujet tabou… »

Aujourd’hui, la volonté de chan‑gement est clairement affichée et assumée. Elle s’est même concréti‑sée, le 27 juillet dernier, par l’adhé‑sion de la Tunisie au centre pour le Contrôle démocratique des forces armées (DCAF, pour Democra-tic Control Armed Forces), situé à Genève (Suisse). Le pays est ainsi devenu le second état arabe – après le Liban – et le 60e dans le monde à s’engager sur cette voie.

Voilà qui marquait le couronne‑ment d’un dialogue instauré dès le 8 février 2011 – moins d’un mois après la chute du régime – avec cette organisation internationale qui opère comme un centre d’expertise

en matière de sécurité, de dévelop‑pement et d’état de droit. Le DCAF œuvre aussi à promouvoir la bonne gouvernance et la réforme du sec‑teur de la sécurité.

Cette institution a déjà mis en œuvre plusieurs programmes de coopération, aussi bien en faveur du gouvernement tunisien que de la société civile, pour faire avancer la question de la gestion et du contrôle démocratique des armées.

Pour toute société, la difficulté consiste à se doter d’une institu‑tion militaire « qui la protège sans la dominer », précise Abdennour Benantar. Ce que le politologue Philippe Droz‑Vincent résume à une question que Platon se posait déjà en son temps : « Qui va nous garder des gardiens ? » Chantier difficile. Pour les militai‑res tunisiens, le contrôle démocra‑tique est « une idée nouvelle qui a ses exigences », note le colonel Ben Kraïem. Mais la Tunisie va pouvoir construire son propre mo‑dèle en s’inspirant des expériences des nombreux pays qui l’ont pré‑cédée sur cette voie. Des exemples qui démontrent que la mise en place d’un dispositif de contrôle démocra‑tique de l’armée constitue un vaste chantier, difficile de surcroît…

Ainsi du cas de l’Espagne qui, selon Eduard Soler i Lecha, cher‑cheur à l’Université autonome de Barcelone, prouve que « ce proces-sus n’est pas facile, ni linéaire ». En effet, ce pays a été le théâtre d’une tentative de coup d’état en 1981, à peine cinq ans après la mort du gé‑néral Franco et le début de la transi‑tion démocratique…

Une première difficulté tient au fait que, dans une situation de tran‑sition comme celle que connaissent la Tunisie et l’égypte aujourd’hui, les armées peuvent résister et, sur‑tout, se soucier de garder ou de ré‑cupérer le pouvoir. Elles peuvent également, comme cela s’est pro‑duit en Amérique latine, mal s’ac‑commoder de l’ingérence du pou‑voir civil dans leurs affaires.

24 I Arabies Novembre 2011

antICIPatIOnen juillet dernier,

la tunisie a adhéré au centre pour le

Contrôle démocra‑tique des forces armées (DCaF),

devenant le second état arabe membre

un manifestant oppose ses fleurs aux armes, qui finalement ne tireront pas.

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Page 26: Arabies | November 2011

COnstItUtIOnL’armée compte

sur la Constituante pour définir les

conditions d’ins‑tauration de l’état

d’urgence

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L’armée tunisienne n’en est pas là car « elle n’a jamais détenu le pouvoir », note Chafik Saïed, pro‑fesseur de droit et doyen honoraire de la Faculté de droit et des scien‑ces politiques de Tunis

Un deuxième obstacle tient à ce que l’armée tend à « essayer de préserver son autonomie ». Une volonté d’indépendance qui « peut cacher une ambition politique », avertit Droz‑Vincent. Car entre ci‑vils et militaires, l’enjeu peut porter sur le pouvoir de décider du contenu de l’éducation militaire, de la taille de l’armée, de l’octroi des promo‑tions et, surtout, de l’organisation et de la direction du ministère de la Défense.

Et le politologue de souligner que le contrôle démocratique de l’armée implique d’intégrer au sein de ce ministère un grand nombre de civils ayant une formation militaire adéquate « pour éviter que des dé-cisions centrales sur les questions politiques soient du seul ressort de la hiérarchie militaire » et que les hommes en treillis « fassent bloc autour d’une chaîne de commande-ment face aux civils »…

Une autre difficulté inhérente à ce processus tient aux « rapports civils/militaires » et au contrôle des seconds par les premiers. Mais ces relations « ne sont pas statiques »,

analyse Droz‑Vincent, qui estime que c’est « quelque chose de com-plexe qui se construit dans la durée et se valide dans les crises ».

Dans les pays démocratiques, ce contrôle – généralement inscrit dans la Constitution – est exercé par les pouvoirs exécutif et légis‑latif ainsi que par la société civile, rappelle Chafik Saïed.

Pour exercer leurs prérogatives, ces institutions – le Parlement, en particulier – doivent disposer d’in‑formations et d’une expertise mili‑taires. Or, selon Abdennour Benan‑tar, cela fait défaut dans les pays arabes et c’est ce qui explique la proposition de l’armée tunisienne de placer auprès des principales institutions étatiques des experts militaires recrutés parmi ses offi‑ciers à la retraite.

Dans les trois pays arabes qui ont fait leur révolution, l’armée n’est pas logée à la même enseigne. L’ar‑mée tunisienne « petite, était tenue à l’écart » par le pouvoir en place, explique Droz‑Vincent. En égypte, « plus massive, elle est marginali-sée par le régime qui devient poli-cier ». Quant à la Libye, le pouvoir « a détruit l’armée, qui a éclaté avec le soulèvement ».

Dans d’autres pays (Bahreïn, Sy‑rie, Yémen, Irak, etc.), le pouvoir politique s’efforce d’introduire ses

réseaux au sein de l’armée. Et ces différences ne sont pas sans im‑portance pour Droz‑Vincent. En effet, « le passé autoritaire pèse et marque une armée. Les modalités présentes sont structurées par le passé ».

Une armée fait toujours peser des risques sur son peuple, estime Jean‑François Coustillière, ancien militaire reconverti dans le conseil. Car, ce « corps particulier, dé-tenteur de la violence légitime, et ayant le sens de la continuité de l’état et du pays » peut devenir un « état dans l’état ». Et l’institution militaire peut « dériver en s’arro-geant un pouvoir que personne ne lui a confié »…Frein à la dictature. Pour minimi‑ser ces risques et faire d’une armée « un frein à la dictature et un fac-teur favorisant la transition démo-cratique », Coustillière recomman‑de de « dégager » les militaires de la corruption, de « les écarter fer-mement de la décision politique », de favoriser les échanges militaires avec l’étranger, et de « promouvoir la soumission des militaires aux lois nationales et internationales ».

De toutes les armées de la région, celle de Tunisie paraît la mieux pla‑cée pour réussir sa mutation et aider à faire aboutir le processus de dé‑mocratisation, explique Jean‑Fran‑çois Coustillière : « Elle n’a jamais été inféodée à un régime. Elle a une attitude – refus de tirer sur les mani-festants – unique parmi les pays de la rive sud de la Méditerranée. Elle n’a pas de rôle politique, ni d’in-térêts économiques. Son personnel est l’un des mieux formés. Elle n’est pas corrompue et constitue l’exem-ple d’une armée républicaine, au service de la nation beaucoup plus que du pouvoir… »

Et Coustillière de conclure sur un dernier atout majeur tunisien : « C’est le seul pays arabe à dis-poser d’un Institut de défense na-tionale, qui permet une meilleure connaissance mutuelle entre mili-taires et civils. » n

Pour éviter les pillages, un soldat monte la garde devant l’école primaire Claude‑Bernard, dans le centre de Tunis.

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En s’efforçant d’afficher l’om‑niprésence de leur petit émi‑rat du Golfe, aussi bien sur la

scène régionale qu’internationale, les dirigeants du Qatar ne se ren‑dent pas compte de ce que cela leur coûtera à l’avenir. Auraient‑ils oublié que leur superficie natio‑nale ne dépasse pas 11 500 kilo‑mètres carrés, et que les Qatariens de souche ne représentent que 20 % d’une population de 1,7 mil‑lion d’habitants ? Un chiffre qui avait fait dire à l’ancien émir des émirats arabes unis (EAU), cheikh

Zayed al‑Nahyane, que « la tota‑lité des Qatariens ne remplit même pas les hôtels du Caire »…

Aujourd’hui, le Qatar ne veut plus se contenter de rayonner à travers sa fameuse chaîne télévi‑sée Al‑Jazeera. Il va maintenant jusqu’à s’ingérer dans les affaires internes de nombreux pays arabes. Ainsi de l’Arabie Saoudite, toute première cible de leur chaîne il y a quelques années. Non contente de donner des leçons au pays le plus influent du Conseil de coopération du Golfe (CCG), Al‑Jazeera avait

critiqué la politique extérieure saoudienne, ainsi que la gouver‑nance du royaume… Un com‑portement provocateur qui avait fortement irrité Riyad et son chef de la diplomatie, le prince Saoud al‑Fayçal. Le même qui, en marge d’une réunion aux Nations unies avec ses homologues, avait ironisé sur le cas de son envahissant voi‑sin, le qualifiant d’« états‑Unis du Qatar »…

Il faut dire que les dirigeants qa‑tariens revendiquent un rôle déter‑minant dans la révolution tunisien‑

L’émirat joue à cash-cashLe minuscule émirat, qui ne cache pas ses sympathies islamistes, a misé sur sa puissancefinancière pour s’imposer parmi les grands acteurs internationaux. Un grain de sable qui irrite… Par Pierre faUchart

28 I arabies Novembre 2011

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affaires internes de nombreux pays arabes

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ne. Ils se veulent incontournables dans la chute du régime de Kad‑hafi en Libye, espèrent mettre fin au monopole du parti Baas en Sy‑rie, et ne se privent pas de déstabi‑liser l’Algérie… Et ils consacrent une importante partie du budget de l’état à financer les forces qu’ils « parrainent » dans ces pays, is‑sues de l’Organisation internatio‑nale des Frères musulmans…

Le petit émirat gazier espère bien recueillir les fruits de son implica‑tion politique et financière – voire militaire, comme c’est le cas en Li‑bye. Mais, il doit composer avec le fait que ses alliés islamistes ne sont pas seuls sur le terrain, et avec bien d’autres courants plus influents qui refusent son ingérence… Message à Damas. Cette folie des grandeurs qui semble frapper les responsables qatariens les a même poussés à dépêcher à Damas le prince héritier, porteur d’un mes‑sage à l’intention du président syrien, Bachar al‑Assad. Ainsi Doha se disait‑elle prête à sauver le régime, à seule condition que ce dernier accepte de former un nou‑veau gouvernement où les Frères musulmans occuperaient 40 % des ministères, avec trois portefeuilles de souveraineté. Une proposition à laquelle le chef de l’état syrien n’a pas même cru bon de répondre, se levant aussitôt pour signifier la fin d’une rencontre qui n’aura pas duré plus de quinze minutes…

Cette politique extérieure s’est répétée à Alger, lors d’une visite de l’émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa al‑Thani, en mai 2011. Ce dernier avait alors conseillé au président Bouteflika de soutenir le Conseil national de transition (CNT) en Libye avant qu’il ne soit trop tard. Et la réponse du chef de l’état algérien avait été directe et ferme : « L’Algérie s’est‑elle un jour mêlée des affaires internes d’un des pays du Golfe ? Alors pourquoi être venu de si loin pour tenter de se positionner dans no‑tre Maghreb ? » L’émir a réagi en

ordonnant de refuser aux Algé‑riens toute demande de visa. Une riposte qui a bien sûr provoqué la colère d’Alger, l’un des proches conseillers d’Abdelaziz Bouteflika appelant même à donner une leçon à ce micro‑émirat pas plus grand que la wilaya d’Illizi ; sans dé‑mocratie ni partis politiques, sans Parlement ni Constitution, qui se targue d’un fonds souverain de quelque 70 milliards de dollars et de projets « gadgets » comme l’or‑ganisation de la Coupe du monde de football en 2022.

En se mêlant tous azimuts aux af‑faires internes des pays arabes, les Qatariens commencent à se faire détester. Et leur ton arrogant tend à devenir insupportable. Ce qui est dangereux pour un pays qui, le cas échéant, ne ferait pas le poids d’un point de vue militaire…

Les dirigeants du Qatar se trom‑pent lourdement s’ils s’estiment éternellement protégés par des « parrains » qui dictent leurs initia‑tives, voire leurs actes d’ingérence. C’est d’ailleurs ce qu’a laissé en‑tendre l’un des ministres présents

lors de la dernière réunion de la Ligue arabe au Caire, le 13 sep‑tembre dernier.

Cela n’empêche pas les Qata‑riens de montrer presque chaque jour que leur pays est en passe de devenir une « mini‑puissance ». Ainsi annoncent‑ils régulièrement l’entrée prochaine de leur fonds souverain – la Qatar Investment Authority (QIA) – dans le capital de certains des plus grands grou‑pes internationaux. Après que le français Areva n’a pas donné suite, c’est maintenant EADS qui est sollicité pour le rachat de la moitié des 15 % de parts mises en vente par le groupe allemand Daimler

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Propriété de la famille régnante al-thani, la chaîne de télévision qatarienne a souvent servi de relais aux critiques du gouvernement al

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L’émir du Qatar, cheikh hamad ben Khalifa al‑thani, dans son palais de Doha.

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dans cette entreprise européenne d’aéronautique et de défense. Une fois encore, après que les Français ont montré leurs réticences malgré les relations privilégiées qui préva‑lent entre Paris et Doha.

De la même façon, le Qatar lais‑se entendre qu’il compte prendre des participations dans des établis‑sements bancaires ou des groupes industriels publics issus de pays de la zone euro qui sont confrontés à des difficultés financières (Grèce, Portugal). Cependant, les Euro‑péens restent méfiants à l’égard de cet appétit vorace des Qatariens.

Et que dire de cette initiative visant à totalement restructurer l’économie libyenne ? Comme si ce pays ne disposait ni de cadres ni d’experts en la matière… Le Qa‑tar a même été encore plus loin en affirmant à ses interlocuteurs à Tri‑poli que ses forces armées étaient prêtes à encadrer l’armée libyenne. C’est sans parler des contrats que les sociétés qatariennes comptent bien décrocher dans le domaine des hydrocarbures. Doha a ainsi déjà fait savoir au président du CNT, Mustapha Abdeljalil, qu’elle

était prête à exporter en Libye tout son savoir‑faire pour explorer et gérer la production de champs ga‑ziers jusque‑là inexploitables.

Le Qatar a, en outre, proposé d’aider à la constitution du nou‑veau gouvernement en se char‑geant de convaincre les islamistes – qu’il soutient militairement et fi‑nancièrement – de faciliter la tâche d’un CNT qui éprouve d’énormes difficultés à faire émerger le pre‑mier pouvoir exécutif post‑révo‑lution. Un choix controversé. Enfin, que penser de l’attribution de la Cou‑pe du monde 2022 de football au Qatar ? Un choix pour le moins controversé dans la mesure où ce pays n’est pas démocratique et n’apporte pas toutes les garanties d’une organisation sans faille… D’aucuns se demandent même comment la Fédération internatio‑nale de football (Fifa) a pu octroyer ce privilège à un état dépourvu de toute tradition sportive et dont l’équipe nationale s’affiche au… 113e rang mondial ! Surtout que ce régime autoritaire où la famille régnante a la mainmise sur toutes

les richesses du pays n’est pas sûr d’être encore au pouvoir en 2022… D’autant que si le taux de croissan‑ce économique se maintient actuel‑lement autour de 16 %, les prévi‑sions ne l’annoncent plus qu’à 7 % en 2012. Et c’est sans prendre en compte une éventuelle propagation des protestations sociales qui ont envahi le monde arabe. Ce que les dirigeants qatariens ont tenté d’en‑diguer il y a quelques semaines en augmentant les salaires de 40 %. Et quid en cas de guerre régionale op‑posant le grand voisin iranien aux états‑Unis et à leurs alliés ?

