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Revue des professionnels des espaces naturels 10 avril 2005 trimestriel • 9,5 animales et végétales...

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avril 2005 • n° 10

3 ÉDITO RéintroductionsPotion magique ou pilule amère?4 L’ÉCHO DES PROS Actualités

sommairePhoto de couverture : Photothèque FerusExtrait du film « La Montagne aux Ours » de Laurent Charbonnier, cinéaste animalier.

Tarif des abonnements : 1 an (4 numéros) : 33,50 €ISSN N° 1637-9896 - Commission paritaire 0505 G 83179

DOSSIERLes réintroductions animales et végétales7 Noé, père des réintroductions.8 Tortues d’Hermann :

se donner toutes les chances de réussir.9 Réintroductions végétales :

éléments de méthode.10 La stratégie : « C’est le document

préalable indispensable. »11 Ensuite vient la charte,

vade-mecum des conduites à tenir.12 Le retour du saumon dans le Rhin : deux

expos pour une appropriation collective.14 Une réintroduction est un commencement

qui bouleverse.15 Trente-cinq ans après, le lynx fait son bilan.17 En Ariège, l’ours fait ses comptes.18 Réintroduire la cistude, quelle faisabilité ?20 Belvédère des vautours :

l’élégante séduction du charognard.21 Les échanges génétiques ne sont pas

toujours préjudiciables mais…21 Le buglosse crépu nous enseigne

la modestie.22 En débat : risque de dérive…

SCIENTIFIQUE - CHERCHEUR

23 MéthodologieÉvaluation de la biodiversité de la végétation en forêt aménagée.

26 Devoir de mémoireL’histoire, miroir des espaces protégés…

ANIMATEUR - FORMATEUR

27 ÉvaluationCap gypaète : la volonté d’évaluer l’action,la méthode pour le faire.

29 Et si c’était à refaire ?

GESTIONNAIRE - PARTENAIRE

30 Fiche techniqueChoisir le GPS adéquat.

MANAGEUR

32 CommuniquerRaid alpages et forêts, en Chablais.Un événement, ça parle énormément…

34 Nouvelles règlesPolitique agricole commune, une question de survie.

JURISTE

37 Responsabilité de l’employeurL’obligation générale de sécurité faite aux employeurs.

AILLEURS

38 Coopération internationaleLe retour à la liberté du dernier cheval sauvage.

40 LECTEUR PENSEUR

42 VIENT DE PARAÎTRE

43 L’AGENDA

[ Les propositions desujets d'articles àtraiter dans la revuesont à adresser à :[email protected]

38La Mongolie accueille son cheval sauvage

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PAGE 3 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10

DIRECTEUR DE LA PUBLICATIONJean-Marie Petit

COMITÉ ÉDITORIALCoordination : MichelleSabatier • Secrétariat :Gwénaëlle Arons •Rubriques : Actualités BrunoMounier, Pascal Danneels •Gestionnaires et partenairesSamia Lamri, Jean-ClaudeBonnafé, Véronique Petit-Uzac, Cécile Birard • Scientifiques et chercheursValérie Fiers, Jean-PierreMartinot • Animateurs,formateurs, pédagoguesNicolas Gérardin, FabriceCugny • Juristes FabienneMartin-Therriaud •Comptables et financiersFlorence Lespine • Ailleurs(international) Marc Lutz •Agenda, publicationsLaurence Boussand.

RÉDACTIONRédactrice en chef : MounePoli • Rédactrice graphiste :Camille Prosperi • Assistantegraphiste: Laetizia Giampietri •Correctrice : Magali FloriMediaterra Route Royale -20600 Bastia Mél : [email protected]él. : 0495 31 12 21

ADMINISTRATION,ABONNEMENTSRÉDACTIONMediaterra Route Royale20600 Bastia Tél. : 0495 31 12 21

PUBLICITÉMarie-José Dupuis • PLC31, rue de la Rochefoucauld75009 Paris Tél. : 0145 26 93 31Mél : [email protected]

ÉDITEUR Aten - Ateliertechnique des espacesnaturels. 2, place Viala -34060 Montpellier cedex 1.Tél. : 0467 04 30 30

IMPRESSION ImprimerieChirat • 744, rue de Sainte-Colombe • 42540 Saint-Just-la-Pendue

