Années 1618-1623

135
1 CORRESPONDANCE DE MONSIEUR D’IRAY INTENDANT DES LA TREMOILLE Années 1618 - 1623 présentée et annotée par Jean Luc Tulot -=- Jean Rogier, sieur d’Iray, entra au printemps 1617 au service de Henri de La Trémoille comme premier secrétaire, dix ans plus tard celui-ci le choisit pour être l’intendant général de ses terres. Sa correspondance conservée aux cotes 1 AP 357, 358 et 361 des Archives nationales de France est une source de premier ordre pour connaître la vie quotidienne des La Trémoille pendant les années 1618 à 1635. Le 19 novembre 2006, j’ai entrepris la transcription de sa correspondance et l’ai achevée le 15 août 2007. Jean Rogier, sieur d’Iray Jean Rogier appartenait à une famille bourgeoise de Poitiers qui fut anoblie par l’exercice de charges municipales 1 . Jean Rogier, le chef de cette famille, était au milieu du XVI e siècle conseiller du Roi au présidial de Poitiers. Son fils aîné, Aymon, fut conseiller au Parlement de Paris. Son second fils, Louis Rogier, sieur d’Iray 2 , père de notre Jean Rogier, fut conseiller au présidial de Poitiers dans le dernier quart du XVI e siècle. Son troisième fils, prénommé Jean, devint en 1568 avocat générale au parlement de Bretagne puis en 1574 président à mortier à ce même parlement et mourut le 7 février 1603 à Rennes 3 . C’est dans une lettre d’André Rivet à Henri de La Trémoille datée du 28 avril 1617 que nous trouvons mentions de l’entrée en service de Jean Rogier auprès de celui-ci : « Le Sr. d’Iray partira dimanche matin, avec M. de La Mazure, pour aller prendre vos commandemens ». Dans sa lettre du 30 du même mois Rivet ajoute : « Monsieur d’Iray vous va trouver. Je suis asseuré qu’il vous servira fidèlement. J’espère qu’il le fera dignement et vous luy sçaurez donner dès l’entrée les commandements qui luy seront nécessaire » 4 . La première lettre de Jean Rogier conservée dans le fonds La Trémoille est datée du 28 juillet 1618 de Thouars et est adressée à Charlotte-Brabantine de Nassau. Suivant la ligne politique pacifiste définie par la duchesse douairière de La Trémoille, Jean Rogier concourut à retenir Henri de La Trémoille de s’engager au mois de mai 1621 avec Henri et Benjamin de Rohan dans la rébellion contre le Roi. En 1627, Henri de La Trémoille le chargea de l’intendance générale de ses terres. En 1629, Louis XIII lui envoya des lettres de jussion à la Cour des aides par lesquelles il enjoignait à cette cour de lui faire jouir des privilèges de noblesse et en 1635 lui accorda des lettres de noblesses. La dernière lettre de Jean Rogier conservée dans le Fonds La Trémoille est datée de Thouars du 21 août 1635. Il souffrait depuis longtemps de la goutte et il est probable que cette maladie hâta sa fin. La date exacte de son décès n’est pas connue dans l’état actuel de notre recherche. L’on sait 1 H. BAUCHET-FILLEAU, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou,1 ère édition, 1840-1854, 2 vol, tome II, p. 633 (fichier 20 082) et Frères HAAG, La France protestante, Slatkine reprints de l’édition originale de 1846- 1859, Genève, 1966, 10 vol, tome VIII, p. 469. 2 Irais est une petite commune à une quinzaine de kilomètres au sud-est de Thouars. 3 Frédéric SAULNIER, Le Parlement de Bretagne 1554-1790, Réimpression de l’édition originale de 1909 augmentée, Imprimerie de la Manutention, Mayenne, 1991, 2 vol, tome II, p. 766. 4 Archives nationales, 1 AP 353/150 et 151.

Transcript of Années 1618-1623

Page 1: Années 1618-1623

1

CORRESPONDANCE DE MONSIEUR D’IRAY

INTENDANT DES LA TREMOILLE

Années 1618 - 1623

présentée et annotée par Jean Luc Tulot

-=-

Jean Rogier, sieur d’Iray, entra au printemps 1617 au service de Henri de La Trémoille commepremier secrétaire, dix ans plus tard celui-ci le choisit pour être l’intendant général de ses terres. Sacorrespondance conservée aux cotes 1 AP 357, 358 et 361 des Archives nationales de France est unesource de premier ordre pour connaître la vie quotidienne des La Trémoille pendant les années 1618 à1635. Le 19 novembre 2006, j’ai entrepris la transcription de sa correspondance et l’ai achevée le15 août 2007.

Jean Rogier, sieur d’Iray

Jean Rogier appartenait à une famille bourgeoise de Poitiers qui fut anoblie par l’exercice decharges municipales1. Jean Rogier, le chef de cette famille, était au milieu du XVIe siècle conseillerdu Roi au présidial de Poitiers. Son fils aîné, Aymon, fut conseiller au Parlement de Paris. Son secondfils, Louis Rogier, sieur d’Iray2, père de notre Jean Rogier, fut conseiller au présidial de Poitiers dansle dernier quart du XVIe siècle. Son troisième fils, prénommé Jean, devint en 1568 avocat générale auparlement de Bretagne puis en 1574 président à mortier à ce même parlement et mourut le 7 février1603 à Rennes3.

C’est dans une lettre d’André Rivet à Henri de La Trémoille datée du 28 avril 1617 que noustrouvons mentions de l’entrée en service de Jean Rogier auprès de celui-ci : « Le Sr. d’Iray partiradimanche matin, avec M. de La Mazure, pour aller prendre vos commandemens ». Dans sa lettre du30 du même mois Rivet ajoute : « Monsieur d’Iray vous va trouver. Je suis asseuré qu’il vous servirafidèlement. J’espère qu’il le fera dignement et vous luy sçaurez donner dès l’entrée lescommandements qui luy seront nécessaire »4. La première lettre de Jean Rogier conservée dans lefonds La Trémoille est datée du 28 juillet 1618 de Thouars et est adressée à Charlotte-Brabantine deNassau.

Suivant la ligne politique pacifiste définie par la duchesse douairière de La Trémoille, JeanRogier concourut à retenir Henri de La Trémoille de s’engager au mois de mai 1621 avec Henri etBenjamin de Rohan dans la rébellion contre le Roi. En 1627, Henri de La Trémoille le chargea del’intendance générale de ses terres. En 1629, Louis XIII lui envoya des lettres de jussion à la Cour desaides par lesquelles il enjoignait à cette cour de lui faire jouir des privilèges de noblesse et en 1635 luiaccorda des lettres de noblesses.

La dernière lettre de Jean Rogier conservée dans le Fonds La Trémoille est datée de Thouars du21 août 1635. Il souffrait depuis longtemps de la goutte et il est probable que cette maladie hâta sa fin.La date exacte de son décès n’est pas connue dans l’état actuel de notre recherche. L’on sait

1 H. BAUCHET-FILLEAU, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, 1ère édition, 1840-1854, 2 vol,tome II, p. 633 (fichier 20 082) et Frères HAAG, La France protestante, Slatkine reprints de l’édition originale de 1846-1859, Genève, 1966, 10 vol, tome VIII, p. 469.2 Irais est une petite commune à une quinzaine de kilomètres au sud-est de Thouars.3 Frédéric SAULNIER, Le Parlement de Bretagne 1554-1790, Réimpression de l’édition originale de 1909 augmentée,Imprimerie de la Manutention, Mayenne, 1991, 2 vol, tome II, p. 766.4 Archives nationales, 1 AP 353/150 et 151.

Page 2: Années 1618-1623

2

seulement qu’il était mort en 1638. Sa femme, Jeanne David, est déclarée veuve lorsqu’elle présentale 13 mai de cette année un chapelain pour la chapelle de Saint-Jean de Thiors5.

Des quatre enfants de Jean Rogier ayant atteint l’âge adulte, sa fille, Marie, épousa enpremières noces par contrat passé le 20 février 1649 à Thouars Gabriel de Marconnay, chevalier,seigneur dudit lieu et en seconde noces à une date non connue Charles du Bellay, sieur d’Anché6.Louis son fils aîné, écuyer, seigneur d'Iray et de Thiors, servit dans les armées du Roi. Il épousa le17 août 1655 Gasparde Lambert, fille de Paul Lambert, chevalier de l’ordre du Roi, gentilhommeordinaire de sa chambre, capitaine de 50 hommes d’armes de ses ordonnances. Son second fils Henri-Charles, écuyer, sieur de Rothemond, épousa dans les années 1650 Elisabeth Tessier. Son plus jeunefils, Jean, épousa le 24 septembre 1658 Eléonore du Bellay, fille de Zacharie du Bellay, sieur duPlessis-Bellay et de Jeanne Herbert qui lui apporta les terres de Belleville et du Grand Lusigny dont ilprit le nom. Les trois fils de Jean Rogier furent maintenus dans leur noblesse le 25 février 1666 parl’intendant Barentin.

Source essentielle pour l’histoire des La Trémoille

La correspondance de Jean Rogier parvenue à nous est constituée essentiellement par les lettresqu’il adressa à Henri de La Trémoille, Charlotte-Brabantine de Nassau, Marie de La Tour d’Auvergneet à Jean du Monceau, sieur de Champdor, qui fut successivement le secrétaire des deux duchesses età Jacques de Rozemont, chargé d’affaire des La Trémoille à Paris. Nous ne possédons pas de lettresadressées aux autres agents des La Trémoille, pas même celles à son neveu Daniel Guérineau.

En dépit de cette lacune, cette correspondance est une source essentielle pour l’histoire desLa Trémoille couvrant les années 1618 à 1635, comblant notamment les vides dans lescorrespondances adressées à Charlotte-Brabantine de Nassau pendant les années 1626 et 1629 à lasuite des séjours de celle-ci aux Provinces-Unies et en Angleterre en 1626 et à Paris en 1629.

L’un des intérêts principaux de la correspondance de Jean Rogier, sieur d’Iray, est de lever levoile sur les relations entre Henri de La Trémoille et son proche voisin le cardinal de Richelieu aprèsavoir abjuré entre les mains de celui-ci le 18 juillet 1628 devant La Rochelle 7. Elle nous révèle lesdétails de la vente de la baronnie de l’Ile-Bouchard au Cardinal, les propositions de services quecelui-ci lui offrit. Elles nous font découvrir, les hésitations d’Henri de La Trémoille entre le choix dela charge de la lieutenance générale de Bretagne avec Blavet, de celle de colonel de la cavalerie légèreet de celle de gouverneur du Poitou8, son refus de vendre le comté de Taillebourg. Elle nous apprendmême que les La Trémoille envisagèrent de s’allier au Cardinal de Richelieu par le mariage du princede Talmont avec une de ses petites nièces.

Cette correspondance met également en évidence la part prépondérante que les deux duchessesde La Trémoille jouèrent dans l’administration de leur Maison. Henri de La Trémoille, il faut l’avouerétait un brave homme, mais à la fois indécis et impulsif, il fallait savoir lui faire entendre raison pourle mieux de ses intérêts, ce que surent faire sa mère Charlotte-Brabantine de Nassau et son épouseMarie de La Tour d’Auvergne.

L’homme privé

5 H. BEAUCHET-FILLEAU, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, 2e édition, 1888-1979,7 volumes, tome III, p. 89.6 Marie Rogier donna à Gabriel de Marconnay quatre enfants. Il était décédé en 1659. Marie Rogier fut maintenue en sanoblesse le 11 août 1670 comme tutrice de ses enfants. Elle partit avec son second époux à Berlin dans le courant des années1670.7 Répondant ainsi à l’interrogation posée par James B. COLLINS, Classes, Estates and Orders in Early Modern Brittany,Cambridge University Press, 1994, p. 192 et dans l’édition française de cet ouvrage : La Bretagne dans l’Etat royal. Classessociales, Etats provinciaux et ordre public de l’Edit d’Union à la Révolte des bonnets rouges, Presses Universitaires deRennes, 2006, p. 214.8 Cf. Lettre de Jean Rogier du 9 décembre 1629 à Marie de La Tour d’Auvergne.

Page 3: Années 1618-1623

3

L’on ne sait rien de l’enfance de Jean Rogier. Le fait qu’il cite Homère dans sa lettre du31 octobre 1623, la qualité de son Français et la clarté de son style font présumer qu’il reçut unesolide éducation classique, probablement à l’Université de Poitiers. Comme tous les hommes de sontemps il avait lu l’Astré d’Honoré d’Urfé comme le révèle la mention dans ses lettres du 12 et 14 juinde 1621 de Clidaman, le fils de la reine du Forez.

Jean Rogier ne donne guère d’indications sur sa famille. C’est seulement dans sa lettre du30 juillet 1620 à M. de Champdor qu’il fait état pour la première fois de sa femme, Jeanne David. Ellelui donna cinq enfants : trois garçons : Louis, Henri-Charles, Jean et deux filles : Charlotte et Marie.Dans ses lettres du 30 décembre 1627 et du 3 mai 1633, il fait état de la naissance de deux garçonsque l’on peut présumer être Henri-Charles et Jean. Nous ne saurons davantage sur celle qui avait lacharge des affaires domestiques de sa maison pendant ses longues absences9. En 1624, au détourd’une lettre, il nous apprend que Daniel Guérineau que Marie de La Tour d’Auvergne avait choisipour être son secrétaire, était son neveu.

L’expression d’une solidarité verticale

Pour sauvegarder et accroître les biens qu’ils avaient hérités de leur aïeux et qui faisaient lagrandeur de leur Maison, en une période de difficulté économique10, les La Trémoille devaient êtred’habiles gestionnaires11. Il leur fallait passer de nouveaux baux avec les exploitants, veiller àl’entretien de leurs forêts, faire réparer au besoin les fermes, veiller à la rentré des droits seigneuriaux.Pour cela ils devaient s’entourer d’agents de qualité comme Jean Rogier, ayant des connaissancesjuridiques, comptables et l’expérience de la nature humaine.

Jean Rogier, comme un siècle plus tard ses successeurs12, avait les intérêts des La Trémoilleparticulièrement à cœur, s’efforçant de conserver les domaines et d’empêcher leur aliénation, étantparfois plus soucieux des intérêts personnels du duc que le duc lui même. Il en tirait certes des profitspour lui et sa famille, mais peu à peu en était venu à s’identifier à la Maison de La Trémoille, seconsidérant au fond comme un de ses fils adoptifs13.

Une correspondance pratique

Les motifs premiers de la correspondance de Jean Rogier résultent de la nécessité pour lesLa Trémoille de gérer leurs propriétés et de garder la direction économique de leur domaine, cettecorrespondance permettant de surmonter l’absence de don d’ubiquité propre à la condition humaine14.

Les ouvrages sur l’épistolaire donnent l’impression que pour les écrivants au XVIIe siècle écrireétait synonyme de plaisir, de loisirs, de conversation amicale, de badinage. Loin de cette visionréductrice, écrire pour Jean Rogier était une obligation inhérente à sa fonction de secrétaire etconseiller des La Trémoille, comme le souligne Jack Goody savoir lire et écrire est une des conditions

9 Madeleine Foisil fait la même constatation s’agissant les livres de raison : « Les notations qui sont consacrées à la présenceet à la vie de l’épouse sont là, mais toujours courtes et élémentaires, la révélant à peine : on ne sait rien de son apparence, dela bonne entente avec elle, des conflits, de son comportement maternel. Mention est faite des naissances […] et qui parfoisdeviennent un drame où se marque le frémissement de l’attachement et de l’affection ». Madeleine FOISIL, « L’écriture dufor privé » in Philippe ARIES et Georges DUBY, Histoire de la vie privée. 3. De la Renaissance aux Lumières, Coll. Points-Histoire, Editions du Seuil, 1999, p. 336-337.10 Sur la conjoncture économique du XVIIe siècle Cf. le bilan nuancé de Françoise BAYARD et Philippe GUIGNET,L’Economie française aux XVIe – XVIIe – XVIIIe siècles, Coll. Synthèse Σ Histoire, Ophrys, 1994, p. 107-130.11 Sur ce sujet Cf. Laurent BOURQUIN, La noblesse dans la France moderne (XVIe-XVIIIe siècles), Editions Belin, Paris,2002, p. 155 et suivantes et William A. WEARY, “ The House of La Trémoille, fifteenth through eighteen centuries : Changeand adaptation in a French noble family ”, Journal of modern history, N°49, mars 1977 (On demand supplement).12 Jean-François LABOURDETTE, “ L’administration d’une grande terre au XVIIIe siècle: le comté de Laval ”, Bulletin dela Commission historique et archéologique de la Mayenne, Nouvelle série, N° 46 (248), Octobre-décembre 1977, p.-54-169.13 Sur ce point Cf. Yves DURAND, Vivre au Pays au XVIIe siècle, Coll. Histoires, Presses Universitaires de France, Paris,1984, p. 166-168 et Les solidarités dans les sociétés humaines, Coll. L’Historien, P.U.F., 1987, p. 124-130.14 Bernard LAHIRE, L’homme pluriel. Les ressorts de l’action, Réimpression de la 1ère édition de 1998, Edition ArmandColin, 2005, p. 156-157.

Page 4: Années 1618-1623

4

pour participer pleinement au système politique du Monde moderne15. Dans ses lettres, il leur exposeles mesures qu’il a prise pour la gestion de leurs biens, il narre les rencontres auxquelles il a participé,donne son avis sur telle ou telle affaire, fait des propositions. Comme il se doit son « je » estomniprésent, s’agissant pour lui de convaincre le duc et les duchesses de la valeur et de la pertinencede ses actes.

Ses lettres se présentent en apparence souvent comme des séries de réponses et de propositionssans transition. Mais à leur lecture, l’on constate que Jean Rogier dans ses lettres répondait point parpoint aux questions que lui posaient les La Trémoille dans les lettres rédigées par un de ses collèguesà son intention, ces lettres par ailleurs répondaient pour leur part de même à ses demandesd’instruction. Certaines lettres fort longues, lui ayant pris de longues heures à rédiger, comportent desretours à des sujets précédemment traités quelques paragraphes plus haut à la suite de la venue d’uneinformation au cours de la rédaction de la lettre. Les additifs sont réguliers, portés au dernier momentavant de la remise de la lettre au messager, dans l’espace libre laissé au dessus de la signature ou enmarge.

Les lettres de Jean Rogier relèvent du genre des lettres d’affaires certes, mais elle necorrespondent toutefois pas au degré zéro de l’art d’écrire stigmatisé par Roger Duchêne dans sonessai sur l’écriture personnelle au XVIIe siècle16. Comme le souligne Gustave Lanson il faut dans leslettres d’affaires de la précision et de la concision17, qualités qui requièrent en fait une grande pratiquede l’écrit et dont fait preuve Jean Rogier dans son exposition des faits, qu’il sait rendre avec un sensréel du récit de façon vivante et imagée.

Par les traditions familiales, par l’enseignement reçu au collège, par la consultation probable desecrétaires Jean Rogier étaient au courant des normes épistolaires. Dans la plus part de ses lettres, ilsatisfait aux conventions sociales, en consacrant un développement à l’attachement qu’il éprouve auservice du duc et des deux duchesses et de leur Maison. L’on trouve aussi dans ses lettres des thèmescaractéristiques de la lettre familière. Dans ses lettres, il s’inquiète régulièrement de la santé de laduchesse douairière de La Trémoille et dit qu’il prie pour sa conservation. Voulant lui plaire, il luidonne des nouvelles de ses enfants et de ses petits enfants.

Dans ses lettres à son collègue et ami Jean Dumonceau, sieur de Champdor, Jean Rogier nemanifeste pas la même distance dont il fait preuve à l’encontre des La Trémoille. Si les affaires de laMaison de La Trémoille occupent une grande place dans ses lettres, il fait preuve d’une plus grandespontanéité et est plus libre dans ses propos, y exprimant sans détour son amitié et des sentimentsintimes. L’on notera toutefois que dans l’interpellation il utilise toujours le terme Monsieur, etn’emploie pas les formules plus chaleureuse de « Monsieur, mon très cher amy » ou de « Mon trèscher amy » dont use Champdor dans ses lettres à Rozemont et Guérineau.

Une écriture du moi

Etre le premier secrétaire du duc de La Trémoille puis son intendant n’était pas sans risque sesqualités devaient être reconnues, il devait se faire apprécier et surtout ne point déplaire, en bref ildevait toujours chercher à se montrer le meilleur. « J’ay tasché, Madame, de vous y rendre, commecomme je feray toute ma vie, les services très humbles que je doibs » écrit-il à Marie de La Tourd’Auvergne dans sa lettre du 23 avril 1625. Se trouvant par sa fonction toujours plus ou moins enposition d’accusé, comme le souligne Georges Gusdorf, Jean Rogier est lui-même la mesure et lecritère de ce qu’il écrit, à la fois le meneur du jeu, arbitre du jeu et enjeu du jeu18.

15 Jack GOODY, Pouvoirs et savoirs de l’Ecrit, La Dispute, Paris, 2007, p. 217.16 Roger DUCHÊNE, Comme une lettre à la poste. Les progrès de l’écriture personnelle sous Louis XIV, Librairie ArthèmeFayard, Paris, 2006, p. 141.17 Gustave LANSON, Introduction au Choix de lettres du XVIIe siècle, Librairie Hachette, Paris, 9e édition, 1909, p. I.18 Georges GUSDORF, Les écritures du moi, Editions Odile Jacob, Paris, 1991, p. 127.

Page 5: Années 1618-1623

5

L’omniprésence de la maladie

Etre le meilleur n’était pas évident, à cela s’ajoutait dans ce monde dont nous avons perdu lesouvenir que le moindre maux aujourd’hui guéri en quelques jours en ce temps vous clouait au litpendant de longues périodes faute de remèdes efficaces19. A intervalle régulier, Jean Rogier doitinterrompre son activité pendant plusieurs semaines, touché notamment par la goutte cette maladie depléthore.

A cela s’ajoute les maladies épidémiques, pestes, dysenteries,…. dont Jean Rogier se fait l’échodans ses lettres, maladie dont les déplacements des troupes favorisaient la dispersions et quienvoyaient en quelques mois au cimetière le 1/10e des habitants d’une paroisse et parfois plus. Cescrises démographiques qui furent la cause principale de la chute de la population protestantemajoritairement urbaine qui ne disposait pas comme la population catholique du réservoirdémographique des campagnes20. Fait qui montre la pertinence de l’opposition à la guerre de laduchesse douairière de La Trémoille, Charlotte-Brabantine de Nassau.

*

Pour faciliter la compréhension des lettres de Jean Rogier, j’ai mis les accents et uneponctuation et développé les abréviations. Je les ai également organisées, dans la mesure du possible,en paragraphes. Les passages que je n’ai pu encore déchiffrer sont identifiés par >>> >>>.

*

1618 Le 20 février, le prince d’Orange, Philippe-Guillaume de Nassau, décéda àBruxelles. Son frère cadet, Maurice, le stadhouder, hérita alors du titre et devint le chef incontesté dela maison de Nassau.

Dans le royaume, les faveurs dont bénéficiaient Luynes et sa famille suscitaient lemécontentement de certains grands qui se rapprochèrent de la Reine-mère toujours en exil à Blois.

Charlotte-Brabantine de Nassau vint à Paris à la fin du mois de février. Au mois de mars, elleeut une forte fièvre qui la laissa longtemps affaiblie. Au mois de juillet, elle alla voir le duc et leduchesse de Bouillon à Sedan puis au mois d’août elle se rendit à La Haye où l’appelait la successionde son frère aîné le prince d’Orange, Philippe-Guillaume. A cette occasion elle emmena avec elle sonfils cadet Frédéric qui faisait ses études à Sedan.

Pendant ce temps les avocats des La Trémoille discutaient avec les avocats des Bouillon lesclauses du contrat de mariage d’Henri de La Trémoille avec sa cousine germaine de Marie de LaTour d’Auvergne. Henri de La Trémoille pendant le dernier trimestre se rendit à la Cour pour faireagréer, par le souverain, son projet de mariage avec sa cousine germaine.

La première lettre de Jean Rogier, conservée dans les archives des La Trémoille, est adressée àCharlotte-Brabantine de Nassau et date du 28 juillet 1618.

28 juillet 1618 – Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Monsieur de La Mazure21 et moy suivant les commandemens que nous avons de VostreExcellence passant par Saulmur vismes Monsieur du Plessis22 luy rendismes vos lettres et exposasmes

19 François LEBRUN, Se soigner autrefois. Médecins, saints et sorciers aux XVIIe et XVIIIe siècles, Coll. Points Histoire,Le Seuil, 1995.20 Yves KRUMENACKER, « Les protestants dans la société française » in Hélène FRECHET (Coordination), Questiond’histoire : Les Sociétés Anglaise, Espagnole et Française au XVIIe siècle, Editions du Temps, Nantes, 2006, p. 276-292.21 Louis Le Liepvre, sieur de La Mazure, devait être le trésorier des La Trémoille. Il était à leur service depuis au moins 1595,année ou il s’était marié à la papauté. Son nom et son prénom ont été longtemps une énigme. C’est Grégory Vouhé,l’historien du château de Thouars, qui en a découvert la mention dans une lettre de Hugues Imbert au duc Charles-Louis deLa Trémoille du 5 novembre 1874 et qui a bien voulu m’en faire part le 26 mai 2009. Il mourut semble t-il en 1642.

Page 6: Années 1618-1623

6

mes créances. Il s’enquist bien particulièrement de vostre désir et intentions sur ce subject où il netrouva que justice.

Nous rencontrasmes au mesme lieu Monsieur du Plessis-Bellay23 avec lequel nous conferasmeset suivant son advis auquel les nostres furent conformes. J’escrivi à Monseigneur que nous estimionsbien à propos qu’il prist la peine de faire entendre par lettres audit Sr. du Plessis-Bellay (obligé à fairequelque séjour à Saulmur pour la succession de desfunct Monsieur son frère) sa volonté et les raisonsqu’il avoit de se trouver ceste année aux Estats de Bretagne ayant esbauché l’année dernière plusieursaffaires pour le service du Roy et utilité de la province, affin que ledit Sieur du Plessis-Bellaymesnageant les lettres scelon sa prudence s’en servist à temps et les fist voir à Monsieur du Plessis quipromet de travailler en ceste affaire de tout son pouvoir et de ne rien oublier de ce qui pourra apporterle contentement que Vostre Excellence souhaitte pour le bien et honneur de Monseigneur.

Monsieur de Rohan24 passa mardy dernier par icy où il n’a parlé que d’affaires générales, etd’où il partit /2/ pour voir Monsieur du Plessis et cercher avec luy quelque accommodement auxaffaires de Béarn, je croy que ceste veue n’a pas esté sans parler de l’affaire de Bretagne. Ce voyage ànostre advis n’a eu pour visée que d’éviter la rencontre de Monsieur le duc de Mayenne.

Madame, j’entends de Paris que Monseigneur presse le voyage de Monsieur de La Mothe pourmettre à exécution la procuration de Vostre Excellence que j’ay en commun avec le Sieur deLa Mothe. Je ne manqueray à vous rendre en ceste occasion comme en toute autre où je seray honoréde vos commandemens le fidelle service que je doibs n’ayant aulcun plus grand désir que de meconserver la qualité,

Madame,

de Vostre Excellence

Très-humble, très-obéissant ettrès fidèle serviteur. d’Iray

A vostre ville de Thouars, ce 28iesme juillet 1618.

Archives nationales 1 AP 357/1

28 juillet 1618 – Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je mets celles-cy au hazard de vous trouver à Paris, ayant appris parcelles que vous escrivés à Monsieur de La Mazure les commandemens que vous avés d’aller trouverMadame. Je ne laisse de vous supplier si vous n’estes point party de m’envoier la coppie de laprocuration que Monseigneur me donnera en commun avec Monsieur de La Mothe pour vendre auMayne et Bretagne et de retirer de mondit Sr. de La Mothe l’acte d’hommage de Madame la duchesse

22 Philippe du Plessis (1549-1623), sieur de Mornay, gouverneur de Saumur, conseiller écouté de Charlotte-Brabantine deNassau, second père, avec le duc de Bouillon, de Henri de La Trémoille. Les biographes de Duplessis-Mornay n’ont supercevoir que la duchesse douairière de La Trémoille était son principal soutien politique, pour cela il faut se rapporter àl’Histoire de la vie de Philippe de Mornay publiée en 1647 à Leyde chez Bonaventure et Abraham Elzevier et à ses deuxderniers volumes de correspondance publiés en 1651 et 1652 à Amsterdam chez Louis Elzevier.23 Zacharie du Bellay (1572-1644), sieur du Plessis-Anger, cadet d’une famille angevine, ancien compagnon d’armes du ducClaude de La Trémoille, fut choisi en 1605 par Charlotte-Brabantine de Nassau pour devenir le gouverneur de son fils. Ilassuma pendant dix ans cette fonction avec soin et compétence comme en témoigne sa correspondance conservée à la cote1 AP 645. En 1616, Charlotte-Brabantine de Nassau lui confia le gouvernement de Taillebourg dont Louis XIII le démit en1622. Après avoir suivi encore quelques années Henri de La Trémoille, il se retira en son château de Puyoger dans la paroissed’Availles-Thouarsais au sud-est de Thouars, où il s’employa à élever et placer ses nombreux enfants.24 Henri II de Rohan (1579-1638) 1er duc de Rohan, aurait pu être le mari de Charlotte-Brabantine de Nassau si celle-ci ne luiavait en 1597 préféré Claude de La Trémoille. L’on peut s’interroger sur ce qu’aurait été sa conduite si il avait été son mari,il est probable qu’elle l’aurait détourné de s’opposer au Roi de France comme elle le fit avec son fils et que comme à la fin desa vie il aurait combattu le roi d’Espagne et l’Empereur. Disputant à Henri de La Trémoille la présidence de l’ordre de laNoblesse aux Etats de Bretagne, Henri de Rohan incarne le parti de la guerre face à la colombe Charlotte-Brabantine deNassau. Jack Alden CLARKE, Huguenot Warrior : the Life and Times of Henri de Rohan, 1579-1638, Martinus Nijhoff, LaHaye, 1966 et Pierre et Solange DEYON, Henri de Rohan, huguenot de plume et d’épée 1579-1638, Perrin, 2000.

Page 7: Années 1618-1623

7

d’Ampville et nous l’envoyer. J’attends d’apprendre des nouvelles de vous tous par le retour deM. Peleus25 .

Je parts présentement pour mettre ordre à quelques affaires qui m’appellent en Gastines oùj’attendray les commandemens de Monseigneur premier que d’en partir. Si je ne reçoy nouvelles devous ou d’ailleurs qui m’en retirent. En quelque lieu que je sois soyés asseuré de mon service et quepersonne ne prise, n’estime et ne chérist plus que moy vostre amitié que je veus mériter et conserverpar le désir que j’ay de vous estre toute ma vie et de bon cœur,

Monsieur,

Très-humble serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce 28iesme juillet 1618.

Archives nationales 1 AP 357/2

18 septembre 1618 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Les commandemens que Monseigneur m’a faict par lettres de ne partir de Thouars sans voir leSr de Guynetoles et recevoir de luy les ventes d’une terre, La Barotière, mouvant de Montaigu,vendue par Monsieur le comte de Brissac, m’ont jusques à présent retenu dedans le Poictou d’où j’ayparty après avoir appris que Monseigneur en avoit traitté en ce lieu avec ledit Sr. de Guinetoles pourme rendre auprès de sa personne et tascher de luy rendre quelque agréable service, à quoy jem’efforceray avec soing et fidélité. Je croy, Madame, qu’il faict entendre à vostre Excellence larésolution qu’il a prise de partir demain pour aller à Monceaux trouver le Roy qui est depuis quelquesjours.

Monsieur Rivet26, en partant de Thouars, me chargea de lettres addressantes à VostreExcellence lesquelles je luy envoye. Elle apprendra par icelles l’estat des affaires qui sont venues à sacognoissance et son sentiment avec celuy de plusieurs et particulièrement de quelques uns deLa Rochelle qui s’honorent de la qualité de vos très-humbles serviteurs touchant le séjour de monditseigneur en ce lieu qui se comporte si bien à ce que je voy, et la fait à ce que j’appren si dignement aupassé, ses actions ayans contenté tout le monde, que je ne croy pas qu’il y ait rien à craindre de cestepart là ny à plaindre sinon qu’en un si long séjour il n’a guères advancé en ses affaires et peu receu detesmoignages de la bonne volonté de ceux qui gouvernent les générales. Dieu le /2/ maintienttousjours en bonne santé par sa grâce. Je l’en loue de toute ma force et le prie qu’il luy continue etaugmente ses bénédictions et qu’il vous rende aux vostres en bonne et heureuse santé. Ce sont lesprières ardantes que faict,

Madame,

de Vostre Excellence

Le très-humble, très-fidelle ettrès obéissant serviteur.d’Iray

A Paris, ce xviijesme septembre 1618.

Archives nationales 1 AP 357/3

25 Pierre Peleus, un huguenot, était le greffier du duché de Thouars.26 André Rivet, né en 1572 à Saint-Maixent, était depuis 1595 le chapelain des La Trémoille et le pasteur de Thouars. Il avaitépousé en 1596 à Thouars, Suzanne Oyseau, fille du pasteur François Oyseau. L’inventaire de la correspondance d’AndréRivet établi par Paul Dibon, Eugénie Estourgie et Hans Bots ne fait état d’aucune lettre du sieur d’Iray, hasard de laconservation ou manque d’affinité. Paul DIBON, Eugénie ESTOURGIE et Hans BOTS, Inventaire de la correspondanced’André Rivet (1595-1650), Martinus Nijhoff, La Haye, 1971.

Page 8: Années 1618-1623

8

11 octobre 1618 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay un extrême regret de ne m’estre trouvé au logis lorsque le messager de Hollande y vint.Non que j’eusse rien de bien particulier à faire entendre à Vostre Excellence, mais seulement pourvous asseurer de la continuation de la santé de Monseigneur que la dévotion du jeusne assigné audixiesme du courant appelé en ce lieu où grâces à Dieu il est heureusement arrivé le huictiesme. Il asuivy le Roy à Monceau, Villers-Costrets, Soissons, Lan et La Fère pour le gouvernement de laquelle,Monsieur de Luynes a traitté avec Monsieur de Vandosme, et de là tourne visage à Charenton, laissantle chemin de Liesse où le Roy et la Reyne ont esté en dévotion.

Tout ce temps là me semble avoir esté bien employé par Monseigneur a faire sa cours encoreque la bonne volonté que le Roy luy tesmoigne et les asseurances d’amitié et protestations se servicedes plus favoris ayent passé jusques icy sans beaucoup de fruict. Le Roy luy tesmoigne et lesasseurances d’amitié et protestations de service des plus favoris ayent passé jusques icy sansbeaucoup de fruict. Le Roy que l’on attendoit dès hier a changé sa résolution et faict estat deséjourner à Soissons où il a mandé le conseil. Messieurs de Vendosme, de Montmorency, de Rohan,de Montbason ont pris congé du Roy et laissé la Cour ou Monsieur le cardinal de Retz à présent chefdu Conseil a appellé Monsieur le duc son parent. Monsieur de Guise y est depuis trois jours, mais à cequ’il dit pour s’en retourner bien tost.

Monsieur l’ambassadeur des Païs-Bas a supplié le Roy d’avoir agréable le nombre des quatreministres depputés pour le synode27. Ce qui a esté refusé /2/, Sa Majesté ne désirant qu’aulcun desnommés face le voyage que M. du Moulin, que si les Eglises requièrent luy associer un aultre, elleveult que ce soit le Sr. Imbert, ministre d’Orléans, ancien compagnon de Monsieur Deageant, s’il estbien conseillé il s’en excusera n’y pouvant estre avec honneur puisque sans vérification. Mondict Sr.l’Ambassadeur retourne encore une fois pour impétrer la mesme chose.

Madame, Monsieur de La Mothe28 est dès longtemps en Bretagne et au Maine pour l’exécutionde la procuration que Vostre Excellence nous avoit donnée en commun. J’ay escrit deux fois dePoictou à Monseigneur pour attendre et recevoir l’honneur de ses commandemens touchant le cheminque j’avois à tenir ou pour y aller ou pour me rendre près de luy. Il me commanda celluy-cy sans meparler de l’autre et depuis n’ay receu aulcun commandement nouveau. M. de La Mazure a baillé unmémoire portant que le terme de la ferme de vostre terre de Berrie finissant à Noël prochain, montantà la somme de xvC livres est affecté au payement de la debte des héritiers de feu M. St-Etienne commeaussi que vostre Excellence désire la descharge de deux mille escus deubs à Monsieur de Netz et de cequ’elle doibt aux juge et lieutenant de Laval. Toutes lesquelles choses très raisonnables. J’ayreprésenté à Monseigneur avoir esté empruntées pour luy et tournées à son proffict et utilité ce qu’ilm’a tesmoigné bien comprendre et agréer.

M. Barbarin29, conseiller au prasidial de Poictiers, m’a escrit que Vostre Excellence l’auroitgrattifié dès le mois de janvier dernier d’une promesse du tiers des ventes de la maison de Bourcanismouvante de vostre terre de Berrie. Il en /3/ demande maintenant l’effect. Icelle maison estant adjugée

27 Les Eglises de France avaient chargé Duplessis-Mornay, Pierre du Moulin, André Rivet et Daniel Chamier de lesreprésenter au Synode qui se tint à Dordrecht du 13 novembre 1618 au 9 mai 1619 et condamna l’arminianisme et destituases ministres, mais Louis XIII s’opposa à leur départ. Emile G. LÉONARD, Histoire générale du protestantisme, Edition depoche Quadrige, P. U. F., 1988, tome II, p. 219.28 Daniel Hay (1563-1626), sieur de la Motte, était un cadet d’une des principales familles de la baronnie de Vitré, seigneursdes Nétumières dans la paroisse d’Erbrée. Il avait été baptisé le 20 avril 1563 à Vitré dans la religion protestante que sonpère, un conseiller au parlement de Bretagne, avait un temps professé. Daniel Hay était devenu, à l’âge de 28 ans, juge civil,criminel et de police de Laval, charge qui faisait de lui le premier magistrat du comté. Par la suite il cumula cette fonctionavec celle de capitaine de Laval et de son château. Couronnement de sa carrière, le 18 avril 1605, le jeune comte de Laval,François de Coligny, à la veille de son départ pour la Hongrie, lui remit l’intendance de sa maison et le gouvernement de sesaffaires. Lors de la prise de possession de l’héritage de la Maison de Laval au nom de son fils, Charlotte-Brabantine deNassau l’avait confirmé dans ses fonctions.29 Isaac Barbarin, écuyer, sieur du Bost, conseiller au présidial de Poitiers.

Page 9: Années 1618-1623

9

depuis peu à M. de Boisguérin30, veu mesme que la somme de xvC livres luy estoit deub par ledeffunct Sr. de Bourcanis pour laquelle comme dernier en hypotecque il n’entre point en ordre. Ilappréhendoit que ledit Sr. de Boirguérin obtint de Monseigneur (sçachant qu’il est honoré de sabienveillance) une grattification du tout. J’ai osé l’asseurer, Madame, que la terre estant en mesmemain vostre Excellence n’auroit point changé de volonté qu’elle estoit trop religieuse en sespromesses et faisoit trop d’estime de luy et de la maison à laquelle il s’estoit allié pour en perdre lasouvenance. Je croy que Monseigneur retournera bien tost en Cour. Je me tiendray prest à sescommandemens et attendray l’honneur des vostres, me conservant la qualité,

Madame,

de Vostre Excellence

Très-humble, très-obéissant, très-fidelle et très obéissantserviteur et subject. d’Iray

A Paris, ce xjesme octobre 1618.

Archives nationales 1 AP 357/4

11 octobre 1618 - Paris

à Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay mis deux lettres au hazard estant en Poictou. Je pense bienqu’elles ne vous auront pas esté rendues. La perte n’en sera pas grande d’aultant qu’elles ne vousparloient point d’affaires et le mal n’en rendra qu’à moy qui me voulois remémorer en vostre souveniret comme par icelles je vous mettois en peine de la disposition de Mlle du Monceau, vostre cousine.Maintenant je vous asseure par celle-cy de sa guérison. Je vous envoye des lettres que m’a addresséM. de La Mazure pour vous les faire tenir. J’en ay de vous pour luy que je luy envoierai poureschange. Je vous supplie d’asseurer de mon fidelle service M. Berthold31 et Madame Toinette32 etque je les reveille affin qu’ils perdent la souvenance d’une pauvre personne qui ne les a servi jusquesicy à faulte d’en rencontrer les occasions que les attend avec impatience. Cecy part,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Paris, ce xjesme octobre 1618.

Archives nationales 1 AP 357/5

28 octobre 1618 - Parisà Monsieur de Champdor

Monsieur, Oultre que j’ay receu les tesmoignages continues de vostre bonnevolonté par une infinité de bon offices, mais encore de nouveau par les asseurances que vous m’endonnés en vos lettres du dernier du mois précédent et d’abondant en la souvenance que vous avés demoy aux lettres que vous escrivés à M. Brusse. Je vous remercie de vos nouvelles, de nous n’enattendés point et pour vous oster toute espérance d’en avoir pour le moins de celles de la Cour.Souvenés-vous que vous cognoissés un homme, et je le dis à sa confusion, qui a esté si peu curieuxque d’avoir passé la meilleure partie d’une année sans voir ny la Cour ny le Louvre, mais quant… ,quant… . Souvenés vous aussi que la douceur de vostre compagnie a esté la principale cause.

30 Marc-Antoine Marreau (1557-1633), sieur de Boisguérin, fils d’un receveur des décimes de Loudun, un compagnon delutte d’Henri IV, ancien gouverneur de Loudun. Cette lettre nous apprend la date à laquelle il acheta la terre de Bourcany enBeuxes.31 M. Berthold était un Silésien que Charlotte-Brabantine de Nassau avait choisi pour être le précepteur de son plus jeune filsFrédéric. Ce fut pour celui-ci une rude tache, car le jeune comte de Laval défiguré par un bec de lièvre était un psychotique.Cf. sur notre site la correspondance de Frédéric de La Trémoille et de Berthold.32 Antoinette Guillemar la femme de chambre de Charlotte-Brabantine de Nassau.

Page 10: Années 1618-1623

10

Je suis pressé si fort par le Sr. de Villefort, que j’ay fort grand peine à m’exprimer. Mes baisesmains de grâce à tous mes bons amis et amies. Je ne sçay si Madame Toinette a perdu la souvenancedes promesses qu’elle m’a faict de m’aimer, qu’elle y prenne garde, car si elle le faict, je la ferayexcommunier. Devinés quel suplice, car je ne croy rien si mal >>> que l’excommunication. Encore uncoup mes baise mains à tout le monde, mais à vous particulièrement à qui je suis du cœur etd’affection et à ma mode sans trancher un brin du courtisan,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Paris, ce xxviijesme octobre 1618.

Archives nationales 1 AP 357/6

4 novembre 1618 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Il y a quelques temps que le Sr. Mony, marchant en ceste ville, ayant charge et transport duSr. Gilles, marchant à La Rochelle, vint trouver Monseigneur pour luy demander payement de lasomme de dix huict cens onze livres portée par une promesse de Monseigneur audict Gilles delaquelle ledict mony est porteur ensemble de procuration dudict Gilles, ladicte somme de xviijC xilivres33 restant à payer de plus grande deüe cy-devant audict Gilles pour vendition d’armes. VostreExcellence a voulu prendre le soing du payement de ceste partie (comme elle a faict de ce qui a estédésjà acquitté) et escrit au Sr. Brusse qu’elle l’a feroit acquiter en Hollande si Monseigneur luyenvoyoit un mandement sur M. de Netz ou sur moy la rembourser.

Depuis vos lettres escrites, Madame, iceluy Mony a retiré de Hollande la promesse cy-dessuscomme luy mesme m’a dict et prétend la faire payer en ce lieu, ce que Monseigneur a promis faire auplustost, encore que je voye pas que cela se puisse si promptement avec facilité. Monseigneur vous enescrit, Madame, et vous rend, je m’asseure humbles grâces des tesmoignages asseurés que de jour enjour vous luy rendés de la continuation de vostre bonté et soing en ses affaires. Je n’ay rien à adjouterà la présente qu’une très-humble supplication que je vous fay de croire que je seray toute ma vie,

Madame,

De Vostre Excellence,

Très-humble, très-obéissant ettrès fidèle serviteur. d’Iray

A Paris, ce 4esme novembre 1618.

Archives nationales 1 AP 357/7

29 novembre 1618 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je vous ay cy-devant escrit l’estat auquel est maintenant la partie deüe au Sr. Gilles marchantde La Rochelle. Pour celle que M. de Netz a fourny de laquelle les deniers ont tourné au service etutilité de Monseigneur. Elle doibt estre acquittée des deniers qui proviendront d’une ordonnance deM. Phelippeaux, thésorier de l’Epargne, de la somme de vMvijC livres à l’acquist du Sr. Guytonfermier des impositions des rivières de Charente et Gironde, la somme de vijC livres qui restera àacquitter le pourra facilement tirer du fonds des assignations de mondict Seigneur.

33 Sur les particularités des signes de numérotation romains hérités du Moyen-Age Cf. Charles HIGOUNET, L’Ecriture,Coll. Que Sais-je ?, Presses Universitaires de France, 5e édition, 1976, p. 107 et Gabriel AUDISIO et Isabelle RAMBAUD,Lire le français d’hier. Manuel de paléographie moderne, XVe – XVIIIe siècle, Collection U, Armand Colin, Paris, 3e édition,2005n p. 97-112.

Page 11: Années 1618-1623

11

Pour ce qui est deub à Poictiers aux chanoines de St. Hilaire et à la vefve de deffunct Sausay,nous avons un mandement dudict Sr. Phelipeaux de la somme de xiiijM iijC livres à l’acquist deM. Boyer receveur général des finances audict Poictiers sur les deniers de sa charge des quartiers dejuillet et octobre. Monseigneur a cy-devant escrit au Sr. Garnier thésorier de St-Hilaire pour sçavoir siluy et ses confrères voudroient prendre pour contact ledict mandement guarenti bon et valable,acquiter la partie de ladicte vefve Sausay et fournir le surplus ; ou bien retenir entre leurs mains ledictmandement qui leur seroit délivré en donnant récépicé, en faire les poursuittes où il ne pend qu’unesignification audict receveur général ou son commis et assignation par devant MM. les thésoriers et enrecevoir les deniers pour se payer par leurs mains et restituer le reste. Ledict Sr. Garnier escrit qu’il ena communiqué à ses confrères qui ne peuvent gouster telles ouvertures, que toutesfois luy envoyantcoppie dudict mandement (ce que j’ay faict). Il verra ce qui sera de faire pour le service deMonseigneur. Il est vray, Madame, que les avances que vous avés faict, le terme de Noël de vostrebaronie de Berrie affecté à M. d’Aubeville, les parties de MM. du Plessis-Bellay et de LaBourdillière, des juge et lieutenant de Laval, celle du Sr. de La Naslière34 et assés d’aultres …/2/,d’aultres qui pressent, attendant un secours prompt et extraordinaire ne voyant aulcun fonds enl’ordinaire pour les acquitter. Je croy, Madame, que le Sr. Brusse aura particulièrement faict entendreà V. E. ce qu’il aura dict et faict en sa négotiation pour de l’argent contant.

Monseigneur m’a faict l’honneur de me dire que vous aviés convenu pour la demie annéeprésente des pentions de Monseigneur le Comte et de Madamoiselle recognoissant, Madame, que cequ’il vous a pleu faire a tousjours eu plus d’égard à son proffict qu’au vostre et eu bien de ses affairesque des vostre propres. De moy, je ne manqueray jamais à aulcun des commandemens que je recevrayde V. E.

A mon arrivée en ce lieu je trouvay que le Sr. Demeufves35 estoit assigné sur M. de Netz et surmoy pour la somme de iijM vjC livres, à laquelle on a transigé, avec sa belle mère et luy, à payerdedans quatre mois prochains, deux desquels sont desjà expirés. Pour vous mettre hors de toutes lesdemandes qui vous pourroient estre faictes par les héritiers ou créanciers du deffunct Sr. de Bourron36,mais on ne se souvient pas que auparavant il avoit esté résolu au conseil que ledict Demeufves seroitpayé des deniers provenans de la vente que feroit Monsieur de La Mothe en Bretagne. De sorte quecela ne peut empescher le remplacement de la partie de Monsieur de Netz, ledit Demeufves atransporté son deub et assignation au Sr. Demeufves de Thouars, son oncle.

J’ay un extrême regret, Madame, que je n’aye acquitté ce que V. E. doibt au Gaigneux. Il m’aesté impossible jusques à présent, n’ayant touché que ce que Monsieur de Netz me délivre pour ladespense de Monseigneur et rien d’ailleurs hormis iijCi iijXX livres du fermier de Montaigu depuis quevous, Madame, et Monseigneur m’avés commis à la recepte et despense de sa maison. Si je puisrecouvrer de l’argent je ne faudray de l’acquitter.

J’ay veu souvent M. de Ligny par le commandement de Monseigneur qui aussi l’a souvent veuet sollicité. Il a /3/ asseuré Madame d’Elbène37 de sa partie. Je n’ay receu aulcun commandement deMonseigneur pour Bretagne, où Madame la maréchale de Fervacques est malade. On a faict icy lesprières pour elle. On l’a creu à l’extrémité, mais ce bruict n’est pas si grand, Monsieur de Joinville aesté la voir à Montfort. La Cour est assé stérile de nouvelles. L’affaire de Béarn s’addoucit, grâces àDieu, lequel je prie estre vostre guide pour vous rendre bientost aux vostres et ramener en paix envostre maison. C’est le souhait que faict,

34 Josias Bidault, seigneur de La Naslière de Blanzay.35 Philippe Demeufves était entré en 1606 au service des La Trémoille. Il était alors l’un de leurs secrétaires à Paris. Il étaitmarié à Anne Vaustel. Leur fille, Charlotte, fut présentée le 17 juillet 1616 au temple de Charenton par Henri deLa Trémoille et Louyse de Clermont. Jules DELABORDE, « Copie des fragments des registres de l’Etat civil des protestantsdétruits par l’incendie du Palais de justice de Paris en 1871 », B.S.H.P.F., tome XXI, 1872, p. 274-275.36 Gilles de Bourron avait été le chargé d’affaire à Paris de Claude de La Trémoille et de Charlotte-Brabantine de Nassau. Ilmourut en 1611. Nous avons publié sur notre site sa correspondance conservée à la cote 1 AP 346 du Fonds La Trémoille desarchives nationales de France.37 Marguerite d’Elbène, veuve d’Alexandre d’Elbène, colonel de l’infanterie italienne. Les d’Elbène étaient venus d’Italie àla fin du XVe siècle. Jean-François DUBOST, La France italienne XVIe-XVIIe siècle, Coll. Histoires, Aubier, 1997.

Page 12: Années 1618-1623

12

Madame,

Très-humble, très-obéissant ettrès fidèle serviteur. d’Iray

A Paris, ce xxixiesme novembre 1618.

Archives nationales 1 AP 357/8

18 décembre 1618 - Paris

à Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Par mes deux précédentes, j’ay amplement respondu à celles dequelles il avoit pleu à VostreExcellence m’honorer avec mes dernières j’avois enfermé plusieurs lettres que l’on m’avoit apportéde divers endroits pour vous faire tenir. Je croy qu’à présent le Sr. de Villefort, escuyer de Monsieurde Chastillon, aura mis ordre de vous les faire rendre.

Suivant vos commandemens, Madame, j’ay délivré au Gaigneux la somme de viijC lxx livres àvostre acquist et retiré avec ses quittances une promesse de M. de La Mothe de la somme de vjC livrespour la garniture des mulets et fausse de vostre littière et une certiffication de MM. Chauveau et dePontaubré de la sommation de ijC lxx livres pour la garniture de noir de vostre carrosse ayant par lesdictes quittances déclaré n’avoir aulcun aultres papiers ne mémoires par lesquels vous luy fussiésobligés, Madame, ny aulcun aultre pour vous.

Le Sr. Garnier thesorier de St-Hilaire de Poitiers m’escrit qu’il fera voir à ses confrères lacoppie du mandement ordonné pour acquitter lesdictes parties et celle de la vefve Sausay ainsi que jevous escrivois par mes précédentes. J’attens scelon sa promesse qu’il me face entendre leur intention.J’ay envoyé à Thouars une rescription du Sr. Boyer de la somme de xvC livres à l’acquict du Sr.Falloux pour payer ce qui estoit deub de reste à la garnison pour l’année 1617. M. de La Mazurem’escrit que les fermiers de vostre baronie de Berrie se plaignent des poursuittes que faict contre euxle Sr. Bouffet et demandent main levée de ses arrests. Pour empescher que cela /2/ n’engendre dutrouble aux affaires de V. E. J’ay esté trouver le Sr. Héraud pour prendre jour avec le Sr. Abbé qui acharge à ce qu’il dict dudict Bouffet et aviser aux moyens d’accommoder cela par compensation de cequ’il doibt et aultrement. En cela, Madame, et en toute autre chose je m’efforceray de vous rendre letrès-humble service que je doibs. Le reste des affaires de vostre maison roule à l’ordinaire.

Aux publics le crédit des Jésuites a esclaté aux despens du Sr. Deageant pour sa récompensed’avoir esté l’un des principaux ministres de leur restablissement. Je sçay, Madame, que quelque autremieux informé que moy vous aura appris sa disgrâce de laquelle les causes se content diversement. Ladouceur et modération qu’il a voulu apporter en l’affaire de Béarn n’est pas une des moindres. Jeregrette son esloignement pour ne voir désormais personne à qui facilement on puisse s’addresser etaussi qu’entre tous c’estoit celuy à qui vous donniés le plus de créance. Il s’est un peu remis, maisavec beaucoup de peur et peu de certitude pour la puissance ce ses adversaires.

La disposition de Monseigneur est bonne grâces à Dieu lequel, je prie incessamment pour lavostre en la qualité,

Madame,

Très-humble, très-obéissant ettrès fidèle serviteur. d’Iray

A Paris, ce xviijesme décembre 1618.

Madame la mareschalle de Fervacques est tousjours griefvement malade et sans espérance deguérison.

Archives nationales 1 AP 357/9

18 décembre 1618 – Parisà Monsieur de Champdor

Page 13: Années 1618-1623

13

Monsieur, Je vous envoye un pacquet de Monsieur de La Mazure. Monsieur duMonceau vostre oncle38 ne m’a rien envoié pour vous faire tenir. Il se réserve à escrire d’icy où nousl’attendons tous les jours sur l’asseurance qu’il nous donne par ses dernières si nous le tenons une foisnous l’entretiendrons paisiblement et le gouvernerons en homme de son aage et de son mérite pourl’amour de luy et de vous. De vous dire les raisons de sa venue en ce lieu je ne le sçay point, sinonque ayant affaire à Orléans. Il est de trop bonne compagnie et nous aime trop pour ne donner pasjusques à nous. Je ne sçay que vous mander de nouveau en eschange de tant de nouvelles desquellesvous nous avés cy-devant faict une si bonne part. Je suis si peu curieux, comme vous sçavés et de sipeu d’intelligence que je n’ay pas moien d’entretenir ce commerce principalement aux affaires decour, de laquelle je n’approche jamais sans un tremblement de membres et une palpitation de cœur.Cela me faict croire que je ne seray jamais bon courtisan.

Je vous dirois pourtant bien la disgrâce de M. Déageant39, mais pour n’en sçavoir pas lesparticularités vous n’en apprendrés rien pour l’heure, je ne pourrois parler de cela qu’avec incertitudeet y aller qu’a tastons, mais je marche bien plus ferme et m’explique avec beaucoup plus d’asseurancequand je vous di que je suis de cœur et d’affection,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Paris, ce 18iesme décembre 1618.

Je baise les mains à Madame Toinette. Je vous supplie de luy dire.

Encore que je vous escrive en papier doré ne croiés pas que ce soit par gentillesse de cour, maisil m’a tombé entre les mains.

Archives nationales 1 AP 357/10

31 décembre 1618 - Paris

à Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Incontinent vostre lettre receu, Monseigneur, a changé la résolution que son conseil luy avoitfaict prendre d’envoyer à Poictiers un mandement qu’il a entre main de la somme de xiiijM iijC livrespour satisfaire aux parties des chanoines et de la vefve Sausay. Croyés, Madame, que si Monseigneuravoit ordonné ce mandement (duquel on n’eust peu retirer que la moitié pour l’un et l’aultre dedanssix sepmaines ou deux mois scelon les formes et l’ordre que trément les thésoriers et receveur pourl’acquist de telles choses comme V. E. sçait très bien) pour le payement de ce que dessus que ce n’apas esté manque de soing pour vous Madame à qui il doibt tant et entant de façons et pourMesseigneurs vos aultres enfans. Je puis tire en conséquence (et vous supplie très humblementMadame de donner créance à mes paroles et vous asseurer que jamais je ne vous diray que desvérités) que je vois de plus en plus qu’oultre les recognoissances naturelles, il est vivement touché desressentimesn pour tant de soing et de peines qu’il vous a pleu prendre, et que vous prenés encores tousles jours à son occasion, mais je ne puis exprimer le regret qu’il a de n’avoir plustost mis ordre à fairefonds pour satisfaire à la rentré de vos deniers dotaux, aux pensions de Monseigneur le Comte et deMademoiselle et au remplacement des quinze cens livres que vos fermier de Berrie doibvent fournir àMonsieur d’Auberville suivant vos commandemens, Madame, et ainsi qu’il vous a pleu affecter laprésente dîme année de la ferme de vostre dicte terre de Berrie au payement de ceste partie. En celason conseil a la plus grande part de la faulte et moy qui m’excuse qu’en ce que jusque à la réception

38 L’on ne connaît pas le prénom de M. Du Monceau, l’oncle de M. de Champdor. Il avait été un des secrétaires de Claude deLa Trémoille et Charlotte-Brabantine de Nassau. Celle-ci le choisit en 1611 pour assumer la fonction d’intendant à Thouars.39 Guihard Déageant (1574-1639), un Dauphinois, premier commis de Barbin, qui fit parti de la coterie qui contribua àl’élimination de Concini. Pour le prix de cette participation, il fut nommé contrôleur général des Finances. Au bout de dix-huit mois, après s’être fait détester par son caractère à la fois des ministres et des diplomates il fut démit de sa charge decontrôleur général et nommé premier président de la Chambre des comptes de Grenoble.

Page 14: Années 1618-1623

14

de vos dernières, Madame, je n’avois pas appris au /2/ vray vos communes résolutions pour cestaffaire ayant seulement ouy de Monseigneur que vous en estiés d’accord, et aussy que ce qui avoitesté escrit s’est perdu avec quelques autres papiers (non toutefois de grande conséquence) renfermésen sa boeste, laquelle de puis long temps on n’a peu recouvrer.

Je supplie très humblement vostre bonté, Madame, de recevoir pour mon excuse que en le peude cognoissance que j’ay eu desdictes affaires. Les continuelles sollicitations desdis chanoines etvefve Sausay et les menaces de ceux-là de reprendre leurs anciens erremens et vous poursuivresuivant la puissance qui leur en est laissé par leur contract à desfault de payement me faisoientappréhender de vous voir rentrer dedans une affaire de laquelle pour sa difficulté vous avés eubeaucoup de peine à sortir. Et pour y mettre ordre en satisfaisant à vos justes intentions et deuxcommandemens que vous me faites.

Monseigneur commanda hier de traitter avec le Sr. Boyer pour ledit mandement et d’encomposer à la somme de xiijMviC livres sçavoir une rescription dudict Boyer addrssant à MonsieurGarnier de la somme de vijM livres à l’acquist du commis à la recepte générale, et le parsus montant lasomme de vjM vjC livres doibt demeurer des fonds audict Sr. de Netz jusque à ce que par vostrecommandement elle soit retirée. Vous adviserés, Madame, s’il vous plaist avec Monseigneur ce quej’auray à faire pour le remplacement desdicts xvC livres dudict Sr. d’Auberviller estant trèsraisonnable de vous en rembourser au plustost, ainsi que juge très bien mondict Seigneur qui vousrendra tousjours, Madame, l’obéissance, l’honneur et le respect qu’il vous doibt et mon très humble ettrès fidelle service à vos commandemens. Monseigneur fut sabmedy à la chasse avec le Roy duquel iln’a point encore pris congé. On tient icy pour certain que Sa Majesté faict levée de huict mil hommesde pied et douze cens chevaux /3/ et mesmes que desja il y a des commissions délivrées. On faictcourir beaucoup de faux bruicts. Vous en apprendrés Madame de particulier par Monseigneur ou parautres mieux informés que moy.

L’approche de l’assemblée de l’assemblée à La Rochelle allarme tout le monde. Ceux desRochellois qui sont icy pour affaires publiques ont commandement de ne sortir de la ville sanspermission. On a dépesché après le messager pour saisir ses lettres. Monsieur Déageant se remet fortbien.

Le Sr. de Champdor m’a faict entendre le commandement que me faict V. E. de vous envoierdeux tomes du livres de M. du Moulin intitulé Le Bouclier de la Foy40 ce que je fay par ce porteur. Jen’adjousteray à la présente que les très humbles supplications que je vous fay, Madame, d’avoiragréable que toute la vie je puisse estre honoré de la qualité,

Madame,

De Vostre excellence

Très-humble, très-obéissant ettrès fidèle serviteur. d’Iray

A Paris, ce dernier jour de l’an MVICxviij.

Archives nationales 1 AP 357/11

1619 est une année fort troublée par les affaires publiques. Dans la nuit du 22 février, laReine mère, Marie de Médicis s’évada de Blois où elle était exilée depuis l’assassinat de Concini etavait rejoint à Loches le duc d’Epernon. La première guerre du fils et de la mère fut brève, unaccord, signé le 30 avril à Angoulême, scella la réconciliation pour quelque temps.

Le parti protestant pour sa part était en effervescence à propos de l’affaire de Béarn.Conciliant, Louis XIII autorisa au mois de septembre la tenue d’une assemblée à Loudun41, villecomptant une forte communauté huguenote, située à cinq lieues de Thouars.

40 Pierre du MOULIN, Le Bouclier de la foy ou défense de la confession de foy des églises réformées du royaume de Francecontre les objections du sieur Arnoux jésuite, Charenton, A. Pacard, 1618, in-8°.41 Sur l’assemblée de Loudun Cf. Frères HAAG, La France protestante, Tome VI, p. 203-208.

Page 15: Années 1618-1623

15

1619 est pour Henri de La Trémoille une année décisive à la suite de son mariage avec sacousine-germaine Marie de La Tour d’Auvergne. Cette union concrétisait le projet que Elisabeth etCharlotte-Brabantine de Nassau avaient élaboré dès la naissance de Marie en 1601. Le contrat demariage fut passé le 19 janvier 1619 et le mariage célébré le 18 février suivant.

Les aléas de la politique arrachèrent rapidement Henri de La Trémoille des bras de sa jeuneépouse. Il dut une première fois la quitter pour assurer le Roi de sa fidélité après la fuite de la Reine-mère, il dut à nouveau la quitter au mois de juin à la suite de la mort de la maréchale de Fervacques,pour entrer en possession du comté de Montfort en Bretagne42.

Louis XIII était à Tours depuis la fin du mois de mai, attendant que la Reine-mère vienne lerejoindre. Henri de La Trémoille, à la fin du mois de juin, alla lui rendre ses devoirs. Pendant cetemps, Charlotte-Brabantine de Nassau était à Paris. A la fin du mois d’août, elle retrouva à Moretsa soeur Elisabeth qui avec une partie de son petit troupeau, emmenait sa fille aînée, Marie, en sonménage à Thouars. Le 9 septembre, elles étaient à Thouars.

Dans le courant du mois de septembre, Henri de la Trémoille se rendit en Bretagne pour allerpour la seconde fois présider l’ordre de la noblesse aux Etats qui se tinrent cette année là à Vannesdu 28 septembre au 13 octobre. Pendant cette session, il reçut une demande de l’Université de Leyded’autoriser André Rivet, le pasteur de Thouars, à quitter son service pour enseigner en cetteuniversité la théologie.

Elisabeth de Nassau dans les premiers jours de novembre prit le chemin de Turenne avec sonpetit troupeau.

1er janvier 1619 – Parisà Monsieur de Champdor

Monsieur, Ce mot vous apprendra que Monsieur du Monceau vostre oncle estheureusement arrivé en ce lieu d’hier au soir. Seulement je ne sçay s’il vous escrira. Je l’ay pourantadverty de la voye du coche et de son partement. Pource que vous avés esté en peine de sa santé, jevous en mande l’estat. J’envoie à Madame deux volumes du dernier livre de Monsieur du Moulin. Jecroy que dedans peu nous vous verrons Dieu aydant et aurons tout loisir de vous entendre biencontent si en ceste entreveue il se présentoit quelque occasion de vous tesmoigner que je suis de cœuret d’affection,

Monsieur,

Vostre plus humble et très-obéissant serviteur.

d’Iray

A Paris, ce premier jour de l’an MVICXIX.

Je vous supplie d’asseurer en vostre cœur ceux de qui j’ay l’honneur d’estre cogneu de montrès humble service.

Archives nationales 1 AP 357/12

[27] février 1619 – Parisà Henri de La Trémoille43

Monseigneur,

A mon arrivée en ce lieu, j’ay veu Monsieur de Netz, auquel j’ay baillé, scelon voscommandemens, la procuration que vous et Madame avés passé en son nom, avec l’obligation de

42 Le douaire de la maréchale de Fervacques, veuve en premières noces de Paul de Coliogny, comte de Laval, était assis surle comte de Montfort.43 Cette lettre non datée dont la cinquième page manque, qui est de la main de Jean Rogier, Sieur d’Iray, est classée avec leslettres de Hannibal de La Trémoille, le demi-frère bâtard de Henri de La Trémoille. La référence qui y est faite de l’évasiondans la nuit 22 février 1619 de Marie de Médicis de Blois, où elle était exilée depuis l’assassinat de Concini, permet deproposer cette date.

Page 16: Années 1618-1623

16

Monseigneur le duc de Buillon de la somme de xxxiijM livres payable en ce lieu et l’estat depayemens que vous avés ordonné estre faict de ladicte somme. Je m’asseure, Monseigneur, qu’iltravaillera à l’exécution de vos commandemens.

J’ay veu Messieurs Justel et Le Vasseur, qui m’asseurent que l’argent est prest, et que, sans leconseil de direction, qui se tient aujourd’huy, où ledict Le Vasseur a nécessité de se trouver, on eustpeu toucher ceste après disnée. Ce sera pour demain, Dieu aidant. Vos lettres, Monseigneur, n’ontesté rendues à Monsieur le Chancelier, ny aux autres suivant leur addresse.

Vostre conseil n’ayant pas esté d’avis de parler jusques à vostre retour en ce lieu de l’affaire dujuge des exempts de Laval, qui poursuit insolemment les officiers dudict Laval pour avoir règlementau parlement où ils se sont portés appellant de sa réception prétendant le faire déclarer incapable, etpour cet effect ont présenté requeste à ce qu’il fust examiné. Voilà où est l’affaire en la sollicitationde laquelle, le Sr. Vautorte a recouvré un assés gros volume contenant les coppies vidimées par arrestde la Cour de tous les tiltres concernans les privilèges de vostre maison de Laval.

Je croy, Monseigneur, qu’il seroit a propos que ledict volume fust entre nos mains ou dequelqu’un /2/ ou de quelqu’un des vostres, pour vous en servir aux occasions et que pour ce faire vousprissiés la peine d’escrire audict Sr. de Vautorte ou qu’il le vous mist entre les mains, ou que s’il yfault observer les formes, faire sçavoir au Sr. Falut le lieü où il est. Je croy qu’il a esté produict en unprocès contre des tisserans auquel vous avés quelque intérest, Monseigneur, de sorte qu’en demandantcommunication dudict procès on pourroit retenir ledict volume duquel vous pouvés juger l’utilité.

Je n’ay encores peu voir le Sr. Demeufves, mais j’appren qu’il n’a point fourny les moyens defaux qu’il s’est chargé de dresser sur les mémoires qu’il a entre mains, je tascheray encoresaujourd’huy de le voir, tant pour ce subject que pour vos aultres affaires, l’une desquelles, à sçavoircelle d’Arron est en estat d’estre jugée au rapport de Monsieur de Champdieu. Ne reste que d’en faireimprimer les factions, et en poursuivre le jugement.

Le procès de Pousauges est és mains de Monsieur Brussol. Pour le jugement il faudra consignerceluy contre le marquis de Nesle est en mesmes mains. Et celuy contre Monsieur de Crequy en cellesde Monsieur Boulanger. Celuy contre Monsieur du Bellay et Drouin est ès mains de Monsieur Jubin.Il reste d’Aron les conclusions de Messieurs les gens du Roy à cause de la requeste civile, celuycontre ledit Sr. du Bellay appellant d’une sentence donnée aux requeste à vostre profit, Monseigneur,touchant l’hommage de Terchant est distribué à Monsieur Catinant. Tous ceux là sont en bon train ets’ils sont bien poursuivis, en bon temps, car la chambre de l’Edit est quasi sans affectation.

Madame la mareschalle de Fervacques est à l’extrémité. Monsieur le prince de Joinvillegrandement soucieux de son salut luy envoya sabmedy des cappucins. Les advocats /3/ et procureursfiscaulx de vostre ville de Laval escrivent à Vostre Excellence et la supplient très-humblement de leurcommender ce que vous pourrés lires en la minutte de leur requeste conformément à l’usance deThouars et Vitré. Je partiray d’icy le plustost que je pourray pour aller où vos commandemensm’appellent. Cela pour vos affaires particulières.