Il reste que les explications offi‑cielles n’ont convaincu personne. Notamment celles du Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, cheikh Hamad ben Jas‑sem ben Jabr al‑Thani. Le même qui affirme que le Qatar est un « pays ouvert » qui accepte les critiques « à condition qu’elles soient objectives ». Le même qui précise que l’organisation de la Coupe du monde tient à une vision stratégique à long terme : « Nous réfléchissons dès aujourd’hui au monde de l’après‑pétrole… » n

30 I arabies Novembre 2011

monDiaL 2022La stupéfiante

désignation du Qatar comme pays organisateur de la

Coupe du monde de football a fait naître

des soupçons de corruption

Signe de son poids grandissant, le Qatar a accueilli une réunion du groupe de contact sur la Libye, à Doha, le 13 avril dernier.

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Lors d’une conférence de p r e s s e q u ’ i l a t e n u e l e 15 septembre dernier, Sabah

al‑Saadi, député et membre du comité d’éthique, s’est attaqué avec virulence au système du Pre‑

mier ministre, Nouri al‑Maliki. Il l’estime en effet gangrené par la corruption et par les campagnes d’élimination de tous ceux qui le contestent… Dernière victime en date, le journaliste Hadi al‑Mahdi,

assassiné le 8 septembre 2011par des tueurs à gages, après qu’il eut critiqué les injustices quotidien‑nes que subit le peuple irakien de la part de l’Administration Al‑Maliki.

Toujours sur la case départ Depuis l’avènement du gouvernement de Nouri al‑Maliki, le 21 décembre 2010, rien ne semble avancer au plan politique ni au niveau socio‑économique. Et la corruption est toujours là…

assassinaTLe journaliste Hadi al‑Mahdi a été tué

le 8 septembre dernier après avoir

durement critiqué le gouvernement

Par Samir SOBH

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Les accusations d’Al‑Saadi ont ainsi permis de rouvrir le dos‑sier sensible des exécutions arbi‑traires de militaires, professeurs d’université et même médecins. Cette intervention, qui a d’autant plus de poids qu’elle émane d’un supposé allié d’Al‑Maliki, fai‑sait suite à la démission du juge Abdel Rahim al‑Uqali, ancien président de la Commission pour l’intégrité (CPI). De quoi enve‑nimer une situation qui s’avère déjà complexe, tendue et à deux doigts de l’explosion. Surtout lorsqu’on sait que, depuis son oc‑cupation par les forces de la coa‑lition en 2003 et la mise en place de ses gouvernements successifs, l’Irak figure en bonne place dans le classement des états les plus corrompus de la planète, s’affi‑chant au 4e rang mondial – et au 2e parmi les pays arabes…Convoitises. Plus de dix mois après la formation du gouverne‑ment d’Al‑Maliki, trois postes clés sont toujours vacants et atti‑sent la convoitise des principales factions qui ont la majorité au sein du Parlement : la Coalition de l’état de droit, dirigée par le Premier ministre lui‑même ; le Mouvement national irakien mené par Iyad Allaoui, majoritai‑rement composé de laïcs ; et l’Al‑liance nationale irakienne qui re‑groupe les différentes formations politiques chiites.

Jusqu’à présent, aucun accord n’a abouti quant aux nominations des ministres de la Défense, de l’Intérieur et de la Sécurité na‑tionale. Et la réticence de Nouri al‑Maliki à valider la nomination d’Allaoui au poste de président du Conseil de stratégie politique – conformément au compromis issu des négociations d’Erbil, en novembre 2010 – constitue un autre frein au retour de la stabilité dans un contexte déjà explosif…

Car le différend qui oppose toujours Al‑Maliki aux Kurdes concernant le vote éventuel de la

nouvelle loi sur le pétrole pour‑rait engendrer une guerre civile. Le 11 septembre dernier, Mas‑soud Barzani, président de la région autonome du Kurdistan, a ainsi appelé les ministres du gouvernement fédéral et les dé‑putés kurdes auprès du Parlement irakien à se réunir à Erbil dès le lendemain pour trouver une issue à cette impasse.

Mais les experts politiques y voient surtout une riposte à Al‑Maliki et une façon de faire pression sur ce dernier pour qu’il retire sa loi sur le pétrole et le gaz

naturel. Car Barzani menace tout simplement de boycotter le gou‑vernement central. Les Kurdes estiment en effet que le Pre‑

Depuis son occupa‑tion par les forces de la coalition, en 2003, l’Irak figure au 4e rang mondial des états les plus cor‑rompus Co

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Nouri al‑Maliki (à d.) et l’ancien Premier ministre Iyad Allaoui (à g.) lors d’une réunion à Bagdad.

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mier ministre a réussi à faire pas‑ser cette loi – qui doit encore être adoptée par le Parlement – sans concertation avec les autorités de la région autonome du Kurdistan. En outre, ils n’ont guère appré‑cié l’attitude du gouvernement central de Bagdad et son évident manque de considération à leur égard. Les Kurdes sont surtout conscients qu’Al‑Maliki pourrait aisément faire valider cette loi par le Parlement, dans la mesure où ils n’y disposent plus que de 53 sièges.

Outre cette loi très controver‑sée qui doit définir une régle‑mentation du secteur des hydro‑carbures et repenser le partage de production entre Bagdad et les

provinces, les conflits tournent autour de la liste des revendica‑tions kurdes, notamment l’arti‑cle 140 de la Constitution, relatif au gouvernorat de Kirkouk. Très riche en pétrole, cette région est l’objet d’une lutte de pouvoir acharnée entre les trois ethnies : arabe, kurde et turkmène.Cocktail explosif. Les escarmou‑ches entre Barzani et Al‑Ma‑liki ont aussi ouvert la voie à un rapprochement entre le premier et Iyad Allaoui. Du fait de son faible nombre de voix, ce proba‑ble nouveau front politique aura cependant du mal à faire rejeter cette loi par le Parlement.

Parmi les autres ingrédients de ce cocktail explosif, on note aussi

le retour des attentats. Certains ont visé les régions ainsi que les personnalités et mosquées sunni‑tes. D’autres ont pris pour cibles les pèlerins chiites se rendant sur les Lieux saints du chiisme, à Nadjaf et Kerbala. Les uns ac‑cusent l’organisation militaire chiite Faylak Badr (la « Division Badr ») et les services spéciaux de Nouri al‑Maliki, les autres pensent à Al‑Qaïda et sa cam‑pagne de terreur tous azimuts. Cette instabilité des conditions de sécurité prouve en tout cas que l’état irakien est loin d’avoir ré‑glé ses problèmes et que le pays n’a toujours pas bougé de la case départ… En dépit de sa garantie d’une majorité relative au sein du

34 I Arabies Novembre 2011

aTTenTaTsLes actes terroris‑tes ont aussi bien

visé les régions que les personnalités et mosquées sunnites

ou les pèlerins chiites se rendant à

nadjaf et kerbala

Le 15 août dernier, un attentat à l’explosif a détruit l’église assyrienne orthodoxe de Mar Afram, dans le centre de Kirkouk.

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Parlement, le pouvoir de Nouri al‑Maliki est plus que jamais en‑travé, voire déstabilisé.

Ainsi la Marjaïa – la référence religieuse chiite – de Nadjaf ne cesse de critiquer le gouverne‑ment de Bagdad. Les ayatollahs Ali Sistani, Mohammed Saïd al‑Hakim, Bachir al‑Najafi et Mohamed Ishak al‑Fayad ont uni leurs voix pour mettre en garde Al‑Maliki et son gouvernement contre la généralisation de la cor‑ruption et le non‑respect des en‑gagements pris envers le peuple irakien au plan des réformes. Les quatre ayatollahs se sont même accordés pour refuser de recevoir tous les responsables politiques de Bagdad, ministres et députés confondus. Cette position af‑faiblit sans doute encore plus le pouvoir du Premier ministre

Surtout que les accusations d’Al‑Maliki et du vice‑Pre‑mier ministre pour les Affaires pétrolières, Hussein Shahres‑tani, concernant la validation de contrats fictifs viennent obscurcir la performance du gouvernement, mettant là encore le Premier mi‑nistre dans une situation délicate.Contrats fictifs. Au mois d’août dernier, la démission forcée du ministre de l’électricité, Raad Chalal al‑Ani, avait ouvert la boîte de Pandore. Ce membre de la coalition d’Iyad Allaoui était accusé d’avoir ratifié des contrats fictifs d’un montant d’environ 2 milliards de dollars. Outre qu’il a nié ces accusations, Al‑Ani a révélé l’existence de « mafias » connues, formées de députés et d’hommes politiques proches du cercle du pouvoir – une allusion claire à Al‑Maliki – qui auraient exercé des pressions sur lui après avoir reçu de grosses sommes d’argent de parties étrangères, qu’Al‑Ani n’a pas pour autant désignées…

Un dossier où revient égale‑ment le nom de Hussein Shahres‑tani, qui occupait le poste de mi‑

nistre du Pétrole dans le premier gouvernement d’Al‑Maliki. Il aurait lui aussi signé des contrats fictifs ces deux dernières années dans le cadre de trois appels d’of‑fres pétroliers et gaziers… Si l’on y ajoute la découverte d’un détournement de fonds de plus de 40 milliards de dollars durant les cinq dernières années, tous les ingrédients sont réunis pour favo‑riser une explosion.

Le facteur iranien – ou plutôt l’influence grandissante de l’Iran en Irak – ne facilite pas les cho‑ses, tout comme l’instauration d’un état démocratique où toutes les parties seraient représentées. L’accord tacite entre Téhéran et Washington, qui garantit leurs intérêts stratégiques respectifs en Irak, confirme la mainmise du pouvoir chiite dirigé jusque‑là par Nouri al‑Maliki. Cela malgré l’opposition entre les états‑Unis et la République islamique d’Iran

sur le dossier nucléaire. Car si le bras de fer perdure entre les deux pays depuis des années, il n’a ja‑mais semblé près d’aboutir à une confrontation directe ou indirecte sur le terrain.

L’influence de l’Iran se remar‑que aussi à travers le rôle joué par le général Qassem Sulei‑mani, chef des Brigades al‑Qods iraniennes. à Bagdad, on répète qu’il est un « fabricant de rois » et le principal artisan qui se ca‑che derrière les décisions prises par le gouvernement Al‑Maliki. Le même Suleimani qui gère aussi les dossiers de la Syrie, de l’Afghanistan et de Gaza.

Toujours est‑il que les échan‑ges commerciaux entre les deux pays s’affichaient à quelque 20 milliards de dollars à la fin d’août 2011, alors qu’ils n’avaient pas dépassé 6 milliards en 2010… Les sociétés et hommes d’affaires iraniens sont désormais privi‑

Novembre 2011 Arabies I 35

cHiffResà la fin du mois d’août dernier, les échanges commer‑ciaux avec l’iran étaient de 20 mil‑liards de dollars, contre seulement 6 milliards en 2010

Dans le sillage de l’ayatollah Ali Sistani, la Marjaïa de Nadjaf a stigmatisé les dérives du gouvernement.

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BaRZaniPrésident de la

région autonome du kurdistan, Mas‑

soud Barzani fait pression pour que

soit abandonnée la nouvelle loi sur le

pétrole

Exploité par un consortium mené par l’italien ENI, le champ pétrolier de Zubair, dans le sud de l’Irak, produit 227 000 barils de brut par jour.

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légiés quand il s’agit d’investir dans certains secteurs de l’éco‑nomie irakienne. Cette influence iranienne suscite évidemment de vives contestations au sein du mouvement sunnite, aussi bien chez les Arabes que chez les Kur‑des ou les Turkmènes.

Dans un pays dont les réserves prouvées en pétrole dépassent celles de l’Arabie Saoudite, le secteur des hydrocarbures de‑meure le principal enjeu. Et ses réserves de gaz naturel, inexploi‑tées jusqu’à présent, devraient propulser l’Irak parmi les pre‑miers producteurs et exportateurs mondiaux dans les 15 prochaines années…

Le quatrième appel d’offres international montre bien toute

l’importance de ces richesses. En effet, pas moins de 12 sites sont proposés : 7 pour le gaz et 5 pour le pétrole. Au début de septembre dernier, 46 compagnies interna‑tionales étaient préqualifiées, les sociétés japonaises (9) étant les plus nombreuses devant les rus‑ses (6) et les chinoises (4).Milliards de dollars. Cela devrait développer l’industrie hydrocar‑bures, augmenter la production pétrolière et lancer le secteur gazier. Soit des milliards de dol‑lars qui viendraient compenser le déficit budgétaire, créer de nou‑veaux emplois dans les régions exploitées et initier des projets intégrés parallèles.

Lors du forum de promotion, récemment organisé à Amman

(Jordanie), le ministre du Pétrole, Abdel Karim al‑Luaybi, a indiqué que l’Irak espérait produire 3 mil‑lions de barils de brut par jour à la fin de 2011 et exporter 2,5 millions de barils quotidiens en 2012.

L’Irak compte ainsi retrouver sa place au sein de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) en tant qu’acteur princi‑pal du marché pétrolier interna‑tional. Cela après plus de trois décennies de mise à l’écart du fait des sanctions de l’ONU, des guerres successives, et du recul des investissements.

La bataille pour cette nouvelle manne aurait déjà commencé en‑tre Al‑Luaybi et un Shahrestani qui, pour la première fois, n’est plus seul à trancher… n

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MAROCLa Bourse accuse le coupLa rentrée a apporté un vent de pessimisme sur le marché des valeurs mobilières au Maroc. Les deux indices de la Bourse de Casablanca ont chuté de près de 10 %, accompagnés d’un ef‑fondrement de la capitalisation estimé à plusieurs milliards de dirhams…

Ce qui a bien sûr engendré la réticence des investisseurs, la‑quelle s’est traduite par de faibles volumes de transactions durant le mois de septembre dernier. Mais ce qui inquiète le plus les analys‑tes financiers, c’est le manque de liquidités qui se ressent chaque jour davantage sur le marché. à tel point que le gouverneur de Bank Al‑Maghrib – la banque

centrale du Maroc –, Abdellatif Jouahri, a pointé du doigt les res‑ponsables. De fait, Karim Hajji, directeur de la Bourse des valeurs de Casablanca (BVC), s’est senti obligé de s’exprimer en affirmant au quotidien L’économiste que le marché local avait du mal à gérer les baisses. Pour y remédier, il préconise l’utilisation de la vente à découvert via le prêt emprunt de titres. Mais les analystes finan‑ciers misent plutôt sur des priva‑tisations à travers la Bourse pour améliorer le flux de liquidités et ainsi anticiper d’éventuelles for‑tes baisses des indices et transac‑tions dans les prochains mois. Un choix qui est lié aux nombreuses incertitudes qui planent actuelle‑ment sur les marchés financiers européens.