ÉDITO

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Les réintroductions, renforcements et translocations d’animauxsauvages, parfois de plantes, se multiplient. Toujours présentés auxmédias comme des success story . À l’inverse, beaucoup les perçoivent

comme une preuve du mauvais état de la nature. Les deux lectures ne sont pas contradictoires… Si les hommes ont éliminéquelques espèces (soit des prédateurs, soit des animaux à haute valeurcynégétique ou commerciale), leur retour est a priori une bonne nouvelle. Iltémoigne du maintien ou de la restauration d’un habitat propice (conditionde toutes les opérations sérieuses) et d’un changement dans les mentalitéset les comportements.De nombreux animaux nous susurrent ainsi : « Allons, tout n’est pas si noir,qui aurait espéré un tel renversement de situation ? » En France, il s’agit ducastor, du bouquetin, du vautour ; aux États-Unis, du loup (plusieurs sous-espèces), du condor de Californie ; en Afrique australe, du rhinocéros blanc.Mais souvent aussi, les manipulations ne sont qu’une gesticulationdésespérée devant la dégradation irréversible des éco-régions. On transfèredes grands singes, on en relâche, mais à quoi bon si la forêt primaire n’estplus que lambeaux ? On brasse les félins et les lycaons de parcs en ranchspour lutter contre la consanguinité et pour diviser les risques, mais jusqu’àquand dans une Afrique où s’accentue la pression autour des aires protégéesfonctionnelles ?Parfois les réintroductions entreprises et réussies à grands frais dans lespays riches feraient presque oublier que les espèces concernées se portentailleurs de plus en plus mal : les vautours se rétablissent par dizaines enFrance mais ils disparaissent par milliers en Espagne, par centaines demilliers en Inde… L’ours brun va peut-être reprendre un fil de vie dans lesPyrénées mais il recule de la Turquie à l’Himalaya…S’il n’est pas question de se priver de l’outil des manipulations d’espècesqui, employé à bon escient, peut rétablir des situations ponctuellement trèscompromises, il ne faut pas compter sur lui pour sauver la biodiversité. Seuleune minorité d’invités, le plus souvent prestigieux, sera appelée à attendredans les zoos et les enclos des jours meilleurs. Le tigre, le panda, commenaguère le tamarin lion ou le bison d’Europe seront toujours des nôtres. Lethylacine l’aurait été, à quelques années près. Cependant, des millionsd’insectes, de mollusques, de reptiles, d’amphibiens, sans parler desanimaux marins, disparaîtront à jamais, avec leurs habitats, sous les coupsde nos pollutions.Les opérations de réintroduction sont séduisantes : qu’elles soient l’occasionde mobiliser autour de la biodiversité, au-delà des cercles d’initiés. Et,toujours à condition de pointer le doigt sur la conservation et la restaurationdes habitats, ennuyeuses, dérangeantes, monotones mais ô combienprioritaires. ■

GILBERT SIMONEST ADMINISTRATEUR

DU WWF FRANCE, DE LA SNPN, DE FERUS,

ET ANCIEN DIRECTEURDE LA

NATURE ET DES PAYSAGES

Potion magiqueou pilule amère?

>>> [email protected]

RÉINTRODUCTIONS

LYNX.

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ACTUALITÉSl’écho des pros ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 4

● DécouverteOctodrilus juvyi: le lombricien ingénieur du sol

● En bref

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LE PARC NATUREL RÉGIONAL DE

CHARTREUSE A INITIÉ UNE ÉTUDE SUR LES

ÉRABLAIES. EN ANALYSANT LE SOL, LES

CHERCHEURS ONT DÉCOUVERT UN VER

INCONNU : OCTODRILUS JUVYI.

Les érablaies qui poussent surles versants de montagnesfont partie des forêts

considérées, au niveau européen,comme des habitats rares,d’intérêt prioritaire. Leurconservation joue un rôleimportant dans le maintien de labiodiversité (directive Habitats).Ces forêts se développent sur desterrains en forte pente, rendusinstables et mobiles suite à deséboulis, des chutes de pierres oudes avalanches. Sur ces sites, laforêt permet de fixer le sol. Detels écosystèmes sont présentsdans le massif préalpin de laChartreuse. Comment ces érables,essences normalement post-pionnières ou nomades,parviennent-ils à coloniser cessubstrats mobiles et à s’ymaintenir? C’est la question quese sont posée les chercheurs duCemagref de Grenoble dans lecadre d’une recherche initiée par leParc naturel régional deChartreuse. Ils ont donc cherché àcomprendre le fonctionnementbiologique et la dynamique de cessites, étape préalable à touteprocédure de gestion conservatoire.L’étude comprend deux phases.Elle est menée au niveau des troissites (altitude entre 1000 et 1200mètres), différents par leursniveaux d’instabilité. La premièrephase a conduit à une évaluationprécise du patrimoine végétal de