Pour les générales, vous avés sceu, Monseigneur, l’enlèvement de la Royne mère, duquel voiciles particularités sur la minuit de jeudy à vendredy, elle sortit avec M. le comte de Brennes et deuxexempts de ses gardes, quelques uns mettent Marsillac en la trouppe, trois de ses damoiselles : deuxitaliennes et une françoise, passa par la petite porte, qui donne sur la terasse, pour aller vers le parc,descendit par une petite eschelle de bois (il en fut trouvé de cordes dedans son cabinet) dedans lefossé, traversa la ville, mes portes de laquelle ne ferment point et au fors bourg de Vienne monta enson carrosse qu’elle trouva tout prest. Elle y fut recuillie par xxv ou xxx cavaliers conduits par le Sr.de Sillière, cappitaine de Loches et à demie lieue par Monsieur de Tholoze assisté de cinquantecuirasses, trouva à Montrichard six chevaux de relais pour son carrosse et à unne lieüe dudict Lochesrencontra Monsieur d’Espernon assisté de deux cens chevaux. De Loches, où elle de reposa quelquetemps. Elle escrivit au Roy et à Madame de Guiercheville à Blois pour l’aller trouver à Angoulesmeavec son train. Elle partit sabmedy de grand matin accompagnée de mondict Sr. d’Espernon avec trois

Page 17: Années 1618-1623

17

cenx chevaux. La nouvelle fut sceue, à St-Germain, sabmedy44 à une heure après-midy, le Roy estant àla chasse. A son retour, il en tesmoigna un grand mescontentement /4/. Il s’achemina dimanche enceste ville contre la résolution qu’il avoit prise d’aller à Fontainebleau à ce que l’on dict où ilassembla son conseil (sans pourtant y attaller aulcun des grands) où il fut résolu de mander leparlement an lendemain pour luy faire entendre son intention contre mondit Sr. d’Espernon et quejeudy il iroit audict parlement en personne pour faire publier sa déclaration et leur parler de lavérification de quelques edicts. Il y fut aussi résolu que Sa Majesté partiroit sabmedy pour aller àTours. Le lundy matin ces résolutions furent changées. On fit entendre au parlement que le Roy avoitreceu lettres de la Royne sa mère, dont il commanderoit la lecture en son conseil, que ce faict il leurferoit plus particulièrement sçavoir sa résolution sur la déclaration contre mondict Sr. d’Espernon. Ona dépesché en diverses province de ce royaume, Messieurs de Chomberg et de La Rochefoucauld sontcommandés d’aller en leurs gouvernement. On parloit hier d’envoyer vers la Royne Messieurs deBrissac et de Marillac. On a dépesché à Monsieur Desdiguières le Sr. Bernard son secrétaire. Onparloit hier d’envoyer vers Monseigneur le duc de Bouillon et Monsieur de Nevers.

Monsieur de Rohan a veu Monsieur le Garde des Seaux auquel pour lever tout le soupçon quieust peu se former de Monsieur de Sully et de luy. Il a offert (à ce que l’on dict) d’envoyer àl’assemblée de La Rochelle, d’où il fera en sorte que l’on escrira au Roy, que tant ladicte assembléeque tout le parti de la Religion portera ses moyens et sa vie pour l’exécution de ses commandemens.On adjouste qu’il a requis quelques uns de faire semblable qui ont remi à attendre les commandemensde Sa Majesté. Il publie assés haut que l’affaire de Béarn est accommodée, mais j’appren d’ailleursqu’il y a d’assés grandes apparences d’accommodmeent, mais rien encores de résolu.

Vous aurés sceu, Monseigneur, l’ordre et le façon qu’on y a tenu et comme l’on vint user desmesmes formes qui furent observées pour l’assemblée de La Rochelle lorsque Messieurs /5/ (ladernière page de cette lettre manque).

Archives nationales, 1 AP 388/33 (494-497)

8 mars 1619 – Saumurà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Partant de Paris, je vous escrivis bien particulièrement ce que j’avois appris en mon séjour auxaffaires tant générales qu’aux vostres particulières et à mes lettres j’attendray par vostre response lescommendemens de Vostre Excellence pour obéir à ceux que j’ay receu de vous. J’ay veu Monsieur duPlessis et luy ay rendu vos lettres. Il vous rend grâces de vostre souvenir et oultre qu’il vous enasseure par ses lettres m’a baillé la charge de vous rendre certain de son service qu’il conserveramesme désir de vous le tesmoigner à l’advenir qu’il a faict au passé. Que au faict présent, il estimeque vous debvés aller trouver le Roy, luy offrir ce qui est en vous et le suivre. Que cela pourra servir àvostre bien et l’advancement des Eglises et mesmes frapper coup à la délivrance de Monseigneur lePrince. Vostre qualité, Monseigneur, joinct à la proximité que vous avés avec luy servant comme d’ungage de sa fidélité. Vous apprendrés par luy mesmes ses propres conceptions m’ayant remis là.

Monsieur de Villarnoul porte en Cour lettres et mémoires sur le faict de ceste délivrance, àlaquelle il est d’advis qu’on ne recule scelon les expédiens qu’il en donne. Il m’a dict que Monsieurde Monthelon a escript à Monsieur de La Bourdillière que le Roy (en l’absence de Messieurs deRohan et de La Rochefoucault) luy avoit commandé d’advertir toutes les villes de Poictou de seguarder. Je croy qu’ils le sont à Thouars où je m’en vay Dieu aydant pour commencer l’exécution dela procuration que j’ay de V. E. de laquelle j’atten les commandemens pour y obéir en la qualité,

Monseigneur, de

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

44 L’annonce de l’évasion parvint à la Cour le samedi 23 février. Michel CARMONA, Marie de Médicis, Librairie ArthèmeFayard, 1981, p. 380.

Page 18: Années 1618-1623

18

A Saumur, ce 8iesme jour de mars 1619.

Monseigneur,

Monsieur du Plessis m’a baillé charge de vous mander qu’il vous baisoit bien humblement lesmains et à Madame et particulièrement à Monseigneur son père.

Archives nationales 1 AP 357/13

10 mars 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

A mon arrivée en ce lieu, j’ay veu les Srs. du Monceau et des Quarts auxquels j’ay faictentendre le commandement que j’avois touchant la recepte des ventes roturières de ce duché. Celuy-làtesmoigne avoir à gré d’estre deschargé de ladicte récepte ; et celuy-cy promet d’y travailler avecfidélité. J’ay parlé audict Sr. du Monceau et à M. de La Mazure pour conférer sur le faict de laprocuration que j’ay de recepvoir de Monseigneur le duc de Buillon, la somme de xxxijM livres etaviser aux traittes que j’ay commandement de faire suivant leur advis. Je tascheray de les assemblerdemain sur ce subiect.

J’ay escript de Saulmur à Vostre Excellence tant sur ce que j’avois appris de Monsieur duPlessis touchant la conduitte de Monseigneur que sur les lettres que Monsieur de Monthelon avoitescript à Monsieur de La Bourdillière qui faict faire guarde en ce lieu et comme je croy bien à proposobéissant aux commandemens que ledit Sr. de Monthelon dit venir du Roy et aussi que toutes lesvilles de la province ont receu pareil commandement, qui comme l’on dict, en usent ainsi, joint queplusieurs publient que Monsieur de Rohannois45 faict amas de gens le temps nous en donnera une plusparticulière cognoissance. Je donneray advis à V. E. de tout ce que j’apprendray.

J’ay escript au fils de la vefve Barbarin46 affin qu’il vint en ce lieu pour aviser avec MesditsSrs. du Monceau et de La Mazure ce qui sera à faire pour la partie qui est deüe à sa mère. Je feray toutce qui sera avisé en ce faict là et en tout aultre pour vostre service /2/ si je ne recoy commandement aucontraire, je ne faudray Dieu aydant à me trouver à Poictiers au xijesme du suivant et cependantessaieray de faire un tour en Bretagne. Tout est encore assés calme en tout ce pais où je prie Dieu,

Madame, qu’il vous maintienne en santé et prospérité.

De Vostre Excellence

Le très-humble, très-obéissantet très-fidelle serviteur. d’Iray

De Thouars, le Xiesme jour de mars 1619.

Archives nationales 1 AP 357/14

10 mars 1619 - Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je ne cesseray jamais de vous importuner. Pardonnés donc à maliberté et me conservés vos bonnes grâces s’il vous plaist et soyés asseuré que si jamais je rencontreles occasions de vous servir que je les apprehenderay avec ardeur de vous tesmoigner les ressentimensque j’ay des obligations que vous avés sur moy.

Ce mot sera s’il vous plaist pour vous supplier de voir M. Hérauld et luy ramentevoir l’affairede l’abbé de Chambon touchant l’arrest qu’il a faict sur les fermiers de Talmond affin qu’il prenne lapeine de m’escrire ce qui sera à faire en ce faict là ainsi qu’il m’a promis. Si le porteur ne me pressoitpoint tant je luy eusse escript mais sa précipitation m’en empesche et aussi que je n’ay rien denouveau à luy mander. Je lui baise les mains.

45 Louis de Gouffier (1578-1642), duc de Rouannez, seigneur d’Oiron, voisin des La Trémoille.46 Elisabeth Barbade, veuve de Jean Barbarin, écuyer, sieur du Bost, juge-sénéchal des justices de l’Ile-Jourdain et de St-Germain-sur-Vienne.

Page 19: Années 1618-1623

19

Je vous supplie aussi de me faire part des nouvelles générales et celles de la maison. SiMonsieur du Monceau vous escript, vous apprendrés comme il a bien pris l’affaire que vous sçavés.Nous n’avons rien de nouveau de deçà, je ne vous mande rien aussi pour nouvelles. Ne me reste sinonà vous asseurer que je suis de cœur et d’affection.

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce xe mars 1619.

Archives nationales 1 AP 357/15

13 mars 1619 - Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je vous rends grâces de la part que vous me faictes des nouvelles dedelà et loue Dieu de la bonne disposition de Madame et de Madamoiselle. Je vous suppliehumblement de continuer de à m’en départir à vostre loisir, car il ne seroit pas pas raisonnable quepour si peu de subject vous fussiés diverti des occupations diverses que je m’asseure vous arrestent.J’avois creu du personnage ce que vous m’en escrivés. Dieu luy fera la grâce de mintenir ce qu’il apromis.

Icy nous n’avons rien de nouveau sinon que au dire de quelques esprits plustost brouillons quebelliqueux nous sommes à la guerre, mais j’espère qu’ils mentiront par leur gorge. Cela est ennuyeuxet me mettroit en colère, je le laisse pour vous dire que si vous voulés estre aux nopces de Mlle vostrecousine nous n’avés qu’à vous hâter non qu’il y ait rien d’escrit encore mais la recerche dugentilhomme est agrée de Monseigneur vostre oncle au contentement comme je croy de Mlle vostrecousine.

Je pars demain Dieu aydant pour aller en Bretagne où je feray peu de séjour estant obligé deretourner icy au plus tost comme vous sçavés pour les affaires qui me sont commises. Je croy que jetrouveray au maître ma besogne faicte, ce me sera un grand contentement. Je vous supplie d’asseurerMM. de Netz et Herauld de mon très humble service et baiser les mains de ma part à toutes vosdamoiselles et à la bonne Madame Toinette et à son bon serviteur. Je baise les vostres et suis,

Monsieur,

Vostre très-humble et obéissant serviteur.d’Iray

A Thouars, ce 13iesme mars 1619.

Archives nationales 1 AP 357/16

17 mars 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay commencé l’effect de ma procuration de l’estat des payemens que j’ay à faire par l’affairele plus important de tous ceux que j’ay commandement de terminer. C’est celuy que vous aviés avecles Sr. et Dame de La Naslière47. J’ay trouvé moyen que celluy-là soit venu en ce lieu avec les piècesprincipales. Messieurs du Monceau, de La Mazure et moy avons avisé avec luy aux moyens de sortird’affaire et pour cela avons pris fondement sur la transaction que Vostre Excellence passa à Parisavec la femme dudict Sr. de Naslière en aoust 1613. Par icelle transaction vous estes obligée Madamepour terminer toutes actions et estouffer grand nombre de poursuittes précédentes qui enfin eussentmonté à de grandes sommes, de fournir et délivrer audict Sr. de La Naslière la somme de neuf mil six

47 Josias Bidault, seigneur de La Naslière de Blanzay et Jeanne Gillier, son épouse, dame de Mauvergne, maison située dansla paroisse de Beaulieu-sous-Parthenay. Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, tome I, p. 524 ettome IV, p. 141.

Page 20: Années 1618-1623

20

cens livres, sçavoir six cens livres contant, ce qui fut effectué et neuf mil livres dedans Noël,aultrement que la transaction demeureroit de nul effect.

Vous aviés commandé, Madame, que c’est dernière somme fust acquittée ce qui eust sansdoubte esté faict sans les arrests faicts entre vos mains par M. le baron de Paillé48, le nommé SireJehan et aultres de sorte que sur les contestations qui suivirent il fut ordonné que vous consigneriés àPoictiers ladicte somme de neuf mil livres. Au commencement de nostre traitté ledict Sr. deLa Naslière déclara ne vouloir tenir le contenu en ladicte transaction, mais d’aultant que nous luyfismes voir que les arrests qu’il a obtenu depuis contre V. E. (je croy qu’il y en a cinq ou six) ne sonten conséquence de ladicte transaction. Il a estimé avec /2/ nous qu’il estoit à propos de traitter audésir d’icelles en sorte que après plusieurs et diverses contestations. Nous avons tiré parole etpromesse par escript que moyennant que dedans la fin du mois de may prochain pour tout délay jeconsigne pour luy au greffe des consignations à Poictiers la somme de douze mil livres. Il me fera lescessions et transports de toutes les sommes de deniers qui luy sont deues par Monseigneur tant enprincipal, interests despens qu’aultrement en conséquence de la transaction cy-dessus, et qu’au casque je ne satisface à la promesse verbale seulement que je luy ay faicte de fournir pour luy auxdictstemps et lieux ladicte somme de xijM livres la promesse par escript qu’il m’a baillée demeurera nulle.

Vostre Excellence jugera s’il luy plaist que nous avons assés heureusement commancé àeffectuer ce qui nous a esté commandé, car il n’a que son principal et les intérests depuis six censtreize, auxquels la transaction vous oblige et à quoy il n’y avoit aulcun moyen de parer et non encoretous. Nous ne luy avons accordé aulcune chose pour ses frais et despans qui pourroient estre tirés parluy en conséquence, aussi luy avons nous remis la somme de six vingts livres que vous avés, Madame,cy-devant faict délivrer à ladicte Dame son espouse. Il s’est montré fort traittable. Je croy que V. E.aura du contentement que c’est si longue et ennuyeuse affaire ait esté terminée. Reste maintenant et jel’escri à Monseigneur d’aviser avec Monseigneur le duc de Bouillon de faire tenir à Poictiers, sinontout l’argent porté par son obligation au temps dict en icelle ou à la fin du mois prochain oucommencement de moy à cause de la difficulté et peu de seureté qui se pourra trouver aux cheminspour le moins de quoy satisfaire à ladicte partie promis de xijM livres et à ce qui reste aux chanoinesde St-Hilaire sçavoir deuxM livres car ils ont receu la somme de vija livres par les mains du Sr. deL’Estang commis du Sr. Boyer, receveur des finances audict Poictiers à l’acquict de Monseigneur /3/et encore ce qui est deub à la vefve Sansay sçavoir iija vjC seize livres, sinon et que l’on ne puisseseurement faire transporter aulcuns deniers que je le puisse sçavoir affin que je mette peine de fairepatienter les desnommés.

J’ay receu lettres et mémoires des fermiers de Thalmond et abbaye desdicts lieu qui continuentà tesmoigner leur mauvaise volonté, car ils recerchent malicieusement toutes sortes de personnes à quiMonseigneur doibt et font faire arrests entre leurs mains, celuy qui est faict est faict à la requeste desabbé couvent et religieux de Chambon m’en sert de preuve, car j’ay appris par ceux mesmes qui ontarresté que ils l’ont faict à la sollicitation et induction desdicts fermiers. Je les ay mandé à compte parl’advis du conseil avec charge d’apporter les derniers qu’ils doibvent, et les acquicts des payemensprétendus faicts.

J’escri aussi à Monseigneur que le Sr. procureur fiscal m’escrit pour les réparations qu’il faultfaire aux fours, moulins et pons dudict Talmond. Je le remets aux comandemens de mondict Seigneur.Il adjouste que il est deub au Sr. de La Bassetière49 de qui sont tenu tenues les dixmes de Remartin unhomage en rachapt et des devoirs de service, et que ledict Sr. de La Bassetière désire estre satisfaict.Pour l’hommage, je le remets au temps que mondict Seigneur sera au pais, ou qu’il m’ait envoyéprocuration pour cela qu’au reste je trouve de la répugnance en ce qu’il demande rachapt et des

48 Louis de Lostanges, baron de Paillé (Charente-Maritime), né du premier mariage de Jeanne Gillier avec François deLostanges, baron de Mauzé (sur-Mignon), seigneur de Paillé et de La Chagnée. En 1595, Jeanne Gillier, veuve, avait duvendre la baronnie de Mauzé à Madeleine de Bouillé, épouse de Louis de Rochechouart. Dictionnaire historique etgénéalogique des familles du Poitou, tome VI, p. 228.49 Gédéon Dorineau, sieur de La Bastière, baptisé le 31 août 1574 à La Rochelle, d’une famille de financiers gérant les biensdes La Trémoille. Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, tome III, p. 145.

Page 21: Années 1618-1623

21

services annuels d’aultant que ce sont droicts diferens et que ou il y a droict de service annuel il n’y apoint de rachapt.

Si Monsieur du Chastelier-Porthault eust esté en ce païs nous eussions mis peine de termineravec luy, car il continue ses poursuittes et faict des frais. Il est à Paris où sont tous les papiers.J’estime Madame que vostre conseil peut entendre ses demandes et par un accord arrester le cours deses poursuittes. Il y a quelques arrests faicts sur luy entre vos mains. Si l’on accorde il sera nécessairece me semble qu’il les face vuider /4/. Nous avons escript aux procureur fiscal et fermiers deLa Trémoille affin qu’ils nous apportent les baulx à ferme et les acquicts des payemens par eux faictsaffin que suivant cela nous avisions de terminer avec la vesve Barbarin.

J’espère Dieu aydant partir demain pour aller au Maine et en Bretagne où je ne pourray fairegrand séjour pour ceste fois à cause des affaires que j’auray dedans trois sepmaines icy à Poictiers et àLa Rochelle pour effectuer ma procuration.

Je supplie très humblement Vostre Excellence de croire que j’apporteray en tous lescommandemens que j’ay receu et recevray à l’advenir de vous, Madame, et de Monseigneur le soinget l’entière fidélité que vous pouvés attendre de celuy qui ne prendra jamais aultre qualité que celle,

Madame de,

De Vostre Excellence Très-humble, très-obéissant ettrès-fidelle serviteur. d’Iray

A Thouars, ce 17iesme mars 1619.

Archives nationales 1 AP 357/17

24 mars 1619 - Lavalà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Je vous ay escript par la voye de Thouars et mandé ce que j’ay faict durant mon séjour de neufjours audict lieu où Messieurs du Monceau, de La Mazure et moy avons assés heureusement employéce peu de temps tant en l’accord faict avec M. de La Naslière que en l’acheminement de toutes lesautres affaires mentionnées en la procuration et estat que j’ay de Vostre Excellence.

Depuis ce temps là, je me suis transporté à Vitré et en ce lieu suivant vos commendemens. AVitré, j’ay veu vos officiers, Monseigneur, et conféré avec eux sur le subject de la commission quevous leur avés faict expédier pour faire procès verbal des usurpations faictes aux landes et forests devostre baronie dudict Vitré. Ce qu’ils ont commencé par la lande de Bréal50, mais peu advancé encore.J’ay receuilly de leurs discours que sans doubte ceste affaire estant bien conduitte vous apportera del’utilité. Il n’y a rien de nouveau en ce costé là qui regarde vostre service Monseigneur au moins quisont venu à ma cognoissance.

Icy j’ay trouvé les affaires en tel estat que si ceux qui cy devant avoient mis prix aux millejournaulx de bois que vous avés résolu de vendre se fussent portés à la raison ou mesme quel’appréhension qu’ils ont de la guerre ne leur eust faict changer les conditions du marché duquel ilsont présenté des formulaires nouveaux, nous eussions aujourd’huy terminé ceste affaire. Ils n’ontoffert que la somme de soixante et cinq mille livres pour lesdits mille journaulx de bois, les mestairiesdes Genetais et les maisons et jardin /2/ du Petit Jeu de Paulme51 et encores soub des conditionsrigoureuses et grandement préjudiciable au bien de vostre service (je dy cecy scelon mon sentiment)sçavoir qu’ils demandoient d’avoir vingt-et-deux journaulx pour vingt et où la terre seroit vague oupeu couverte de bois, trois journauls pour deux de sorte que ne croyant vendre que mille journaulx debois vous eussiés esté obligé Monseigneur d’en faire fournir plus de treize cens cinquante quatorzecens. Ce prix si bas, et ces conditions si désavantageuses nous ont retenu de rien adjuger en gros etestimé à propos pour vostre service que si les enrechisseurs ne haussent ledict prix. Soubz les

50 Bréal à l’est de Vitré.51 L’Abbé Angot fait état d’un lieu dit du Jeu-de-Paume dans les communes d’Arquenay et de Juvigné-des-Landes. AbbéANGOT, Dictionnaire de la Mayenne, op. cit., tome II, p. 494.

Page 22: Années 1618-1623

22

conditions que vous leur avez faict proposer ou qu’une ultre trouppe qui semble avoir désir des’accommoder des choses exposées en vente, ne die de meilleures paroles. Nous proposions de vendrepar parcelles, car sans doubte vous en tirerés meilleur prix, Monseigneur, mais il y aura un peu plusde longueur non toutesfois telle que dedans un mois vous n’en retirés bien près de quarente millelivres. Nous avons reffusé des deux mestairies la somme de dix mille livres à la charge de l’usufruitde la dame de St-Victor ou bien la somme de xiiijM livres des maisons et jardins du Petit Jeu dePaulme aussi à la charge de l’usufruit et plusieurs aultres sommes de divers particuliers, de sorte quepour bien conduire ceste affaire nous avons estimé à propos et ainsi a il esté ordonné que jeudy etvendredy après la feste. On se transportera sur les lieux où les particuliers assisteront qui feront lesbrisées et mesme des choses qu’ils désireront. A cela, Monseigneur je ne pourray assister (aussi n’yseray-je pas nécessaire). Vos commendemens m’appellent en ce temps la mesme à Poictiers où je nemaqueray de me trouver, si je ne recoy de vous des commendemens au contraire.

Nous n’avons point /3/ adjugé la ferme de vostre comté de ce lieu, Monseigneur, ayant entendude faire entendre premièrement à V. E. l’estat où nous en sommes. L’ancien bail estoit à huict millivres compris le moulin d’Olivet qui maintenant en est distraict d’aultant que le fermier de vostrefourneau d’Olivet52 en jouit de sorte que les anciens fermiers n’ont mis prix qu’à vijMijC livres. Il y aeu d’autres encherissemens, les derniers sont venus à la somme de vijMvjC livres. J’ay espérance del’un d’eux que ladite ferme pourra monter à pareille somme de viijM livres. Mon opinion sur cela,Monseigneur, est que si lesdicts anciens fermiers desquels on vous a rendu beaucoup de bonstesmoignages et qui n’ont encore esté confirmés depuis mon arrivée en ce lieu viennent à pareil prixque les autres et mesme à quelque chose moins, ils doibvent estre préférés. Nous attendrons sur celal’honneur de vos commandemens.

A mon arrivée, j’ay pressé le forgeron pour le prix du terme escheu de sa ferme, lequel j’ayretiré moins cinq livres et l’enveré à vostre argentier, sçavoir la somme de sept cens vingt livres pourl’office de surgarde de vos forests d’Allouée et de Boyère, mais d’aultant qu’il y a du péril auxchemins, j’ay pris icy une lettre de change de toutes les deux sommes du Sr. du Chastelier-Audouyn53 ; qui, pour le service qu’il vous désire rendre, n’a voulu prendre aulcune chose pour lechange.

J’ay mis entre les mains de Monsieur de La Mothe le règlement que vous avés faict pourQuintin, ensemble les lettres de provision des offices de séneschal du Désert et de sergent de Marcillé,ainsi que vous me l’aviés commandé Monseigneur pour des deniers qui proviendront desdits officespayer les soldats de la garnison de Vitré et les appoinctemens au Sr. de Jaulnay qui tesmoigne estreplein d’affection à vostre service, comme faict en ce lieu le Sr. de St-Laurent54 qui en tout ce que j’ayveu s’est porté très-dignement et en bon serviteur.

Pour la construction de vos forges55, j’en mettray demain Dieu aidant la /3/ proposition sur letapis et par mes premières feray entendre à V. E. ce qui se sera passé sur ce subject. J’espère partird’icy lundy prochain Dieu aydant pour aller en Poictou et retourner au temps que j’estimeray. Vous ypouvoir servir de l’advis de Monsieur de La Mothe.

J’ay baillé la commission que vous avés faict expédier, Monseigneur, sur la démission du Sr.Blanchet pour recevoir les deniers provenans de la vente de vos forests, et des tauls et amendes au fils

52 Ce fermier du fourneau d’Olivet s’appelait Michel de Guern, sieur de La Curée.53 Ambroise Audouin, sieur du Châtelier dans la paroisse de Saint-Berthevin-lès-Laval, d’une famille bourgeoise de Laval.54 Annibal de Farcy, écuyer, sieur de Saint-Laurent, procureur fiscal du comté de Laval appartenait à une branche cadetted’une famille noble de Normandie. Il est mort dans la Religion réformée le 18 septembre 1650 à Vitré. Paul de FARCY,Généalogie de la famille de Farcy, Laval, 1891, rééditée à Nantes en 1980 par la branche de Pontfarcy avec des aditions.55 Le développement de la métallurgie française fut largement impulsé par quelques familles nobles qui comme Henri deLa Trémoille confiaient l’exploitation de leurs forges à des entrepreneurs qualifiés dont ils attendaient un fermage. Sur cepoint Cf. L. BOURQUIN, La noblesse dans la France moderne (XVIe-XVIIIe siècles), p. 183.

Page 23: Années 1618-1623

23

du desfunt Sr. de La Vauselle56 qui vous a très-bien servy en la charge de procureur fiscal de ce comtéet aussi m’aviés vous commandé d’ainsi le faire.

Monsieur de Bouillé57 envoya vendredy en ce lieu un des siens pour requérir la ville de luytrouver une maison pour son logement. A cela ils n’ont respondu aultre chose (ainsi me l’ont ils faictentendre ) sinon que s’il venoit icy il se pourroit loger où bon luy sembleroit. Cela est de conséquenceni vos officiers ni vos habitans Monseigneur ne le désirent et appréhendent grandement sa venue.

Gerraiseau messager ordinaire de ce lieu à Paris a enchéry du bois à prix raisonnable, vous luydebvés Monseigneur la somme de xijC livres ou environ pour laquelle payer Monsieur de La Mothe ade longtemps ordre et commandemens de Madame vostre mère. Nous ne luy avons encore riendesfinitivement adjugé, mais je puis vous asseurer, Monseigneur, qu’oultre l’affection qu’il a à vostreservice il y a de la commisération, car estant chargé d’une muméreuse famille et nécessiteuse illanguist en attaendant le payement de cette partie.

Le Sr. de La Qeurie, forgeron susdit, vous envoye un mémoire contenant une proposition pourla construction de vos forges. Le Sr de St-Laurent vous en escrit. J’attendray d’en estre mieux informépour vous donner avis sur ce subject. Je supplie très humblement Vostre Excellence de croire que partout où je seray commandé d’elle, je serviray avec fidélité et affection comme estant,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Laval, ce 24ième mars 1619.

Monseigneur,

J’oubliois à vous escrire que Denis Chanthuon, Sr. de La Pelisonnière58, qui est maintenantpourveu de l’office de surgarde des forests de Boière et d’Allouée et m’a fourny la somme de septcent vingt livres ainsi que je vous ay escript cy-dessus, désire avoir un acquict de vous de ladictesomme de vijCxx livres par luy déboursée d’aultant qu’il n’a rien pour justiffier ledict déboursementet que si vous révoquiés sa provision son argent seroit perdus. Je croy, Monseigneur, que cela estraisonnable moyennant que vous y faciés employer que luy rendant ladicte somme de vijCxx livres parluy financé vous le pourrés déposséder quand il vous plaira. Il promet de vous bien servir.

Archives nationales 1 AP 357/18

24 mars 1619 - Lavalà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Après avoir estanché les affaires pour lesquelles j’estois commandé de passer en Poictou. Je mesuis rendu en ce lieu à Vitré au 21iesme et en ce lieu au 23iesme du courant. Là j’ay trouvé quelqueacheminement à la commission que les officiers ont de faire des procès verbaux des usurpationsfaictes aux forests et communs de la baronie, mais pour conduire ceste affaire de laquelle (scelon l’airque j’ay peu prendre dedans le païs on peut sans doubte retirer de l’utilité). Il fault du temps et dusoing et pour cela j’y retourneray incontinent que les affaires du Poictou seront terminées.

Icy nous n’avons rien adjugé d’aultant que ceux qui avoient mis prix aux bois ont apporté desconditions si rigoureuses et offert is peu que nous n’avons nullement trouvé à propos de leur adjuger.Ils demandent 22 journaulx pour 20 et trois journaulx pour deux aux endroits où il n’y aura que peuou point de bois, contre ce qui avoit esté accordé qu’ils n’auroient aulcune terre au de là desdicts

56 Thomas Duchemin (1557-1611), sieur de La Vauzelle à Argentré, un huguenot, fut procureur fiscal du comté de Laval. A.JOUBERT, "Note généalogique sur Thomas Duchemin, sieur de La Vauzelle", Bulletin de la Commission historique etarchéologique de la Mayenne, 2e série, I, 1888-1889, p. 304-305.57 René de Bouillé, marquis de Bouillé, fut gouverneur de Laval de 1611 à 1644.58 Denis Champhuon, sieur de La Pelissonnière à Saint-Denis-du-Maine, était grenetier à Laval. Abbé ANGOT, Dictionnairede la Mayenne, op. cit., tome III, p. 244.

Page 24: Années 1618-1623

24

mille journaulx et que pour cet esfect le fort portant le foible ils prendroient tant plein que vuide sansdistinction, car aultrement il leur faudroit je m’asseure au lieu desdicts mille journaulx bien près detreize ou quatorze cens, et aussi qu’ils n’offrent tant dudict bois des mestairies des Genetais que desmaisons et jardins du Petit Jeu de Paulme que la somme de LXM livres. Il y a un autre party qui seforme.

Madame de St-Victor qui comme l’on dit est malade du /2/ petit Jeu de Paulme iiijM livres etainsi de diverses personnes plusieurs petites sommes pour le bois, mais pour bien le vendre et affind’avoir une bien particulière cognoissance de tout. Nous avons esté d’avis qu’il se failloit transportersur les lieux et y faire transporter ceux qui veulent achepter affin de voir si le nombre des journaulx etla valeur d’iceux selon qu’ils se trouveront couverts de bois. Ainsi je croy que dedans peu de tempson pourra faire une somme bien notable.

Pour la ferme Vostre Excellence sçait que l’ancien bail estoit ha viijM livres, maisl’appréhension de la guerre, la distraction qui a esté faicte du moulin d’Olivet duquel jouist à présentle forgeron a retenu les anciens fermiers qui n’offrent que vijM ijC livres d’aultres ont enchéri et ledernier prix est à vijM vjC livres. Le Sr. du Chastelier Audouin m’a baillé espérance de hausse jusquesà viijM livres nonobstant les considération cy dessus. Mon advis à cela (et je l’escri à Monseigneur)est que si Lesdicts anciens fermiers offroient pareille somme ou peu moindre que les autres, il seroitbien à propos de les préférer, veu les bons tesmoignages que tout le monde rend d’eux, mais pour celail est nécessaire d’avoir les commandemens de Monseigneur au plustost.

J’ay mis entre les mains de Monsieur de La Mothe le règlement que Monseigneur a faict pourQuintin et les lettres de provision des offices de seneschal du Désert et de sergent de Marcillé affinque des deniers qui proviendront de la vente d’iceux il pare et acquitte ce qui est deub à la garnison deVitré et les appointemens de M. du Jaulnay s’il y a de quoy suffire à tout.

J’ay vivement pressé le forgeron en sorte que j’ai retiré de luy à desduire sur la demie annéeescheue de sa ferme la somme de quatorze cens livres de laquelle (appréhendant le hazard deschemins) j’envoye une lettre de change à l’argentier de Monseigneur et en son absence à Monsieur deNetz. Je luy envoye cent pistoles par le mesme ordre, lesquelles j’ay retirées de l’office de /3/surgarde des forests d’Allouée et de Boyère. Suivant les commandemens que j’avois et de l’advis deMonsieur de La Mothe, j’ay mis entre les mains du fils du deffunct Sr. de La Vauzelle la commissionexpédiée sur la demission du Sr. Blanchet pour recepvoir les deniers provenans de la vente ordinairedes forests et des taulx et amendes jugées. Il est à présent marié59 et promet de se bien acquitter de sondebvoir, et d’ailleurs il ne pourra estre receu sans donner bonne et suffisante caution.

Je ne puis encores rien mander à Vostre Excellence sur les propositions faictes pour les forges.Je mettray aujourd’huy cela en délibération et vous donneray advis, Madame, de ce qui se sera passé.Monsieur de La Mothe a par sa prudence tellement levé les troubles oppositions et traverses quefaisoient cy-devant les usagers, que lorsque nous avons esté à l’audience pour faire les ventes cy-dessus aulcun n’a formé d’opposition. Si je ne reçoy commandement au contraire, je retourneray icypour aider à parachever toutes les affaires cy-dessus incontinent que nous aurons mis ordres à celle dePoictou, que j’appréhende estre retardées par l’appréhension qui pourra saisir les gens deMonseigneur le duc de Buillon et les empescher de porter l’argent qu’ils doibvent fournir à Poictiers.Je supplie très-humblement Vostre Excellence de croire qu’en tout je serviray avec affection etfidélité.

Les habitans de ce lieu appréhendent grandement l’arrivée de Monsieur de Bouillé qui a envoyéun des siens afin que les habitans luy cerchassent un logis, mais ils l’ont remis à en faire cercher luymesme et à se loger où bon luy sembleroit.

Le forgeron sort d’icy qui a mis un mémoire concernant les forges entre les mains du Sr. de St-Laurent pour vous faire entendre certaine proposition sur la construction desdictes forges, delaquellen’estant pas bien esclairci je ne puis rien dire à Vostre Excellence pour ceste fois. Vous aurés

59 François Duchemin, sieur de Barbein, fils aîné de Thomas Duchemin, Sieur de La Vauzelle, et de Judith de Launay, avaitépousé le 5 février 1619 au château de Montjean Suzanne Journée, fille d’Isaac Journée, Sieur de La Ronce et de Jeanne deGennes, née le 5 février 1595 à Vitré.

Page 25: Années 1618-1623

25

souvenance s’il vous plaist, Madame, que de longtemps Monsieur de La Mothe à ordre et mandementde vous de payer la somme de xijC livres ou environ /4/ à Gerraiseau messager qui a mis prix, commeplusieurs aultres, à quelque canton de bois. Nous ne luy avons rien adjugé deffinitivement, mais jevous asseure, Madame, qu’il y a de la commisération et que sa famille numéreuse et nécessiteuselanguist après le payement de ceste partie. Il a mis le bois à bon prix voire à plus haut qu’aulcun aultrede sorte que Monsieur de La Mothe. MM. les officiers et moy sommes bien d’avis de luy satisfaire enceste part si vous le trouvés bon, Madame, et que Monseigneur l’ait agréable.

La crainte que j’ay que Mondict Seigneur ne soit à Paris m’a obligé d’adresser la lettre dechange de la somme de ijM

Cxx livres à M. de Netz en l’absence dudict Guérin. Voylà Madame ce qui

s’est passé depuis mes dernières, de sorte qu’il ne me reste sinon de prier Dieu pour vostre prospéritéet santé et qu’il me rende tousjours si heureusx que je puisse estre aimé de vous en la qualité,

Madame de,

De Vostre Excellence Très-humble, très-obéissant ettrès-fidelle serviteur. d’Iray

A Laval, ce 24iesme mars 1619.

Archives nationales 1 AP 357/19

24 mars 1619 – Lavalà M. de Champdor

Monsieur, Je vous ay escript par le messager de Thouars du xviie, mais je ne puisme lasser de vous entretenir et vous asseurer de la continuation de mon invariable affection à vostreservice. Vous apprendrés par les lettres que j’escri à Madame ce que j’ay faict depuis que je suisarrivé en ce lieu.

J’envoye au Sr. Guérin une rescription de la somme de deux mil cent vingt livres ou en sonabsence à M. de Netz, à qui j’en fay l’addresse. Je vous supplie d’affection de veiller à ce que celuydes deux qui la recevra et ladicte somme de ijM

Cxx livres porté en icelle m’en envoye le récepicé par

la voye du messager de Thouars auquel si vous ou quelque autre prenés la peine de m’escrire vousdonnerés s’il vous plaist vos lettres car je partiray Dieu aydant demain ou mardy pour y aller.

J’ay appris icy les fiançailles de Madame Toinette60. J’en loue Dieu et en suis grandement aise,mais elle ma donné le contentement d’y assister. En partant de Thouars je laissais Monsieur duMonceau qui se portoit bien. Pour moy, je me haste pour estre aux nopces de Mlle vostre bonnecousine. Faites mois l’honneur s’il vous plaist de me mander ce que vous aurés appris depuis vosdernières et le temps auquel nous seront si heureux que de voir toute nostre seigneurie que Dieuconserve et vous aussi. Je suis,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Laval, ce 24iesme mars 1619.

Je vous supplie d’aller au logis de Périer ou chez Pacard61, libraires demeurans près MonsieurHerauld, et vous enquérir s’ils ont le Traitté de Parlemens par Bernard de La Roche-Flavin62,semblable à celuy que vous voyés au logis de M. Arnaud et l’achepter en blanc et me l’envoyer par le

60 Fiançailles d’Antoinette Guilmar, femme de chambre de Charlotte-Brabantine de Nassau, avec Gilles Brosseau sonargentier. Le Fonds La Trémoille conserve de ses lettres aux cotes 1 AP 656 et 658.61 Adrien Périer et Abraham Pacard étaient deux marchands libraires huguenots originaires de Lyon, établis au faubourgSaint-Germain, rue Saint-Jacques, le premier à l’enseigne du Compas d’or et le second à celle de l’Etoile d’or. Henri-JeanMARTIN, Livre, pouvoirs et société à Paris au XVIIe siècle (1598-1701), Préface de Roger Chartier, Librairie Droz, Genève,1999, 2 vol, tome I, p. 332 et 394-395.62 Il doit s’agir des Treize livres des Parlements de France de Bernard de La Roche-Flavin publié en 1617 à Bordeaux, grosin-folio de 968 p.

Page 26: Années 1618-1623

26

messager de Thouars d’aultant que le bonhomme M. le Sénéchal me persécute pour luy faire venir. Jevous envoyeray ce qu’il vous aura cousté me le mandant.

Archives nationales 1 AP 357/20

8 avril 1619 – Thouarsà M. de Champdor

Monsieur, Je vous rends grâces des nouvelles que vous me mandés, j’en reçoyun contentement extrême car par icelles l’heureuse issue deux affaires qui me faisoient appréhenderpour leur conséquence. Je vous rends grâces aussi de ce que vous avés escript à Monsieur deLa Mothe touchant la rescription de ijM

Cxx livres que j’addressoy à Monsieur de Netz par la voye de

Laval et de j’avoye chargé le papier de Gerraiseau. Je suis grandement estonné qu’elle n’ait estérendue audict Sr. de Netz. Je vous supplie d’affection de vous en enquérir et me mander par ce présentvoye ce que vous en sçaurés affin que ie tasche promptement à y mettre odre. Vous me manderés, s’ilvous plaist, ce que vous aura cousté le livre que je vous ay supplié de m’envoyer et je vous vousenvoieray par la première voye, laquelle attendant je vous baise les mains et suis de tout mon cœur,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce 8iesme apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/21

8 avril 1619 – Thouarsà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Par mes dernières de Laval je vous ay faict entendre particulièrement ce qui s’estoit passé pourvostre service durant mon séjour audit lieu et à Vitré vous suppliant comme je fay encore très-humblement Monseigneur de nous donner sans cela vos commandemens. Par icelles je remetois àcelles-cy à vous mander ce que j’apprendrois pour la construction de vos forges. A cela j’ay à vousdire Monseigneur que le Sr. de La Cuerie qui a présent exploite vostre fourneau d’Olivet n’ayant pasassés de commodités et de force seul pour effectuer ce qu’il avoit […] près, recerché de toutes parts,de s’associer quelques personnes solvables. J’ay appris qu’il a veu pour cet effect M. de Vanve,escuyer, riche de quatre ou cinq mil livres de rente, qui a aultres fois tenu les forges de Monsieur lemareschal de Brissac à Pouansay63, comme aussi le Sr. de Sourches, escuyer, mtre des forges deMonsieur le duc de Mayenne64, et aussy quelques marchands du païs lesquels jusques icy n’y ontvoulu entendre. Les uns prennent prétexte sur l’insolvabilité dudit de La Cuerie, les aultres sur legrand prix qu’il est obligé de payer pour lesdites forges. En [cette] extrémité il a cerché des remèdespour se relever et ainsi […] que l’on luy trouvast jusques à 15 ou 16 M livres pour employer tant à laconstruction de la forge que pour achepter une maistairie et moulin nommé Pinchault lieu fort proprepour cela (à ce que j’ay appris dedans le païs) distant d’environ de deux lieux de Laval et en ce faisantil offre payer l’intérest de ladicte somme à raison de l’ordonnance et augmenter sa ferme de xij ouxvC livres. Il me semble qu’il n’y a pas grande apparence d’entendre à ceste proposition d’aultant quece seroit tousjours davantage s’engager avec luy et se mettre en plus grand hazard tant enconsidération de son insolvabilité que pource qu’il pourroit divertir ses deniers où il est pressé depayer. Toutes fois d’aultre que ceste condition est grandement advantageuse si l’on trouvoit /2/ laseureté ou qu’il se peut associer avec quelque homme de moyens qui fist les advences ou qui peut lesasseurer si l’on estoit contraint de les faire. Monsieur de La Mothe s’est efforcé d’y faire entre les Srs.

63 La forge de Pouancé (Maine et Loire) sur l’étang de Tressé à la limite de la Bretagne et de l’Anjou.64 La forge de Chailland (Mayenne).

Page 27: Années 1618-1623

27

du Bois-Belin65 et de Bourgon66, gentilshommes du païs, et celuy là pour certaines bonnesconsidérations plustost que celluy-cy. Mondit Sr. de La Mothe m’a asseuré qu’ils font paroistrequelque volonté pour cela, mais jusques à mon partement dudit Laval il n’y avoit rien de résolu.

Depuis ledit La Cuerie a faict une aultre ouverture de laquelle il a dressé mémoire qui a estéenvoié à Madame vostre mère par le Sr. de St-Laurent cela m’empeschera de vous la réitérer. J’ayencore à vous dire sur ce subject, Monseigneur, que le Sr. de La Poulardière67 marchant en vostre villede Laval, riche d’environ cinquante ou soixante mil livres, a offert à mondit Sr. de La Motte de faireadvance de la somme de seize mil livres, tant pour l’acquest des mestairies et moulin cy-dessus quepour la construction de la forge et de se contenter de cinquante arpens de bois pour les forges etfourneaux à prendre en la forest de Missedon ou Concise ou grande forest de La Gravelle nereprendre son remboursement de ladite somme de seize mil livres que sur telles années que l’onvoudra voire sur les dernières de sa ferme. Il n’a encore offert que sept mil livres, mais mondict Sr. deLa Mothe s’asseure qu’il pourroit hausser le prix. Si V. E. commande que l’on entre en quelque traittéavecque luy. J’estime, Monseigneur, qu’il doibt asseurer ledict La Cuerie d’aultant qu’il a un contract,et pour autres considérations que scelon vostre bonté et charité vous pouvés asser juger.

J’avois oublié en mes dernières (pour obéir de poinct en poinct à vos commandemens) de vousmander, Monseigneur que mondict Sr. de La Mothe a faict l’extraict de ses comptes, mais on ne peuttirer au vray des payements faicts à divers particuliers sans avoir les quittances qui, comme im m’aappris sont encores à Paris en diverses mains, lesquelles il est très nécessaire de retirer, etparticulièrement celles qui sont entre les mains de Bontemps, ce qui luy est deub se trouvera au bas deses parties arrestées par mondict Sr. de La Mothe, qui estant à Quintin, a receu les procès contre lesgentils hommes de /3/ de Basse Bretagne et baillé charge au procureur fiscal, dont Monsieur de Lorialà mémoire. Voyla Monseigneur ce que j’ay a adjouter à mes précédentes, encore que je croye quemondit Sr. de La Mothe vous aura donné advis de tout.

Aujourd’huy expire le temps que Monseigneur le duc de Buillon a pris pour vous faire toucherà Poictiers la somme de trente-deux mil livres. Je pars pour m’y trouver demain Dieu aydant incertainsi je trouveray personne de la part de mondict seigneur de Bouillon à cause de la difficulté et peu deseureté qu’il y a aux chemins et principalement en ce pais là où il y a quantité de gens de guerre qu’alevé Monsieur le comte de La Rochefoucault, M. Le Chastelier-Barbot oultre M. de La Gorronnièrelève en Bas Poictou l’un et l’aultre sont [à] Saint-Maixent avec Monsieur de Rohan qui n’a pas [reçu]de La Rochelle le contentement que quelques uns luy faisoient espérer. On ne luy a pas mesme envoiéfaire les complimens ordinaires. Je croy qu’il a esté bien conseillé n’ayant pas pris résolution d’yaller. Plusieurs croyent qu’il ne s’en fust pas retourné content. L’assemblée estoit presté à se séparerquand un courrier du Béarn arriva et fit changer le dessein de ceste séparation, d’aultant qu’auditBéarn ils ne vouloient [en] aulcune façon entendre aux propositions d’accommodement [qui] avoyentesté envoyées.

Icy vos affaires roulent à [l’accoutumée. Les] fermiers de Thalmond se couvrent tousjoursd[…] à la requeste des religieux et couvent de Chambon […] d’un autre faict à la requeste duSr. Berny ministre […] affin qu’ils apportent coppies des pièces justifficatives des payemens qu’ilsprétendent avoir faicts […]. Je travailleray en tout avec fidélité comme,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Thouars, ce 8iesme apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/22

65 Gilles du Grasmesnil, seigneur du Bois-Belin à Erbrée, demeurant à Bréal-sous-Vitré, fils du conseiller au parlement deBretagne Jean de Gramesnil et de Catherine Morel de Lespinay.66 François de La Corbinaye, seigneur de Bourgon et des Moulins-Neufs.67 Nicolas Le Macon, sieur de La Poulardière, un riche entrepreneur dont il sera souvent question dans les lettres de JeanRogier.

Page 28: Années 1618-1623

28

8 avril 1619 – Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay escript de Laval à Vostre Excellence tout ce que nous avions négotié tant là qu’à Vitré.J’escri amplement à Monseigneur ce qui est venu à ma cognoissance touchant les forges, mais lacrainte que j’ay que son absence empesche que vous ne voyrés mes lettres.

J’ay à vous dire, Madame, (je croy pourtant que Monsieur de La Mothe vous en aura donnéadvis) que le Sr. de La Qeurie qui a présent exploite le fourneau estant grandement incommodé arecerché et recerche tous les jours de s’associer quelques personnes solvables. Il en a faict parler auxSrs de Vanve et de Sourches, gentilshommes fort accommodés desquels celluy là a tenu à Pouansayles forges de Monsieur le mareschal de Brissac et celluy-cy tient encore celles de Monsieur le duc deMayenne, mais ne l’un ne l’autre jusques icy n’y a voulu entendre à cause de l’insolvabilité dudit LaQeurie qui depuis a demandé que l’on luy advancast la somme de xiijM livres pour achepter unemestairie et un moulin nommé Pinchault et faire là le bastiment des forges, offrant de payer l’intérestd’icelle somme et d’augmenter sa ferme de xvC livres mais à cela on doibt appréhender que lanécessité ne luy fist divertir les deniers qui luy auroient esté advancé et les employer ay payement etacquist des debtes pour lesquelles il est pressé.

On croit que Monsieur de Bois-Belin et Monsieur de Bourgon ont volonté d’entrer en sonmarché. S’ils le sont je croy, Madame, que ce sera la meilleure et plus utile de toutes les propositionsqui ont esté faictes sur ce subject, car lors la seureté y sera toute entière. Vous aurés aussi receuMadame une seconde ouverture proposée par leidt La Querie de laquelle le Sr. de St-Laurent a envoyémémoire à Vostre Excellence. Le Sr. de La Poulardière, marchant de Laval grandement accommodé,comme m’a faict entendre Mondit sr. de La Mothe offre de faire les advances de ce qui seranécessaire tant pour l’achapt desdits mestairie et moulins que pour le /2/ bastiment de la forge et ne serembourser de ses advances que durant les dernières années de sa ferme, mais il n’offre encore quesept mil livres (il y a pourtant espérance de plusà aussi ne demande il que cinquante arpens de boispour les forges et fourneau à prendre en la forest de Missedon en Concise ou grande forest deLa Gravelle. Il y avoit bien de la difficulté de traitter avec celuy-cy sans Le Querie qui a un contract etd’ailleurs je croy Madame qu’il y a de la charité de le faire entrer en partie de quelque marché qui seface.

Je pars présentement pour aller à Poictiers car aujourd’huy expire le temps porté en l’obligationde xxxijM livres de Monseigneur le duc de Buillon. Il y a des gens de guerre aux environs dudictPoictiers. L’on craint que cela n’empesche les gens de mondict Seigneur de Buillon de s’y trouver. Jen’ay encore rien receu des fermiers de Thalmond et d’Angles. Ceux-là se couvrent des arrests faictsentre leurs mains et tout fraischement d’un faict par le Sr. Berny, ministre. Je n’ay receu aulcunesnouvelles ny commandemens de V. E. depuis mon partement de Paris ; si j’ay l’honneur d’enrencevoir je m’y conformeray entièrement comme,

Madame,

de Vostre Excellence le très-humble, très-obéissantet très fidelle serviteur. d’Iray

A Thouars, ce 8iesme apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/23

10 avril 1619 – Poitiersà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Il ne s’est passé qu’un jour depuis mes dernières de Thouars par lesquelles j’ay donné advis àV. E. de tout ce que j’ay appris sur le faict de vos forges de Laval, et des autres choses desquellesvous m’aviés donné commandement que je ne vous avois faict entendre par mes pénultiesmes deLaval d’aultant que lorsque je les escrivis elles n’estoient encore venues à ma cognoissance.

Page 29: Années 1618-1623

29

Hier me furent rendues les lettres du Sr. Chastellier-Cornillau68 cy incluses en lesquelles ildiscourt amplement du dessein et volonté qu’il a de renouer la vente en gros des mil journaux de bois,métairies des Genetais et Petit Jeu de Paulme. Vous verrés par icelles, Monseigneur, son inetention,son prix et les conditions qu’il demande. Cella m’empeschera des les réitérer. Seulement ay-je à vousdire qu’il est besoing d’avoir sur ce promptement vos commandemens comme ledict Cornillau mesmele désire pour les raisons employées de sesdictes lettres.

Icy je n’ay trouvé personne de la part de Monseigneur le duc de Bouillon. J’attendray encorequelques jours pour ne manquer en rien à obéir à vos commandemens, mais j’appréhende que les gensde guerre qui sont en Limouzin les auront retenu chez eux. Monsieur le comte de La Rochefoucaultn’est party que d’hier pour aller à St-Maixent où Monsieur de Rohan se doibt trouver. Mondict Sr. deLa Rochefoucault a mené cinquante ou soixante carabin ausquels il a faict prendre des casaques, ceuxlà sont ordonnés pour sa garde. Il y a nombre de gens de pied qui rodent le païs et se sont desjaestendus jusques à Montmorillon où il a mis garnison. Tout est aussi esmeu en ce lieu comme calme àThouars et environs où vous estes grandement désiré Monseigneur. Je prie Dieu qu’il vous y amènescelon vos désirs et vous donne des assiduels accroissemens de grâces et de toutes sortes deprospérits, ce sont les souhaits,

Monseigneur, de

Vostre très-humble, très-obéissant ettrès fidelle serviteur. d’Iray

A Poictiers, ce 10iesme apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/24

10 avril 1619 - Poitiersà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Depuis mes dernières de Thouars, j’ay receu du Sr. du Chastelier-Cornillau les lettres cy-incluses. Vostre Excellence verra par icelles son dessein et son prix et soubz quelles conditions.

Icy n’est encore arrivé aulcun de la part de Monseigneur le duc de Buillon. J’ay crainte que lesgens de guerre qu’a Monsieur le comte de Chomberg en Limouzin et partie mesme de ceux qu’a levéMonsieur le comte de La Rochefoucault qui se sont desja estendu jusques à Montmorillon ne facentappréhender à ceux qui ont charge de mondit Seigneur de Buillon de commettre leur argent auxchemins ou certes il n’y a plus guères de seureté. J’attendray pourtant encore quelques jours affn qu’iln’advienne faulte de ma part.

Icy les esprits sont grandement esmeus et jusques à présent tout fort tranquille à Thouars. Jeverray ce matin Dieu aydant Monsieur le thésorier de St-Hilaire affin que le chapitre dudit St-Hilairene face point de frais pour ce que Monseigneur leur doibt de reste.

En tout je me porteray tousjours comme je doibs avec soing et fidélité priant Dieu que leseffects de mon service respondans à mon affection vous donnent subject de me tenir en la qualité,

Madame,

De Vostre Excellence Vostre très-humble, très-obéissantet très-fidelle serviteur. d’Iray

A Thouars, ce Xiesme apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/25

13 avril 1619 – Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

68 Pierre Cornilleau, sieur du Châtelier, d’une famille bourgeoise lavalloise.

Page 30: Années 1618-1623

30

Madame,

Le Sieur de Grandmont69 arriva jeudy dernier à Poictiers et apporta la somme de trente deux millivres que Monseigneur le duc de Buillon devoit faire fournir à Monseigneur en ce temps là auditPoictiers où ladicte somme de xxxijM livres m’a esté délivrée et mise ès mains par ledict Sieur deGrandmont, thésorier de mondict Seigneur le duc de Buillon. J’en ay baillé acquict conforme à celluyque le Sr. de Netz a baillé au Sr. Le Vasseur à Paris pour la somme de xxxiijM livres. Le conseil deMonseigneur audit Poictiers a assisté à tout ce que j’y ay faict. J’ay payé ce qui restoit aux chanoineset ce qui estoit deub à la vefve Sausay. J’ay faict conduire le reste en ce lieu appréhendant lesmouvemens qui commencent et principalement en ce païs là.

J’ay veu Madame de Ste-Croix70 que j’ay asseurée de la bonne disposition de VostreExcellence. Je vous asseure aussi de la sienne Madame et de le grande joie et contentement qu’elletesmoigne de l’heureux mariage de Monseigneur. Tout est encore en icy en grande paix ou je prieDieu qu’il vous maintienne en sa saincte garde et qu’il me face la grâce d’estre recognu toute ma vie,

Madame,

De Vostre Excellence Vostre très-humble, très-obéissantet très-fidelle serviteur. d’Iray

A Thouars, ce xiijesme apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/26

31 avril 1619 – Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, Le messager m’a rendu les lettres de Madame du 16iesme de ce mois etles vostres du 21iesme. Je n’ay point receu celles que Madame me mande m’avoir faict l’honneur dem’esscrire à Laval. Vous verés par celles que je luy escri comme je respon à ce qu’elle me faictl’honneur de me mander touchant les abbayes. Il fault que je me soye mal expliqué là dessus au passé,car quand j’ay parlé d’arrests et saisies j’entendois qu’ils estoient faicts sur la principaulté deThalmond comme les arrests faicts à la requeste des religieux abbé et couvent de Chambon pour lasomme de xijCxxx livres et à la requeste de M. Casar Berny ministre de Mouilleron pour la somme dexiCiiijxx xij livres x S […] bien que les fermiers des abbayes et particulièrement celuy de l’abbaye deThalmond faisoient de grands frais car par l’estat qu’il m’a envoyé il prétend ne debvoir de la dernièredemie année que la somme de ijC

Lix livres ix S de sorte que ce mal entendu est venu pour ne m’estrepas faict entendre.

Je vous remercie humblement de la peine et du soing que vous prenés de me mander ainsiparticulièrement des nouvelles de la maison et des générales qui viennent à vostre cognoissance. Jevous supplie de continuer et vous m’obligerés de plus en plus encore que je le soye en beaucoup defaçons et tout fraischement en ce qu’il vous a pleu prendre la peine d’achepter et m’envoier le Traictédes parlemens où il y a un cahier entier à dire ainsi que vous verrés par le petit mémoire du libraire àqui je l’avois baillé pour le faire relier de sorte que je vous supplie de porter ledict mémoire à celuyqui vous a vendu le livre affin qu’il fournisse ledict cahier de quoy il ne doibt faire de difficulté. Jevous envoye les cent dix sols qu’il vous a cousté.

Nous n’avons icy aulcune nouvelles. Le Fresne a parachevé les reliques de sa vie avec celles deson poulmon. Il a décédé ce matin. Pour moy je suis tout malade, non grâces à Dieu retenu au lit maisen l’appréhension de m’y voir réduit si mes dégoustemens et ma lassitude continuent. Je vous supplied’affection de vous servir de moy et de m’employer en quelque chose pour revanche de tant de bons

69 Au vu de la lettre précédente le Sieur de Grandmont était un officier de la vicomte de Turenne.70 Flandrine de Nassau, quatrième fille de Guillaume de Nassau et de Charlotte de Bourbon, née le 18 août 1579 à Anvers,elle fut élévée par sa tante Jeanne de Bourbon, abbesse de Jouarre et de Sainte-Croix de Poitiers. Elle abjura le 15 août 1588,prit le voile le 19 septembre 1590 et fit sa profession le 21 novembre 1593. Elle devint abbesse de Sainte-Croix de Poitiers le25 juillet 1604. Elle mourut le 10 avril 1640. Sur le rôle de Flandrine de Nassau fut une des grandes abbesses réformatricesde Sainte-Croix. Cf. Edmond-René LABANDE (Dir), « Histoire de l’abbaye de Sainte-Croix de Poitiers », Mémoires de laSociété des Antiquaires de l’Ouest, 4ème série, Tome XIX, Années 1986-1987, p. 271-305.

Page 31: Années 1618-1623

31

offices que vous me rendés. Si Monseigneur appelle à son service le Sr. de Rosemont, je m’asseurequ’il en recevra du contentement. Je vous baise les mains et à luy, et suis,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce dernier jour d’apvril 1619.

Archives nationales 1 AP 357/27

1er mai 1619 – Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay receu celles qu’il a pleu à Vostre Excellence m’escrivit du 22iesme mars et 16eme duprécédent pour respondre à ce que les denières touchant des abbayes j’ay voulu dire au passé que lesfermiers d’icelles nous veulent faire croire avoir faict de grands frais et particulièrement celuy del’abbaye de Thalmond lequel suivant l’estat qu’il m’a cy-devant envoyé ne se prétend reliquataire duprix de la dernière demie année de la ferme, que de la somme de ijC lix livres ix sols iiij deniers delaquelle j’ai bien eu de la peine à la faire désaisir, m’ayant tesmoigné beaucoup de mauvaise volontéen cela, comme en ce qu’il ne m’a voulu délivrer aulcuns deniers pour le prix de la ferme de laprincipaulté dudit Thalmond se couvrant des arrests faicts entre ses mains à la requeste des religieux,abbé, couvent de Chambon et de M. Casar Berny, ministre de Mouilleron, ceux-là pour la somme dexijC xxx livres et celluy-cy pour la somme de xjC iiijXX xij livres x sols. Pour terminer avec ceux-lànous avons promis à leur fermier ayant charge d’eux la somme de vjC livres laquelle il n’a vouluaccepter. L’aultre des fermiers à sçavoir celuy d’Angles71 m’a faict délivrer la somme de douze censlivres de sorte que je n’ay touché desdicts deux fermiers que la somme de quinze cens livres que j’aydélivré à M. de La Mazure à déduire sur ce qui vous est deub par Messeigneurs pour la rente desdeniers dotaux de Vostre Excellence.

Monseigneur me faict l’honneur de m’escrire et me commander que j’aille le trouverincontinent que j’auray mis ordre aux placemens qu’il m’a commandé faire des deniers que j’aytouché à Poictiers de Monseigneur le duc de Buillon par les mains du Sr. du Grand Mont et mesmesavant qu’aller en Bretagne que je me rende près de luy ; de sorte qu’il me sera impossible de metrouver à l’adjudication de ce qui est esposé en vente en ce païs là. Car comme vous /2/ sçavés trèsbien, Madame, il est malaisé de pouvoir traitter si promptement tant de diverses et importantesaffaires estant nécessaire de faire divers voyages pour cela comme à Lodun pour l’affaire du Sr. de LaValette, à La Rochelle pour celle du Sr. Chalmot, et à Poictiers où je me doibs trouver dedans la findu mois courant pour terminer avec le Sr. de La Naslière et consigne pour luy la somme de xijM livres.Ce qui ne s’est fait plus tost à cause qu’il est obligé par la transaction que V. E. à cy-devant faict avecMadame sa femme ayant charge et procuration de luy de fournir plusieurs papiers, desquels les unssont à Paris les autres ailleurs, et lesquels il est nécessaire de retirer, car ne les fournissant pas commeil est obligé de faire par ladicte transaction et fault qu’il donne asseurance et l’occasion de les fournir,ou que l’on consigne seulement à la charge qu’il les fournira dedans un certain temps.Je ne feray riensans l’advis du conseil. J’ay aussi baillé assignation à la vefve Barbarin audict Poictiers de sorte quesi Dieu me rend un peu ma santé je ne manqueray de m’y trouver.

J’ay baillé à mondit Sr. de La Mazure la somme de cent soixante et douze livres pour leremboursement de pareille somme par luy cy-devant fournie sur les mandemens de Monseigneur auCappitaine La Perrière72 et sergent Amat. Je n’ay point receu celles qu’il a pleu à V. E. m’addresserpar la voie de Laval. Le Sr. du Monceau s’est chargé d’envoyer à Monseigneur la coppie de latransaction que luy et moy avons ce jourd’huy faict avec Mlle de Blazay sur le droict de fief qu’elle

71 L’abbaye d’Angles au sud-est de Talmont, ancien prieuré érigé en abbaye au début du XIVe siècle.72 Jean Guymeleu, dit le capitaine de La Perrière, un soldat de la garnison de château, qui s’établit à Vitré à la suite de sonmariage le 19 juin 1591 avec Suzanne Lefebvre.

Page 32: Années 1618-1623

32

prétend en ceste ville. Le Sr. du Monceau avoit commandement par lettres de Monseigneur, et moyseulement un verbal, mais d’aultant qu’elle a désiré que je fusse estably en ladicte transaction je l’ayvolontiers faict ayant mesmes depuis mon arrivée en ce lieu recognu plus particulièrement le méritede ceste affaire. Cela se peut mieux dire de bouche que par escript. Nous sommes obligées de fournirla rattiffication de Monseigneur, lequel je supplie très humblement nous l’envoyer et me faireentendre ses commandemens. Ne me reste sinon à prier Dieu pour vostre prospérité et santé, et à voussupplier très-humblement de croire que je n’ay d’autre désir plus grand que de me conserver laqualité,

Madame,

De Vostre Excellence Très-humble, très-fidelle et très-obéissantserviteur. d’Iray

A Thouars, ce premier jour de may 1619.

Archives nationales 1 AP 357/28

22 mai 1619 – Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Le conseil de ce lieu avoit esté d’advis de mander le Sr. Berny pasteur de l’Eglise deMouillerons avec les pièces fondamentales et justifications de ses prétentions et suivant icelles luyaccorder (soubz le bon plaisir de Monseigneur) ce qui luy est deub en principal et despans taxés avecles intérests et à taxer s’en est retournée sans fruict ny pour nous ny pour elle.

Le Sr. du Monceau s’est chargé d’envoyer à Vostre Excellence la coppie de la transaction queluy et moy avons faict avec le Sr. La Jault tant en son nom que comme ayant les droicts cédés desreligieux, abbé et couvent de Chambon touchant les arrérages qui leur ont deubs. Nous luy prometons(soubz le bon plaisir de Mondit Seigneur de luy bailler et payer dedans six sepmaines la somme deneuf cens livres, sçavoir les rachapts de Bouchet et de la Chapelle de Viel Pont pour la somme dequatre cens livres à laquelle ils luy ont esté adjugé, et la somme de quatre cens livres de […], et ausside fournir de rattification de mondict Seigneur dedans ledict temps à faulte de laquelle la transactiondemeure nulle à quoy il estime que Monseigneur a un notable intérest d’aultant qu’il y a desjà deliquide xijC

L livres ou environ, et que le tout pourroit monter xviijC livres qui s’acquittent pour lamoitié si ladicte transaction a lieu. C’est pourquoy, je supplie très humblement Monseigneur de nousenvoyer ladicte rattification.

Il n’y a point encore eu de moyen d’amener à raison la vefve Barbarin qui m’escript et faictescripre qu’elle ne veult rien diminuer du principal de ce qui luy est deub non plus que des intérests etdespans. Le Sr. Bourceau de Poictiers me mande qu’il la rendra enfin plus traittable. Quant au /2/ Sr.de La Naslière il me mande qu’il ne peut fournir les pièces et actes à quoy la transaction l’oblige. Ilme semble Madame que puisque Vostre Excellence faict entretenir de point en point ce qu’elle luy apromis par ladicte transaction et mesmes payer tous les intérests quasi depuis le terme expiré. Il estraisonnable mesme nécessaire que de sa part ledict Sr. de La Naslière fournisse lesdictes piècesd’aultant qu’elles pourroient demeurer en mains de personnes qui cy après en feroient peut-estre denouvelles demandes. Je luy escripray demain Dieu aydant.

Les Srs du Monceau, de La Mazure et moy avons veu la coppie du partage provisionnel deMesseigneurs. Nous en escrivons tous ensemble à V. E. C’est tout ce que j’ay depuis mes dernières etje prie Dieu, Madame, qu’il vous tienne sa saincte garde, et qu’il me face la grâce de mériter laqualité,

Madame,

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Thouars, ce 22iesme may 1619.

Archives nationales 1 AP 357/29

Page 33: Années 1618-1623

33

22 Mai 1619 - Thouars

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Il est nécessaire que mes lettres ne soient que remerciements de tantde peine que vous prenés à mon occasion et nouvellement du soing que vous avé eu de faire cercher lecahier qui rendoit imparfaict le traitté de parlemens que j’ay receu et vous en rends mille graces. C’esttrop m’obliger de vous mettre en […] de mes indispositions qui continue mais parfois avec plus derelance qu’au passé, aussi a elle esté plus grande depuis mes dernières.

Dieu a faict une grande grâce à Madame la mareschalle de Fervaques de l’avoir appellé en sonrepos, et Madame un grand honneur de luy avoir menée comme par la main73. Je suis bien aise del’adjudication des mil journaux, mestairie des Genestais et Petit Jeu de Paulme. Vous m’en avésappris les premières nouvelles dont je vous remercie.

Le Sr. Rozemont m’a escript le mauvais estat de son affaire. Je ne sçay que luy respondre. Jevous supplie le saluer de ma part et l’asseurer du desplaisir que j’en ay. Je luy eusse escript mais lapesanteur de ma teste me servira d’excuse. Continués s’il vous plaist à m’honorer de vos lettres.

Nous sommes incertains du lieu où est le Roy et du chemin qu’il veut tenir quelques unstiennent qu’il descendra jusques en Bretagne. Nous tenons la paix faicte grâce à Dieu que je prie vousmaintenir en sa garde. Cecy part,

Madame, de

Vostre très-humble, très-obéissant serviteur.d’Iray

A Thouars, ce xxijesme may 1619.

J’ay receu l’exécution contre le Sr. du Breuil-Goulard de la somme de xliiij livres xvj sols.

Archives nationales 1 AP 357/30

2 juin 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Monsieur de Beaurepère74 m’a rendu celles dont il a pleu à Vostre Excellence m’honorer parlesquelles vous me commandés d’aller à Paris, après que j’auray donné quelque ordre aux affaires quime retiennent icy. A cela, Madame, j’ay à vous dire que si j’eusse rencontré quelque facilité enaulcunes et seureté aux autres avec lesquels j’avois commandement de traitter. Les choses contenuesen ma procuration seroient il y a longtemps exécutées, mais l’insolvabilité de ceux-cy et l’opiniastretéde ceux-là nous ont retenu jusques icy et retarde en partie l’effect de madicte procuration.

J’ay escript à La Rochelle au Sr. Chalmot et n’ay eu aulcune response. J’ay pareillement escriptet faict escripre à la vefve Barbarin, mais jusques icy sans fruict, n’ayant appris par ses responsesqu’une résolution de ne rien diminuer de son principal intérest et despans. C’est à dire une volonté dene point traitter d’aultant qu’il se pourra présenter quelque autre créancier plus traittables duquel nouspourrons tirer quelque composition.

Nous avions convenu cy-devant avec M. de La Naslière comme j’ay faict entendre à VostreExcellence, mais lorsque nous luy avons mandé les pièces et actes qu’il est obligé par la transactionde nous délivrer en luy payant la somme promise. Il a faict la sourde aureille et depuis aulcunesnouvelles. J’y ay envoyé et en atten response aujourd’huy.

73 Anne d’Allègre, veuve en premières noces de Paul de Coligny et en secondes noces du maréchal de Fervacques, estdécédée dans la première quinzaine du mois de mai 1619. Elle fut assistée sur son lit de mort par Charlotte-Brabantine deNassau et par le ministre Pierre du Moulin. Sa mort permettait à Henri de La Trémoille d’entrer en possession du comté deMonfort.74 Isaac Fouquet, seigneur de Beaurepaire de Saint-Martin-de-Macon, d’une famille noble dont les origines remontent aumilieu du XIVe siècle. Il avait épousé en 1613 une catholique, Anne Gaschignard, et ses enfants furent catholiques.

Page 34: Années 1618-1623

34

Nous avons voulu traitter avec le Sr. de La Valette et luy payer le principal et arrérages en nousdonnant caution ce qu’il n’a peu faire ni pour l’un ni pour l’autre. De sorte que par l’advis deM. Adam et du conseil de ce lieu, je luy ay baillé trois cens livres sur le principal pour subvenir à sanécessité et ayder à mettre quelque ordre à ses affaires en faisant lever les arrests ou autrement ; etpour sortir Vostre Excellence et de l’importune involution des chicquaneries des fermiers /2/ et soubsfermiers de La Valette de ses créanciers et cohéritiers. J’ay consigné au greffe à Lodun la somme desept cens dix neuf livres quinze sols et sans en cela comprendre la somme de xxxj livres cy-devantdélivrée par M. de La Mazure à un des dicts cohéritiers, recevans les deux sommes a sept censcinquante livres que se montent lesdicts arrérages.