ALGÉRIE Les chiffres du FMI Les experts du Fonds monétai‑re international (FMI) estiment que les recettes enregistrées ces deux dernières années ont per‑mis au Trésor public algérien d’épargner quelque 300 mil‑liards de dollars… Cela sous la forme de réserves de change, de bons du Trésor américain, de bons européens et de fonds spéciaux, dont le plus impor‑tant est celui de la régulation des recettes. Ce montant est censé absorber un déficit bud‑gétaire estimé à 25,6 % du PIB, comme prévu dans le projet de la loi de finances 2012, pour les

cinq prochaines années. Cette aisance doit en effet permettre de couvrir le déficit au plan fi‑nancier sur le court terme – tant que le baril de pétrole ne des‑cend pas sous les 80 dollars et que le cours actuel du gaz natu‑rel se maintient.

Cependant, 35 % des dé‑penses prévues dans le bud‑get 2012 sont destinées aux sa‑laires, ce qui constitue un gros point négatif dans la mesure où ces sommes sont bloquées hors investissements. Toute‑fois, en termes de croissance économique, dans une région où cette dernière est la moins forte (environ 4 % ces derniè‑

res années), le FMI note que l’Algérie figure parmi les pays en développement bien qu’elle confirme sa faible croissance (3,3 % en 2010) et que les prévisions soient à la baisse (2,9 % en 2011, 3,3 % en 2012).

LIBYELes débiteurs sous pressionLa National Oil Corporation (NOC) libyenne s’apprête à ré‑clamer les arriérés dus par les compagnies pétrolières étran‑gères opérant en Libye sous le régime du colonel Kadhafi. Voilà qui constitue une premiè‑re mise à l’épreuve des rela‑tions avec les partenaires d’an‑tan pour le nouveau pouvoir en place. Mais les négociations s’annoncent rudes, puisqu’on parle dans un premier temps d’un montant de plus de 6 mil‑liards de dollars…

Soucieux d’anticiper au mieux la récupération des fonds qui lui sont dus, le nou‑veau pouvoir a dressé une liste des compagnies pétro‑lières débitrices où figurent notamment ConocoPhillips et ExxonMobil (états‑Unis), BP (Grande‑Bretagne), Eni (Italie) et Vitol (Suisse). Les Libyens refusent toutefois d’intégrer des garanties d’avenir dans les négociations, considérant que

ces arriérés sont des droits lé‑gitimes. Et ils ont annoncé que, dorénavant, toute nouvelle opé‑ration serait sujette à un appel d’offres transparent. La NOC entend aussi mettre fin au gel des recettes pétrolières imposé par l’ONU depuis le mois de mars 2011 en guise de sanc‑tions contre la Jamahiriya.

ÉGYPTE De nouveaux horizonsOutre le retour d’indices po‑sitifs dans le tourisme, les né‑gociations sont bien avancées avec l’Arabie Saoudite et les émirats arabes unis pour ob‑tenir quelque 7 milliards de dollars en aides. Parallèlement, Le Caire a concrétisé avec la Banque africaine de déve‑loppement (BAD) un prêt de 500 millions de dollars à taux préférentiel. Et les discussions continuent avec le FMI pour un prêt de 3,2 milliards de dol‑lars. Ce que le gouvernement

égyptien s’était pourtant refusé à faire au mois de juin dernier. Ce revirement est survenu après que les réserves de change sont passées de 25 milliards de dol‑lars (août 2011) à seulement 24 milliards en septembre.

Avec un déficit budgétaire qui devrait approcher 8,6 % du PIB global au 30 juin 2012, l’égyp‑te étudie par ailleurs les moyens de réduire les emprunts auprès des banques locales et mise sur une relance des Investissements directs étrangers (IDE) dans les prochains mois, surtout après les prochaines élections législa‑tives et présidentielle.

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AVOIR mAnAgeRs

mAROCAnas sefrioui Le président du premier groupe immobilier marocain, Addoha, vient de consolider les positions de l’entreprise dans le domaine de la cimenterie. Ce qu’il a ré‑cemment démontré en invitant la presse, les élus et les auto‑rités locales à visiter les deux

cimenteries jumelles qui lui ont coûté environ 5 milliards de di‑rhams et qui emploient près de 500 personnes.

Déjà entièrement opération‑nelle depuis le mois de dé‑cembre 2010, la première est située à Lahlaf M’zab, dans la région de Ben Ahmed. Quant à la seconde, elle est localisée à Ighrem Laalam, près de Beni Mellal. et devrait démarrer sa production d’ici à deux mois.

Pour réaliser ce projet sous l’étiquette des Ciments de l’Atlas (Cimat) – entité qui n’a aucune relation d’actionnariat avec Addoha –, Anas Sefrioui a levé des fonds auprès des ban‑ques marocaines à hauteur de 60 % du budget, le reste prove‑nant des fonds propres du grou‑pe. On notera que 15 % de cet investissement (900 millions de dirhams) ont été consacrés aux questions d’environnement.

Figurant parmi les invités, le ministre marocain de l’Indus‑trie, du Commerce et des Nou‑velles Technologies, Ahmed Réda Chami, a tenu à préciser qu’il s’agit là du premier opé‑rateur 100 % marocain dans ce secteur.

TUnIsIe Abdelwahab ben Ayed Le P‑DG de Poulina Group Holding (PGH) est le premier chef d’entreprise tunisien à dé‑cider de reprendre ses activités en Libye, avant même la fin des hostilités sur le terrain. C’est à cette fin qu’Abdelwahab ben Ayed a dépêché sur place, de‑puis le début de septembre der‑nier, des équipes d’ingénieurs, de techniciens et d’ouvriers spécialisés. Ils sont chargés d’évaluer les opérations né‑cessaires à un redémarrage, dans les plus brefs délais, des activités de Poulina en Libye. Pour sa part, Ben Ayed affirme avoir pris toutes les disposi‑tions et garanties suffisantes pour assurer la sécurité de ses collaborateurs sur le terrain. Deux usines du groupe ont déjà repris leur activité depuis la mi‑octobre dernier. Il s’agit de celles qui sont spécialisées dans la production d’aliments pour bétail et d’emballages (alvéo‑les). Les autres – qui devraient redémarrer progressivement dans le courant des prochaines

semaines – concernent les sec‑teurs de l’agro‑alimentaire, des matériaux de construction, des plastiques, de l’acier, des tra‑vaux publics et du transport.

Abdelwahab ben Ayed a par ailleurs estimé que, sans le conflit en Libye, les filia‑les de Poulina Group Holding auraient présenté en 2010 un chiffre d’affaires consolidé de 6 %, qui auraient dû grimper à 10 % en 2011.

LIBAnmohammed safadi

Le ministre libanais des Finan‑ces est confronté à une rude épreuve, aussi bien face à la po‑pulation qu’aux syndicats et au Parlement. Cette situation fait suite à la présentation de son budget pour 2012. Mohammed Safadi compte en effet réduire le déficit public en augmentant de 2 % la TVA – qui passerait ainsi de 10 à 12 % – et en intro‑duisant de nouvelles taxes, ce qui risque de créer une tension sociale dans une conjoncture économique déjà assez mo‑rose depuis quelques mois. Le ministre se retrouve ainsi en opposition avec une bonne part de ses collègues au sein du gou‑vernement.

Mais Safadi n’en démord pas, affirmant que cela devrait faire tomber le déficit public de 9,4 à 8,1 % du PIB. Ce dernier serait malgré tout en augmentation de 14,3 % par rapport à 2011 pour atteindre 4,4 milliards de dollars. Ce budget prévoit aussi l’introduction d’une nouvelle taxe immobilière (3 %) sur les ventes ainsi qu’une hausse de l’impôt sur les intérêts issus de l’épargne bancaire (de 5 à 8 %). Safadi ne s’est pas montré plus convaincant en avançant une baisse du ratio de la dette au PIB, qui s’afficherait à 132 % au lieu des 135 % actuels. Mais en se maintenant à près de 4 milliards de dollars en 2012, cette dette publique accusera tout de même une hausse de 24 millions.

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ALgÉRIemohamed Laksaci Dans son dernier rapport sur la conjoncture de la Banque centrale d’Algérie (BCA) au premier semes‑tre 2011, le gouverneur de l’institution financière n’a pas manqué de pointer du doigt les fragilités de l’éco‑nomie algérienne. Cette intervention traditionnelle de Mohamed Laksaci a aussi été l’occasion de lancer quelques avertis‑sements discrets sur les conséquences de la politi‑que macroéconomique du gouvernement. Alors que la majorité des indices mo‑nétaires et financiers – ba‑lance des paiements, posi‑tion financière extérieure, recettes d’exportation des hydrocarbures – est dans le vert, la BCA s’inquiète cependant de certaines in‑certitudes qui se sont am‑plifiées depuis le début de l’été. Cela est notamment lié à l’évolution des prix du pétrole. Mohamed Lak‑saci s’est aussi alarmé de l’augmentation inquiétante des importations. En forte hausse (+ 15,7 %), ces der‑nières ont atteint 22,3 mil‑liards de dollars sur le pre‑mier semestre de l’exercice en cours. Le gouverneur de la BCA a également donné des informations concer‑nant le bon état des paie‑ments extérieurs sur les six premiers mois de 2011. Laksaci relève toutefois le solde négatif des mouve‑ments de capitaux, pour partie lié aux transferts plus importants des associés de Sonatrach et à une baisse des revenus sur les inves‑tissements à l’étranger.

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pÉTROLesonatrach revient en LibyeEn dépit des relations tendues entre le Conseil national de transition (CNT) et l’Algérie – qui avait officiellement affi‑ché sa neutralité lors du conflit avant d’accueillir sur son terri‑toire quelques membres de la famille du colonel Kadhafi –, les relations économiques ne semblent pas compromises.

Pour preuve, la déclaration du ministre algérien du Pétrole

et des Mines, Youcef Yousfi, qui a tenu à préciser que son pays n’a aucun problème concernant l’avenir de ses investissements en Libye. Et de confier que la compagnie nationale pétrolière Sonatrach attend le calme pour revenir dans ce pays voisin via sa filiale Sonatrach Interna‑tional Petroleum Exploration & Production (Sipex).

Active en Libye depuis plu‑sieurs années, la Sonatrach a vu ses efforts couronnés de succès dans un pays qui correspond très bien à sa stratégie d’inter‑nationalisation en amont.

Sur le bloc 65, situé dans le bassin de Ghadamès, la com‑pagnie algérienne – qui détient l’intégralité du permis d’explo‑ration après avoir remporté un appel d’offres international – a découvert deux nouvelles sour‑ces, en 2009 puis en 2010.

HÔTeLLeRIeAtlas Hospitality en famille Avec l’inauguration à Agadir

de l’Atlas Marina Beach Sui‑tes & Spa, au début d’octobre dernier, le groupe Atlas Hospi‑tality – filiale hôtelière de Royal Air Maroc – s’est positionné sur le segment de l’hôtelle‑rie familiale. Situé en pleine marina, ce nouveau complexe compte 187 logements : 62 stu‑dios de 50 m2, 52 appartements de 75 m2, 54 appartements de 100 m2 et 19 autres de 120 m2.

Réalisé en partenariat avec la société Marina Agadir, ce projet a nécessité un investissement de 120 millions de dirhams. Il vise, en premier lieu, une nou‑velle clientèle de nationaux à fort pouvoir d’achat et des tou‑ristes venant du Moyen‑Orient.

L’ouverture de ce nouvel éta‑blissement porte la capacité hô‑telière d’Agadir – capitale de la région de Sousse – à 3 000 lits. Elle fait surtout d’Atlas Hospi‑tality le leader sur la destination avec 4 établissements, dont 3 sur le bord de mer. D’ici à la fin de 2012, ce groupe qui poursuit son expansion devrait totaliser 20 unités hôtelières, réparties à travers tout le pays. Avec désor‑mais 8 000 lits, son offre d’hé‑bergement progresse de 15 % par rapport à 2010.

à l’horizon 2015, Atlas Hospitality vise un parc de 38 hôtels de différents stan‑dings, et compte se développer sur le segment de l’hôtellerie « moyenne gamme » avec un programme de 16 nouveaux hôtels 3 étoiles dans différentes villes du royaume.

InVesTIssemenTsLe Koweït cible la zone euroLe fonds souverain de l’état du Koweït, dont les avoirs avoisi‑nent 300 milliards de dollars, vise les marchés de la zone euro. Actuellement confron‑tés à d’importantes difficultés, ces derniers vont être bientôt contraints de brader groupes et

sociétés pour surmonter leurs crises. Une belle occasion pour la Kuwait Investment Autho‑rity (KIA), dont les intermé‑diaires sillonnent ces derniers temps les capitales européennes qui sont dans l’œil du cyclone : Athènes (Grèce), Lisbonne (Portugal), Rome (Italie), Madrid (Espagne) et même Bruxelles (Belgique). Déjà dé‑tentrice de parts dans des entre‑prises renommées (Citigroup, Daimler Benz, Banque agri‑cole de Chine), la KIA laisse entendre qu’elle ne craint pas d’investir dans les marchés fi‑nanciers européens après s’être livrée à un minutieux calcul des risques potentiels.

De sources proches de la KIA, on apprend que l’Italie notamment « ouvre l’appétit » de ce fonds souverain depuis que son gouvernement a en‑trepris de mettre sur le marché des bons du Trésor. Ces mêmes sources indiquent que les ban‑ques européennes, confrontées

à de grosses difficultés de tré‑sorerie et soumises à une obli‑gation de recapitalisation, sont des cibles privilégiées.

TRAnspORTsAlstom livre en AlgérieLe fleuron de l’industrie fran‑çaise du transport a livré les deux rames de tramway Citadis destinées à la ligne de Constan‑tine. Cette arrivée en Algérie

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des premières rames fabriquées par Alstom ouvre la voie à la li‑vraison des 27 tramways Cita‑dis commandés par l’Entreprise du Métro d’Alger (EMA).

Outre ces rames Citadis qui sont conçues pour transporter environ 6 000 passagers par heure dans chaque sens, Alstom fournit le système d’exploita‑tion (équipements énergétiques, caténaires, signalisation fer‑roviaire, télécommunications) et les équipements de l’atelier garage.

Ce projet d’infrastructu‑res ferroviaires s’inscrit dans le programme de soutien à la relance économique, mis en place par les autorités algérien‑nes. à la fois structurant pour l’agglomération de Constantine et symbolique pour le pays, ce tramway constitue un véritable outil de développement et de modernisation pour les prin‑cipales agglomérations d’Al‑gérie. Il doit permettre à un nombre croissant de passagers de voyager dans les meilleures conditions, tout en préservant au mieux l’environnement. C’est du moins l’engagement pris par Alstom Transport, qui place les thèmes de l’innovation et du développement durable au cœur de sa gamme de produits, services et équipements.

Rappelons que le tramway a été réintroduit à Alger au mois de mai 2011, cinquante ans après que ce mode de transport a disparu d’Algérie.

sOCIÉTÉs AVOIR

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fet accordé plus d’avantages aux patrons et hauts fonctionnaires qu’aux petits salariés… Le salai‑re minimum sera certes revalorisé de 20 % à partir de janvier 2012, mais ce n’est pas ce geste qui per‑

Les résultats de la 14e tripar‑tite qui réunissait gouverne‑ment, syndicats et patronat

n’ont pas convaincu tous les par‑tenaires sociaux. écartés de cette rencontre organisée à Alger, les

29 et 30 septembre dernier, dans la résidence Djenane al‑Mithaq, les syndicats autonomes ont dé‑noncé « une mascarade ». Alors qu’elle était censée soulager le front social, cette réunion a en ef‑

mascarade Non conviés à parti-ciper, les syndicats autonomes ont dé-

noncé les modalités et les conclusions de la 14e tripartite

Priorité aux entreprises ! Outre quelque 200 nouvelles mesures économiques qui satisfont surtout le patronat, le salaire minimum a été revalorisé de 20 %. Largement insuffisant pour des syndicats qui ne veulent pas en rester là…Par Akima BEDOUANI

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mettra aux bas salaires de sortir de la précarité… Et rien ne dit que les augmentations de salaires répétées qu’impose le gouverne‑ment lui permettront de répondre aux attentes des travailleurs, tou‑tes catégories socioprofessionnel‑les confondues. De leur côté, les patrons estiment qu’il vaudrait mieux se soucier de développer la productivité, afin de garantir la croissance et la production de richesse dans le pays.