ces sites. La seconde, encours, vise à comprendre ladynamique de peuplement desérablaies. Pour cela, leschercheurs procèdent à desanalyses du sol : composition deshumus, porosité, état de la faunelombricienne… C’est en analysantle sol qu’a été découvert un verinconnu, aujourd’hui baptiséOctodrilus juvyi par le professeurZicsi. Cette nouvelle espècelombricienne s’ajoute aux quelquetrois cents déjà répertoriées enFrance. La découverte estsuffisamment peu courante pourque la communauté scientifique s’yintéresse de plus près. Pourl’instant, Octodrilus juvyi a ététrouvé sur les trois sites d’étudesdu Parc naturel régional de laChartreuse. Il s’agit donc soitd’une espèce endémique, c’est-à-dire spécifique du massif et dontles caractéristiques seraient lerésultat d’une évolution depuis laformation du massif ; soit d’uneespèce caractéristique desérablaies. Seules des recherchesau niveau national ou mondialpourraient répondre à cettequestion. ■Bernard Juvy - Cemagref Grenoble

>>> Tél. : 0476762775

[email protected]

Une nouvelle RéserveElle rejoint les 325 Réservesnaturelles de France et devient lepremier espace protégé en Côted’Or et le quatrième en Bourgogne :la réserve naturelle nationale de laCombe Lavaux - Jean Roland a étécréée, par décret, le 10 décembre2004. Ce paradis des botanistesrecèle une multitude d’espècesmontagnardes et méditerranéennes,comme la très rare véronique en épiou le scorzonère d’Autriche que l’ontrouve seulement à cet endroit enBourgogne. Le classement enRéserve naturelle nationalepermettra en particulier de contenirla circulation des véhicules à moteursur les chemins carrossables. Ledéveloppement incontrôlé des loisirsmotorisés est en effet une desmenaces importantes qui pèsentsur un tel milieu, en particulier surles pelouses du plateau. ■

Jouer pour comprendreLes joueurs choisissent ce qu’ilsvont cultiver. Les caractéristiques deréserve en eau du sol sont biendéfinies et l’informatique modéliseles conséquences de ces choix enfonction des scénarios climatiques.Initié par les chercheurs duCemagref de Montpellier, ce jeu desociété veut sensibiliser au partagede l’eau. Des tests sont en coursafin d’évaluer les retombées du jeuen termes de prise de conscience. ■>>> [email protected]

Tél. : 0467046300

L’Ifen centraliséHier établissementpublic à caractèreadministratif, l’Institutfrançais de l’environnementa changé de statut. Depuisjanvier 2005, il est devenu un« service à compétence nationale »directement rattaché au ministre encharge de l’Environnement. Sescompétences restent identiques :organiser et animer le réseau desproducteurs et utilisateurs del’information environnementale.L’Institut demeure basé à Orléans. ■>>> www.ifen.fr

Tél. : 0238797878

SUR LE SITE…

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PAGE 5 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10ACTUALITÉS

l’écho des pros

«Bois mort et à cavités,une clé pour desforêts vivantes», le

colloque francophone qui s’esttenu en octobre dernier 1 a conclusur l’urgence d’agir : de trèsnombreuses forêts manquent detrès vieux arbres et de bois mort.Près de 300 participants venusde huit pays ont mûri cetteconclusion après avoir échangéleurs connaissances etexpériences sur la biodiversitéforestière.Une trentaine d’exposés oraux,des débats, ainsi qu’unecinquantaine de posters ontpermis de faire un tour d’horizoncomplet des vieux arbres et desarbres morts debouts ou au sol. Ces milieux particuliers abritentdes centaines d’espècesfongiques, animales et végétalesdont un bon nombre n’est pasencore connu. Au niveau du boismort se jouent le bouclage descycles forestiers (dont dépend lafertilité à long terme), lerecyclage des matériaux, lestockage de l’eau et, bien sûr, laprotection de milliers d’espèces.Les expériences de gestion, ladynamique et l’écologie du boismort, l’entomologie,l’ornithologie, la botanique,l’écologie, l’hydrobiologie, ledroit, l’économie, la sociologie,l’éducation à la nature, lasylviculture, la protection de lanature… Tous les participants sesont retrouvés sur la nécessitéde laisser plus d’arbres morts enforêt. Cependant, les interactionssont fortes entre économie etbiodiversité et les discussionsrestent ouvertes sur les types debois mort à conserver ou sur lafaçon d’adapter les modesd’intervention. L’une desdifficultés tient à l’existence denombreuses situations, toutesparticulières. Des progrès restentdonc à faire, tant en matière deconnaissances scientifiques etnaturalistes que de gestiondurable.Lors de ce colloque, unedynamique d’échanges deconnaissances et de pratiquesde gestion s’est créée autour du