J’ay présentement receu une lettre du Sr. Fremillon, procureur fiscal de Montaigu, par laquelleil me donne advis que la veille de la St. Jehan l’on faict les fermes muables de la baronie ; maisd’aultant que je n’ay aulcun commandement pour le bail de la ferme générale qui aussi expire à laSt. Jehan, et que si lesdictes fermes muables estoient baillées avant la générale le total de ladictesomme pourroit en estre moins prise d’aultant que le fermier voudroit peut-estre retenir aulcunesdesdictes fermes muables qui luy seroient commodes ce qu’il ne pourroit faire si elles estoientbaillées. Je luy ay faict response qu’il differast jusques huict jours après ledict jour de St-Jehan affinque nous puissions recevoir vos commandemens pour les luy faire entendre ou ceux de Monseigneursur ce subject. Cela presse, c’est pourquoy, Madame, je vous supplie très-humblement d’en avoirsouvenance. Je n’ay receu aulcune lettre ne commandement de Monseigneur touchant l’amortissementde le rente deüe à M. du Plessis.

Mon indisposition depuis deux mois ou environ, m’a empesché de monter à cheval, mais leslettres des pères et nouveaux fermiers de Thalmond me font prendre résolution d’y faire un voyagesur la fin de la prochaine sepmaine pour aviser aux réparations nécessaires et en faire faire procèsverbal, d’aultant que si lesdicts nouveaux fermiers ne trouvent les lieux en bon estat ils n’y entrerontpoint sans faire leurs protestations. Si j’avois quelques commandemens pour cela, je ferois passeroultre.

Je sçay Madame qu’il est très-raisonnable de satisfaire et vous rembourser de la sommeavancée par V. E. pour les pandans d’aureille de Madame Vostre belle-fille, mais je n’ay à présentaultre deniers antre mes mains que ceux qui me restent de la somme que j’ay cy-devant receu àPoictiers. Je suis prest d’obéir de poinct en /3/ poinct à vos commandemens et par toutes mes actionsfaire paroistre que je suis,

Madame,

De vostre Excellence

Le très-humble, très-obéissant et trèsfidelle serviteur. d’Iray

A Thouars, ce 2iesme juin 1619.

Archives nationales 1 AP 357/31

2 juin 1619 – Thouarsà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

La vefve Barbarin persiste tousjours opiniastrement à ne rien diminuer des interests et despansnon plus que du principal de sa somme. Cela nous a empesché de la payeret aussi que la partie queVostre Excellence luy avoit ordonné pourra (si elle ne change d’avis) estre délivrée à quelquecréancier avec lequel on traittera plus avantageusement.

Nous n’avons nulles nouvelles du Sr. de La Naslière depuis que nous luy avons demandé lespièces et actes qu’il est obligé de vous délivrer par sa transaction lorsque vous luy ferés payer lasomme promise. J’ay envoyé vers luy et et atten sa réponse.

Pour sortir Vostre Excellence d’une grande involution de procès et des chicquaniers desfermiers et sous-fermiers de la terre de Berrie, du Sr. de La Valette auquel vous debvés, de ses

Page 35: Années 1618-1623

35

créanciers et cohéritiers. J’ay suivant vos commandemens, Monseigneur, et l’advis de vos conseils deLodun et de ce lieu consigné audict Lodun la somme de sept cens dix neuf livres quinze sols pour lesarrérages escheus, n’ayant payé sur le principal que cent escus à cause de l’insolvabilité dudictLavalette qui ne nous a peu bailler de caution.

J’ay escript au Sr. Chalmot et n’ay point receu de response. La négligence et insolvabilité deceux-cy et l’opiniastreté de ceux qui ont retardé jusques icy partie de l’effect de ma procuration n’yayant perdu de ma part un seul quart d’heure de temps.

Le Sr. Frémillon, procureur fiscal de vostre baronnie de Montagu, m’escript que les fermesmuables de ladite baronie se baillent la veille de la St. Jehan cela (s’il n’estoit retardé) pourroitapporter préjudice à la ferme générale d’aultant que le fermier général retiendroit en les dites fermesmuables ce qui lui seroit commode. Ce qu’il ne pourroit après, d’aultant que nul en ce lieu n’acommandement de bailler ladite ferme générale qui expire audit jour de St-Jehan. Je ne laisseray d’enfaire faire les proclamations /2/ attendant l’honneur de vos commandemens sur ce subject desquelsj’ay besoin dedans la St-Jehan ou un peu après vous suppliant très-humblement, Monseigneur, mefaire entendre comme j’ay à me gouverner en ceste affaire et si à présent vous aurés faict partageprovisionnel à Messeigneurs vos frères et sœurs d’aultant que par la coppie que j’en ay veu vous leurlaisser ladite terre de Montagu. On m’escript de là que celuy qui en est fermier ne veult donner la prixaccoustumé. Vostre procureur fiscal de Thalmond et ceux qui en sont nouveaux fermiers m’escriventde plusieurs affaires qui me font résoudre (bien que depuis deux mois mon indisposition m’aitempesché de monter à cheval) à y faire un voyage sur la fin de la sepmaine et principalement à causedes réparations qu’il fault de nécessité faire à l’entrée desdits nouveaux fermiers pour leur bailler leslieux en bon estat auxquels autrement ils n’entreroient point sans faire leurs protestations. Si j’avoisquelque commandement de Vostre Excellence sur ce subject, je serois plus hardy à y faire ce quej’estimerois pour le bien de vostre service. Je l’attendray et cependant prieray Dieu pour vostreprospérité et santé comme,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissant, très-fidelleserviteur et subject. d’Iray

A Thouars, ce 2esme juin 1619.

Archives nationales 1 AP 357/32

12 juin 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je vous escrivy dernièrement et vous manday par Garton ce que j’avois appris de Thalmont etde Montaigu et comme il estoit nécessaire de faire un voyage en l’un et l’aultre lieu en celles-cy pouraviser aux baux tant des fermes muables que de la générale en celluy là pour faire faire procès verbaldes réparations nécessaires et de l’estat auquel les choses se voient mises entre les mains desnouveaux fermiers, mais que premier il estoit à désirer d’avoir le commandement pour les transporter.

J’avois escript à Monseigneur et supplié très-humblement de me commander ce que j’avois àfaire en cela. Je n’ay rien receu qui me peut apprendre son intention, mais d’aultant que la chosepresse audict Thalmond. Je partiray demain, Dieu aydant, pour y aller, et y serois desjà si le Sr. deLa Naslière ne m’avoit retenu, et fait espérer de pouvoir terminer avec luy l’humeur duquel serecognois estre porter à ne sortir point d’affaire. J’ay cy-devant et par plusieurs fois faict le récit àVostre Excellence de ce qui s’estoit passé entre luy et nous. Je l’ay pressé de parachever et de nousfournir les actes et pièces qui est obligé par la transaction, il fuit, et dict qu’il fournira ce qu’il estobligé par la promesse qu’il m’a bailler. Je luy rescri et luy explique comme la promesse l’oblige auxmesmes choses que le transaction, car par le promesse il s’oblige que moyennant que je fournisse etconsigne pour luy à Poictiers dedans la fin de may la somme de xijM livres, il me ferra cession ettransport de toutes les sommes de deniers que luy peut debvoir Monseigneur tant en principal,intérests, despans, qu’autrement en conséquence de ladicte transaction ; et ainsi il me semble que /2/

Page 36: Années 1618-1623

36

puis que nous debvons agir en conséquence de la transaction que ladite transaction doibt estre suivieet luy nous délivrer les pièces comme elle l’oblige en luy fournissant et consignant pour luy ladictesomme de xijM livres porter ladicte promesse. Je luy ay escript cela dès le mois d’apvril, il m’atousjours entretenu de responses qui ne signifient rien, et encore tout fraichement d’une que je vien derecevoir. Je luy avois envoyé lundy dernier un homme exprès. Par mes lettres, je le suppliois dem’esclaircir, et me faire entendre la façon de laquelle il vouloit prendre l’affaire. Il me respond endeux lignes comme au passé, et simplement qu’il est prest de satisfaire à la promesse qu’il m’a faictesans me parler en aulcune façon des pièces sans lesquelles à mon advis on ne doibt traiter, comme ilne les a pour justiffier ses demandes. Il ne luy sera deub aulcun chose d’aultant que la transactionl’oblige à les rapporter, et s’il les a pourquoy le payer sans les rendre. Voylà où nous en sommes.

Je verray encore ce jourd’huy MM. du conseil pour me conduire et gouverner par leur advis.Vostre Excellence par celles dont il luy a pleu m’honorer me faict esperer une response à mespénultiesmes. Je l’en supplie très-humblement comme aussi à mes dernières , affin que obéissantentièrement à vos commandemens, je me conserve la qualité,

Madame, de

Vostre très-humble, très-obéissant et très-fidelleserviteur. d’Iray

A Thouars, ce xijesme juin 1619.

Archives nationales 1 AP 357/33

25 juin 1619 – Thouarsà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

J’estois à Thalmond lorsque celles desquelles il a pleu à Vostre Excellence m’honorer m’ontesté rendues. J’en arrive présentement là, j’ay trouvé plusieurs réparations nécessaires desquelles, vosofficiers avoient avant mon arrivée faict un procès-verbal. J’ay veu aulcunes des mestayries desAbbayes. Je vous puis asseurer Monseigneur qu’il est très nécessaire de les faire réparer, car toutescelles que j’ay veu menacent ruine et appris que les autres plus esloignées sont en plus mauvais estat,cela est de très grande considération, car si les logis et granges ne sont réparées et qu’à faulte d’yavoir pourveu à temps elles tombent , elles ne pourront estre remises sans de très-grands frais sid’ailleurs les mestairies n’estant pas logées, il ne se trouvera point de mestayers pour cesexploitations. Vous en jugerés, s’il vous plaist, la conséquence, Monseigneur, et y mettrés l’odre quevous verrés nécessaire en donnant vos commandemens à quelqu’un des vostres pour ce faire.

De Thalmond, je me suis transporté à La Gillaudière l’un des principaux membres de l’abbayedudit Thalmond pour empescher la levée des fruicts que vouloient faire les Srs de La Roche-Henry afaulte d’hommage non faict par l’abbé. Ils ont levé les fruicts de La Gillaudière par deux annéesconsécutives. La première par le rachapt qui leur estoit deub par la mort de l’abbé, l’aultre à faultedudict hommage. C’est un droict que la coustume leur donne et auquel on ne peut parer tant quel’abbaye sera sans abbé, ladicte Gillaudière est affermée la somme de vC livres de laquelle (si lesdictsSrs. de La Roche-Henry eussent levé lesdits fruicts) le fermier eust demandé diminution sur le prix desa ferme pour la non jouissance. J’ay composé avec lesdits de La Roche-Henry à la somme de centcinquante livres. Il estoit temps d’y arriver, car ils vouloient faire coupper les foins. Les dixmes deRemartin75, lesquelles /2/ desfunct Monseigneur fit annexer à vostre principaulté de Thalmond lors dela vente des biens ecclésiastics, sont tenues du Sr. de La Bassetière qui les vouloit lever pour lerachapt qui luy est deub depuis la mort de Monseigneur. A le vérité cela a esté in peu long, lesdictesdixmes sont affermées ijC livres. J’ay composé pour ledict rachapt avec ledict Sr. de La Basetière à lasomme de six-vingts livres.

Vous me commandés d’aller à Montaigu pour bailler le ferme de la baronnie, mais à monarrivée en ce lieu j’ay trouvé lettres du Sr. Manceau, advocat de Vostre Excellence à Poictiers,

75 Remartin est un fief situé dans la paroisse de Saint-Vincent-sur-Jard.

Page 37: Années 1618-1623

37

responsives à un factume et à celles que je luy avois envoyé touchant l’affaire du Sr. de La Naslière.Je luy mandois c’est en effect qu’il fault que je me transporte à Parthenay et de là à Mauvergne76,maison dudit Sr. de La Naslière, et là avec deux notaires le sommer d’exécuter ce qui est de sapromesse et de prendre jour pour l’exécution d’icelle qui est de payer et consigner par moy commeayant commandement de Vostre Excellence et faisant pour elle ladite somme de xijM livres et par leditde La Naslière me faict cession et transport de ses droicts et sommes de deniers mentionnées par lecontract de transaction faict à Paris avec Madame vostre mère l’année 1613, et me mettre entre lesmains toutes les piè[ces jus]tificatives desdicts droicts, soit arrest, soit quittances, mentionnées aucontract ainsi qu’il est obligé et à faulte d’y respondre par ledit Sr. de La Naslière déclarer que pourl’exécution de ladite promesse et pour faire telle consignation que je me trouveray à heure jour et lieucertain auquels je le sommeray de se rendre pour exécuter de sa part ladite promesse. C’est affaire estde conséquence, Monseigneur, de sorte que dès ce soir ou demain matin je commenceray l’exécutionde cest advis pour faire en tout ce qui sera jugé nécessaire pour le bien de vostre service scelon mondebvoir et ma conscience.

Cela me fera différer le voyage de Montaigu pour lequel j’ay vos commandemens et de metrouver près Vostre Excellence après mon retour dudit Montaigu. Le mal est que toutes les affairesnécessaires et de conséquence vienne toutes ensembles, mais je seray tousjours à cheval jusques à ceque j’y aye mis tout l’ordre possible. J’ay escript au Sr. de Romagné, mais /3/ je n’ay receu aulcuneresponse de luy.

Incontinent que je seray de retour j’iray recevoir l’honneur de vos commandemens. Je ferayentendre à M. du Plessis-Bellay ce qui est de vostre intention pour la rente qui luy est deue. J’ay faictparler et escripre à M. du Chastelier-Porthault. J’en ay mesme conféré avec celuy qui faict sesaffaires. Il ne laisse de poursuivre et ne se lasse point de plaider.

Il n’y a encore rien de certain pour le temps de l’assemblée provinciale. C’est à l’Eglise deChastellerault de la convoquer. Le conseil de la province s’assemble aujourd’huy à St-Maixent. Ilveult haster le temps à ce que l’on dict & presser ceux de ladite Eglise de Chastelerault de laconvoquer contre leur intention de n’appeler les aultres Eglises que sur la my-aoust. La raison deceux-cy est ce me semble grandement considérable, car il ne vas pas de ceste province si proche dulieu où l’assemblée générale est arrestés77, comme des autres provinces plus esloignées et qui ontbesoing de temps pour se préparer et transporter audit lieu de l’assemblée générale, n’y ayant lieu enla province duquel facilement on ne se transporte en deux jours à Lodun, que cependant quelquenouveauté pourra arriver sur laquelle les députés seront instruicts et préparés, et aussi que ce seroit ungrand bien si les desputés nommés pour la générale ne faisoient que peu ou point de séjour en leursmaisons après leur nommination et ainsi ne peussent recevoir autre teinture que celle qu’ils avoientprise au lieu où ils auroient esté nommés. J’ay crainte que cela ne brouille car dès à présent onrecognoist manifestement une brigue pour la nommination. Monsieur de Rohan est au Parc où ilchasse. Il visite la noblesse et est visité d’elle. Monsieur des Roches-Baritault78 le fut voir mercredydernier.

Je feray proffict de vos commendemens, Monseigneur, et continueray à faire entendre à tous lesgens de bien la bonne intention et volonté que vous avés de vous tenir uni aux sentimens des Egliseset de contribuer avec grand soing et affection ce qui est en vous pour leur conservation n’ayant autrebut que la gloire de Dieu et leur affermissement. C’est ce que l’on croit de vous, vos actions au passéen ont rendu des preuves tout-entières et font espérer le mesme à l’advenir. Chacun en parle ainsi,

76 La maison de Mauvergne située dans la paroisse de Beaulieu-sous-Parthenay au sud du bois de La Meilleraye, appartenaità Jeanne Gillier la femme de Josias Bidault, seigneur de La Naslière. Celui-ci était en mauvaise santé et mourut au cours dumois d’octobre.77 Le 24 mai 1619, Louis XIII avait signé un brevet assignant une assemblée générale à Loudun pour le 25 septembre.Léonce ANQUEZ, Histoire des assemblées politiques des réformés de France (1573-1622), Réimpression de l’édition de1859, Slatkine reprints, Genève, 1970, p. 316.78 Gabriel de Chasteaubriant, seigneur des Roches-Baritaut, comte de Grassay, fils de Philippe de Chasteaubriant, seigneurdes Roches-Baritaut et de Philiberte du Puy-du-Fou, sa seconde femme.

Page 38: Années 1618-1623

38

ceux desquels on a parlé aultrement font leur pouvoir pour se remettre et regaigner l’authorité qu’ilsont laissé en l’affaire.

Si en mon voyage, j’appren quelque chose je vous en advertiray. Cependant je prie Dieu qu’ilvous tienne en sa sainte garde et me face la grâce d’estre tousjours recognu de vous,

Monseigneur, pour

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidelleserviteur et subject. d’Iray

A vostre ville de Thouars, ce 25iesme juin 1619.

Archives nationales 1 AP 357/34

25 juin 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’arrive présentement de Thalmond où j’ay trouvé plusieurs réparations nécessaires. Lesofficiers ont faict un procès-verbal de celles de la principausté aux quelles j’en ay faict adjouster unesans laquelle le moulin de Longeville dépendant de ladite principaulté n’estoit point en estat de servirde Thalmond. Je me suis transporté à La Gillaudière, qui est un des principaux membres de l’abbayedudit Thalmond affin d’empescher que les Srs. de La Roche-Henry (desquel tient ce lieu là) encontinuant les erres des deux années dernières n’eslevassent les fruicts à faulte d’homage non faictpar l’abbé de Thalmond. La mestayrie est affermée cinq cens livres. J’ay composé avec eux pourlesdits fruicts à la somme de cent cinquante livres.

J’ay aussi veu le Sr. de La Bassetière duquel tiennent les dixmes de Remartin. Il vouloit leverlesdites dixmes pour le rachapt qui estoit deub depuis le décès de desfunct Monseigneur lesditesdixmes sont affermées deux cens livres. J’ay composé pour ledit rachapt à la somme de quarenteescus.

A mon retour en ce lieu, j’ay trouvé les lettres du Sr. Manceau advocat de Vostre Excellence àPoictiers responsives à un factum et à celles que je luy avois escript touchant l’affaire du Sr. de LaNaslière pour apprendre par son advis et d’un autre advocat ce que j’avois affaire et comme je m’ydebvois gouverner. Il me respond la mesme chose que ce que je luy escrirois. C’est en effect qu’ilestime à propos que je me transporte à Parthenay et de là à sa maison à Mauvergne avec deux notaireset là sommer ledit Naslière de ma part comme ayant charge et commandement de Monseigneurd’exécuter ce qui est de sa promesse et de prendre jour pour l’exécution d’icelle qui est de payer etconsigner par moy la somme de xijM livres et par ledit Sr. de La Naslière me faire cession et transportde ses droicts et sommes de deniers mentionnées par le contract de transaction faict à Paris avequesVostre Excellence l’année 1613 et me mettre entre les mains toutes les pièces justificatives desditsdroicts, soit arrests, soit quittances prentionnées par ledit contract de transaction. De sorte /2/ que jesuis résolu de partir demain pour l’exécution de ce que dessus et m’en retourner en ce lieu pour porterà Poictiers ladite somme de xijM livres et la consigner suivant vos commandemens, Madame et l’avisde vostre conseil audit Poictiers.

J’ay faict escrire et parler au Sr. du Chastelier-Portault pour terminer l’affaire qu’il a avecMonseigneur. J’en ay mesme conféré avec celuy qui faict ses affaires. Il ne laisse cependant depoursuivre.

Incontinent que je fus arrivé de Paris, je fis mon pouvoir pour disposer les habitans de ce lieu àcontribuer leur possible pour un présent à l’entrée de Madame vostre belle-fille. J’en trouvay aulcunassés résolu de bien faire ; et reschauffay de mon possible ceux qui sembloient plus refroidis. Enfin ilsse sont résolus de faire achester pour ijMiiij livres de vaisselle d’argent. J’appren à mon arrivée qu’ilsont envoyé à Paris pour ce faire. Je suis bien marry que leur bonne volonté ne se soit davantageestendue. J’y ay faict tout ce qui a esté en moy. Je hasteray mon voyage de Partenay et de Poictiers leplus que je pourray pour me transporter à Montaigu. En tout je me gouverneray avec soing et fidélitépour me conserver la qualité,

Page 39: Années 1618-1623

39

Madame,

De Vostre Excellence

Très-humble, très-obéissant et très-fidelleserviteur. d’Iray

A Thouars, ce 25iesme juin 1619.

Archives nationales 1 AP 357/35

15 juillet 1619 - Toursà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Suivant vos commandemens et l’avis du conseil de Poictiers, j’ay cy-devant esté avec deuxnotaires que je pris à Partenay en la maison du Sr. de La Naslière pour le sommer d’exécuter de sapart la promesse par écript qu’il m’avoit baillée, comme de ma part j’offrois ainsi qu’au passéd’exécuter la promesse verbale que je luy avois faict à sçavoir de consigner pour luy des deniers deMonseigneur au greffe de consignations à Poictiers la somme de xijM livres en me faisant les cessionset transports de ses prétensions et de toutes les sommes de denier qui luy estoient deues parMonseigneur tant en principal, intérest, frais, dépans qu’autrement et me rendant et mettant entre lesmains les actes et pièces qu’il doibt convenir ainsi qu’il estoit obligé par la transaction que VostreExcellence à cy-devant passé à Paris avec la femme du Sr. de La Naslière que pour ce faire il eust àprendre soin certain pour se trouver audict Poictiers et au refus qu’il fit de cela. Je luy déclaray que le2iesme du courant je me trouverois audict Poictiers au logis du Sr. Contant où je le sommois de setrouver aultrement fis mes protestations, cela luy fut un pressant esguillon, car il avoit grand volontéde rétracter sa parole et résilie de la promesse qu’il m’avoit baillé ; ce qu’il eust faict sans que jefaisois paroistre et justifiois de mes diligences et le debvoir auquel je m’estois mis par les responsesqu’il m’avoit faict enfin contre le serment qu’il avoit faict de de ne s’y trouver point il se transportaau jour dict à Poictiers en ladicte maison où M. Manceau, deux notaires et moy l’attendîmes, et oùaprès plusieurs contestations et difficultés qu’il fit de me remettre les principales pièces qu’il avoitentre mains nous traittasmes et terminasmes ladicte affaire et luy me rendit lesdictes pièces que ledictSr. Manceau suffisantes et telles que je m’en debvois contenter (oultre ce qui est escript en ladictecession de xijM livres que je fis employer (oultre ce quy est escript en ladicte cession qu’il m’a faicte)en l’acte de consignation qu’il leva pour sa seureté estre provenu des deniers de Monseigneurprocédans du dot de Madame son espouse.

Après mon retour de Poictiers, Monsieur de La Mazure et moy aussi suivant lescommandemens de Vostre Excellence avons esté à Montaigu où nous avons baillé la ferme scelon lesformes ordinaires et quasi à mesme prix hormis vingt Francs auxquels /2/ équitable l’avance que lefermier (appellé François Frémillon soubs la caution d’Amaulry Frémillon, procureur fiscal duditMontaigu) doibt faire par demies années. Ledict Sr. procureur fiscal nous fit une proposition touchantle casuel dudict Montaigu à sçavoir qu’il avoit parole de certaines personnes qui me bailleroient sixcens livres par chacun an. Cela avec le prix de l’ordinaire monteroit jusques à la somme de ijM iiijC xllivres. Je croy que si le tant alloit iusques à la somme de ijM vC livres la chose seroit à son poinct. J’enparle scelon ce que j’ay peu apprendre sur le lieux. Monsieur de La Mazure mande je m’asseure àVostre Excellence les particularités de ce que nous avons négocié en ce voyage au retour duquel je mesuis rendu auprès de Monseigneur pour continuer à luy rendre le très-humble service que je suisobligé. Je prie Dieu qu’il vous soit et à luy aussi agréable comme je travaille icy avec soing et fidélité.

Mondict Seigneur vous envoye deux procurations pour l’affaire de Royan de laquelle Monsieurdu Plessis-Bellay escript amplement à Vostre Excellence.

Monseigneur escript à Monsieur de Netz suivant vos advis, Madame, pour terminer l’affaire deM. du Chastelier-Portault ainsi que vous l’ordonnerés. Comme aussy pour se rembourser du debet dudenier comptable qu’il a rendu et pour séparer les ordonnances que Monseigneur a baillé à diversparticuliers à estre acquittés par ledict Sr. de Netz. J’ay souvent parlé à celuy qui faict les affaires demondit Sr. du Chastelier affin qu’il fist lever les arrests faicts entre vos mains, Madame, à la requeste

Page 40: Années 1618-1623

40

de ses créantiers, que puis après l’affaire se terminast avec plus de seureté. Il ne m’a jamais bienrespondu sur cela bien que comme il m’a dit j’en ai escript souvent à son maistre qui ne l’a pointinformé de sa volonté sur ce subject.

Je n’adjousteray à la présente que mes prières à Dieu pour vostre prospérité et santé et qu’il meface la grâce d’estre tenu de vous en la qualité,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très-fidelleserviteur et subject. d’Iray

A Tours, ce xviesme juillet 1619.

Archives nationales 1 AP 357/36

15 juillet 1619 - Toursà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je vous escri ce mot à la haste pour vous supplier tant de la parMonsieur de La Mazure que de moy de faire tenir les lettres et pacquets cy-inclus suivant leuraddresse. J’arrive présentement de Thouars après avoir faict le voyage de Montaigu avec monditSr. de La Mazure où nous avons baillé la ferme de Montaigu aux conditions que vous verrés par cellesque nous escrivons à Madame. Je ne suis icy que d’hier où je voudrois avoir les moyens commeailleurs de remontrer les occasions où je puisse vous rendre des preuves que je suis de tout mon cœur,

Monsieur,

Vostre très-humble, et très-obéissant serviteur.d’Iray

A Tours, ce xviesme juillet 1619.

Archives nationales 1 AP 357/37

23 juillet 1619 - Toursà Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay failly, je le confesse, d’avoir laissé escouler quelques occasionssans vous renouveller les asseurances de mon service, mais croyés que j’estois bien pressé et qu’ellesestoient bien prompte puisque je ne me suis pas acquitté de ce debvoir. Je veux croire de mesme devous, qui avés laissé venir premièrement le messager et en suitte le Sr. Demeufve, sans que ny l’un nyl’autre m’ait rien apporté de vostre part, sinon la certitude qu’ils m’ont laissée de vostre bonnedisposition. Ledit Sr. Demeufves me dict que M. son nepveu vouloit faire taxer les despans contre desHayers au préjudice de la promesse par escript qu’il m’a baillé de se contenter et faire contenter sononcle pour cinquante ou soixante livres. Je ne sçay lequel des deux… . J’ay en tout la mémoire trèsmauvaise. C’est de quoy je m’estonne. Je sçay que de sa part il se plaindra de moy qui luy avoispromis lorsqu’il me bailla ladicte promesse de luy fair payer ladicte somme dont il convint dedans uncertain temps qui véritablement est passé, mais il doit considérer, s’il luy plaist, et je l’en prie (encoreque ce ne soit pas mon affaire, mais l’affection que j’ay au service de nostre maistre commun et leregret de voir des brouilleries pour si peu de choses), que depuis ce temps là je n’ay pas esté à Parispour en parler et que luy mesme a peu sollicité son payement veu mesme que la conseil avoit estéd’advis de ceste composition.

Je baise les mains à toute vostre noblesse de l’un et l’autre sexe ensemble à M. et MadameBrisseau. Faictes-moy l’honneur de me conserver vostre amitié, laquelle je chériray comme je doibs etdemeureray à jamais,

Monsieur,

Vostre très-humble et très-obéissant serviteur.d’Iray

A Tours, ce xxiijiesme juillet 1619.

Page 41: Années 1618-1623

41

Encore une fois, je baise les mains à M. Berthold.

Archives nationales 1 AP 357/38

29 juillet 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Avec celles dont il vous a pleu m’honorer, j’ay receu les lettres que Monsieur Schvertz vousescript et l’estat présent du comté de Montfort et une consultation sur iceluy. Par les lettres dudit Sr.Schvertz Monseigneur a recognu la nécessité qu’il y a de vous payer la somme de neuf mil livres qu’ilvous doibt de reste de la somme de douze mil livres laquelle vous avés payée et avancée à son acquistscelon la supplication qu’il vous a cy devant faicte pour les pendans d’aureille dont il a faict présent àMadame son espouse. Je luy ay aussi faict entendre, Madame, que s’il ne pouvoit satisfaireprésentement à la somme entière, qu’au moins il estoit nécessaire qu’il donnast ordre de vous délivrerla somme de trois mil livres. Il m’a tesmoigné estre en ceste volonté, Madame, et de faire son possibleaffin que en cela et toutes autres choses vous receviés le contentement que vous pourrés souhaitter.Pour cette partie, il a jugé à propos d’employer la moitié de la somme de six mille livres portée en unerescription sur le Sr. Boyer recepveur général de […]79 acquitter ou à Paris ou en ce lieu. Sinon seservir pour […] les plus prompts qui se présenteront pour retirer ladicte partie.

J’ose asseurer Vostre Excellence que je le voy grandement recognoissant de tant d’obligationsque vous avés sur luy et en toutes sortes, et de la peine et du soing qu’il vous plaist prendre pour sesaffaires. Il est vray, Madame, que mondict Seigneur estant à Tours mit entre les mains de M. deLargier pour faire tenir à M. de Netz ladicte rescription délivrée pour les six premiers mois del’appointement et entretenement que le Roy luy ordonne durant la présente année, estimant que ledictSr. de Rozemont fust à Paris et que ledict Sr. de Netz retirast de luy (sinon de l’argent content) aumoins ou une rescription sur le recepveur de ceste ville nommé Rimbault de pareille somme de six millivres ou une ordonnance à son commis à Poictiers pour la délivrer. C’est comme Monseigneur l’aentendu et la charge qu’il baille maintenant à mondit Sr. de Netz.

J’ay aussi faict voir à mondict Seigneur ledict estat de Montfort ensemble la consultation eniceluy et vostre bon advis affin qu’il me donne ses commandemens pour Bretagne. Je ne les ay pointencore receus pour cela. Premier que vos lettres, Madame, fussent rendues à Mondit Seigneur, il enavoit receu de M. de La Mothe qui luy donnoit advis que plusieurs affaires pressantes et importantesl’appelloient à Rennes et en Bretagne à Montfort particulièrement pour les fermes et réparations. Pourresponse, mondit Seigneur luy manda qu’il seroit très aise qu’au plustost après /2/ la réception de seslettres et avoir mis ordre à luy faire tenir les deniers qu’il avoit entre les mains, il partist pour faire cevoyage. Monseigneur n’a point encore receu de response sur cela.

Pour moy, Madame, je seray tousjours prest d’effectuer les commandemens dont je serayhonoré. Je croy qu’à présent mondict Sr. de La Mothe aura mis ordre à ce qui pressoit le plus suivantvos bons advis. Mondict Seigneur escript au Sr. Demeufves et l’exhorte à continuer son travail,l’asseurant de le faire payer de ce qui luy est deub à la première occasion qui se présentera. Ne mereste qu’à prier Dieu pour vostre prospérité et santé et à vous supplie très-humblement, Madame, decroire que je seray jusques à la fin,

Madame,

De Vostre Excellence

Très-humble, très-obéissant et très-fidelleserviteur. d’Iray

A Thouars, le xxixiesme juillet 1619.

Archives nationales 1 AP 357/39

79 La fin de cette ligne est dissimulée par une pliure de la page.

Page 42: Années 1618-1623

42

22 août 1619 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Depuis mes dernières, il ne s’est rien passé icy qui soit digne de vous estre mandé sinon queMonseigneur a baillé ses lettres de nomination de l’office de contreroolleur au grenier à sel de Lavalau Sr. Duchemin sur la résignation du Sieur de La Roche et sans retirer aultre proffict non plus que duprécédent qu’il a nommé hormis le huistiesme dernier dont ce à quoy l’office est estimé à raison del’ancienne finance qui est en effect deux cens livres pour le précédent et deux cens cinquante pour ledernier.

Monsieur de La Mazure et moy allasmes hier à vostre baronnie de Berrie pour faire adjuger lesréparations nécessaires, mais nous ne trouvasmes aulcuns ouvriers qui se voulussent mettre à laraison. Je n’ay encore receu aulcunes nouvelles des fermiers des Abbayes. Incontinent qu’ils serontvenus et qu’ils m’auront mis entre les mains le prix de leur dernière année, je le mettray en celles deMonsieur de La Mazure.

Vostre Excellence apprendra s’il luy plaist par celle-cy la bonne disposition de Monseigneurqui est fort visité de ses amis et serviteurs. Il avoit hier Monsieur le comte de Fiesque. Il a visité à leurmaison MM. de Roches-Jarret, de La Brise, commandeur de Prailles, Boisgirault et Mesnardière. Jecroy Madame que cy-devant il vous a mandé ce qu’il avoit appris de l’assemblée de Chasteleraultd’où MM. de Laudrière et de Bessay le vindrent voir. Ledit Sr. de Bessay, Monsieur de Vérac sontdepputés à la générale pour la noblesse, Monsieur Clémenceau pour l’Eglise, MM. de La Milletière,de Maleray pour le Tiers estat80. Le voyage et séjour de […] /2/ n’apporta pas grand fruict au public,ny a luy comme on dict beaucoup de contentement. On parle moins certainement de le venue de laRoyne-mère qu’au passé. C’est ce que je sçay pour le présent de sorte qu’il ne me reste qu’a prierDieu qu’il vous conserve en sa garde et vous ameine en santé avec Messeigneurs vous suppliant trèshumblement de me tenir tousjours en la qualité,

Madame de,

Vostre Excellence très-humble, très-fidelle et très-obéissantserviteur. d’Iray

A Thouars, ce 22iesme aoust 1619.

Archives nationales 1 AP 357/40

26 septembre 1619 – Vannesà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je vous supplie d’asseurer Madame que j’ay retiré de Monseigneur leslettres que le Sr. Falut escript à madite dame touchant la poursuitte du tuteur des enfans de Monsieurle président de Thou. Incontinent que M. de La Mothe sera icy je luy communiqueray pour y donnerordre.

Nous sommes icy d’hier à midy où Monseigneur est heureusement arrivé grâces à Dieu avectoute la suitte. MM. de la ville luy vinrent au devant plus d’une lieües et MM. d’Aradon et deCoesquen avec la plus part de la noblesse. Monsieur de Vandosme et Monsieur de Retz arrivèrent surle soir. On attend aujourd’huy Monsieur le mareschal de Brissac et MM. les commissaires de Rennes,les diverses affaires, de ce commancement avec la participation du porteur, et le peu ou point denouvelles que nous avons encore m’empesche de rien adjouster à la présente sinon à vous asseurerque je suis,

Monsieur,

Vostre plus humble serviteur.

80 Jonas de Bessay, gouverneur de Talmont, Olivier de Saint-Georges, seigneur de Vérac, Jacques Clémenceau, pasteur dePoitiers, Etienne Chesnevert, sieur de La Milletière, avocat à Talmont et André Maleray, avocat au siège présidial. James S.VALONE, Huguenot politics : 1601-1622, The Edwin Mellen Press, Lewiston, 1994, p. 227.

Page 43: Années 1618-1623

43

d’Iray

A Vannes, ce xxvje septembre MVIXIX.

Archives nationales 1 AP 357/41

13 octobre 1619 - Vannesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je vous escrivi hier bien au long ce qui s’estoit passé de plus mémorable en ceste assemblée etde la cause qui avoit obligé Monseigneur de faire plus de séjour qu’il ne pensoit, ne me reste à vousdire Madame sinon qu’aujourd’huy sans remise (après avoir grattiffié MM. les commissaires àl’ordinaire) se doibt bailler la ferme de laquelle je vous discourois hier. Ceste action sera celle qui ymettra fin et laquelle mondit Seigneur attend pour aller voir le fort de Blavet.

Vostre Excellence me commande par un mot de sa main au dos de celles que M. Rivet escript àM. Brusse et à moy en commun de retirer de Monseigneur les lettres qu’elle luy envoye et les luyrenvoyer. Lorsque le jardinier arriva je ne me remontray pas au logis, de sorte qu’aulcunes ne metombèrent entre les mains, mais bien de Monseigneur duquel je n’ay peu retirer que celles deMonseigneur le prince d’Orange cy incluses.

Tout continue grâces à Dieu à se porter scelon vostre intention et vostre contentement.Monseigneur escript à MM. Rivet et Herpenius81. Je croy Madame qu’il vous faist bienparticulièrement entendre son intentions qui a mon advis va ne laisser point aller Monsieur Rivet. Ilne s’est rien passé depuis mes précédentes qui mérite de vous estre mandé de sorte que je n’ay ayadjouster mes prières à Dieu pour vostre prospérité et santé, ce sont les plus ardentes que faict,

Madame,

De vostre Excellence Le très-humble, très-obéissant, très-fidelle etserviteur et subject. d’Iray

A Vennes, le xiije octobre MVICXIX.

Archives nationales 1 AP 357/42

30 octobre 1619 - Montfortà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Monsieur de La Mothe et moy arrivons de Bécherel où suivant vos commandemens nous avonsconféré avec ceux qui nous pouvoient donner cognoissance particulière de la consistance et revenu dela terre. Nous y avons appellé le Sr. du Plessis naguères sorti de ferme qui en a joui xxij ans, Le Sr. deLa Falaise à présent chastellain et fermier, le Sr. de La Vieuville, l’un des plus anciens et entendus detout le païs, et tous les officiers du lieu en ceste conférence tant par le rapport des susnommés que parles mémoires qui nous ont esté fournis par ledit Sr. procureur fiscal et du Plessis de la consistance deladite terre. Nous avons appris que toutes charges desduittes tant ordinaires qu’extraordinaires commeinstructions de procès criminels &c, elle pouvoit valoir tant en ordinaire que casuel en y comprenantles greffes (qui sont engagés pour la somme de iijMiijClx livres) la somme de iijMijC livres, maisd’aultant que lesdits greffes ne sont raquittés en l’estat qu’à présent est la terre, elle ne peut valoir quela somme de ijMvjC livres de ferme. Elle est affermée audit Sr. de La Falaise pour trois anscommencés le premier jour de décembre 1617 à ijM livres par chacun an, et cent livres de deniersd’entrée. Il prend les ventes jusques à six cens livres et non plus.

81 André Rivet avait été contacté par un professeur de l’université de Leyde Thomas Van Erpe (1584-1624) dit Erpenius pourvenir professer dans cette université la théologie. Sur cette affaire consulter Gustave COHEN, Ecrivains français enHollande dans la première moitié du XVIIe siècle, 1920, Librairie Edouard Champion, Slatkine reprints, Genève, 1976,p. 293-310.

Page 44: Années 1618-1623

44

Passant par Rennes, je prendray coppie du bail et du contract de l’engagement des dits greffes/2/ qu’il est nécessaire de s’acquitter. Il sera besoing de faire fonds pour le racquit de la somme deiiijM livres ou environ car oultre la somme principale il fault payer les ventes qui pourront monter àquatre cens livres et plus, et les frais qu’ils prétendront avoir faicts pour entrer en possession etjouissance. Ils peuvent valoir de ferme pour le moings six cens livres. Il n’y a point de rachapts, nyd’aultres parties casuelles que les lods et ventes, mais ceste terre est de grande estendue et de laquelle(comme l’on nous a faict entendre) relèvent xvijClx maisons nobles. Le peu de soing de desfuncteMadame la mareschale de Fervacques a faict que beaucoup de choses menacent ruine et aussi quepour en augmenter le revenu et maintenir ce qui y est à présent il est nécessaire d’avoir les tiltres etpapier de ceste terre et la faire réformer en un seul article. Il y a une rente de quarante mines defroment évaluée à iijCiijXX livres que doibt le seigneur de La Tour, laquelle il ne paye point. Lediscours de cela seroit long, je remets à faire entendre cela à Vostre Excellence de vive voix.

Monseigneur est icy du xxviije de ce mois et en bonne santé grâces à Dieu bien resjouy del’heureuse nouvelle qu’il a receu de la délivrance de Monseigneur le Prince82 pour s’en conjouir avecluy. Il a dépesché ce matin M. de St-Marsole. Il hastera son voyage le plus qu’il pourra. Je luy ay faictvoir derechef la coppie des lettres que Monsieur du Plessis-Mornay vous a cy-devant escript et faictentendre ce que vous me commandés, Madame, touchant la députation de M. Herpenius. J’estime etm’asseure qu’en cela comme en toutes autres choses il se conformera à vos bons avis.

Je croy qu’il ne fera pas long séjour en ce lieu. Il n’y a faict aulcune affaire qui mérite de vousestre mandée, hormis /3/ qu’il a continué la pluspart des officiers de ce comté pourveus par Madamela mareschale de Fervaques depuis le contract que vous avés faict. Elle …. Il ne s’est rien passéd’ailleurs dont j’aye souvenance, non plus qu’à Quintin83.

J’ay parlé à M. de La Mothe suivant vos commandemens, Madame, touchant les acquists quivous sont nécessaires. S’il ne les porte luy mesme il m’asseure qu’il me les baillera pour vous lesrendre. Je n’ay rien a adjouster sinon à continuer mes prières à Dieu pour vostre prospérité et santé, cesont les plus ardentes que face,

Madame,

De Vostre Excellence,

Le très-humble, très-obéissant et très fidelleserviteur et subject. d’Iray

A Montfort, ce 30esme octobre 1619.

Archives nationales 1 AP 357/43

1620 Au mois de janvier, Charlotte-Brabantine de Nassau se rendit à Paris pour allersuivre les procès pendants au Parlement et aussi pour morigéner son fils cadet le turbulent Frédéric.Elle arriva dans la capitale le 6 février.

L’assemblée de Loudun poursuivait ses séances et ne se sépara qu’au mois d’avril en précisantque si les promesses faites par la Cour n’étaient pas tenues, elle se réunirait à nouveau dans six moisà La Rochelle.

A Angers, Marie de Médicis réunissait autour d’elle les “ brouillons ”. Ce qui décidaLouis XIII à intervenir. Rouen (10 juillet), Caen (15 juillet) se rendirent sans combat. Le 2 août le Roiétait au Mans et delà fit marche vers La Flèche et Angers. Le 7 août, les partisans de la Reine mèrefurent dispersés par l’armée royale au Pont-de-Cé. Le 10 août la paix d’Angers mit fin à la secondeguerre de la mère et du fils.

82 Luynes, craignant l’influence de la Reine mère, avait obtenu de Louis XIII la libération le 20 octobre 1619 du prince deCondé, interné depuis septembre 1616.83 En cette année 1619 à Quintin, Sébastien Le Coniac, sieur de Lanvéac, fils de Jean Le Coniac, sieur de La Ville-au-Pilon,fermier du comté, succéda dans la charge de sénéchal à Jean Suasse, sieur de Collédo, qui exerçait cette charge depuis 1591.

Page 45: Années 1618-1623

45

Henri de La Trémoille en dépit des conseils de prudence que lui donnait sa mère, mécontent dupeu de cas qu’on faisait de lui à la Cour et de l’indifférence du Roi à son encontre84, rejoignit laReine-mère. Elle lui donna commission pour deux régiments et une compagnie de gendarme. Maisavant qu’il n’ait pu réunir ces troupes, la paix était conclue.

Henri de La Trémoille dut passer sous les fourches caudines. Suivant l’avis de son cousin, leprince de Condé, il assura le souverain de sa fidélité lorsque celui-ci en route pour Poitiers, passa le18 août à Montreuil-Bonnin85.

La décision de Louis XIII de descendre au Béarn pour y rétablir le catholicisme (19 octobre)fut pour les La Trémoille un cruel dilemme.

Le 25 décembre, se réunit à La Rochelle, sans l’autorisation du Roi, une assemblée protestanted’une soixantaine de membres. Henri de La Trémoille s’y était fait représenter par La Bourdilière quicommandait en son nom à Thouars. Il est vrai que son épouse, venait d’accoucher le 17 décembred’un fils : Henri-Charles, le futur prince de Tarente.

19 février 1620 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

M. de Netz escript à Monseigneur que la procuration qu’il avoit baillé à M. de La Mothe pouremprunter de l’argent à Paris affin de payer la partie deüe à Messieurs de Tillières86 et de Thavanes setrouve desfectueuse, et que M. Herauld debvoit luy envoyer la minute d’un autre. Il ne l’a point receuencore, mais suivant l’advis dudict Sr. de Netz il a escript à Laval affin s’il y a moyen de disposer lesadjudicataires des mil journaux etc, à s’aobliger au payement de ladicte partie dedans trois mois etpouvoir faire envoyer leurs promesses à Paris. Mondict Seigneur n’a rien appris encore sur ce subject.J’ay peur que les oppositions qui restent à lever leur serviront d’excuse et donneront prétexte de nedonner point ce contentement que l’on requiert d’eux.

Il y a de la malice aux fermiers dudict Laval de n’avoir point envoyé l’obligation aux héritiersde feu M. de Thou ainsi qu’ils ont promis de bouche à Monseigneur et depuis par leurs lettres. Je leuren escripray par la première occasion.

M. du Monceau s’est chargé d’escrire au Sieur Fallut qu’il y a un deffault prest à juger contrevous, Madame, comme tutrice de Messeigneurs à faulte d’avoir pris le faict et cause de la Dame duCheval blanc poursuivie à Paris par le Sr. Commandeur de Prailles qui prétend la maison dudit Chevalblanc tenir de luy immédiatement. Il n’y a aulcun doubte Madame que par le jugement quiinterviendra sur ledit desfault vous serés debboutée de toutes deffances, car ladite Dame du Chevalblanc vous a tousjours servie /2/ mesmes paré les ventes à feu Monseigneur duquel elle a acquist quej’ay veu.

Il ne s’est rien passé icy au particulier depuis vostre partement, sinon que Mademoiselle setrouva un peut mal lundy dernier, mais à ce que j’appris hier elle se portoit beaucoup mieux. Aupublic les Srs. de Bellujon87 et de La Fontan ont esté ouis en l’assemblée de la part de MM.Desdiguières et de Chastillon, le dernier non avec tant de mescontentement de la compagnie quel’autre pour n’avoir pas tant dict, mais tous deux avec peu de fruict pour ceux à qui ils parloient et peude contentement de satisfaction pour eux. Après qu’ils eurent esté ouis la response de Monseigneur à

84 Pourtant, Louis XIII avait écrit le 26 juillet 1620 de Caen à Charlotte-Brabantine de Nassau qu’il souhaitait donner à sonfils le “ moyen de faire valoir son courage et la générosité de ses ancêtres ”. Eugène GRISELLE (Editeur), Lettres de la mainde Louis XIII, Société des bibliophiles français, Paris, 1914, 2 vol, tome I, p. 59-60.85 Lettres de Duplessis-Mornay à Charlotte-Brabantine de Nassau des 10 et 20 août 1620. DUPLESSIS-MORNAY(Philippe), Mémoires... contenans divers discours, instructions, lettres & depesches par luy dressées ou escrites [...] depuisl’an 1600 jusqu’à l’an 1623, op. cit., tome II, p. 407-408 et 412-413.86 Tanneguy II Le Veneur de Carrouges (1585-1652), comte de Tillières.87 Daniel de Bellujon, gentilhomme bourguignon, était le porte parole de Lesdiguières.

Page 46: Années 1618-1623

46

l’assemblée fut leüe et trouvée très bonne suivant les tesmoignages de MM. de La Forest88 et duPlessis-Bellay jusques là qu’elle fit dire à plusieurs et presques à tous que si tous les autres escrivoientet parloient comme Monseigneur les affaires générales en iroient mieux. Il est en très bonne estime enceste compagnie la et particulièrement envers les gens de bien qui tous ont le cœur et les yeux fichéset attachés sur vous, Madame, de laquelle seule ils espèrent et font estat, recognoissans que ce quivient d’ailleurs ne sent rien de la bonté, piété et franchise que tout le monde recognoist en vous89.Dieu qui vous conduit partout, vous a mené au lieu sans où sans doubte il se veult servir de vous pourmaintenir son Eglise en repos. C’est le discours d’un chacun et ma croiance que vostre voiage estoitaussi nécessaire pour cela, que pour le particulier des affaires de Messeigneurs qui avoient très-grandbesoing de soing et sage-conduite de Vostre Excellence pour retenir les affaires penchantes,fortiffiées les douteuses, et affermir celles desquelles il falloit craindre l’événement sans vostrearrivée.

Le Sr. /3/ Bellujon vit Monseigneur avant que se présenter à l’Assemblée et luy rendit deslettres de la part de M. Desdisguières, aultant simples qu’elles pouvoient estre. Monseigneur luy faictresponse trouvée bonne au jugement de plusieurs. Il vous en envoye coppie et nous escript amplementde tout ce qui s’est passé, comme de la résolution prise à l’assemblée de desputer encore, et des autreschoses qui luy ont esté mandées de Lodun ou celles que vous luy aviés escript ont esté portéesincontinent après leur réception en sorte que je ne les ay point veües, ne sachant point s’il vous y faictresponse particulièrement ainsi que Vostre Excellence m’a commandé de le faire souvenir, ne voulantmanquer en aulcune façon d’obéir aux commandemens que vous m’aurés faict l’honneur de me faireaffin de me conserver toute ma vie la qualité,

Madame,

De Vostre Excellence

Très-humble, très-obéissant et très fidelleserviteur. d’Iray

A Thouars, le 19e febvrier 1620.

Archives nationales 1 AP 357/44

26 février 1620 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Mademoiselle m’a faict l’honneur de me dire celuy que vous me faicte de me commander devous escrire aux occasions les choses de deçà qui viendroient à ma cognoissance à quoy j’obéirayavec tout le besoing et affection qu’il me sera possible et à tous les autres commandemens dontVostre Excellence m’honorera, estant obligé en toutes sortes et très estroittement par tant detesmoignages et d’effects de vostre bonne volonté vers moy où par la souvenance qu’il vous plaist enavoir. Je n’ay jusques icy laissé passer aulcune occasion prompte sans vous escrire et n’en perdraypoint à l’advenir puisque vous me faictes l’honneur de me le commander.

M. de St-Marsolle90 m’a cy-devant escript par vostre commandement, Madame, le discoursqu’il a eu avec le Sr. Bernabé, advocat de M. de Rohannois, affin que je le fisse sçavoir àMonseigneur qui n’a point response à toutes les choses qu’on luy propose sur ses affaires sinon quevous estant à Paris, Madame, et ayant agréable d’en avoir le soing vos volontés et résolutions estoientles siennes. Le Sr. de St-Marsolle me mande que vous me commandés de vous faire entendre lessentimens de mondict Seigneur sur ce subject. C’est celuy que j’en ay peu apprendre. Je respondray

88 Moïse Suzannet, sieur de La Forêt-Brédurière, un huguenot poitevin, était le lieutenant du duc de Bouillon augouvernement de Castillon.89 Ce passage fait de Charlotte-Brabantine de Nassau la chef de file du parti de la paix contre les faucons favorables à laguerre et explique le choix de Loudun comme siège de l’assemblée à égale distance de Thouars et de Saumur et de Duplessis-Mornay.90 Isaac de Farou, écuyer, seigneur de Sammarçolles, un huguenot du Pays Loudunais.

Page 47: Années 1618-1623

47

audit Sr. de St-Marsolle que l’on ne peult que trouver bonne la proposition qu’il faict d’esbaucher cetaccommodement et qu’il sçait que vostre maison, Madame, est une maison de paix et que jamais vousne vous reculés de la raison ny des accords pourveu que d’ailleurs on s’en approche de bonne grâce.Car il me semble que c’est à M. de Rohannois à recercher et vous tesmoigner l’envie qu’il a de sortird’affaires, mais cecy est un discours faict à un des vostres par son advocat peut-estre /2/ sans son sceuqui a mon advis eust eu beaucoup meilleur grâce avant le jugement du procès de Pousauges.

J’ay escript aux fermiers de Laval par le commandement de monseigneur le desplaisir qu’il a deleur retardement a envoyer l’obligation pour les héritiers de feu M. de Thou. Nous avions il n’y a quedeux jours un homme exprès envoyé par M. de Vautorte91 qui mande à Monseigneur que les religieuxde Clermont ne veulent recevoir aulcune proposition d’accommodement et traitté pour la place quel’on demande auprès d’eux pour la construction des forges ne donnant aultres raisons pour prétexte deleur reffus que l’appréhension du voisinage de La Cuerie et ses associés. Monseigneur luy commandede persister et de tascher de les amener à raison. Le Sr. Lezarie mande au Sr. de St-Laurent qu’il necroit pas que ces personnes s’y puissent rendre et que si Monseigneur luy veult donner mandementqu’il fera travailler bon gré mal gré. Cela n’a point encore esté résolu et pense qu’il vaudroitbeaucoup mieux ou recercher une autre place, ou attendre encore quelque temps pour pour amenerlesdicts religieux au point que l’on désire que non pas bastir de tour et acte grands frais en un lieu oùil n’y auroit aulcune seureté.

Ledict Sr. de Vautorte escript aussi à Monseigneur qu’il a veu et conféré avec la plus part desusagers qui consentoit mainlevée et pourveu que Monseigneur les dédommage cy-après ou en deniersou en bois au dire d’experts, et que pour l’asseurance de ce dédommagement certaine somme d’argentdemeure es mains des adjudicataires jusques à ce qu’il ai esté faict, que pour cela ledict Sr. deVautorte et lesdicts adjudicataires s’obligent en privé nom. Monseigneur luy respond qu’il trouvebonne ceste proposition mais que premier qui passe oultre à l’effect d’icelle, il veult sçavoir siM. l’abbé de Clermont et aultres prétendans usage qui se trouveront à Paris auront cet expédientagréable, affin de faire tout par un mesme /3/ traitté que pour ce faire il vous en escrira et voussuppliera de commander que l’on s’enquière d’eux, mais qu’il s’est trouvé beaucoup meilleur detraitter dès à présent, puisqu’aussi bien tousjours le fault il fera sans laisser aulcun levain ny matièrede brouiller cy-après, car les fermiers n’estans obligés de payer que six mois après qu’ils auront entréen jouissance si ce traitté ne se faict avant les six mois expirés, avec lesdicts usagers, lesdictesadjudicataires ne délivreront aulcuns deniers à mondict Seigneur puisque ledict traitté sera préalable,ou à tout le moins retiendront tousjours la somme dont on aura convenu jusques après l’affect dudicttraitté, que cela seroit de notable préjudice pource qu’ayant faict estat de toute la somme que devrontlesdicts adjudicataires, lesdicts six mois expirés partie d’icelle ne pourroit demeurer entre leurs mainset cepandant jouir de toutes les choses qui leur ont esté adjugées sans que les affaires de Monseigneuren resseussent du domage, que toutesfois il attendroit vos lettres et luy feroit entendre sa volonté.J’atten la response desdictes adjudications sur la proposition faicte par M. de Netz, à sçavoird’envoyer leurs promesses à Paris pour sur icelles emprunter la somme de xxxvjM livres pour troismois. Ils le doibvent et à mon advis puisque c’est pour acquitter les debtes de Monseigneur et àprésent mesmes que Madame de St-Victor les a laissé, par sa mort, jouissans des mestairies desGenetais. Le Sr. advocat fiscal de ce lieu s’est chargé d’escripre à Paris et envoyer un factum del’affaire de la Dame de La Plantière qui tourmente grandement Monseigneur pour son payement.

C’est tout ce que j’ay à pour le présent au particulier de vostre maison. Pour le public MM. deBertheville, de La Haye, de La Chappelière, de La Milletière, etc92 sont chargés de s’ouvrir à vous,Madame, et vous portent des lettres. Je leur remets à vous dire le mérite de tout, et atten l’honneur devos commandemens pour y obéir avec le soing et affection que doibt,

91 Louis Cazet (1586-1651), sieur de Vautorte, appartenait à une des plus notables familles catholiques de Laval. Son pèreJean Cazet, ancien avocat au duché de Mayenne avait été de 1586 à sa mort en 1605 conseiller au parlement de Bretagne, sonfrère aîné François avait hérité de cette charge. Louis Cazet avait acheté en 1610 à Daniel Hay, sieur de La Motte, avecl’agrément de Charlotte-Brabantine de Nassau, la charge de juge ordinaire de Laval pour la somme de 30 000 livres, ce quilui conférait les attributions, sinon le titre de maire de la ville. Il détenait également la charge de juge des exempts.92 Cf. Léonce ANQUEZ, Histoire des assemblées politiques des réformés de France (1573-1622), p. 323.

Page 48: Années 1618-1623

48

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très-fidellesubject et serviteur. d’Iray

A Thouars, ce 26e febvrier 1620.

Archives nationales 1 AP 357/45

3 mars 1620 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Monseigneur a veu en celles que vous m’avés faict l’honneur de m’escrire ce que vous y avésadjousté de vostre main sur quoy je n’ay receu aulcun commandement estant tousjours prest et àtoutes heures d’obéir et servir par tout avec pareille affection.

Nous avons eu icy un homme de la part de M. de La Cressonnière93 qui demande payement dela somme de iijMvijCiiijX trois livres xiij S, qu’il prétend luy estre deub de reste de la somme de quinzemille livres cy-devant et de longtemps emprunctée de M. de Pontlevoy son beau-père, scelon laliquidation qui en a esté faicte sur vostre offre en l’année 1608 et de la somme de cinq cens iiijXXxiijlivres ix S contenue en deux exécutoires de despanse de Poictiers. Il supplie très-humblementMonseigneur de le faire payer contant ou à tout le moins de passer en Cour condemnation desintérests pour l’advenir. Ses lettres sont grandement soumises et pleines de protestations de services ettoutes telles qu’elles peuvent partir d’un homme qui demande de l’argent. Monseigneur luy respondque Vostre Excellence ayant eu agréable (scelon la très-humble supplication qu’il luy on a fait) deprendre le soing de la conduitte de ses affaires desquelles elle a toute cognoissance, qu’il luy escriraet le suppliera très-humblement par l’équité qu’elle recognoistra en sa demande de luy consentircondemantion pour les dicts intérests.

Je ne sçay Madame si mondict Seigneur vous en escripra. Ce ne sera faulte de l’en fairesouvenir. Vous sçavés, Madame, mieux que personne le mérite de cet affaire de laquelle je n’ay aultrecognoissance /2/ que celle que me donne la coppie des arrests qu’il a dit avoir obtenu laquelle setrouvera en ce pacquet avec la lettre qu’il a escript à Monseigneur. Vostre conseil de ce lieu a estéd’avis d’obtenir commission de Poictiers pour faire appeler Monsieur le marquis de Royan affin devoir déclarer la parage d’Aspremont finir à quoy à mon advis il ne se trouvera point de difficulté.Monsieur de La Mazure vous porte ladicte commission laquelle mondict Seigneur à commandé vousestre envoyée pour y faire ce que vous estimerés à propos.

On nous a rapporté les lettres que Monseigneur avoit cy-devant escript à M. de Monts de Royanqui est à présent à Paris. J’envoye lesdictes lettres affin que par leur datte il voye le soing que vousavés eu Madame de luy donner contentement. Monsieur de La Mazure vous dira beaucoup mieus debouche que je ne pourrois vous escrire les affaires d’icy.

L’Assemblée est maintenant entre la crainte et l’espérance du succès du voyage de sesdesputés, mais plusieurs craignent plus qu’ils n’espèrent. On n’y faict pas grandes affaires à présent.La plus part des desputés se sont retirés avec congé et charge de se rendre au 12e. M. Le Vidame aesté malade, mais à présent il est entièrement guéry. M. Chauvé a esté à Saumur. Ce voyage aempesché celuy que Mondit Sr. le Vidame devoit faire en ce lieu pource qu’ils ne peuvent s’absenteren mesme temps.

Les adjudicateurs de Laval ne doibvent à mon advis plus faire de difficulté d’envoyer leurspromesses à Paris pour emprunter de l’argent d’aultant qu’il ne reste plus à payer que la somme dexviijM à M. le comte de Tillières94 et aussi qu’ils reffusent dix-sept mil livres contant des deuxmestairies des Genetais pour lesquelles on ne leur faict aulcun trouble quy empeschent.

93 Henri Bastard, marquis de la Cressonnière dans la paroisse de Cesay, gouverneur de l’Ile et du château de Maillezais. Ilavait épousé en 1595 Louise de Pontlevoy, fille de Louis de Pontlevoy et de Françoise de Broé. Dictionnaire historique etgénéalogique des familles du Poitou, tome I, p. 321.94 Tillières (Maine et Loire).

Page 49: Années 1618-1623

49

J’appren, Madame, que mondit Sr. le Vidame a très bien faict de passer les jours gras à Lodun yayant /3/ esté nécessaire à cause de l’arrivée du Sr. Gillier, envoyé de Monsieur des Diguières, pourapporter la coppie de la déclaration du Roy95, et oster dit-il l’allarme qu’elle pourroit causer d’aultant(ce sont ses mots) que les nouvelles qui a leur abbord sont estimées mauvaises ont des aisles plusfortes que les bonnes, et faict une présupposition à mon advis au commencement de sa lettre qui ne setrouvera pas conforme à la charge qu’on les desputés. Vous verrés, Madame, par la coppie de laditelettre que je vous envoye. J’eusse faict de mesme de la déclaration mais vous en sçavés la substance,et aussi cela ne seroit tousjours que trop tost.

Monseigneur reçoit à mesme heure cet advis de vous, Madame et de MM le Vidame96 et deLa Moussaye97 et depesche en diligence vers MM. de La Forest et du Plessis pour les rappeler. Lesgens de bien sont nécessaires en l’assemblée à laquelle on veult faire peur pour l’obliger à prendre desdélibérations desquelles aulcuns veulent tirer le gré qu’ils n’ont pas mérité. Plusieurs croyent cestedéclaration du Roy plustost mandiée et recerchée par aulcuns des nostres pour venir à leur but queprocéder de la mauvaise volonté de Sa Majesté envers nous. Mon appréhention est pour le public quiest en danger de souffrir si Dieu n’opère puissamment puisque nous contribuons à nostre mal et quenous n’en pourons recevoir de plus grand que celuy que nous faisons nous mesme. Je ne doubte point,Madame, que vous qui voyés cela de plus près et en prévoyés le malheur mieux que personne ne lesupportiés avec un extrême regret, mais Dieu enfin fera son œuvre à la confusion de ceux qui auronten de mauvaises intentions contre le bien commun de ses Eglises.

Je le prie ardemment qu’il vous conserve vostre santé et vous donne la force de vois cesdésordres et les supporter parmy le grand soing et sollicitude que vous prenés pour les affairesparticulières de Monseigneur, pour lesquelles, Madame, il /3/ continue ses très humbles supplicationsenvers vous. Il est en très bonne santé grâce à Dieu avec Madame son espouse et Mademoiselle. Jeloue Dieu de voir une telle intelligence et amitié entre eux trois, et la grande affection qu’il tesmoigneet a en effect pour Monseigneur le comte duquel il prend les intérests avec pareille part que si ils luyarrivoient en propre.

Je ne recevray jamais de plus grand contentement que de le voir vivre avec le respect ethonneur qu’il vous doibt. C’est dont je prie Dieu et qu’il vous maintienne en sa sainte guarde et vousconserve en santé et qu’il me donne les moyens de vous rendre les très humbles services que je suisobligé comme,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidelleserviteur et subject. d’Iray

A Thouars, le 3e mars 1620.

Archives nationales 1 AP 357/46

10 mars 1620 – Thouarsà M. de Champdor

Monsieur, Vous m’avés escript plus que vous ne deviés et qu’il n’estoitnécessaire, cela ne pourra avoir esté sans vous avoir faict perdre beaucoup de temps inutilement etque vous eussiés mieux employé ailleurs. Jamais les lettres de mes amis ne me sont à importunité,moins plus de mes intimes et plus asseurés comme vous. Nous avions appris de Madame et à mesme

95 Léonce ANQUEZ, Histoire des assemblées politiques des réformés de France (1573-1622), p. 324.96 Prégent de Lafin († 1625), vidame de Chartres, fils de Jean de La Fin, seigneur de Beauvoir-La-Nocle et de Béraude deFerrières, un vétéran des guerres de la Ligue, représentant de l’Ile-de-France, président de l’assemblée de Loudun.97 Amaury II Gouyon (1577-1624), marquis de La Moussaye, comte de Plouër, vicomte de Pommerit dans l’évêché de Saint-Brieuc, était le chef d’une des branches cadettes de la Maison de Gouyon-Matignon ayant embrassé le protestantisme dans ledernier quart du XVIe siècle. Il représentait la Bretagne à l’assemblée de Loudun. Durant cette assemblée, dans le cadre desréseaux de réciprocité des échanges, caractéristiques aux relations nobiliaires du XVIe siècle et XVIIe siècle, il offrit sonamitié aux La Trémoille.

Page 50: Années 1618-1623

50

temps de Lodun ce qui s’est passé au conseil touchant la déclaration du Roy contre les depputés del’assemblée et la veriffication et publication d’icelle au parlement.

J’ay bien du regret de le peine et du soucy que Madame a pris pour envoyer coppie de ladictedéclaration car nous en avions coppie dès long temps ainsi que Monsieur de La Mazure nous pourraavoir dit.

Nous avons aussi appris les termes à plus près de la harangue de Monseigneur le Prince enprésentant ladite déclaration à MM. du Parlement, mais non sans souspirer et regretter qu’elle n’aitesté en façon qu’elle ait donné contentement à tous les gens de bien, qui se resjouissent en la fermecréance qu’ils ont que les pauvres huguenots ont Dieu pour tout potage qui ne les abandonnera point.Et bien il se trouvera qu’en fin il les guarentira de mals, et puis voyla tout. Nostre assemblée estmuette et sans prononcer avec paroles que du respect et obéissance et ceux qui la composent attendentle succès de la négotiation de leurs depputés. Ils voudroient estre quasi sans bouche et sans oreilles,pour ne voir ny ouïr la publication de ladicte desclaration et en suitte la signification qui est capablede faire plus de mal que la peste.

Toute nostre cour se porte bien grâces à Dieu hormis me maistre qui est enrumé, mais avecmoins De relapse qu’au passé. Pour moy, je me porte guaillard comme un guardon et qui atten lesmoyens de vous tesmoigner par effects l’entière affection que j’ay d’estre reçu de vous,

Monsieur,

Vostre très-humble serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce 10e mars 1620.

Ayés agréable de supplier Madame Briseau de commander deux fers de rabats et vous de lespayer et je vous rendray l’argent.

Archives nationales 1 AP 357/47

11 mars 1620 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Depuis mes dernières, il n’est rien survenu de nouveau ny au général ny au particulier sinonque Monseigneur a esté acceuilli d’un rhume qui l’a empesche quelques nuits de dormir mais qui àmon advis a beaucoup diminué grâce à Dieu il n’en a point guardé le lict mais seulement la chambre.Cela, Madame, ne vous doibt point mettre en peine et soucy de l’événement, car je m’asseure quenous en avons la fin avec celle de la sepmaine. Il n’est survenu aulcun accident ny fiebvre, mais lemauvais temps qui continue a esté grandement contraire à ce ma. Il vous escript, Madame, l’estatauquel a présent il est, et je m’asseure que Madame son espouse et Madamoiselle vous en rendentcertaine.

Monseigneur est intervenu (mais soubs promesse d’indemnité pour l’événement) en un procèsqui se poursuit à Angers pardevant les juges des traittés par les marchans de ce duché contre unnommé Bartel qui se dit fermier desdicts traittes en Anjou à cause des exactions qu’il veult faireprétendant xlvi S pour chacune pipe de vin qui sort du duché pour aller plus en avant en Poictou, etxx S pour cent pesant qui en soit ou qui y entre. Les habitans de ceste ville qui y ont grand interest ysont aussi intervenus et Monseigneur à leur requeste et supplication moyennant ladicte promessed’indemnité.

J’envoye à M. de La Mothe une assignation donnée à la requeste de Jehan Jamet98, cy-devantfermier de vostre principaulté de Thalmond, et luy mander ce que je sçay là dessus. Le remettant dureste /2/ à M. de La Mazure qui est pleinement instruict du mérite de l’affaire.

98 Jehan Jamet avait été le fermier de la principauté de Talmont jusqu’au 31 décembre 1618. Le 27 janvier 1618, Charlotte-Brabantine de Nassau avait affermé la principauté pour cinq ans à compter du 1er janvier 1619 pour la somme de 2 376 livrespas an à René Jacquelin, conseiller et élu pour le Roi en l’élection des Sables. G. LOQUET, « Essai Historique sur leTalmondais », Annuaire de la Société d’Emulation de la Vendée, 48e année, 1901, p. 172-173.

Page 51: Années 1618-1623

51

On me rend présentement une lettre que vous m’avés faict l’honneur de m’escrire par laquellevous me commandés Madame de dire à Monseigneur que vous avés trouvé bon l’avis qu’il a donné àl’assemblée. Je n’y manqueray aussi tost que je pourray avoir l’honneur de le vois. Ce matin il n’arien encore appris de Monsieur de Roannois ny d’aucun de sa part. Si j’ay cognoissance desouvertures que Madame de La Rochepot fera j’en advertiray Vostre Excellence, et de toutes autreschoses que j’apprendray. Monseigneur remet MM. de La Mothe et Herauld touchant la difficulté et ledoubte du lieu où se doibvent commencer les poursuittes pour les réparations nécessités à Montfortsur ce qu’il vous plaira adviser, comme aussi mondict Sr. de La Mothe pour ce qu’il luy escript duSr. Fallut.

Nous avons à présent M. de La Forest et attendons M. du Plessis-Bellay à demain. Il a esté àRoyan où il avoit baillé rendés-vous à M. de Pernan qui ne s’y est pas trouvé pour n’avoir pas esté ensa maison lorsque les lettres de mondict Sr. du Plessis y arrivèrent. Cela faict appréhender de ne rienconclure ainsi qu’il me mande à cause que sans entremeteur on ne peut guère advancer avec celuyauquel il a affaire.