Il reste que, avec cette revalori‑sation de 20 %, le salaire national minimum garanti (SNMG) passe‑ra de 15 000 à 18 000 dinars algé‑riens (180 euros). Selon les syn‑dicats, cette mesure n’aura pas un grand effet sur l’amélioration du pouvoir d’achat des petits salai‑res. Et les travailleurs, qui espé‑raient obtenir une meilleure reva‑lorisation, sont déçus. Alors que l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) tablait sur une hausse du salaire minimum à hau‑teur de 20 000 dinars (200 euros), elle a finalement dû se contenter d’une petite augmentation de 3 000 dinars…Organisations syndicales. Dès lors, les responsables des dif‑férentes organisations syndica‑les autonomes n’ont pas tardé à se faire entendre. Selon eux, ce sont les gros salaires des cadres et hauts fonctionnaires, indexés sur le SNMG, qui sont les plus avantagés par cette nouvelle donne. Ainsi, un cadre supérieur de la fonction publique qui per‑çoit un salaire de 200 000 dinars (2 000 euros) touchera 40 000 di‑nars (400 euros) supplémentai‑res… Pour permettre aux petits salariés de sortir de la pauvreté et de la précarité, ces syndicats ré‑clament donc un salaire minimum à 30 000 dinars (300 euros).

Pour répondre au mécontente‑ment des syndicalistes et salariés, le Premier ministre, Ahmed Ou‑yahia a rétorqué : « Même si nous avions décidé d’une augmenta‑

tion de salaire de 10 000 dinars, les travailleurs ne seraient pas satisfaits, trouveraient à redire et demanderaient plus ». Et de préciser que cette revalorisation du salaire minimum coûterait 75 milliards de dinars à l’état…

En ce qui concerne la révision des pensions de retraite – que l’UGTA souhaiterait voir aug‑mentées de 40 % –, Ahmed Ouya‑hia a affirmé que le dossier avait été confié à un groupe de travail. Mais les patrons algériens, solli‑cités pour soutenir le financement des caisses de retraite en reversant 1 % de leurs charges patronales, ont d’ores et déjà rejeté cette pro‑position…

« L’Algérie a le taux d’imposi‑tion le plus bas de la Méditerra‑née et il n’est pas interdit d’en‑visager plus de pression fiscale

pour sauver ce régime de retraite par une solidarité intergénéra‑tionnelle. Mais il faut alors agir sur d’autres leviers. Il n’est pas normal qu’un pays comme l’Al‑gérie, où les deux tiers de la po‑pulation ont moins de 30 ans, ne trouve pas assez de cotisants pour ceux qui partent à la retrai‑te », déplore Nassim Kerdjouj, un des vice‑présidents du Forum

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entre hausse des salaires et subventions des produits de base, la rente pétrolière algérienne est lourdement ponctionnée fi

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Les étudiants de l’école nationale supérieure de statistique et d’économie appliquée (ENSSEA) manifestent à Alger.

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REVENDICATIONSL’UGTA a demandé

une révision de l’impôt sur le

revenu global et du mode de calcul du salaire minimum.

En vain…

des chefs d’entreprise (FCE), dans une déclaration au quotidien algérien Al‑Watan.

En attendant, retraités et bas salaires doivent composer avec une réalité économique plus que délicate. La hausse des cours des matières premières sur les mar‑chés internationaux a des réper‑cussions sur les prix des produits de première nécessité en Algérie. Et la situation devient très inquié‑tante pour le pouvoir d’achat des ménages les plus démunis, qui ont souvent du mal à boucler les fins de mois…

Depuis les émeutes de jan‑vier 2011, le gouvernement al‑gérien a certes accordé des sub‑ventions exceptionnelles aux produits de large consommation

(huile, sucre, farine, etc.). Cepen‑dant, l’inflation ne cesse de croî‑tre, rendant quasiment inopéran‑tes toutes les mesures prises par le gouvernement afin d’atténuer la crise du pouvoir d’achat. Et, bien sûr, l’augmentation des sa‑laires ne suit pas.Propositions rejetées. L’UGTA a donc demandé d’autres mesures pour améliorer le pouvoir d’achat des citoyens, parmi lesquelles la révision de l’impôt sur le revenu global (IRG) et l’abrogation de l’article 87 bis, relatif au mode de calcul du salaire minimum en Algérie.

Ces propositions ont toutefois été rejetées par les organisations patronales. Ces dernières justi‑fient leur position par la volonté

de « préserver la viabilité des en‑treprises »…

Quant au gouvernement, il dé‑fend sa politique en évoquant le triste état des finances publiques. Le déficit engendré par l’augmen‑tation de la masse salariale ainsi que par les différents investisse‑ments publics coûte cher à l’État.

Mais certains opérateurs éco‑nomiques mettent plutôt en cause la grogne sociale, qui a conduit le gouvernement à accorder aux jeunes des milliards de dollars pour la création de micro‑entre‑prises, dont la grande majorité est vouée à l’échec.

De l’avis des économistes, cet argent aurait dû renforcer les investissements déjà consentis, notamment dans la construction

Comme partout, la rigueur est de mise et les commerçants ressentent eux aussi la baisse du pouvoir d’achat…

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d’infrastructures et le développe‑ment d’une politique industrielle viable et durable, ce qui garanti‑rait la production de richesse et la création d’emplois…

Malgré leur solide représentation au sein des travailleurs dans les dif‑férents secteurs d’activités, les syn‑dicalistes affiliés aux organisations autonomes n’ont pas été invités à participer à la tripartite. Ce qui ne signifie pas pour autant que « les syndicats autonomes ne sont pas reconnus ou qu’ils sont ignorés », selon le Premier ministre. Alors pourquoi n’ont‑ils pas été associés aux discussions de la tripartie ?

Président du parti politique Ahd 54, Ali Fawzi Rebaine a déclaré à Al‑Watan que cette 14e tripartite est « une pièce de théâtre ». Selon lui, ce sont bien les syndicats autonomes qui sont les plus représentatifs chez les salariés. Leurs responsables sont d’ailleurs unanimes : l’UGTA est avant tout le partenaire du gou‑vernement et du patronat…Problèmes en suspens. Hormis la revalorisation du salaire mi‑nimum, il faut bien reconnaître que les problèmes liés au monde du travail ont été écartés ou res‑tent en suspens. Ce qui fait dire aux syndicats autonomes que les résultats de cette tripartite ne reflètent pas les attentes des tra‑vailleurs algériens.

Coordinateur du Conseil na‑tional autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest), Meziane Meriane considère que cette tri‑partite était une réunion « gou‑vernement/gouvernement ».

Quant au por te‑parole du Conseil des lycées d’Algérie (CLA), Idir Achour, il estime que le gouvernement « a discuté et débattu avec lui‑même ». Et d’expliquer : « la tripartite s’est déroulée comme on s’y attendait. Elle a totalement répondu aux attentes de l’un de ses partenai‑res : le patronat »…

Le fait est que les organisations patronales sont satisfaites des ré‑sultats. à commencer par la prin‑cipale d’entre elles, le FCE, qui se réjouit de ce « nouveau climat, plus à l’écoute des problémati‑ques de l’entreprise ». Ce que son président, Réda Hamiani, estime totalement justifié : « La masse salariale de l’entreprise ne peut évoluer sans une corrélation avec la production et la productivité. » D’autant plus que « la richesse créée est susceptible d’être redis‑tribuée », conclut‑il.

Certaines revendications pa‑tronales propres à soulager les entreprises ont ainsi été validées, dont l’allégement des procédures de remboursement de la TVA à l’exportation ou le rééchelonne‑ment des dettes fiscales. Mais le patronat a encore d’autres mesu‑res incitatives en attente : baisse de l’IRG, assouplissement des

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alors que l’UgTa espérait une hausse du salaire minimum de 20 000 dinars, elle a dû se contenter de 3 000 dinars

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procédures de crédits réservés aux investissements ou encore indisponibilité des assiettes fon‑cières. Des éléments que les pouvoirs publics pourraient être amenés à prendre en charge afin de favoriser la pérennisation des entreprises algériennes.

Dans un communiqué officiel, la tripartite a toutefois exclu le recours à une baisse de l’IRG. De l’avis du Premier ministre, cet IRG constitue une source

L’état a débloqué des milliards de dollars pour développer des micro‑entreprises souvent vouées à l’échec.

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majeure de revenu fiscal pour le pays.

Sur le thème des finances pu‑bliques, Ahmed Ouyahia souli‑gne « une importante résurgence du déficit budgétaire du fait de la politique salariale de l’État, de l’importance des transferts sociaux ainsi que du volume des investissements publics ».

Pour ne pas aggraver l’ampleur du déficit, le Premier ministre préconise d’éviter toute nouvel‑le mesure, comme la baisse de l’IRG… D’autant que cela n’ap‑porterait aucun résultat concret selon le ministre des Finances, Karim Djoudi.

Ce dernier explique en effet que cet impôt, qui représente 20 à 25 % de la fiscalité ordinaire, ne touche pas l’ensemble des salariés et ne constitue donc pas un facteur dé‑terminant dans le niveau du pou‑voir d’achat des citoyens… Il va

même plus loin en considérant que les mesures prises en faveur des entreprises sont également « des mesures de considération sociale » qui ont pour vocation de créer et de préserver des emplois… Pour Karim Djoudi, le pouvoir d’achat n’est pas seulement tributaire du SNMG, mais également du main‑tien et de la stabilité de l’emploi.colère et frustration. Toujours est‑il que la colère gronde dans les rangs des travailleurs. Près de 500 syndi‑calistes de la zone industrielle de Rouïba se sont ainsi rassemblés devant le siège local de l’UGTA – qui était partie prenante de la tripartite – pour protester contre les modalités et les résultats d’une réunion qui leur laisse une grande frustration…

Un mécontentement qui doit aussi beaucoup au rejet de la re‑vendication d’une baisse de l’IRG. Les syndicalistes pointent du doigt

le fait que les salariés sont seuls à devoir s’acquitter d’un impôt dont sont exemptées les autres catégo‑ries socioprofessionnelles, comme les commerçants.

Aujourd’hui, l’Algérie se trou‑ve donc à la croisée des chemins. Avec deux directions possibles : continuer à augmenter les salai‑res et à subventionner les pro‑duits de première nécessité grâce à la rente pétrolière, ou miser sur un véritable programme de développement économique qui puisse générer croissance durable et richesse nationale.

Dans la plupart des pays du monde, l’heure est maintenant à la rigueur. Et malgré ses réserves de change, l’Algérie n’est pas à l’abri d’un gros déficit budgétai‑re. Plus que jamais, le pays a donc besoin de s’appuyer sur les bras de ses travailleurs pour construire sur des bases solides. n

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TVa entre autres mesu-res, les entreprises

ont obtenu un allégement des

procédures de rem-boursement de la

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L’inflation galopante qui frappe les produits de première nécessité rend inopérantes la plupart des mesures d’urgence…

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GESTIONNAIRE DE VENTEFuji Film (Maroc)Quali�cation: diplôme dans une discipline pertinenteExperience: 2+ ans d’expérienceSkills: Expérience dans le domaine des ventes Bonnes aptitudes de communication Bonne maîtrise de l’anglais et du français

Job Reference:JB1720898

ASSISTANTE ADMINISTRATIVECovidien (Maroc)Quali�cation: diplôme dans une discipline pertinenteExperience: 2+ ans d’expérienceSkills: Bonne organisation Expérience dans l'organisation d'événements Bonne compétence analytique

Job Reference:JB1718089

DIRECTEUR DE VENTES JOTUN (Maroc)Quali�cation: diplôme dans une discipline pertinenteExperience: 4-6 ans d’expérienceSkills: Capacité de persuasion Bonne capacité à négocier Bonne maîtrise de l’anglais, de l’arabe et du français

Job Reference:JB1715068

CHEF DE PLANNIFICATION D’ACTIVITÉSNew Talents (Maroc)Quali�cation: Diplôme en finance/économie/ adm.Experience: 5+ ans d’expérienceSkills: Bonne compétence analytique Bonne capacité à négocier Bonne maîtrise de l’informatique

Job Reference:JB1718897

RESSOURCES HUMAINESThe Nielsen Company (Maroc)Quali�cation:Diplôme en gestion des ressources humaines Experience: 8+ ans d’expérienceSkills: Expérience en marketing/ ventes Bonne compétence de communication Bonne maîtrise de l’anglais

Job Reference:JB1720473

ASSOCIÉ DE CLIENTÈLEThe Nielsen Company (Maroc)Quali�cation: Diplôme en gestion Expserience: 3-4 ans d’expérienceSkills: Bonne maîtrise de l’anglais et du français Bonne compétences en leadership Bonne capacité à négocier chantier.

Job Reference:JB1720815

TECHNICO- COMMERCIAL Sarsar (Maroc)Quali�cation: Diplôme dans une discipline applicable Experience: 2+ ans d’expérienceSkills: Bonne élocution Anglais souhaité Esprit d’initiative et sens des responsabilités

Job Reference:JB1720445

FACILITY MANAGER Mahola Maroc (Maroc)Quali�cation: Degree in De Formation Supérieure Experience: 5+ ans d’expérienceSkills: Bonne maîtrise de la langue française Bon communiquant Un excellent négociateur

Job Reference:JB1720916

DIRECTEUR MARKETING ET FIDÉLISATION Michael Page (Maroc)Quali�cation: Diplôme dans MakerkingExperience: 10+ ans d’expérienceSkills: Une excellente vision stratégique du marché à l'aise avec les outils de gestion de la relation client Vous êtes opérationnel(e) et pragmatique

Job Reference:JB1719080

INGÉNIEUR PROJET Cosumar (Maroc)Quali�cation: Diplôme en génie mécaniqueExperience: 0-2 ans d’expérienceSkills: Forte capacité de négociation Une forte coordination des compétences Forte compétences en planification

Job Reference:JB1717532

RESSOURCES HUMAINESConvergence conseil (Maroc) Quali�cation: Degré dans les ressources humainesExperience: 5+ ans d’expérienceSkills: Sens relationnel Implication Rigorisme

Job Reference:JB1716211

TECHNICO- COMMERCIALConvergence conseil (Maroc)Quali�cation: Diplôme dans une discipline juridiqueExperience: 3-5+ ans d’expérienceSkills: Sens du contact Sens de communication Sens d’organisation

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48 I Arabies Novembre 2011

Suite logique, réactions et in‑terrogations se sont multipliées. Pourquoi un tel revirement de situation ? Quelle crédibilité res‑te‑t‑il au gouvernement El‑Fassi après ce cafouillage ? Les par‑lementaires sont‑ils réellement surchargés par l’examen des lois électorales ?

De son côté, le chef du gouver‑nement, Abbas el‑Fassi, a souli‑gné que « le retrait soudain du projet de la loi de finances 2012 n’entravera pas le fonctionne‑ment des services publics ».