bois mort, dynamique que lesparticipants ont souhaité voirs’étendre au cours de cesprochaines années.Les communications (orales et posters) de même que lasynthèse des quatre atelierssont publiées chez Lavoisier, Tec. & Doc. ■

Place au bois mort

1. Organisé du 25 au 28 octobre 2004 par le WWF, la FRAPNA, l’université de Savoie etune dizaine de partenaires (MEED, MAPAR, IFB, RNF, ONF, PRO SILVA, École forestière dePoisy, École supérieure d’agriculture de Purpan, CICM, OPIE…), ainsi que l’appui de laRégion Rhône-Alpes, du Conseil général de la Savoie et des Communes de Chambéry et laMotte-Servolex.

>>> Benoit Dodelin,Leca université de Savoie73376 Le Bourget du Lac cedexMél : [email protected] >>> Jean André, Leca université de Savoie73376 Le Bourget du Lac cedexMél : [email protected] >>> Daniel VallauriWWF-France, 6, rue des Fabres13001 MarseilleMél : [email protected]

Le site du colloque : www.univ-savoie.fr/labos/ldea/Bmc/accueil.html

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Le site du colloque est en ligne surinternet... les actes doivent paraîtredans les semaines qui viennent. À ne pas manquer !

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ACTUALITÉSl’écho des pros ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 6

● BiodiversitéLa liste des espèces menacées s'allonge

● En bref

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Sports de pleine natureLa Fédération des Parcs naturelsrégionaux a engagé une étude sur lapratique des sports de pleine nature.Elle doit aboutir à la publication d’unguide de concertation entre acteurs.La première phase, actuellement encours, consiste à recueillir lesexpériences des gestionnaires de siteset usagers. Sur le même thème, onnotera le séminaire organisé en maipar RNF (voir p.43). ■>>> [email protected]

Police de l’eauSignée le 26 novembre 2004, unecirculaire prévoit la réorganisation dela police de l’eau. Ainsi, un serviceunique de police de l’eau sera misen place dans chaque département,contre quatre à huit servicesaujourd’hui. Les missions de policede l’eau consistent notamment àlutter contre la pollution des eauxlittorales et marines, à protéger lesmilieux aquatiques et les zoneshumides. Ce service unique devraêtre identifié au plus tard le 30 mars2005 et sa mise en place effectivedevra intervenir avant janvier 2007. ■>>> Marillys Macé

Tél. : 0142191750

Chartes forestières de territoireOuvert depuis janvier 2005, le siteinternet des CFT offre desinformations réparties dans troisrubriques : « Connaître les CFT »fournit un accès aux dossiers desCFT • « Élaborer une CFT », apportedes renseignements pratiques pourélaborer une CFT et financer sesactions • « Vie des CFT » mutualiseles informations communiquées par les acteurs des CFT.Une liste de discussion estégalement ouverte. ■>>> www.cft.fncofor.fr.

La liste rouge des espècesmenacées de l’Union mondiale pourla protection de la nature (UICN)

s’allonge toujours : plus de 15500 ysont aujourd’hui référencées. Cetteévaluation, la plus importante jamaisentreprise de l’état de la diversitébiologique mondiale comprend, pour lapremière fois, l’indice liste rouge. Cetoutil permet de mesurer les tendancesen matière de risque d’extinction. Unindice liste rouge est disponible pour lesoiseaux et les amphibiens. Il montre queleur état s’est constamment dégradédepuis les années 80.Depuis 2003, la liste a connu quelqueschangements significatifs, notammentquelques sérieuses aggravations,

comme pour l’olivier de Sainte-Hélène(passant d’éteint à l’état sauvage, àéteint), la corneille d’Hawaï (passant deen danger critique d’extinction, à éteint àl’état sauvage), le puffin des Baléares(passant de quasi menacé, à en dangercritique d’extinction), un grand lézard del’île d’Hispaniola, Celestus warreni(passant de quasi menacé, à en dangercritique d’extinction). Mais il y aégalement eu des cas d’amélioration,comme pour la loutre d’Europe (passantde vulnérable, à quasi menacé) et lepigeon impérial de l’île Christmas(passant de en danger critiqued’extinction, à vulnérable). ■>>> http://www.iucnredlist.org/texte en anglais