MM. de l’assemblée ne laissèrent de courir la bague dimanche dernier en partie de quatre vieuxcavaliers contre quatre jeunes. M. le comte d’Orval99, chef des derniers, y eust une disgrâce à cause deson cheval qui tomba au milieu de la carrière, cela avec malheur, mais sans mal ny aultre accident quede desplaisir. Le procureur du Roy de Lodun avoit résolu de faire publier aujourd’huy cette injurieusedéclaration /3/. On taschera de la faire retarder jusques à vendresy. Le procureur du Roy d’Angers l’aenvoyé à Saumur avec l’arrest de commandemens aux gouverneurs de souffrir les Jésuites prescheraux villes de seureté, pour le mesme effort mais je croy que Monsieur du Plessis n’en a encoresouffert la publication.

Je n’ay rien d’ailleurs pour le présent sinon à continuer mes prières à Dieu pour vostre santé etprospérité affin qu’il vous rende bientost aux autres où vous estes grandement souhaittée et qu’il nerende si heureux que je puisse tousjours estre recognu de vous,

Madame pour,

Vostre très-humble, très-obéissant et très-fidelle serviteur et subjet. d’Iray

A Thouars, ce xie mars 16xx.

Archives nationales 1 AP 357/48

14 mars 1620 - Thouars

à Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Il ne s’est passé qu’un jour depuis le partement de nostre messager, durant iceluy Monseigneura faict sa première sortie et l’a employée à la chasse d’un cerf qu’il a pris et Madame la marquise deLa Moussaye100 a visité Madame la duchesse et Madamoiselle. Nous avons à présent MM. deLa Forest, du Plessis-Bellay et de La Berlaudière. Monsieur le Vidasme se faict attendre aujourd’huy.Ceux de l’assemblée qui avoient pris congé pour faire un tout en leurs maisons avec charge de seretrouver au 12e commencent à se rendre à Lodun où la déclaration fut publiée mercredy sans aulcuneopposition, ny mesme que l’on se soit mis en debvoir de l’empescher. Je croy qu’on l’eust peu avecmoins de bruict qu’a La Rochelle où elle avoit esté envoyée pour y estre publiée avec l’arrest portantpermission aux Jésuites d’y prescher, mais le peuple y a faict beau mesnage et s’en est pris au moineet au procureur du Roy et qu’il a pensé mes arriver en ce tumulte en son point de publication.

Vous aurés, Madame, des lettres de Monseigneur et d’autres qui vous diront plus departicularités de l’affaire de Royan que moy qui sçay seulement qu’elle est bien avancée. Nous

99 François de Béthune (1598-1678), comte d’Orval, fils de Sully et de sa seconde épouse Rachel de Cochefilet, était un desreprésentants du Haut Languedoc et de la Haute Guyenne à l’assemblée de Loudun.100 Catherine de Champagne de La Suze, épouse de Amaury II Gouyon, marquis de La Moussaye, l’un des représentants de laBretagne à l’assemblée de Loudun qui avait accompagné son mari.

Page 52: Années 1618-1623

52

n’avons encore rien ouy de Madame de La Rochepos ny de Monsieur de Rohannois. Vous sçaurés,Madame, comme la vérisfication et publication de la déclaration au Parlement est en termes plusrudes et en tout autres /2/ sens que ladite déclaration par laquelle le Roy vouloit qu’elle fust signiffiéeà MM. de l’assemblée pour se séparer trois sepmaines après la signiffication qu’on estimoit devoirestre différer pour donner plus de moyen et déplaisir aux depputés qui suivent le Roy de faireentendre leurs raisons et traitter avec plus de facilité, mais MM. de la Cour enjoignent que à larequeste et poursuitte du procureur général. Elle sera publiée au bailliage et séneschaussée du ressortet que le délay des trois sepmaines courra dès le jour de la publication à Lodun avec charge etcommandement aux substituts dudict procureur général d’en faire le rapport et asseurer la cour deladicte publication dedans huictaine ce temps de huict jours au lieu d’un mois qui est donnéd’ordinaire pour cela témoigne l’ardeur que l’on a de courir au mal, aussi bien que ceste explicationde faire courir le délay du jour de la publication sans attendre que scelon l’intention de Sa Majestéelle fut publiée. Vos bons et sages advis, Madame, sont maintenant aussi nécessaire à Monseigneurque jamais, car ceste précipitation de MM. de la Cour met tout le monde en cervelle et faict moinsespérer de bon succès de la négotiation des desputés, que craindre de la mauvaise volonté de ceuxauxquels ils ont principalement affaire.

Icy tout est en bonne santé grâces à Dieu et je le prie ardemment pour la vostre Madame affinqu’il vous la conserve parmi une telle diversité d’affaires publiques et particulières dont elle est agitéeet qu’il me rende si heureux que je puisse toute ma vie me conserver la qualité,

Madame, de

Vostre très-humble, très-obéissant et très-fidelleserviteur et subjet. d’Iray

A Thouars, le 14e mars 1620.

Archives nationales 1 AP 357/49

15 avril 1620 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je me suis rendu dès sabmedy donner de fort bonne heure auprès de Monseigneur et luy ayparticulièrement faict entendre ce que vous m’avés faict l’honneur de remettre en moy qui croyoispartir aujourd’huy pour me rendre à Paris sur la fin de la sepmaine courante ainsi que vous aviésmandé à mondict Seigneur. Sa résolution avoit tousjours esté telle jusques à présent aussi bien que lacréance de tous ceux de deçà et la mienne, mais lors que je pensois prendre mes dépesches il m’acommandé de demeurer près de luy pour les raisons qu’il m’a faict l’honneur de me dire qu’il vousescriroit, Madame, et qu’il me feroit sçavoir cy-après.

Je vous supplie très-humblement, Madame, de croire que je n’ay affection pour demeurer oupour aller sinon ou vos commandemens et ceux de Monseigneur m’appelleront et que j’estois aussiprest et disposé de me trouver à Paris dedans la fin de ceste sepmaine si Monseigneur me l’eustcommandé, que je fus pour me rendre en ce lieu lorsque j’en receus les commandemens de V. E. Enquelque part que je soye, Madame, je serviray tousjours sinon avec beaucoup d’utilité au moins avectoutes sortes d’affections de fidélité.

Lundy dernier Monseigneur fut à Loudun dire adieu au général et aux particuliers del’assemblée, et fit cela avec tant de grâce tant en l’action publique que aux complimens desparticuliers que rien ne s’y pouvoit adjouter. Je le vy Madame, et vous supplie très-humblement dedonner cest créance à mes yeux. Car certes rien ne se pouvoit mieux. Je luy ay faict entendre le soinget la peine que /2/ vous prenés pour ces affaires. Il tesmoigne en avoir un très grand ressentiment. Jecroy qu’il vous en asse[ure] Madame et qu’il n’a désir ni intention en […] d’un nouvel ordre dans sesaffaires que celluy que vous apporterés par vostre prudence. Je luy ay aussi faict connoistre les fraisqu’il vous avoit esté nécessaire de faire pour la poursuitte de ses affaires. Il fera, je m’asseure,Madame tout ce que vous aurés agréable en cela. Il m’a dit de vous l’escrire. Il vient d’avoir nouvelles

Page 53: Années 1618-1623

53

du Roy retourné à Fontainebleau ou à Paris. Je ne sçay encore qu’elle résolution cela-luy fera prendrequoy quelque fois je le voy très disposé d’effectuer vos conseils auxquelles il déffere entièrement.

L’affaire que M. du Plessis a req>>tié est maintenant fort divulguée en Xaintonge etAngoulmois. Il y a à mon advis de grandes raisons pour l’advancer et de la perte et que je ne die de la>>>> la laisser plus longtemps sans certitude. Je croy que Mme de Buillon a lettres de Monseigneurson mari pour >>>> la somme dont on a besoing et en accommoder Monseigneur qui n’a point encoreescript à M. le P. et doubte aussi bien que vous Madame s’il le doibt faire.

MM. du Plessis et de La Forest s’en sont allés. Celluy-cy en sa maison et l’autre en songouvernement. Monseigneur, Madame son épouse et Mademoiselle se portent bien grâces à Dieu. Ilsont esté fort aises d’apprendre toutes les particularités que vous m’avés commandé de leur dire. Jecroy que l’on vous escrira de Madame la Duchesse nouvelles qui vous plairont.

Monseigneur a receu response de M. de Monts qui v […] recevoir la moitié de ce qui luy estdeubt […] nant qu’on l’asseure de luy donner l’autre partie de […] un an prochain. Le procureur deTaillebourg a eu main [levée] /3-51/ de la saisie apposée sur vostre baronie de Didonne par Gouttemais quoy qu’on puisse dire il sera bien malaisé de sortir des mains de cet homme et de ses associéssans leur donner quelque chose pour les frais cy-devant faicts. C’est l’avis de vostre conseil deXaintonge, Madame, c’est pourquoy Monseigneur commande audict Sr. procureur de Taillebourgd’en sortir au meilleur marché qu’il pourra. Cela ne pourra au plus revenir qu’à lx livres.

Le Sr. du Tertre grand vendeur de Montfort est décédé depuis que je suis icy. Son fils est venupour estre préféré en la charge, mais trop tard, car j’appren que Monseigneur l’a promis à ungentilhomme nommé Fleuriaye101 pour la somme de iijM livres.

Je n’ay pas eu le loisir de guère apprendre autre chose des affaires depuis mon arrivée et aussique je me préparois de partir pour aller recevoir vos commandemens Madame et y obéir entièrementscelon mon possible, comme je feray tousjours lorsque j’en seray honoré affin que je me puisseconserver la qualité,

Madame, de

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidelleserviteur et subject. d’Iray

A Thouars, ce 15e apvril 1620.

Archives nationales 1 AP 357/50 et 51

15 avril 1620 - Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, Vous aurés appris la peine que j’eu à trouver des chevaux de poste etcomme je fus jusques à Pluviers sur mon hongre, cela n’empeschera pas que le vendredy je ne vinssecoucher à Tours avec l’assistance de Dieu. Pensés si le lendemain nous fusmes de bonne heure en celieu d’où je croyois partir demain matin et n’y avois plus rien a faire qu’à y recevoir mes dépesches.J’estois auprès de Monseigneur pour cela lorsqu’il m’a commandé de demeurer pour beaucoup deconsidérations. Je n’estois pas moins prest d’aller vers vous que lorsque j’y estois de venir icy, je n’ayaulcune acception de lieux pourveu que je soye si heureux que de servir par tout avec le gré de ceuxqui me commandent, comme sers avec affection. Pleust à Dieu que ce fust avec utilité. Vous sçavésles obligations que je vous ay & si je les sçay aussi, mais cela ne m’empeschera pas de vousimportuner encore.

Je vous supplie très affectueusement de faire tenir à Sedan avec soing et par voye seure àMonsieur Le Comte102, gouverneur dudit Sedan, la lettre cy-incluse affin que j’en puisse avoir

101 Il s’agit peut-être de Hardy de Vay, sieur de La Fleuriais, un gentilhomme huguenot de Treffieux, second fils de Claudede Vay, seigneur de La Rochefordière et de Suzanne Chauvin de La Muce-Ponthus. Il épousa en 1629 Jeanne Le Maistre,dame du Plessis, fille de Guillaume Le Maistre, seigneur de La Garelaye à Derval.

102Antoine de La Marche des Comtes, sieur de La Roche et de L’Eschelle, capitaine de 50 chevau-légers sous les ordres de

Henri de La Tour d’Auvergne, était depuis 1599 gouverneur de Sedan. Il exerça cette fonction jusqu’à sa mort au mois de

Page 54: Années 1618-1623

54

response encore une fois je vous supplie ayés en soing. Si Marot est près de vous avec mes chevaux etma valise, je vous supplie aussi de luy commander qu’il me vienne trouver et plustost à petitesjournées. Sinon ayés s’il vous plaist agréable d’envoyer un homme exprès à Angerville-la-Rivièreprès de Machecoul103 où Daulphin où il a esté malade affin que s’il est en estat de pouvoir monter àcheval jusques à Orléans et de là s’en venir par eau jusques à Saumur qu’il parte au plustost. Je croyqu’il aura assés d’argent, mais s’il en a faulte vous m’obligerés beaucoup de l’asssiter de ce dont ilaura nécessité.

J’ay laissé certains papiers au Sr. Briseau qui importent Madame Givrais avec des lettresaddressantes à M. de La Mazure. Je vous supplie de retirer le tout dudit Sr. Briseau (à qui je baise lesmains et à Madame sa femme) et le mettre ès mains de mondit Sr. de La Mazure à qui j’estois chargéde les délivrer. Tous vos amis de deçà se portent bien. Je vous supplie baiser les mains de ma part àMadame de Schelandre à Mlle de Madaillan, à M. de […] que j’oublie, beaucoup usé à vous escrire,mais je suis pressé comme un homme qui pensant prendre la botte est obligé d’escrire. Faictes moyresponse s’il vous plaist et me croyés autant que personne,

Monsieur,

Vostre très-humble, et très-obéissant serviteur.d’Iray

Thouars, ce 15e apvril 1620.

Si vous jugés que Marot puisse se mener, faire conduire icy la vaisselle de terre que j’ayachepté, je vous supplie de luy faire délivrer pour me l’ammener.

Archives nationales 1 AP 357/52

22 avril 1620 - Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, J’escri à Monsieur de La Mazure. J’ai peur qu’il ne soit plus à Paris.S’il est parti je vous supplie bien humblement d’ouvrir le petit pacquet que je luy envoye et de fairerendre les lettres scelon leur addresse.

Je m’oubliay de vous dire en vous quittant pour ce que je croyois retourner que Mlle de GrandeMaison m’avoir mis ès main une pistole pour délivrer à Mademoiselle de Madaillan (à laquelle jebaise très-humblement les mains) affin de luy achepter quelque petites choses. Je vous supplie de ladonner pour moy ou de prier M. Briseau qu’il luy délivre ce sera aultant à déduire sur ce que je kuy aydonné. Tous vos amis et parens de deçà se portent bien et moy je vous baise les mains qui suis,

Monsieur,

Vostre très-humble, serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce 22e apvril 1620.

Archives nationales 1 AP 357/53

14 juin 1620 - Taillebourgà Charlotte-Brabantine de Nassau

Cette lettre n’est pas du 14 juin 1620 mais du 14 juin 1621

Archives nationales 1 AP 357/54

septembre 1640 à Paris dans l’hôtel de Soissons « où il estoit logé par le commandement de Monseigneur le Comte ».E. HENRY, Notes biographiques sur les membres de l’Académie protestante et les pasteurs de l’Eglise réformée de Sedan,Sedan, 1896, p. 11-12.103 Angerville-La Rivière et Manchecourt (Loiret) au nord-est de Pithiviers.

Page 55: Années 1618-1623

55

30 juillet 1620 – Thouarsà Monsieur de Champdor

Monsieur, En celles qu’il vous a pleu m’escrire j’ay de nouvelles et certainesasseurances de la bonne volonté de Madame envers moy par le soing qu’il luy plaist avoir de mafemme104 et de l’estat de sa santé. Je recoi cela à tant d’honneur et d’obligation que je ne puis enexprimer mon ressentiment ny l’en remercier comme je doibs ce que je puis est de continuerardemment mes prières à Dieu par sa santé, et qu’il luy donne aultant de prsopérité et decontentemens que je recognois de lui devoir de services par tant de tesmoignages qu’elle me faictsentir de son affection.

Je suis bien marry que je n’aye de quoy luy escrire ne sçachant aulcunes nouvelles pour n’avoirsorti de ma maison depuis son partement de ce lieu, sinon ce matin que Dieu m’a faict recognoistrequelque petit amendement en ma maladie que j’ay veu à l’extrémité, mais maintenant j’espère plusque je ne crains par sa grâce.

Encore une fois, j’ay à vous dire que je reçoy extrême honneur et obligation ce soing deMadame. Je vous supplie très humblement l’asseurer que je n’auray rien plus à cœur que de lui rendrequelque agréable et très humble service ainsi que j’y suis obligé et pour vous. Asseurés-vous, s’il vousplaist, que je tiendray à grand bonheur et contentement si je puis trouver l’occasion de vous donnerdes preuves certaines que je suis de cœur et d’affection.

Monsieur,

Vostre très-humble et plus affectionné serviteur.

d’Iray

A Thouars, ce 30e juillet 1620.

Je vous supplie de tout mon cœur d’assurer Monsieur de La Mazure que je suis son très humbleserviteur et que je luy baise très-humblement les mains, comme je fay à tout ce monde de l’aun etl’autre sexe.

Archives nationales 1 AP 357/55

12 août 1620 – Les Aubiers105

à Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je suis très-asseuré que rien ne vous peut venir du plus agréable que ce qui vous rend certainede la bonne disposition de Monseigneur à quoy celle-cy servira s’il vous plaist. Il a pour le moinssoixante maistres avec luy qui à mon advis le serviroient de bon cœur s’il s’en présentoit occasion.Dieu veuille qu’il n’en ait point besoing.

Il ira aujourd’huy visiter Madame de Rohan qui envoya hier vers luy et luy vers elle. Celuy quivint de sa part avoit un commandement bien exprès de s’enquérir de l’estat de vostre santé.Mesdamoiselles ses filles sont avec elle, Monseigneur n’est esloigné que de deux petites lieues duParc où elle est. Elle escrivit à mondit Seigneur et demandoit d’apprendre des nouvelles. Il n’oublirarien de ce qu’il avoit de plus certain. Messieurs ses enfans ont rebroussé à Maillezais sur l’avis de laprise du Pont-de-Cé. Ils avoient advancé jusques à Champdenier et celuy qui apporta les lettres deMadame de Rohan nous voulut faire croire qu’ils avoient avec eux huict cens chevaux et seize censhommes de pied. Ils attendront la fin de tout cecy.

Monsieur de Raiz106 est à Mortagne. On nous dict qu’il a congédié tous les gens de guerre qu’ilavoit. Il s’excuse fort de ce qui court sur ce que Monsieur de Vendosme luy contesta le rang et le

104 Il s’agit de la première lettre où Jean Rogier fait état de sa femme, Jeanne David, ce qui fait présumer qu’il venait de semarier.105 Les Aubiers entre Thouars et Mauléon.106 Henri de Gondi (1590-1659), 2e duc de Retz, fils de Charles de Gondi, marquis de Belle-Isle et d’Antoinette d’Orléans-Longueville, petit-fils du maréchal et 1er duc de Retz Albert de Gondi (1522-1602) et époux de Jeanne de Scépeaux-Chemillé.

Page 56: Années 1618-1623

56

commandement. Peu de gens à mon advis prendront ce prétexte en payement, le rang de l’un et del’autre estant incogneu de peu de personnes. Ce sont pourtant les discours des siens qui se trouventbien empesché à lever le soupçon que chacun prend de leur maistre.

L’infanterie de Monseigneur crie à l’argent et demande monstres aultrement prétexte de sedesbander. J’estime qu’il seroit à désirer qu’elle fut retirée et que chacun fuste en sa maison, caroultre le temps qui nous faict espérer la paix /2/, elle apporte moins d’assistance et de support que depeine et incommodité en l’estat où est Monseigneur. Ce que je souhaitterois savoir que cela se fit avechonneur et seureté pour ceux qui l’ont voulu servir et assister, mais aussi de leur donner ce qu’ilsdemandent pour les faire subsister en corps. Je ne voy pas grand fruict de ceste subsistance et suistrompé si la plus part ne se retire mesme après avoir esté contentés. Ils doibvent aujourd’huy loger àSaint-Amand et Monsieur du Fresne à St-Mars107, l’un et l’autre ne sont qu’à une lieue d’icy. Je croyque M. du Tablier les joindra aujourd’huy. Comme Monseigneur vouloit monter à cheval le Sr. Bailluy a rendu vos lettres. Je ne croy pas Madame qu’il y puisse faire response.

Nous n’avons rien, Madame, qui mérite de vous estre escript. Je prie Dieu pour vostreprospérité et santé et vous supplier très humblement de croire que je suis et seray toute ma vie,

Madame,

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

Aux Haubiers, ce 12e aoust 1620.

Monseigneur doibt demain coucher à St-Georges.

Archives nationales 1 AP 357/56

27 août 1620 - Toursà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Monseigneur vit Monsieur du Plessis en passant par Saumur et l’entretint environ deux heuresqui furent tout le temps qu’il demeura au chasteau et tousjours auprès de son lict où il estoit depuisquelques jours à cause d’un rhume, cela joinct m’empescha de luy pouvoir parler. Il ne sçait à ce quej’enten quel jugement faire de tout cecy, voyant les régimens de ceux de la Religion licentié (et entreceux-là, celluy de M. de Villarnoul) et d’autres qui subsistent dont les commissions estoient >>>>>postérieures. On ne croit point en ce païs là que le Roy passe Poictiers. S’il en part on appréhende queson partement ne face du mal quand ce ne seroit que d’alarmer le Béarn et les provinces voisines. Onenvoya dire au Père Bérule passant par là les grandes raisons qu’on avoit de doubter de cet armement.Il fit l’innocent et protesta d’en ignorer la cause, aultre que pour faire venir MM. du Mayne etd’Espernon à l’obéissance, mais qu’il s’estonnoit de la résolution de ne partir de Poictiers changerdepuis qu’il avoit quitté Sa Majesté.

Je croy Madame que Monseigneur vous fait entendre leur conférence. Il arriva icy au jour qu’ilavoit dict. Il vous escript les particularités. Il n’a point veu le Roy qui partit hier matin pour allerchasser à Amboise. On attend Monseigneur le Prince aujourd’huy et croit-on le partement de Poictierspour demain. La Reyne ira aussi et la Reyne mère s’y doibt trouver. Monsieur de Mayne a envoyéassurer le Roy de son service /2/ et obéissance avec très-humble supplication de luy donner lesmoyens de licentier ses troupes. A cela les uns disent qu’il a commandement de desarmer

J’ay veu ce matin, Madame, suivant vos commandemens Monsieur de Rousselaï qui vous baisetrès-humblement les mains disant prendre à très grand honneur d’avoir receu celle que vous luy avésescript, du sujet de laquelle il n’estoit neulement en doubte l’ayant appris de vostre bouche et de cellede Monseigneur, oultre que d’ailleurs il recognoissoit que l’avantage de Monseigneur alloit à attendreles asseurances et commandemens que le Roy luy avoit depuis faict par son courrier, que toutes-foispuisque vous l’aviés agréable il voiroit la date de l’acte qu’il a parcouru tout du long. Il promet de

107 Saint-Amand-sur-Sèvre et Saint-Mars-la-Réorthe au sud-ouest de Mauléon.

Page 57: Années 1618-1623

57

vous faire response ce soir que je retireray s’il y a moyen de le faire, et vous le feray tenir par lespremiers.

Monseigneur est en très bonne disposition grâces à Dieu que je prie pour la vostre et qu’il medonne les moyens de mériter par mes services la qualité,

Madame de,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidelleserviteur. d’Iray

A Tours, le 27e aoust 1620.

Ainsi que je veux fermer ma lettre, on me veult asseurer que le Roy ne retourne que demain etque son partement est retardé jusques à sabmedy.

Archives nationales 1 AP 357/57

Mardi 31 août 1620 - Poitiersà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Vous aurés avec celle-cy la response de Monsieur de Rousselay à celle que vous luy avésescript et par M. de Lessart l’arrivée du Roy en ce lieu de hier, et celle de la Royne qui seraaujourd’huy. Monseigneur y arrive présentement avec Monseigneur le Prince qui tesmoigna en sonpassage à Tours désirer que mondit Seigneur vint icy avec luy. Je croy Madame que cela ne peut estremauvais et me semble cognoistre que mondit Seigneur le Prince s’en ressent obligé.

Tout le train a passé à l’Isle-Bouchard où Monseigneur croyoit devoir coucher hier. Il enrecevra sans doubte quelque incommodité, mais elle ne sera pas longue, car j’estime que tout sera icyà ce soir. Monsieur de Vendosme n’a point suivi le Roy depuis Tours où il demeura un jour entierpour attendre Monseigneur le Prince sans lequel à ce qu’on dict on n’a rien voulu délibérer, moinsrésoudre. Il a esté et Monseigneur avec luy descendre au logis au Roy où il y a eu conseil aussi tost,mais Monseigneur après avoir eu faict la révérence au Roy (qui luy a faict très bonne chère et laentretenu) il est venu se sécher et refraischir en la maison de M. des Anges procureur où il est logé. Ilest bien malaisé de rien escrire de certain tant les conseils sont secrets. Icy se prendra la délibérationpour le Béarn. Aulcuns croyent Monsieur du Mayne avoir désarmé, cest autre le contraire. Il sembletoutesfois que le dessein pour la Guyenne se continue.

Il n’y a rien icy de la part de la /2/ Royne mère. On doubte si elle viendra. On parle que M. leGrand doibt faire un voyage vers Monsieur d’Espernon, mais comme personne privée et non commeenvoyé du Roy. Monseigneur le Prince nous faict bien espérer, il a les moyens de nous procurer bienet avantage ; Si vous voulés voir la Royne, Madame, l’occasion s’en présente commode, mais il faultsa haster d’aultant que si le Roy passe oultre, elle ne fera icy que fort peu de séjour. D’ailleurs vostrevoyage à mon advis ne seroit pas infructueux.

Je croy que Monseigneur vous faict sçavoir comme il est désiré et par qui. Celluy de Madamevostre belle-fille est souhaitté aussi. Madame la Princesse l’a ainsi dict à mondit Seigneur le peu detemps qu’il y a que nous sommes arrivés, de loisir que j’ay à cause du partement de Monsieur deLessart m’empeschent de rien adjouster sinon mes ardentes prières à Dieu pour vostre santé etprospérité et qu’il me face la grâce d’estre tousjours recognu de vous,

Madame, pour

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Poictiers, ce dernier jour d’Aoust 1620.

Archives nationales 1 AP 357/58

Page 58: Années 1618-1623

58

1621 les La Trémoille se trouvèrent au milieu de la tourmente. Pendant les trois premiers

mois de l’année Henri de La Trémoille, pressé par sa mère, conjointement avec Duplessis-Mornay etHenri de Rohan, tenta de persuader l’Assemblée de La Rochelle de se dissoudre pour obéir à lavolonté du Roi tant que celui-ci conservait une attitude conciliante108.

L’assemblée de La Rochelle ayant refusé de se dissoudre et une ultime tentative de médiation dumaréchal de Lesdiguières ayant échoué, Louis XIII décida le 18 avril de marcher à la tête de sonarmée contre les protestants qui refusaient de reconnaître son autorité. Le 1er mai, il était à Orléans,le 3 à Blois, le 13 à Saumur où il démit Duplessis-Mornay de son gouvernement.

Le 10 mai, l’assemblée de La Rochelle organisa la défense en divisant la France en huit cerclessous le commandement général du duc de Bouillon. Chaque cercle devait être commandé par desGrands du parti protestant : La Force, Rohan, Soubise et La Trémoille.

Le duc de Bouillon, rendu impotent par la goutte et qui considérait que le sort du protestantismene se jouait pas en France mais en Allemagne, refusa ce commandement et assura le souverain de safidélité. Henri de La Trémoille, dûment chapitré par son oncle et sa mère, se voulait “ bonfrançois ”109. Mais alors que sa mère s’était rendue à Saumur au devant de Louis XIII pour l’assurerde sa fidélité et l’accueillit à Thouars le 17 mai110, il était resté à Taillebourg et se fit quelque peutirer l’oreille avant de faire de même. Le souverain par trois lettres adressées les 13 mai 1621 deSaumur, 21 mai de Parthenay et 27 mai de Niort l’invita à le rejoindre. Pour sa part, Lesdiguièreslui écrivit trois lettres le pressant de satisfaire à la volonté du Roi. A cela s’ajoutaient les pressionsde sa mère, de sa femme et de certains de ses agents.

Le duc de La Trémoille céda à ce courant pacifique et rejoignit l’armée royale qui depuis le 17mai assiégeait la ville de Saint-Jean-d’Angély tenue par Soubise. Pendant ce temps en Bretagne, le28 mai, le duc de Vendôme, gouverneur de la province s’emparait de la ville et du château de Vitré eten démettait le capitaine de la garnison Jean Nouail, sieur de Launay.

Henri de La Trémoille avec le concours du maréchal de Lesdiguières pendant les mois de juinet juin chercha à convaincre l’assemblée de La Rochelle de se dissoudre et d’obtenir son pardon,mais ce fut peine perdue111. L’on peut présumer que c’est avec soulagement qu’après la capitulationle 24 juin de Saint-Jean d’Angély, que Henri de La Trémoille et sa mère virent l’armée royaleprendre le chemin de Montauban qu’elle investit le 18 août.

Louis XIII ayant refusé de restituer Vitré à Henri de La Trémoille, le duc de Bouillon craignantque ce refus incitât son neveu à se joindre à Henri de Rohan, l’invita à le rejoindre à Sedan où sonépouse, dépressive s’y était retirée dans le courant du mois d’août. Henri de La Trémoille arriva le22 octobre112.

31 janvier 1621 - Parisà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

J’ay receu par le Sr. Bressuire celle que vous m’avés faict l’honneur de m’escrire et les lettreset mémoire de l’Assemblée pour Monseigneur le duc de Buillon vers lequel vous me commendésd’aller, mais vous ne me prescrivés point si ie doibt estre ou avant avoir receu mes responses ou après.

108 James S. VALONE, Huguenot politics : 1601-1622, The Edwin Mellen Press, Lewiston, 1994, p. 160.109 Daniel Ligou dans son essai sur le Protestantisme en France de 1598 à 1715, SEDES, 1968, p. 75, écrit que Henri deLa Trémoille “ n’avait aucune envie de se battre ”. Les archives des La Trémoille font fait apparaître qu’en fait c’estl’ensemble de sa maison sous l’impulsion de sa mère qui se lia pour l’empêcher de se joindre à Monsieur de Rohan et auxRochelais. A cela s’ajoutera le Roi et la maréchal de Lesdiguières.110 Louis XIII, venant de Saumur, passa le nuit du 17 au 18 mai au château de Thouars puis partit pour Parthenay. Journal deJean Héroard, tome II, p. 2757.111 Léonce ANQUEZ, Histoire des assemblées politiques des réformés de France, op. cit., p. 354-359.112 Le 28 octobre 1621, Louis XIII par une lettre, écrite du camp de Montauban, donnait son assentiment à ce voyage. LouisCharles de LA TREMOILLE, Chartrier de Thouars, op. cit., p. 145-146.

Page 59: Années 1618-1623

59

Le temps que M. Justel a esté (à sçavoir un mois) à retirer la sienne quelque soing et industrie qu’il yait apporté m’a faict appréhender que remettrai jusques à avoir retiré la mienne, les affaires n’ayenttout à faict changé et ainsi que sans aulcun doubte lesdictes lettres et mémoires ne parvinssent àmondict Seigneur de Buillon lorsqu’il n’en seroit plus temps ou pour le moins si tard que le préjudicey seroit très grand tant pour luy que pour ceux qui luy écrivent. D’ailleurs partis de ce lieu et n’avoirpoint mes responces et mesmes qu’on ne me vist pas en poursuivre l’expédition seroit donner de ladesfiance icy et faire mal penser des bonnes intentions de l’entreveüe de Lodun, estant très vray quedeux heures après que je fus icy on sçavoit et que j’y estois et ce que j’y estois venu faire. C’estpourquoy, Monseigneur, de l’avis d’un de vos asseurés serviteur et amis, j’ay estimé plus expédient etpour le public et pour vous et pour mondit seigneur de Buillon de luy envoyer par celuy qui me lesapporte les dites lettres et mémoires auquel quand bien mesme je l’eusse rendu, je n’eusse peu rienadjouster estant bien ample et signé et ne laissant aulcune créance au porteur. Il faict mention decertaines coppies de lettres et mémoires que vous ne m’avés point envoyés, qui toutesfois eussent estétrès nécessaire.

Ce que j’eusse peu faire à Sedan eust esté de recevoir les avis de Monseigneur de Buillon et lesrapporter à vous sur les choses que vous me commandés de luy exposer lesquelles il sçait dèsja lesayant communiquées à Madame sa femme de point en point et supplié de vostre part monseigneur quenous puissions avoir ses bons conseils sur icelles ainsi que je vous ay escript ou à Madame vostremère par vostre lacquais, ce qu’elle m’a promis et à l’Assemblée sur les choses dont ils l’enquièrent,et pour ce faire /2/ je le supplie très humblement de m’envoyer une bonne et ample instruction de ceque j’auray à parler ou à présenter jusques où à qui et comme quoy, affin que je m’y conformeentièrement soit en la faisant vois après l’avoir receüe ou en la supprimant après m’en estre renducapable. Ou bien s’il est encore malade et qu’il ne puisse escrire avoir agréable de m’envoyerquelqu’un de créance informé de ses intentions qui me les fait entendre pour les mesnager ainsi qu’illuy plairay ou bien me mandoit si après avoir receu mes responces j’yray le trouver, mais je ne croypas qu’il face choix du dernier pour ce que ce temps est incertain que ce seroit trop attendre unepersonne qui n’a rien à dire ny pour le public ny pour le particulier, estant informé pleinement decelluy-cy par Madame sa femme et ce qui en a resté que vous me commandés par les vostre en cellesque je luy vien d’escrire de l’autre par le mémoire qui luy est envoyé. Vous me commandés d’ailleurs,Monseigneur, de retirer resp>> partir sans l’avoir seroit manquer à vos commandemens à faire l’un etl’autre ensemble il ne se peut faire le dernier eust esté très mal interprété icy ou on est en desfiance detout et où on ne donne point de chevaux, ny à la poste ny au relais sans certificat d’ailleurs.

Le Roy est absent et a quasi toute la Cour avec luy à Lezigni d’où les uns croient qu’il passeraoultre, vers Fontainebleau ou ailleurs, et les autres qu’il retournera demain ou mardy. Et les affairessont sur une estrange pente. M. de Favas a dépesché à La Rochelle sur sa response. Le Roy premierque partir assisté de Monseigneur le Prince passa au logis de M. de Schomberg, où de sa main il rayatoutes les pensions sans exceptions, ou pour les restablir ou pour employer les deniers ailleurs.

Vos lettres au Roy ont, Monseigneur, esté très bien receües, mais je ne sçay quel goustMonseigneur le Prince aura trouvé aux siennes. Il ne s’est rien passé depuis hier que je ne vous escrivipar Espérance. Je n’espargneray rien de ce peu qui est à moy pour vous rendre le très humble et fidèleservice que je doibs.

C’est chose estrange que M. de Rohan qui avoit promis d’estre si diligent n’ait encore faictsçavoir icy aulcune chose sur vos résolutions communes. Je prie Dieu, Monseigneur, qu’il vousmaintienne et conserve en ce temps calamiteux que plusieurs appré /3/hendent avec raison, mais qu’ilveuille que je puisse bien augurer il me semble que la response faicte en termes si graves à M. Favasqui donne naissance à de nouvelles craintes aux coeurs de plusieurs gens de bien, n’est pas si rudequ’on la crie car nous demandons l’observation des Edicts et l’exécution de choses promises. Le Roynous le promet si nous nous séparons. Est-il possible que s’il ne tient qu’aux formes. Dieu pourempescher la désolation de son Eglise n’ouvrira point un moyen pour recommencer la seureté deschoses qu’on nous promettra. Mon opinion est qu’on veult attendre M. Desdiguières et le rendreentremetteur. C’est tout pour ceste fois après vous avoir très humblement suplié de croire que je suiset seray tousjours comme j’y suis obligé,

Page 60: Années 1618-1623

60

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-fidelle et très-obéissantserviteur. d’Iray

A Paris, ce 31e janvier 1621.

Archives nationales 1 AP 357/59

11 mai 1621 – Thouarsà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Le soing de Mesdames a esté tel que vous estes à présent informé pleinement de l’estat deschoses de deçà. Les nouvelles, que trois valets de pied despeschés sur les mineurs vous ont portées,vous auront servi de nouvelles raisons pour demeurer dans vos résolutions louables. Car oultre lesconsidérations de l’obéissance deüe au souverain, sa puissance contre la foiblesse de ceulx qui seveulent rendre exécuteurs des résolutions de l’assemblée, sans attendre à qui on en veult, si au publicou simplement pour estre obéi, les avis que vous avez donnés et auxquels vous avez persisté,l’exemple des plus capables qui ne changent point, et l’impuissance des plus eschauffés aucommencement, auxquels à présent les rames tombent des mains et qui protestent (comme on nousdit) tout à fait d’obéissance, une particulière considération, vous peut selon les avis de Mesdames etde vos serviteurs de deçà, assez faire cognoistre qu’à présent vous ne pouviez varier sans rendrevostre condition et des vostres pire que de tous ceux qui ne sont pas tenus dans les bornes ou de leurspromesses ou de l’obéissance, c’est, Monseigneur, la présence du Roy qui est ou sera dans peud’heures à Saumur et dans peu de jours chez vous, s’il tient la route de Niort à Fontenay. Son avantguarde a la face tournée de deçà estant logée au pont St-Just. Cela, je m’asseure, Monseigneur, vousdoibt faire cognoistre de quelle importance est vostre fermeté et persévérance, sans en estre diverti paraulcune considération.

Je ne doubte point que si vous eussiez creu le Roi si proche, vous eussiez donné advis à /2/M. de Diguières et à M. du Plessis de vos peines à La Rochelle et exortations à l’Assemblée, du refusque vous avez fait des commissions et de vostre résolution de vous trouvez à Pons pour rendre laprovince où vous estes, capable de vos raisons, affin de faire encore un effort vers l’Assemblée, maisMadame vostre mère a suppléeé et despesché M. de l’Essart avec un mémoire dont vous envoyecoppie. Par la vous verrés, Monseigneur, comme elle s’oblige de leur envoyer de vos lettres après latenue du conseil de Pons par lesquelles vous leur ferés entendre ce qui s’y sera passé. Si vous envoyésquelques blancs à Mesdames elles les feront remplir scelon les occasions.

Lorsque vous recevrez la présente, vous serez informé des personnes qualifiées de la provincequi se doibvent trouver à Pons et des sentimens de la plus part. Il semble de deçà que si vous lestrouviez conformes à vos intentions, et que vous aiez subject d’espérer que la résolution qui s’yprendra responde à vostre désir, il est bien à propos, Monseigneur, d’en faire le voyage affin que toutle monde voye que vous n’auriez rien obmis de ce que vous avez creu pouvoir servir au service duRoy et utilité de nos Eglises, et en retiriés l’avantage d’estre recognu fidèle en vos promesses etconstant en vos résolutions113. Si aussi comme il est à craindre on a faict des brigues au contraire pourporter en continuant toutes choses et en toutes les provinces a des extrémités blasmables et ainsi vousattirer en une compagnie de personnes préoccupées d’où vous vous auriés de la peine à vous retireravec gré sans vous laisser saisir de leur créance, on seroit bien d’avis que le mieux seroit de vous enexcuser par quelque occasion et prétexte comme de maladie feinte ou autre qui vous puisse fairedemeurer en l’estat où vous estes jusques à ce que le masque soit levé et l’intention de >>>>> dont ilvous apparoistra /3/ sans doubte un effort à Saumur, place de telle considération que difficilement lapourra on laisser sans changement ou nouvaulté si le dessein est général, vous vous souviendrés s’ilvous plaist si vous allés au conseil à Pons et que vous y trouviés des eschauffés et qui vous pressent

113 La première partie de cette lettre de Jean Rogier, sieur d’Iray, du 11 mai 1621 à Henri de La Trémoille jusqu’à ce mot aété en partie publiée par A. de BARTHELEMY, “ Documents relatifs à l’assemblée de La Rochelle ”, Annales Historiquesdu Poitou, tome VIII, 1879, p. 262-263.

Page 61: Années 1618-1623

61

de la façon dont vous avés usé envers M. de Chastillon. Lavalade qui ne s’en retournera pasmescontent pour ne rompre avec personne jusques à ce que vous voyrés plus clair.

Je n’ay rien faict ny veu depuis mon arrivée que ce que dessus que j’ay eu commandement devous escrire. Je feray tousjours ce qui sera en moy pour vous rendre le très-humble et très-fidèleservice que je doibs,

Monseigneur, comme

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Thouars, ce xje may 1621.

Archives nationales 1 AP 357/63

19 mai 1621 - Parthenayà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay creu du bien de vostre service et de Monseigneur de voir en passant Monsieur le duc deDesdiguière pour l’avertir de ce que vous aviés appris depuis le partement du Roy touchant Vitré etpour sçavoir ce qui se passoit affin de le vous faire entendre.

J’arrivay donc hier au soir en ce lieu et y vis mondit Sr. Desdiguière qui continue tousjours àvous donner des asseurances de son soing avec promesse s’il est employé par vous et par monditSeigneur de contribuer ce qui sera en luy pour vous faire recevoir contentement. Il s’estonne dudiscours que vous fit ce bon seigneur. Il croit que c’est un trait de son humeur ou pour avoir mandéceste commission, ou pour s’avancer jusques à des choses sans charge. Il croit plustost le donner quel’autre mais qu’il en apprendra la vérité et taschera d’y apporter tout l’ordre qu’il luy sera possible.Cepandant, il demeure tousjours dans l’avis qu’il vous a donné Madame et à moy pour monditSeigneur croyant qu’il est nécessaire de faire diligence.

Le Sr. Arnaud est de retour de St-Jehan. Il a apporté deux lettres l’une que M. de Rohan laissapour Monsieur le Connestable avant son partement et l’autre de M. de Soubise par laquelle il faictentendre les sentimens de M. son frère. En son absence, l’un et l’autre ne parlent point de venir, maisau contraire sont fermes et tesmoignent résolution, la dernière beaucoup davantage. Ledit Sr. Arnaudrapporte que dedans St-Jehan il y a deux mil hommes de pied et plus de quatre cens vins chevaux.Cela fera haster le Roy qui est résolu d’y aller par le plus court chemin. Sa Majesté ne part pasaujourd’huy ny peut estre demain, mais elle a envoyé l’ordre à Monsieur d’Auriac qui n’est qu’àdemie lieüe de St-Jehan.

Monsieur Desdiguières n’a appris qu’icy le changement faict de M. d’Armaignac114. Il en afaict un grand bruict et en a parlé fort hault au Roy et à M. le Connestable qui l’a asseuré que tout sepasseroit à son contentement et à plus près par sa volonté. Ledit Sr. d’Armagnac a aussi tost bienparlé au Roy luy disant qu’il s’estonne comme Sa Majesté le souffre coucher dans sa chambre et à sespieds puisqu’elle ne se fie pas en luy de la guarde d’une place qu’il a acceptée par soncommandement, en laquelle il a mis tout son bien et qu’il se trouve réduit à l’extrémité. On luy arespondu que c’estoit pour peu de temps et qu’il seroit restabli. Monseigneur Desdiguières m’a donnéune lettre pour mondit Sr. d’Auriac d’aultant que je doibs passer au milieu de toutes les trouppes.Voyla Madame ce que j’ay appris icy. Je pars pour continuer mon voyage. Dieu veuille qu’il puisseestre utile à vostre contentement et au service de Monseigneur et toute sa maison. Je ne désire rien siardemment et par quelques actions faire voir que je suis,

Madame,

Vostre très-humble, très- obéissant et très-fidèle serviteur.

d’Iray

114 Jean d’Armagnac († 21 avril 1635), seigneur de La Mothe-du-Nouâtre, premier valet de chambre du Roi, était gouverneurde Loudun depuis 1617 et bailli du Loudunais depuis 1620.

Page 62: Années 1618-1623

62

Parthenay, ce 19e may au matin.

Archives nationales 1 AP 357/60

21 mai 1621 – Ponsà Charlotte-BrabantinDieu e de Nassau

Madame,

Je ne doubte point que les lettres et discours de M. de La Grange ne vous ayent mis en peine. Ilsm’y mirent aussi et me firent faire la meilleure diligence que je pus. Je suis icy d’hier à cinq heures oùj’ay trouvé Monseigneur en fort bonne disposition. Il est à présent assisté d’un assés bon nombre denoblesse, mais dont la plus part prend congé pour aller en leurs maisons. Vous verrés, Madame, par lacoppie de la lettre que Monseigneur escript à M. Desdiguières l’estat du lieu où nous sommes ; quin’est pas mauvais grâces à Dieu et le trouve tel à présent que nous pourons encore cheminer en nosvoyes. La lettre est longue et raisonnée affin qu’on puisse tirer asseurance par escript et la créance estpour une chose que vous pouvés penser à sçavoir pour 82771 552 961, 81 3795 768, 32610, 81576241, 81, 82, 6755 854,1153110102910 81 71 51106515 19 591 81 717 326 7797.

Monsieur de L’Escure est chargé de vous escrire la response qu’il vous aura. Il fera ce voyageaussi bien et mieux que moy. Pour ce que peut-estre on se fust contenté de me donner des paroles,mais il luy faudra un escript. Madame le temps est si cher que je ne croy pas devoir retarder leditSr. de Lescure aussi que je n’ay rien a adjouster sinon que je 105731 666 591 10517 45 29 81 376 481771. C’est pourquoy nous nous sommes hastés 817 65 651.

Je me suis servi du chiffre de Madame vostre belle-fille. Je vous supplie très humblement,Madame, qu’elle apprenne par celle-cy ce que je sçay. Je travailleray tousjours avec affection etconscience 9757 91 773317 pas si 1762 253317 que 2615. Dieu mercy et aussi que plus nous irons enavant plus nous recognoistrons que 977 8133252. Je prie Dieu, Madame, qu’il vous tienne en saguarde et me face la grâce d’estre tousjours recognu de vous,

Madame,

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Pons, le 21e may 1621.

J’appréhende grandement que vous n’ayés envoyé à la Cour 817 81 10 10 517 que M. deLa Grange 175102.

Archives nationales 1 AP 357/61

28 mai 1621 - Ponsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

M. d’Auvilliers115 estoit parti et avoit advancé quelques lieües quand il a faict rencontre de M.de L’Escure116 retournant de la Cour portant des lettres que j’ay coppiées en haste pour vous en faireentendre le contenu. Elles vous diront mieux que moy les bonnes paroles et les promesses dont ellesnous veulent faire espérer quelque agréable succès. Enfin Monseigneur se résoult de partir demainpour aller à Taillebourg, de là Chisé ou en autre lieu que le Roy sera. Dieu nous y conduise.

Je vous supplie très humblement Madame d’avoir agréable que je vous die que jamais je ne mesuis trouvé en pareille peine, hier on me croyoit et publioit pensionnaire du Roy, aujourd’huy du Roy

115 Pierre Frétard, écuyer, sieur de Auvilliers ou de Haut-Villiers, un gentilhomme du Mirabelais. Il épousa le 18 mars 1631au château de Terchant Renée Lemoyne d’une famille bourgeoise huguenote de Vitré. Sa jeune épouse décédamalheureusement le 9 novembre suivant. Le Sieur d’Auvillier testa le 16 novembre 1644 au château de Thouars. Il déclaraêtre “ résolu de parachever le reste de la vie ” que Dieu lui donnera “ en la profession de la vérité & de la religion où j’aytoujours vescu, que les édits du Roy nous enjoignent de nommer prétendue resformée ”. Sa correspondance est conservée à lacôte 1 AP 642.116 Jean de Saulières, alias de Solier, écuyer, seigneur de Lescure.

Page 63: Années 1618-1623

63

et de Monsieur le Connestable. Si nous arrestions encore quelque jours icy, je le seroy sans doubte del’Espagnol et du Pape à leur dire. Mais Dieu m’est témoing de mes intentions et je me persuade quevous me serés, Madame, un bon guarent de mes procédures. Monseigneur en recognoist l’intégrité.

Je n’ose importuner Madame vostre belle-fille d’une seconde lettre à cause de sonindisposition. Dieu luy rende son ancienne santé, vous conserve la vostre et me doint d’estre tousjoursrecognu de vous,

Madame pour,

Vostre très-humble, très-fidelle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Pons, le 28e may à minuit 1621.

Archives nationales 1 AP 357/62

12 juin 1621 - Taillebourgà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Il y a trois jours que M. de Pontaubré croyoit partir et moy je l’estimois avec luy, mais lacommission pour Vitré n’a esté expédiée que depuis, ledit Sr. vous dira Madame les particularités dela despesche. Je vous escrirois par luy les nouvelles d’alors. Depuis nous avons eu MM. deLa Bourdillière et de Champvernon117 qui n’ont rapporté autre fruict de leur voyage, que d’avoirconservé leurs personnes ou de mort ou de prison. Dieu m’a grandement assisté de n’avoir pas esté dela partie, car sans doubte on m’y eust assassiné et tous ceux qui m’eussent voulu guarentir et si lemaire mesme s’y fust opposé il eust couru mesme fortune. Le Sr. de Loubrie de Béarn m’a presté cettecharité. Il estoit à Pons lorsque j’y arrivay et publie que plus qu’aulcun autre je suis cause queMonseigneur n’ait accepté les commissions.

Dieu et vous me serés tesmoins, Madame, que mes sentimens n’ont esté que tendans au bienpublic, à celuy de Monseigneur, à la conservation de La Rochelle et à la seureté de l’assemblée et àprésent de ces deux je n’ay pour récompense que des calomnies, mais encore trouveray je grande marétribution si le service de Dieu demeurant en son entier le public puisse jouir paisiblement de laliberté de l’exercice et que Monseigneur y rencontre seureté, honneur et contentement. Leur calomniepasse mesme si avant qu’ils disent que vous avés commandé au Sr. de Jaulnay de laisser entrer M. deVendosme à Vitré118. M. de La Bourdillière a laissé leurs responses à M. le mareschal Des Diguièresqui l’a ainsi désiré aultrement je …/2/, je vous en eusse envoié coppie. Clidaman119 et Bacchus se sontveus et salués, mais sans se parle. On bat tousjours St-Jehan de grande furie. On despesche encoreaujourd’huy M. de St-Angel à M. de Rohan120, mais j’ay peur que son voyage soit trop long pour St-Jehan. Je pense recognoistre de plus en plus qu’icy 79 91 615 621 959 31419 81 775061 19 67971552 910 825610756101 85 574.

Lorsque je me suis voulu escrier sur la despesche de Vitré on m’a asseuré avec serment queMonseigneur en auroit tout contentement et qu’il en estoit demeuré d’accord, mais s’il l’a faict c’est

117 Laurent Chapeau, sieur de La Bourdelière, le gouverneur de Thouars et Guillaume Rivet, sieur de Champvernon, pasteurde Taillebourg, frère d’André Rivet avait été envoyé à La Rochelle par Henri de La Trémoille pour >>>>>>>>>>>118 César de Vendôme lorsqu’il avait saisi Vitré le 28 mai 1621 sur l’ordre du Roi, avait démis de ses fonctions le capitainede la garnison du château Jean Nouail, sieur du Jaunay, un des plus fidèles partisans des La Trémoille à Vitré. Jean Nouailcomptait de nombreux adversaires politiques à Vitré et notamment le vicomte de Terchant et ne put jamais être rétabli dansson commandement. Il mourut le 22 janvier 1628 à Vitré.119 Clidaman est un personnage de l’Astrée d’Honoré d’Urfé. Fils d’Amasis, la reine du Forez et sœur de la nympheGalathée, il mourut pour estre resté fidèle au tyrannique roi Childéric. Rappelons que L’Astré met en scène un monde oùrègne la justice, la concorde et la foi religieuse dans une société immobile de bergers et de bergères dirigée par une femme aupouvoir incontesté et incontestable. Jean-Marie CONSTANT, La folle liberté des baroques (1600-1661), Perrin, 2007, p.151.120 Le baron de Saint-Angel porta à Henri de Rohan une lettre de Luynes datée du 11 juin 1621. Georges SERR, Henri deRohan. Son rôle dans le parti protestant, Tome II, 1617-1622, Société de l’Histoire du Protestantisme Français, Paris, 1975,p. 599.

Page 64: Années 1618-1623

64

sans doubte qu’il 82 32885 110 9568 257610 211567 que 82 51778510679 19 17107610 15671. Ilsasseurent qu’ils donneront de l’argent pour 81 62979 110 951 Clidaman 19 1710 8131551 8266758.

Monsieur de St-Angel assure que Monsieur de Rohan désire que l’assemblée se sépare etqu’après Sa Majesté ait agréable de donner contentement à nos Eglises que si elle ne le faict82 515810 24429879915. S’il tient ce langage 61 710 9568 92 958817 375617 25774 861079 951 854 110 M. de 82 375613 97910 951 105767 6197 373317 81 1618 110952519101 6215252 ;Hier 79817 6565610 26976 25 574.

A la Cour on m’a asseuré et de bonne part que le Béarn a révoqué et désavoué ses députés quela basse Guyenne fera le mesme au premier jour. On nous apporte ce matin pour nouvelle fascheuseles uns que M. de Créqui fut tué hier au soir, les autres qu’il n’est que blessé. M. de Pontaubré quipasse par l’armée et apprendra certaines nouvelles. J’y estois hier à neuf heures du soir et on n’enparloit point.

Je fis hier une proposition nouvelle à sçavoir que puis que l’Assemblée en est là, que SaMajesté tesmoigneroit une grande bonté et justice si elle avoit agréable de donner aux personnesqualifiées de la Religion ce qu’elle ne veult concéder à l’Assemblée, moyennant que ceux làs’obligeassent de faire séparer l’Assemblée et obéir le Roy, ainsi il semble que Sa Majesté ytrouveroit contentement /3/ pource qu’elle seroit asseurée d’obéissance, et que l’Assemblée yrencontreroit satisfaction, mais je ne sçay encore comme on prendra cela. On nous dict à M. deLa Bourdillière et à moy que demain on nous envoyeroit quérir. Je ne sçay pourquoy M. de Jarnac121

va faire un effort vers La Rochelle 79 82 817 691 282 6755 il ne porte que ce que MM. de LaBourdillière et de Champvernon avoient porté. Sans doubte il s’en reviendra aussi peu édifié.

J’escrivi dernièrement, Madame, à Madame vostre belle-fille. J’ay peur que mes lettres luyayent ayent esté importunes, mais je la croyois en santé. Dieu luy redonne et vous conserve la vostreet me face trouver quelque moyen où je puisse tesmoigner que je suis,

Madame,

Vostre très-humble, très-fidelle et très-obéissant serviteur. d’Iray

A Taillebourg, le 12e juin 1621.

Je m’oubliois de dire qu’on nous a asseuré et mesmes M. 8161991710 que si M. 81 62 5926326610 81 574241 591158 27331 91 675552 75561 621369 81 762 67557 262571 81 854 61710 591017374 49241 95687 51581910 105 75515 9518951 37419 282 8756155.

Archives nationales 1 AP 357/64

13 juin 1621 - Taillebourgà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay receu celle dont il vous a pleu m’honorer par le Sr. de La Roche-Mesnil122, hier je vousescrivis par M. de Pontaubré. Depuis son partement, est arrivé celuy de M. de Jarnac bien résolu dedire à l’Assemblée ses sentiments et de tous ceux avec lesquels il a conféré. Je crains bien qu’on ne lerenvoye comme les autres c’est à dire sans fruit.

Il est vray Madame que je ne vous ay point donné advis de l’arrivée de M. d’Auvilliers, mais jecroyois que Monseigneur l’eust faict ainsi qu’il m’avoit asseuré ; aussi que vos lettres me parlant quede l’affaire de Montjan j’attendois à y respondre lorsque nous verions l’affaire en estat d’en pouvoirparler ce que j’ay faict depuis, et comme M. de Pontaubé vous aura dict.

121 Guy II de Chabot, baron de Jarnac, avait participé à l’assemblée politique de Loudun, mais en 1621, il avait refusé lesfonctions de lieutenant-général de la Saintonge que lui avait proposé l’assemblée de La Rochelle. Les Frères Haagmentionnent que le 16 juin, il se présenta devant cette assemblée “ pour l’assurer de son affection au bien des églises ” ettâcher en même temps de l’amener à conclure la paix. Frères HAAG, La France protestante, tome III, p. 311.122 Jacques Potin, sieur de La Roche-Meny, était un vassal des La Trémoille pour le fief de Puy-Jourdain à Louzy.

Page 65: Années 1618-1623

65

J’ay bien du regret, Madame, que vous ayés esté si long temps sans recevoir de lettres d’icymais lorsque j’ay appris quelque chose qui méritast de venir jusques à vous je n’ay pas manqué à vousla faire sçavoir, et vous aurois plus souvent donné des nouvelles de Monseigneur si j’avois esté enlieu commode ou mesme lorsque j’ay sceu le partement de quelqu’un en endroit où je peusse escrirenon que je m’excuse sur le peu de loisir pource que j’employerois volontiers la nuist ou le temps derepos à faire chose qui vous peust apporter le moindre contentement. Les divers voyages qu’il mefault faire et les peines diverses qui se remontrent tant dedans que dehors en ce mauvais siècle nelaissent guères les gens de bien sans quelque travail et beaucoup de soucy, d’ailleurs nous trouvons4619 817 1716917 1997 71051 679856101 12534 61 115181. Je ne sçay, Madame, si je vous ayescript que si Clidamant 91 315710 5195 2826755 79257610 517785 8151965 8576610 66611021797.

Je ne manqueray à /2/ représenter ce que vous me faictes l’honneur de me commander quimérite qu’on y ait esguard et qu’on le considère comme on doibt, car si le Roy par sa prudence etjustice n’arreste le cours des violences contre ceux de nostre profession il sera impossible en find’empescher un désordre public. Je ne doubte point que ceux qui ont veu les lettres et mémoires deMonseigneur à l’Assemblée et qui se sont bien informés de ses procédures ny rencontrent suffisantematière de louer ses résolutions que de blasmer son dessein, mais il est bien malaisé de contenter toutle monde, de satisfaire aux malicieux et de guérir les maladies des ignorans.

Je pourray aujourd’huy faire un voyage de Cour si on y mande M. de La Bourdillière et moyainsi que vendredy on nous dict, bien qu’à mon advis on n’y ait affaire que de luy, car si c’est pourrapporter son voyage de La Rochelle. Je n’en puis parler que par luy avoir ouy dire. Toutesfois, jeferay tout ce qui me sera ordonné. M. de St-Angel tardera à beaucoup de gens à venir. Je croy que siM. de Rohan se porte à l’obéissance il pourra recevoir contentement. Dieu veuille qu’il s’y résolve.Ceux qui sont à présent dedans Pons, fors les chevaux eschappés. De là on juge combien la présencede Monseigneur y estoit nécessaire, pour contenir cette ville et la et peut estre une bonne partie de laprovince ou l’obéissance de Sa Majesté.

Parmy tout cela je continue mes prières à Dieu pour vostre santé, qu’il redonne celle deMadame vostre belle-fille et conserve celle de Messeigneurs vos enfans et me face la grâce de vousparoistre par toute fidelité et humilité comme je suis,

Madame,

A T. le 13e juin 1621.

Archives nationales 1 AP 357/65

14 juin 1621 - Taillebourgà Charlotte-Brabantine de Nassau123

Madame,

Depuis le partement de M. de Pontaubray, j’ay faict quelque séjour à la Cour par lecommandement de Monseigneur pour diverses affaires à sçavoir pour obtenir une sauvegarde pourvostre maison de Bournezeau et paroisses qui en dépendent. Je l’ay retirée mais seulement la maisonet le bourg y sont employés et non les paroisses. Je tascheray de les y faire comprendre et vousl’envoyeray. Pour obtenir un adveu de ce que M. de Boisrond a cy-devant mis des gens à Pons à laprière de Monseigneur. Ce qu’aussy j’ay obtenu pour avoir des archers affin de conserver ce comté.Ce qu’on m’a promis.

Et pour sçavoir ce qu’on a envie de faire des canons qui ont esté tirés de Vitré, on m’asseureque Monseigneur s’est contenté d’en avoir la valeur. On luy a offert et à présent luy offrent eninformant qu’ils ne sont point [au] Roy. J’espère toutesfois que nous lèverons cette difficulté ! Jen’eusse jamais esté d’avis qu’onn eust deu désirer ny demander autre chose que le restablissementd’iceux, mais Monseigneur a ses raisons.

123 Cette lettre a été classée à tort avec les lettres de 1620.

Page 66: Années 1618-1623

66

J’y ay encore parlé 8591 81101051 1755 28815 21561051, mais je croy qu’on attend que M. deTerchant 2610 1517101 81 71531910 25 574. Si Clidamant 91315710 5195 79257610 517785 8132651 4125 31792 41 19 779 46191. A ce qu’on m’a dict M. de Jarnac qui debvoit estre de retour dèslundy est encore attendu. Je ne sçay s’il n’y a pas raison de bien espérer de ce long séjour. Dieu veilleque luy et M. de St-Angel nous rapportent quelque moyen qui nous tire de toutes ces misères, carcertes elles sont grandes.

On n’entend parler que de révoltes ou faictes on en proches et tous ces gens de bien sontinspirés maintenant que le malheur semble nous avoir acceuilli. C’est un des fruicts de l’aleurtementde l’assemblée. On nous asseure icy de la dissipation de l’Eglise de Paris et de celle de Bourdeaux quitoutes fois est la pluspart receuillie à Castillon.

Je ne sçay, Madame, si vous aurés veu la déclaration du Roy du 27e du mois passé124. Peu l’onveue à la Cour, moy seulement d’hier, Monseigneur y va aujourd’huy pour en parler d’aultant /2/ queplusieurs semblent s’en esfaroucher d’aultant disent-ils qu’on trouvera par ce moyen criminel qui onvoudra. Si Dieu n’a pitié de nous nous sommes à la veille de voir bien des maux. Je croy toutesfoisencore que si l’Assemblée et M. de Rohan vouloient rendre l’obéissance que le Roy demande leschoses seroient restablies. Pons faict à présent guerre ouverte. On nous asseure que Monsieur duMaine est près de Nérac qu’il veult prendre. Aussitost que lesdits Srs de Jarnac et de St-Angel serontde retour je ne manqueray Madame à vous donner advis de ce qu’ils auront négotié s’il vient à macognoissance. Cepandant je prie Dieu qu’il espande ses bénédictions sur vous et vostre illustre maisonvous conserve et guarde en ce siècle plein de calamité, et me face la grâce d’estre recognu de vous,

Madame, pour

Vostre très-humble, très-obéissant et très-fidèleserviteur. d’Iray

A Taillebourg, ce 14e juin 1620.

J’ay encore parlé d’une lettre pour aller à Vitré, mais je croy qu’on attend que M. de Terchant,est presté le serment au Roy. Sy Monseigneur ne fust venu, on avoit résollu de faire beau mesnage enson bien à ce qu’on m’a dit.

Archives nationales 1 AP 357/54

25 juin 1621 – Taillebourgà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je ne vous ay pas si tost faict response que je debvois mais je mepromets que vous m’excuserés, vous estes mon très bon ami pour tirer ceste faulte à la rigueur. Jen’ay manqué de faire entendre à Monseigneur le contenu de vostre lettre touchant M. de Merad,laquelle mesmes il a leües. Il tesmoigne à l’esfect beaucoup de disposition et en viendra là à monadvis losqu’il y aura plein pouvoir. Je me resjouis grandement du recouvrement de vostre santé que jeprie Dieu vous continuer et augmenter. C’est le souhait,

Monsieur,

Vostre très-humble et très-affectionné serviteur.d’Iray

A Taillebourg, le 29e juin 1621.

Archives nationales 1 AP 357/66

124 Dans sa déclaration faite à Niort le 27 mai 1621 et enregistrée le 7 juin à Paris, Louis XIII s’il avait confirmé sa protectionaux protestants demeurant dans l’obéissance, avait qualifié tous ceux qui étaient retirés à La Rochelle et à Saint-Jeand’Angély et ceux qui les favorisaient, directemenr ou indirectement, de criminels de lèse-majesté au premier chef ; voulaitqu’il fut procéd contre eux selon la rigueur des lois et ordonnances, par saisies de leurs personnes, annotations de leurs biens; défendait à tout gentilhomme et autres de se rendre dans ces villes et enjoignait à ses sujets de quelque qualité qu’ils fussentde désavouer l’assemblée de La Rochelle et de jurer d’aider le Roi contre elle. Léonce ANQUEZ, Histoire des assembléespolitiques des réformés de France, op. cit., p. 353.

Page 67: Années 1618-1623

67

29 juin 1621 - Taillebourgà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je vous envoye les responses de Messieurs Desdiguières et de Pontchartrain. Je n’ay peu encoreretirer celle de M. de Rucelaï qui ne quitte point du tout la maison de Monsieur le Connestable, je laretireray et la vous envoyeray. Vos lettres, Madame, ont frappé un très grand coup pour faire surseoirl’exécution de la seconde déclaration, le Roy ayant ordonné en son conseil que lettres seroientenvoyées aux juges royaux de toutes les provinces et villes du Royaume, par lesquelles il leur feroitentendre que son intention est que ladite déclaration soit sursise jusques à ce qu’il en ait autrementordonné. Ce que maintenant on promet faire ou faire entendre l’intention de Sa Majesté bien au long.

Je vous envoye, Madame, la lettre pour le présidial de Poictiers affin que chacun sçache commeon a grandement defféré à vos lettres et remonstrances. Vous commenderés, s’il vous plaist, qu’ellesoit envoyée au plustost jugeant l’importance du retardement un des officiers en pourra estre leporteur et retirer certifficat de l’avoir rendue.

J’ay aussi retiré celle pour Xainctes à cause que les officiers en pressoient grandement cesteEglise. J’ay faict despescher celle pour Bretagne et m’a on asseuré que celle pour Touraine surlaquelle j’ay faict grande instance à cause de l’Isle-Bouchard estoit partie, sinon qu’on nousl’envoyera. Si cela est nous ne faudrons à vous la faire tenir. J’ay envoyé une sauvegarde du Roy cy-devant à Benon. Hier j’en envoyay une à Montaigu et aujour’huy j’en envoyeray une à Didonne àcause du passage de l’armée, si le Roy va en Guyenne à quoy il y a grande apparence veu le cheminqu’il prend.

On nous veult faire croire que Monsieur du Mayne y asseure toutes les places en l’obéissancedu Roy, qu’il a pris Nérac et est allé lever le siège de Caumont investi par M. de La Force. C’estchose /2/ chose estrange, Madame, que Monsieur de St-Angel ne soit point encore de retour et qu’onn’ait sceu aulcunes nouvelles de luy. Tout semble contribuer à mettre les affaires en mauvais estat.J’appréhende bien qu’à présent veu ce qui s’est passé depuis peu on ne se porte pas si volontairementà l’accommodement des affaires publiques. Les pertes de St-Jehan et autres villes n’esmeuvent enaulcune sorte l’assemblée de laquelle on n’entend que du mal. N’est ce point un tesmoignage queDieu est courroucé contre nous de dire qu’il n’y a pas un mois que Monseigneur eust peu obtenir deSa Majesté que la ville de pons eust demeuré soubs son obéissance en l’estat qu’elle estoit, que leshabitans le désiroient, et cepandant il a fallu que par la résolution de l’Assemblée en l’envoy de M. lemarquis de Chasteauneuf125 la ville soit maintenant réduitte à estre sommée sans aulcune puissancesuffisante de résister et que sans doubte elle soit obligée et forcée de souffrir telle les nouvelles qu’onluy voudra imposer. Monseigneur avoit de plus asseurance que Sa Majesté advoueroit tout ce qui s’yestoit passé jusques à l’arrivée dudit Sr. marquis. Voyla encores un des fruicts de ces belles et fortesrésolutions.

Le Roy est à présent à Brisambourg d’où il partira après disner pour aller coucher à Cognac oùMonseigneur sans doubte ira demain. M. Desdiguières s’y trouvera. Ils veront pour une bonne fois cequ’il y a à espérer pour le public, or mondit Seigneur pour son particulier car le Roy passant oultre ilne croit pas devoir aller plus avant tant pour l’incommodité de ses affaires, que pour d’autres raisonsque vostre prudence cognoist et sçait très bien.

Je vous envoye la coppie de la cappitulation de St-Jehan. Nous y verrés, Madame, que lacondition de Monseigneur n’est pas la plus mauvaise est certes il eust bien mieux valu obéir de bonneheure que de 32651 713482910 81 517671015. Ceux qui s’y /3/ entendent disent qu’on eust encorespour quelque temps peu soustenir. M. de Pontaubray vous dira le particulier de tout cela pour y avoiresté présent, et comme il a esté impossible de retenir les soldats qu’ils n’ayent ptité et emportéquelque chose, aulcuns disent ce qu’ils ont peu. Je ne puis en rien dire de certain, pour n’y en avoirentré. Je croy que St-Jehan perdra le nom de ville et que les fossés seront comblés et les muraillesabbatues. Voyla une estrange persistance de l’assemblée qui pourroit sauver ceste ville là et plusieursautres que leur subsistance ne pourra recouvrer.

125 Charles de Pierre-Buffière, marquis de Châteauneuf, d’une des principales famille protestante du Limousin.

Page 68: Années 1618-1623

68

M. de Pontaubray vous dira aussi Madame ce qui s’est faict pour Vitré. Il est grandementmalaisé de faire affaire au Conseil à présent qu’il suit, et que le Roy marchera car les affairespubliques employent tout le temps. M. de Seaux m’a promis de faire expédier une sauvegarde pourOlivet.

Je finis, Madame, en priant Dieu pour vostre santé et le recouvrement parfaict de celle deMadame vostre belle-fille et la prospérité de tous ceux de vostre illustre maison en la qualité,

Madame de,

Vostre très-humble, très-obéissant ettrès-fidèle serviteur. d’Iray

A Taillebourg, le 29e juin 1621.

Il eust mieulx vallu obéir de bonne heure que de faire semblant de résister.

Archives nationales 1 AP 357/67

1er juillet 1621 - Cognacà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Les dernières de Monsieur de La Mazure me commandent de vostre part de vous faire entendrece qui se passe et ce qui s’est faict sur les plaintes de la dernière déclaration. Les lettres sont du 27e dupassé. J’y ay satisfaict avant leur réception en ce que j’ay peu par trois despesches, l’une parAnthoine, l’autre par Peussier, et l’autre par M. de Pontaubray. Je ne doubte point, Madame, que letemps que vous avés esté sans recevoir nouvelles de deçà n’ait peu à bon droict vous apporter undésir d’en apprendre. J’estois à la Cour où je ne pourrois y donner ordre. Je vous supplie très-humblement de le croire et que si je ne satisfais entièrement à toutes sortes de comandemens que vousme faictes l’honneur de me faire que je ne le puis pas estre occupé ailleurs premier que de les avoirreceu. J’ay peur Madame que ce long discours vous enuye, mais j’ay tant de crainte de vous desplairque je ne puis rien obmettre pour vous asseurer de l’affection entière que j’ay de vous rendre toute mavie tout respect, service et obéissance.