Le Parlement marocain adop‑tera‑t‑il ou non la loi de fi‑nances 2012 sous l’actuel

gouvernement ? C’est la ques‑tion que se posent de nombreux politiques et élus de l’opposition ainsi que les médias. Il faut dire que son retrait in extremis, jus‑tement le jour où elle devait être débattue au Parlement, en a laissé perplexes plus d’un. Mais que se passe‑t‑il donc au sein de l’exé‑cutif marocain ?

Après avoir été adopté par le Conseil des ministres, le 21 sep‑

tembre dernier, le projet de loi de finances 2012 a été subitement retiré des bureaux de la Chambre des représentants quelques heu‑res plus tard… Le retrait soudain de ce texte, qui devait être discuté en séance plénière le lendemain de sa validation, a évidemment suscité la stupéfaction générale.

Pour justifier cette décision, le ministre de la Communication et porte‑parole du gouvernement, Khalid Naciri, a mis en avant lors d’un point de presse « la surchar‑ge de l’ordre du jour ».

exception La nouvelle consti-

tution autorise le gouvernement à prendre, par dé-faut, les décrets

nécessaires au bon fonctionnement des

services publics

Loi de finances 2012 : le grand videAdopté en Conseil des ministres puis retiré le jour même où il devait être débattu au Parlement, le texte qui doit fixer le prochain budget de l’état soulève des polémiques à quelques semaines des législatives…Par Akima BEDOUANI

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En effet, en cas de retard dans l’examen du texte, l’alinéa 3 de l’article 76 de la nouvelle Consti‑tution autorise le gouvernement à prendre, par défaut, les décrets nécessaires au bon fonctionne‑ment des services publics. La Constitution fixe au 22 octo‑bre 2012 le délai de rigueur pour le dépôt dudit projet de loi.

Après avoir adopté une nouvel‑le Constitution qui marquait un tournant historique dans le pro‑cessus d’édification démocrati‑que, le Maroc s’apprête à former dans les prochains mois un nou‑veau gouvernement. Ce dernier sera constitué selon les résultats des élections législatives antici‑pées de ce 25 novembre…Impératifs économiques. Dans le même temps, l’actuel gouverne‑ment est censé mettre en œuvre une loi de finances qui doit être établie en tenant compte des im‑pératifs économiques mondiaux (crises d’endettement, inflation, hausse des prix des matières pre‑mières). Mais cette loi doit aussi composer avec le contexte interne (projets d’investissements natio‑naux et étrangers, revendications sociales et plan d’austérité). Dès lors, il paraît très difficile de trou‑ver l’équilibre entre limitation des dépenses et maintien de la croissance…

Le projet de la loi de finan‑ces 2012 a été établi sur les bases suivantes : un taux de croissance de 4,8 %, un taux d’inflation de 2 % et un baril de pétrole à 100 dollars. Il compose aussi avec un déficit des finances pu‑bliques qui devrait atteindre 4 % du produit intérieur brut (PIB), selon les prévisions du ministre de l’économie et des Finances, Salaheddine Mezouar. Et le grand argentier du royaume chérifien se veut optimiste : « La conjonc‑ture difficile n’a pas empêché le gouvernement de continuer à appuyer l’investissement puis‑que 759 milliards de dirhams ont

été alloués, entre 2008 et 2011, au soutien des secteurs sociaux et à la consolidation du pouvoir d’achat à travers des augmen‑tations de salaires de l’ordre de 32 milliards dans le cadre du dialogue social, la mobilisation de 150 milliards au titre de sub‑ventions des produits de base et 10 milliards au bénéfice des po‑pulations démunies. »

Pourtant, le Maroc est bien plongé dans l’austérité. C’est d’ailleurs pourquoi le projet de la loi de finances 2012 prévoit une augmentation des taxes, notam‑ment sur les hauts revenus des particuliers et sur le bénéfice des entreprises.

On note également que parmi les principales directives du futur budget de l’état – dont héritera le prochain gouvernement – figurent aussi une diminution substantielle des dépenses gouvernementales de fonctionnement (personnel, logistique, frais de déplacements

et d’hébergement, communica‑tion, approvisionnement) ainsi que la réduction du coût des com‑pensations sociales à hauteur de 3 %. Car ces dernières représen‑tent une très lourde charge pour les finances publiques. Estimées à 45 milliards de dirhams à la fin de 2011, elles doivent absolument être revues à la baisse si l’on veut éviter un déficit critique pour les prochaines années.

La cacophonie liée au sort de cette future loi de finances a finale‑ment amené le gouvernement à

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Loi de finances 2012 : le grand vide

croissance à 4,8 %, inflation à 2 % et baril de pétrole à 100 dollars. telles sont les bases sur lesquelles a été établi le projet de loi de finances 2012 ch

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Les députés marocains attendent l’arrivée au Parlement du roi Mohammed VI.

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soutienentre 2008 et 2011,

795 milliards de dirhams ont été

alloués aux sec-teurs sociaux et à

la consolidation du pouvoir d’achat

constituer, en toute hâte, une com‑mission qui doit statuer sur son de‑venir. Présidée par Abbas el‑Fassi, cette nouvelle institution rassemble les différentes sensibilités politi‑ques de la majorité : Salaheddine Mezouar (ministre de l’économie et des Finances), Driss Lachgar (ministre chargé des relations avec le Parlement) et Mohand Laenser (ministre d’état).

Selon la presse nationale ma‑rocaine, les membres de la com‑mission s’opposent à la promul‑gation de cette loi et ont du mal à trouver un accord. Les différen‑tes sources évoquent deux scéna‑rios : d’une part, laisser au futur gouvernement le soin d’élaborer ce texte ; d’autre part, adopter une loi « minimaliste » en attendant le prochain pouvoir exécutif…

Après trois sessions, cette com‑mission n’a toujours pas pris la moindre décision. Pour faire taire les critiques, Khalid Naciri a tou‑tefois indiqué que, conformément à l’article 176 de la Constitution, le Conseil de gouvernement avait

adopté, le 28 septembre dernier, un décret relatif à ce projet de loi de finances et à son retrait des tra‑vaux de la session extraordinaire de la Chambre des représentants.Sauver les apparences. « Que les choses soient claires, certains parlaient de retrait du projet de loi de finances. Le fait est que le pro‑jet n’a été retiré qu’aujourd’hui [28 septembre], après adoption du projet de décret 2‑11‑570 mo‑difiant le 2‑11‑540, promulgué le 9 septembre dernier, relatif à la réunion d’une session extraordi‑naire du Parlement », a déclaré le porte‑parole du gouvernement.

Certains voient cependant dans l’adoption tardive de ce décret une façon de sauver les apparen‑ces pour Abbas el‑Fassi et son administration…

Malgré le flou qui entoure en‑core l’échéancier du projet de loi de finances 2012, certains points concernant le fonds de solidarité nationale ont été clarifiés.

Depuis la grogne sociale du printemps 2011, le gouvernement

marocain a pris des engagements pour améliorer le quotidien de la population la plus défavorisée. Marginalisée depuis longtemps, cette dernière vit dans des condi‑tions d’extrême pauvreté, plus particulièrement dans les zones rurales. Chômage, manque cru‑cial de logements et non‑acces‑sibilité à l’éducation sont des problèmes récurrents que vivent des centaines de milliers de Ma‑rocains…

Pour y remédier, les autorités publiques comptent créer, dans le cadre de ce projet, un fonds national de solidarité sociale. Il sera destiné au financement de programmes centrés sur le déve‑loppement rural, notamment dans les zones montagneuses. Ce fonds doit aussi assumer les dépenses relatives à la mise en œuvre et à la généralisation du Régime d’as‑sistance médicale pour les éco‑nomiquement démunis (Ramed) et au programme Tayssir, qui prévoit le versement mensuel de 100 dirhams par enfant scolarisé aux quelque 275 000 ménages concernés.

Pour atteindre cet objectif, il est question de réformer la caisse de compensation, qui coûte très cher à l’état. Car en subventionnant certains produits, comme les ma‑tières premières, le ministère de l’économie fait le jeu de la classe moyenne au détriment des plus démunis. Les pouvoirs publics doivent donc mieux cibler leurs aides en s’assurant de les octroyer aux plus nécessiteux. économies et austérité obligent…

Pour financer ce fonds de soli‑darité, le projet envisage donc de taxer les plus hauts revenus, mais aussi les produits et services. Les acteurs économiques qui font des bénéfices devront également met‑tre la main à la poche.

De leur côté , les banques contribueraient à hauteur de 450 millions de dirhams tandis que 100 millions proviendraient

Salaheddine Mezouar, ministre de l’économie et des Finances, lors de la réunion du G7, le 10 septembre dernier.

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du secteur des assurances. Quant aux télécoms, elles redistribue‑raient 1 % de leur volume d’ac‑tivités à ce fonds de solidarité nationale… « Cette loi a pris en compte la concrétisation des orientations royales qui visent à accorder un intérêt particulier à la solidarité sociale et au déve‑loppement humain », a souligné le ministre de Tutelle.

Il reste que ce retrait soudain du projet de loi a provoqué un tollé de l’opposition, qui reproche au gouvernement d’avoir improvisé.

Chef de file du Parti de la jus‑tice et du développement (PJD), Lahcen Daoudi a adressé au président de la commission des finances de la Chambre des re‑présentants un courrier visant à organiser « une réunion avec le chef du gouvernement pour dis‑cuter de l’improvisation dans la gestion de la présentation du pro‑jet de budget au Parlement ».

Le même Daoudi qui souligne dans une déclaration au quotiden Aujourd’hui Le Maroc que « la période de transition que traverse le Maroc exige du gouvernement l’adoption de la loi de finances sous son mandat. Le Maroc ne peut rester sans loi de finances pendant des mois »… Une base de travail. Concernant le rapport entre la loi de finances et la formation du prochain gou‑vernement, Lahcen Daoudi ex‑plique que cette loi « constituera une base de travail pour le pro‑chain gouvernement, qui pourra la modifier à travers des lois rectificatives ». Le leader du PJD reproche aussi à Abbas el‑Fassi de ne pas suivre les recommanda‑tions de la nouvelle Constitution qui consistent à tenir une réunion par mois pour rendre compte des actions du gouvernement devant les parlementaires. Ce qui n’a ja‑mais été le cas…

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Le programme tayssir prévoit le versement mensuel de 100 dirhams par enfant scolarisé. une mesure qui concerne quelque 275 000 ménages

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Quant au Rassemblement na‑tional des indépendants (RNI), dont le président n’est autre que le ministre de l’économie et des Finances, Salaheddine Mezouar, il a précisé que la date des élec‑tions législatives anticipées – ce 25 novembre – ne laisse pas as‑sez de marge de manœuvres à son candidat pour qu’il s’implique dans la campagne électorale.

De son côté, le président du groupe parlementaire de la Mou‑vance populaire, Mohamed

La ville fortifiée de Taroudant, à 80 kilomètres d’Agadir, fait partie des régions rurales qui restent à développer.

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Moubdi, a estimé, dans les pages du quotidien Aujourd’hui Le Ma‑roc que « le prochain gouverne‑ment pourra toujours avoir accès au projet de loi et le modifier à sa guise ».

Enfin, le Parti authenticité et modernité (PAM) va plus loin. Il considère que le retrait du pro‑jet de loi de finances 2012 est un danger, dans la mesure où il pourrait être utilisé pour deman‑der le report des élections… En temps normal, ce contretemps ne devrait pas influer sur le scrutin.Mais avec le contexte particulier de ces législatives anticipées, il semble difficile de dissocier les deux événements…

Certains proposent donc de valider le projet de loi de finan‑ces 2012 en suivant une procédu‑re accélérée. Cela afin d’éviter de parasiter la campagne électorale.

D’autres préfèrent évoquer la conjoncture économique très dif‑ficile et le calendrier électoral très chargé, qui compliquent le travail des parlementaires et des politi‑ques. La seule certitude, dans ce

contexte difficile de restriction budgétaire assortie d’un impéra‑tif maintien de la croissance, est que toute décision devra être mû‑rement réfléchie pour éviter une banqueroute nationale…Projets d’envergure. Dès lors, quelle stratégie adopter ? Les économistes mettent en avant la nécessité d’une politique qui reposerait sur le soutien de la croissance, l’augmentation des investissements et la réduction des dépenses. Mais au vu de son défi‑cit budgétaire, le Maroc ne semble guère en mesure d’appliquer un tel plan… Et dans le même temps, le pays ne peut se permettre d’avancer sans ce nouveau texte. Ce serait d’autant plus négatif que le Maroc s’est engagé sur des pro‑jets d’envergure (plan Maroc Vert, énergie solaire, etc.) auprès des institutions internationales.

Pour relancer la croissance, il faudrait instaurer des réformes profondes et non sectorielles. Car il ne s’agit plus ici de sau‑ver les apparences à travers des programmes provisoires de sou‑

tien (Ramed, Tayssir, etc.), mais bien de prévoir une stratégie qui puisse permettre de rétablir un équilibre entre développement socio‑économique et maîtrise du déficit budgétaire. Faute de quoi le pays risque de plonger dans une austérité de longue durée.

En définitive, ce projet de loi de finances 2012 est sans doute plus important que les ambitions élec‑torales des uns et des autres. Ce que les politiques et élus savent mieux que quiconque.

Dans toutes les démocraties, la majorité au pouvoir conduit sa politique à travers les directi‑ves de la loi de finances, qui fixe le budget de l’état. Et peut‑être l’insuffisance des ressources ma‑rocaines reflète‑t‑elle la difficulté du royaume chérifien à projeter des réformes politiques…

Quoi qu’il en soit, le prochain gouvernement va hériter d’un très lourd fardeau : celui de devoir as‑surer la croissance économique malgré un déficit budgétaire im‑portant et une grogne sociale en‑core à l’état de veille. n

RessouRces Pour financer son

fonds de solidarité, le maroc va taxer

les plus hauts reve-nus et les bénéfices

des entreprises, mais aussi les pro-

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Grâce au programme Tayssir, qui encourage la scolarisation, il n’est plus rare de voir des collégiennes dans les rues, comme ici, à Fès.

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atténuant les charges des en-treprises. » Cette mesure est d’autant plus intéressante que le gouvernement lance, en parallèle, des fonds d’investissement desti‑nés à financer le développement des entreprises. Depuis deux ans, le secteur financier entre ainsi comme actionnaire dans le ca‑

Su r t o u s l e s s e g m e n t s – agro‑alimentaire, équipe‑ments automobiles, indus‑

trie pharmaceutique, BTP – la compétitivité des firmes algérien‑nes ne cesse de croître dans un marché en plein développement. Pour une bonne part, le crédit en revient à une politique gouverne‑

mentale volontariste qui les en‑courage à se montrer dynamiques pour mieux développer l’écono‑mie nationale. Ce que souligne Abderrahmane Benkhalfa, délé‑gué général de l’Association des banques et des établissements financiers (Abef) : « L’état sou-tient l’activité de production en

SOUTIEN L’état a lancé des fonds d’investis-sement spéciaux pour financer le

développement des entreprises

Des sociétés XXLPar leur solidité et leurs belles performances, certaines entreprises algériennes, publiques ou privées, contribuent à relancer l’économie nationale. Focus…

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Par Véronique NArAmeN

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Novembre 2011 Arabies I 55

pital de nombreuses entreprises, via ces sociétés de capital‑inves‑tissement.