DÉCLARATION DU 13 JANVIER 2005

La question de la survie des ours dans les Pyrénées […] fait partie d’une ques-tion plus vaste posée à l’humanité tout entière. [C’est] celle de sa cohabita-tion, sur cette planète, avec la nature […]. Depuis cinquante ans, le développe-

ment des activités humaines est entré dans une concurrence de plus en plus viveavec ce qui reste de nature sauvage sur la Terre. Sous toutes les latitudes, […]l’Homme doit partout choisir entre poursuivre un développement indifférent desrichesses de la nature, et alors inéluctablement la détruire, ou bien trouver lesvoies d’un développement non destructeur […]. Chacun doit prendre sa part de res-ponsabilité. Nous le demandons, pour ce qui est leur part, aux autres peuples. Lesours font partie de la part des Français. […] L’objectif, c’est le doublement de lapopulation d’ours dans le massif pyrénéen d’ici à trois ans. Ils sont aujourd’huientre 14 et 18 sur le massif pyrénéen. L’objectif est la trentaine fin 2008.L’action s’engage dès cette année. Le gouvernement a décidé de réintroduire cinqours, plutôt des femelles, à l’automne prochain. […] Cette perspective et ce délainous laissent le temps d’un véritable travail collectif d’accompagnement et de dia-logue. Il nous reste à décider, d’ici à l’été, de multiples paramètres :- Où auront lieu, en 2005, ces premières réintroductions?- D’où viendront ces ourses réintroduites ? Déjà les premiers contacts diploma-tiques ont été engagés avec l’Espagne, la Croatie et la Slovénie.- Dans quelles conditions et avec quel accompagnement […]? À cet égard, dès lesprochains jours, les préfets […] engageront un important processus de concerta-tion et de dialogue avec les maires de l’ensemble du massif pyrénéen, avec lesreprésentants professionnels et institutionnels (chambres d’agriculture et syndicatsagricoles, représentants économiques…) enfin, avec les associations dont les fédé-rations de chasseurs. […] Cette décision du gouvernement doit également s’accom-pagner d’une démarche d’écoute d’habitants des Pyrénées.- [Nous approfondirons enfin] pendant toute cette période, lesrelations avec nos partenaires espagnols et andorrans. […]Chaque pays doit faire des efforts pour renverser lespratiques, économiquement, socialement, cultu-rellement légitimes jusqu’à ce jour, mais qui, sinous les laissions durer, condamneraientdes milliers et des milliers d’espècesvivantes à la disparition. […] Sauver lesours des Pyrénées ne se fera pas sanseffort mais c’est une part de l’avenir del’humanité qui se joue. ■

SERGE LEPELTIERMINISTRE DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

«Objectif : doubler la population d’ours»

© Marie WeberÀ consulter : www.ours.ecologie.gouv.fr.ce site internet présente l'ensemble du programme ours.

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PAGE 7 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10

Noé, pèredes réintroductions

LE LYNX AVAIT DISPARU

DE NOTRE TERRITOIRE, IL A ÉTÉ RÉINTRODUIT

DANS LES VOSGES

ENTRE 1983 ET 1993.LE LYNX EST REVENU

SEUL DANS LES ALPES ET

DANS LE JURA À PARTIR

D’UNE POPULATION

RÉINTRODUITE

EN SUISSE.