Monseigneur vient présentement de partir pour aller à Jarnac presser le seigneur du lieu d’allerà La Rochelle pour la seconde fois affin de les exhorter à se mettre en leur devoir et escrire à monditseigneur qu’ils veulent obéir à Sa Majesté, et la mesme chose à Monsieur la maréchal des Diguières etce d’aultant que M. de Favas a pris les armes. S’ils font cela sans doubte le Roy leur pardonnera etaprès effectuera (à ce qu’on promet) toutes choses justes et raisonnables que nous pourrionsdemander, et respondra favorablement toutes nos plaintes qui seront de ceste qualité. Après ceste foyje ne voy plus de prompt remède aux malheurs publics. Je di tousjours que si on se met en debvoir àLa Rochelle nous aurons la paix, mais je n’espère pas mesme de là qu’au passé tant l’espritd’estourdissement domine.

M. /2/ de St-Angel est de retour d’hier à midy en ce lieu, où mondit Seigneur n’arriva qu’àquatre heures. Son voyage a esté long pour avoir esté arresté prisonnier huict jours durant à St-Nicolas, mais il ne semble pas inutile d’aultant que par son moyen. Monsieur de Rohan a despeschéM. des Isles à La Rochelle où il est pour les exhorter à solliciter à l’obéissance. Son arrivée a causé laseconde despesche de mondit Sr. de Jarnac.

M. de Malret est aussi arrivé avec ledit Sr. de St-Angel. Celluy-là ne nous a pas appris lesubject de son voyage. Il avoit promis icy beaucoup de choses qu’il n’a peu tenir comme de fairedesputer icy par la province de Basse Guyenne affin de protester de toute sorte d’obéissance, mais ilasseure que le passage de 37976155 815729aa, l’a empesché non de tout mais en partie, plusieursvilles demeurans dans l’obéissance et d’autres comme Bergerac et autres ayans receu guarnisons. Jecroy qu’il est venu 81 82 12510 81 379761 5581476771 233 69 825765 817 67336 776797. Il asseureque Monsieur de Boisse n’a point armé pource qu’il n’a point eu de charge, que seulement il demeuresur la desfensive et pour empescher qu’on ne luy face mal. M. de La Force faisant loger sur ses terres.

Page 69: Années 1618-1623

69

M. du Mayne est devant Nérac où on n’a peu capituler d’aultant que ceux de la ville désiroientque la place fust mise entre les mains du cappitaine de ses guardes pour la mettre en celles de M. dePairdaillan qui en disposeroit ainsi qu’il plairoit au Roy d’en ordonner, mais mondit Sr. du Mayne ditque c’est la première place qu’il a assiégé durant ce mouvement qu’il veult sans milieu la mettre enl’obéissance de Sa Majesté. 688610 9568215736781 715565 81574 956881 3152 9579 72667581 7679515810. Ces Messieurs disent qu’il y a quatre mil hommes à Bergerac, que M. de Rohan est àMontauban où il y a assés bon nombre d’hommes qui s’y sont jettés pour sa desfense.

On desmantèle St-Jehan et Pons est rendu. C’est à dire a protesté d’obéissance, Sa Majesté luydonnant advis ce qui a esté faict et M. le mareschal des Diguières pour y aller mettre l’ordre. On croitque /3/ M . Zamet sera laissé dedans. Le Roy faict estat de partir lundy s’il n’est retardé jusques auretour de M. de Jarnac il sera bien malaisé de traitter en courant. On assure icy que les depputés del’Assemblée ont esté renvoyés d’Angleterre sans rien faire. L’Ambassadeur en retourne, d’aultres ledisent retourné d’hier au soir. Je n’ay point veu. Il doibt icy arriver un nonce qu’on dit devoir donneradvis à Sa Majesté de nous laisser en la liberté de l’exercice ainsi qu’au passé mais aussi de se faireobéir. Le bruict est que Buquoy a desfait Bethleem Gabor. On croit le roy de Dannemark puissant etrésolu de recouvrer les pays du roy de Bohème.

Monseigneur doibt retourner aujourd’huy de Jarnac et M. Desdiguières de Pons demain. Dieuait soing de nous. Je vous supplie très-humblement Madame de croire que je ne perds aulcun temps nioccasion pour vous rendre et à Monseigneur toutes sortes de très-humbles et fidèles services. Si jejuge nécessaire de vous despescher ce porteur, nous vous tiendrons adverties de ce qui se passera,cepandant je prie Dieu qu’il vous tienne en sa guarde, redonne la santé à Madame vostre belle-fille etme rendra digne d’estre nommé,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant ettrès-fidèle serviteur. d’Iray

A Coignac, ce 1 juillet 1621.

Archives nationales 1 AP 357/68

25 octobre 1621 – Thouarsà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Nous avons eu advis certain par M. d’Auvilliers de vostre passage en bonne santé par Meaux.Dieu vous la conserve, soit vostre guide en vos actions et les face réussir à vostre contentement.Depuis vostre partement, Monseigneur, nous avons receu une lettre de M. de Rulles responsive à celleque vous luy aviés escripte touchant la commission qu’il avoit envoyé à Faye-Labasse126 pour fairecontribuer la paroisse. Il s’excuse et proteste n’avoir sceu que Faye-Labasse fust dedans vostrechastelanie qu’il ne se fust pas tant oublié s’il l’eust sceu et n’eust point oultrepassé les limites quevous luy aviés prescrites, qu’il a mandé qu’on retirast ladite commission. Il escript cela de Fontenayoù il est auprès de M. le comte de La Rochefoucault auquel quelqu’un disant vostre partement et lacause d’iceluy tout cela avec émotion luy sans s’esmouvoir respondit qu’il l’avoit desjà appris et loüé,le subject en estant si juste.

Les habitans papistes de Lodun à l’ouye de vostre partement furent trouver M. de La Chesnayeet le supplièrent d’aviser à luy et que vostre voyage avoit ses raisons autres peut-estre qu’on ne disoit.Vous pouvés penser, Monseigneur, que chacun en aura parlé selon son sens ou sa passion /2/ maisjusques icy nous n’apprenons pas qu’il change en rien l’estat où vous nous avés laissé. Nous veronspar le retour de M. de Lessart de quel goust il aura esté à la Cour d’où nous n’avons rien appris decertain non mesme par ouy dire depuis le partement de Goubelet.

126 Faye-l’Abbesse à l’Est de Bressuire.

Page 70: Années 1618-1623

70

Le cappitaine La Pierre est de retour de Vitré avec M. des Hayers127, qui m’a délivré la sommede six mil livres, de laquelle j’ay rendu la somme de trois mil six cens livres que j’empruntais à vostrepartement de ce lieu. J’ay Monseigneur suivant la charge et pouvoir qu’il vous a pleu me fairel’honneur de me donner baillé acquit audit Sr. des Hayers de ladite somme de six mil livres. Il estoitvenu en intention de vous faire une très humble supplication à ce qu’il vous pleust pourvoir songendre128, fils du procureur de vos eaues et forêts de Vitré, de la survivance de l’office duditprocureur. Il m’a chargé d’un mémoire et requis de le vous envoyer de sa part, mais je n’ay pas creuque nous fussions eu temps de vous en importuner. Toutesfois j’en attendray vos commandemenspour y obéir.

M. de Trélan129, cy-devant sénéchal de Vitré, et celuy130 que vous avés eu agréable de pourvoirde son office vous ont escript, Monseigneur, pour un différent survenu à cause dudit office, mais qui asa naissance dès avant que vous eussiés délivré vos provisions. C’est que premier qu’on vous eustparlé de faire changement de la personne du Sr. de Trélan à celle du Sr. Duverger, ils avoient convenuet compromis que celuy-là se desmettroit de son dit office en faveur de celluy-cy moyennant lasomme /3/ de douze mil livres et pour cent pistoles de perles. Cependant vous vous souviendrès desfeintes difficultés que faisoit ledit Sr. de Trélan lorsqu’on luy parloit de résigner, bien que desjà il yfust obligé par ledit compromis, lequel pour ne sçavoir, vous eustes agréables d’accorder audit Sr. deTrélan la somme de dix mil livres pour récompense de sa démission entre vos mains, laquelle sommefut incontinent après acquittée par le père su sénéschal qui à présent exerce sur le mandement quevous en luy en donnastes dont à présent n’est content ledit Sr. de Trélan et poursuit pour le payemententier de ladite somme de xijMviC livres. Tout ce mal est venu faulte de vous avoir descouvertMonseigneur la teneur dudit compromis, cepandant par le commandement de Madame vostre mère,j’ay escript à l’un et à l’autre, et convie de n’enfoncer point l’affaire jusques à ce que vous eussiésfaict un voyage à Vitré où vous rendriés à chacun justice. Tout ce que j’y voy de mieux est que s’il y ade la perte, ce sera au Sr. de Pontdavy à s’en guarentir, car aulcun d’eux n’a droit de rien désirer devous que ce qu’il vous plaira.

Je ne sçay Monseigneur sy Madame vostre mère vous escrira ce que ledit Sr. des Hayers avoitcharge de vous dire 54884829 sa 19659654 à sçavoir que 845 429 669 48ab 18799861 64 1454482992 59469 987891 54 857491 18664 49 241 4469 3a981 a5a1 5597a469. Bien marris 541 96158466415a 44a484. Mais ce sont peut-estre paroles. Le cappitaine La Pierre les allarma à sa venue pource qu’il n’en fit pas sçavoir le subject à M. des Perrières. Par le commandement de madite Dame j’aydélivré trois cens livres pour le Sr. de 88342294224 /3/.

On nous dit que 9974249419482994 45a2 35 6989647848a. Vous pourrés Monseigneur enavoir mieux appris la vérité par d’autres. Voylà ce que nous avons pour le présent à quoy jen’aajousteray que mes ardentes prières à Dieu à ce qu’il luy plaise avoir soing de vous et vous fairerecevoir toutes sortes contentemens par tout et me donner les moyens de vous rendre des servicesaultant agréables et utiles que fidèles et pleins d’affection en la qualité,

Monseigneur de,

127 André de Gennes (1574-1629), sieur des Hayers, était l’un des fermiers de la baronnie de Vitré. Il était membre d’une desprincipales familles bourgeoises de Vitré. Si son père fut protestant, il présente la particularité d’avoir été baptisé dans lareligion catholique et d’avoir fait baptiser dans cette religion les enfants nés de son mariage avec Jeanne Leziart.128 Dans son relevé des registres catholiques de Vitré, l’abbé Paris-Jallobert n’identifie pas ce gendre du Sieur des Hayers.129 Jean de Couesnon, sieur de Trélan (1560-1632), sénéchal de Vitré de 1596 à 1619, était le fils de André de Couesnon,sieur de Lorgerie, sénéchal de Vitré de 1548 à 1592 et de Jeanne de Trélan. Il épousa en premières noces en 1587 uneprotestante Rachel Chevallerie (1564-1602) puis en secondes noces en 1605 une catholique Andrine de Gennes. LesArchives des La Trémoille à la cote 1 AP 679/XVII conservent de lui une lettre à Henri de La Trémoille en date du 19 juillet1622 où il sollicite la charge de connétable sans titulaire depuis la mort du sieur de Cohigné et se plaint de n’avoir pas étépayé par Mathurin Duverger, sieur de Pontdavy, de la vente en 1619 de son office de sénéchal « pour la somme de douze milsept cet vingt livres ».130 René Duverger, sieur de Boislebault, fils de Mathurin Duverger (1560-1632), sieur de Pontdavy, avait été le 20 novembre1619 reçu sénéchal de Vitré. Abbé Paul PARIS-JALLOBERT, Journal historique de Vitré ou documents et notes pour servirà l'histoire de cette ville, Réimpression augmentée de l’édition originale de 1880, Editions régionales de l'Ouest, Mayenne,1995, p. 71.

Page 71: Années 1618-1623

71

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le 25e octobre 1621.

Archives nationales 1 AP 357/69

1622 Henri de La Trémoille passa la plus grande partie de l’année 1622 à Sedan auprèsdu duc de Bouillon.

Après avoir défait Soubise à Rié (14 avril) et pris le fort de La Chaume près de Talmont,Louis XIII marcha sur Saintes, puis entreprit le siège de Royan qui capitula le 11 mai. A l’occasionde ce siège, considérant l’attitude du Sr. du Plessis le gouverneur de Taillebourg suspecte, il le démitde sa charge et plaça la garnison sous les ordres de M. de Fouquerolles131. A cette nouvelle,Charlotte-Brabantine de Nassau vint le solliciter pour qu’il lui remette la place entre ses mains, maisil refusa alléguant qu’il importait à son service et à l’intérêt du duc que cette place qui contrôlait le“ passage de la rivière ” reste sous la garde du Sr. de Fouquerolles et qu’il lui la remettrait dansquelques temps132.

Après la paix de Montpellier (18 octobre), Marie de La Tour d’Auvergne retourna à Thouars etHenri de La Trémoille se rendit à Paris pour obtenir les terres qui avaient été confisquées.

1er janvier 1622 – Thouarsà Henri de La Trémoille

à Sedan

Monseigneur,

Depuis hier que je vous rescrivy par M. Le Heaulme nous avons receu nostre messager de Pariset par luy estre asseurés de la bonne disposition de Madame et de Monseigneur le Prince que nousaurons demain ou mardy en ce lieu Dieu aydant je partiray aujourd’huy pour leur aller au devant et lesasseurer de la bonne santé de Madame vostre mère. Mademoiselle à la sienne un peu altérée par uneenhumure mal général icy et duquel peu ou point de personne ont esté exempts.

Je croy, Monseigneur, que madite Dame vous envoye la coppie de l’estat que dressa icy M. deLa Mothe duquel je me promets que Vostre Excellence apprendra ce qui se passe tant en la ferme deVitré qu’autres affaires concernants vostre service lorsqu’il en survient qui méritent de vous estremandées. Icy il n’est rien arrivé de nouveau.

Vous aurés sceu, Monseigneur, le bruict qui dict que le Roy veult avoir des asseurances deMessieurs qu’ils ne feront point la paix avec le Roy d’Espagne si Sa Majesté entreprend la deffencede ses alliés qu’on opprime. On asseure et cele vient de La Forest-sur-Saivre qu’il est arrivé descommissions de La Rochelle pour faire démolir le fort qui est devant la fortification d’Aiguillon.Vous en aurés des nouvelles plus /2/ certaines au premier jour. On dit que M. de Chamdolant à uneasseurance pour son restablissement à Marans et Madame de La Boulaye a promesse pour le sien àFontenay. Monsieur du Plessis m’escript que son affaire et autres de mesme nature sont remis à Pariset que les paroles tant de S. M. sur icelles que de ses ministres ont esté fort bonnes. Je n’ay riend’ailleurs quant à présent sinon à prier Dieu pour vostre prospérité et santé et qu’il me doint d’estretousjours creu de vous,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le premier jour de l’an 1622.

131 Lettre de Louis XIII à Henri de La Trémoille écrite le 30 avril 1622 de Saintes, Louis-Charles de LA TREMOILLE,Chartrier de Thouars, op. cit., p. 146.132 Lettre de Louis XIII à Henri de La Trémoille écrite le 14 mai 1622 du camp de Royan. Ibid., p. 146-147.

Page 72: Années 1618-1623

72

Archives nationales 1 AP 357/70

6 avril 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

J’ay receu par celle qu’il vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire du 15e du passé denouveaux tesmoignages de vostre bienveillance envers moy au soing que vous daignés avoir de masanté dont je remercie très-humblement Vostre Excellence et prie Dieu pour tant de bienfaicts vousaccroistre les grâces et advantages que vous avés receu de luy et qu’il départ à ceux qu’il aime lemieux. Vous aurés ouy parler Monseigneur de l’acte de l’assemblée de La Rochelle et de la lettre duSr. de La Chappelière qu’un gentilhomme de M. de Jarnac porta à Paris lorsque le Roy y estoit et celasur l’envoy par luy faict à La Rochelle par conférence de M. le Guarde des Seaux, lesdites lettres etactes portent qu’en continuant en la volonté qu’ils ont tousjour eüe et qu’ils ont faict sçavoir cy-devant à M. le vicomte de Doncastre ils sont tous prest d’envoyer des desputés de leur corps tels qu’ilplaira à S. M. chosir pour se venir jetter à ses pieds et luy demander la paix. Que si sa dite Majesté n’acela agréable ils authoriseront pour ce faire ou M. de Jarnac ou M. de Chalas.

Sur cela ledit Sr. de Jarnac envoya demandé des passeport pour aller à La Rochelle ce qu’on netrouva pas bon, mais bien une lettre du 20e du passé à M. d’Espernon pour la laisser aller et venirseurement à La Rochelle. Madame vostre mère avoit envoyé en Xainctonge pour en apprendre lesparticularités à la source, mais M. de Jarnac estoit en Perigort. Elle en sçaura bientost la vérité par unmendement cy-inclus dont vous cognoissés l’escriture vous apprendra, Monseigneur, ce qui se passoiten Xainctonge, Angoulmois et Guyenne et par les coppies de deux lettres aussi cy-incluse /2/ en l’unece qui se passoit en Languedoc et Daulphiné les redditions véritables du Poussin ou est M. du Persecappitaine des guardes de M. de Lesdiguières qui à l’honneur d’estre cogneu de vous et de Bares et lavérité du meutre du président de Cros en l’autre, l’intention de Sa Majesté touchant le restablissementde M. du Plessis à Saumur où elle est attendue aujourd’huy les logis y estans marqués il y a deuxjours. On ne sçait qu’elle route elle tiendra de la plus commune voix est qu’elle descendra à Nantes oùM. de Vandosme est allé devant. Si le Roy faict quelque séjour audit Saumur ou que la Royne mère ydemeure tant soit peu. Madame vostre mère ira rendre ses debvoirs. Si Sa Majesté ne prend le cheminde Bretagne mais celuy de bas Poictou il y a apparence qu’elle passera par icy, mais jusques à présentnous n’avons rien appris.

On ne sçait 80 34 51 65 a5 18 24 54 68 69 41 19 656 25 a2 38 92 4d a6 61 86 24 74 69 8a 25 a426 47 46 90. On dict que 100 84 16 299 888 99 3a 48 84 65 62 45 98 19 74 15 87 41 54 8ac 641 49 54a42 649. Vous aurés sceu, Monseigneur, l’arrivée de M. de Montsizet en court de la part de M. deLesdiguières. Le Roy se monstre très bien disposé à la paix, à quoy Monsieur le duc de Savoye leporte par ses advis sur le doubte que j’ay que vous n’ayés sceu que ceux de La Rochelle ont escript àM. la baron de Languerach133 le supplians de se vouloir employer à ce bon œuvre. J’ay creu ne ledebvoir obmettre et que lesdits de La Rochelle protestent par leur lettre se vouloir soubs mettre à toutdebvoir vers Sa Majesté laquelle a eu communication de cette lettre a monstré l’avoir agréable commeen la plus part de MM. les ministres de l’estat qui tesmoignent désirer grandement le retour deMonsieur le vicomte de Doncastre estimans qu’il pourroit y frapper coup. Je sçay de certain queM. de 161577422878654 Monsieur de 88 61 84 94 92 64 2814 que nous aurions la paix.

Monseigneur le Prince est attendu à La Roche-aux-Aulbiers pour tenir un enfant ou /3/ s’ilvient il veult accorder le Seigneur du lieu et ses enfans avec MM. de Crissé, M. de La Chasteigneraiavoit prié dimanche le Sr. des Cottières qui lève une compagnie sur commission de Sa Majesté dedesloger de Faye-la-Basse ce qu’il reffusa et mesmes donna quelques coups à celuy qui luy porta lalettre ce qui obligea mondist Sr. de La Chasteignerai de s’assister de ses amis et y mener un provostqui les changea. On fit un cappitaine sans gens. Aussy telles petittes trouppes sont dedans le païs desmaux à viloence qui ne se peuvent exprimer. M. de Soubize est venu jusques à La Chaize-le-Vicomte

133 Gideon van Boetzelaer et Asperen (1569-1634), baron de Langerack, fut de 1614 à sa mort ambassadeur des Provinces-Unies à Paris.

Page 73: Années 1618-1623

73

et lors M. le comte de La Rochefoucauld estoit à Bourneseau où il loge. Cinq jours au granddommage des habitans et du païs ils ont faict divers logemens à deux lieues l’un de l’autre, mais enfinet il y a environ dix ou douze jours celluy-cy se retira à Fontenay et laissa la campagne à l’autre quis’est mis dedans Lusson sans aulcune résistance ou il est encore à présent et faict estat à la prière etinstance de MM. de La Rochelle de nettoyer la coste s’il n’y entrevient empeschement. Il a pourcertain de quatre à cinq mil hommes de pieds bons, trois cens maistres et deux cens que carabins quemousquetaires à cheval avec trois pièces de batterie.

Monsieur le comte de La Rochefoucault après avoir guarny Fontenay d’hommes s’est acheminéen hault Poictou. Il avoit laissé là M. du Chastelier-Barlot et maintenant on dist qu’il y retourneassisté des régiments dudit Sr. du Chastelier et d’Estissac. M. de Favas est toujours en Médoc et faictson cas à part. On nous dict icy, mais nous n’en sçavons rien au vray qu’il est arrivé à La Rochelle sixvaisseau d’Angleterre avec LX hommes chacun on ne dict point de la part de qui, ny par quellesubvent ils sont venus. Qu’à présent ils ont là six vingts vaisseaux et six mil hommes dedans. QueM. de La Noue y est arrivé, que MM. de Kergrois et de La Mothe-St-Surin y estoient attendus. Celuy-là avec quatre cens hommes et celluy-cy avec […]. On nous dict que le Roy ne partira point de cesprovinces qu’il n’ait nettoyé le Poictou. Voyla Monseigneur tout ce /4/ que j’ay ouy du général.

Pour venir au particulier V. E. sçaura que j’ay receu les quatres commissions pour faire ventede bois en ses terres de Laval, Vitré, Montfort, Quintin qu’elle m’a envoyées et suivant vostrecommandement Monseigneur je les ay scellés, contresignées et incontinent envoyées à M. de LaMothe par homme exprès parce que le temps presse. Je n’appren rien de vos fermiers de Thalmondbien que j’y aye bien souvent envoyé, mais estans habitans des Sables ou ayans encore leurs fruictslorsque Monsieur de Soubize y a entré ils pourront sans doubte avoir beaucoup perdus. C’est pourtantleur faulte qu’ils n’ont apporté ce qu’ils doibvent, car je leur ay souvent mandé avant la prise desSables. J’ay leurs responses.

On nous avoit cy-devant envoyé de Paris une commission pour faire appeller Madame deFrontevrault134 touchant les fromentages sur le renvoy que demandent les partis adverses par devantleurs juges ordinaires. Je la renvoye à M. Malherbe avec l’assignation donnée à ladite Dame. Onm’avoit envoyé un compulsoire pour faire appeler M. le marquis de Fourvilles et faire vuidimerl’advis de Belleville sur l’opposition formée par vostre procureur aux criés dudit Belleville, qu’onvouloit vendre avec droict de haulte justice bien qu’il vous soit rendu et tienne de vous seulement àdroict de justice foncière, mais d’aultant que ledit Sr. de Fourvilles n’a point esleu de domicille en celieu et que l’affaire presse, partie adverse ayant produict. J’envoye par le commandement de Madamevostre mère et advis de vostre conseil l’original dudict adveu affin qu’il soit vuidimé à Paris, partieappellère renvoyé en ce lieu. Je leur renvoye ledit compulsoire pource qu’il leur pourra servir, et nousest icy inutile. Doisseau promet encore de vouloir terminer à l’amiable, mais il ne se peut rien dire decertain d’un tel homme et qui a si souvent manqué à sa parole. J’envoye aussi au Sr. Malherbe uneprocuration de La Chaume cessionnaire des offices de jaulgeage pour en user ainsi qu’il sera trouvébon par vostre conseil.

Il n’est rien arrivé /5-72/ icy de nouveau en vos affaires particulières. Madame vostre mère seporte mieux, Monseigneur le prince et Mademoiselle se portent bien Dieu soit loüé, que nous ayonsaussi tost appris vostre convalescence que vostre maladie. Je le supplie qu’il vous donne une parfaictesanté avec toutes sortes de contentemens et vous Monseigneur que vous me faciés l’honneur de mecroire pour toute ma vie,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le 6e apvril 1622.

Archives nationales 1 AP 357/71 et 72

134 Jeanne de Bourbon-Lavedan, abbesse de Fontevraud depuis 1611, décédée le 11 janvier 1637 à l’âge de 89 ans.

Page 74: Années 1618-1623

74

13 avril 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Vous sçaurés bien particulièrement par celle de Madame vostre mère ce qu’elle a appris àSaumur durant le temps qu’elle y a esté lorsque la Cour y a passé et depuis les raisons qui l’ont meüed’envoyer à Nantes M. de Pontaubray. En quoy elle a eu pour principal but et le bien des affaires deV. E.

Vous avés sceu Monseigneur M. de Soubize à Lusson d’où on croyoit qu’il deust faire emportertoutes sortes de provisions dont ce païs est fort abondant, mais il y a simplement vescu et n’en a rientiré soit ou faulte de commodités pour la voiture ou par defférence à quelque recommandation ou pourfavoriser le seigneur du lieu ou avec telle chose. On croyoit que de Lusson il tireroit vers La Rochellepar le marais n’ayant eu sur son chemin d’obstacle que la Brault petit fort sur la rivière qui luy eustesté très aisé de forcer n’estant basti que de mauvaise matière ny guardé que par cent hommes quisans doubte n’eussent pas attendu mais il a rebroussé en Poictou jusques aux Essarts et Puybeliard oùil estoit vendredy que M. le comte de La Rochefoucaud partit de Fontenay avec ce qu’il peut decavalerie (ayant derechef mandé la noblesse de la province) et les régiments de Navarre, deChampagne, de Burie, du Chastelier, de La Rainville et de St-Vivien et celuy de M. le prince deMarsillac, son fils, l’attendant à Maseuil espérant avec ses forces /2/ se mettre entre Monsieur deSoubize et les Sables, ce qu’il a voulu estant beaucoup plus avant que M. de Soubize qui ne va quebien lentement à cause de cinq pièces de canon qu’on dit estre tirées par des bœufs. Cepandant on nevoit point d’autre passage asseuré pour M. de Soubize que les Sables et sera bien malaisé que cela sepasse sans combats. Il est aussi fort et plus que Monsieur de La Rochefoucault, car il a pour le moinscinq mil hommes de pied et six cens chevaux et tous les régiments cy-dessus ne font qu’environ troismil cinq cens hommes, mais aulcuns croyent que le bourg des Sables à l’ayde du régiment deMarsillac a investi La Chaume et que M. de Vendosme a faict couler quelques trouppes de Nantes.Cela est encores incertain, mais s’il y a forces suffisantes entre M. de Soubize et la Mer, il auraincontinent le Roy sur les bras, car on assure qu’il prendra la route de Fontenay, de Niort et peut estrede Xainctes, cepandant ceux de La Rochelle et M. de Soubize ont escript à la Royne mère pour lasupplier très-humblement d’intercéder pour la paix, de laquelle on parle diversement scelon lesinclinations diverses qu’on recognoist en ceux qui ont l’honneur d’approcher Sa Majesté. M. deSchomberg assure que quoy qu’on die il fera son possible affin que le Roy (son auctorité sauvé) ladonne à ses subjects la recognoissant nécessaire à l’estat.

La conférence de Messieurs de Lesdiguières, de Rohan et de Chastillon qui se devoit faire àBaignols ou au St-Esprit le 25e du passé a esté différé jusques au 5e du courant à cause desempeschemens que M. de Montmorency avoit mis sur le passage de M. de Rohan. On attend de là lesouvertures de la paix, et à la Cour on asseure que si elles sont telles, voire un peu moindres que cellesqu’autrefois on a ouy dire à M. de Lesdiguière /3/ comme nécessaires nous aurons une paix et reposasseuré en ce Royaume et que Sa Majesté ne demande que l’obéissance de ses subjets pour secourirses voisins et alliés à quoy elle sera de nouveau convié par l’Ambassadeur de Venise qui doibtbientost arriver. M. de Favas faict tousjours son affaire à part et il avoit il y a quelque temps pris uneabbaye dont nous ne sçavons le nom, mais que ses gens ne guarderont guères ayant au mesme instantquasi esté enveloppé par ceux de M. d’Espernon qui leur firent quitter prise et les desfirent. Lelieutenant de M. de St-Surin y fut tué et dit–on bon nombre de braves gens. Voylà Monseigneur ceque je sçay à présent à quoy je n’adjousteray que mes prières à Dieu pour vostre prospérité et santé etde Madame et vous suppliant très humblement de croire que je suis et seray jusques au tombeau,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A vostre Thouars, le 13e apvril 1622.

Archives nationales 1 AP 357/73

Page 75: Années 1618-1623

75

21 avril 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Le voyage du messager se rencontre au mesme temps que le partement de Monseigneur leprince que Dieu vous meine et conduise en parfaicte santé135. A son arrivée vous apprendrez parM. Brusse l’estat de vos affaires de deçà et ce qu’il a ouy de particulier au séjour qu’il y a faict,cependant j’ay creu que vous n’auriés pas désagréable, Monseigneur, que je vous disse que SaMajesté est à présent à Niort où elle faict estat de séjourner toute la sepmaine pour de la prendre de laroute de Chizé et de Xaintes où M. du Plessis-Bellay l’ira trouver. M. de Bullion l’a desjà veüe etmesmes on a tenu conseil sur ce qu’il a apporté. Un bruict court qu’il n’y a pas contentement suffisantet luy mesme dit qu’il luy fault retourner en Daulphiné sur quelques circonstances. Cepandant lesdesputés qui doibvent parler au nom des Eglises sont à St-Maixent et attendant un commandement surce qu’ils auront à faire, mais on ne croit pas qu’ils voyent Sa Majesté que l’affaire ne soit plusadvancé et après le retour dudit Sr. de Bullion qui doibt voir la Royne mère premier que partir. Elleest demeurée malade sur le chemin plusieurs plaignent son absence d’auprès Sa Majesté pour lesbonnes inclinations qu’on luy recognoist à la paix.

On tient pour assuré que M. de Soubize s’est sauvé à La Rochelle luy sixiesme où à ce qu’ondict il a souffert avec patience les rebuts et comices du peuple. Les prisons sont pleines de gens detoutes qualités. Hier au soir fut pris icy près le Sr. du Coudray-Chézelles, le comte de Marenne et LaMothe-St-Surin sont prisonniers à ce qu’on dict. On leur faict suivre la Cour. Le Sr de La Riodornièreest aussi prisonnier à Fontenay. Il y a danger pour ceux qui ont esté dedans St-Jehan ou rendu leurdéclaration. Il y a arrest à la sollicitation et proffit à ce qu’on /2/ tient de M. la comte de LaRochefoucault par lequel le bien de tous ceux qui estoient avec M. de Soubize est confisqué et ceuxde quelque religion qu’ils soient qui les ont retirés déclarés criminels de lèze majesté et leurs biensaussi confisqués. Si cela est tiré à la rigueur il n’y aura guères de maisons à la campagne exempts. Lesprovosts, les communes et les païsans sont tousjours aux escoutes pour surprendre ceux qui seretirent, cela faict beaucoup de mal parce que tout ce qui se rencontre à présent sur les chemins dequelque costé qu’il puisse venir court fortunes. Les païsans près des Herbiers ont assommé M. de LaMothe d’Anjou qui estoit à Monseigneur le Comte. Il est bien à craindre que la paix ne soit retardéepar cet affaire, mais Dieu la tournera s’il luy plaist au bien.

Je parleray à M. de Bullion lorsqu’il passa icy du voyage de Monseigneur le prince lequel il nedesapprouva pas puisque vous Monseigneur et Messeigneurs ses autres proches le désiriés près devous. Voylà ce que nous avons à présent dont M. Brusse vous dira le particulier à son arrivée et moyje continueray mes prières à Dieu pour vostre prospérité et santé et qu’il me doint d’estre tousjoursrecognu de vous,

Monseigneur par,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le 21e apvril 1622.

Archives nationales 1 AP 357/74

23 avril 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Vous aurés appris par M. de Bellujon les particularités de l’entrevüe de MM. de Lesdiguières etde Rohan, et ce qui se passe en Dauphiné et Languedoc où ceux de la Religion font de grandesplaintes de M. de Chastillon pour leur faire à présent guerre ouverte et le pis qu’il peut à ce querapportent les depputés qui assistent M. de Bullion, lequel à ce qu’il croit porte les ouvertures d’un

135 Henri-Charles de La Trémoille arriva le 12 mai 1622 à Sedan.

Page 76: Années 1618-1623

76

accommodement général, tant par ce qui s’est passé et résolu en ladite entreveüe que par l’avis quedonne en particulier mondit Sr. de Lesdiguières portant à ce qu’on dit son se […] advis du moyen queSa Majesté peut tenir pour donner la paix ce qu’il croit raisonnable qu’elle accorde. Avec eux ontpassé MM. du Grosi et des Isle-Maison. Le dernier a charge d’aller à La Rochelle et en amener desdesputés et un de la part de M. Soubize à St-Maixent où ils doibvent tous séjourner attendant desnouvelles desdit Sr. de Bullion qui est allé tout droit vers Sa Majesté, laquelle a tousjours montrébeaucoup d’inclination de désir de donner la paix à son estat mais à présent aulcuns doubtent que cequi s’est passé près de l’isle de Rié136 ne tarisse l’espérance qu’on en pouvoit avoir ce que plusieursprennent au contraire estimans que Sa Majesté prendra ce moyen pour faire vois à ses subjects de laReligion que la paix qu’elle leur donnera deppendra purement de sa bonté affin qu’ils n’en ayentobligation qu’à luy seul et luy en rendent les grâces qu’ils doibvent. Je ne doubte point Monseigneurque le bruict commun ne vous ait porté ce qui s’est passé audit Riés à quoy aulcun et mesme quasitous ceux qui y estoient imputent trahison, d’aultres y croyent seulement de l’improividence /2/ auxchefs qui bien difficilement s’en peuvent excuser.

Je vous ay cy-devant escript, Monseigneur, l’arrivée de M. de Soubize à Lusson, son partementde là pour son logement aux Essars d’où il partit pressé pour sçavoir Sa Majesté près de luy et hasta leplus qu’il luy fut possible son voyage audit Rié où il se présenta le mardi douziesme du courant, maisnon plus tost que M. du Bois de Kergrois137 avec quelques trouppes de cavalerie et infanterie que leRoy luy avoit commencé de conduire et se jetter dans ladite isle de Rié fut sommé. On y reffusel’entrée à M. de Soubize qui fit donner l’assault et emporta l’isle, mais sans moyen de retenir lessoldats qui aussi tost se jettèrent au pillage en toute l’estendue de l’isle qui dit-on contient sept lieuesou environ. Après il falut combattre ledit Sr. du Bois de Kergrois, qui avoit entré par une autre desadvenues de l’isle, cependant qu’en l’isle on s’employe la temps à ramasser et rallier les soldats SaMajesté arrive mais n’entre point dans l’isle où le jeudy quatorziemse MM. d’Esplan et Marillacvirent M. de Soubize auquel ils parloient en public et l’exhortoient de n’attendre point les forces etpuissance de Sa Majesté qu’ils avoient sur les bras, mais de recercher leur salut en sa bonté sansl’espérer de leur résistance qui ne pouroit estre que très foible contre une si belle armée et plusieursautres discours que Vostre Excellence jugera convenables en telle matière. Il parle aussi en particulierà M. de Soubize où dit-on se tenoit là MM. de Bessaye et Freton.

Cepandant Sa Majesté se tenoit là sans en aulcune sorte temoigner de vouloir entrer en l’isle lestenant enfermé et à sa mercy s’ils en eussent sorti cela durant quelque temps que ceux de l’isles’employoient à former les advenues ce qu’ils taschèrent de faire mais non jamais de>>>>, Surquoyon tint conseil si on cappituleroit, si on se retrancheroit ou si lorsque le mer seroit basse on seretiretoit à gué, le dernier fut pris et suivy. De sorte que la nuict du vendredy au sabmedy qui estoit du15e au 16e chacun se mit en état de partir et de faict la cavalerie passa à que et partie de l’infanteriejusques à la /3/ gorge, le mousquet et la bandolière sur la teste. Il y avoit quelques petites barquesrestées sur la vase ou la pluspart de l’infanterie se jetta espérant se sauver par la mer lorsque la maréeretourneroit, mais on croit que cela aura esté taillé en pièces. Quant à ce qui passa on avoit donnérendés-vous aux officiers de l’armée pour se trouver à La Chaize-Le-Vicomte, mais comme ilsmarchoient Monsieur de Soubize à la teste, un de la file s’endormit et au lieu de suivre son cheval lemena par un autre chemin où après luy ce qui suivoit, ce qui ne fut recogneu que long temps après lamesprise. On cerche des guides, on n’en trouve point, au jour chacun disoit sçavoir les chemins desorte que ce qui restoit se sépara en six ou sept bandes dont la plus part tirent à La Chaize, où on netrouve rien de là à Bourgnesau où on devoit aussi avoir des nouvelles de leur général, on ne l’y trouvenon plus. Enfin on crie qu’on se sépare et sauve qui peut. Voyla tout en route, M. de Soubize estoit

136 Le 16 avril 1622, Louis XIII a la tête de son armée a dispersé celle de Benjamin de Soubise retranchée dans l’île de Riez.Cette île a été reliée au continent au XVIIIe siècle lorsque furent asséchés les marais et que le cours du Ligneron fut détournépour en faire artificiellement un affluent de la Vie.137 Louis d’Avaugour (1574-1640), sieur du Bois de Kergrois dans la paroisse de Carquefou, avait été au début duXVIIe siècle une des figures marquantes de l’Eglise de Nantes jusqu’à la rébellion des fermes du parti protestant contrel’autorité royale. Les baptêmes de deux de ses enfants à Saint-Léonard de Nantes en 1621 et 1623 témoignent de sonralliement à la Religion du Roi. Yves SAGET, « Les Avaugour de Kergrois, seigneurs de Mauves, de Saffré et du Bois enCarquefou » (1514-1758), Cahiers du Centre de Généalogie Protestante, N° 87, Troisième trimestre 2004, p. 139-149.

Page 77: Années 1618-1623

77

suivi de six ou sept vingts chevaux. Il a passé, mais seulement avec six en la forest de Chizé jusquesoù il a esté poursuivi et s’est scelon l’apparence retiré vers La Rochelle.

Le reste a esté pris et dévalizé, tout la bagage perdu, les chemins et les prisons sont pleines degenset ce qui a eschappé a esté mis en chemise. C’est la plus grande grâce qu’ils ayent receu. C’est laplus grande et estrange desroulte qu’on puisse imaginer, car elle est universelle, mais à ce que nousnous apprenons moins sanglante d’aultant que les communes et les paisans se contantent de prendreles fuyards ou de les dévaliser. De demander la raison pourquoy lorsqu’il sceurent certainement queSa Majesté approchoit ils ne se retirèrent de Lusson en Aunix par les marais, ils respondent que deLa Rochelle on manda à M. de Soubize qu’il n’y esparast point de retraitte s’il n’y portoit du pain,qu’on n’en avoit point pour ses trouppes. Cependant on ne peut estre de l’esprit de tout ce qui estoit làhormis des chefs, qu’ils n’ayent esté trahis et livrés et que cela n’ai esté concerté.

Sa Majesté coucha hier à Fontenay /4/ et le Reyne sa mère à St-Hermine. On attend quelqu’unde vostre part à la Cour Monseigneur pour se joindre aux desputés des Eglises pour demander en leurnom la paix à Sa Majesté. Ceste négotiation sera bientost liée, mais cela ne durera que peu et lesdepputés ne verront point Sa Majesté qu’après que les choses seront accordées. M. de Pontaubray esttousjours à la Cour avec promesse de Monseigneur la Prince d’estre favorablement expédié etcommandement de M. de Schomberg de suivre. Il en fault attendre le succès.

Si Millières ne trompe à l’accoustumée, on sortira aujourd’huy d’avec luy en luy payant douzecens livres contant et luy donnant mon obligation du reste, qui pourra monter environ deux mil huictcens livres payables le tout dedans deux ans. Sçavoir la moitié d’icy à un an et le reste d’icy à deux.Tout présentement le Sr. Malherbe de Paris m’escript que Doisseau ne veult tenir la parole qu’il adonnée à M. de Rozemont de s’accommoder. Ce mauvais affaire et toutes sortes de malheurs tant parles malices du principal auteur qui est Milliers que par ces cessionnaires. Il ne s’est rien passéd’ailleurs en vos affaires Monseigneur aux quelles je m’employeray tousjours avec le soing et fidélitéque je doibs.

J’obmettoy que l’armée de Sa Majesté ne suivit point celle que conduisit Mondit Sieur deSoubize à cause dit-on qu’elle ne pouvoit passer que par l’endroit ou celle-cy avoit passé à gué ce quel’autre ne peut à cause de la marée qui monta. Aultres disent qu’il fut faict un ban de ne tuer personne,mais cela n’est pas bien certain. M. de Chastillon doibt aussi envoyer un desputé à la Cour. VoylaMonseigneur ce que j’ay maintenant de sorte qu’il ne me reste qu’à vous supplier très-humblement dem’honorer de la qualité,

Monseigneur de,

Vostre très-humble, très-fidèle et trèsobéissant serviteur. d’Iray

A Thouars, le 23e apvril 1622.

Archives nationales 1 AP 357/75

15 mai 1622 - Taillebourg

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Je n’ay point esté en lieu depuis quinze jours où je pusse vous escrire aussi n’avois rien de bon.Je suis tousjours allé et venu par le commandement de Madame vostre mère des lieux ou elle aséjourné à la Cour et retourné aux accasions. Monsieur d’Auvilliers en a veu une partie et des peinesque Madame vostre mère a prises en ce mauvais rencontre.

J’ay receu le 13e de ce mois celle qu’il a pleu à V. E. m’escrire du 19e du passé et veu celle quevous escrivés à madite Dame à laquelle vous me remettés l’occasion de vostre despesche cessemaintenant comme depuis la datte de vos lettres vous aurés peu apprendre par le retour de M. deBullion et de ceux qui l’assistoient le subject qui a mené Madame vostre mère en Cour n’est pasignoré de vous Monseigneur ledit Sr. d’Auvillier vous en dira la suitte et ce qui s’y est passé. Je luy aydict tout ce que j’ay seu plus que luy pour vous le rapporter je le remettray à luy s’il vous plaist

Page 78: Années 1618-1623

78

Monseigneur pour ne vous estre ennuyeux et aussi de peur de retarder plus long temps son partement.Il seroit inutile de vous dire mon extrême affliction sur ce changement de Taillebourg. Dieu sçait si jeme suis espargné à tascher à vous y rendre le service très-humble et fidèle que je doibs. Madame y atravaillé au delà de ses forces. Je prie Dieu qu’il vous comble de ses saintes bénédictions et me dointd’estre recognu de vous toute ma vie,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-fidèle ettrès-obéissant serviteur. d’Iray

A Taillebourg, le 15e may 1622.

Archives nationales 1 AP 357/76

8 juin 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Depuis nos dernières Madame vostre mère a receu des lettres de M. de Pontaubray qui n’escriptrien de nouveau touchant le public, seulement confirme il le traitté de M. de La Force etl’acheminement de M. de Vendosme avec six mil hommes pour blocquer Montauban. Monseigneur lePrince est près de Sa Majesté qui dès le 26e du passé estoit sur le chemin droict de Thoulouse autresdisent depuis qu’elle passera par Foix. De traitté général on n’en parle point, mais le bruict desparticuliers continuent. Toutesfois nous n’en sçavons rien au vray.

Ledict Sr. de Pontaubray escript que MM. de La Forest, de Rignac et luy sont allés ensemble àla Cour que le premier a esté bien veu et bien receu de Sa Majesté. Il y a eu une recommandationquasi générale de tous les voisins de toutes qualités tant d’une que d’autre religion pour ses bonscomportements. On n’a rien changé en sa place sinon qu’on a retranché cinquante hommes de saguarnison on met aultant icy. Ledit Sr. de Pontaubré en a la commission et l’estat, et lors qu’ilescrivoit qui estoit le 28e du passé il avoit ordonnance de payement pour un mois et demy seulementet en poursuivoit l’assignation mais le remboursement des advances de Taillebourg est remis à Parispar Monsieur de Schomberg qui en escript à Madame vostre mère pour l’en asseurer et M. dePontaubré en a les lettres. Le Roy a faict bonne chère à Monsieur de Duras138 et luy a osté laguarnison qui l’incommodoit. M. de Schomberg escript à M. du Candal qu’il paye ce qui /2/ est deubà Vostre Excellence pour l’entretenement des guarnisons. La cavalerie arrive à la file aux environs deLa Rochelle aulcuns disent qu’il y est arrivé quelques gens d’Angleterre. On ne dict pointasseurément où est à présent M. de Soubize. Un gentilhomme venu de la Cour pour haster M. deLuxembourg a dict à Madame vostre mère que l’Ambassadeur d’Angleterre a esté à La Rochelle ets’en retourne à la Cour, mais c’est dont elle n’a ouy parler qu’à luy, et M. du Plessis n’en a rien apprisnon plus.

Mondit Sr. de Luxembourg et Messieurs les comtes de Lude et de Torigny doibventaujourd’huy passer par icy pour aller à la Cour. Madite Dame a envoyé son carosse au premier quil’en a envoyé supplier. La Royne mère avoit advancé quelques journées sur le chemin du Roy, maiselle a rebroussé et debvoit arriver hier à Poictiers où elle fera fort peu de séjour et de là prendra lechemin de Pougues.

Le Prévost de ce lieu fut hier pris prisonnier en sa maison à la requeste du Sr. du Sauvage qu’ilavoit mis en prison sabmedy dernier, qu’il le trouva à deux lieues d’icy près du village de Coullongeet en l’abordant luy assisté de ses archers luy porta le pistolet à la teste qui a ce que dist l’autremanqua et luy donna de la bouche dudit pistolet dedans la joue où il le blessa et encore l’amenaprisonnier. Le Sauvage demanda qui estoit sa partie. Il ne s’en trouva point, le procureur du Roy ayantdéclaré n’avoir faict aulcun réquisition contre luy, ny point sçavoir qu’il y eust d’information ny

138 Jacques de Durfort (1547-1626), marquis de Duras, seigneur de Blanquefort et de Rauzan, l’un des principaux seigneurshuguenots de Guyenne comme les La Trémoille avait refusé de s’engager dans la rebellion contre Louis XIII. YvesDURAND, La Maison de Durfort à l’Epoque moderne, Imprimerie Lussaud, Fontenay-Le-Comte, 1975.

Page 79: Années 1618-1623

79

mesme de plainte, cepandant il l’écroüa l’accusant d’avoir donné advis à quelques personnes sur qui ilavoit des décret, recellé et assistés ou conduict les rebellles, que d’ailleurs il avoit envoyé un procès-verbal au conseil contre le Sauvage et autres sur lequel estoit intervenu arrest. Cepandant les amis decelluy-cy se /3/ pourvoyent au Présidial de Poictou obtiennent jussion au geollier d’ouvrir les portesde la prison aultrement et en cas de refus ordonnent qu’elles seront rompues pour en extraire leprisonnier en présence d’un de vos juges Monseigneur ou de deux notaires. M. le Séneschal s’y esttrouvé, M. le lieutenant estant audict Poictiers pour vos affaires et en présence de celluy-là les portesdes prisons furent hier rompues et le prisonnier extraict sans qu’il y fust apporté aulcunempeschement de la part dudit provost qui ne parut point se doubtant du décret que ledit Sr. duSauvage avoit obtenu du présidial, lequel depuis à l’après fut mis en exécution. Il fut donc pris et est àprésent conduict à Poictiers par le sergent qui l’a pris et quelques amis du Sauvage, assistés de ceuxque Madame vostre mère leur avoit donné pour leur tenir main forte voyla les fruicts de laprésomption et ce qui suit d’ordinaire ceux qui s’oublient du respect et s’esguarent de leur debvoir.

Je respon Monseigneur à celles que M. de Rozemont m’a escript par vostre commandement,Madame vostre mère a faict tenir à M. de La Motte celle que vous luy aviés envoyée non par hommeexprès, mais par voye aussi prompte. Elle a receu des lettres de M. Berthold par lesquelles elleapprend que Monseigneur le Comte est avec Monseigneur le prince Henry, qu’il se porte bien. Dieuveuille qu’ainsi soit de vostre disposition de Madame et Monseigneur le Prince. Nous attendons devos nouvelles et moy vos commandemens sur la provision de la charge de Lieutenant général àLaval139 auxquels je rendray en action les autres dont vous m’honorerés l’entière et parfaicteobéissance que doibt,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le 8e juin 1622.

Archives nationales 1 AP 357/77

14 juin 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

J’escrivi le huictiesme à Vostre Excellence ce que nous avions et sçavions, depuis il ne nous estpas venu grand’nouvelles. M. de Pontaubré n’en a […] point mandé en une lettre que Madame vostremère a receu depuis. Elle est du 7e de Moissac140 près Montauban. Sa Majesté y estoit et avoit envoyésommer St-Anthoni141 de se rendre par un des enfans de M. de La Force, qui y fut retenu, cela fit quele Roy commandé qu’on y fist advancer les trouppes avec menace à ce qu’on dict de tout mettre à feuet à sang si ils résistent.

Ledict Sr. de Pontaubré debvoit suivre jusques à St-Anthoni ou Thoulouse pour faire scellerl’arrest de restablissement de l’Election de ce lieu. Il se plainct qu’on ne faict aulcune affaire à maCour, que celles de la guerre sont seules sur le tapis. On a entièrement ruiné Tonneins et le feuparachève le reste des ruines. On parle aussi de Clairac de mesme que les habitans de Négrepelisse etMonflanquin où par désespoir faict ainsi de leurs villes, M. de La Force, avec deux de ses fils, a veule Roy et s’est retiré à ce qu’on dit pour réduire aulcuns de ses enfants a l’obéissance. On ne sçaitpoint au vray si Sa Majesté s’engagera à Montauban. La plus part croit que non, mais tirera droict auBas Languedoc pour leur oster la récolte et sur l’espérance que quelques gouverneurs traitteront. M.

139 La justice ordinaire de Laval appartenait au comte. Elle était exercée par un juge ordinaire, un lieutenant général, unlieutenant particulier, un avocat et un procureur fiscal. Alain CROIX (Coordination), La Bretagne d’après l’Itinéraire deMonsieur Dubuisson-Aubenay suivi du Profit de la Bretagne par Jean-Baptiste Babin (1663), Presses Universitaires deRennes – Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, Rennes, 2006, p. 881-882. L’Abbé Angot n’identifie pas cepersonnage.140 Moissac au nord-ouest de Montauban.141 Saint-Antonin-Noble-Val au nord-est de Montauban.

Page 80: Années 1618-1623

80

de Chastillon […] en armes descouvertes contre M. de Rohan y a pris la […] /2/ l’abbé après centvolées de canon et s’en alloit attaquer celle de Pequés pour se rendre maistre des salines. On dict queM. le maréchal de Lesdiguières devoit s’aboucher avec M. le prince de Piedmont au fort de Barroz etque M. de Sully rentre aux finances pour les administrer soubs Monseigneur le Prince en lui remettantce qu’il luy doibt de Mourront et laissant la charge de l’Artillerie à M. le comte de Schomberg. Nousn’apprenons rien de ce qui se passe devant La Rochelle ny mesmes où Monsieur le Comte est. Onparle encore de quelques Anglois arrivés, mais de cela rien de certain.

Voylà Monseigneur ce que j’ay peu receuillir de diverses endroicts. On ne dict rien du tout àPoictiers et aussi a on peu de nouvelles de la Cour à cause de la difficulté et danger des chemins, qui,à ce que rapportent ceux qui ont peu s’eschapper sont bordés de corps morts. Le prévost de ce lieu estencore prisonnier à Poictiers. Il ne veut point respondre devant le président, mais prend à partie M. lelieutenant criminel.

J’obmettois à vous escrire, Monseigneur, que ledit Sr. de Pontaubré escript qu’il a une lettre duRoy aux habitans de ce lieu par laquelle S. M. leur ordonne d’obéir aux commandemens de Madamevostre mère, laquelle n’est pas en santé telle qu’il seroit à désirer. Elle vous a escript par la voy dePoictiers, mais le jour mesme qu’elle vous escrivit, et depuis elle a tousjours esté malade.Madamoiselle a faict venir M. d’Issoddeau. Les maux publics qui percent les cœurs de tous les gensde bien sont le principal subject de sa tristesse, et la tristesse à mon advis la cause de son mal. Dieuluy veuille oster, luy redonner sa santé première, vous conserve la vie celle de Madame et deMonseigneur le Prince, vous donne tousjours toutes sortes de contentemens et à moy de moyens detesmoigner avec quelle affection et fidélité je suis,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le 14e juin 1622.

Archives nationales 1 AP 357/78

29 juin 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

J’ay receu par le Sr. Peussier celle que vous m’avés faict l’honneur de m’escrire du 7e ducourant, en laquelle vous me donné vos commandemens d’obéir à ceux de Madame vostre mère, àquoy je ne manqueray d’aucun respect, humilité ny affection et me faites entendre vostre intention etvolonté de donner contentement à Madame de Ste-Croix en conférant une pention de Religieux àPierre Bouin en l’abbaye de St-Laon de ce lieu. Sur quoy Monseigneur vous aurés à présent appris lecommandement que madite Dame vostre mère m’a cy-devant faict d’en escrire au Sr. de Rozemont etluy mander pour les faire entendre à Vostre Excellence les difficultés qui se rencontrent et dont j’aydesja escript à madite dame de Ste-Croix par mesme commandemens et l’affaire qui maintenant estpoursuivie par ledit Bouin et deffendue par Moreau héritier et se prétendant en cette part successeurde feu Moreau son oncle. Vous aurés aussi veu Monseigneur la consultation faicte sur ce subject quej’ay envoyée audit Sr. de Rozemont.

J’attendray vos commandemens pour y obéir en tout. Quant au commandement que vous mefaictes Monseigneur de sçavoir de ma dite dame si elle ne trouveroit pas à propos d’avoir un titulaireabbé de ladite abbaye de St-Laon, je n’ay peu ny osé depuis la réception de la vostre luy parlerd’affaire. Sa maladie nous en ostant le moyen aussi bien qu’à elle de les entendre. C’est ce que luyrecommandent principalement les médecins et de ne point en charger son esprit, et ce qu’ils nousdesfendent bien soigneusement. Sa maladie dure plus que nous estimions, mais la fiebvre qui aucommencement sembloit plus lente et ne duroit que peu s’est opiniastrée en sorte qu’à présent lesaccès sont plus longs et recognoissons que c’est une fiebvre double tierce à sçavoir un jour bon etdeux mauvais, mais, Dieu aydant, elle la laissera bientost scelon le jugement des médecins et nosdésirs passionnés, tousjours y a t-il en cette maladie grandement à plaindre les douleurs qu’elle

Page 81: Années 1618-1623

81

souffre, mais non rien à craindre que la longeur au pis. Elle n’est pas par la grâce de Dieu travailléedes grandes douleurs /2/ qu’elle ressentoit à Paris durant sa grande maladie, celle-cy la traitte plusdoucement. Bien et vray qu’au commencement et mesme depuis elle eu de grandes et assés fréquentesfoiblesses, mais à présent j’apprens qu’elle n’est pas tant travaillée. Les maux publics l’affligentextrêmement et de vray ils fendent les cœurs aux gens de bien.

Monsieur de Pontaubré à son arrivée nous avoit promis un mémoire de ce qu’il avoit departiculier de son voyage, mais il est parti pour aller à Bourgneseau sans nous donner l’effet de sapromesse, et ainsi faulte de souvenir il nous prive du moyen de nous informer des particularités de cequi s’est passé à Negrepelisse dont toutesfois Madamoiselle envoye un mémoire, mais bien en gros enattendant que par le retour dudit Sr. de Pontaubray nous puissions estre mieux informés car il a fortpeu séjourné icy et encore avons nous eu moins de loisir de l’entretenir.

J’ay pourtant appris de luy et depuis veu par les lettres et états que Madame vostre mère m’afaict l’honneur de me communiquer qu’il a apporté un estat de cinquante hommes que le Roy aordonné d’estre enttretenus en ce lieu en qualité de guarnison nouvelle soubs l’auctorité de maditeDame commandés par… . Le nom est en blanc de sorte qu’elle y establira celuy qu’il luy plaira. Je nevous envoye point Monseigneur coppie dudit estat d’aultant qu’il est semblable à tous les autres maisbien de l’assignation donnée pour un mois pour l’entretenement de ladite guarnison et d’un mois etdemy pour cent hommes qui ont tenu guarnison à Taillebourg. Je vous envoye aussi Monseigneur lescoppies d’une lettre escripte par Sa Majesté aux habitans de ce lieu, d’une de Monsieur de Schombergà madite Dame vostre mère, d’une de mondit Sr. de Schomberg à M. du Candal pour vous payer cequi est deub de l’année dernière à cause des guarnisons de Taillebourg et Vitré.

Par là Monseigneur vous verrés que ledit Sr. de Pontaubré a peu faire et de vray est-ilgrandement difficile de beaucoup advancer aux affaires particulières, que personne n’a plusd’expédition. Il m’a dict qu’en recevant les commandemens de Monseigneur le Prince lors qu’il partit,il luy demanda si madite dame n’avoit pas en crainte que le Roy se voulust accommoder de vostremaison de Taillebourg, qu’il avoit appris qu’elle en avoit eu quelque opinion, mais que ny elle nyvous ne debviés rien appréhender de cela et qu’il engagoit son honneur que le lendemain de la paixvos maisons seroient rendues et de cela donnoit de telles asseurances de bouche qu’il eust volontiersimputé à crime d’en doubter. Il n’y avoit personne à la Cour de la part de Monsieur de Lesdiguière.

On ne sçavoit point le dessein du Roy après le siège de St-Anthoni, s’il tireroit à Castres ou àMontpellier. M. de Chastillon envoya Villefort pour supplier /3/ qu’on se souvint de luy pour luycontinuer le gouvernement du dernier. On luy promist, mais non à ce qu’on dict de l’avoir en qualitéde ville de sûreté. On disoit M. de Rohan assés fort aux Sévenes. Ledit Sr. de Pontaubré rapporte quele Roy eut advis à son arrivée à Moissac que six jours avant il avoit entré quatre mil hommes àMontauban et plus de deux mil qui y estoient desjà et que la ville estoit très bien munie de tout. Il ditqu’à son partement il apprist que les forces de Sa Majesté estoient de près de trente mil hommes.

Il passe tous les jours des trouppes qui se vont rendre à l’armée de Monseigneur le comte deSoissons qui est à présent à La Jarriée. Vers le six ou 7e du courant arrivèrent dix gualères à Royan,mais elles ne firent que mouiller l’ancre et tirèrent à Bordeaux, où on a creu ici que le Roy estoit venuen poste, mais ce bruict ne continue pas, et au contraire qu’il n’a pas quitté son siège de St-Anthonilequel nous n’apprenons point encore certainement rendu. Un passant passant qui venoit de l’arméede Sa Majesté nous dict que le bruict estoit que Sadite Majesté pourroit prendre la route de Millau enRouergue, mais cela est fort incertain.

M. de La Forest avoit faict demander un passeport pour venir en Poictou en sa maison avec safamille pour se divertir un peu et esloigner sa veüe de tant d’horribles spectacles. Il ne l’a pas obtenupour luy mais bien pour Madame sa femme. J’appren de La Forest-sur-Saivre que pour certainLescure a eu la teste tranchée à Bordeaux et ses despesches bruslées par arrest. On tient que M. deLa Noüe142 est rentré dans La Rochelle et depuis pris quelques deniers qu’on menoit à Monseigneur leComte, pour le moins aulcuns disent XLV

M .

142 Claude de La Nous, seigneur de Montreuil-Bonnin, fils d’Odet de La Noue.

Page 82: Années 1618-1623

82

Je vous rens très humbles grâces Monseigneur de l’honneur que vous me faictes de m’entretenirdu traitté que vous avés faict avec le Sr. du Marais pour l’office de lieutenant général en vostre comtéde Laval143, et ne faudray à informer Madite Dame vostre mère lorsque nous pourrons luy parlerd’affaires de vostre intention touchant vostre géole et conciergerie dudit lieu ainsi que vous me lecommandés affin qu’on n’y presse rien. Depuis sa maladie, il ne nous est rien arrivé d’extraordinaireen vos affaires. Les fromemnables de ce duché n’ont point diminué par la malice du temps, maisaugmenté de quelque chose contre oppinion et apparence. J’y ay assité aux baux comme je fay à toutce qui importe en quelque sorte vostre service. Sans mentir la longue maladie de madame vostre mèrenous trouble, non Monseigneur que vous ny Madame ny ses amis ayés rien à craindre de la suitte siDieu n’envoye de bien fascheux accidens, mais elle est fort foible et changée. Madame de Schelandrea promis de faire les observations pour les jours de sa maladie et les escrire à Sedan, à quoy jem’asseure elle satsifera.

Le prévost de ce lieu est tousjours prisonnier à Poictiers où le présidial l’a tenu jusques àprésent. Il a eu recours au conseil pour obtenir une jussion et estre mendé /4/ à Paris, cependant ontravailloit à ouïr des tesmoins pour juger le procès.

J’obmettois à vous dire Monseigneur que madite Dame vostre mère n’a point voulu encore fairevoir l’estat de la guarnison nouvelle et que le marquis de Maloze est dedans Montauban.Madamoiselle envoye à M. de Schomberg. Le Sr. de La Chesnaye, le cadet, va maintenant à la messe,comme faict le Sr. Arnaud le cappitaine et assés d’autres de cette sorte. Vous verrés, Monseigneur,par un mémoire faict par M. d’Issodeau et signé de luy et de M. Brusse l’estat de la maladie de maditedame jusques à ce jour. Dieu luy redonne bien tost sa santé, vous augmente la vostre, celle deMadame et de Monseigneur le prince et me faire la grâce d’estre tousjours recognu de vous,

Monseigneur, par

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A vostre Thouars, le 29 juin 1622.

Archives nationales 1 AP 357/79

2 novembre 1622 – Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Le jour mesme que partit de ce lieu Verdelet, arriva sur le soir une lettre du Sr. NicolasLe Prince144 de le somme de quinze cens livres payable à huict jours de veüe à Paris par le Sr. Le Brunà moy ou à mon ordre vous m’avés donné celuy de l’addresser à Monsieur de Netz et pour obéir àvostre commandement Monseigneur je luy envoye ladite lettre de change avec une lettre d’avis etdeux de moy, l’une pour luy et l’autre pour ledit Sr. Le Brun, lequel je supplie de faire bon payementde ladite somme audit Sr. de Netz en mon absence et pour oster toute occasion de double et difficultéque pourroit trouver un mauvais payeur sur ce qu’il pourroit dire, ne recognoistre point monescripture pour estre privée j’envoye ma procuration audit Sr. de Netz pour recevoir ladite somme, endonner argent ou acquists et à faulte de parent faire faire toutes significations et sommationsnécessaires et tout cela de peur que de ce qui deppend de moy vostre service ne soit retardé d’un seulmoment.

Le mesme jour arriva aussi Monseigneur à Madame vostre mère un gentilhomme appellé M. deLa Vionnière, cy-devant intendant des affaires de feüe Madame la duchesse d’Auville, avec lettres etcréances de la part Monsieur le duc de Rouannois145. Madite dame vostre mère me commande de vous

143 Dans sa lettre du 6 juin 1622 à sa mère Henri de La Trémoille annonce à celle-ci qu’il a traité pour cette charge avecPierre Marest, fils de Jean Marest, sieur de La Tremblaie. Archives nationales, 1 AP 393/113.144 Nicolas Le Prince était un marchand flamand protestant qui vécut à Saumur entre 1610 date du baptême du premier enfantné en cette ville de son mariage avec Angélique Baus et 1631 année de son décès.145 Louis Gouffier (1575-1642), duc de Roannez ou de Rouannois, seigneur d’Oiron.

Page 83: Années 1618-1623

83

envoye coppie de ladite lettre qui sera cy-incluses et sa créance estoit de la supplier très-humblementde la part de mondit Sr. de Rouannois de luy dire qu’elle grattiffication /2/ il devoit attendre pour lesrachapts qui vous estoient avenus par le décès de feüe Madame sa tante et ce qu’elle ou vous auriésagréable de luy remettre soit le tiers ou la moitié affin qu’après que madite Dame et luy se seroientenquis de la juste valeur des terres, et sçachant sur cela ce qu’il auroit à fournir la grattifficationdesduiste. Il le fist tenir prest à jour dit, et empescher qu’aulcuns créanciers ne l’arrestassent. Qu’illaisseroit homme au païs qui recevroit les commandemens de Madame vostre mère durant qu’il feroitun voyage à Paris où il voudroit pouvoir servir avec toutes sortes d’honneurs et complimensquej’obmetz. Surquoy madicte Dame luy fit dire qu’elle vous en escriproit, Monseigneur, pour apprendrevostre intention là dessus. Elle m’a présentement faict l’honneur de me dire qu’elle vous en touchoitquelque chose, mais qu’elle le remettoit à ce que je vous en escrirois comme l’en ayant entenduparler, de sorte qu’elle estime qu’il seroit à propos que Vostre Excellent luy fist responce sur cesubject qui […] peust faire voir affin qu’en cette occasion ou mondit Sr. de Rouanois supplie etrequiert montant ce semble pour la valeur de la grattiffication qu’il espère estant à présent très riche etaccommodé que pour s’approcher honnestement il y fut d’aultant plus convié par vostre lettre àMadite dame vostre mère en laquelle vous feriés voir et cognoistre vostre volonté sur cela en disant lagrattiffication qu’il vous plaist faire à présent ou la remettre à madicte Dame ou en quelque sorte à luymesme, à ce que je puis apprendre les deux terres qui despandent d’icy ne sont pas de grande valeur,celle qui dépend de Thalmond est meilleure. Il a tesmoigné à madite Dame beaucoup d’affection et desoing avant, durant et depuis sa maladie et à présent ce moyen semble arriver à propos pour l’obligerpuisqu’il requiert ainsi ce qu’il ne fit pas après le décès de desfuncte Madame de La Rochepot146, caril enjoignit à ses fermiers de payer entièrement ce qu’ils debvoient /3-81/ dont il vous peut souvenir.Vous en ferés scelon vostre prudence.

Monsieur de Plessis-Bellay a présenté à Madame vostre mère compte portant ses advances qu’ila faictes à l’entretenement de la guarnison de Taillebourg depuis que vous arrestates ce qui luy estoitdeub durant le séjour que V. E. fit audit Taillebourg jusques an temps qu’il en fut sorti sans ycomprendre le mois dont il fut payé du Roy et les deniers que sur icelles il a receus ou des vantes deBrisambourg soubs vostre procuration ou d’ailleurs par vostre commandement. Il a aussi employé enson compte en en despense la somme de douze cens livres pour deux ans de vostre estat degouverneur dudit Taillebourg dont il n’a rien receu sur vos blancs, lesquels il a rendus. Il employoitaussi la somme d’onze cens tant de livres pour pareil temps de deux ans de l’ancien estat de septsoldats entretenus audit Taillebourg dont aussi il n’a receu aulcune chose ainsi qu’il a faict voir parles sommations faictes aux trésoriers parroiciaux, mais madicte Dame a mis cet article en sursianceattendant de sçavoir vostre intention d’aultant que les comptes précédens par luy rendus n’ont donnéaulcune lumière ; telle n’étant point arrivée cy-devant.

Celuy que Madame vostre mère avoit envoyé en Bretagne vers MM. de La Mothe et des Hayerspour les haster est de retour. Il rapporte de bouche que nous aurons icy l’un et l’autre cette sepmaineet une lettre dudit Sr. de La Mothe à madite Dame qu’il sera icy dedans trois ou quatre jours et à moyqu’il ne m’escript rien remettant toutes choses à la vive voix. Je croy qu’ils apporteront de l’argent ouauront ordre pour en faire tenir à Paris, Madame le commandoit ainsi au Sr. des Hayers. Je nemanqueray Monseigneur à vous informer de ce qui se passera en leur voyage.

Madite Dame continue à toutes occasions d’escrire à Paris pour vos affaires dont elle a un trèsgrand soing, mais vous en avés assés de cognoissance. Il ne s’est rien passé de deçà en vos affairesd’ailleurs qui mérite de vous /4/ occuper en sa lecture des publiques nous n’en avons rien que de Parisd’où vous avés plustost et plus souvent des nouvelles que nous chacun en escript la paix ; et dePoictiers on dict la memes chose mais non quelle paix si générale ou pour le Languedoc seulement nyà quelles conditions. Dieu la veuille donner bonne par sa grâce et remettre tout en repos.

Il y a deux jours que M. de Beauvois, gouverneur de Montreuil-Bellay, passa par icy et fist voirà Madamoiselle une lettre d’un sien amy, laquelle il avoit receüe à Marans d’où il venoit, par laquelleon luy mandoit que jeudy et vendredy il y avoit eu un grand combat sur la mer près de Ré, auquel

146 Jeanne de Cossé, mère du précédent, veuve en premières noces de Gilbert Gouffier, duc de Roannez, épouse en secondesnoces d’Antoine de Silly, comte de La Rochepot.

Page 84: Années 1618-1623

84

Messieur de Guise et de La Rochefoucault, qui estoient dans un vaisseau appellé Nostre Dame, furentattaqués par le vice-amiral des Rochelois appellé Marquin et les autres vaisseaux tant d’une part qued’autre faisans bon debvoir de combattre que six vaisseaux des Rochelois furent calés à fort et autresbruslés d’un et d’autre costé ledit Marquin pris prisonnier par mondit Sr. de Guise, qui quitta sesarmes pour prendre une p[…] avec cinquante autres de La Rochelle et que de l’autre part […]personnes de marque. M. de Viceguerre qui avoit un des premiers commandement soubz M. de Guiseavoit esté tué et aussi M. le chevalier de Tenie aultrement commandant de Villegua qui commandoitdedans Thalmond. Voyla à plus près la teneur de la lettre ainsi que je l’ay appris par ceux qui l’ontentendu lire. Si j’eusse peu voir ledit Sr. de Beauvois je luy eusse demandé coppie pour vousl’anvoyer.