Dans ce pays aux ressources considérables, il était indispensa‑ble d’intensifier la croissance en s’appuyant sur le tissu entrepre‑neurial et en stimulant son essor. L’état a alors investi dans les in‑frastructures pour assurer la via‑bilité économique. Il a densifié le réseau des routes et voies ferrées, développé le transport aérien. à tel point que les nombreux aéro‑ports concurrencent aujourd’hui en Algérie les déplacements ter‑restres !Fibre optique. Les autoroutes de la communication n’ont pas da‑vantage été négligées. Le territoi‑re a ainsi été raccordé in extenso en fibre optique et relié au reste du monde par voie satellitaire. Des confins du Sahara jusqu’aux montagnes du Djurdjura, l’entre‑preneur algérien peut désormais suivre ses affaires et transférer des données commerciales ou fi‑nancières en quelques clics.

Pour ses partenaires européens comme pour ceux de l’Afrique subsaharienne, l’Algérie est une plate‑forme d’entrée qui relie le Vieux Continent à l’Afrique. Cette position géostratégique est confortée par un investissement pérenne et massif de ceux qui contribuent le plus à la richesse du pays : les grands acteurs éco‑nomiques.

Certains sont si connus qu’à leur simple patronyme est aus‑sitôt associé l’entreprise ou le produit qui leur correspond : Haddad, Zetchi, Mehri, Othmani, Hasnaoui…

Mais outre ces géants du secteur privé, certains groupes industriels publics sont eux aussi passés à la postérité. Et la Sonatrach en est le leader incontesté.

Véritable locomotive économi‑que du pays, voire du continent, ce poids lourd du secteur pétro‑lier est incontournable. Son siè‑

ge, à Oran, renseigne d’ailleurs bien sur les capacités du titan : « Sonatrach est la plus impor-tante compagnie d’hydrocarbu-res en Algérie et en Afrique. Elle intervient dans l’exploration, la production, le transport par ca-nalisations, la transformation et la commercialisation des hydro-carbures et de leurs dérivés », peut‑on lire sur leur site.

La compagnie pétrolière peut notamment revendiquer plus de 56 milliards de dollars d’expor‑tations en 2010, ce qui la hisse au 12e rang du classement mon‑dial des plus importantes sociétés pétrolières. Sonatrach s’affiche également dans le peloton de tête des exportateurs de GNL (4e), de GPL (3e) et de gaz naturel (5e).

Nommé P‑DG en 2010, Nor‑dine Cherouati préside aux desti‑nées de cette entreprise publique

fondée en 1963. Autour de lui s’agrègent un réseau de filiales et de partenaires étrangers qui exploitent les énergies fossiles algériennes, notamment pour ali‑menter l’Europe (Espagne, Fran‑ce, Grande‑Bretagne) et la Corée du Sud.

Sonatrach s’implique aussi dans des projets de production et de transport d’hydrocarbures au Pérou ainsi qu’au Nigeria, où

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Algérie Télécom compte investir 80 milliards de dinars pour moder-niser et renforcer son réseau Té

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en mai dernier, Alger a inauguré le premier tronçon de son tramway, reliant Bordj el‑Kiffan à Bab ezzouar.

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56 I Arabies Novembre 2011

cEVITALL’empire de l’hom-me d’affaires Issad Rebrab revendique

une croissance annuelle de 50 %

depuis 1999

il opère via le Trans Saharan Gas Pipeline (TSGP) dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Ne‑pad, pour New Partnership for Africa’s Development). Ce gazo‑duc doit normalement acheminer le gaz nigérian vers les marchés européens en passant par le Niger et l’Algérie avant d’emprunter un conduit sous‑marin en Méditer‑ranée. Soit 4 200 kilomètres pour transporter 18 à 20 milliards de mètres cubes de gaz naturel…

La compagnie pétrolière al‑gérienne intervient également en égypte, aux côtés du groupe norvégien StatoilHydro, sur un projet de forage. Au Mali, elle est positionnée dans la recherche et l’exploitation, en joint venture avec ENI (Italie) et Baraka Petro‑leum Ltd (Australie).

La Sonatrach est tout aussi im‑pliquée en Europe, où elle pos‑sède, entre autres participations, 25 % de parts dans plusieurs centrales électriques au Portugal. Elle fournit aussi 1 milliard de

mètres cubes de gaz au marché français, via le terminal GNL de Montoir, en Bretagne. leader du générique. Autre fleu‑ron de l’économie nationale, Saïdal opère dans l’industrie pharmaceutique, où il est leader du marché des génériques pour les pathologies telles que le dia‑bète et l’hypertension artérielle. « Nous travaillons à la régula-tion de la production en assurant la disponibilité et l’accessibilité, aux prix les plus bas, de 180 mé-dicaments qui couvrent 20 classes thérapeutiques », souligne son P‑DG, Boumediène Derkaoui.

L’activité de l’opérateur phar‑maceutique est venti lée sur 13 sites de production et va pro‑chainement se redéployer avec 6 nouvelles unités, un centre neuf de recherche et développe‑ment (R & D) ainsi qu’un labora‑toire de bio‑équivalence. Autant d’ajouts qui viendront renforcer la capacité de production, avec l’objectif d’accroître une part de marché – actuellement fixée à

7 % – qui devrait couvrir le quart des besoins du pays en 2014.

Plus de 4 000 salariés, dont 1 300 cadres, travaillent pour ce donneur d’ordre dont le chiffre d’affaires a été de 11,5 milliards de dinars (160 millions de dol‑lars) en 2010.

Il y a également fort longtemps que le groupe industriel Cevital a pignon sur rue. Exactement qua‑rante ans, depuis 1971.

Capitaine de ce vaisseau indus‑triel, Issad Rebrab a commencé par prendre une participation dans une petite entreprise de mé‑tallerie. Le voilà aujourd’hui à la tête d’un empire dont la crois‑sance annuelle est de 50 % de‑puis 1999… à lui, l’agro‑indus‑trie, la distribution automobile, la construction, l’immobilier, la presse, le transport maritime, la fabrication de verre, la grande distribution…

Premier exportateur hors hy‑drocarbures du pays, Cevital a réalisé un chiffre d’affaires de 2 milliards de dollars en 2009 et

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Avec 56 milliards de dollars d’exportations en 2010, Sonatrach s’affiche au 12e rang mondial des compagnies pétrolières.

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SAïDALLe géant de l’indus-

trie pharmaceuti-que emploie plus de 4 000 salariés, dont

1 300 cadres

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Sur commande du gouvernement, le groupe Cosider a construit des milliers de kilomètres de routes et d’autoroutes.

compte pas moins de 12 000 col‑laborateurs. En tête de ses reve‑nus, l’agroalimentaire (60 % du chiffre d’affaires), qui fournit le marché national en produits de consommation de base, notam‑ment en huile, margarine et su‑cre.

Pour la partie automobile, on trouve Omar Rebrab, directeur général de Hyundai Motor Algé‑rie (HMA). Cette filiale de Cevi‑tal enregistre elle aussi de bons résultats avec 30 000 véhicules commercialisés en huit mois. HMA négocie à présent la repri‑se de la marque Fiat en Algérie. Aujourd’hui, c’est Malik, le fils Rebrab, qui a repris les comman‑des.stratégie nationale. Tout aussi incontournable est Algérie Télé‑com, principal artisan de la stra‑tégie nationale de généralisation des Technologies de l’information et de la communication (TIC). Arrivé depuis peu, le nouveau patron de cette société publique, El‑Hachemi Belhamdi, annonce un investissement de 80 milliards de dinars pour consolider et mo‑derniser le réseau. Soit 15 000 ki‑lomètres de fibre optique dernière génération pour proposer le ser‑vice triple play (téléphonie, In‑ternet haut débit et télévision nu‑mérique terrestre) au plus grand nombre d’abonnés.

La construction a elle aussi ses têtes de gondole, a fortiori avec le projet d’un million de nouveaux logements, programmé par l’état dans le cadre du plan quinquen‑nal 2009‑2014. Mobilart en fait partie. Cette entreprise familiale a acquis une réputation de qualité et de sérieux dans le métier en respectant les délais et en amélio‑rant la qualité des produits.

Professeur d’économie, Abdel‑latif Benachenhou revient sur les clés de cette belle réussite : « à partir de 1994, l’entreprise ga-gne de nombreux marchés dans la menuiserie industrielle en

équipant notamment les sièges de Sonatrach et du ministère des Af-faires étrangères. Pour conforter sa position, elle se lance dans la construction et réalise 1 500 lo-gements pour l’Office de promo-tion et de gestion immobilière (OPGI) d’Oran. Mobilart s’équi-pe valablement en matériels de tous types et dépense à cet effet 450 millions de dinars… »

Tout cela lui vaut notamment d’être à ce jour promoteur de Bahia Center, un complexe im‑mobilier de grand standing qui surplombe la baie d’Oran.

Le groupe Cosider intervient aussi dans le Bâtiment, les tra‑vaux publics et l’hydraulique (BTPH), où il occupe la première place en Algérie et la cinquième sur le continent. à son palmarès figurent des milliers de kilomè‑tres de routes, autoroutes, ga‑zoducs et oléoducs, mais aussi

des dizaines d’ouvrages d’art, des barrages hydrauliques, des aéroports ainsi que des dizaines de milliers de logements. On lui doit aussi la faculté des Sciences de l’information et de la com‑munication (SIC) à Hydra, deux sections du métro d’Alger et le transfert d’eau In Salah‑Taman‑rasset. Les entreprises algérien‑nes, lorsqu’elles s’en donnent les moyens, sont capables de fort belles réalisations. n

L’état a tellement développé le trans-port aérien que les nombreux aéroports concurrencent les déplacements terrestres aé

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audiovisuelouverture en algérie Selon le discours officiel des autorités algériennes, le sec‑teur de l’audiovisuel et des médias va connaître un boule‑versement dans les prochains mois. Le 4 septembre dernier, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a profité de la séan‑ce inaugurale du Conseil de la nation (Majlis al‑Oumma) pour annoncer « l’ouverture des médias lourds ainsi que la délivrance des agréments aux nouveaux titres de la presse écrite ».

Ouyahia a également pré‑cisé que, dans le cadre du pro‑chain code de l’information, les autorisations données aux journaux ne seront plus « sou‑mises au contrôle de l’ad‑ministration ou de la justice, mais plutôt à une autorité su‑périeure de la presse écrite qui sera instituée ».

Concernant la garantie de la liberté d’expression, le Premier ministre a souligné qu’« il n’y a plus de dispositions privati‑ves de liberté dans le projet de loi de l’information ».

En effet, à la suite des ré‑formes politiques annoncées par le président de la Républi‑que, Abdelaziz Bouteflika, en avril 2011, le Conseil des mi‑nistres a adopté le projet de loi organique relatif au secteur de l’information le 12 septembre dernier. Ce texte de loi prévoit l’ouverture du champ audiovi‑suel par le biais d’une conven‑tion entre une société algérien‑ne de droit privé et une autorité chargée de la régulation, qui doit être instaurée dans le ca‑dre de cette future loi.

Attendue depuis de nom‑breuses années, cette ouver‑ture des médias a été accueillie avec un grand soulagement par les partis politiques et la so‑ciété civile. La presse ne s’est d’ailleurs pas privée de mettre en avant les opportunités qui s’offrent aux professionnels des médias et aux investisseurs de promouvoir ce secteur si‑nistré.

Une programmation plus libre et plus variée, proche des attentes des Algériens, sera ainsi bientôt d’actualité. Jusqu’alors limités à la chaîne

unique (ENTV) et à ses « ju‑melles » (Canal Algérie et A3), les téléspectateurs algériens auront désormais le choix entre plusieurs chaînes thé‑matiques et généralistes. Une concurrence nouvelle qui de‑vrait favoriser l’amélioration de la qualité des programmes.

Selon des sources locales, des hommes d’affaires et pa‑trons de presse auraient déjà monté des projets d’investisse‑ment. Six candidats ont d’ores et déjà annoncé leur intention de lancer des chaînes de télé‑vision privées : isaad Rebrab (P‑DG du groupe privé Cevi‑tal, propriétaire du quotidien généraliste de langue française Liberté et actionnaire de Ber‑bère TV) ; Ali Haddad (P‑DG du groupe privé ETRHB, pro‑priétaire du quotidien Le Temps d’Algérie et de Dzaïr Web TV, lancée en août 2011) ; Djilali Mehri (P‑DG de Pepsi Algérie et partenaire du groupe Accor) ; Ali Fodil (directeur général du quotidien arabophone Echo‑rouk) ; Zahredine Smati (prési‑dent du conseil d’administra‑tion du quotidien Al‑Khabar)

et Omar Belhouchet (directeur de la publication du quotidien Al‑Watan).

Le conseil d’administration d’Al‑Watan a ainsi publié un communiqué pour annoncer le dépôt prochain d’une candi‑dature pour lancer une chaîne de télévision privée généraliste ainsi qu’une radio. L’objectif est « d’apporter du sang neuf dans le traitement de l’infor‑mation politique, économi‑que, sociale et culturelle ; des phénomènes sociaux ainsi que des spectacles, des fictions et du cinéma », précise le com‑muniqué. Quant à la mise en œuvre de ce projet, Al‑Watan a affirmé son intention de s’ap‑puyer sur des fonds propres et d’employer des compétences algériennes.

Selon le ministre de la Com‑munication, Nacer Mehal, des consultations ont été lancées auprès des professionnels du secteur depuis le début du mois d’octobre 2011. En mi‑sant sur cette nouvelle liberté d’entreprendre dans le secteur des médias, l’Algérie compte bien rattraper son énorme re‑tard dans ce domaine.

Med‑iT 2011 GPCdZ à l’honneurL e p r i x d u c o n c o u r s Med‑it 2011, consacré cette année à la conception d’ap‑plications algériennes de télé‑phonie mobile, a été remporté par GPCDZ. Cette société de production de données géo‑graphiques a été mise à l’hon‑neur pour son application Web appelée « Win Rani ». Gratuit, ce logiciel qui effectue des recherches par mots clés offre tous les services d’un annuaire géographique téléchargeable sur smartphones et PC. De‑puis son lancement, près de 40 000 téléchargements ont déjà été enregistrés.

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3G appel d’offres en algérieLe 15 septembre dernier, l’Al‑gérie a officiellement lancé son appel d’offres pour l’attribution de la licence de téléphonie mo‑bile troisième génération (3G).

Selon un communiqué pu‑blié par l’Autorité de régulation de la poste et des télécommu‑nications (ARPT), le proces‑sus d’octroi des licences 3G devait débuter le 19 du même

mois avec le retrait des dos‑siers préliminaires et d’appel à la concurrence. Les opérateurs avaient jusqu’au 7 octobre pour envoyer leur candidature, la délivrance des licences étant prévue pour le 23. Quant à la commercialisation, elle débute‑ra au cours du premier trimes‑tre 2012. Ce déploiement de la téléphonie mobile de troisième génération devrait permettre aux Algériens de visionner des vidéos, d’utiliser la visiophonie et de regarder la télévision.

libye Télévision à la française Le secteur audiovisuel français s’implique en Libye pour aider le Conseil national de transition (CNT) à disposer de sa propre chaîne de télévision.