Depuis ce précédent illustre, les choses sont devenuesplus complexes…Aujourd’hui, face à un ciel sans rapace, à une eau sanspoisson, ou au désert laissé par un chantier d’aménage-ment, nous devons imaginer des solutions, souventmodestes, pour reconstituer un peu le patrimoine quenous ont légué nos parents (ou celui qu’ils ont dégradé!).En premier lieu, il s’agit sans doute de laisser faire lanature. La capacité de colonisation des espèces, lorsquele milieu leur convient, ne lasse pas de noussurprendre ; pensons à la loutre dans le Massif Central,au loup dans les Alpes ou aux plantes sur la moindrefriche.La dynamique naturelle est parfois bloquée, pour desraisons multiples : obstacles à la circulation des espèces,explosion d’espèces concurrentes… Il peut alors êtrejustifié d’intervenir, en réintroduisant les espèces dispa-rues. Dans certains cas, le milieu physique lui-même aété dégradé, simplifié. Il ne s’agit plus dans ce cas deréintroduire telle ou telle espèce, mais de reconstruirel’ensemble d’un écosystème.Après quelques décennies de lâchers empiriques,concernant souvent des espèces assez simples à manipu-

JEAN-LOUIS MICHELOTCONSULTANT EN ENVIRONNEMENT

>>> Mél : [email protected]

Lorsqu’il ouvrit les portes de l’Arche, Noé ne savait pas qu’ileffectuait la première réintroduction de l’histoire. Le travailétait immense : la biodiversité risquait de souffrir de la

catastrophe qui venait de frapper la planète. La méthodologieretenue était simple : un seul couple d’animaux pour reconstituer unepopulation viable. Les formalités administratives furent égalementminimes. L’opération réussit pourtant brillamment !

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ler, nous sommes entrés dans une période de réintro-ductions élaborées sur des bases scientifiques, accompa-gnées d’un suivi ambitieux ; il en est résulté des succèsparfois spectaculaires (bouquetin dans les Alpes, vau-tours dans le Massif Central…).Cette évolution est particulièrement positive, mais ellene doit pas cacher le travail qui reste à accomplir, etnotamment :• Prendre en compte toute la dimension sociale desopérations. On sait que l’appropriation locale des réin-troductions est l’une des conditions de leur succès. Au-delà, l’un des objectifs majeurs de ces opérations doitêtre de renouer la proximité, souvent perdue, entre lapopulation et la nature ;• S’intéresser à la nature ordinaire, et aux « lâchersordinaires ». Pour un lâcher de vautours, combien delâchers de perdrix ou de lièvres inconsidérés ? Pour unetransplantation de plantes rares, combien d’engazonne-ments de talus d’autoroute ? Ces opérations apparem-ment anodines façonnent aussi notre biodiversité ; ellesméritent le même sérieux que les opérations plus ambi-tieuses et soulèvent les mêmes questions préalables : cesespèces vivaient-elles ici ? Pourquoi ont-elles disparu ?Peuvent-elles vivre dans le milieu que nous leur offronsaujourd’hui ? Quelles seront les conséquences de leurprésence future ?La reconstitution de notre patrimoine naturel mérited’être mise en valeur par des expériences exceptionnellesportant sur quelques espèces emblématiques ; elle demande aussi et surtout un travail de fourmi sur l’en-semble des écosystèmes et des espèces qui les occupent.■

Le dossierRéintroductions

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 8Le dossierRéintroductions

de 14 ans (1991-2004) a été réalisé à la suite d’uneréintroduction portant sur quatre-vingt-dix animauxlâchés entre 1987 et 2001. Ce suivi démontre le suc-cès de l’opération : bonne survie des animaux adultes(supérieure à 90% par an), reproduction des animauxnés en liberté (deuxième génération), taux d’accrois-sement de la population positif (supérieur à 1), satu-ration du site initial et colonisation de nouveaux sites.Sur cette base, il est possible d’élaborer une grilled’évaluation permettant de juger du succès ou del’échec d’une réintroduction chez la tortued’Hermann. Cette grille (cf. tableau) comporte uneévaluation à court, moyen, et long termes. En effet,la démographie de l’espèce (maturité sexuelle de 7 à12 ans selon les populations, durée de vie supérieureà 50 ans) impose un certain recul qui ne peut guèreêtre inférieur à 10-15 ans pour le moyen terme etsupérieur à 20 ans pour le long terme. Ces délaisposent évidemment un problème de taille : celui desfinancements et de la pérennité des politiques ! Celaveut dire que de tels projets doivent concerner dessites gérés de façon durable, avec des budgetsdurables et une politique durable, toutes chosesaujourd’hui bien difficiles à trouver ! ■

MARC CHEYLANMAÎTRE DE CONFÉRENCES À L’ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES

ALBERT BERTOLEROINSTITUT MÉDITERRANÉEN D’ÉTUDES AVANCÉES, MALLORCA, BALÉARES

Se donner toutes les chances de réussir

>>> Tortues d’Hermann

>>> Mél : [email protected]