D’ailleurs le séneschal de Bournezeau arriva hier de sa […] qui dit qu’on ne s’est point encorebattu et qu’un courrier passa vendredy qui tiroit vers Nantes pour dire à M. de Guise que la paix estoitfaicte. Tousjours est-il très vray que jeudy et vendredy vers Fontenay, Niort et aux environs on ouïtcontinuellement un bruict de canonades. Vous estes au lieu Monseigneur où vous pouvés prendre desbons et salutaires advis pour les procédures dont vous userés sur cette nouvelle de paix si elle estvéritable et les […] que vous tiendrés pour remémorés à Sa Majesté les promesses qu’elle /5-82/ vousa faictes pour la restitution de vos places dont et particulièrement pour Taillebourg. Elle donna paroleà Madame vostre mère au camp devant Royan et à vous de Vitré lorsque vous estiés près de SaMajesté et la suivite jusques à Barbesieux.

Je ne sçay si Monseigneur le Prince qu’on dit estre parti pour aller à Lorette147 n’aura point enmémoire avant son partement des promesses avec serment qu’il fit à M. de La Bauge et depuis à M.de Pontaubray qu’incontinent qu’il verroit les affaires accommodées il vous feroit rendre vos maisonssans délay.

Je croy que Madame vostre mère vous escript son sentiment sur ce subject. Si je sçavois lesconditions et circonstances particulières du traitté, je prendrois la hardiesse de vous dire le mien, maisen tout cas sçay-je que vous recognoissés très-bien combien cela vous est important, et que vousjugerés assés que lorsque le temps sera propre pour en faire les demandes on ne doibt le laisserécrouler, mais encore en reviens je à ce point que vous estes à la source des bons et sages conseils. Icytout va à l’ordinaire en repos Dieu mercy et vous et le soing de Madame vostre mère. Et cetteprovince a depuis longtemps demeuré bien tranquille. Madame vostre mère et Mademoiselle sont entrès bonne santé, Dieu mercy, que je prie pour la conservation et augmentation de la vie de Madame,de Monseigneur le prince et de tous les vostres et qu’il vous face recevoir les advantages que vousmérités scelon les souhaits,

Monseigneur, de

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Thouars, le 2 novembre 1622.

Archives nationales 1 AP 357/80, 81 et 82

7 novembre 1622 - Thouars

à Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Cette voye est grandement pressée pour moy qui ne la sçay que peu avant le partement duporteur cepandant puisque vous m’avés commandé de n’en laisser passer, je vous diray que depuisquatre jours M. de La Motte est en ce lieu d’où il doibt partir demain pour retourner chez luy. Il nousdonnoit espérance de venir par l’homme que Madame vostre mère luy avoit envoyé. Elle luy acommandé de dresser les estats du revenu et employ diceluy de vos terres de Bretagne et des ventes

147 A la suite des erreurs stratégiques répétées du prince de Condé lors du siége de Saint-Antonin et devant Montpellier,Louis XIII avait confié le commandement de l’armée à Lesdiguière de retour du Dauphiné et s’apprétait à conclure la paix.Pierre CHEVALLIER, Louis XIII, roi cornélien, op. cit., p. 235.

Page 85: Années 1618-1623

85

qui y ont esté faictes à quoy il a satisfaict. Il n’a aulcuns deniers entre ses mains. Vous en verrés,Monseigneur, le particulierpar les états qu’il en a dressés et pareillement de ce que Vostre Excellencepeut toucher de net et clair aux dites terres pour le terme de Noël de la présente année et aussi ce qu’ilestime à propos d’estre acquitté sur cela.

Le Sr. des Hayers est aussi venu au mandement de madite Dame vostre mère et apporté lasomme de deux mil deux cens livres, laquelle il dit et soustient estre plus qu’il ne doibt de sa ferme,laquelle expire en avril prochain et de cela a donné un estat sommaire depuis octobre 1621 jusques àprésent que je n’ay rien touché pour toute cette année là que ladite somme de deux mil livres dont jeluy ay baillé récépicé /2/, le reste du montant de sa ferme ayant esté employé en réparations et menusfrais. Monsieur de La Motte asseure qu’incontinent qu’il sera dedans le païs il vous fera tenirMonseigneur la somme de trois mil livres s’il n’apprend point de Paris ou de ce lieu que vous soyésparti pour venir et s’il sçait que cela soit il envoyera ladite somme icy ou à Paris s’il en a ordre, etasseure aussi qu’à Noël il fera tenir où il vous plaira la dernière année qui escheu à ce temps là de laterre de Quintin.

Pour moy, Monseigneur, j’ay faict ainsi que vous m’aviés commandé tenir à Paris une lettre dechange à M. de Netz de la somme de quinze cens livres dont vous aurés je m’asseure bientostnouvelles, et feray tousjours ce que je pourray pour ne manquer en rien à effectuer voscommandemens.

Hier, Madame vostre mère receut le Sr. de La Rivaudière148 avec les bonnes chères et agréablesnouvelles de vostre santé, de Madame, de Monseigneur le Prince et les promesses que vous luy faictesque bien tost elle jouira du contentement de vostre présence. Elle se resjouit et Mademoiselleextrêmement en l’attente de cette veüe et tous vos serviteurs en ont des joyes qui ne se peuventexprimer, moy particulièrement qui attens avec une ardente impatience cet honneur. Ledit Rivaudièrenous apporte quelque bruict de la paix, mais non rien de si certain que Madame vostre mère en receuthier par le Sr. Peussier qui revint de La Forest-sur-Saivre de voir M. du Plessis qui fait sçavoir àmadite Dame que S. M. entra à Montpellier le 20e du passé seulement et que dans la fin du mois ellepourra estre à Lyon que les choses se sont bien passées à l’entrée de Sa Majesté audit Montpellier,qu’un soldat qui avoit faict insolence fut pendu sans rémission. Vous en sçavés Monseigneur plus departicularités que nous.

Ledit Sr. de La Rivaudière a aussi apporté vostre rattisfication Monseigneur /84/ du contractque Madame a eu agréable de me passer pour ce qui m’est deub et la descharge qu’il vous a pleum’envoyer dont je vous remercie très humblement, Monseigneur et vous supplie très-humblement decroire que je n’ay en cette affaire aulcun mien advantage, mais pour principal but vostre servicem’asseurant d’ailleurs que vous aurés soing de moy comme de celuy qui veut vire et mourir,

Monseigneur,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Thouars, le 7e novembre 1622.

M. de Guise a pris le Rocher de La Dive. Rien ne s’est faict sur mer depuis mes dernières quisont venu à ma cognoissance. On dict qu’un courrier du Roy est entré à La Rochelle.

Archives nationales 1 AP 357/83 et 84

31 décembre 1622 – Thouarsà Henri de La Trémoille

Monseigneur,

Nous attendons et prions pour l’heureuse arrivée de Madame et Monseigneur le prince. Nousn’avons point encore avis du jour que nous serons honorés de leur veüe. Ils trouveront icy Madame

148 Urbain Turpin, seigneur de La Rivaudière dans la paroisse de Chevaigné au nord de Rennes. Abbé GUILLOTIN deCORSON, Les Grandes Seigneuries de Haute-Bretagne, Réédition de l’édition originale de 1897-99, Le Livre d’Histoire,Paris, 1999, 3 vol., tome I, p. 391-396.

Page 86: Années 1618-1623

86

vostre mère et Madamoiselle en très bonne santé Dieu aydant elle est telle à présent. Il ne s’est rienpassé en vos affaires de deçà, Monseigneur, lesquelles coulent à l’ordinaire. Je croy que d’ailleurs onen donne advis à Vostre Excellence quand quelque chose survient de nouveau. Nous demeuronstousjours en l’espérance laquelle vous nous avés donnée d’estre bientost honorés et bienheurés devostre présence en ce lieu ou et par tout ailleurs Dieu ait soing de vous et vous soit en conduite, vousfaisant recevoir tous contentemens et satisfaction scelon vos souhaits et mes prières.

L’approche du Roy vers Paris vous apprendra toutes nouvelles, Monseigneur, tant du généralque de vos affaires particulières. Je m’asseure que M. de La Bourdillière n’aura pas obmis à luyremémorer comme il s’est rendu guarent et caution de toutes vos maisons et de bouche /2/ et parescript. Il est vray que depuis ses promesses et asseurances on s’en est asseuré, mais tousjoursdemeure il engagé et à grande occasion de s’employer à ce que promptement elles vous soientrendues, mais je n’estime point que rien soit si ferme que la parole de Sa Majesté à laquelle vous avéstenu la vostre et rendu de grands services par vostre obéissance qui mérite non seulement la restitutionde ce qui est vostre, mais des recognoissances et biens faicts qui puissent estre un exemple à tout lemonde puis que tout le monde a cognoissance de vos procédures, ayant tousjours demeuré et suivyune mesme route.

M. du Heaume sçait si particulièrement l’estat du lieu où il vient et des environs que jen’entreprendray pas de rien adjouster à ce qu’il en peut dire. Cette province n’est pas en petite peinede l’avis qu’elle a receu de Guyenne et Xaintonge d’une résolution prise au conseil de mettrequelques imposition sur le sel et mesme de ce que desjà on dit qu’on n’en laisse point enlever dessalines sans une levée de cinquante sols par mois. On se délibère à Poictiers de s’y opposer avec lesdesputés des lieux susnommés par requeste vers Sa Majesté et remonstrances des causes et raisons deleurs exemptions, cepandant ils appréhendent que duranr le temps qui leur sera nécessaire pour sepourvoir on ne passe oultre et mesme qu’on leur dit que desja il y a commissaires nommés et partispour faire ladite imposition.

Hier passa en ce lieu un gentilhomme de M. du Plessis retournant de Lyon et Grenoble, d’où ilpartit avec M. de Lesdiguière qui y a /3/ laissé M. le comte de Sault149 pour avoir principalementesguard à l’arsenal dont MM. de la cour de Parlement ont instamment poursuivi la démolition vers SaMajesté, jusques là que n’ayons rien peu d’eux mesmes ils ont faict intervenir les gens d’Egliseparticulièrement les cordeliers faisant plainte qu’il estoit basti en leur terre de tout temps destinéespour servir d’emplacement à leur église. On dit que cela ne fut pas porté aux aureilles de Sa Majestésans induction d’ailleurs et promesse d’estre favorablement escoutés, mais la présence de mondit Sr.le Connestable l’a emporté dessus tout et l’arsenal demeure. Je ne vous di point, Monseigneur, queMM. les comtes de Sault et d’Orval vont à la messe non plus que plusieurs autres petites choses quenous avions desjà apprises par Paris, vous le sçavés plustost que nous.

Ce gentilhomme rapporte que le duc de Savoye150 fit une très belle harangue au Roy pourl’exhorter à la guerre de La Valteline. Il fut très bien entendu tant qu’il parla de cela, mais interrompupar Sa Majesté lorsqu’il demanda permission d’assiéger Genève, laquelle luy desfendit en disantqu’elle ne luy permettroit jamais, la résolution de cette guerre pour l’assistance des alliés est remise àParis. M. de Rohan et ses gens estoient à Lyon avant le Roy pour poursuivre le payement de ce quileur a esté promis. Il tesmoignent estre en peine de ce qu’il avoit à faire ou de retourner en Languedocou de suivre le Roy jusques à Paris. Il ne disoit point encore son intention sur cela. M. de Soubizeestoit encore au païs ces derniers jours. Monseigneur le comte de Soissons et MM. le cardinal deSourdis, de La Rochefoucault et de St-Luc ont passé à Poictiers pour aller à Paris. Voyla Monseigneurce que /4/ nous avons quant à présent. C’est pourquoy il ne me reste qu’à adjouster mes prières à Dieupour la santé et prospérité de Vostre Excellence à laquelle je rendray toute ma vie avec fidélité etaffection entière les très-humbles services que je doibs en qualité,

149 François de Bonne de Blanchefort, comte de Sault, fils de Charles de Blanchefort, marquis de Créquy et de Madeleine deBonne, était le petit-fils du maréchal de Lesdiguières.150 Charles Emmanuel, duc de Savoye, était venu rencontrer Louis XIII à Avignon. Pierre CHEVALLIER, Louis XIII, roicornélien, op. cit., p. 241.

Page 87: Années 1618-1623

87

Monseigneur de,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Thouars, le dernier jour de l’an 1622.

Archives nationales 1 AP 357/85

1623 Au début de l’année, Henri de La Trémoille était à Paris pour obtenir la restitutionde sa principauté de Talmont, de ses baronnies de Mauléon et de Vitré et de son comté deTaillebourg, saisis sur l’ordre du Roi en 1621 et 1622. Louis XIII lui rendit Talmont, Mauléon etVitré.

Marie de La Tour d’Auvergne accoucha à Thouars au mois de mars d’une petite-fille qui nevécut que quelques mois. An mois de mai, Henri de la Trémoille partit à Vitré alors que son épouse etsa mère se rendaient à Sedan pour aller réconforter la duchesse de Bouillon, inconsolable depuis ledécès de son époux le 25 mars 1623.

Marie de La Tour d’Auvergne revint à Thouars à la fin du mois de juillet. Le 2 août, elle partiten Bretagne rejoindre son époux. Elle arriva à Laval le 7 août.

A la fin de l’année, le duc de La Trémoille présida pour la troisième fois l’ordre de la noblesseaux Etats de Bretagne151 qui se tinrent à Nantes du 28 novembre 1623 au 27 janvier 1624. Le6 décembre, les Etats lui proposèrent d’accepter la démolition du château de Châtillon-en-Vendelais,moyennant une indemnité de 30 000 livres.

Mercredi 4 janvier 1623 - Thouars

à Monsieur de Rozemont (?)

Monsieur, Hier 3e, je receus à mesme temps deux pacquets de vous : l’un par lenepveu de M. Bonne152 et l’autre par la voye de Chinon. Au premier estoient une lettre deMonseigneur à Madame sa mère, une à M. du Monceau, un mandement à moy pour ouyr et arresterles comptes des fermiers des terres de Monseigneur qui sont en Bretagne et au Mayne, une lettre devous à madicte Dame, une de M. Brusse à elle mesme, et une à Madamoiselle, une à M. de Pontaubré,et celle que vous m’escrivés par commandement de Monsseigneur avec les actes que Monsieur de LaMotte luy a envoyés concernant l’affaire et demande de M. de Foulgeray. Je vous particularise toutece que dessus d’aultant que le pacquet dudict nepveu dès le 12e novembre et rendu par luy le joursusdict seulement, il semble n’estre pas hors de propos de vous détailler ainsi tout ce qui estoitdedans. Au second pacquet estoient seulement deux lettres de vous, l’une à moy l’autre auSr. Favereau.

J’ay rendu à Madame celles qui s’addressoient à elle, et ay adjousté à la vostre de bouche ceque vous me mandés pour luy dire. Elle me tesmoigne de la satisfaction de l’un et de l’autre. J’aypareillement rendu les autres scelon leur addresse hormis celle dudict Sr. Favereau que M. deChampdor luy a envoyée. J’escriray du mandement et actes susdicts suivant les commandemens deMonseigneur. C’est à dire après que j’auray receu ceux de Mesdames, mais vous aurés seu par l’estatde Monsieur de La Motte, dont Madame a envoyé coppie à Monseigneur la response à cela. C’est àdire la raison qu’il rend des deniers de toutes les fermes.

Pardonnés-moy si je vous dis que vous me faictes peine de me faire excuse de vos lettres quisont très bonnes et qui m’apportent beaucoup de continuité, et lesquelles je reçoy à honneur. Je

151 Par l’institution des Etats, la noblesse bretonne moyenne dans une certaine mesure pouvait faire entendre sa voix. Ce quiexplique l’intérêt pour un grand comme Henri de La Trémoille d’y présider l’ordre de la noblesse pour renforcer son réseaude clientèle et de fidélité.

152 Nicolas Bonne, originaire de Turenne, était à Sedan l’apothicaire d’Elisabeth de Nassau qui le cite fréquemment dans seslettres à sa sœur la duchesse de La Trémoille. Nicolas Bonne fut inhumé le 13 février 1630 à Sedan.

Page 88: Années 1618-1623

88

devrois bien plustost vous en faire des miennes si mal raisonnées et escriptes, mais je m’asseure quela bonté de mes amis supplée à mes deffaulx, laissés donc ces cérémonies s’il vous plaist, et m’aimés.

J’estime que le réuny qu’a faict Monseigneur du différent de MM. de Vautorte et Marest àMM. de son conseil de Paris les oblige l’un et l’autre à leur oster les moyens d’entrer en un procès oùà mon advis Robin auroit bien trouvé Marion, car ils sont assés apprès vous deux.

M. de La Motte m’a dict qu’il n’avoit aulcune quittance de M. de Netz de la somme dont vostrelettre faict mention. Il a assuré, Madame, qu’il vouloit sortir des comptes qu’il a à rendre au plustostet cela pour /2/ respondre à ce que vous m’en escrivés. La présence de Monseigneur à Paris, où onnous dict qu’il est à présent, pourra terminer l’affaire contre Mlle de Montpensier à metre ordre auxautres. J’escri à M.. Malherbe ce que j’estime des nouvelles prétentions du Sr. Clercelier en qualité decessionnaire de M. le duc de Chevreuse et si je ne revivatre bien j’en suis bien marry, mais aussi nesçai-je point le vray et mérite d’icelles.

Le Sr. Favereau a à présent receu vos lettres. Je ne sçay si son traitté avec le Sr. Quentinréussira. C’est une histoire qui mérite la vive voix et est bien malaisé que les choses ainsi prisess’effectuent. Je croy bien ce que vous me dites que Madame n’en a point escript en sa faveur.

MM. de La Mazure, de La Salle, de Champdor et tour nostre monde vous baisent les mains etvous remercient de vostre souvenir. Je n’ay rien à présent à escrire à M. Le Maistre et aussi j’espèreque nous aurons bientost Monseigneur et vous tous. Je suis et seray tousjours son serviteur trèshumble, et vous supplie aussi de croire de mesme que je suis,

Monsieur,

Vostre bien humble et très-affectionné serviteur.

d’Iray

A Thouars, le 4e jour de l’an 1623.

Archives nationales 1 AP 357/86

Samedi 28 janvier 1623 - Paris

à Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay receu celle qu’il vous a pleu m’escrire par Goublet avec le lettreque M. de La Mothe escript à Madame sur les rencontres arrivés en la ferme de la baronie de Vitrédont les affaires de Monseigneur ont receu des advantages. Depuis mes lettres escriptes à Mesdames,je luy en ay parlé et il en tesmoigne de la satisfaction. Je croy qu’il leur fera entendre luy mesmes.

Je luy ay aussi dict quelque chose touchant les plainctes que faict mondit Sr. de La Mothe àMadame de vostre lieutenant de Laval. Il dict n’avoir ouy parler de cela et a regret de voir tant dedivision partout. M. de La Mothe ne luy en a point encore escript. M. du Chastelet153 fut tout hierdepuis le matin jusques au soir avec luy, il m’a faict l’honneur de me dire qu’il se pleut à sonentretien.

Je ne doubte point que vous ne voyés mes lettres et par icelles que vous n’appreniés commej’ay trouvé icy toutes choses. Je n’ay point encore veu M. de Netz depuis la réception de la vostrepour sçavoir s’il n’a pas baillé les lettres à Madame la duchesse de Guise. Vous y verrés aussi queMM. de La Haye et de Villars ne sont plus capables de rien faire en l’affaire de la restitution desmaisons.

Nous avons eu tant d’affaires aujourd’huy qu’il m’a été impossible d’escrire à M. deLa Mazure. Je vous supplie très humblement de luy baiser et à Mlle sa femme très humblement lesmains de ma part. J’en présente aultant à Monsieur et Mlle du Plessis et leur suis à tous très humbleserviteur.

153 Paul Hay (1592-1636), Sieur du Chastelet, fils de Daniel Hay, Sieur de La Motte et de Gillette de Pélineuc, après avoir étéconseiller au Parlement de Bretagne (1616) puis avocat-général à ce même parlement (1618), remarqué par Louis XIII, avaitdécidé de quitter la Bretagne pour poursuivre sa carrière à Paris. Frédéric SAULNIER, Le Parlement de Bretagne 1554-1790, op. cit., tome II, p. 488-492.

Page 89: Années 1618-1623

89

Je ne crois pas que nous facions icy long séjour. Nous avons à présent et j’estime que vousaurés bien tost Monseigneur le Comte grandement creu, haussé et de très bonne grâce. Chacun en areceu une grande satisfaction, Monseigneur particulièrement en a eu de la joye. Dieu les veuilleconserver tous deux.

Je vien présentement de voir le pauvre Sr. Demeufves154. Il dit qu’il ne peut rendre les papiersqu’il ne soit hors de prison et Monseigneur veult qu’il commance à les rendre et puis qu’il luy aydera,certes c’est pitié. Le temps me presse et suis contrainct de finir en vous remerciant de vos bons officeset vous assurant que je vivray et mourray véritablement,

Monsieur,

Vostre bien humble et très-affectionné serviteur.

d’Iray

Paris, le 28e janvier au soir 1623.

Archives nationales 1 AP 357/87

Samedi 28 janvier 1623 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Hier, sur les trois heures ou quatre du soir, arriva en ce lieu Monseigneur le Comte155 en trèsbonne santé grâces à Dieu. Ceste nouvelle est trop bonne et vous apportera trop de joye pour ne vousestre escripte que de moy, Monseigneur et luy sans doubte vous la diront assés en leur grande joyemutuelle de leur entreveüe. La mienne en est telle Madame que je ne puis commancer mes lettres parun autre discours.

Monseigneur apprist jeudy à deux heures après midy par M. de Chasteauneuf156 l’arrivée deMonseigneur le Comte à Montataire, dès lors il luy envoya le carrosse de Madame la Princesse avecMM. de St-Marsolle et de Mazeuil. M. de Montataire le retint chez luy tout le jeudy. Il est aussipuissant que M. de St-Marsole, mesme plus hault. Je croy que vous aurés bientost le conatantment desa veüe. Il a couché avec Monseigneur et depuis qu’ils sont ensemble il n’y a eu moyen de les divertirtant soit peu pour leur parler. Il n’a amené avec luy depuis Boulogne que M. de Chasteauneuf, ungentilhomme flamand qui doist demeurer icy et un homme de chambre. Je di de son train car M. lebaron de Montataire est venu des Païs-Bas avec luy. Ses lacquais se sont rendus les premiers. M.Berthold pourra estre icy aujourdhuy avec le bagage, le Sr. Inguel fut laissé pour recevoir quelqueargent. Il n’a peu joindre. Messeigneurs virent dès hier ensemble Madame la Princesse, mais nonencore le Roy qui est absent à la chasse et ne sçait on où depuis mardy ayant desfendu à tous lesgrands de suivre.

J’ay trouvé icy un estrange changement aux affaires publiques, M. de Tronson, secrétaire du /2/cabinet eut commandement de porter une lettre de Sa Majesté à M. de Schomberg157 portant créance àsçavoir qu’il retournast en sa maison sans en partir pour retourner en Cour qu’il n’eustcommandement de Sa Majesté qui auroit soing de ses enfans, et incontinent ledict Sr. de Tronson fut

154 Philippe Demeufves, le chargé d’affaire des La Trémoille à Paris, avait été emprisonné pour avoir acheté une maison àConflans que désirait le Premier président au parlement de Paris. Ses officiers firent courir le bruit que Demeufves avaitacheté cette maison pour y faire célébrer le culte et l’accusait d’y vouloir accueillir des gens d’armes. Demeufves fut arrêté etinterné au Châtelet. Les archives de France à la cote 1 AP 347 conservent les lettres qu’il adressa à Charlotte-Brabantine deNassau pour que celle-ci lui viennent en aide. Ces lettres font apparaître que les membres du conseil des La Trémoillen’intervinrent guère en faveur de Demeufves, voyant en cette affaire le moyen de s’en débarasser.155 Frédéric de La Trémoille après une absence prés de trois ans venait de rentrer en France.156 Charles de Marconnay, sieur de Châteauneuf, d’une famille huguenote du Mirabelais. Il avait accompagné en 1620Frédéric de La Trémoille pendant son Grand Tour qui fut interrompu par la bataille de la Montagne blanche et avait continuéà veiller sur lui pendant son séjour en 1621 et 1622 aux Provinces-Unies.157 Pressé par les ministres, Louis XIII le 20 février 1623 avait démis Schomberg de sa charge de surintendant des financesqu’il assumait depuis 1619.

Page 90: Années 1618-1623

90

aus logis de MM. les intendans et arresta leurs papiers leur enjoignant de par Sa Majesté de ne sortirde leurs maisons sans en avoir permission d’elle.

Mardy dernier la superintendance fut baillée à M. le marquis de La Vieuville, le contrerollegénéral que tenoit M. de Castille à M. de Champigny et M. du Beauclair faict intendant, depuis M. leprésident de Chevry a esté restably et M. de Castille remis en sa charge première d’intendant. Lemesme jour M. de Loménie porta de la part de Sa Majesté le seaux à M. la Chancelier. Ceschangemens ne sont pas désagréables à tout le monde, mesmes plusieurs estiment qu’ils serviront àaffermir la paix.

La Royne mère a MM. le Chancelier et de Pisieux ont très grand regist près de Sa Majesté, et laRoyne mère à ce qu’on dict veult qu’on croye qu’elle a travaillé tant qu’elle a peu à esloigner M. deSchomberg. M. de Caumartin ne la fit pas longue. On dict qu’il n’estoit point serviteur ny amy de lamaison.

Le Roy depescha ledit jour de mardi un courrier à Monseigneur le Prince, lequel à ce que m’adict Madame sa mère158 doibt estre à Gennes le 2e du prochain. Il doibt retourner au plustost. Chacuncroit que ce pourra estre trop tard. Toutesfois Madame sa mère m’a faict l’honneur de me dire qu’ellea eu de très bonnes paroles de Sa Majesté qui tesmoigne tousjour en eux beaucoup de confiance.

On ne parle plus du voyage de Picardie et de Champagne, mais cepandant on croit que Amienspourra tomber ès mains de M. le duc de Chevreuse qui est veu de très bon oeil de Sa Majesté, maisqu’elle escoute très-volontiers la Royne sa mère et les susnommés sur les affaires. J’ay veu et salué dela part de Vostre Excellence M. le Connestable qui vous baise très-humblement les mains.

Madame de Longueville n’est point encore en cette ville. Elle a receu vos lettres à présent. Jetascheray d’en retirer response. J’ay esté plusieurs fois pour saluer de vostre part /3/ Madame laduchesse de Chevreuse, mais elle est quasi tousjours auprès de la Royne. Son secrétaire a eu voslettres, Madame, pour luy donner et promis d’en envoyer response. Je n’ay point envoyé celle de M.de Schomberg.

Monsieur Boutillier vous baise très-humblement les mains, Madame, et proteste qu’il est vostretrès-humble serviteur qu’il ne manquera point à l’office que vous désirés de luy vers la Royne-mère,laquelle il dict vous avoir voüé beaucoup d’affection et sans feintise. Il n’a rien dit-il à présent sion àvous renouveller les asseurances de son service.

J’ay trouvé à mon arrivée en ce lieu que Monseigneur avoit eu trois lettres de Sa Majesté : uneà M. de La Rochefoucault, une à M. de Villegna et une à M. de Rulles par lesquelles elle leurcommande de remettre entre les mains de Monseigneur ou de ceux qu’il envoyera pour les recevoirles maisons et chasteaux de Thalmond et Mauléon. Ils demandent quelques jours pour poursuivre lepayement de ce qui leur est deub et après promettre de sortir.

J’appren aussi et voy que M. d’Oquerre159 a baillé pareille expédition pour Vitré oùMonseigneur envoye M. de Mazeuil pour recevoir de M. des Perrières les chasteaux desdits Vitré etde Chastillon-en-Vendelois. Je croy Madame que vous le sçavés par luy mesmes et l’ordre qu’ilestime devoir estre guardé pour la conservation. On n’a point encore dressé le petit estat et ainsil’entretenement des guarnisons pour ces lieux la est à faire.

On promet de rendre Taillebourg mais on demande du temps et qu’on ne presse point le Roy àce que j’appren jusques icy des paroles et estime qu’il fault juger du restablissement de cette place parce qui se fera au fort devant La Rochelle.

On donne pareillement des paroles à M. de Villarnoul pour Saumur. Madame la Princesse m’adict après avoir veu les lettres, Madame, que Monseigneur le Prince vous a escript et à Monseigneurplus particulières beaucoup que les vostres, et toutes deux de sa main que le restablissement deTaillebourg est l’affaire de Monseigneur son fils. Il fault attendre.

J’ay veu M. du Chastelet sur le faict des abbayes. Il faict de grands doubtes pour Thalmond,toutesfois M. le comte de La Rochefoucault en a parlé à Monseigneur ainsi que j’escri à Madame

158 Charlotte-Catherine de La Trémoille, princesse douairière de Condé, belle-sœur de Charlotte-Brabantine de Nassau.159 Nicolas IV Potier († 1628), sieur d’Ocquerre, secrétaire d’Etat.

Page 91: Années 1618-1623

91

vostre belle-fille. Il poursuit a présent l’expédition de /4/ celle de Chambon avec promesse du pèreSaguirant et de M. d’Erbault de l’avoir promptement, pourveu qu’elle soit pour son frère. Sur celaMonseigneur n’avoit point appris vostre intention de sorte que sur la dispute et question de la tenir enconfidence ou de la posséder effectivement en vous faisant ordonner une pention mondit Seigneur aconsenti qu’il y fist nommer son frère à la charge qu’ayant le brevet et les lettres d’œconomat il luymettroit tout entre les mains pour en disposer scelon vos volontés ce qu’il a promis.

Je croyois Madame que des Thouars vous en aviés demeuré d’accord avec M. de La Mothe etluy auriés faict entendre vostre intention, laquelle M. du Chastelet dict ne point sçavoir sur ce faict.Cette affaire estoit tellement advancé à mon arrivée qu’il n’y avoit à l’advis de tous vos serviteurs dedeça aulcun lieu de là retarder sans péril après le brevet et les lettres d’œconomat obtenues elle seconservera bien aisément si on veult.

Pardonnés-moy Madame si j’entre si avant en cette affaire mais le zèle ardent que j’ay à vostreservice et le mérite de l’affaire me font vous dire qu’il est de vostre prudence d’y aviser de bonneheure. Je m’asseure que M. de La Mothe y fera ce que vous voudrés. J’ay dict icy que j’estimois quevostre intention estoit que cette piéce ne sortist pas de vostre maison, et que je vous avois toujsoursouy parler de la conserver et non de la donner.

M. de Chalas et les depputé de Montpellier sont icy, ceux qui les ont ouy parler et discourir dela procédure qu’on a tenu vers eux que cest pitié. Dieu ait soing de tout s’il luy plaist. J’ay dict àMonseigneur ce que vous m’aviés commandé et à Monseigneur le comte de que vous estimiésmeilleur de leur demeure ensemble icy. Vous verrés ce qu’ils en escriront à Vostre Excellence et larésolution qu’ils prendront. M. de Lessart est allé vers Madame la mareschale de Chastillon avec voslettres et celles de Monseigneur pour se condouloir160.

J’ay receu Madame celle qu’il vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire par Goubelet aveccelles que M. de La Mothe vous a escript et à moy (Monseigneur le prie par lettres de sa main qu’il/5/ assiste ledit Sr. de Mazeuil de tout ce qu’il pourra en l’affaire qui le meine) ensemble le mémoirepour faire voir à Monseigneur, contenant ce que vous avés estimé à propos sur le restablissement deses maisons. Vous jugerés, Madame, qu’il est venu trop tard par ce que dessus, et n’eust pas mesmesesté à temps quand je l’eusse apporté. Je ne l’ay peu encore faire voir à mondit Seigneur ny aulcunedesdictes lettres. Il a eu les siennes mais luy et Monseigneur son frère qui ne se quittent point me fontcraindre que je ne pourray vous renvoyer la lettre de M. de La Mothe.

J’y feray pourtant ce que je pourray, mais je prens tant de plaisir à les voir ensemble et faire sibonne chère que je sentirois conscience de les divertir tant soit peu. M. de Lussé et le lieutenant deLaval se plaident icy à la table de marbre sur quelques petites pointilles dont M. de La Mothe vousparla, à sçavoir pour cette harbequze ostée dans les forests à La Frégate qui faict parler de luy. Ilseroit à désirer qu’ils fussent accommodés, mais le feu y est encore et d’ailleurs les plaintes que faictM. de La Mothe dudict Sr. lieutenant semblent le presser trop pour y consentir. Je n’ay appris de celaicy aulcune chose sinon par la lecture des lettres de mondit Sr. de La Mothe et l’entretien de MM. duChastelet et de Lucé. J’ay bien du regret de voir toutes ces divisions et souhaitterois avoir assésd’industrie et de bonheur pour les appaiser.

J’en ay trouvé icy une très grande et qui avoit commancé à esclatter, ce qui a présent arrivéetout à faict, c’est entre MM. du conseil sur l’acceptation faicte par Monseigneur du fils de M. Gallandà présent les esprits s’accordent mais ne sont encore en l’estat que seroit à souhaitter. Nous feronstout ce qui se pourra. Ceste acceptation estoit faicte quand j’arrivay et Monsieur Galland parle de celacomme de chose faicte et résolue et suivant laquelle son fils et l’homme qu’il luy donne pourl’assister ont desja plusieurs fois travaillé. Je ne les ay point encore veus ensemble à présent ils separlent.

Je feray entendre ce que vous me commandés, Madame, à Monseigneur touchant la ferme deVitré aux rencontres de laquelle les affaires de mondict Seigneur s’améliorent. Je n’ay point encore

160 La maréchale de Châtillon venait de perdre sa mère Anne d’Albin de Valzergues, épouse de Gabriel de Polignac, seigneurde Saint-Germain-de-Clan.

Page 92: Années 1618-1623

92

donné vos lettres à M. d’Herbault, Monseigneur a remis à quelque temps. Il a envoyé dire auSr. Demeufves qu’il vouloit avoir ses papiers premier que de luy donner de l’argent.

Je vous supplie très humblement me pardonner, Madame, si je suis si long, mais à une arrivée ilse rencontre tant de diverses choses à dire et à faire qu’on ne peut s’exprimer en peu de paroles, etaussi que vous m’avés commandé d’escrire ainsi. Ma joye me faict finir par ou j’ay commencé et direà V. E. le contentement que nous avons eu de voir Monseigneur le Comte en si bon estat et heureusesanté. Présentement il m’a faict l’hommeur de me dire le grand désir qu’il a de vous voir avecMadame vostre belle-fille, Monseigneur le Prince et Mademoiselle. Dieu vous conserve tous en bonneet heureuse santé avec contentement et me doint de vous faire voir par mes très humbles et fidèlesservices que je suis et seray toute ma vie,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Paris, le 28e janvier 1623.

Thomas a eu le vent fort contraire et a demeuré fort longtemps sur mer. MM. de La Haye et deVillars vous remercient très-humblement de l’honneur que vous leur faictes et vous baisent trèshumblement les mains.

Depuis ma lettre escripte, j’ay veu MM. de Lucé et lieutenant de Laval qui sont à présent amiset sont d’accord, mais ils n’ont encore rien escript. De peur d’user de redites et de vous importuner,Madame, je ne vous redi point ce que je pourray avoir escript, estimant que vous vous communiquerésvos lettres. Je vous envoye une de Madame la Princesse.

Archives nationales 1 AP 357/88

Mardi 31 janvier 1623 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Si vous avés veu le Sr. Prévost, chirurgien, il aura dict à Vostre Excellence que nous estimionsescrire par luy le 28e , mais sur ce qu’il dist qu’il feroit séjour à Orléans, Monseigneur estime plus àpropos que ses lettres et les miennes vous fussent et à Madame vostre belle-fille portées par un de seslacquais qui vous rendra et celles-cy et les autres ensemble.

Depuis celle-là Sa Majesté est retournée de sa pourmenade et Monseigneur le Comte luy a faictla révérence. Monseigneur m’a faict l’honneur de me dire qu’elle l’a très bien veu et reçeu. Je ne sçayquelle résolution ils prendront pour leur partement si ensemble ou séparément.

Je n’appren pas qu’on ait parlé de Taillebourg depuis le retour du Roy qui est encoreaujourd’huy party pour aller à la chasse. On dressera bientost le petit Estat à quoy il est besoing deveiller à bon escient. Monseigneur à ce qu’il m’a faict l’honneur de me dire a veu MM. d’Erbault etde Beaumarchais161 et n’a point trouvé M. le marquis de La Vieuville. Si aultre fois mondit Sr. deBeaumarchais a eu le vouloir de prendre en payement la partie de XL

M livres du don, il a maintenanttout pouvoir de la faire passer, car oultre la charge de M. son gendre il est en année.

Présentement, Madame, on a rapporté à Monseigneur que le procès que vous aviés contreMaillet, Sr. de La Morestière, est jugé à vostre profict. L’affaire a esté très bien /2/ sollicitée parMonseigneur en personne et encore par son commandement. On y estoit encore hier au soir à septheures et maintenant mondit Seigneur retourne de voir et remercier MM. de Bellièvre et Bavin et lessupplier de ne point s’arrester ny prester l’aureille aux clameurs dudict Maillet qui n’a arrivé en cesteville qu’au mesme temps qu’on sortoit de l’audience où il a appris des mauvaises nouvelles qui luydonnent de l’exercice et à ses amis, mais Monsieur le rapporteur Bavin a promis de dresser l’arrestaujourd’huy et M. le président de le signer et faire mettre demain matin au greffe.

161 Vincent Bouhier (1599-1632), sieur de Beaumarchais, était trésorier de l’Epargne et un des principaux financiers de cetteépoque. Il fut emporté en 1624 par la chute de son gendre, le marquis de La Vieuville.

Page 93: Années 1618-1623

93

M. Cottière sollicite le restablissement du temple de Tours au lieu où il estoit cy-devant basti.Je ne croy pas qu’il l’obtienne audict lieu, mais on le consent à ce que dict M. le Chancelier en unautre aussi proche et commodes. Cela ne les contente pas.

J’ay regret, Madame, de n’avoir plustost escript et de n’escrire plus souvent, mais les occasionsmanquent. On se doibt assembler jeudy prochain pour aviser aux affaires. Nos MM. ne s’entendentpoint encore. Nous ferons ce que nous pourrons pour les accommoder.

Messeigneurs se portent très bien grâces à Dieu. Vous aurés de leurs nouvelles par eux mesmes.Il ne s’est rien passé depuis mes dernières qui mérite de vous estre escript. MM. les ducs prétendanspairie n’y ont point encore esté receus, leurs contestations pour la promotion et préséance en sontcause. Deux le cèdent à M. de Rohannois qui est opposé par M. de Lavalette fondé paincipalementdit-on sur la volonté du Roy à cause de l’alliance qu’il a prise en se mariant.

Nous attendons aujourd’huy M. Berthold. Vous sçaurés sans doubte plus certainement Madamepar Monseigneur le comte ce qu’il a résolu pour le temps de son partement. Il ne quitte guèreMonseigneur et je loüe Dieu de les voir ainsi mutuellement et fraternellement s’entre aimer scelonmes souhaits. Je n’escri point à Madame vostre belle-fille, d’aujourd’huy, n’ayant rien à adjouster àma première. Je prie Dieu pour vos santés communes, de Monseigneur /3/ le prince et deMadamoiselle et qu’il me doint d’estre tousjours creu et recognu de vous toute ma vie, ainsi que jesuis,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Paris, le dernier jour de janvier 1623.

Madame,

J’ay scelon vos commandemens faict entendre à Monseigneur vos bons advis touchant MM. duPlessis et de La Mothe. Il m’a faict l’honneur de me dire qu’il est tout porté et disposé à faire ce qu’ilpourra pour ce qui reguarde le premier à quoy encore vos bon advis et tesmoignages le confirment etrésolu de faire pour ce qui reguarde mondict Sr. de La Mothe sçelon ce qu’il vous pleut me dire. Onme dict que la calomnie dont il se plainct vient d’un nommé La Frégate, lequel pourtant n’a pas esté siosé d’en escrire à Monseigneur, mais à luy mesmes à ce qu’on nous rapporte, supprimé sa lettre aprèstoutesfois l’avoir monstré à plusieurs. C’est une grande audace et témérité à ce compagnon là. Lelieutenant de Laval s’en deffend. Je luy en ay parlé. Il aura bientost affaire à partie, car M. deVautorte qui est en dissent avec luy pour les esmolumens de leurs ofices viendra au premier jour. Ilsne sont nullement d’accord tous deux, et Monseigneur leur veult donner un règlement pour l’advenir.Je renvoye à Vostre Excellence la lettre que M. de La Mothe luy a escript. M. du Chastelet a encoreveu aujourd’huy Monseigneur qui luy faict tousjours très bonne chère.

Archives nationales 1 AP 357/89

Samedi 4 février 1623 - Parisà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Vous me commandés de vous escrire quelle espérance il y a d’estre parés de la somme portéepar la rescription de l’espargne délivrée par M. Moiant à acquitter par M. de Villautray et mise èsmains du feu Sr. Charviel vivant commis dudict Sieur luy absent et ce pour partie de ce qui est deubpour l’entretenement des guarnisons de Thouars et Taillebourg. Surquoy j’ay à vous dire, Madame,que la mort dudict Charviel entre les papiers duquel est ladicte rescription a jusques icy empesché lepayement de cette partie. Celuy qui a sa charge à présent demande seulement quatre ou cinq jourspour cercher et recouvrer ladicte rescription, laquelle trouvée sera acquittée et payée à M. de Netzincontinent ou en argent ou en seures assignations.

Je n’ay veu icy personne qui fust chargé de deffendre et s’opposer à la translation de l’électionde Mauléon à Mortagne. Si quelqu’un se fust présenté à Monseigneur il l’eust assisté et faict assister

Page 94: Années 1618-1623

94

en tout. Vostre Excellence a grand intérest à mon advis d’empescher en tout ce qu’elle pourra un telchangement.

Les esprits de MM. du conseil sont un peu addoucis et commencent à s’approcher.Monseigneur les assemble jeudy dernier où il ne fut pas parlé bonnement de choses qui méritent devous estre escriptes. Les affaires de Berry, Rocheesnard et bois de Perrettes tinrent quasi toute l’aprèsdisnée. J’ay bien du regret que je voye tout aller scelon mes souhaicts. Je ne manqueray jamais à ceque j’y pourray contribuer.

Le Sr Demeufves est tousjours en /2/ prison. Il m’a envoyé un mémoire de sa main où il parlede plusieurs pièces qu’il dict importantes, mais non qui les a ny ou elles sont ny ce qu’il y a à faire suriceluy. Je l’ay faict voir à Monseigneur qui s’en est grandement irritté d’aultant dit-il que par ledictmémoire il recognoist une mauvaise volonté et foy en ce qu’il porte une description desdicts papierssimplement comme appréhendant de s’enlacer s’il disoit qu’il les a. Je luy remontreray le tort qu’il sefaict. Il se plainct de MM. du conseil, particulièrement de ce qu’il sçait sa charge occuppée. J’ay biendu regret tant pour le service de Monseigneur si d’avanture il a des pièces importantes que pour sonpropre bien, de ne pouvoir faire de cela quelque chose d’utile, car Monseigneur veult qu’il commenceà rendre les papiers premier que de luy subvenir davantage. J’ay faict voir ledict mémoire àM. Heraud qui asseure que ledict Demeufves n’a point lesdicts papiers, mais bien souvent en tellesmatières on se peut tromper et faudroit une bonne mémoire pour se souvenir de tout.

Il y a fort longtemps que je n’ay entendu parler d’aulcun advancement aux affaires des maisons.Je croy que Monseigneur ira luy mesme vous en dire des nouvelles bientost. Nous ferons aujourd’huyendosser d’un acquit de quatre mil livres la promesse que M. de Netz à de vous Madame de la sommede six mil quatre cens livres cy-devant empruntée pour les affaires de mondict Seigneur et dès l’an1617. Ledict Sr. de Netz a esté remboursé de ladicte somme de iiijM livres sur ladicte somme devjM iiijC par le compte qu’il a rendu à Monseigneur de sa négotiation durant trois années et plus lequela seulement esté signé cejourd’huy.

Je vy hier MM. le chevalier de Royan et du Chastelet touchant l’affaire des abbayes deChambon et Angles. Ils ont promesses, mais la réception de M. du Chastelet en sa charge et l’affairede son mariage162 dont les résolutions ne sont encore entièrement prises l’empesche de pouvoirvacquer tant qu’il désire audictes affaires.

On ne parle point de la charge de M. du Chastillon163 pour s’en desfaire à aulcun, moins à celuyqu’on disoit en avoir la promesse par le traitté de Montpellier. On dict que la paix s’affermit et quehier les conventions avec l’Anglois, le duc de Savoye, les Vénitiens, les Suisses et quelques princesd’Italie devoient estre signées. Dieu veuille avoir /3/ soing de tout s’il luy plaist.

Monseigneur se porte très bien et Monseigneur le Comte aussi. Ils ne se quittent guères que lanuict. Vous recevrés je m’asseure bientost le contentement de leur veüe, plustost de Monseigneur leComte si Monseigneur ne le retient. On nous dict qu’il n’y aura plus de guarnison entretenues auxvilles de seureté, et qu’on doibt dresser un petit estat nouveau dont on ne sçait encore les formes.Hormis pour ce qui est des pensions de ministres et entretenemens d’académies auxquelles on dictque rien ne sera retranché. Voyla le bon estat auquel les affaires de ceux de nostre profession ont estémises. Encore une fois Dieu en ait soing.

M. Berthold lequel à ce que j’estime sera près de vous le premier pourra dire à V. E. l’estatauquel nous sommes. Lundy on se doibt assembler au logis de M. Malherbe pour voir les papiersretirés des mains de Mlle Arnaud. M. de Netz m’a dict avoir retiré de l’Espargne des rescriptions pourvostre pension Madame et celle de Monseigneur durant une demie année de 1621. Elles sont a

162 Paul Hay du Châtelet, veuf en première noces de Marguerite de Renouard (1603-1619), fille d’un maître des Comptes deBretagne, épousa le 27 février 1623 à Paris dans la paroisse Saint-André-des-Arts Madeleine Danguechin (1606-1688), filled’un conseiller et commissaire au parlement de Paris. Il avait acheté une charge de mâitre des requêtes et en fut pourvu le 3avril 1623. Frédéric SAULNIER, Le Parlement de Bretagne 1554-1790, op. cit., tome II, p. 488-492.163 Gaspard III de Coligny, sieur de Châtillon, était colonel-général des gens de guerre à pied françois au service des Etats desProvinces-Unies.

Page 95: Années 1618-1623

95

acquittés sur les deniers de la vente, revente et taxe en hérédité des courtiers de vin. Par le comptedudict Sr. de Netz il luy est deub vc tant de livres.

Je prie Dieu pour vostre conservation et parfaicte santé et suis ainsi que j’y suis par tant dediverses sortes d’obligations et devoirs obligé à estres et demeurer toute ma vie,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Paris, le 4e febvrier 1623.

Je ne fay longue lettre à Madame vostre belle-fille estimant que ce seroit estre importun que deredire tout ce que je dis icy qu’elle verra je m’asseure.

Archives nationales 1 AP 357/90

Mercredi 10 mai 1623 – Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

La santé de Monseigneur, de Monseigneur le Comte et de Monseigneur le Prince est telle qu’onla peut souhaitter grâces à Dieu à qui je fay mes prières très ardentes pour la vie qui pour n’estre pasparfaicte lorsque vous partistes d’icy, me mettra en peine jusques à ce que par quelqu’un j’en aye eules nouvelles que je désire et atten impatiemment.

Monseigneur parle de partir d’icy dans deux jours pour son voyage du Mayne et de Bretagne.Je ne sçay si Monseigneur le Comte en sera. Vostre Excellence apprendra sans doubte par eux larésolution qu’ils ont prise ensemble sur cela.

M. Malherbe escript icy qu’il a réservé pour vous le faire voir et à Madame vostre belle-fillel’estat général des affaires. Si vous avés pris la peine et que vous ayés en le loisir de le voir, Madame,je m’asseure que vous y aurés recognu qu’une bonne union et correspondance est nécessaire entreceux qui les font, et que pour cela ils ont besoing de vostre prudence et auctorité. Je n’escriray pointMadame le peu de choses que MM. Galland le jeune et Malherbe escrivent, vous les aurés sansdoubte apprises par leurs bouches et aussi que ledit Sr. Malherbe remet à escrire plus amplementlorsqu’il aura eu l’honneur de vous voir.

J’avois commencé quelque /2/ peu de temps avant vostre partement à […] de M. Trinquant etde ses beaux-frères […] seulement de l’affaire des chaussées […] que de mil livres et qui n’a point[…] pas raisonnable à Monseigneur […] quelque raisons et considérations à les […] condition que lesautres. Ils sont les plus […] de se deffendre et mesmes de servir et ont les […] leurs mains. M. deLa Mazure et moy en avoient [parlé] à Monseigneur qui d’ailleurs trouve l’offre trop […] croy qu’ilmettroit ces raisons en considération s’ils […] de donner davantage, mais ils ne veulent que ce […].

Monseigneur n’a point eu de Paris nouvelles qui pu[ssent le] contenter sur la proposition faictepour se départir de […] sur l’abbaye de Thalmond, car on ne parle de donner que [en] cas de paisiblepossession et qu’on face changer le brevet au nom de celuy de qui la proposition est partie. Si lapossession estoit paisible on n’auroit point besoing d’en traitter. Vostre prudence avisera, Madame,s’il y a quelque chose à faire à Paris sur cela. On nous dict que l’œconomat de Millet est finy et n’a onpoint ouy parler que les bulles de M. l’abbé de Réau fussent venues. Monseigneur me commanded’envoyer exprès à Thalmond pour apprendre la consistance du temporel de ladicte abbaye et le tempsde receuillir les fruicts Il n’est survenu aulcune chose aux affaires de Monseigneur depuis vostrepartement qui mérite de vous estre escripte. Monseigneur me commande de le suivre en son voyage ceque je feray, Dieu aydant, ayant assés de santé pour cela et d’affection de le suivre.

J’obmettois à dire à Vostre Excellence que on n’a point relevé l’appel au conseil interjetté parles fermiers de l’abbaye de Thalmond des jugemens donnés à Fontenay et aussi que Millet, qui s’endict oeconome, ne les a point faict appeler en déjection d’appel /3/ tesmoigne qu’il ne poursuit pasvivement l’affaire. Ce me faict doubter s’il n’est pas expédient de nry rien […] la part de

Page 96: Années 1618-1623

96

Monseigneur puisqu’ils n’y font aulcune procédure de leur costé, et qu’il n’y a pas grande […] decommenncer et aussi que je n’estime pas que l’affaire vuide par là.

Depuis ce que dessus escript, j’ay veu Monseigneur le Comte en volonté de partir pour aller àl’Isle-Bouchard. J’ay eu l’honneur de luy faire la révérence et recevoir ses commandemens. Je croy,Madame, que Monseigneur et luy vous font entendre ce qu’ils ont résolu ensemble. Ils se sont séparésavec mutuels et reciproques tesmoignages d’amitié, et depuis encore j’ay eu l’honneur de voir et ouïrMonseigneur sur ce subject je vous diray Madame comme j’ay tousjours faict que je le trouvetousjours plein d’affection cordiale et entière envers luy et pour le dire en un mot fraternelle. Je prieDieu qu’elle demeure et dure entre eux jusques au tombeau et que e[…] longue et heureuse santé vouspuissiés voir cette concorde entretenue.

Je le prie aussi de me rendre assés heureux pour vous faire des services agréables et utiles àquoy mon soing sera tousjours appliqué affin que je puisse estre maintenu et conservé en l’honneur devostre bienveillance et de vostre service, ce que j’estime et prise au delà de toutes autres choses,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Thouars, le xe may 1623.

Archives nationales 1 AP 357/91

21 mai 1623 - Laval

à Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay veu ces mots au commencement d’une lettre. Après avoir saluévos grâces je vous diray que je suis vostre serviteur. Elle vient de basse Bretagne , d’où qu’elle puissevenir je la trouve bonne et vous déclare que je désire et entens que la mienne à vous se commence etfinisse ainsi, car cela est scelon mon sens et m’attache moins aux mots qu’aux choses. J’y adjouteraypour le milieu que Monseigneur et toute sa belle suitte arriva icy en bonne santé le 18e , que nouslaissasmes Monseigneur le Prince en bonne disposition, et que ma femme me mande qu’elle continue.Voyla pas (sic) bonnes nouvelles. Je ne doubte point que M. de Rozemont ne vous en escrivebeaucoup d’autres, pour moy vous sçavés et voyés en lisant la présente que j’escript mal que je donnepeine à lire mon escripture.

Je vous supplie de me mander comme quoy Mesdames sont arrivées. Si le voyage et le longchemin n’augmenta point le mal qu’avoit Madame à son partement de Thouars, et si nous auronsl’honneur de la revoir bientost. Je pren la hardiesse de luy toucher un mot de ce que je vous dis enpartant, mais le peu de temps qu’il y a que je sers Monseigneur et en iceluy le peu de service que jeluy ay faict a rendu a plume tellement honteuse qu’elle n’a osé exprimer mes conceptions et aussisans la grande bonté de Madame en qui je constitue la principale force de ce que je puis désirer et lavolonté que j’ay de servir son illustre maison toute ma vie je n’eusse pas entrepris d’en dire lemoindre mot puisque je n’ay point de raisons pour me fonder en mes services passés et aussi que j’aytrop peu de temps servy pour en espérer résompense, mais, Madame m’a promis qu’elle auroittousjours soing de moy, et tesmoigné estre satisfaicte de mes services.

Je vous supplie, si elle vous demande l’explication de ce que je ne luy dis qu’en crainte et quasisans m’expliquer de la donner telle que vous avés eu agréable de l’entendre de moy et me mander siou non elle aura bien reçeu ma lettre et scelon cela mesnager pour vostre serviteur ce que vous verrésluy estre utile comme aussi me faire sçavoir comme j’ay à me gouverner et si j’en doibs encoreescrire, car si cela importune, je n’en parleray jamais. S’il y a de la disposition, je m’asseure queMademoiselle me fera l’honneur de se souvenir de son très-humble service. Elle me l’a promis. Vousvoyés comme librement, j’use envers vous, aussi servés vous de moy à toutes occasions et je vousrendray des preuves véritables de la parfaicte affection et désir que j’ay d’estre toute ma vie,

Monsieur,

Vostre plus humble et très-affectionné serviteur.

Page 97: Années 1618-1623

97

d’Iray

A Laval, le 21e may 1623.

Mes baise mains à tout le monde tant de l’un que de l’autre sexe.

Archives nationales 1 AP 357/92

27 mai 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je vous escrivis il y a huict jours de Laval et vous fis sçavoir la bonne disposition deMonseigneur et de Monseigneur vostre petit-fils. Elle est encore telle grâces à Dieu que je prie pour lacontinuation de la vostre laquelle nous apprenons bonnes par M. de Frolles ; celuy qui vous la renduetelle en soit loüé et bénit à jamais. Je le prie aussi de tout mon cœur qu’il soit vostre guide en vostrechemin et en vostre séjour, et vous doint de parfaire vostre voyage heureusement et à nous l’honneurde vous revoir bientost.

Je vous escrivois par mes dernières, Madame, la résolution que Monseigneur avoit prise decélébrer icy le jeusne. Il y arriva le mercredy 24e pour cela au contentement, au moins en apparence,de tout le peuple, mais particulièrement de l’Eglise. Il a remis le geollier et les portiers sans s’arresteraux requestes des habitans qui depputent vers luy sur le faict de ceux-cy. Les plus factieuxtesmoignent du regret des choses passées et promettent de mieux vivre à l’advenir. Les autres seréjouissent de la présence de leur maistre et seigneur et tous ensemble asseurent d’une affection etfidélité entière.

Le principal est que toutes choses sont à présent restablies par la prudence et sage conduitte deMonseigneur tant icy qu’à Laval où il a laissé aux cœurs des habitans des regrets de son absence, et àla noblesse qui l’a visité un désir de le revoir et de le servir, car il s’est très bien et dignementcomporté envers les uns et les autres. Icy /2/, il faict de mesme et si le monde n’y est desraisonnable ilen acguerra bientost les volontés. La il a commandé à ses officiers de remettre au Thrésor tous lesactes d’hommages, adveus, déclarations et aultres tiltres qu’ils pourroient avoir entre leurs mains affinde tenir tout en estat de pouvoir assigner les homages généraux que ses officers pressent commenécessaires à la conservation des fiefs sur lesquels les voisins font des usurpations. Il en a toutes foisdifféré l’assignation jusques à ce qu’on voye un bon et certain affermissement à la paix.

Il a aussi faict faire les proclamations de la ferme du comté et en a aussi diffusé l’adjudicationpour n’estre encore à prix raisonnable. Elle estoit au passé à neuf mil deux cens livres en ycomprenant les parties casuelles. On n’en promet encore de tout que huict mil cinq cens livres. Il estvray que Olivet et la maison et jardin des Lices sont osté du […]laire du bail et qu’à la requeste etprière des Esleus […] le fermier d’employer quatorze escus par an à l’entretenement des ponts,chemins et chaussées. Je croy que le prix en montera. Il y a divers partis qui s’eschauffent.

Monseigneur a ordonné aux officiers des chastelanies du comté de Laval de ne plus recevoir lesadveux des vassaux, mais bien d’assister lorsqu’ils seront receus par ceux du comté. Cela s’est faictaussi pour les déclarations. On y parla en sa présence de l’arrest donné à la poursuitte des sergenspriseurs vendeurs, etc à ce qu’on fist ou refformer ou expliquer l’arrest qui semble leur donner plus deprivilèges d’avantage que l’edict de leur création et l’institution ne leur en attribue. On en doibtescrire à Paris de Laval où Monseigneur parla au sergent qui a poursuivy pour obtenir l’arrest. Ilpromet de s’accorder et s’accommoder en retranchat le nombre des sergens de Monseigneur.

On luy parla de créer un receveur ou chastelain général au comté pour poursuivre le payementdes cens et devoirs et avoir l’œil à la conservation des fiefs. Tout le conseil approuva et loüa cetteproposition, mais Monseigneur a encore différé d’y pourvoir.

On luy parla aussi des forges qu’il a veües et nous avec luy. C’est un très bel ouvrage /3/ quimérite d’estre conservé. La fanderie se parachève. Reste à présent de pourvoir au desdomagement etrécompense de ceux dont l’eau de l’estang couvre les terres. Sur quoy le Sr. de Bourgon164 faict de

164 François de La Corbinaye, seigneur de Bourgon.

Page 98: Années 1618-1623

98

grands cris et demandes. Les autres prennent leurs affaires plus patiemment et offrent de se contenterde la raison. Monsieur de La Mothe a desjà mis ordre à une partie, mais il n’a peu convenir avecledict Sr. de Bourgon, qui est à ce que je voy de très difficile convention. Peut-estre que la présencede Monseigneur le rendra plus traittable. On a mis isus de deux endroits une proposition d’arrenter laforest, laquelle dit-on ne se peut conserver aultrement ny les forges subsister plus de quinze ans sicela ne se faict, mais Monseigneur n’a encore rien résolu là dessus.

Icy on parla hier au conseil de la réünion des chastelanies de la baronnie de ce lieu. On proposeplusieurs grandes utilités tant présentes qu’à l’advenir de cette réünion mais aussi y a il quelquesdifficultés comme de contraindre les vassaux des chastelanies à venir plaider jusques en ce lieu. Il yen a d’autres mais on y trouve des remèdes, et à celle là on asseure que les vassaux donneront lesmains bien volontiers, et que bientost on fera en sorte que Monseigneur en sera prié ou aura leurconsentement soubz leur seing.

On propose de hausser la ferme de plus du quart, de rendre la ville et les marchés plus beaux etmeilleurs, de mieux conserver les frêts, et mesme les les chastelanies, de hausser les offices de prix etde recevoir une bonne somme présentement. A quoi M. de La Mothe et moy avec luy qui avons veu etouy les consultations qui en ont esté faictes à Paris bien qu’on ne fust pas du tout d’avis de faireladicte réünion, estimons toutesfois qu’on y doibt travailler. Si on tient ce qu’on promet et luy se faictfort d’apporter le consentement de la plus part des plus notables vassaux qui sont ses proches et alliés.Vous avés cy-devant entendu parler de toutes les choses, Madame, et ce que je vous en dis n’est quepour vous informer de ce qui s’est passé. J’obmetois à dire à Vostre Excellence que la chose a estéproposée icy avec plus d’apparence d’utilité, et moins de difficulté qu’à Paris où on ne parla point desmoyens et expédiens qu’on veult tenir pour les lever.

Monseigneur a receu la coppie de l’arrest donné contre du Val et l’estat du procès de Paris,mais Madame vous en avés sans doubte plus de nouvelles que nous et en apprendrés le mérite et lesparticularités à vostre retour audict Paris. Vostre Excellence a icy généralement tout ce qui s’est passédepuis mes dernières. Ce sont jusques icy des propositions, mais aussi avant que les exécutésméritent-elles d’estre considérées. Me reste à présent de vous supplier comme je fay très humblement,Madame, de me vouloir continuer les effects de vostre bienveillance et de vos soings et promessespour moy, qui atten de vostre bonté, de la libéralité de Monseigneur, de la bienveillance de Mmevostre belle fille et de l’affection et fidélité que j’apporteray toute ma vie à vos services, quelquespreuves, qui oultre le passé me facent cognoistre que mes services sont agréables. Pardonés-moy s’ilvous plaist, Madame, mais vostre bonté qui pardonne tout à tous se souviendra s’il luy plaist desprotestations que je luy ay souvent faictes, et que je réitère encore que jusques à la mort, je seray,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 27e may 1623.

Archives nationales 1 AP 357/93

27 mai 1623 - Vitréà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je touche encore un mot à Madame de ce que je vous escrivy de Lavalil y a huict jours et la supplie très humblement que par son moyen je voye et reçoive des preuves etasseurances que mes services sont agréables. Je m’assure que vous vous souvenés de ce dont je vousentretins sur le chemin de Lodun, et me promets que vous en aviés mesnagé et faict entendre lesraisons aux occasions.

Excusés s’il vous plaist ma liberté je n’en ay encore rien voulu dire à Monseigneur qui je croyrecognoist assés avec quelle affection je le sers et me persuade que si Madame daigne se souvenir demoy et m’honorer de sa faveur d’avoir tout contentement. Mandés-moy, je vous supplie ingénument etfranchement comme je doibs me gouverner, si insister, si espérer et ce que j’ay à faire et servés vouss’il vous plaist de moy, qui suis et serais jusques à la fin invariablement,

Page 99: Années 1618-1623

99

Monsieur,

Vostre bien humble et très-affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 27e mai 1623.

Archives nationales 1 AP 357/94

1er juin 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Vous aurés par la présente la continuation de la bonne disposition de Monseigneur et deMonseigneur le Prince, dont je m’assure tousjours des nouvelles plus particulièrement par la voye deThouars. Depuis mes dernières par le précédent messager, j’ay rendu compte à Monseigneur desdeniers que j’ay receu et mis pour son service durant deux ans finis hier et m’est un très grandcontentement et satisfaction de voir que Monseigneur en reçoive de mes services et particulièrementdesdicts comptes.

Je souhaitterois qu’il eust esté rendu avec aultant d’ordre et de moyen de servir que de fidélitéet bonne conscience. Monseigneur m’en a tesmoigné sa satisfaction non seulement en paroles, maisen m’ayant libéralement accordé pour la rente que je paye, ainsi que je luy ay faict voir et cognoistredes deniers que durant ledict temps j’ay empruntés pour son service et par son commandement etaussi ayant voulu considérer les frais de mes maladies et pour mieux dire en continuant envers moyses biens faicts la somme des trois mil livres qui est plus que je ne pouvois attendre ny espérer.

A cela, Madame, je sçay combien m’ont esté utiles vos favorables recommandations et les bonstesmoignages que Vostre Excellence a eu agréable de rendre de mes foibles services. Je n’ay point deparoles, Madame, pour vous en remercier comme je doibs et aussi vostre bonté est au de là de toutesparoles, mais Dieu vous rendra tant de bien-faicts s’il luy plaist ainsi que je l’en prie ardemment etqu’il vous doint en parfaicte santé toutes sortes de contentemens.

Ce qui se pourroit faire en ce lieu pour la pancarte est parachevé. Les lettres du Roy et lavériffication de la Cour de parlement /2/ de cette province restent. Monseigneur qui parle d’allermardy ou mercredy prochain à Rennes pourra en conférer avec son conseil et y prendre l’ordrenécessaire pour commencer ce qui y sera avisé, dont je ne feray faulte de donner advis à VostreExcellence et de ce que j’y apprendray. Les landes et communs et la réunion des chastellanies suivent.Au premier l’utilité est certaine, à l’autre elle est apparenté, mais l’un ny l’autre ne seront sansdifficulté. Monseigneur a mis ordre de faire voir et conférer avec ceux qui ont le plus d’intérest à lalande d’Isé, lesquels tesmoignent y vouloir donner leur consentement mesme promettent de travaillerà y faire condescendre les autres.

Monseigneur y alla jeudy et de là fut soupper au Chastelet où Monsieur de La Mothe le receutet traitta très bien et fit paroistre la joye qu’il recevoit de voir Monseigneur en sa maison. Mondict Sr.de La Mothe a plus d’espérance qu’il n’eust jamais qu’on pourra faire l’affaire de tout ou partiedesdictes landes non qu’il n’y croye des difficultés mais il estime qu’on les pourra surmonter,Monseigneur l’envoya hier à Laval pour accommoder et remettre les humeurs des habitans sur lesoppositions et difficultés qui se sont formées touchant les deniers dont a esté achepté le présent qu’ilsveulent faire à Madame vostre belle-fille. Vous les avés sceües cy-devant, or je croy que M. de LaMothe les lèvera par sa présence. Il doibt retourner aujourd’huy.

Vostre Excellence me faict l’honneur et daigne se souvenir de moy en toutes sortes, mesme seremémorés que cy-devant j’ay pris la hardiesse de luy dire que pour la conservation de ma santé leseaües de Pougues m’estoient nécessaires sçelon l’avis des médecins et me commander de passer pasParis. J’ay faict voir à Monseigneur ce qu’il vous a pleu m’en escrire et suis prest d’obéir à tout,l’ayant toutesfois très humblement supplié de me permettre (s’il me commandoit de demeurer auprèsde luy) et me donner congé vers la fin du courant pour aller à Pougues s’il reste du temps ou àThouars prendre les eaües que j’en ferois apporter lesquelles on me dict plus utiles que celles de Spa.Encore une fois je prie Dieu, Madame, qu’il vous rende pour tant de biens pour tant de soings. Ce que

Page 100: Années 1618-1623

100

vous luy demandés et attendés de sa bonté. C’est ce que je puis, Madame, que de luy continuer mesprières pour cela et de vous rendre toute ma vie toutes sortes de très humbles services ainsi que j’ysuis si estroittement obligé.

Monseigneur reçoit présentement des lettres de Monseigneur le Comte du 28e passé qui est entrès bonne/3/ disposition grâces à Dieu. Il est tousjours à Bournezau d’où Monseigneur le priera departir pour le venir trouver incontinent que les bleds seront couppés à Thalmond où Monseigneur nefaict point estat d’aller si M. le comte de La Rochefoucault ne va en Poictou.

Je di, Madame, que Monseigneur le Comte attendra quelques jours pour voir si ceux qui sontpour Monseigneur à Thalmond ne recevront point d’empeschement à la récolte d’aultant qu’en ce casMonseigneur le Comte les pourroit asseurer et fortiffier par sa présence ainsi que Monseigneur l’en asupplié. La moisson fust à présent bien advancé en ce païs là sans les pluyes trop fréquentes. Le Sr.Peussier qui escript du 27e du passé mande qu’on y debvoit commencer dedans huict jours. Cela faicton commence.

Je croy, Madame, que nous ne serons pas longtemps sans voir Monseigneur le Comte qui sansdoubte fust icy sans cela. Je n’ay à changer à ce qu’au passé. J’ay escript à Vostre Excellencetouchant la bonne union et amitié qui est entre Monseigneur et luy, et je prie Dieu qu’elle continue ets’il se peut reçoire de l’accroissement.

M. de La Servannière165 n’est point encore asseuré à l’Eglise de ce lieu et aussi le synode deNormandie n’a point encore tenu et n’est on pas mesme certain du temps qu’il tiendra. Monseigneurle trouve bien à son gré et aussi certes est-il honneste homme, d’humeur douce, docte, et qui parleavec grande facilité. Il est fort désiré et aimé en cette Eglise où il a plusieurs parens et amis et s’y estmarié. Il faict de son coté paroistre beaucoup de désire pour y demeurer, mais il craint qu’il se trouvedes difficultés en sa province pour le changement d’Eglise. Voylà, Madame, ce que nous avons quantà présent icy ; où et partout ailleurs rendra à vos commandemens une entière et parfaicte obéissance,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le premier de juin 1623.

Archives nationales 1 AP 357/95

4 juin 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Avec l’honneur de vos commandemens, j’ay reçeu par celle qu’il vous a pleu me fairel’honneur de m’escrire avec joye et actions de grâces à Dieu les bonnes et agréables nouvelles devostre meilleure disposition et de la force qu’il vous donne au milieu de tant d’affaires et de causes detristesses et ennuys de demeurer en l’estat qu’on espéroit de vostre arrivée pour l’ordre des affairesd’une telle maison et consolation de Madame vostre sœur qui en attendoit principalement de vous,aussi Monseigneur le duc de Buillon166 escript il que vostre arrivée Madame et de Madame vostrebelle-fille leur ont rendu Madame sa mère qui avoit tant besoing de vous. J’en loüe Dieu et le prie devous fortifier de plus en plus pour parfaire là ce que vous avés si bien commencé, après vous rendreaux vostres scelon mes souhaits.

Monseigneur a eu la migraine qui l’a plus tormenté qu’au passé. Il a prist hier un peu de cassedont il receut beaucoup de soulagement. Il se portoit bien hier au soir grâces à Dieu et sans douleur nyinquiétude. Il ne guarda point le lict ce ne sera rien Dieu aydant. Monseigneur le Prince a esté un peuenrhumé. M. Dissodeau l’a veu qui dit que c’est une petite fluxion causée et attirée par ses dents. On

165 Jean Blanchard, sieur de La Servanière, fils de Guillaume Blanchard, pasteur de Condé-sur-Noireau en Normandie. Lesliens étroits unissant cette Eglise et celle de Vitré expliquent cette requête. Jean Blanchard après avoir été pasteur de Condé-sur-Noireau en 1626, fut pasteur à Vire de 1626 à 1637 et enfin de Fresnes.166 Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne, devenu duc de Bouillon à la suite de la mort de son père.