Selon le quotidien français Le Figaro, le Conseil supérieur

chaîne publique sportive, qui serait placée sous la tutelle de l’établissement de télévi‑sion tunisienne (ETT). De son

côté, l’agence Tunis Afrique Presse (TAP) a révélé que des dizaines de demandes avaient été déposées pour la création de chaînes de télévision et qu’elles seraient étudiées ulté‑rieurement.

aRabie saoudiTe un nouveau concurrent pour al‑Jazeera

Le milliardaire saoudien Al‑Walid ben Talal envisage de lancer en 2012 une nouvelle chaîne TV d’information en continu. Lors d’une conférence de presse, le prince Al‑Wa‑lid a déclaré que cette future chaîne, appelée « Al‑Arab », contribuera à promouvoir la liberté d’expression dans les pays arabes. Dans l’objectif de concurrencer l’incontourna‑ble Al‑Jazeera, Al‑Arab sera « objective, équilibrée et crédi‑ble » dans le traitement de l’actualité régionale. La nouvelle chaîne a notamment prévu un temps d’antenne très impor‑tant (près de cinq heures par jour) pour les émissions qui aborderont l’actualité économique et financière. En outre, un accord de partenariat vient d’être conclu avec le groupe américain Bloomberg LP.

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de l’audiovisuel (CSA), Fran‑ce Télévisions, France 24 et l’Agence France‑Presse (AFP) se seraient engagés à apporter leur soutien à cette initiative.

Porte‑parole du CNT chargé de ce dossier, Mahmoud Sha‑man a entamé des pourparlers avec ses partenaires français pour l’obtention des moyens techniques et matériels néces‑saires au lancement de cette future chaîne.

La même source fait état de contrats déjà signés entre le pré‑sident de France Télévisions, Rémy Pflimlin, et Mahmoud Shaman pour permettre aux Libyens d’acquérir toute la lo‑gistique de production audiovi‑suelle. L’AFP apporterait quant à elle son savoir‑faire pour la création d’une agence de pres‑se, France 24 se chargeant de la formation des techniciens et journalistes de la télévision li‑byenne.

bande dessinéeCaricatures tunisiennesGrande première en Tunisie ! Sous l’appellation de « Bande de BD », un collectif d’artistes locaux a présenté son premier recueil de bandes dessinées, intitulé « Koumik », qui devait sortir durant la première quin‑zaine du mois d’octobre der‑nier. Parmi les 14 auteurs qui ont participé à l’élaboration de ce projet, on trouve notamment Seif Eddine Nechi, Chakib Daoud, Jihène Charad, Noha Hbaieb et Selmen Nahdi.

Avec une totale liberté créa‑tive, ces derniers ont réalisé des caricatures et bandes des‑sinées sur le thème de l’élec‑tion du 23 octobre 2011.

Novembre 2011 Arabies I 59

Tv PRivées du neuf en Tunisie Les deux chaînes de télévision privées tunisiennes (Hanni‑bal TV et Nessma TV) ne seront bientôt plus seules. Le 7 septembre dernier, l’ins‑tance nationale pour la réfor‑me de l’information et de la communication (inric) a fait savoir dans un communiqué qu’elle compte attribuer des licences pour la création de nouvelles chaînes privées. Les heureux élus ? Tahar ben Has‑sine (Hiwar Ettounsi), Moha‑med Hannachi (Golden TV), Mohamed Moncef Lemka‑char (Khamsa TV), Nasr Ali Chakroun (Ulysse TV) et is‑sam Kherigi (TWT). On évo‑que aussi le lancement d’une

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60 I Arabies Novembre 2011

La société civile arabe réclame haut et fort une mutation dé‑mocratique. Les artistes, partie

intégrante de cette société, s’expri‑ment et transmettent, à travers leurs œuvres, messages et regards criti‑ques sur le monde arabe, sa riches‑se, sa splendeur, sa complexité.

L’art contemporain arabe connaît un dynamisme sans précédent de‑puis quelques années. Les artistes participent aux expositions organi‑sées dans les capitales incontourna‑bles de l’art comme Paris, Londres et New York. Leurs œuvres sont devenues plus visibles sur la scène internationale.

C’est dans cet esprit que l’expo‑sition Traits d’Union, Paris et l’Art contemporain arabe était organisée par la revue bimestrielle Art Abso-lument à la Villa Emerige, en octo‑bre dernier à Paris. Une douzaine d’artistes parmi les plus talentueux, venus ou originaires des pays ara‑bes, ont exposé leurs œuvres aussi belles qu’originales dans un espace lumineux et convivial. L’occasion de découvrir cet art contemporain

arabe trop peu connu en France. Ayman Baalbaki, Ninar Esber

et Elie Bourgély (Liban), Taysir Batniji (Palestine), Hicham Beno‑houd, Najia Mehadji, Abderrahim Yamou et Mahi Binebine (Maroc), Zoulikha Bouabdellah et Yazid Oulab (Algérie), Laila Muraywid et Khaled Takreti (Syrie) ou encore Nermine Hammam (Égypte), qui disposent tous d’une visibilité dans leur société d’origine ainsi qu’à l’international, ont été sélectionnés autant pour la qualité de leurs œu‑vres que pour le lien qu’ils entre‑tiennent avec la France.

Cette exposition est une façon de créer « ce trait d’union entre les cultures », a déclaré le commis‑saire de l’exposition et rédacteur en chef d’Art Absolument, Pascal Amel. « L’art contemporain est aujourd’hui transculturel », a‑t‑il souligné lors de l’inauguration. Quant au choix des œuvres expo‑sées, Pascal Amel explique qu’il a privilégié « des œuvres visibles des deux côtés de la Méditerranée, qui créent des traits d’union entre les

mondes, produisant le plus sou-vent une esthétique de l’hybride, un métissage des formes et des sensibilités où se tressent de ma-nière inédite le corps, le ludique, l’affect, l’ornemental, la beauté, la spiritualité, le politique, la critique sociétale ».

Les œuvres exposées ont été réalisées à travers divers supports comme les nouvelles technologies, la sculpture, la photographie, le dessin…

Les artistes arabes sont impli‑qués et touchés par la complexité de leur histoire et de leur vécu. Ils expriment, à travers leurs créations diverses, des thèmes aussi sensi‑bles que tragiques : ceux qui sont liés aux crises identitaires, aux réalités de la guerre ainsi qu’aux faits de société. Ces fructueuses contributions, qui donnent une vi‑sion différente de la société arabe, permettront sans aucun doute de changer le regard des Occidentaux sur un monde arabe toujours terni par les événements tragiques du 11 septembre 2001…

Pour accompagner cette initia‑tive, tables rondes et débats étaient également proposés pour informer le grand public et les amoureux de l’art contemporain de l’évolution de la scène artistique arabe. n

L’art arabe contemporain Par Hakima KerNANe et Lila D. ScHoePf

Art AbsoLumentLa revue a présenté

à la Villa emerige une douzaine d’ar-

tistes arabes parmi les plus talentueux

sAVoir exposition

Abderrahim Yamou, Lilith, 2010

Zoulikha Bouabdellah, Mirage 4

Abderrahim Yamou, Amas rouge, 2011Khaled Takreti, Amour haine, 2011

Hicham Benohoud, Ver-sion soft, 2002-2003 Nermine Hammam, Worrier women, 2011

Najia Mehadji, Mystic Dance, 2011

Taysir Batniji, Watchtowers, 2008

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uniVersALité« Je crois à l’extension de l’homme. Que tout homme d’ailleurs est moi ici »

Pouvez-vous nous parler des œuvres que vous ex-posez ?

J’invente des traces. Je colle des draps. Du papier, des cartes et du tissu. De la paille et des cailloux. Du sable et de la terre. Du « tout ». J’assemble les cicatrices du quo‑tidien. Le mien et celui des autres. Mon œuvre est une plainte qui accentue ma peur quand je veux être rassuré. Les oiseaux noirs, les visages inquiétants, le meuble à non‑usage. Quelles sont vos influences ar-tistiques ? Votre œuvre a-t-elle un lien avec la civilisation ou/et le monde arabe ? L’universalité de l’homme est avant celle de l’art. On dira que chaque société a ses critères et ses spécificités. Cela peut être vrai si on se prive du choix. Je crois à l’extension de l’homme. Que tout homme d’ailleurs est moi ici. J’ai passé ma jeunesse au Liban, mais mes influences artistiques sont plutôt européennes. Mes yeux ont été bercés par les saintes familles de la Renaissance italienne. Les paysages des impressionnistes et les personnages torturés de Van Gogh, avant de me confronter à la virtuosité de Picasso. La dé‑couverte de Fautrier et plus tard de Tapiès a été la gifle qui m’a plongé dans l’univers de Kiefer. Quels liens entretenez-vous avec la France en général, et Paris en particulier ? La France est mon pays. Mon autre pays. Et le Liban aussi était mon autre pays et mon pays. C’est en France que j’ai apaisé mes angoisses. Où j’ai découvert que mon nombril n’était pas uni‑que. Où la couleur pouvait avoir un visage. Où les visages sont de toutes les couleurs. Mon Paris

m’a appris quelle force avaient les faibles et quel pouvoir avait une trace de fusain sur un papier blanc. Que l’art pouvait faire fon‑dre nos visages comme le bronze. Pensez-vous qu’une partie de la scène arabe contemporaine se crée en France ?La France est notre grand miroir. Elle porte dans l’imaginaire ara‑be l’idéal républicain, la nation des arts et la passion des grandes amours. Nous avons été bercés par la France et sûrement une partie de la scène arabe se crée en France car cette dernière fait partie du bagage culturel de nos pays.

Considérez-vous votre démarche artistique comme engagée ?L’art par définition ne peut être qu’engagement. Pas forcément dans les problèmes de la société, mais sur un plan plus aigu, les

problèmes de l’existence elle‑même. Pourquoi je ne me suis pas noyé quand j’avais trois ans ? Mon seul souvenir c’est que l’eau avait mauvais goût. Pourquoi la balle a effleuré ma tête quand j’avais quinze ans au lieu de la pulvériser ? La seule réponse est la question même. Engagé ? Oui. Dans la question immédiate qui traînera jusqu’à ma mort. Là où le monde disparaîtra à jamais.

En quelques mots, je travaille plutôt avec beaucoup de matières que j’assemble ou que je cumule, comme on cumule des instants, a priori dispersés et sûrement oubliables. « Ce qui compte, ce n’est pas l’objet, c’est de montrer que la vie de quelqu’un se loge dans un tiret », a dit Boltanski en montrant une plaque des dates de naissance et de mort de sa mère.

Ma démarche artistique n’est engagée que par l’instant présent, commun à tous… n

Novembre 2011 Arabies I 61

elie bourgély

Nermine Hammam, Worrier women, 2011

Najia Mehadji, Mystic Dance, 2011

elie Bourgély, En fermant les yeux, 2011 ; Soudain, je me suis rappelé. Quelqu’un descendait l’escalier. J’attendais. 2011.

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62 I Arabies Novembre 2011

Parlez-nous de vous, de vo-tre parcours…Je suis né à Marrakech et

après le baccalauréat, je me suis installé à Paris pour y poursuivre des études de mathématiques. En‑suite, j’ai enseigné dans un lycée.Je voulais devenir artiste, mais je ne savais dans quelle discipline. J’ai commencé par être musicien. Et je l’ai fait très sérieusement. Ma rencontre avec l’écrivain espagnol Agustin Gomez‑Arcos a été déter‑minante. Il m’a poussé à écrire et m’a présenté des peintres qui m’ont ouvert leurs ateliers. J’ai voulu leur ressembler. J’ai fait l’apprentissage de cette liberté qui nous faisait dé‑faut dans le Maroc de Hassan II. J’ai soudain eu accès à la parole. Et à l’écoute, aussi.

Après quatorze ans à Paris, où j’ai publié de nombreux romans et fait pas mal d’expositions, j’ai im‑migré aux États‑Unis où était ins‑tallé mon jeune frère. J’y ai passé six ans. Un exil douillet pendant lequel j’ai beaucoup peint. Et j’ai écrit Ce Maroc qui nous fait mal, comme disait le poète Khaïr‑Ed‑dine. J’ai eu la chance de trouver des éditeurs et des galeristes qui m’ont fait confiance. En 1997, ce fut la consécration en entrant dans la collection permanente du musée Guggenheim de New York.

Qu’est-ce qui vous a décidé à par-ticiper à cette exposition ? Le commissaire de l’exposition, Pascal Amel, est un ami. Quand il m’en a parlé, j’ai immédiatement accepté son offre. Il mène un com‑bat pour la pérennité du dessin, de la peinture et de la sculpture tout en restant ouvert aux autres médias en vogue en ce début de siècle.

Les artistes arabes sont à l’hon-neur dans cet événement… Ont-ils une sensibilité particulière ?

L’art plastique dans le monde ara‑be, même s’il est jeune, n’a rien à envier à l’art occidental. Dans la peinture, on retrouve les couleurs chaudes comme en Amérique du Sud… Pour le reste, il y a une géné‑ration d’artistes formés aux écoles des beaux‑arts arabes, mais aussi d’Europe. Ils sont animés d’un for‑midable désir de liberté, détruisant sans complexe les limites matériel‑les de la peinture, purifiant son lan‑gage jusqu’à l’extrême, narguant l’expression esthétique convenue et ses codes.

Quel est le moteur important de votre inspiration ? L’humain est au centre de mes pré‑occupations. Ses angoisses et ses tourments sont le ferment de mon travail. Je vide mon sac, j’exor‑cise les démons qui me hantent en tant qu’Arabe, mais aussi en tant qu’individu tout court. Et je tente de persuader mes semblables d’en faire autant. C’est le rôle « donqui‑

chottesque » que je me suis assigné, comme tout artiste du Sud ! J’uti‑lise ces « armes miraculeuses » dont parlait Aimé Césaire, celles qui procurent un sentiment extra‑ordinaire de revanche contre l’in‑humain, quand les moyens de cette revanche sont d’ordre esthétique.

Il y a un rapport complémentaire entre ma peinture et mon écriture. Quand je peins, je commence par esquisser un personnage en surface et puis je cherche à le pénétrer, à voir ce qu’il y a à l’intérieur. Quand j’écris, je me place d’emblée à l’in‑térieur du personnage, c’est‑à‑dire, en plein dans les sentiments, pour restituer une image. Il y a donc comme un mouvement de va‑et‑vient… La peinture, comme l’écri‑ture, me permet de disséquer les mille et une facettes de la nature humaine. Comme l’homme est imparfait, l’art lui permet en réa‑lité d’inventer un être meilleur, des sentiments supérieurs, de trans‑cender sa condition. n

expression « L’art plastique

dans le monde arabe, même s’il

est jeune, n’a rien à envier à l’art

occidental »

sAVoir exposition

mahi binebine

Mahi Binebine, cire et pigments sur bois, 2011.

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En brEf sAVOIr

Novembre 2011 Arabies I 63

Alter Dico, l’Afrique en poche

lancée à la mi‑mars dernier, l’application Alter Dico (disponible sur l’App Store)

est la première encyclopédie centrée sur l’Afrique pour iPhone. Une nouveauté que

l’on doit à Hachette Livre International, qui édite ce dictionnaire encyclopédique noms communs/noms propres en partenariat avec l’Agence universitaire de la Francophonie.

Outre son interactivité, l’application Alter Dico est aussi évolutive. Grâce à sa fonction wiki photo. elle permet en effet à ses utilisateurs de poster des photos de‑

puis leur iPhone ou leur page Facebook pour illustrer ses définitions – sous réserve de validation par les éditions classiques de l’expression française (Edicef) et après

vérification du droit à l’image. De quoi en faire au fil du temps une œuvre commune.

Alter Dico propose ainsi quelque 130 000 mots, dont 10 000 ont un lien direct avec l’Afrique.