CRITÈRES SUCCÈS ÉCHEC

Évaluation à court termeCondition physique Se maintient ou s’accroît Se réduitCroissance des jeunes Bonne Mauvaise

Domaines vitaux Stables et recouvrementsuffisant entre individus

Instables et recouvrementinsuffisant entre individus

Densité > 3 individus/ha < 3 individus/haReproduction Oui NonTaux de survie annuel adulte > 0.80 < 0.80

Évaluation à moyen terme (10-15 ans)Taux de survie annuel adulte > 0.90 < 0.90Reproduction Oui NonStructure de la populationprésence de jeunes notamment Bonne Mauvaise

Colonisation nouveaux espaces Oui NonÉvaluation à long terme

Taux d’accroissement population I > 1 I < 1Probabilité de survie de la population

Survie à 50 ans avec probabilitéd’extinction < 0.05

Faible ou extinction à 50 ansprobabilité > 0.05

et que le site réunit l’ensemble desconditions nécessaires à la survie d’unepopulation sur le long terme. La phasede suivi démontrera que la populations’est bien établie sur le site et que seschances de perdurer sont bonnes. Fortmalheureusement, c’est généralement laphase trois (lâcher des animaux) quireçoit le plus d’attention (et de budget !).Le plus souvent, on ne sait donc pascomment a été préparé le projet, ni sicelui-ci a réussi. Or, justement, c’estcette information qui est capitale pourplanifier de nouveaux projets.Concernant la tortue d’Hermann, denombreuses opérations de réintroduc-tion ont été conduites dans le Var sansdonner lieu à de telles évaluations, d’oùla réticence actuelle du ministère de l’Écologie face à ce type d’action. Grâce àdes recherches menées en Espagne, ondispose d’un retour d’expérience permet-tant de cadrer ce type d’opérations et de lesconduire au succès. Dans le Parc natureldu delta de l’Ebre en Espagne, un suivi

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Évaluation

LE DÉCLIN DES POPULATIONS FRANÇAISES

DE TORTUE D’HERMANN RÉSULTE DE

FACTEURS CUMULATIFS DIFFICILES À

MAÎTRISER : PROGRESSION DE

L’URBANISATION, ÉVOLUTION DES

PRATIQUES AGRICOLES, DÉCLIN DE

L’ÉLEVAGE, INCENDIES DE FORÊTS,AUGMENTATION DU COUVERT FORESTIER. LA RÉINTRODUCTION N’A CEPENDANT DE

SENS QUE DANS DES CONDITIONS BIEN

PARTICULIÈRES : SITES PROTÉGÉS SUR

LESQUELS UNE POLITIQUE CONSERVATOIRE

DE LONG TERME EST MISE EN PLACE.AUJOURD’HUI, DE TELS SITES N’EXISTENT

PRATIQUEMENT PAS EN FRANCE, CE QUI LIMITE LA MISE EN PLACE

DE TELS PROJETS.

En France, mais aussi en Italie et en Espagne,plusieurs structures se sont engagées dansl’élevage de la tortue d’Hermann, sans réelle-

ment se préoccuper de l’essentiel : où lâcher ces ani-maux? La médiatisation faite autour de ces élevagesa, par ailleurs, dirigé l’attention du public et desdécideurs vers une conservation ex-situ, au détri-ment de la préservation des populations sauvages. Aurisque de provoquer, on peut dire que ces opérationsde réintroduction ont retardé ou affaibli la protec-tion des populations sauvages. Un parallèle peutd’ailleurs être fait avec l’ours des Pyrénées dont il n’apas été possible de sauver la population native alorsque l’introduction d’animaux slovènes est plutôt unsuccès. Ces expériences soulignent combien il estimportant de ne pas brûler les étapes. La protectiondes populations sauvages doit toujours être la priorité.La réintroduction est un pis-aller, lorsque la protec-tion in situ a échoué.Sur le plan technique, les projets de réintroductiondoivent suivre le déroulement recommandé parl’UICN dans les documents de 1987 et 1996 : uneétude de faisabilité, une phase préparatoire, unephase d’introduction, une phase de suivi. La phase defaisabilité devra, notamment, démontrer que lescauses ayant conduit à la disparition ont été résolues

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Éléments de méthode>>> Réintroductions végétales

Destinées à la conservation des plantes menacéesde disparition, les opérations de réintroductionpeuvent s’avérer coûteuses. Il est donc absolu-

ment nécessaire de se poser au préalable des questionsconcernant l’objectif réel, l’indigénat 1 de la plante et lafaisabilité de l’opération.