Page 101: Années 1618-1623

101

escript, Madame, qu’il se fortifie grandement et croist en corps et en cognoissance aultant qu’on peutdésirer qu’il va à présent tout seul. Dieu en soit loüé. Nous en aurons bientost des nouvelles.Monseigneur le Comte a un grand soing d’en faire sçavoir des siennes à Monseigneur. L’abbé deRéau luy a faict parler d’accommodement.

M. de La Bourdillière doibt partir demain 5e pour aller à Thalmond /2/ pour préparer et disposertoutes choses au dessein qu’a Monseigneur de faire lever le revenu de l’abbaye. Il ne se trouvera pointsans doubte d’empeschement, et aussi Vostre Excellence se souviendra s’il luy plaist que nous avonsfaict tout ce que nous avons peu par l’advis du conseil de Paris pour empescher que les fermiers enfussent despossédés et ainsi que ledict Sr. abbé ou l’œconome les pourront contraindre au payementen vertu des jugemens qu’ils ont obtenu à Fontenay, cependant il n’y a point d’autre moyen à ce quechacun dit. Si nous apprenons quelque chose, je ne faudray à vous en donner advis et de ce qui sepassera. Mondict Seigneur la Comte a et faict paroistre avoir beaucoup d’affection et de soing de cetaffaire. M. de La Bourdillière le doibt voir en passant.

On a parlé de la proposition antienne de réunir les chastelainies de cette baronie. Chacun lecroit à présent utile et M. de La Mothe travaille avec ses amis pour la faire réussir comme aussi cellede La Lande d’Isé qui serviroit d’exemple pour avoir plus facilement raison des autres. Vous sçavésMadame l’utilité de cela mieux que personne.

J’avois escript à Vostre Excellence quelque chose touchant la proposition d’arrentement desforges de Laval et forestz de Missedon et La Gravelle sur ce que de toutes parts on dict et faict sçavoirà Monseigneur et particulièrement ses officiers de Laval que s’il ne faict ledit arrentement il n’y aurapas de bois pour entretenir la forge vingt et cinq ans. Ils en disent plusieurs raisons, mais la plusapparente et vray semblable est que les deux forestz sans toutes fois y comprendre les cantonsordonnés pour les usages aux quels on ne touche point, ne contiennent pas trois mil arpens. Ils disentbeaucoup moins ce que tous les ans le maistre de forges ayant droit d’en prendre quatre vingt arpens.C’est à dire durant les dix-huict années que dure son bail, et le bois ne rejettant pas comme faict lechesne, la forest se trouvera incontinent dépeuplée et ainsi à la fin du bail ou peu après les forgesinutiles. Voyla à mon advis la plus considérable raison qu’il y ait pour commuer le ferme en rente,d’aultant que ledit maistre de forges sembleroit lors plus obligé de conserver les forestz en estat qu’iln’est maintenant, ne luy important pas quel bois ou en quelle quantité restera après la fin de son /3/bail167. Je proposois qu’il pourroit prendre moins de bois, mais aussi on répond qu’il diminueroit àraison de ce qu’il laisseroit. Et ainsi on ne retireroit de plusieurs années grand utilité de la forge etmesme a peine de quoi récompenser et desdomager M. de Bourgon et les autres particuliers, dont lesterres sont noyées par l’estang des forges. Elles sont très belles et bientost la fenderie travaillera. Lachaussée dudit estang est aussi des plus belles. L’intention donc de Monseigneur est de perpétuer s’ilest possible le prix des fermes de la forge et de la verrerie et ainsi d’arrenter lesdites forestz deMissedon et La Gravelle auxquelles par le bail à ferme on ne pouroit faire de couppes ny vendre debois. La seureté semble estre la chose plus requise. Le Sr. Poulardière168 propose d’y engager etspécialement hypothéquer lesdites forestz où il ne pourra rien vendre, engager ny aliéner en aulcuneautre façon, de ne prendre par chacun an qu’aultant de bois qu’il a droict d’en prendre, qu’il ne pourrafaire les couppes sans y appeler les officiers qu’il les fera clore de fossés deffensables par chacune descouppes. Que les bastimens qu’il a sur les lieux luy coustent plus de quatre vingts mil livres et qu’ilacquera un fonds dans le comté de Laval et baronnie de Vitré pour quarente mil livres de domainedont il fera constre dedans dix ans à Monseigneur, à quoy sa femme s’oblige avec luy en tous sesautres biens. Il est vray que la seureté des temps de sa ferme n’est pas plus grande car il n’a point decautions. Cette proposition a esté faicte il y a longtemps par M. de La Motte ainsi que vous pourrés

167La protection du patrimoine forestier fut une préoccupation constante de MM. de Laval tant au XVIIe siècle qu’au

XVIIIe siècle. Cf. Jean-François LABOURDETTE, “ L’administration d’une grande terre au XVIIIe siècle: le comté deLaval ”, Bulletin de la Commission historique et archéologique de la Mayenne, Nouvelle série, N° 46 (248), Octobre-décembre 1977, p.-54-169.168 Nicolas Le Macon, sieur de La Poulardière, acheta en cette année 1623 à Henri de La Trémoille ses forges de Port-Brilletet leurs annexes dans les forêts de Misedon et La Gravelle pour une somme de 30 000 livres payable en cinq ans et une renteannuelle de 6 360 livres. François DORNIC, Le fer contre la forêt, Ed. Ouest-France, Rennes, 1984, p. 24-25.

Page 102: Années 1618-1623

102

vous ressouvenir, Madame, mais depuis traversé par Lezerie169 de Laval et autres de ses amis etparens. En quoy MM. les officiers taschent à frapper leur coup, mais en tout événement je voyMonseigneur disposé à préférer ledict Poulardière auquel aussi à mon advis on ne peut oster lemarché premier puisque vous avés eu agréable, Madame, de rattiffier la subrogation à luy faicte parM. de La Mothe du contract faict avec de Guerne. Il y a dix ou douze jours qu’on en est là et qu’il n’ya point de moyen de le faire joindre. Il est vray aussi qu’il demande cent journaux de bois de plus /4/d’aultant qu’il s’obligeroit de ne point toucher à pareil nombre le plus proche du parc d’Olivet. Etledit bois proche dudit Olivet faict à ce qu’il dict la sixiesme partie de toute ladite forest de Missedon.Oultre ce que dessus et plusieurs autres clauses longues à déduire mais prises sur le bail faict à Parispar mM. de vostre conseil avec ledict de Guere.

Monseigneur désire deux promesses de luy et de sa femme par actes divers. L’une portant queMonseigneur pourra résilier et faire résoudre et casser ledict contract d’arrentement lorsqu’il sera enaage de parfaicte majorité si bon luy semble en consentant de luy payer la somme de deux mil escuslaquelle luy a esté promise par M. de La Mothe et MM. les officiers de Laval lorsque suivant lacommission de Monseigneur ils luy donnent l’emplacment de sa forge et chaussée et qu’à causedudict emplacement, plus commode pour Monseigneur et moins commode pour luy. Il avoit estécontrainct d’allonger la chaussée de plus du tiers et que pour ce faire il luy auroit cousté plus dequatre mil escus. Par le procès-verbal faict en vertu de ladicte commission de Monseigneur il apperque mondict Sr. de La Mothe et lesdicts officiers ont arbitré son desdomagement et récompense àladicte somme de deux mil escus, laquelle ils supplieront Monseigneur de lui accorder ce qui en casde résolution dudict contract seroit accordé.

Par l’autre promesse Monseigneur désire que ledit Poulardière et sa femme s’obligent de payerdedans cinq ans pour l’amortissement de la rente sçavoir la somme de trente mil livres à Monseigneurou à ses créanciers selon le mémoire qui en sera lors baillé ; et nonobstant iceluy payement de trentemil livres qu’il continue de payer la mesme rente qu’il payeroit dès à présent qui est le prix des fermesdes forges et verrerie à sçavoir viMiijC lx livres par an jusques à ce qu’il eust fourny à mondictSeigneur la somme de six vingt mil livres jusques auquel temps il ne pourroit rendre, eschanger,engager, surintcéder ny en aulcune autre sorte atitrée aulcune des choses contenues audict contractd’arrentement, mais il ne peut venir à raison et les dix mil escus cy-dessus luy font peur, estanttousjours obligé au payement de mesme rente. Il faict sur cela diverses propositions.

Monsieur de La Mothe vous a parlé et escript aultres fois Madame de descharger s’il y avoitmoyen les quantons ordonnés pour les usagers du droict qu’y ont les usagers et leur bailler la valeurou en leur délaissant du bois en propre, ou en leur donnant des terres vaines ou vagues, et /5-97/ ced’aultant que lesdits quantons sont inutiles, ledit Poulardière demande aussi lesdits quantons avecpouvoir de partager ou récompenser les usagers, puis dit il que Monseigneur n’en retire aulcunprosfict, sur quoy Monseigneur luy respond qu’il luy laissera procuration pour en traitter avec M. deLa Mothe en luy donnant advis de ce qui se passera pour conclure puis après selon soncommandement, et qu’estant approprié des dicts quantons il luy en baillera quatre cens journaux tantpour le récompenser des cent qu’il laisse près d’Olivet que pour ses peines à traitter et aussi e faveurdesdictes promesses qu’il feroit. Voyla où on en est, j’y travaille, Madame, et en tout ce qui concernele service de Monseigneur avec tout le soing et affection que je puis avec regret que la cappacitémanque.

M. de La Mothe parle de faire un voyage à Montfort. Il n’estoit hier icy, c’est pourquoy je n’aypeu encore obéir au commandement que Vostre Excellence me faict de luy parler de la pension quidoibt estre retenue sur Chambon. Je luy ay envoyé vos lettres. Nous l’aurons icy demain, Dieu aydant.Monseigneur a quelque envie de faire un voyage à Rennes pour voir la Court de parlement. Aussi à lavérité en est-il bien proche pour perdre l’occasion de cette visite.

Vous avés assés recognu en passant par Paris l’estat auquel j’avois osé vous dire qu’estoient lesaffaires qui ont besoin ou qu’en passant ou qu’en séjournant vous y apportiés par vostre prudence

169 François Debonnaire, sieur de Laizerie dans la paroisse de Bonchamp, un grainetier, d’une famille bourgeoise de Laval.Abbé ANGOT, Dictionnaire de la Mayenne, tome II, p. 18.

Page 103: Années 1618-1623

103

cognoissance et auctorité l’ordre que vous jugerés et recognoistrés nécessaire. J’ose dire, Madame,qu’il est besoing que vous en preniés s’il vous plaist un peu la peine et que Madame vostre belle-filley apporte aussi ce qui despend et est en sa puissance et auctorité. Monseigneur escript à M. Malherbequ’il trouve bon ce qu’elle luy a commandé de faire faire par un de ses clercs et le prie de continuer.

L’affaire de M. Trinquant et de ses beaux frères est remise au retour de Monseigneur àThouars. Ils ne veulent en rien accroistre leurs offres. Il y a des raisons particulières pour leur part,ainsi que je les ay cy-devant escripts à Vostre Excellence. Je n’ay rien de plus pour le présent, c’estpourquoy je n’adjousteray que la continuation de mes prières à Dieu à ce qu’il vous soit guide etconduit en vos voyages, que partout où vous serés il vous face recevoir le contentement qui est deub àvostre bonté et piété, que bientost nous recevrons l’honneur et la joye d’estre honoré de voscommandemens par vostre bouche, qu’il vous ramène aux vostres avec aultant de santé et deprospérité que vous en souhaittera toute sa vie,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant, trèsfidèle et obligé serviteur. d’Iray

A Vitré, le 4e juin 1623.

Monseigneur se porte très bien grâces à Dieu.

Archives nationales 1 AP 357/96 et 97

4 juin 1623 - Vitréà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je suis en peine de vostre disposition. Les lettres que vous avésescripts à M. de Rozemont m’en donnent de la crainte. Je prie Dieu qu’elle soit telle que je la désirepour moy mesme qui recevrois un regret extrême de sçavoir que plus longtemps elle souffrit del’altération, car vous estimant et honorant parfaictement comme je fay et que j’y suis obligé par tantde bons offices. Je prendray tousjours une grande part à ce qui vous arrivera de bien et de mal. Jevous supplie bien de le croire et que je suis aultant à vous qu’à moy mesme. Je vous di cela sansparler à la mode, car c’est du cœur et du meilleur de mon affection.

Monseigneur a eu quelque interruption en sa santé par une migraine qui l’a bien travaillé prèsd’un jour. A présent grâces à Dieu, il se porte très-bien, comme faict tout ce qui a l’honneur demanger son pain. Nous n’avons nulles nouvelles. C’est pourquoy je ne vous en diray point.

J’atten un mot de response et un effect de la bonté de Madame et de ses promesses. J’entenrester à celles que j’ay escriptes par les deux précédens voyages à elle et à vous. Je n’ay encore rienentamé en ma proposition. Je ne sçay si j’en attendray vostre advis ou si je commenceray premier qued’avoir en vos lettres. Je vous baise les mains, comme fait M. Brusse et nous disons le mesme à toutvostre monde de l’un et de l’autre sexe. Il me voit escrire la présente en laquelle il va lire toutprésentement que je suis,

Monsieur,

Vostre plus humble et très affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 4e juin 1623.

Archives nationales 1 AP 357/98

10 juin 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Depuis mes précédentes par le lacquais, Monseigneur a affermé son comté de Laval tantordinaire qu’extraordinaire et casuel la somme de huict mil livres au Srs. Barbin, Begéon et Bois

Page 104: Années 1618-1623

104

Gast. Olivet et les Lices n’y sont compris, le revenu desquels avec les charges nouvelles qu’on leurimpose valent sept cens livres, ce seroit en tout la mesme somme de la précédente ferme.

Monseigneur a pourveu le Sr. de St-Laurent170 de l’office de receveur du domaine à Laval. Lacharge sera utile pour l’esclaircissement des droicts et le recouvrement des cens, rentes et debvoirsdudit comté moyennant qu’on s’en acquitte bien, tous ses droicts et attributions ne doibvent charger laferme que de vingt et cinq livres par chacun an.

J’estime qu’aujourd’huy l’affaire des forges dont j’ay cy-devant escript amplement à VostreExcellence se parachèvera scelon le désir que Monseigneur en a tesmoigné en avoir. Les conditionsne sont du tout semblables à ce que j’escrivi à l’autre voyage, elles diffèrent en ce que Monseigneurs’oblige par le contract de remplacer sur les quantons des usages les cent arpens délaissés près Olivetet outre le nombre de trois cens arpens sur les dicts quantons de dans cinq prochains à la fin desquelsle Sr. de La Poulardière doibt payer à Monseigneur la somme de trente mil livres, mais d’aultant queMonseigneur ne dispose pas et par avant mesme n’en disposera pas lors dedits usages. Le Sr de LaPoulardière baille une contre promesse de ne tirer la clause à conséquence que pour deux cens arpensà prendre sur les autres bois de /2/ Monseigneur proches de ladite forge au cas qu’il n’eust lors traittéavec les usagers desdicts quantons. Que si aussi on peut traitter avec eux, la clause tiendra pour leditnombre de quatre cens arpens. Icy à Laval chacun croit ce marché fort advantageux pour Monseigneuret que sans iceluy les forges n’eussent peu subsister vingt ans, oultre que on n’eust peu à ce qu’on ditvendre les forests arrentés trente mil escus. Dieu veuille que cela se passe au contentement de VostreExcellence et de celuy de Monseigneur et de Madame sa femme à…, au bien de leurs affaires.

Hier M. de La Motte fut à la maison de ville pour faire enregistrer les lettres de Connestable dece lieu dont Monseigneur a pourveu M. de La Grange171. J’escri à Madame vostre belle-fille ce qui s’ypassa. On y depputa pour travailler sur la refformation de la Pancarte suivant l’arrest de la Cour172. Onen espère beaucoup d’utilité pour cette terre. Vostre Excellence la sçait mieux qu’on ne luy peut dire.En suitte Monseigneur veult faire travailler à la réunion des chastellanies de l’utilité de laquellechacun demeure d’accords et promet-on d’y travailler ardemment de tous costés.

M. de La Mothe se résout d’aller aujourd’huy à Rennes pour préparer et disposer les amis etserviteurs de Monseigneur à l’y recevoir. Il est toutesfois encore en doubte du temps qu’il fera levoyage. Nous n’avons rien sceu cette sepmaine de Monseigneur le Comte sinon par bruicts qui nousdisent qu’il se porte bien et se comporte aussi judicieusement qu’il est possible. M. de La Bourdillièredoibt l’avoir veu à présent et estre à Thalmond pour l’affaire de l’abbaye.

La santé de Monseigneur et de Monseigneur son fils est telle qu’on la peut souhaitter. Dieuveuille vous augmenter la vie, Madame, et vous donner par tout le contentement que vous désirerés, età moy la grâce d’estre toute ma vie honoré de la qualité,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 10e juin 1623.

Madame,

170 Annibal de Farcy, écuyer, sieur de Saint-Laurent, ajoutait cette nouvelle fonction à son emploi de procureur fiscal ducomté de Laval.171 Jean Perrier, Sieur de La Grange, avait été nommé le 2 juin 1623 Connétable de Vitré. Abbé Paul PARIS-JALLOBERT,Journal historique de Vitré, op. cit. p. 559.172 Du 19 juin au 1er juillet 1623, Antoine Laval, sieur de La Trouche, conseiller du Roi, premier avocat en la sénéchaussée etsiège présidial de Rennes, avait fait procédé à la révision de la Pancartes, c’est à dire des devoirs dûs au baron de Vitré :droits de péage et de provosté, de foires et marchés, de coustumes, de cohuage, de minage, de mesurage et de porche, delevage et de pavage. Cette réformation avait été faite en application d’un arrêt du Parlement de Bretagne du 18 juillet 1618pris à la requête de Charlotte-Brabantine de Nassau pour la conservation des droits de son fils. E. FRAIN de LaGAULAYRIE, Tableaux généalogiques, notices et documents inédits au soutien du mémoire où il est fait mention deplusieurs familles établies à Vitré et paroisses environnantes aux XVe, XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, Vitré, 3 vol, 1889-1898, tome I, p. 131-144.

Page 105: Années 1618-1623

105

Depuis ma lettre escripte on me dit que vous estes toujours tormenté de vostre douleur dejambe, cela met en peine vos serviteurs, moy particulièrement, Madame, qui ne reçoy au monde de sigrand contentement que quand j’appren vostre santé par faictes, comme aussi rien qui m’affligepassionnément que d’y apprendre l’altération Dieu par sa grâce vous la rende toute entière, et à nousl’honneur d’estre bien tost honorés par vostre bouche et vostre heureux retour & de voscommandemens.

Archives nationales 1 AP 357/99

24 juin 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Celle-cy ne sera plus pour vous importuner de mon affaire, mais pourvous remercier très-humblement et affectueusement du grand soing que vous en avés eu. Madame m’afaict trop d’honneur d’avoir voulu entendre par vostre bouche mes intentions et désirs sur lespromesses de sa bienveillance qu’il luy avoit pleu me faire. Il est vray que je ne m’en suis pasexpliqué. Je ne suis pas assés hardi pour cela et n’ay pas rendu d’assés longs et utiles services, et aussisuis-je peut estre plus malheureux que plusieurs qui ne doibvent pas moins à leur bonne fortune qu’àleurs services les biens faicts et grattiffications dont je les voy tous les jours honorés.

Je me replie tousjour sur la bonté de madite Dame de laquelle j’ay jusques icy beaucoupattendu et attendray toute ma vie. Et aussi n’en ay je encore escript ny parlé qu’à elle. Encore une foisje vous remercie très-humblement et vous supplie de ne vous en mettre plus en peine et laisser celacomme chose hors de saison. Seulement tenés-moy, s’il vous plaist, en vos bonnes grâces et croyésque je conserveray toute ma vie le souvenir de vos bons offices, bien heureux si une fois en ma vie jepuis rencontrer l’occasion de vous en tesmoigner le ressentiment que j’en ay et combienpassionnément je suis,

Monsieur,

Vostre très-humble et plus affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 24e juin 1623.

Archives nationales 1 AP 357/100

8 juillet 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Par celle qu’il vous a pleu m’escrire du 26e du passé vous me faictes l’honneur de me mander letemps de vostre partement de Sedan, et depuis j’appren vostre arrivée à Grouaincy, dont je loue Dieuqui vous aura guidé et conduict en tout vostre chemin s’il a exaucé mes prières ainsi que je le croy.Vostre Excellence me faict aussy l’honneur en me mandant des nouvelles de sa bonne disposition deme donner part à la joye que tous ses serviteurs en recevoient. La mienne doibt estre daultant plusgrande que j’y suis plus obligé par une suitte continuelle de tesmoignages et d’effects debienveillances qui tirent de moy des prières fréquentes et ardentes pour la continuation de vostre santéà celuy qui vous l’a redonnée.

Je ne vous ay escript aulcune chose, Madame, sur ce que vous m’aviés faict l’honneur dem’escrire touchant la pension sur l’abbaye de Chambon d’aultant que M. de La Mothe a deu vousinformer amplement de ce qui se passoit et aussi qu’il en voulut lors bien prendre la charge. Je croyqu’il vous y donnera tout le contentement que vous en souhaittés, Madame, il me l’a ainsi asseuré etque vous le recognoistrés par bons et véritables effects.

Si je le voy avant le partement du messager, je sçauray si ce voyage ne luy aura rien appris denouveau sur ce subject. Hier il me dict qu’ayant sceu l’arrest intervenu au renvoys du Sr. Dannelot,procureur du Roy en la mareschaulsée et que quelques personnes avoient envie de brouillet cetaffaire, il auroit envoyé à Thouars le Sr. Blanchet pour faire receuillir et percevoir les fruicts de

Page 106: Années 1618-1623

106

l’abbaye. Depuis nos dernières, Monseigneur, a eu des nouvelles de Monseigneur le Comte et luy aenvoyé des siennes le conviant encore à le venir voir et luy ayder à préparer la bienvenue de Madamesa belle sœur.

Je croy qu’il sera icy dedans peu de temps car quand mesme il auroit volonté d’attendre que lesfruicts de l’abbaye de Thalmond fussent receuilis, ce la ne peut guères /2/ tarder, car les mestives sontfort advancés là. Il m’a faict l’honneur de m’escrire et commander de vous envoyer Madame leslettres cy-incluses. Il est en très bonne disposition Dieu mercy. Je m’asseure que par luy mesmes vousen aurés les asseurances.

Monseigneur n’a point encore faict son voyage de Rennes. Il est résolu de partir le 10e pour celasans plus de différé. Il est en très bonne disposition grâces à Dieu. Nous avons appris de mesmedepuis deux jours de Monseigneur le Prince. M. de Netz a envoyé à Monseigneur une response à unelettre qu’il avoit escript à M. Elbœuf à ce qu’il envoyast procuration à ceux qui font ses affaires encette province pour assister à l’ouverture de la chambre du thrésor, ladicte response porte qu’il se fieentièrement à Monseigneur et que seulement il le supplie de commander qu’on mette à part les tiltreset papiers qui se vont trouver concernant ses terres et maisons, désirant en tout luy faire paroistre laconfiance qu’il prend en luy et le résolution de traitter et terminer toutes leurs affaires franchementfaisant un grand estat de l’amitié de Monseigneur. Cela aussi témoigne franchise en toutes sortes àmon advis. Il ne s’est passé icy aulcune chose aux affaires depuis mes dernières.

M. de La Mothe et moy avons par le commandement de Monseigneur esté voir voir quelqueslandes et communs que MM. du Boullay et de La Morinière173 veulent afféager, cela est bien peu dechoses, n’y en ayant que soixante-dix ou quatre-vingt journaux ou environ, mais ce seroit uncommencement. Tout semble se bien préparer pour la lande d’Isé dont Monseigneur pressel’afféagement, mais cela ne peut estre estre travaillé qu’après son retour de Rennes, où on dict qu’ilest attendu avec intention de luy bien recevoir.

Je prie Dieu, Madame, qu’il vous ait de sa guarde et vous doint toutes sortes de contentemens età moy les moyens de pouvoir par très humbles services et fidèles quelques fois mériter dignement laqualité que je désire plus que chose du monde,

Madame, de

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 8e juillet 1623.

Archives nationales 1 AP 357/101

18 juillet 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Obéissant à vos commandemens, je ne laisseray passer aulcune occasion de vous escrire depuismes dernières par le messager auxquelles je donnois advis à Vostre Excellence du retour deMonseigneur de Rennes et de ce qui s’estoit passé durant son séjour audict lieu. J’ay veu MM. lesofficiers de cette baronie desquels je n’ay rien appris de nouveau ny qu’en l’absence de Monseigneuril se soit passé aulcune chose qui mérite d’aller à vostre cognoissance.

J’ay receu des lettres de M. de Rouvray par lesquelles il me recommande de faire tenirseurement et promptement à Vostre Excellence le pacquet cy-inclus. On l’a porté à Thouars d’où ilm’a esté envoyé, ainsi j’y crains quelque retardement. La santé de Monseigneur est très bonne grâcesà Dieu que je prie pour la continuation et augmentation de la vostre. Monseigneur le Prince se portetrès bien, ainsi que nous avons appris par les nouvelles de Thouars que Monseigneur a receües.

Il est vray que le 4e de ce mois M. de Guise arriva à La Palice avec cinq grands vaisseaux cela atout allarmé. Cependant, je vi hier par lettres d’un marchand de La Rochelle du 8e à un autre

173 Julien Léziart, écuyer, sieur de La Morinière dans la paroisse de Mecé au nord-ouest de Vitré.

Page 107: Années 1618-1623

107

marchand de cette ville que mondict Sr. de Guise n’avoit empesché et n’empeschoit les vaisseauxmarchands d’aller et venir à La Rochelle. Un bruict court que le Roy l’a mandé pour apprendre lesraisons de son approche et séjour audict lieu de Palice.

Monseigneur n’a receu de Monseigneur le Comte aulcunes nouvelles non plus que de ce quis’est passé et se passe à Thalmond pour la récolte des fruicts. Il en attend d’heure à autres. Incontinentqu’il en aura receu, je ne feray faulte, Madame, à vous donner advis de la disposition de Monseigneurle Comte.

M. de La Tour duquel vous parloient mes dernières est en ce lieu /2/ pour traitter de l’affaire dumoulin et estang près Bécherel, à quoy je voy ce me semble Monseigneur disposé, mais l’absence deM. de La Mothe qui n’est encore de retour de Rennes en a jusques icy arresté l’effect, d’aultantqu’ayant plus de cognoissance que personne du mérite de cet affaire. Il seroit bon à mon advis de latraitter et terminer par le sien.

Les affaires des landes et communs semblent aller de bien en mieux, et desjà se trouvent assésde personnes qui veulent contracter. Monseigneur attend aussi pour ce faire mondit Sieur deLa Mothe que nous pourrons avoir icy aujourd’huy avec M. le président des Neptumières . Voylà,Madame, ce que nous avons quant à présent. Je prie Dieu qu’il soit vostre guide et conduitte partout,qu’il vous doint toutes sortes de contentements et à moy de mériter tousjours par mes très humblesservices la qualité,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 18e juillet 1623.

Archives nationales 1 AP 357/102

22 juillet 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Tous les vostres ont grande occasion de louer Dieu et le remercier de la continuation de vostresanté à laquelle vous debvés veiller comme au principal et considérer le reste comme accessoiresauxquels on pourra tousjours remédier pourveu que vostre santé vous demeure. Vous me faictesl’honneur de me dire que vous n’estes pas de ceux qui appréhendent le plus le mal dont l’air de Parisest infecté174. Je sçay assés, Madame, que par constance et vertu vous mesprisés ce qui faict frémir lesautres, mais à ce qu’on escript de tous costés le mal se rend universel, et faict que par s’en esloigner laplus part se résolvent à l’éviter s’ils peuvent. Je sçay bien aussi comme vostre présence et vos soingssont nécessaires aux affaires, mais le temps est mauvais et les affaires peuvent souffrir remise.

Il me semble, Madame, qu’un autre air seroit meilleur pour prendre des eaües que celuy deParis que chacun fuit. Pardonnés, s’il vous [plaist]175, à cette hardiesse à un serviteur qui a l’affectionet la fidélité vivement emprainctes au cœur, qui ne reçoit point de joye si parfaicte qu’aus nouvellesde voste santé et qui en craint l’altération. J’ay faict entendre à Monseigneur ce que VostreExcellence m’escript touchant M. de Netz. Je croy qu’il vous y respond, Madame, et le remet à vostreprudent advis.

M. de Champdor obéissant à vos commandemens m’escript ce qui s’est passé au conseil envostre présence. Sur quoy, je luy respons sans l’employer icy de peur de vous importuner de redites.Monseigneur m’a faict l’honneur de me dire qu’il vous escriroit son sentiment touchant le voyage deM. de La Mothe. Mondict Seigneur est en peine, Madame, de vous sçavoir à Paris en un temps quechacun s’en esloigne. Il ne s’est passé aulcune chose /2/ aux affaires de deçà depuis mes dernières par

174 Paris de 1438 à 1638 fut le point le plus pesté du royaume. Notamment pendant les dix années s’écoulant de 1622 à 1631la peste y joua à cache-cache d’un quartier à l’autre, partiellement contrôlée. Pierre CHAUNU, La mort à Paris. XVIe, XVIIe

et XVIIIe siècles, Librairie Arthème Fayard, 1978, p. 185.175 Pressé, D’Iray n’a pas écrit ce mot.

Page 108: Années 1618-1623

108

voye extraordinaire avec lesquelles je vous envoyay un pacquet de M. de Rouvray. Nous attendons àtoutes heures des nouvelles de Monseigneur le Comte. La santé de Monseigneur est fort bonne grâcesà Dieu. Il parle de partir sur la fin de la sepmaine prochaine pour aller à Laval, et y faire préparer cequi sera nécessaire pour la bien venue de Madame vostre belle-fille.

Les choses semblent préparées pour l’afféagement des landes, mais rien n’a encore esté faict encela. Je prie Dieu Madame qu’il vous inspire le conseil que vous avés à prendre pour vostre séjour oupartement de Paris. Le premier me faict craindre. Je le prie aussi qu’il vous doint partout de recevoirles contentemens qui sont deus à vostre bonté et à moy d’estre tousjours honoré du tiltre,

Madame de,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 22e juillet 1623.

Messieurs Brusse et Rozemont vous remercient très-humblement de l’honneur que vous leursfaictes de vous souvenir d’eux.

Archives nationales 1 AP 357/103

23 août 1623 - Thouarsà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay appris en ce lieu par lettres de Paris et de St-Mor la continuation de vostre bonnedisposition dont je loue Dieu et le prie ardemment de tout mon cœur de vous l’augmenter et vousdonner toutes sortes de contentemens. Je suis icy depuis dix jours et espère y faire encore aultant deséjour pour parachever à prendre les eaües de Pougues dont j’ay commencé l’usage et me rendreincontinent auprès de Monseigneur scelon ses commandemens et y attendre ceux de VostreExcellence pour y rendre ainsi que je doibs une entière et parfaicte obéissance.

Icy tout roule à l’ordinaire. J’y ay assisté au conseil où on parle des affaires dont j’escri àM. Malherbe et luy envoye les mémoires qui ont esté dressés sur celle de Colasseau176. Monsieur deLa Mazure et moy avons conféré avec M. Demeufves touchant la cession à luy faicte par feu sonnepveu177. Il s’est résolu d’envoyer un de ses enfans au païs de son nepveu, où il croit qu’il a du bien.Son père luy debvoit deux mil escus qu’il luy avoit presté pour entretenir sa famille, acquérir desdomaines et marier deux de ses filles. Ledit Sr. Demeufves oncle en a l’obligation, laquelle sondictfils doibt faire voir à MM. du conseil à recevoir d’eux ordre et advis pour s’y confirmer /2/ scelon lesmémoires qu’il en a tant pour ce qui concerne la seureté de ce que Monseigneur a desjà payé enconséquence de ladite cession que pour celle dudit Sr. Demeufves de ce lieu que l’affaire reguardeprincipalement.

Je ne diray point icy à Vostre Excellence l’estat auquel je laissay à Laval Messeigneurs etMadame vostre belle-fille, car je sçay que depuis vous aurés en de leurs nouvelles qui lors estoienttrès bonnes ainsi qu’elles sont encore Dieu mercy à ce que j’appren par un homme qui vient de là.

Pour le général nous n’avons rien en cette province, laquelle j’appren estre toute en paix. LeSr. Peussier n’a trouvé aulcune opposition à la récolte des bleds de l’abbaye de Thalmond. Rien ne l’atroublé que la pluye. Un peu de bon temps l’en mettra bien tost hors. Resteront les vendanges. VoylàMadame ce que je sçay pour le présent. Je prie Dieu encore une fois ainsi que je feray tous les joursde ma vie qu’il vous doint en parfaicte santé et longue et heureuses années et à moy de pouvoir vousrendre les très humbles services que vous doibt,

176 Prosper Ier de Colasseau, seigneur de Beaulieu, capitaine au régiment de Boissy, époux de Marie de La Fontaine, Dame deBouillé-Loretz, avait rendu aveu le 23 novembre 1617 de tout ce qui à Bouillé-Loretz relevait du duché de Thouars. Il avaitintenté une requête contre les La Trémoille « pour oster un poteau planté à Bouillé-Lorets » (Cf. lettre du 9 septembre 1623 àCharlotte-Brabantine de Nassau).177 Cette mention laconique nous apprend que Charlotte-Brabantine de Nassau qui était intervenue en sa faveur lors de sonséjour à Paris n’avait pu obtenir du Roi la grâce de Philippe Demeufves et que celui-ci avait été exécuté.

Page 109: Années 1618-1623

109

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Thouars, le 23 aoust 1623.

Archives nationales 1 AP 357/104

9 septembre 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je suis depuis deux jours de retour auprès de Monseigneur que grâces à Dieu j’ay trouvé etMesseigneurs vos autres enfans en très bonne disposition. Il est vray que Monseigneur le Prince aencore de reste une petite toux de laquelle on aura bientost la fin. Ce bon Dieu qui luy a redonné sasanté vous conserve la vostre par sa bonté et nous doint par l’accroissement de vostre prospérité deplus en plus matière de louanges.

Icy j’appren que le procès-verbal de la pancarte de ce lieu cy devant dressé par un des substitutsde M. le procureur général du Roy n’a pas encore esté soubsigné par les habitans qui mesme ont denouveau faict une depputation de quinze pour entendre la lecture d’iceluy et en faire leur rapport à lamaison commune et ainsi pour ne finir jamais. Aujourd’huy se doibt trouver en ce lieu ledit Sr.Substitut et à la requeste du Sr. procureur fiscal faire sommer et assigner les quinze nommés etdepputés pour ouïr la lecture de sondict procès verbal et en cas d’absence d’aulcun d’eux prendred’autres habitans d’office.

Je n’appren point qu’on ait beaucoup avancé en l’affaire des Landes et croy qu’enfinMonseigneur se résoudra de prendre lettres de triage pour celles où les habitans proches prétendentusage. M. Malherbe m’escript qu’ils attendent les pièces concernants la première et ancienneconcession du droict de nomination aux offices royaux de Laval pour faire voir à MM. les gens duRoy sur quoy se sont fondés MM. du conseil pour la concession des lettres de confirmation etrestablissement audict droict, mais Monseigneur remet, M. de Netz qui aussi luy en a escript, aupremier voyage du messager, et que durant ce temps là il les fera tenir prestes.

Vostre Excellence aura eu advis sans doubte de l’accord et traitté faict avec M. de La Tourtouchant les moulins ruinés de la tour près Bécherel. C’est pourquoy Madame je ne vousimportuneray point de redites.

J’ay laissé toutes choses à Thouars à l’ordinaire. L’arrest intervenu sur une requeste présentéepar Colasseau pour oster un poteau planté à Bouillé /2/ Loretz nous a mis un peu en peine. Incontinentque nous en eusmes advis je depeschay à M. Malherbe avec amples mémoires pour advoir l’advis duconseil et s’y gouverner scelon iceux, mais principalement pour opposer et empescher l’exécutiondudict arrest dont la commission est addressée à MM. les lieutenans général ou particulier d’Anjou,celuy-là me semble y avoir procédé civilement et judicieusement, car premier qu’exécuter ledict arrestil ordonna que Monseigneur seroit appelé et ouy par devant luy. Nous avons faict comparoistre àl’assignation et demandé délay de quinzaine que nous avons eu pour advertir Monseigneur veu sonabsence et la précipitation dont on a usé audict arrest, car l’instance de réintegrande n’a esté intentéequ’à la fin de juillet dernier et jugée le 13e aoust suivant. Depuis que je suis en ce lieu Monseigneur aenvoyé procuration pour récuser lesdicts Srs lieutenants si besoing est et cela pour avoir le loisir derecevoir de Paris ou une surséance ou des déffences. Ledict Sr. Malherbe m’escript qu’il a envoyél’advis du conseil à Thouars, si on eust allégué la possession de Monseigneur qui est immémoriale,certaine et très aisée justiffiée. Je ne croy pas que l’arrest fust intervenu et de Thouars on pouroitenvoyer cela facilement. On estime qu’à Paris il y a pièces suffisantes pour cela, et n’est qu’unincident et qui ne faict aulcun préjudice au fonds où Monseigneur à tous les droicts du monde, maiscependant cela ne laisse de luy apporter de la fascherie.

Je ne voy point encores qu’on ait parlé d’autres affaires aussy il y a il fort peu de temps que jesuis arrivé de Thouars où Madame j’ay laissé une joye très grande aux cœurs de vos très humbles etfidèles serviteurs en l’espérance qu’ils avoient que bientost ils seroient honorés et bien servis de

Page 110: Années 1618-1623

110

vostre présence tant agréable et souhaitte de tous les gens de bien, principalement de la famille devostre très-humble serviteur bien obligé à continuer de plus en plus les prières à Dieu pour la santé etle contentemens de Vostre Excellence. Cette nouvelle nous estoit arrivée au temps que j’y estois,M. Berthold me la continua et Dieu sçait avec quelle allégresse nous la receusmes, ce sera en sontemps et Dieu veuille que ce soit toutes les fois que sa santé et son contentement le requèreront scelonles souhaits,

Madame, de

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 9e septembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/105

9 septembre 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Je veux recommencer mon commerce et vous donner encore la peinecy-après de lire mes lettres, non que j’en veuille exiger de vous qu’à vostre loisir, car je ne désire pasque pour m’escrire vous vous mettiés au moindre soucy, ny que vous vous destourniés tant soit peudes affaires qui je m’asseure vous occupent tout entier fussiés vous plus hault de demy pied que vousn’estes. Vous n’aurés pas désagréable que je vous die mon retour en ce lieu, et mes belles vaillances àbien boire tous les jours six choppines d’eaüe, si c’eust esté du vin il eust mieux value, et ce conseil làm’estoit bien donné par Marot, mais je ne l’ay jamais creu grand médecin, nous n’avons toutesfoispas laissé de prendre des temps de nous souvenir de vous en la façon qu’on doibt se souvenir de sesamis et en beuvant en nos petites compagnies du voisinage vous souhaitter des biens qui iroient sansdoubte au delà de vos propres souhaits.

Le bon M. Berthold arrivoit à Thouars au temps que j’en partois. Il vous aura dit ou dira debouche la joye que j’ay receue de ce qu’il m’a dit qui le concerne. A dire vray il contenta grandementmon esprit et prise beaucoup la compagnie et société des gens de sa sorte et de la vostre. J’en voy peude semblables. Je me hastay de retourner et n’ay entièrement parachevé mes eaues sur lescommendemens que Monseigneur me faisoit, réitérois de retourner. Je prie Dieu que je puisse luyestre utile en quelque chose.

Au nom de Dieu ne perdés pas les occasions d’asseurer, Madame, de la continuation de montrès humble et fidèle service, et que rien n’est plus grave dans mon cœur que la volonté de luy enrendre qui luy soit agréable, faictes moy s’il vous plaist cette faveur d’en asseurer aussi Madamoiselleà la bonté de laquelle moy et ma famille avons des obligations infinies. Je pren beaucoup dehardiesse, mais vostre prudence la mesnagera et me rendra excusable, et aussi qu’il est bien malaiséque de l’abondance du cœur la bouche ne parle.

Icy je trouve tout ainsi que je le laissay. Tout le monde y est en bonne disposition grâces àDieu. J’escri à Madame ce que j’ay appris aux affaires. J’ose croire qu’elle ne l’aura pas désagréableny vous la parfaite volonté que j’ay d’estre tousjours creues et recogneur de vous,

Monsieur,

Vostre très-humble et très affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 9e septembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/106

16 septembre 1623 - Vitré

à Monsieur de Rozemont (?)

Monsieur, J’atten en ce lieu de Vitré M. de La Mothe pour aller avec luy à Lavalcercher et faire cercher les pièces consernantes l’ancienne concession et octroy du droict de

Page 111: Années 1618-1623

111

nomination aux offices royaux à Laval. Je trouve ce petit loisir que je ne veux pas perdre et ne puismieux l’employer qu’à vous escrire. Je vous remercieray donc pour ma femme avec toute l’affectionqu’il m’es possible de la faveur que vous luy avés faicte de luy envoyer des pseaumes. Vous estes tropsoigneux de ce qui me touche. Vous me comblés de vos biens et me trouvés tousjours inutile à vousservir. J’en ay bonne volonté mais point de moyens dont je suis bien marry.

Patience ! Nous ne serons point batu on ne le savons que peu icy car nous ne faisons pointgrand chose. Nostre pancarte est sur le bureau. J’espère que nous en aurons bonne issue. Dieu la dointtelle à Madame de toutes ses affaires. Je l’espère telle puisqu’il bénist tousjours ce dont elle aagréable de se mesler. Nos landes et communs sont tousjours terres vaines et vagues, assés depersonnes en demandent mais quand il fault joindre on nous ne les pressons pas assés où ils reculenttrop, ainsi prou paroles, mais point ou peu d’effetcs.

Je croy que vous aurés bientost à Paris un homme bien patient et raisonnable, le Sr. Chesneauqui va si on ne change d’avis poursuivre les lettres royales pour la pancarte et la réunion deschastellanies de cette province. Il travaille assés, mais il n’avance guères icy. Peut-être qu’ailleurs sonlabeur ne sera pas si ingrat. En vérité je suis estonné qu’il n’a la pia mator transpiores et grandementestoné de coups de pancarte, de réunion, de landes et communs, etc.

Je vous remercie aussi de la peine que vous avés prise de m’escripre le 2e du courrant. Mesdernières vous aurons appris comme je me suis réintégré en Bretaigne et depuis quel temps. Nous nesçavons point icy où nous irons voir MM. les Estats ny où ils sont assignés.

Mais mon Dieu il m’a semblé ouïr lire ès dernières de Madame à Monseigneur quelque chosequi ne me faict point croire que si tost, elle parte de là. En vérité, je suis étonné de sa résolutiond’avoir si longtemps demeuré en un tel air. Je vous supplie de me mander tousjours des nouvelles desa santé que je souhaitte estre parfaicte et en prie Dieu du meilleur de mon cœur et de luy donner etfaire recevoir chacun jour toutes sortes de contentemens.

Mademoiselle me faict plus d’honneur que je ne mérite de daigner se souvenir de son trèshumble serviteur. Je ne doubte point que ma femme ne luy ait envoyé ce qu’elle luy a commandé. Ellel’avoit desja voulu faire, mais le messager ne peut le porter.

Maintenant que Mlle de Madaillan est en santé, il luy fault mari. Elle en vault la peine. Elle aeu trop de courage. Pour moy je donne ma voix à M. du Ponthieu. Il est digne d’elle et elle de luy. Jeleur baise à l’une et à l’autre très humblement les mains il ne tient qu’en eux qu’ils ne me façent bienaise, car, en vérité, je le seray quand j’apprendray leur mariage. Si vous les voyés dites leur s’il vousplaist de ma part.

Je vous supplie aussi que Mlle Dully, et Mlle de La Verrie, M. de Pontaubray. M. et MadameBriseau trouveront icy mes très humbles baise-mains. Que le bon M. de Champdor les y trouve aussy.Je luy suis, je luy suis et seray toute ma vie,

Monsieur,

Très-humble et très affectionné serviteur.d’Iray

A Vitré, le 16e septembre 1623.

J’adjoute cecy de Laval le 17e juin au matin où nous avons mis par ordre toutes les piècesénoncées et contenues au veu de l’arrest du conseil concernant la confirmation du droict denomination. M. de La Mothe les a mises ès mains du messager pour les mettre en celles de M. deNetz. On ne les a pas retirées sans peine au commencement à cause de quelques petits riettés survenuscy devant entre MM. les oficiers de ce lieu. Chacun n’estoit pas content. Le voyage n’a pas esté sansfruict.

Archives nationales 1 AP 357/107

17 septembre 1623 - Lavalà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Page 112: Années 1618-1623

112

Celle qu’il a pleu à Vostre Excellence m’escrire du 3e du courant m’a esté rendue à Vitré où jelaissay hier Messeigneurs et Madame vostre belle-fille en très bonne disposition, grâces à Dieu, que jeloue d’apprendre la vostre si bonne et le prie ardemment de la vous continuer telle, mesmel’augmenter longuement et heureusement.

Monseigneur a de nouveau despesché en Anjou conformément aux advis de Paris et de Thouarspour empescher s’il y a moyen l’exécution de l’arrest donné en faveur de Colasseau et faire que lesparties soient sur les causes d’opposition de Monseigneur renvoyées au Parlement pour recevoirrèglement. Nous attendons de sçavoir ce qui s’y sera passé.

J’ay suivant vos commandemens (auxquels Madame je rendray toute ma vie une entièreobéissance) parlé à Monseigneur pour sçavoir ce qu’il aura agréable de contribuer pour les bastimensdu temple de Charenton et vous l’escrire, mais il m’a faict l’honneur de me dire qu’il vous en avoitescript cy-devant assés au long.

Depuis ma précédente, il ne s’est passé aulcune chose à Vitré qui mérite d’aller à lacognoissance de vostre Excellence sinon que Monseigneur a faict mettre entre les mains des depputésdu corps de ville dudit lieu le procès-verbal de la Pancarte pour leur faire voir que rien n’a estéadjousté ny diminué à ce qu’eux mesme ont délibéré et avisé sur ce subject et aussi pource qu’il estnécessaire qu’il soit signé d’eux, ce qui ne pouroit estre que premier ils n’en eussent /2/ eu la lecture.

Je loüe Dieu, Madame, de voir tousjours une telle union entre Monseigneur et Monseigneur sonfrère. Je m’asseure, Madame, que vous en recevrés un très grand contentement, ceste créanceredouble ma joye qui ne sera jamais que entière, que lorsque je verray que quelque chose deffaudra àvostre satisfaction à laquelle procurer tous les vostres sont bien estroittement obligés et vos serviteursà y contribuer tout ce qui peut et pourra dépendre d’eux. Je di que tous le doibvent et ne crois pasaussi qu’aulcun ait autre pensée.

Pour moy, je n’ay en cela ny en toute autre chose moyen meilleur que mes souhaits et mes veuxet prières et si je puis quelque autre chose qui vous soit agréable, Madame, je ne desfaudray jamais enun seul point. Je désirerois avoir des paroles qui me peussent mieux exprimer et vous faire croire etpleinement persuader cette vérité. Monseigneur le Prince est en parfaicte santé grâces à Dieu, maisvous en aurés d’ailleurs des nouvelles plus particulières.

Monseigneur a envoyé en ce lieu M. de La Mothe auquel j’ay tenu compagnie pour cercher etmettre à part les pièces nécessaires à la vérification à la Cour des Aydes du droict de nomination deMonseigneur aux offices royaux de ce comté et sur lesquelles l’arrest pour la confirmation dudictdroict est cy-devant intervenu au conseil, lequel nous avons veu et retiré toutes les pièces et actesénoncés en iceluy qui estoient ès mains de Vautorte, lesquels mondict Sr. de La Mothe a mis ès maindu messager de ce lieu pour les rendre en celles de M. de Netz qui je m’asseure ainsi qu’il est biennécessaire aura soing de les conserver jusques à ce qu’il soit besoing de les produire, et après de lesretirer. Monsieur de La Mothe luy en envoye un inventaire.

Monseigneur nous a aussi commandé de voir icy s’il y aura moyen de trouver prix raisonnablede certains bois taillis assés inutiles esloignés d’icy et desquels on n’a de longtemps retiré aulcunproffict, et aussi de luy cercher un fermier de la glandé des forests de Boyère et Allouée, et après deretourner auprès de luy. Je croy que nous employerons ce jour de demain à l’exécution de cecommandement.

Je prie le bon Dieu qu’il bénie vos desseins, accomplisse vos désirs, partage tous les affairesdont vous avés /3/ agréable de prendre soing et la peine et vous doint tousjours et en tout d’enrecevoir et ressentir les fruicts et les contantemens que vous mérités scelon les souhaits et les prières,

Madame de

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Laval, le 17e septembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/108

Page 113: Années 1618-1623

113

23 septembre 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Vous me dites tant de belles et bonnes choses que je n’ay pas de motà répliquer point de moyens de vous remercier, point d’occasions de vous servir. Je vous jure pourtantle bon vrayement que s’il s’en présente vous recognoistrés qu’estant personne sans considération, aureste il y a en moy une bonne volonté, une parfaicte affection et une fidélité entière vers mes amis.Que je serois content si ma bonne fortune vouloit que je vous procurasse une moitié de vous, qui fustaultant digne de vous que vous et celle serés honorés et estimés de moy ; et je vous jure que puis envoulés prendre une de ma main je ne jetteray jamais les yeux que sur une belle et qui ait pour le corpset pour l’esprit les qualités qui vous sont nécessaires. Je sçay un peu ce qu’il vous fault, mais premierje veux sçavoir quand l’envie voue en prendra, et lors nous tascherons de vous pourvoir scelon vosappétits, car vous en valés la peine.

Madamoiselle me faict des honneurs dont je suis indigne. Je suis assés redevable et obligé à sabonté et à ses biensfaicts sans de nouveau me daigner honorer de son souvenir. Je prie Dieu qu’il luydoint tousjours les contentemens qu’elle mérite et que je luy souhaitte.

Je n’ay point veu encore la personne que vous me nommer par vostre lettre d’aultant que lemessager n’est arrivé qu’à ce matin et veult repartir incontinent. Vous aurés veu M. de La Mothe sansdoubte avant que la présente soit parvenue à vous. C’est pourquoy il seroit superflu de vous entretenird’affaires ny de nouvelles. C’est une très bonne lettre parlante à laquelle rien adjouster seroitsuperflu. Tout est icy en très bonne santé grâces à Dieu que je prie continuellement et prieray tant queje vive pour celle de Madame et sa prospérité.

Je suis si pressé que je ne sçay si je pourray faire response à M. Berthold. Ce sera pour demainou lundy que Monseigneur envoyera. Depuis le commencement de ma lettre que j’ay prise et laisséeplusieurs fois on me faict peur de la disposition de Madame et de faict je voy par celle qu’elle m’afaict l’honneur de m’escrire qu’il y a eu de l’altération. Dieu par sa grâce luy veuille rendre une santéparfaicte et à moy me donner les moyens de luy rendre des très humbles et agréables services, et depouvoir vous tesmoigner combien je suis passionnément,

Monsieur,

Vostre bien humble et très affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 23e septembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/109

30 septembre 1623 - Vitréà Monsieur de Champdor

conseiller et secrétaire de Madame à Paris

Monsieur, Je regrette avec vous que les pièces nécessaires à la vériffication dudroict de nomination aux offices royaux de Laval n’ayent esté plutost porté, mais incontinent que j’ayesté retourné de Poictou et que j’ay receu commandement d’en aller avec M. de La Mothe fairerecerche et les envoyer je n’ay ay pas manqué et […] y servir plustost et encore ne les eusmes non passans mistère. Toutesfois puisque Madame en a daigné prendre le soing, je ne desespère de riensçachant assés par l’expérience et la cognoissance du passé combien son affection est grande pour cequi touche Messeigneurs et comment elle sçait par prudence faire tout tourner à leur bien et advantageet en un mot faire ce qui sembleroit impossible et que d’autres n’oseroient tenter.

M. de La Mazure m’a escript touchant l’assignation sur la vente des offices des nouveauxconseillers en Poictou. Je croyois avec luy que ceux de Poictiers y fussent compris et pensionsbonnement avoir trouvé marchand. J’en ay escript à Fontenay et Niort et non à La Rochelle que jen’estimois pas y estre comprise. Nous verons ce que ferons nos lettres. Il en a aussi escript et faictescipre.

Page 114: Années 1618-1623

114

J’ay receu la coppie de la lettre de la Dame de Rocquemadour178 qui desjà avoit faict pareillesplainctes à Monseigneur. Je trouve la procédure de M. de Rouvray bien estrange et m’estonne de larigeur dont il use, cependant voyla les effects de tant de belles parolles et promesses. Tout ce qui sepeut faire en cela scelon mon jugement est ou de payer s’il y a condemnation pour les intérests en casqu’on ne puisse traitter avec luy. Ce dont je m’estonne le plus est des poursuites qu’il a faictes contreMadame qui ne luy doibt aulcune chose et n’a aultre intérest en l’affaire que celluy de Monseigneurqui a lé vérité luy a tousjours esté très sensible et de grand ressentimens.

J’ay faict entendre à Monseigneur ce que vous m’escrivés de la continuation de lamésintelligence entre MM. du conseil. Il est en grande peine et m’assure qu’il en escrira à Madame etla suppliera d’y mettre par sa prudence et auctorité l’ordre qui ne peut que bien malaisément y estremis par autre, et de faire tout ce qu’elle jugera estre expédient sur tout cela, vous m’obligés bien fortde me parler avec tant de franchise. Vous sçavés combien je l’aime et ceux qui en usent, vous meferés un singulier plaisir de continuer.

Je suis bien aise que nous ayons à Thouars M. de La Pilletière179. C’est un personnage de grandmérite qui je m’asseure servira utilement à l’Eglise.

Je prie pour l’heureux voyage de Madame à St-Germain et qu’il luy doint toutes sortes decontentement et de prendre une bonne résolution pour son partement ou son séjour à la Cour. Dieusçait si son contentement et de prendre une bonne résolution pour son partement ou son séjour à laCour. Dieu sçait si son contentement et service s’y rencontroit, lequel des deux je souhaitterois, vousm’en croyés je m’asseure sans jurer et combien j’ay de joye d’estre honoré par sa bouche de sescommandemens. Dieu la veuille conserver et luy donner en santé de longues et heureuses années.

Vous sçavés je m’asseure la grande affliction de M. et de Mlle de La Bourdillière et de M. deNerlu par la mort de la pauvre Mlle de Nerlu180, que je m’asseure tirera des regrets de la bonté decœur de Madamoiselle que Dieu veuille conserver par sa grâce et me donner de pouvoir voustesmoigner aussi véritablement par mes service en effect que jusques icy je vous ay, mais inutilementpuisque ce n’a esté qu’en paroles asseuré ce qu’encore toutefois je vous réitère que je suis,

A Vitré,

Vostre très humble et plus affectionné serviteur.

d’Iray

Je baise avec vostre permission à amis et amies très humblement les mains. Je n’escri point àM. Berthold n’ayant rien à adjouster à celle que je luy ay respondu et aussi que je le croy parti. C’estun bon et docte Allemand qui mérite d’estre aimé. A la bonne Mlle de Madaillan mes baise mains s’ilvous plaist.

Archives nationales 1 AP 357/110

7 octobre 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Pour ne laisser passer aulcune voye que vous n’appreniés des nouvelles de la disposition deMesseigneurs et de Madame vostre belle-fille. Je supplieray très humblement Vostre Excellenced’avoir agréable que j’asseure qu’ils sont tous en très bonne et parfaicte santé grâces à Dieu que je

178 Jeanne Prévost, la veuve de Jacques de Rocquemadour, le défunt procureur fiscal de Taillebourg.179 Pour remplacer André Rivet, parti pendant l’été 1620 aux Provinces-Unies pour enseigner la théologie à l’Université deLeyde, le choix de la duchesse douairière de La Trémoille s’était finalement porté sur Paul Geslin, sieur de La Piltière.Originaire de Nantes, il avait auparavant exercé le ministère à Châtellerault pendant une dizaine d’années. Il avait épousé uneprotestante d’Angers Marie d’Escorsse, fille de Symphorien d’Escorsse et de Jeanne Huet, et en eut cinq enfants : trois fils etdeux filles. Paul Geslin de La Piltière mourut dans le courant de l’année 1630. Le Fonds La Trémoille des ArchivesNationales et le Fonds Rivet de la Bibliothèque de l’Université de Leyde conservent une trentaine de ses lettres.180 Au vu de ce passage l’on ne peut que présumer que Laurent Chapeau, écuyer, sieur de La Bourdillière, capitaine deThouars, et Gabrielle de Maulay son épouse venaient de perdre leur fille Antoinette.

Page 115: Années 1618-1623

115

prie pour la vostre du meilleur de mon cœur. Je croy, Madame, que vous en aurés la certitude parleurs lettres depuis les mêmes dernières.

Le Sr. de La Poulardière a rendu compte à Monseigneur du prix de soixante arpens de bois donton luy avoit faict délivrance avant son dernier contract sçavoir trente à luy seul, et trente à luy et au sr.Lezerie en société lors. Ledit bois pris en Missedon à raison de cent livres l’arpent.

J’avois obmis en mes précédentes a faire entendre à Vostre Excellence que sur l’avis quej’avois eu des propositions que faisoit le Sr. Barateau de donner à Monseigneur pour estre continué ensa ferme de St-Laon la somme de deux cens livres par an oultre le prix courant de cinquante escusd’or de pot de vin et de quitter ce qu’il pouvoit demander à Monseigneur pour les payements quedurant la ferme courante il a fait et fera des décimes ordinaires auxquelles il n’est point obligé parladicte ferme courante, et aussi de s’obliger à les payer durant la ferme qui suivra et que ce dont ildisoit pouvoir demander restitution monteroit à plus de neuf cens livres.

Sur cet advis dis-je, j’en parlay à Monseigneur pour sçavoir s’il n’auroit point agréable que jefisse entendre cette poursuitte dudit Sr. Barateau au Sr. Prevost, chirurgien, et mondict Seigneur mecommanda de le faire, ce que je fis et le priay de ma faire sçavoir son intentions et ses offres.Cependant le Sr. Barateau arriva icy, mais Monseigneur ne voulust rien affaire avec luy qu’il n’eutappris les intentions dudit Sr. Prvost /2/ quatre jours après l’arrivée de celluy-là, la response du Sr.Prevost me fut apportée. Par icelle il me disoit que l’affaire valoit bien que luy mesme vint faire sonoffre, ce qu’il ne manqueroit d’exécuter le sabmedy ou dimanche suivant.

Monseigneur attendit ce temps là jusques au mardy au soir qu’il traitta avec ledict Sr. Barrateauaux conditions cy-dessus hosrmis qu’au lieu de deux cens livres par an il en a baillé tois cens oultre leprix courant sa première ferme n’estant encore finie, qui faict pour sept ans que Monseigneur luycontinue la somme de deux mil cent livres et qu’il a payé contant, sçavoir sept cens cinquante livresen deniers et le surplus en une obligation payable à Noël.

Monseigneur envoyera à Rennes un des jours de la prochaine sepmaine pour consulter ce qu’ilfault faire sur le procès-verbal de la refformation de la Pancarte de ce lieu, lequel les habitans neveulent vériffier au parlement de Rennes les lettres du Roy pour la perception de ce droict ; commeaussi pour consulter si certaines lettres obtenues par feu Monseigneur le comte de Laval père en 82 etrevériffiées audict parlement audict an pour establir et refformer ses foretz et landes en Bretagne nepourront pas servir à Monseigneur pour suivre les erremens passés sans estre obligé à en obtenir denouvelles. Cela est principalement pour restablir les usurpations faictes sur les dictes landes et forests.

Voyla, Madame, ce que je puis dire pour ce voyage à Vostre Excellence laquelle je prire Dieuardemment vouloir conserver longuement en bonne et heureuse santé et me donner de pouvoir par trèshumbles et fidèles services tesmoigner que je suis et seray toute ma vie,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 7e octobre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/111

14 octobre 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdorà Paris

Monsieur, Quoy qu’on en die quelque difficulté que puisse faire M. du Lis,advocat fiscal aux aydes, quelque peu de temps qui reste, si est ce que j’espéreray tousjours bien de laviriffication des lettres de nommination aux offices royaux de Laval puisque Madame est au lieu oùl’affaire s’agite, car comme vous dites il n’est donné qu’à elle d’entreprendre la poursuitte des choses

Page 116: Années 1618-1623

116

difficile, mais vous me dite un achoppement à sçavoir que Madame de Buillon a loué son logis181, etainsi que Madame est à loger ou y sera au 20e du courant.

A la vérité il ne seroit ny bon ny raisonnable que Madame arrestant et allongeant son séjour àParis pour mettre ordre et avoir soing des affaires de Monseigneur qui ont grand besoing de sa bonneconduitte et prudence pour estre très importantes et pesantes portast la despense nécessaire pour unlogement nouveau. Aussi croy-je que Monseigneur luy en escript amplement, vous verrés cela sansdoubte la lettre ou en entendrés le contenu touchant ce point. Il fault dire vray que la bonté et le grandsoing de Madame pour Messeigneurs n’a ny bornes ny mesure ny moy de paroles pour l’exprimer. Jeprie Dieu qu’il la conserve longuement en bonne santé pour eux et pour ses bons et fidèles serviteursau rang desquelz j’ose hardiment prendre place que je ne quitteray que par la mort.

Madame me faict trop d’honneur et à ma pauvre famille de daigner se souvenir de nous quin’avons que nos prières pour sa santé et prospérité. Par vostre première qui est du 2e du courant vousme faictes la faveur de me dire son soing. Je vous supplie de luy en faire de ma part les très humblesremercimens auxquels je suis obligé.

Je baise bien humblement les mains à Mlle de Madaillan la ressuscite. Je vous asseure qu’ellevault trop d’avoir si bon courage. Je luy conseille de n’y retourner plus de peur qu’elle n’en fust pasquitté pour le prix. Je vous asseure qu’elle vault trop d’avoir si bon courage. Je luy conseille de n’yretourner plus de peur qu’elle n’en fust pas quitte pour le prix. Je vous asseure que sa maladie ouplustost la peur que j’avois de sa mort et sa reconvalescence ont eu doubles larmes de moy, à sçavoirde tristesse et de joye.

Mes baisemains, s’il vous plaist, à Mamoiselle, à M. et Madame Brizeau et à tous mes amis etamies. J’ay faict entendre à Monseigneur ce que vous m’escrivés par commandement de Madametouchant l’accommodement désiré par M. Vincent sur ses prétentions et ce qu’elle vous a dict sur lasomme de 2 329 escus demandés par le rapporteur général et solliciteur des restes. Monseigneurrecognoit en tout ce grand soing et cette tendre affection de Madame que Dieu veuille bénir etconserver en longue et heureuse santé avec contentement.

J’arrive de Rennes ainsi que vous verrés par celle que j’escri à madicte Dame. Durant monabsence, M. du Plessis-Bellay a eu nouvelles que Mlle sa femme estoit malade de la petite verolle. Ilest allé à Thouars et ne l’ay plus trouvé. C’est pourquoy, je n’ay peu luy faire les recommandationsque Madame me commenda en vostre lettre. Ce sera par lettres au premier jour et que je luy escrirayparce que Madame ne luy a escript par ce voyage. Je vous di cela d’aultant […] laissé un mot de lettrepour moy par laquelle il me prie de retirer […] Paris pour luy et luy envoyer. J’ay obmis d’escrire àMadame que M. Peleus m’escript ayant charge du consistoire qu’on désire de moy que je sache deMonseigneur s’il n’a pas agréable de commander au Srs. Barateau et Demeufves de continuer afournir à M. de La Piltière qui desja est à Thouars avec sa famille la subvention accoustumée àM. Rivet. Je n’en ay encore parlé à Monseigneur n’ayant bonnement pas eu de loisir pour faire nosdespesches. Adieu, dispensés moy des cérémonies ordinaires lesquelles dites n’adjoustereoient rien audésir et affection que j’ay de vous tesmoigner plus par effets que par paroles et escripts que je suisinviolablement de tout le cœur,

Monsieur,

Vostre bien humble et très affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 14e octobre 1623.

M. de La Motte est parti je croy qu’il ne sera point hors de propos d’ouvrir celles que luyescript Monseigneur. J’ay obmis d’escrire à Madame que le conseil de Rennes est d’avis d’obtenirlettres du Roy pour restablir les usurpations faictes aux landes et forestz en la forme qu’estoient cellesde Monseigneur de Laval peu avant qu’obtenir lettres de tierçage.

Archives nationales 1 AP 357/112

181 L’Hôtel de Bouillon était situé à Paris dans le faubourg Saint-Germain rue de Seine.

Page 117: Années 1618-1623

117

14 octobre 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay receu celle qu’il vous a pleu m’escripre par Espérance le 2e du courant en laquelle VostreExcellence me faict l’honneur de me dire que les miennes luy sont agréables en ce qu’elle y list lesnouvelles de la disposition de Messeigneurs et recognoist la continuation de l’affection et fidélité demes services. Je ne manqueray jamais aux choses que je sçauray vous estre agréables ny au debvoirque je suis obligé de rendre non plus qu’à l’obéissance à tous les commandemens dont il vous plairaou honorer vostre bonté et vostre soing se font recognoistre par tout et en toute occasions pourMesseigneurs. La peine que vous prenés aux affaires de Monseigneur, vos sollicitudes pour les faireréussir, les effects qu’elles produisent font cognoistre, Madame, que personne n’a tant de soing etd’industrie que vous et que vos peines sont considérées par celuy qui seul envoye la bénédiction surles actions des siens et aussi puis-je asseurer Vostre Excellence que Monseigneur voit et reçoit celacomme il fault et recognoist combien il est redevable à vostre soing.

Depuis le retour d’Esperance le messager a apporté celles que vous avés escriptes de Paris àvostre retour de St-Germain par lesquelles, Madame, on apprend que M. de La Vieuville ayant sceuau vray pour qu’elle somme de Monseigneur est employé en l’estat de l’année, a refformé la lettrequ’il escrivoit à M. Morant et au lieu de six mil livres luy a baillé ordonnance pour douze. On yapprend aussi que le Roy a commandé que Monseigneur fust payé d’une dernière année de sa pensionpour l’année courante et que l’assignation en fut donnée sur les deniers qui seront accordés à SaMajesté par les Estats de cette province en la présente année.

Je n’estime pas qu’on tire grande subvention de ce costé là à cause de l’establissement etinstitution qu’on veult faire des trésoriers nouveaux. Toutefois il n’y en peut avoir si peu qu’il n’y enait pour suffire /2/. S’il n’est détourné ailleurs. Le lieu de Quimper où ils sont assignés n’est pointagréable à la pluspart, particulièrement aux commissaires de Rennes, aulcuns desquels s’escuserontsans doubte du voyage qui sera long et pénible.

J’arrivay hier au soir assés tard de Rennes où j’ay appris cela, j’y estois allé par commandementde Monseigneur pour apprendre où et en quelles mains sont les lettres et les tiltres des terres deBretagne, et pour voir et convenir avec ceux qui les ont de l’ordre et moyen de les retirer avec leurseureté. Il y en a ès mains des Srs. de Lorial et Alain, celuy-cy a un coffre du feu Sr. Geslin et ainsi jecroy qu’ils concernent cette baronie, celuy là a plusieurs papiers concernant Montfort, mais la plusgrande partie est ès mains de Mlle de Broize qui me remist à M. Turquant, lequel j’ay veu et doibtdonner mémoire audict Sr. Alain de la procuration qu’il désire estre donnée par Monseigneur à celuyqui les ira retirer avec la lettre ou coppie collationnée de M. d’Elbœuf portant consentement d’ouvrirle thrésor de ce lieu. Lequel de faict a esté ouvert après procès-verbal faict par notaires royaux suivantl’avis du conseil de Rennes auquel assista M. de La Motte au dernier voyage qu’y a faictMonseigneur. Il semble, Madame, que tous les papiers qui sont à Rennes où ils se guastent etpourrissent seroient mieux au thrésor d’icy où on en feroit inventaire lorsque les autres qui y sontseront mis d’ordre dont ils ont besoing.

J’avois aussi commandement de consulter quelques affaires à sçavoir à qui la cognoissanceappartient en cette baronie des faultes que commettent ceux qui vont à la chasse sans permission : auxjuges ordinaires ou aux officiers des forestz. On l’attribue à ceux-cy. S’il seroit à propos d’estreappellant d’une sentence donnée au proffit du Sr. de Martimont182 contre le Sr. de La Paillardière,condamné au payement des loyers d’une maison afféagée par feüe Madame de Fervaques à feu M. deMartimont, lors intendant des affaires de la maison de Laval et ce pour récompense de services payantses gages et le remboursant des frais faicts à la construction de ma maison.

Ce qu’on avoit à faire sur la pancarte à cause de la diminution et refformation que prétendentfaire les habitans de ce lieu sur le premier procès verbal faict avec eux, sur quoy on estime qu’il faultprésenter requeste et demander un commissaire. C’est un grand tour et comme à commencer de

182 Philippe de Vassault, sieur de Martimont, un membre de l’Eglise de La Roche-Bernard, réfugié à Vitré dans les années1590.

Page 118: Années 1618-1623

118

nouveau si on est bien fondé à se pourvoir contre un arrest de ce parlement donné en faveur deshabitans de ce lieu il y a environ dix-huict ou vingt mois contre un nommé Bernier183 queMonseigneur avoit nommé à M. de Rennes, et M. de Rennes avoit /3/ receu en qualité de prieur de St-Nicolas. C’est une affaire où à mon advis Monseigneur n’a intérest qu’à la fondation du droict denomination d’aultant que la fondation faicte par un des prédécesseurs de Monseigneur ne porte quechappelenie et non prieure, laquelle depuis a esté annexée à l’hospital, de sorte que ce que la cour aretranché de la pension du chappelain est appliqué à la nourriture et entretien des pauvres, mais laquestion est sur ce que Monseigneur désire y pourvoir conformément à la fondation et les habitansdisent que cela a changé de nature par la réunion faicte à l’hospital et partant que conformément àl’ordonnance ils ont droict d’y commettre que et nommer. La consulatation que j’ay faicte est ennostre fabveur. Ils disent en avoir une qui faict entièrement pour eux. Il y a encore un secret à sçavoirque par la fondation et depuis par augmentation de feu Monseigneur André de Vitré184 on accorde etdonne plusieurs choses aux chappelains de cette chapelle de St-Nicolas dont on ne paye rien etappréhende que si on veult tirer cette fondation à conséquence en faveur de Monseigneur que del’autre part on ne soit bien fondé d’en demander l’entretenement à quoy il y auroit du désavantageestant question de plus de six cens livres de rente dont on ne paye rien. Le meilleur à mon advis que lachose n’est que de petite conséquence pour Monseigneur à présent qu’on en sçait le mérite cequ’auparavant on ne disoit pas.