D’abord exclusivement réservée aux iPhones, Alter Dico sera ultérieurement opérationnelle sur Androïd. n

Tunis, hors les murs

Tunis, ce n’est pas que la médina ! N’en déplaise aux écrivains, histo‑

riens, photographes et autres passionnés d’architecture de la fin du xIxe siè‑cle, dont l’œuvre s’est essentiellement concentrée sur le cœur historique de la ville dès lors qu’il s’agissait d’évo‑quer les merveilles cachées derrière les murs de la capitale tunisienne. Mais depuis 1860, la ville s’est étendue bien au‑delà de ces murs, se développant à l’est de la médina pour former ce qu’on appelle la « ville européenne ».

Des rues que l’on peut désormais parcourir à travers les 256 pages et 200 illustrations de Tunis, architectures 1860‑1960, dont le propos est de faire découvrir la diversité du patrimoine tu‑nisois des xIxe et xxe siècles. Chacun des quelque 150 édifices présentés dans cet ouvrage est situé sur un plan de la ville et fait l’objet d’une notice descrip‑tive. Né d’un partenariat entre le CNRS et l’Institut national d’histoire de l’art (Inha) via le laboratoire In Visu, Tunis, architectures 1860‑1960, écrit sous la direction de Mercedes Volait (directeur de recherche au CNRS), est paru aux éditions Honoré Clair, jeune départe‑ment de la société Aristeas – spécialiste de la mise en valeur du patrimoine et de la reconstitution 3D de monuments his‑toriques.

Député UMP des Bouches‑du‑Rhône, Renaud Mu‑selier a annoncé, le 2 septembre dernier, sa nomi‑

nation à la tête de l’Institut du monde arabe (IMA). Une suite logique pour cet ancien secrétaire d’état aux Affaires étrangères, qui est déjà président du conseil culturel de l’Union pour la Méditerranée (UpM). Re‑naud Muselier succède ainsi à Dominique Baudis, président de l’IMA depuis 2007.

l’IMA change de tête

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64 I Arabies Novembre 2011

La Francophonie à Tunis

C ’est dans les splendides jardins de la Résidence de France, dans la banlieue nord de Tunis, qu’a eu lieu la remise

des prix du concours scolaire francophone Philippe‑Senghor, pour sa cinquième édition annuelle. Son Excellence l’ambassadeur de France, Boris Boillon, était présent au côté de son épouse, Anne.

Cette édition 2011 concernait particuliè‑rement la Tunisie du fait de l’implication de l’Association tunisienne pour la pédagogie du français (ATPF), dont le président, Samir Marzouki, n’a eu de cesse de se multiplier pour faire de son pays le partenaire privilégié de l’événement. Trois écoles régionales (Sa‑kiet Ezzit, Mateur et Sfax) sont en effet les gagnantes du concours 2010‑2011. Les lau‑réats étaient donc les invités privilégiés de la France et de la Francophonie.

Créé et présidé par Colombe Anouilh d’Harcourt, fille du célèbre dramaturge Jean Anouilh, ce concours a permis de découvrir la beauté de ce palais beylical, construit il y a trois siècles. L’occasion aussi d’admirer les sculptures futuristes d’artistes tunisiens qui avaient investi les bosquets et pelouses des jardins de la Résidence pour exposer.

Ce concours Philippe‑Senghor est né de la grande amitié partagée par deux amoureux de la langue française, puis par leurs deux enfants : Philippe, le défunt fils de Léopold Sédar Senghor, et Colombe Anouilh. C’est après la disparition de son ami Philippe que cette dernière a développé l’idée de ce concours pour honorer sa mémoire et rendre hommage aux deux grands hommes que fu‑

rent leurs pères. Un projet concrétisé et lancé en 2006. Ouvert à tous les pays francophones et à ceux qui souhaitent introduire la langue française dans leurs programmes, le concours Philippe‑Senghor a pour but de transmettre, à travers les pays participants, l’amour de la langue française. Il s’adresse exclusivement à tous les élèves du dernier cycle de l’enseigne‑ment élémentaire dont le français n’est pas la langue maternelle.

Il a aussi pour objectif d’illustrer l’esprit d’invention et la créativité en proposant aux candidats de réaliser un travail littéraire, in‑

Par Latifa Hitti

dividuel ou collectif, encadré par des parents et professeurs. Un texte narratif leur est ainsi proposé, dont il leur faut imaginer la suite et l’illustration. Le thème ? Il est choisi chaque année par un grand écrivain francophone, ap‑pelé à rédiger le début d’une histoire ou d’un conte avant de laisser aux enfants le soin de le terminer. Le résultat sera publié dans un re‑cueil imprimé en Tunisie et distribué dans les pays contributeurs.

Parrain officiel du concours, l’académi‑cien Erik Orsenna avait inauguré la première édition de 2006, qui fut un véritable succès. Depuis, une histoire différente est proposée chaque année par différents écrivains. Après la Sénégalaise Fatou Diome, l’académicien franco‑libanais Amin Maalouf et la Malga‑che Michèle Rakotoson, 2011 était l’année du Haïtien Dany Laferrière, auquel succédera l’écrivaine tunisienne Emna Belhaj Yahia en 2012.

Soutenu par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), l’Unesco et le mi‑nistère français de la Culture et de la Com‑munication, le concours – qui avait démarré avec seulement 4 pays – n’a cessé de grandir et revendique aujourd’hui plus de 40 pays participants à travers le monde.

Forte de cette réussite, la présidente, Co‑lombe Anouilh d’Harcourt, continue à dé‑ployer toute sa volonté pour que cet événement culturel fasse son chemin dans les écoles. n

savoir événemenT

est édité à l’issue du concours. En réalité, il nous faudrait obtenir l’aide d’un grand nombre d’associations de professeurs pour pouvoir être plus largement diffusés.

Devant un tel succès, voyez-vous d’autres défis à surmonter ? Faire connaître ce nouveau concept aux milliers d’enfants qui ont le français en partage, leur faire découvrir « l’Autre et ses différences », créer entre eux des pas‑serelles et surtout, respecter leur imaginai‑re d’enfants avec leurs codes bien à eux et si inventifs. Notre but est de créer la pre‑mière bibliothèque francophone écrite et illustrée par des enfants pour d’autres en‑fants, et qu’ainsi par le français fleurissent les imaginaires et les rêves des enfants.

Colombe anouilh d’Harcourt, présidente du concours Philippe-senghor

Comment vous est venue l’idée de ce concours ? C’est en me liant d’amitié avec Philippe Maguilen Senghor, en 1973 à l’Institut le Rosey (Suisse), que j’ai eu le privilège de rencontrer son père, le président Léopold Sédar Senghor. Lors d’un voyage au Séné‑gal, le président m’avait répété cette phra‑se : « Colombe, l’avenir est au métissage » qui, avec le temps, a pris toute sa dimen‑sion. J’ai voulu développer ce concept et le décliner auprès des enfants en les aidant à apprendre le français en s’amusant.

Quelles sont les difficultés rencontrées ?La principale difficulté est de faire parve‑nir aux enfants, aux écoles et aux biblio‑thèques des différentes pays l’ouvrage qui

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Kenzo vous aime !Quatre ans après la fragrance originale créée pour son eau de parfum, Kenzo en offre une nouvelle déclinaison avec L’eau de toilette KenzoAmour. En tête, un pétillement limpide de bergamote, thé et orange amère. Suit un cœur délicatement floral où se mêlent pivoine, acacia et fleurs exotiques. Jusqu’à la douceur d’un fond nimbé de vanille, encens et muscs blancs.

vitrine sAvOir

Novembre 2011 Arabies I 65

impératrice d’un jour, impératrice toujoursFlorale, fruitée et boisée. Ainsi se caractérise la nouvel‑le eau de parfum Imperial Ruby de l’horloger‑joaillier Charriol, qui se distingue par son flacon associant le luxe de l’or, la splendeur des gemmes et la passion du rouge. Au menu : melon d’eau, cerise griotte et bergamo‑te de Calabre (tête) ; roses rouges, feuilles de violettes et santal doré (cœur) ; musc, ambre et cèdre blanc (fond).

La Prairie fait sa révolutionExperts en soins contre le vieillis‑sement, les Laboratoires La Prairie Switzerland déclenchent une véritable révolution anti‑âge avec leur Cellular Power Infu-sion. Ce soin agit sur les trois di‑mensions du vieillissement de la peau : cellules, énergie et tissus. Il recharge l’énergie des cellules, dont il renouvelle les capacités en reconstruisant simultanément leur structure pour garantir l’ap‑parence et la sensation d’une peau éternellement jeune.

Page 66: Arabies | November 2011

savoir entre nous

66 I Arabies Novembre 2011

tunisieEn écho à un article paru dans le numéro d’Arabies du mois dernier (« Béji Caïd Essebsi, pas à pas… »), je tiens à vous écrire pour saluer le travail ac‑

compli par le Premier ministre, Béji Caïd Essebsi, depuis son arrivée en février dernier. Car si personne ne pouvait présumer de l’issue des récentes élections de l’Assemblée constituante, au moins ce scrutin a‑t‑il eu lieu. Ce qui était loin d’être gagné il y a encore quelques mois… Alors que tous annonçaient un

avenir catastrophique pour no‑tre Tunisie, Essebsi s’est multi‑plié sur tous les fronts : politi‑que, social et économique. Aux prises avec un flou politique et juridique total, il a réussi à ra‑

mener un semblant d’unité na‑tionale malgré les pressions de la rue et de la classe politique, tout en rétablissant un climat de sécurité relatif en gérant parfai‑tement le conflit social qui l’op‑posait aux forces de l’ordre…

Daoud Farhani Bouarada, Tunisie

algérieAprès avoir lu l’article intitu‑lé « Alimentaire, une facture salée », paru le mois dernier dans Arabies, j’étais aussi ef‑faré qu’inquiet. Effaré devant les chiffres liés à la hausse du prix de certains produits ali‑mentaires de base : céréales (+ 93 %), sucres (+ 49 %) ou produits laitiers (+ 42 %)… Comment a‑t‑on pu laisser les choses en arriver là ? Inquiet, aussi, en pensant à l’avenir d’une Algérie pour laquelle ces produits importés sont in‑dispensables. Pétrole et gaz naturel suffiront‑ils toujours à payer la facture ? Mais au vu des nombreuses mesures gouvernementales d’urgence

que vous énonciez, j’ai aussi pris conscience de tous les efforts de l’état pour subve‑nir malgré tout aux besoins alimentaires du pays. Et j’ai noté que l’Organisation des nations unies avait souligné l’amélioration des conditions de rendement de notre culture céréalière. C’est plutôt rassu‑rant, non ?

Hocine YahyaouiBlida, Algérie

palestineCette fois, ça y est ! Les dés sont jetés… En dépit des pres‑sions de tout bord, Mahmoud Abbas a été jusqu’au bout : il a demandé l’adhésion officielle

de l’état palestinien à l’Or‑ganisation des nations unies (ONU). Une requête dont on sait qu’elle n’a quasiment aucune chance d’aboutir, comme l’a écrit Hervé de Cha‑rette dans le n° 294 d’Arabies (« Palestine : penser au lende-main »). L’intérêt est surtout de mobiliser encore davantage la Communauté internationale autour de la cause palestinien‑ne. Et d’allonger la liste des 131 pays qui ont déjà reconnu la Palestine comme un état souverain… Voilà qui devrait aussi mettre certains acteurs de poids face à leurs responsa‑bilités : aux états‑Unis, celle de ne plus se comporter en valet d’Israël par crainte de subir les foudres du lobby juif américain en période électo‑rale ; à Israël, celle de ne plus se comporter en puissance im‑périaliste et coloniale obtuse ; et à l’Union européenne, celle d’en finir avec la valse des hé‑sitations…

Wahid Hammami Mahres, Tunisie

marocComme la Tunisie le mois dernier, le Maroc s’apprête à entrer en période électorale avec les élections législati‑ves anticipées qui sont fixées à ce 25 novembre. Une pre‑mière depu is l e mois de septembre 2007. Mais les enjeux sont ici bien moins politiques qu’économiques. Car le Premier ministre issu de ce scrutin devra avant tout s’atteler à résorber un défi‑cit budgétaire critique et une dette publique faramineuse, ce qu’Arabies a souligné dans son numéro d’octobre dernier (« Vers un déficit record »).

Daoudi Abdelali Kenitra, Maroc

FondateurYasser Hawary(Tél. : +33 1 47 66 46 00)

rÉdaCtriCe en CHeFLila D. Schoepf(Tél. : +33 1 47 66 95 15)

rÉdaCteur en CHeF adJointSamir Sobh (Tél. : +33 1 47 66 96 93)

seCrÉtaire de rÉdaCtionFabrice Pavée

CoLLaBorateursn Politique, Économie : Antoine Arman, Akima Bedouani, Hélène Benail, Mekioussa Chekir, Pierre Fauchart, Hakima Kernane, Christian Malar, Véronique Narame, Mourad Saouli, Georges Sassine.n culture, SociÉtÉ : Alexandre Aublanc, Philippe Cendrier, Dominique Francœur, Anne SamarcorreSPonDAntSAbou Dhabi : Gerald Butt, Beyrouth : Ed Blanche, Dubaï : Paul Weston, Tunis : Moncef Mahroug

ConCeption & direCtion artistiqueRanda Khouri

adMinistrationArabies : Mensuel édité en France par laSociété de Conseil en CommunicationS.A.R.L. au capital de 124.000 FF. RC.Paris 86 BO 1718

GÉrant - direCteur de La puBLiCationJulien Hawary

responsaBLe adMinistratiFMaguy Paniagua(Tél. : +33 1 47 66 95 14)

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18, rue de Varize75016 ParisTél. : +33 1 47 66 46 00Fax : +33 1 43 80 73 62

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Page 68: Arabies | November 2011

LIBYE Après quarante-deux ans de dictature, la mort de

Mouammar Kadhafi ouvre la voie aux ambitions de tout bord et à une possible guerre de successionLe mensuel du monde arabe et de la francophonieN

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5 –

Nov

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11

Belgique 4.46 - Luxembourg 4.74 - Suisse 8 FS - Grèce 4.11 - Antilles 6.86 - Réunion 6.86 - Canada 7.95 $ C - USA 5.90 $US - Maroc 25 DH

Tunisie 2.5 DT - Liban 5 000 L - Arabie Saoudite 25 SR - E.A.U 25 DH - Koweït 2.75 DK - Côte-d’Ivoire 2 000 CFA - Sénégal 2 000 CFA - Mali 2 000 CFA

Gabon 2 000 CFA - Guinée 6.86 - Afrique zone CFA 2 000 CFA - Comores 2 000 CFA - Djibouti 5.19 - Allemagne 6.20 - Italie 5.17 - Algérie 120 DA

Nouvelle donneMonde arabe

ALGÉRIESyndicats et salariés sont les grands perdants d’une tripartite qui a privilégié les entreprises

MAROCÀ l’aube des législatives, le prochain budget de l’État n’est toujours pas fixé. Polémiques…

Élections brûlantes en Tunisie et en Égypte, succession chaotique de Kadhafi en Libye, relève des troupes américaines en Irak, ambitions démesurées du Qatar…L’avenir se joue aujourd’hui

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Mouammar Kadhafi ouvre la voie aux ambitions de tout bord et à une possible guerre de succession

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INTERVIEW EXCLUSIVEMinistre des Affaires étrangères et européennes,

Alain Juppé revient sur le retour en force de la diplomatiefrançaise dans un monde arabe en pleine mutation

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