J’ay scelon ce qu’il a pleu à Vostre Excellence me faire l’honneur de me commander faict vosrecommendations à MM. du Plessis-Bellay, Brusse et à tous ceux de la maison. Ils s’en ressententgrandement honorés et vous remercient très humblement, Madame, de l’honneur de vostre souvenir.Le premier durant mon absence de ce lieu a receu nouvelles de Thouars d’où on luy mande que Mlledu Plessis à la petite vérole. Il est allé et croy que son retour auprès de Monseigneur sera réglé par lareconvalescence de sa malade.

J’espère tousjours bien de la veriffication de la Cour des Aydes du droict de nomination auxoffices royaux de Laval puis qu’il vous plaist prendre la peine d’en avoir soing, car je sçay et ayesprouvé que Dieu vous aime et bénit vos peines. J’ay faict entendre à Monseigneur ce que VostreExcellence a commandé à M. de Champdor de m’escrire touchant l’accommodement désiré parM. Vincent et les 2 329 escus demandés à mondict Seigneur par les receveurs et solliciteurs desrestes.

Je m’asseure, Madame, qu’il vous escript le grand ressentiment qu’il a de vos soings pour cequi le concerne. Je recognois tousjours la continuation d’une bonne union et amitié parfaicte entre luyet Monseigneur son frère. Ils sont en très bonne santé, grâces à Dieu, ainsi qu Madame vostre belle-fille et Monseigneur le Prince. Je m’asseure, Madame, que Monseigneur le Comte recognoit assésavec qu’elle affection vous luy escrivés l’avis de ses amis et serviteurs pour un voyage en poste à laCour et que tout ce qui luy vient de vous ou par vous luy est et sera tousjour /4/ très utile etadvantageuse n’ayant pour but principal que le bien et advancement des vostres. Il vous aura sansdoubte faict entendre ses raisons pour son séjour icy. En ce temps là les advis de Monseigneursembloient conformes à ceux qu’on donnoit de là sur ce subject. Vostre Excellence me faict l’honneurde me dire que lors on croyoit du bien en ce voyage, mais que le temps et les occasions changent.Vous en pourrés mieux juger que personne Madame et faire la différence nécessaire des temps.

Je tiendrois à grande grâce de Dieu de pouvoir penser, dire ou faire quelque chose qui peutvous faire recognoistre au vray quelle affection j’ay pour vostre service et des vostres, quelle joye devous voir et eux en parfaicte santé, quels souhaits et prières je fay pour la prospérité et accroissementde vostre très illustre maison, vous verrés que personne au monde n’est avec un cœur plus entier,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 14e octobre 1623.

183 Vincent Bernier. Abbé Paul PARIS-JALLOBERT, Journal historique de Vitré ou documents op. cit., p. 578.184 André Ier baron de Vitré de 1090 à 1135.

Page 119: Années 1618-1623

119

Archives nationales 1 AP 357/113

21 octobre 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Par celle qu’il a pleu à Madame me faire l’honneur de m’escrire duxje, elle me commande d’envoyer à Paris (si toutesfois il m’a tombé entre les mains) l’extraict del’article du compte de François David, receveur des tailles à Thouars, faisant mention des ijMiijCxxixescus demandés à Monseigneur par le solliciteur des restes d’aultant que sur ledict extraict on pourroitlever l’apostille, sur quoy je vous diray (n’estimant pas que cela méritast de luy escript) que j’ayenvoyé tout ce que j’ay receu à sçavoir le commandement faict par ledict payement dans lequel il mesemble qu’il est faict mention tant dudict article que de l’appostile en ces mots ou semblables allouépour le comptable sauf à recouvrer la somme susdicte sur Monseigneur et sur quelque habitant deThouars du noms duquel je ne me souviens. Il est vray que Madame ayant faict passer en allouantplusieurs parties purement et simplement on pourroit avoir deschargé Monseigneur sur le mesmearticle en cas que celle dont il s’agist en fust une. Je ne doubte point que puisque Madame a euagréable d’en parler à M. Durand on n’en puisse par son moyen plus de lumière.

Madame me commandoit aussi de luy achepter deux pièces de Quintin185. J’ay faict un voyage àRennes depuis avoir receu ce commandement auquel j’ay obéi. Je les vous addresse, c’est du plusbeau que j’ay peu trouver. Je vous supplie très-humblement de luy vouloir présenter de ma part. Ce neme sera pas un petit honneur et contentement si il se trouve à son gré. J’ay faict voir à Messeigneurset à Madame sa belle-fille la coppie de la lettre que luy escript M. d’Aersen.

Vous me faictes trop de faveur de me témoigner de l’appréhention pour la santé et me lasouhaitter bonne. Je vous en remercie très-humblement. J’ay eu quelques craintes, lesquelles par lagrâce de Dieu commencent à s’esvanouir. Je le prie pour la continuation et augmentation de la vostre,que partout et tousjours il vous donne occasion de contentement et à moy de pouvoir vous tesmoigneravec quelle affection je suis et veux demeurer tant qu’il me laissera au monde,

Monsieur,

Vostre très-humble et très-fidèle serviteur.

d’Iray

A Vitré, le 21e octobre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/114

21 octobre 1623 – Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je continue encore, grâces à Dieu, à commencer mes lettres par asseurer Vostre Excellence dela bonne disposition de tous Messeigneurs. Je le prie que par sa bonté nous puissions tousjours avoirde pareilles nouvelles de la vostre tant désirées des vostres et tant nécessaire à vos serviteurs à moyparticulièrement qui en ay tant d’occasion suivant le commandement que vous me faictes, Madame,par celles qu’il vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire du xje du présent.

J’ay faict entendre à Monseigneur ce que vous m’escrivés touchant les autre mil six cens livresque Monseigneur le Comte et Madamoiselle ont droict de prendre par chacun an pourparfournissement sur Bécherel et Gaël comme plus proche et cela seulement comme en luyrenouvelant la mémoire dont toutes fois j’ay recognu qu’il se souvenoit assés et aussi n’a il rientouché de Bécherel ny encore de Gaël qui ne se paye qu’à terme à sçavoir à Noël. Le fermier sollicitecontinuellement que la refformation qui est commencé de cette terre là se parachève. M. de

185 Quintin était un centre de production renommé de toiles de lin de qualité dites « Bretagnes » et connues également sous lenom de « Quintin ». Cf. Jean MARTIN, Toiles de Bretagne. La manufacture de Quintin, Uzel et Loudéac (1670-1830),Presses Universitaires de Rennes, 1998.

Page 120: Années 1618-1623

120

La Boessière en est commissaire, mais à Rennes on estime que pour la parfaire la présence de M. deLa Motte est nécessaire d’aultant qu’on a à agir avec plusieurs gentilshommes assés qualiffiés et quiont faict des entreprises et usurpations auxquelles il est malaisé de pourvoir et remédier s’il n’y aquelque personne qui sont recognue pour avoir auctorité et moyen de maintenir des visiteurs etarpenteurs qu autrement n’y travailleroient qu’avec crainte et sans cette refformation ledit fermier dictqu’il ne payera que le prix antien et là qu’il n’est obligé à plus sinon au cas de ladicte reffomation. Ilest vray que son bail est faict à cette condition il n’y a à travailler sur les lieux que pour quinzejoursou trois sepmaines à ce que j’appren de M. de Lorial, lequel est un des adjoincts à cettecommission.

Je ne feray faulte, Madame, de faire ressou/2/venir Monseigneur de commander que la sommede deux mil livres soit réservées du prix de la ferme dudit Gaël lorsque le terme d’en payer le prixsera venu. Comme aussi de ce qui peut-estre deub à mondict Seigneur le Comte et à Madamoisellepour les termes passés desdicts iiijMvjC livres jusques à Noël 1622. Il ne s’est passéa aulcune choseaux affaires de Monseigneur depuis mes dernières. Je suis allé par son commandement à Rennes pourapprendre quelque chose de ce qui se doibt proposer aux Estats. J’y ay veu et aux environs aulcunsdes amis de Monseigneur qui je m’asseure y sera avec moyen d’y servir le Roy. Je n’ay rien d’ailleursquant à présent sinon à supplier très humblement Vostre Excellence d’avoir agréable que je puissetousjours estre honoré de la qualité,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 21e octobre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/115

28 octobre 1623 - Vitréà Monsieur de Champdor

Monsieur, Je vous remercie bien humblement et aultant affectueusement que jepuis du soing et peine qu’il vous plaist prendre de me mander des nouvelles de la santé de Madame etde sa maison. Pour récompense ayés d’ici que tous Messeigneurs et Madame la duchesse se portentbien, grâces à Dieu, que Monseigneur le Prince est parfaictement joli. Ce que vous m’escrivés despromesses faictes à M. de Netz par M. le Procureur général de la Cour des Aydes sont des fruicts eteffects des sollicitudes et soings de Madame que je prie Dieu vouloir conserver en longue et heureusesanté, comme aussi Madamoiselle et leur donner des contentemens à l’esgual de mes souhaits etprières.

Vous ne ma mandés point ce que vous croyés du séjour de Madame à Paris. Je mesnageray ceque vous m’escrivés, ainsi que j’ay faict au passé ce que vous m’avés escript. Je vous supplie del’asseurer de mon très-humble et fidèle service et que jamais je ne desfaudray à ce que je luy doibs. Jesçay que chacun en dict aultant mais si chacun dict vray je ne sçay. Je suis trop désireux de soncontentement trop obligé à ce devoir et ay trop de cognoissance de sa bonté et de son affection versMonseigneur pour y manquer.

Ce que vous me dites de M. Testar186 n’adjouste pas peu à la bonne opinion que, sans lecognoistre, j’avois conceüe de luy sur le rapport et les bons tesmoignages qu’en rend M. Durand187,

186 Paul Testard (1597-1650), sieur de La Fontaine, était le fils d’un notaire de Blois Paul Testard et de Marguerite Bellay,son épouse. Charlotte-Brabantine de Nassau l’avait choisi sur les recommandations du ministre de Charenton Samuel Durantpour être le chapelain de son fils aîné. Il resta deux ans à son service. Au mois de janvier 1626, l’Eglise de Blois l’ayantdemandé pour ministre, le duc de La Trémoille consentit à son départ. Il est à l’origine de la querelle de la grâce universellepar la publication en 1633 à Blois de son Eirenicon seu Synopsis doctrinae de natura et gratia. En 1637, lors du synoded’Alençon, il fut avec Moïse Amyraut l’objet d’un procès par les adversaires de l’universalisme hypothètique.187 Samuel Durant (1574-1625), fils d’un bourgeois de Paris Jean Durant et de Madeleine Couët du Vivier, était ministre àCharenton depuis 1607. Pondéré, stricte observateur de la discipline, il assumait une place éminente dans l’Eglise réforméede France de son époque.

Page 121: Années 1618-1623

121

car pour vous dire vray j’en croirois aussi tost vostre advis et en ferois aussi tost vostre advis et enferois aussitost choix à vostre relation que de beaucoup d’autres plus sçavans aux langues que vousn’estes et ne vous en offenses pas.

Je n’avois rien sceu du mariage de M. du Moulin188, mais vostre lettre m’a rendu curieux et j’aycreu ne pouvoir estre mieux satisfaict par personne que par Madame Schélandre189 si elle vouloit mefaire l’honneur de m’en dire ce qu’elle en pouvoit sçavoir, car il est bien malaisé que rien de tellenature luy eschappe. J’en ay donc appris les particularités qui le confirment tousjours en l’opinion quej’ay que les ministres sont hommes sensuels, charnel, etc aultant que les autres et qui bien souventfont choses qui peuvent aussi tost apporter en leurs familles le trouble que le repos.

Au reste, on me dict icy que vous n’estes pas en santé parfaicte. Je vous jure que j’en suis enaussi grande peine que si vous estiés mon propre frère. Je di frère bien aimé, car je suis de cœur etd’affection et ne seray jamais autre que,

Monsieur,

Vostre bien humble et très-affectionnéet fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 28e octobre 1623.

Je ne vous escri point d’affaire pour n’avoir rien à présent à vous mander de cette sorte.

Archives nationales 1 AP 357/116

28 octobre 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay receu par M. de Mazeuil190 celles qu’il a pleu à Vostre Excellence m’escrire du 22e ducourant par lesquelles elle me commande de faire entendre à Monseigneur que Madame de Vendosmevous a faict supplier qu’il ne se fist aulcune saisie ny frais pour les rachapts advenus à Monseigneurpar le décès de feue Madame la duchesse de Mercoeur. Monseigneur en a escript à M. son procureurfiscal de Thouars conformément à ce que dessus et moy encore présentement la mesme chose et aussiqu’on escrive icy ce que valent de ferme les terres tombées en rachapts et quelle distraction il faultfaire du prix des desdites fermes tant pour ce qui ne court en rachapt que pour aussi quel pourroit yavoir y avoir quelque chose esdites terres qui reléveroit d’autres seigneurs. Nous aurons leur responsededans huict ou dix jours.

Vous me commandés aussi Madame de ramentevoir à Monseigneur l’Eglise de Thouars et lapersonne de M. de La Piltière191. Je croy qu’à présent ledit Sr. aura receu ou recevra bientost lesmesmes subventions de bois, bled et vin qu’avoit de coustume de recevoir M. Rivet d’aultant queMonseigneur a envoyé pour ce faire ses mandemens aux Srs. Demeufves et Barateau. Il n’est deub àl’Eglise en derniers que trois mois. Et on n’a point accoustumé de payer que par demies années. Enmon dernier voyage à Thouars j’acquitay ce qui estoit deub pour les six premiers mois de la présenteannée.

J’ay aussi remémoré à Monseigneur ce que Vostre Excellence me commande pour sacontribution au temple de Charenton. Il m’a faict l’honneur de me dire qu’il donneroit cent pistoles et

188 Pierre du Moulin (1568-1658) ancien ministre de Charenton, ministre à Sedan depuis 1621 avait perdu le 12 août 1622 sapremière épouse Marie Colignon, âgée de 52 ans, lors d’une épidémie qui sévissait dans la ville. Il avait six enfants en sacharge et après 15 mois de veuvage se remaria avec Sarah du Gelhay, âgée de 26 ans, fille d’un capitaine. Il eut dix enfantsde ce second mariage.189 Agnès de Lisle (1560-1627), veuve de Robert Thyn de Schélandre, écuyer, sieur de Soumazannes, ancien capitaine etgouverneur de Jametz.190 Pierre de Marconnay, sieur de Maseuil, comme son frère, Charles, sieur de Châteauneuf, était au service des La Trémoille.Il avait en octobre 1621 accompagné Henri de La Trémoille à Sedan. En 1623, le duc de La Trémoille le chargea de prendrepossession du château et de la ville de Vitré en Bretagne que le Roi lui avait restitué. Il épousa en 1624 Marguerite Garnier.191 Paul Geslin, sieur de La Piltière, le nouveau pasteur de Thouars.

Page 122: Années 1618-1623

122

que par cette voye il en envoyeroit mandement à M. de Netz. C’est le plus beau et le plus asseurébastiment qu’on puisse faire que celuy où s’assemblent les saints pour faire de commune voix prièresà celuy qui donné abondamment de quoy bastir des maisons quand on a travaillé comme il fault àbastir la sienne qui doibt servir comme de fondement aux nostre.

Il ne s’est passé aulcune chose aux affaires /2/ de Monseigneur depuis mes précédentes. Lespromesses qu’on donne pour asseurances à M. de Netz des conclusions favorables de MM. les gensdu Roy de la Cour des Aydes sont effects du soing de Vostre Excellence et continuation des preuvesde sa bonté et de la grande affection qu’elle a pour ce qui touche Monseigneur, lequel aussi Madameen a des recognoissances et sentimens dignes de luy. Il se porte grâces à Dieu très bien ainsi que tousMesseigneurs.

MM. de Coesquen192, de La Roche-Giffard193, de St-Jouan194 et de Pouigny195 partirent hierd’icy, où ils estoient venus visiter Monseigneur. Je me persuade, Madame, que vous n’aurés pasdésagréable que je continue à vous dire que l’amitié et bonne union entre Monseigneur etMonseigneur son frère est telle qu’il n’y a rien a y souhaitter. Je prie ce bon Dieu que cela continuetousjours et reçoive ses accroissemens s’il en a besoing. C’est ce que je souhaitte le plus au monde etde voir que vous receviés avec une parfaicte santé. Les contentemens et satisfactions qui vous sont siraisonnablement deubs.

Vostre Excellence aura sans doubte par autres plus particulièrement que par moy des nouvellesde l’estat et de la santé de Madame vostre belle-fille. Monseigneur le Prince est si parfaictement jolyet advancé en jugement que je n’ay point de paroles pour l’exprimer, voua aurisés bien ducontentement, Madame, si vous le voyiés en cet estat et prendriés bien du plaisir à vous faireentretenir par luy car il dit et entend tout et respond très agréablement. Dieu pas sa saincte grâce leveuille de plus en plus bénir.

Nous sommes tousjours en attente du lieu et du temps des Estats. De Rennes on escript àMonseigneur la mesme chose que vous, Madame, à sçavoir qu’il y aura changement au lieu. Si celaest, il faudra nécessairement esloigner aussi le temps, mais jusques icy on ne voit rien de certain, lepremier advis n’a point esté demandé et cepandant nous touchons le temps de l’assignation et sommesfort esloignés du lieu. Nous n’avons eu encore qu’un jour M. de La Motte. Je prie Dieu, Madame,qu’il vous maintienne en santé et qu’il me doint de pouvoir toute ma vie rendre à vos commandemensl’entière obéissance que doibt,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 28e octobre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/117

31 octobre 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Je ferois préjudice notable à la bonne volonté que je sçay que vousreservés d’entretenir de bonnes paroles tirées du fonds de la poictrine (comme font les bons amis orainsi que parloit Ulisse dans nostre grand oncle Homère). M. de Rozemont qui n’est pas moins gros etdésireux de la mesme chose. Il vous dira ce que nous faisons et m’asseure mesme qu’il ne se feindra

192 Louis de Coëtquen, marquis dudit lieu à Saint-Helen, un catholique, gouverneur de Saint-Malo.193 Samuel de La Chapelle, seigneur de La Roche-Giffart, était le principal seigneur huguenot du pays de Châteaubriant. Ilétait marié à Françoise Marech la fille de l’ancien gouverneur de Rennes René Marech, sieur de Montbarot et d'Esther duBoays de Baulac. Il mourut en 1626 dans un accident de chasse.194 Mathurin de Rosmadec, seigneur de Saint-Jouan de l’Isle, un catholique, d’une branche cadette de la Maison deRosmadec.195 Jean-Jacques d’Angennes, marquis de Poigny et seigneur du Boisorcant dans la paroisse de Noyal-sur-Vilaine. AbbéGUILLOTIN de CORSON, Les Grandes Seigneuries de Haute-Bretagne, op. cit., tome I, p. 68-74.

Page 123: Années 1618-1623

123

pas (bien qu’il ne soit des plus grands prophètes) en pénétrant dans l’avenir de vous dire quelquechose de ce que nous ferons. Je l’ay particulièrement supplié (et vous en conjure ensemble) de vousfaire ressouvenir de moy et de vous entre esveiller parfois sur la mémoire d’une pauvre petitepersonne qui n’a pas moins d’attention pour vous, et n’en faict pas moins d’estime que si vous estiésses frères. D’une personne dis-je qui n’entend pas si bien le breton et manceau que le poictevin non audeux tiers près.

Je ne veux toutesfois pas dire de ce païs ce qu’un docteur disoit du sien, que le mal y vientsemer et y croist sans peines, mais bien que je ne suis pas sans soing et peine non plus ceux quientreprennent d’y vivre avec franchise et intégrité, car vivre ainsi n’est pas […] à la mode Baste, n’enpleurés pas pourtant encore qu’il soit vray. Je serois bien marry de vous voir des conforté, faictesbonne chère et vous tenés joyeux. Je vous donne de bon advis et tasche de les suivre, mais faictes ensi vous estes sage mieux vostre proffict que moy qui sans fraude ny barat suis de cœur et d’affection,

Monsieur,

Vostre très-humble et très-affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le dernier octobre 1623.

Au nom de Dieu faictes moy naistre quelque occasion de vous faire service et vous verrés qu’ilne teindra à moy que tout n’aille bien. Le Sr. Inguel est marié196.

Archives nationales 1 AP 357/118

31 octobre 1623 - Vitré

à Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je sçay bien que M. de Rozemont est une bonne lettre parlante et que par luy vous allésapprendre bien particulièrement la bonne disposition de tous Messeigneurs et l’estat auquel sonttoutes choses en ce lieu où on est encore en incertitude du temps et du lieu des Estats. Le retardementde Monsieur de Vendosme causera l’absence de plusieurs qui appréhenderont de s’exposer auxincommodités d’un voyage en hyver. J’en ay ainsi ouy parler à plusieurs. Où qu’ils soientMonseigneur se résout d’y aller. Il y sera utile au service du Roy et au bien du païs auquel à ce qu’ondict on fera des propositions nouvelles dont on est en peine sans les sçavoir.

M. le procureur fiscal de ce lieu suivra bientost ledit Sr. de Rozemont, Monseigneur ayantdélibéré de l’envoyer solliciter des lettres royaux pour la refformation de la pantcarte de ce lieu,réunions des chastelanies et restablissement des choses usurpées sur les landes et forests des terres deBretagne conformément à celles que pour cecy obtint en quatre-vingt-deux feu Monseigneur le comtede Laval père. Ledit Sr. de Rozemont a bonne cognoissance de tout qui le fera beaucoup mieusentendre à Vostre Excellence que je ne pourrois l’exprimer par mes lettres. C’est pourquoy, Madame,après avoir loüé Dieu de ce qu’il luy plaist vous continuer vostre santé, je vous supplieray trèshumblement me faire l’honneur de croire que personne ne rendra jamais à vos commandemens uneobéissance plus entière et fidèle,

Madame que,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le dernier d’octobre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/119

4 novembre 1623 - Vitré

196 Jean-Godefroy Inguel ou Ingel, qui avait été le valet de chambre de Frédéric de La Trémoille pendant les années 1620-1622, venait d’épouser le 12 novembre 1623 à Vitré Marie Lasnon (1594-1650), la fille d’un gendarme de la garnison. Ildevint par la suite receveur de la baronnie de Vitré. Il mourut le 6 avril 1646 au château.

Page 124: Années 1618-1623

124

à Monsieur de Champdor

Monsieur, Vous aurés avant que ma lettre soit parvenue à vous tout loisird’entretenir M. de Rozemont qui vous dira toutes nouvelles du général et des particuliers du subjectde son voyage quelles lettres il porte et comme Monseigneur remet tout à Madame dont les soingspour les affaires de mondict Seigneur et les bontés pour ses serviteurs. Pour moy particulièrement nese peuvent exprimer ny assés loüer et remertier.

Suivant ce qu’elle a escript à Monseigneur et conformément à ce que par son commandementvous m’en dites vous trouverez une lettre pour M. le marquis de La Vieuville portant remerciementdes ordonnances qu’il a baillées pour avoir les assignations de ce qui est deub pour l’année passée etune supplication de tenir la main à ce que Madame et mondict Seigneur puissent jouir de ce qu’il apleu à la bonté du Roy leur continuer pour la courante ; et pas un mot de pention puisqu’il les a tant àcontre cœur, n’importe des mots si on trouve les choses.

J’ay faict entendre à mondict Seigneur ce que par le commandement de Madame vousm’escrivés touchant l’ambassadeur de Savoye. Quant au moyne La Haye, sçavés-vous pas que chairde telles gens est venaison en paradis. Peut-estre à présent sçaurés vous l’intention de sa mère et àquoy vont ses prétentions. Le soing de Madame y fera donner ordre et esclaircir ce qui luy estjustement deub si ladicte La Haye se met à raison si j’avois ou […] qu’y contribuer je le ferois de boncœur.

Vous aurés bientost M. le procureur fiscal de ce lieu qui va pour plusieurs grandes affaires. J’aybien peur que ses sollicitations ne soient interrompues par ses ennemis, je voulois dire ses créantierset aussi sont ce de dangereux ennemis quand ils demandent à qui n’a de quoy pour l’heure lescontenter. Ledict Sr. de Rozemont (à qui je fay mes bien humbles baise mains et que je remercie de lafaveur de son souvenir en la lettre qu’il a escript icy de Laval) vous aura discouru du subject duvoyage dudict Sr. procureur.

Mandés-moy, je vous prie, si vous estes bon courtisan et si les Estats seront à Nantes. Jetascheray de faire un tour jusques à Thouars pour mander s’il est encore où il estoit au passé. Je disans raillerie que je tascheray d’y aller et ferois plustost ce voyage à cause des couches de ma femmedont je ne ne suis pas en petite peine. Si mon debvoir m’obligeoit d’aller aux Estats.

Vous ne m’avés point escript si vous aviés receu une boette couverte de papier blanc etcachettée en plusieurs endroits en laquelle il y avoit deux pièces de Quintin. Je voudrois que vouseussiés pris guarde si elle n’aura point esté ouverte. Souvenés vous s’il vous plaist de m’en escrire unmot, car j’aurois regret si elle s’estoit perdue. M. de Rozemont se souviendra qu’il prist la peine de lamettre ès mains du messager. Que vous diray-je plus ? Les affaires de Paris sont soubz le soing deMadame, nous n’en avons point icy de nouvelles. Toute vostre cour se porte bien. Nous avons grandevinée en nos quartiers. Vous sçavés tout cela. C’est pourquoy il ne me reste plus de nouvelles. Car cen’en seroit point de vous asseurer que je suis,

Monsieur,

Vostre bien humble et très-affectionné serviteur.

d’Iray

Vitré, le 4e novembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/120

4 novembre 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je post poseray tous les honneurs que je recevray jamais à celuy que Vostre Excellence me faicten approuvant la fidélité de mes très-humbles services et tesmoignant qu’ils luy sont agréables. Cebonheur me vient de Dieu et de vostre bonté, Madame, qui considérées et agrées aultant l’affection etbonne volonté de ceux qui vous servent que l’utilité qui vient de leurs services. Hors qu’il plaira àDieu rendre les miens utiles, ils respondront à mes souhaits pource qu’il n’y aura jamais manqué

Page 125: Années 1618-1623

125

d’affection et de fidélité. A l’approbation qu’il vous plaist d’en faire vous daignés adjouster lesasseurances de la continuation de vostre bienveillance.

Je vous en rends très-humbles grâces, Madame, et vous supplie très-humblement de croire quepersonne n’obéira jamais à vos commandemens avec plus de courage et de fidélité que moy, à quivous ne vous lassés point de faire et procurer du bien.

Je ne doubte point, Madame, qu’il ne se trouve sur ce qui sera accordé en la présente année à SaMajesté par les Estats de cette province de quoy acquitter les ordonnances de la présente année.Monseigneur en escript à M. de La Vieuville ainsi que vous luy avés mandé et me l’avoir commandéet à M. de Champdor de m’en escripre plus amplement.

Nous ne sommes point encore certains du temps et du lieu des Estats. On escript que ce sera au20e à Nantes où on attend M. de Vendosme. M. de La Motte est à Rennes pour aviser à la perfectionde la refformation de Gaël avec M. de La Boessière. A son retour, je ne manqueray de luy mettreentre les mains les lettres, pièces et mémoires concernans vos comptes, qui ont esté mises en lesmiennes par Madame vostre belle-fille.

M. de Rozemont /2/ part pour Paris dès le premier de ce mois avec les lettres ouvertes deMonseigneur à MM. de son conseil, lesquels il remet à ce que Vostre Excellence aura agréabled’ordonner. Cela a très grand besoing de vostre bonne conduitte, Madame, et du soing que vous avésagréable d’en vouloir prendre vos peines y sont à plaindre. Mais vous avés tant d’affection au bien desaffaires de Monseigneur que vous les surmontés.

Je croy que le Sr. procureur fiscal partira avec, ou incontinent après, ce messager. Ledit Sr. deRozemont aura sans doubte faict entendre à Vostre Excellence le subject du voyage de cettuy-cy, c’estpourquoy ce seroit vous importuner que le redire. Il ne s’est rien passé aux affaires de Monseigneurdepuis le partement dudict Sr. de Rozemont. Tous Messeigneurs sont en très bonne disposition grâcesà Dieu, que je prie et prieray pour la vostre aultant qu’il me laissera au monde. Je feray entendre àMonseigneur combien il est raisonnable qu’il assigne en lieu seur ce qui est deub de reste àMonseigneur le Comte et à Madamoiselle des termes escheüs à Noël 1622 pour le parfournissementdu partage sur Bécherel et Gaël, ce qu’il fera je m’asseure de bon cœur et très volontiers.

Je prie Dieu qu’il me continue la grâce de voir que mes services vous soient, Madame, et àMonseigneur aussi longtemps agréables qu’ils seront fidèles ne désirant au monde d’aultre qualité quecelle,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Vitré, le 4e novembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/121

7 novembre 1623 - Vitréà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay cy-devant escript à Vostre Excellence la résolution qu’à prise Monseigneur d’envoyer àParis M. le procureur fiscal de ce lieu pour suivant les commandemens que vous auriés agréables deluy donner, obtenir des lettres royaux pour plusieurs choses très importantes au service et bien desaffaires de Monseigneur, particulièrement pour la réunion des chastellanies de ce lieu, refformation dela pantcarte, restablissement des choses usurpées sur les landes et forests despendantes des terres deMonseigneur en cette province et tiercement desdites landes et pour diverses autres affaires,desquelles estant bien informé et portant les tiltres, actes et mémoires qui y peuvent servir. Il estbeaucoup plus capable de les exposer et d’en faire cognoistre le mérite et utilité à Vostre Excellenceque je ne pourrois l’exprimer par escript. Il porte avec luy les mémoires qu’il a sur l’affaire de Quintinet un tiltre en original qui pourra beaucoup servir au procès contre les habitans de la paroisse d’Isé.Monseigneur escript à MM. du Conseil le subject du voyage dudit Sr. procureur et les prie de

Page 126: Années 1618-1623

126

l’assister de leurs bons advis pour les suivre s’il en reçoit vos commandemens. M. de La Mothe n’estpoint encore de retour de Rennes depuis mes dernières.

Le substitut de M. le procureur des Estats a asseuré Monseigneur par lettres que les Estats setiendroient à Nantes au 24e du courant. M. de Vendosme n’y estoit encore arrivée le 2e où l’y attendoitM. de Lessongère197, intendant de ses affaires, y estoit. Il a dist beaucoup d’honnesteté à M. leprocureur d’Estat touchant Monseigneur et particulièrement que quand M. de Vendosme auroit toutesles passions du monde pour faire entrer Monsieur son fils dans l’assemblée des Estats, il s’endéporteroit en considération de Monseigneur qui attend de jour en jour nouvelles de ses amis deRennes où à mon advis il en peut faire un grand nombre et /2/ mesmes de ceux qui y tiennent lesprincipales charges et y sont les plus considérables. C’est un de mes principaux souhaits et de le voirpartout aimé, estimé, honoré, et en aussi grande considération qu’il le mérite. Il est en très bonne santéainsi que sont tous Messeigneurs qui sont icy grâces à Dieu que je ne cesseray jamais de prier pour lavostre, et qu’il vous doint toutes sortes de contentemens et à moy de mériter par mes très humbles etfidèles services,

Madame de,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Vitré, le 7e novembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/122

11 novembre 1623 - Vitré

à Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay tant faict de despesches aujourd’huy en divers lieux et suis sipressé pour celles de Paris que j’appréhende bien de n’avoir du temps à suffire pour vous respondre etremercier comme je doibs. Je croy que l’absence de M. Malherbe peut avoir arresté les conclusions deMessieurs les gens du Roy de la Cour des Aydes, car il y a en telles rencontres certains petits secretsqui ne se communiquent à gens de haulte estoffe. Je croy donc plus cela que je ne crains l’autre.

J’ay bien du regret que le partement de M. de Rozemont luy ait esté le moyen de porter lesactes et pièces dont il eust receu les commandemens de Madame si son voyage eust esté retardé dequelques jours. J’ay mis és mains de M. de La Motte les dicts actes et mémoires. Il m’a asseuré qu’il yfera prompte response et y satisfera au désir de Madame scelon ses commandemens.

Je suis bien aise que Monseigneur soit assuré de M. Testar198 et que nous ayons bientost parminous une personne de laquelle vous rendés des tesmoignages qui serviront à la faire estimer deplusieurs, mais surtout de moy qui adjouste créance entière à ce que vous dittes et puis vous avés servide moyenneur.

J’ay receu la lettre escripte à Madame par Merlat, Guarrier et Boullanger caultion avec autresde Monseigneur pour la somme de trois mil livres. Vous avés aves là présenté un mémoire contenantce que je sçay de l’affaire. C’est pourquoy je vous y remets, s’il vous plaist, et une promesse que jedonne à Madamoiselle de la somme de quatre cens livres causée pour les raisons que me mandés etcelles qui sont contenues audict mémoire, ladicte promesse payable à volonté. Si elle n’est bien ainsi

197 Jean Blanchard, sieur de Lessongère, d’une famille noble de Fay-de-Bretagne, était le surintendant général de César deVendôme. Il avait débuté dans les offices en 1602 comme procureur du Roi au Présidial de Nantes, puis était devenu en 1612procureur général à la Chambre des Comptes. En 1619, ill quitta cette Chambre pour prendre en charge la gestion des affairesdu duc de Vendôme. Il exercera cette fonction jusqu’en 1630. Il couronna sa carrière avec le poste de premier président à laChambre des Comptes où il exerça de 1634 à 1641 avant de le céder à son fils, tout en conservant le privilège de siéger sansgages, mais avec voix délibérative. Il avait été maire de Nantes en 1611-1613 et était titulaire d’un brevet de conseiller d’Etatdepuis 1614. Il acheta en 1623 la châtellenie du Bois-de-La-Muce aux portes de Nantes qui sera érigée en 1644 en baronniepuis en 1651 en marquisat. Guy SAUPIN, Nantes au XVIIe siècle. Vie politique et Société urbaine, Collection Histoire,Presses Universitaires de Rennes, 1996, p. 184, 306 et 334.198 Paul Testard, sieur de La Fontaine, le chapelain que Henri de La Trémoille venait de prendre à son service (Cf. lettred’Iray du 28 octobre 1623).

Page 127: Années 1618-1623

127

me la renvoyant j’en envoyeray une autre et telle forme qu’on désirera, car je ne veux manquer àaulcune chose qui me soit commandé non que l’estat de mes affaires soit commode ainsi que pourradire M. de Rozemont depuis le partement duquel nous n’avons receu aulcuns deniers et il sçaitcombien j’en estois chargé quand il me laissa et pour avoir aussi cognoissance de la presse que mefont divers créanciers, mais quoy faire ou dire à cela, rien du tout, tousjours bon courage et bonneespérance jamais. Je me rendray tant que je pourray fournie ou aller, car j’ay trop de confiance en labonté de Madame, de Monseigneur et de Madame la duchesse pour appréhender rien, au contrairej’en espère tout puisqu’ils ont cognoissance de l’intégrité de ma vie et de mes actions en ce quireguarde leur service. Je di trop de confiance en la bonté de Madame et en son équité pour doubter derien. L’approbation qu’elle me faict l’honneur de faire de mon service m’apporte une joye et unesatisfaction en l’esprit que je prise sans comparaison plus que je ne puis l’exprimer, mais je dois toutcela à sa bonté. Je prie Dieu qu’il luy retribue ses biens faicts.

Je ne croy pas que nous recevions plus de vos lettres icy, Monseigneur en partira un des joursde la prochaine sepmaine pour aller aux Estats à Nantes, d’où, Dieu aydant, je feray un tour à Thouarsoù l’estat de ma femme m’appelleroit bien plustost estant sur son terme d’accoucher, mais je ne puisquitter à présent. Dieu en aura soin s’il luy plaist. Monseigneur remercie très humblement Madame deses bons advis suivant iceux il escript le lettre de laquelle vous me parlés en la vostre parcommandement de Madame pour la santé et prospérité de laquelle et de Mademoiselle. Je prie Dieuqu’il me doint de pouvoir vous tesmoigner quelque jour par bons services que je suis aultant quepersonne qui vive,

Monsieur,

Vostre très-humble et très-affectionné serviteur.

d’Iray

A Vitré, le xje novembre 1623.

Il m’est du tout impossible d’escrire à M. de Rozemont. Je luy fay des excuses et luy suisserviteur très affectionné.

Nous n’avons peu encore retiré le procès-verbal de la refformation de la pancarte de ce lieu àcause qu’on demande pour les sallaires de l’advocat du Roy six vingt escus et il n’en fault pasquarente. On me le promet à demain. Je mettray ordre si je puis le retirer qu’il soit envoyé par l’autrevoyage. Je vous supplie de le dire à M. le procureur fiscal de ce lieu ou à M. de Rozemont à qui jebaise les mains.

Archives nationales 1 AP 357/123

29 novembre 1623 - Nantes

à Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay ce matin escript à Madame par la voye ordinaire. Je n’ay en leloisir d’adjouster qu’un mot de response à une lettre de Monsieur de Rozemont depuis M. deChasteauneuf est arrivé et au mesme temps de son arrivée, Monseigneur a advis du partement de cecourrier, cela l’empesche et ses serviteurs moy particulièrement de faire response à celles qu’il a pleuà Madame me faire l’honneur de m’escrire par ledit Sr. de Chasteauneuf et à celles de M. deRozemont. Ce sera pour la première occasion Dieu aydant, aussi ne pourois-je rien de moy à causequ’elles parlent d’affaires sur lesquelles je n’entrepren pas de respondre que par commandement etconseil.

Je plains surtout la peine de Madame qui ne pourroit que succomber si elle n’estoit douée deprudence et patience extraordinaire, mais ou qu’elle soit il fault que son soing et son affection pourles siens paroisse aux despans mesmes de sa propre santé, ne pardonnant à peine ny travaille pourfaire réussir ce qu’elle estime importer au bien des affaires de son illustre maison.

Je vous convie et supplie de faire mes excuses si je ne luy escri par cette voye, mais j’ay escriptce matin et le reste du jour n’a produit aulcune nouveauté. Nous avons ouy toutefois depuis la

Page 128: Années 1618-1623

128

harangue de M. de Cahors199 qui a dignement représenté les nécessités de Sa Majesté et demandé pourelle un secours de six cens mil livres. L’affaire des généraux n’a point encore esté entamées.

La bonne santé de Monseigneur continue. Il en pourra asseurer Madame par ses lettres. J’ay cesoir une mauvaise teste qui me contraint contre mon gré de finir. Je vous baise à M. de Roozemont ettous mes amis et amies très humblement les mains et suis,

Monsieur,

Vostre très-humble, et très-affectionné serviteur.

d’Iray

A Nantes, le 29e novembre 1623.

J’ay crainte que Madamoyselle ne blasme ma hardiesse si j’ose me ramentevoir à son souveniret luy renouveller par vous les asseurences de mon très humble service bien heureux si je pouvois enma vie luy en rendre qui luy fust agréable. Je prie Dieu qu’il luy doint toutes sortes de contentemenset prospérité.

Archives nationales 1 AP 357/124

29 novembre 1623 - Nantesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Depuis les lettres de Monseigneur trois jours ont seulement passé qui n’ont guères produit denouveauté. Il est vray que les Estats furent ouverts hier à une heure après midi. Toute l’audiance sepassa en harangues. Celle de Monsieur de Cahors reste pour ce matin. Plus nous allons avant plusrecognoi-je le pouvoir et les moyens qu’aura Monseigneur de servir le Roy à quoy il s’employe detelle sorte, qu’il seroit désirable que la Cour on pensast à luy avec aultant d’affection. Monsieur deVendosme continue ses protestations et asseurances d’amitié. Il sçait assés qu’il ne sera jamais trompépar Monseigneur sur lequel chacun a les yeux et se repose pour rencontrer et ajuster le service etcontentement de Sa Majesté dans le bien et conservation des privilèges de la Province.

On dict icy et cela vient de la Cour que le Roy tient pour très indifférent ou d’establir desgénéraux ou de tirer à plus près en deniers la valeur des offices. S’il en est ainsi je ne doubte pointque tout n’aille et ne responde au désir de Sa Majesté en ce que le païs pourra faire.

Hier, Monsieur l’Evesque de Rennes200 obéit au commandement du Roy et partit de ce lieu pouraller en cour à ce que ses amis disent. Je ne croy pas toutesfois qu’il s’esloigne beaucoup pourquelque temps. Vostre Excellence en peut conjecturer les raisons. Il y auroit choses à dire que lepapier ne peut souffir de crainte qu’il tombe en d’autres mains.

J’obmettois à vous dire, Madame, que Monsieur de Vendosme et M. de Cahors mandèrentM. de Rennes avant son partement, mais il n’y alla point. Depuis le cappitaine des guardes et quelquesuns de ses soldats de M. de Vendosme furent envoyés apprès pour luy faire à /2/ ce qu’on dictcommendement de par le Roy de s’esloigner de dix lieues de ce lieu toutesfois cela ne se sçait pointd’aultant qu’on ne le trouva point. Je croy que cela n’aura pas diminué les aigreurs mutueles àl’accommodement desquelles Monseigneur a voulu s’employer, mais en vain ayant trouvé de touscostés de la résistance. Nous ne sçavons où nous méneront les Estats. Il y a apparence qu’ils serontlongs bien que chacun se dispose à les advancer et y apporter toute diligence.

Je serois très honoré et m’estimerois très heureux si je pouvois y rendre quelque service utile etagréable. On ne parle icy d’autres affaires que d’estats c’est pourquoy, Madame, je ne vous

199 Siméon-Etienne de Popian, évêque de Cahors de 1607 à 1627.200 Pierre de Cornulier (1575-1639), un Nantais, licencié dans les deux droits, jurisconsulte éminent, conseiller du roi en sesconseils d’Etat et Privé. Il avait été conseiller clerc au Parlement de Bretagne, abbé commendataire de Sainte-Croix deGuingamp, de Saint-Martin de Gaël, de Blanche-Couronne, commissaire des Etats près la Chambre des Comptes, député duclergé de Bretagne aux Etats Généraux de 1614. En 1616, il avait été nommé à l’évêché de Tréguier où il résida très peu puisen 1619 à celui de Rennes. Georges MINOIS, La Bretagne des prêtres en Trégor d’Ancien Régime, Coll. Les Bibliophiles deBretagne, Editions Beltan, 1987, p. 88.

Page 129: Années 1618-1623

129

importuneray de longues lettres. Seulement vous diray-je que Monseigneur est en parfaicte santé.Vous aurés sceu l’estat de celle de Madame vostre belle-fille depuis nous, qui depuis Rennes n’enaons rien eu non plus que celle de Monseigneur le Prince. Je prie et prieray Dieu inncessamment pourla vostre si nécessaire aux vostres et à vos serviteurs.

Je ne doubte point, Madame, que l’affection que vous portiés à feu Monsieur du Plessis ne vousay donné plus de regret de sa mort201, qu’il n’en a eu luy mesme, aussi certes doibt-on des regrets à saperte et de l’honneur à sa mémoire. Monseigneur a envoyé ses consolations à Messieurs ses gendres.

S’il se passe icy quelque chose qui soit digne d’aller jusques à vous je ne faudray à vous eninformer et de ce qui viendra par tout ailleurs à ma cognoissance puisque que j’en ay receu voscommandemens aux quels je rendray toute ma vie une entière obéissance en qualité,

Madame de

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Nantes, le 29e novembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/125

Jeudi 7 décembre 1623 - Nantesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Il me fut impossible de satisfaire autrement à mon debvoir par M. Mesmin secrétaire deMonsieur le duc de Vendosme pour le peu de loisir que nous donne la cognoissance de son promptpartement, que sans entreprendre de dire à Vostre Excellence choses mal arrengées, informerquelqu’un des vostres pour vous en donner advis de la bonne disposition de Monseigneur.

Celle-cy, Madame, vous en dira la continuation et la réception de celles qu’il vous a pleu mefaire l’honneur de m’escrire du 18e du passé par M. de Chasteauneuf202, qui s’est rendu auprès deMonseigneur depuis peu. Par icelles, Madame, vous me faictes l’honneur de me dire que vousn’estimés par le temps grandement favorable pour les affaires qui ont donné lieu au voyage duSr. Chesneau procureur fiscal de Vitré, que mesme il est à craindre que quand elles passeroientfavorablement, elles pourroient porter mauvaise conséquence pour autres sans comparaison plusimportantes comme celle de Taillebourg et autres, d’aultant qu’à la Cour on veult que les petiteschoses, et qu’on ne reffuse que peu ou point tiennent lieu de grandes obligations et ferment la boucheaux demandes que d’ailleurs on pourroit faire quoy que justes et promises, oultre que la personnen’estant cogneue et peut-estre peu agréable, se trouveroit moins utile à l’effect de ce pourquoy elle aesté envoyée.

A cela, Madame, je n’ay rien à dire ny escrire et M. de Rozemont qui a esté présent à tout peutfidèlement raporter quels ont esté mes sentimens sur ce faict s’il s’en veut souvenir j’ay faict entendreles vostres à Monseigneur auxquels je m’asseure, Madame, qu’il vous fera response si les compagnieset le temps luy peuvent permettre vous pouvant asseurer, Madame, qu’il n’en prent assés pour dormir,car dès le matin huict heures il entre aux Estats d’où il ne sort qu’à midi assisté et suivi de grandetrouppe de noblesse et de bonnes qualités dont la pluspart disne avec luy qui ne le quitte point etincontinent est visité de plus grande trouppe qui le faict patienter une /2/ et deux heures pourretourner à la compagnie d’où il ne revient qu’à cinq heures et passe les soirs aux compagnies etcomédies où se trouvent tousjours M. de Vendosme, qui faict convier MM. de Brissac, de Guesmenéet tous les autres qui n’en retournent qu’à onze heures. Monseigneur en est le plus incommodé pourcequ’il est seul subject aux exercices ordinaires du lendemain. Voylà à quoy les heures se passent.

201 Duplessis-Mornay, l’ami et conseiller de Charlotte-Brabantine de Nassau, est décédé le 11 novembre 1623 en son châteaude la Forêt-sur-Sèvre entouré de ses filles et de ses gendres.202 Charles de Marconnay, sieur de Châteauneuf, revenait des Provinces-Unies où il avait participé au siège de Goch au sudde Clèves.

Page 130: Années 1618-1623

130

Vous avés sceu, Madame, comment M. de Rennes s’est absenté par le commandement du Royqui luy a ordonné de l’aller trouver pour affaires importantes, le dispensant mesmes de se trouveraaux Estats. On croit toutesfois qu’il n’est encore fort esloigné et qu’il attend nouvelles de la Cour.Cepandant son absence a donné matière de parler à plusieurs qui estiment qu’il avoit bonnecognoissance des moyens qui pouroient faire rencontrer et adjuster le service du Roy et le bien etcontentement de la province.

Il est vray que le lendemain de son partement M. de Vendosme et MM. les Commissaires firentl’ouverture des Estats qui ont agité aulcunes de leurs affaires avec assés de quiétude et de douceurjusques à ce qu’ils ont appris que ces deux clauses du contract faict en l’année dernière entre MM. lesCommissaires du Roy et eux n’ont esté entretenues : l’une que la ferme des imposts et billets se feroitactuellement en leur assemblée pour les deniers en provenans estre mis ès main du receveur généralde cette province ; l’autre que bien que par la dernière clause d’iceluy contract l’édict del’establissement des trésoriers de France et généraux en cette province eust esté révocqué et supprimé,et que depuis au mois de juin dernier le Roy eust rattifié et appouvé ledit contract en tous ses poincts,cepandant au mesme mois de juin Sa Majesté auroit remis sus ledit édict. Cela a faict que tous lesEstats et de tous ordres ont semblé n’avoir qu’une voix tant les sentimens pour supplier très-humblement Sa Majesté de supprimer ledict édict ont esté unanimes.

C’est l’affaire sur laquelle ils sont maintenant et supplient MM. les commissaires de leur […]ladite suppression ou qu’aultrement ils ne peuvent délibérer sur les propositions faictes par M. deCahors commissaire extraordinaire, qui a mon advis se trouve estonné et en peine de voir tellerésolution. Nous verrons ce que le temps produira. Je n’ose entreprendre de dire mon sentiment et ceque j’entens dire aux particuliers cela mériteroit la vive voix, mais bientost on y verra à ce qu’on dictune résolution une résolution laquelle viendra à la cognoissance de tout le monde, les choses estantencore jusques icy incertaines.

Je m’asseure, Madame, que vous me faictes l’honneur de croire que je rens en cecy àMonseigneur comme je feray toute me vie en tout les services que mon peu d’industrie mais monaffection et fidélité entière me fournist et espère avec l’ayde de Dieu que le Roy, le Païs et luy aurontcontentement de sa procédure. C’est au monde ce que je souhaitte le plus et de voir qu’on rende àVostre Excellence l’honneur, le respect et l’obéissance qui pour tant et tant de raisons vous est deüe,et que vous recevriés les contentemens des vostres que si justement vous mérités. Il est vray qu’unebonne partie du contentement que je reçoy au monde gist en cela.

Mais j’ay peur de /3/ vous importuner, c’est pourquoy après vous avoir dict que je ne sçay oùnos Estats nous mènerons ny quel séjour Monseigneur fera icy, je retourneray aux affairesparticulières.

Par ledit Sr. Mesmin Monseigneur escrivit à M. de Netz qu’il eust a retirer mesmes encomposant s’il y avoit moyen de l’argent de l’ordonnance de xijM livres à acquitter par M. Morantpour satisfaire et payer MM. du conseil pour tout le passé. Car icy je puis vous asseurer Madame quece qu’ont peut faire est de fournir à la despense et mesmes que partie des termes de Noël est desjaprise comme la somme de deux mil quatre cens livres ordonnée par Monseigneur pour estre payée àM. Turquant sur la ferme de Quintin, et encore ce qui est deub à Poussin pour la composition faicteavec luy dont il n’a touché que cent escus par moy ainsi que sçait ledit Sr. des Hayers auquel mesmesMonseigneur manda hier d’en fournir à Madame vostre belle-fille.

M. de Vendosme n’a encore parlé ny faict parlé de ses rachapts et aussi estime-je qu’il est bonde remettre telles affaires après les générales qui donnent d’ordinaire luy et loy et mouvement à tout.On a parle icy de vendre La Roche-Bernard, mais il y a tant de lenteur et de différentes opinions àceux qui veulent acquérir qu’on ne sçait à quoy se tenir. M. de La Mothe en parle assés à ses amis etcognoissances, mais il ne trouve rien qui responde encores à son désir. Pour moy, Madame,j’espéreray et attendray tant que je pourray et ferois en continuant si je pourrois quelque chosedavantage car je ne feray jamais assés selon mon affection et mon debvoir, mais il me sera malaisévoire impossible de plus advancer. Vostre Excellence sçait mon peu de pouvoir. Je ne puis que je nedie assés souvent à Monseigneur qu’il luy est nécessaire de vendre pour payer. Le temps de samajorité apporche, je prie Dieu qu’il luy veuille inspirer tousjours et surtout de bons conseils.

Page 131: Années 1618-1623

131

Je retourne aux Estats pour dire à Vostre Excellence que leur résolution met beaucoup demonde en peines nous particulièrement pour ne voir quasi point de milieu pour accommoder cetincident, Monseigneur s’y comporte avec honneur et louange pour le service du Roy et l’utilité de laprovince.

Aujourd’huy ou demain se pourra faire une proposition aux Estats par M. le procureur sindicportant que plusieurs de tous ordres luy ont faict de grandes plainctes de ceux qui cy-devantcommande dans Chastillon-en-Vendelois, dont mesmes il a entre mains plusieurs informations quecette place est grandement préjudiciable à la Province particulièrement aux circumvoisins et ainsiqu’il estimeroit à propos que Monseigneur fut très humblement supplié par MM. les Estats d’enconsentir la démolition et razement. A quoy je ne doubte point que Monseigneur ne donne les mainsmoyennant récompense raisonnable dont toutesfois il est est résolu de faire juges MM. les Estats,Vostre Excellence jugera si en allées et venues cette affaire n’occupe pas une bonne partie de nostretemps.

Dieu veuille que cela succède au bien et contentement de Monseigneur, auquel M. deChasteauneuf et moy parlasmes hier encore, en présence de M. du Plessis, du Sr. Chesneau pour luyfaire cognoistre ce que vous avés dist sur cela audit Sr. de /4/ Chasteauneuf. Sur quoy il tesmoignaavoir regret du choix que pour ces affaire et avoir faict, que toutes fois il n’y avoit esté meu par autreconsidération que pource qu’il avoit les pièces et tiltres entre les mains, dont il n’auroit voulu sedessaisir que puisque vous luy faisiés l’honneur de prendre le soing de ses affaires il s’estoit remis envostre prudence pour surtout donné l’ordre que vous estimerés nécessaire ainsi que s’il peut escrire àVostre Excellence, mais il vint hier au soir si lassé que je doubte qu’il ait peu escrire, s’il ne l’a faictce sera pour vendredy ou sabmedy.

A la sortie des Estats, il fut chez Monsieur de Vendosme où la compagnie l’avoit supplié d’alleret 14 autres depputés avec luy. Il y parla très bien et en bon serviteur du Roy et bon patriote. Je sçaymesme que la pluspart. Je di la plus part de Messieurs les commissaires luy donnent louanges de saprocédure. Il m’a esté du tout impossible de luy parler avec aultant de loisir qu’il faudroit de sesaffaires particulières non plus qu’à M. de La Mothe qui n’a vraiment pas de temps assés pour vacqueraux présents ce sera après que la résolution aura esté prise sur ce grand article pour lequel M. de LaMothe est un de ses desputés.

Mais je sçay, Madame, que ce qui faict que Monseigneur ne se met beaucoup en peine de ce quile touche est la grande asseurance qu’il a sur vostre soing et prudence. Si de moy je pouvois yadjouster quelque service, je passerois volontiers les jours et les nuicts pour vacquer icy et à ce quipourroit estre utile là, mais par celle que Vostre Excellence m’a faict l’honneur de m’escrire et partiers de M. de Rozemont. Je voy qu’il ne tient qu’à l’argent que toutes choses n’aillent comme il faultpar le bon ordre qu’il vous a pleu establir. A cela je ne puis que mes sollicitations et dire mes foiblessentimens. Pour après sur ce qui me sera commandé y servir avec fidélité et attention. Voylà,Madame, ce que j’ay et sçay. Quant à présent, je prie le bon Dieu qu’il vous doint avec contentementtoute santé et prospérité et à moy de vous rendre des services aultant agréables qu’ils seront tousjoursfidèles et plein d’affection en qualité,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Nantes, le 7e décembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/126

Vendredi 8 décembre 1623 - Nantesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Je vous ay escript par la voye du messager ordinaire, deux jours n’ont encore passé depuis.Ainsi nous n’avons guères de nouveauté. Ce que nous ont rapporté MM. les généraux de cetteprovince n’est pas nouveau à Vostre Excellence, il l’estonne icy à plusieurs. Ils sont arrivés au temps

Page 132: Années 1618-1623

132

que la résolution se prenoit d’envoyer les présents desputés dont le voyage se fait pour obtenir de labonté du Roy l’exécution de ses promesses touchant la révocation et suppression de l’édict des douzegénéraux. Le retour de ceux-cy et les expéditions qu’ils apportent ne rendent tout le mondeesgualement content. Je ne sçay encores au vray si Monsieur de Rennes parachèvera son voyage. Il y ade grandes raisons pour cela et aussi que j’estime que Monseigneur le duc de Vendosme se résoudradifficilement à le mander.

L’affaire de la démolition de Chastillon-de-Vendelais fut proposée hier et sur icelle résolu quedeux de chasque ordre viendroient traitter avec Monseigneur pour sa récompense et le remercier destesmoignages qu’il donne au païs de son effection. Ladite récompense fut aussi arbitrée et résolue àtrente mil livres payable dans trois ans à sçavoir dix mil livres par chacun an à la charge queMonseigneur fera faire les démolitions.

J’estime que Monseigneur vous répondra particulièrement, Madame, à ce que vous luy escrivéstouchant le Sr. procureur fiscal de Vitré. Il m’a faict l’honneur de me le dire ainsi. Il reçoit icy grâcesà Dieu de grandes occasions de contentement. Ce n’est pas une petite joye à ses serviteurs de voir queses procédures soient approuvées du Roy et des ministres de l’Estat ainsi qu’elles sont icy du généralet des particuliers de la province. Cette depputation nous ménera bien loing, si j’appren quelque chosequi mérite d’aller jusques à vous je ne manqueray pas aux occasions d’en donner advis à VostreExcellence et vous tesmoigner que je suis,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Nantes, le 8e décembre 1623.

La haste me servira s’il vous plaist d’excuse à ma mauvaise escriture. Ce qu’on a accordé àMonseigneur pour Chastillon a esté plustost par recognoissance et grattification que pour importancequ’on jugeast y avoir à démolir la place. Monseigneur a esté bien sceu.

Archives nationales 1 AP 357/127

Samedi 16 décembre 1623 – Nantes

à Monsieur de Champdor

Monsieur, J’ay cy-devant escript à Madame les commencemens de l’affairetraittée avec Monsieur de Coniac203 qui luy en dira la fin. Je m’asseure qu’elle la trouvera utile etadvantageuse pour plusieurs raisons. De Thouars, M. de La Mazure nous le conseilloit et nous hastoitavec raison. Le plus grand offre qui soit venu de là n’a esté de bien loing si considérable que lesconditions que vous pourrés lire en l’escrit que porte mondit Sr. de Coniac.

Monseigneur en escript à madite Dame. Je ne puis luy escrire pour cette fois, car oultre que jen’ay rien digne d’elle. Je suis attaché au lit par ce mauvais mal dont autres fois vous m’avés veuplaindre un pied. Vous ferés donc s’il vous plaist mes excuses et aussi que deux jours sont seulementpassés depuis que je luy ay escript. Je ne puis que je ne vous die que son soing et affection pourMonseigneur et ses affaires est digne d’admiration, et m’estonne comme elle peut supporter tant depeine et résister à des solicitudes continuer. J’en ay souvent entretenu Monseigneur qui véritablementen a de grand ressentimens à quoy j’adjouste que les frais et la despense qu’elle faict mérite qu’il ypense à bon escient, et en supporte une partie. Ce que je croy il fera ce bon cœur et très volontiers.J’ay recueilly cela de ses discours qui partent, et je l’ose asseurer aultant du cœur que de la bouche.

203 Cette lettre n’a pas été conservée. Les Le Coniac étaient des catholiques de Quintin, originaires de Cohiniac (Côtesd’Armor) sur laquelle les comtes de Laval s’étaient appuyés pour gérer cette possession loitaine de leurs autres terres. Sesmembres contrôlaient une bonne part des charges du comté et de la ville de Quintin. Jean Le Coniac († 31 juillet 1631), sieurde La Ville-au-Pilon à Saint-Bedan, le chef de la famille était le fermier général du comté de Quintin. Son fils aîné Henri, néen 1587, était depuis 1614 conseiller au Parlement de Bretagne. Son second fils, Sébastien, était depuis 1619 sénéchal deQuintin. Son troisième fils Jean, né en 1605, après avoir reçu la tonsure en 1621 des mains de l’évêque de Quimper, était à laveille d’être nommé par le Roi le 31 décembre 1623 abbé de Saint-Laon de Thouars.

Page 133: Années 1618-1623

133

Je ne doubte point qu’il n’eust très agréable que Madame composast des ordonnances qu’il a àParis et que des deniers qui en proviendoient elle en prist telle part qu’elle adviseroit. Peut-estre quele succès de Monseigneur en ce lieu facilitera les moyens de convertir le papier en deniers. Jesouhaitte et recerche tous moyens de pouvoir rendre à Madame quelques services y estant obligé entant de sortes.

Je n’escri point à M. de Rozemont qui trouvera icy mes bien humbles baise-mains. Je n’osevous dire la douleur que me faict ce mauvais pied, ny dequel nom j’appelle mon mal. Ce seroit vousentretenir d’un trop mauvais discours. J’aime mieux vous supplier de m’aimer tousjours et de mecroire,

Monsieur,

Vostre très-humble et très affectionné serviteur.

d’Iray

A Nantes, le 16e décembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/128

Jeudi 21 décembre 1623 - Nantesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Hier estoit le jour du messager ordinaire que je laissay partir sans escrire à Vostre Excellencescelon mon debvoir. Je n’y eusse manqué si je n’eusse esté seigné le matin au bras droict, je vouseusse dict Madame comme maintenant je fay la continuation de la bonne santé de Monseigneur etcelle de ses bonnes procédures envers le public et les particuliers qui le font aimer, estimer et honorer.Le succès du voyage des desputés luy donnera Dieu aydant par vostre soing et sollicitude continuellenouvelle matière de contentement et d’honneur.

M. de Coniac vous aura à présent porté Madame la conclusion de l’affaire commencé pour St-Laon. Je ne doubte point que vostre crédist et auctorité ne luy soit nécessaire pour la faireheureusement succéder. Ainsi c’est une suitte de peines que je plains et les craindrois pour vostresanté si vostre affection toute parfaicte ne les surmontoit avec plaisir.

Je supplie très-humblement Vostre Excellence de croire qu’en cette affaire et toutes autres surlesquelles je suis honoré de quelques commandemens. J’y fais ce que je puis pour le bien advantage etcontentement de Monseigneur bien heureux lorsque j’apprendray qu’il sera approuvé de vous. Carjusques là mon contentement n’y peut estre.

Je ne puis assés m’estonner de l’imprudence et la légèreté du Sr. procureur fiscal de Vitréd’avoir osé changer, ny souffrir estre changé aulcune chose à ce qui par le conseil, honoré de vostreprésence, avoit esté avisé. Les lettres que Monseigneur luy a escriptes auront faict cognoistre à VostreExcellence, si elle a eu agréable se les faire lire, l’ordre qu’il avoit de recevoir et suivre surtout voscommandemens. Je m’asseure que sa procédure ne sera nullement approuvée de Monseigneurpuisqu’elle vous a esté désagréable, sçachant assès le desplaisir qu’il recevra tousjours quand quelquechose sera passée qui vous donne du mescontentement. M. de Rozemont aura je m’asseure dict àVostre Excellence si vous l’avés daigné /2/ enquérir le jugement que j’an ay tousjours faict.

Mais, Madame, je laisse cela pour vous dire que Monseigneur ayant voulu continuer à sesanciens fermiers de Thalmond leur ferme qui expire dimanche prochain et eux ayant demandé cinqcens livres de diminution l’a promise à un des enfans du feu Sr. de La Gandivière qui a eu l’honneurd’en estre longtemps fermier. Le preneur l’a aux mesmes charges que les précédans et au mesme prixsinon qu’il donne par an deux fournitures de toile de plus évaluées à xl livres. C’est toit ce qu’on apeu faire de mieux et encore avec peine. Les conclusions favorables obtenues pour la vérification dudroict de nomination aux offices royaux de Laval sont effects de vostre affection et crédit, et aussi devostre prudence, laquelle y estoit si nécessaire.

M. de La Roche-Jarret va à Paris pour son affaire contre Collasseau. Il en entretiendra asséssouvent Vostre Excellence c’est pourquoy de peur de l’en importuner je ne luy diray que cecy. Il a

Page 134: Années 1618-1623

134

désiré une procuration de Monseigneur en laquelle le nom du procureur fust en blanc pour poursuivreet faire poursuivre vivement le procès qu’a Monseigneur contre ledit Collasseau jusques à arrestdéfinitif ce que mondit Seigneur luy a accordé à cause qu’il luy a baillé promesse par escript de fairela poursuitte à ses frais et mesme d’indemniser Monseigneur de l’événement. Il recevra surtout l’ordrede Vostre Excellence pour la santé de laquelle, sa prospérité et son contentement je prie tous les joursDieu, et qu’il me doint d’estre toute ma vie honoré de vostre bienveillance et de la qualité que je prisesur toutes choses,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et trèsfidèle serviteur. d’Iray

A Nantes, le 21e décembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/129

Mercredi 27 décembre 1623 - Nantesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

J’ay esté en doubte si je devois envoyer à Vostre Excellence une lettre de Monseigneur à demyfaicte. Il avoit remis ce matin à vous escrire attendant tousjours quelque chose de nouveau, maisM. de Cahors l’a tenu jusques à dix heures et Monsieur de Vendosme jusques à onze. Ils sont sortisensemble et vont disner aussi ensemble chez M. du Rocher-Portal204 qui traitte Monseigneur, MM. lesautres présidens et tous Messieurs les commissaires.

Ce que je voy de la lettre de Monseigneur respond à ce que Vostre Excellence luy a escripttouchant le procureur de Vitré, lequel il blasme pour les mauvais moyens dont il a usé maisparticulièrement de ce qu’il vous a dépleu. J’ay creu, Madame, estre de mon debvoir d’adjouster cecypour vous oster du soucy que vous aurés peu prendre pour n’avoir point de lettres de Monseigneur. Jevous supplie très humblement de l’avoir agréable et que jusques à ma mort je puisse estre honoré de laqualité,

Madame de,

Vostre très-humble, très-obéissantet très fidèle serviteur. d’Iray

A Nantes, le 27e décembre 1623.

Archives nationales 1 AP 357/130

Mercredi 27 décembre 1623 - Nantesà Charlotte-Brabantine de Nassau

Madame,

Depuis le partement d’Espérance j’ay receu celle qu’il a pleu à Vostre Excellence m’escrire du16e. Vous me faictes l’honneur de me dire par icelle l’arrivée à Paris des courriers de M. deVendosme depuis lesquels y sont arrivés MM. les dépputés des Estats il nous estoit impossibleMadame de vous escrire le subject du voyage desdits courriers, car bien que nous nous enimaginassions les raisons. Nous n’eussions peu toutesfois en asseurer les causes. Et aussi qu’on avoitplustost advis de leur partement que de la délibération de les faire partir, mais puisque tout cela sefaisoit à cause du voyage desdits depputés leur présence n’aura rien laissé en doubte. On est icy entrela crainte et l’espérance pour le succès de ce voyage particulièrement si ou non on traittera, ouconviendra du traitté à la Cour. Aulcuns désirent en cela ce que les autres appréhendent.

204 Gilles Ruellan, seigneur du Rocher-Portal et de Tiercent, originaire d’Antrain. Tallemant des Réaux a consacré uneHistoriette, à ce financier lié à Richelieu. Gilles Ruellan mourut au mois de mars 1627 à Paris et fut inhumé le 31 mars dumême mois dans l’église des Grands carmes de Rennes.

Page 135: Années 1618-1623

135

Tout ira assés à mon gré si Monseigneur reçoit celuy qu’il mérite et que vostre affection et vossoings luy procurent. Icy on traitte de légères affaires dont la pluspart ne sont bonnes qu’à envoyer letemps jusques à ce qu’on ait pour nouvelles les intentions du Roy sur le subject de la dite desputation.

On ne parle point encore que sourdement des rachapts des Essars et Rié. M. de La Mothe a faictce qu’il a peu pour trouver marchands de La Roche-en-Nord. Il ne se présente personne qu’il veuilletout. Quelques particuliers prendroient ce qui les accommode. On continue tousjours à y veiller. J’ycontribueray ce qui despendra de moy. Vostre Excellence me faict l’honneur de m’escrire sessentimens sur la résolution que Monseigneur doibt prendre de vendre quelque chose qui …. /2/, quipuisse mettre ses affaires hors de la presse des incommodités passée et présentes en danger mesme devenir continuelles ou plus grandes s’il n’y est remédié par une vente.

Je ne doubte point, Madame, que oultre le ressentiment que vous avés pour celles deMonseigneur l’estat des vostres ne s’en ressentes. J’ay souvent pris la hardiesse de luy dire ce quej’estimois sur ce subject et représenter le gouffre où les arrivages de rentes, les condemnationsd’intérests et les frais des mauvaises affaires emportent et attirent. J’ay tousjours veu en luy des désirsd’en sortir par cette voye et croy que s’il en trouvoit les occasions il donneroit bien volontiers lesmains. Depuis deux jours, je me suis traisné à son logis, mais les fréquentes visites ne permettent paspas qu’on puisse beaucoup luy parler. Il est besoing que vos bons advis, vostre soing et vostreprudence interviennent en cela et y coopèrent. Car Dieu bénist vos procédures et vostre expériencefournist tousjours de bons moyens. Monseigneur se porte très bien grâce à Dieu. On nous asseureaussi souvent de la bonne disposition de Madame vostre belle-fille et de Monseigneur le Prince qui serend de plus en plus si joli et agréable qu’il ne se peut trouver de paroles pour le dire.

Les dernières nouvelles que nous avons eues de Monseigneur le Comte nous asseuroient de sabonne disposition. Je luy ay escript scelon les commendemens qu’il luy a pleu m’en faire. M. deChasteauneuf est allé le trouver il y a longtemps. Je prie Dieu qu’il luy inspire de bons conseils poursa conduitte et l’accroisse en toutes sortes d’honneurs. Il les mérite et les grands dons et rares qualitésdont Dieu l’a voulu doüer sont de bons moyens pour les obtenir s’il suit vos sages conseils.

A tout cela vostre santé est absolument nécessaire. Celuy qui vous la donne, la continue etl’augmente par sa grâce en longues et heureuses années, celle de Madamoiselle en toutes sortes deprospérité et envoye sur vostre très illustre maison les bénédictions du Ciel et de la Terre sçelon lessouhaits,

Madame,

Vostre très-humble, très-obéissant et très fidèleserviteur. d’Iray

A Nantes, le 27e décembre 1623.

Messieurs Brusse, du Plessis et les autres vous rendent très-humblement grâce de l’honneur devostre souvenir.

Archives nationales 1 AP 357/131

- § -

Jean Luc Tulot, F Saint-Brieuc, 1er juin 2009