Grandes lignes méthodologiques- Anticiper : ne pas attendre les situations catastrophe.Généralement, lorsque l’on peut compter l’effectifd’une plante, ce n’est pas très encourageant !- Établir un diagnostic complet sur la plante : géné-tique, écologie, biologie de la reproduction, chorologiemondiale, nationale, causes de la régression. Choisir letype d’opération le plus adapté à la situation.- Pour chaque étape, prendre l’avis de personnes-res-sources reconnues: botanistes, biologistes, comité scien-tifique, Conservatoire botanique national le plus proche.- Programmer: de la conception à l’implantation (atten-tion à la réaliser à l’époque optimale!), un tel programmeprend en moyenne deux ans, en raison des études com-plémentaires à réaliser, de la recherche du matérielvégétal le plus approprié, des délais administratifs…- Respecter des principes déontologiques. On doitmettre toutes les chances de son côté pour la réussitedu programme tout en nuisant le moins possible aumilieu. Le matériel végétal implanté doit être originairede la localité même ou, à défaut, d’un site très proched’un point de vue géographique et écologique. Le sited’accueil doit bénéficier d’une protection foncière ouau moins d’une convention de gestion. Dans le casd’une réintroduction, l’opération ne doit pas perturberle milieu d’implantation, ni mettre en danger d’autresespèces. Si la plantation assure une visualisation plusimmédiate de l’impact de l’action, le semis permetd’éviter les lâchers involontaires d’autres espèces éven-tuellement véhiculées dans la motte. Un suivi d’aumoins cinq ans est nécessaire après l’implantation (à budgéter !).

- Respecter la réglementation : toute implantation ennature d’espèce protégée par la loi (arrêtés interminis-tériels national et régionaux) doit faire au préalablel’objet d’une demande d’autorisation argumentéetransmise par la préfecture de département et la Direnau ministère de l’Écologie et du Développementdurable. La fourniture du matériel végétal (parrécoltes, éventuellement par cultures) devra être réali-sée par un Conservatoire botanique national. Dans unespace naturel protégé, il faudra d’abord solliciter l’ac-cord de sa direction. Ces étapes permettent en plus demettre en mémoire les opérations afin d’éviter toutbrouillage de la répartition naturelle de l’espèce.

BilanLe bilan est souvent difficile à dresser en raison dufréquent manque de recul (que représentent quelquesannées de surveillance par rapport à la durée poten-tielle de dormance des semences dans le sol ?) et demoyens pour le suivi (temps, protocole, quels critèresd’échec?). Les résultats sont très variables suivant lesespèces. Les échecs apparents constatés semblentsouvent liés à l’implantation d’un effectif trop faible,insuffisant pour installer une banque de semencesindispensable à la pérennité de la population implan-tée. On peut évoquer aussi une inadéquation desmilieux choisis.La restauration de biotope apparaît comme une étapeà privilégier pendant plusieurs années avec un suivi,avant d’envisager d’autres actions en cas d’échecavéré. Engagée à temps, elle peut suffire à retrouverdes effectifs suffisants avec des interventions moinsonéreuses. Dans le cadre de programmes globaux deconservation de l’espèce, on donnera la priorité à laprotection des populations encore en état, mais éga-lement à une intensification des prospections bota-niques qui permettent parfois la redécouverte deplantes présumées disparues. ■ANNIE ABOUCAYA - BOTANISTE

CONSERVATOIRE BOTANIQUE NATIONAL MÉDITERRANÉEN

>>> Mél : [email protected]

RENATURATION

Recréation, sur un espacetotalement artificialisé, d’unécosystème proche d’uneréférence naturelle, par desactions variées et ambitieuses(apport de terre,terrassement, implantation devégétaux…).

RESTAURATION DE BIOTOPE

Restauration d’un milieuécologiquement adéquat.C’est la première démarche àengager, notamment lors de lararéfaction ou de la disparitiond’une population végétale. Lesméthodes adoptées peuventêtre très diverses: ouverturede milieu, suppression de lasurfréquentation humaine parpose de clôture, réhabilitationde zones humides, éradicationde plantes exotiquesenvahissantes concurrentes,remise en place de pratiquesagricoles traditionnelles…

RÉINTRODUCTION

Réimplantation volontaired’une espèce animale ouvégétale dans une région d’oùelle a disparu.

INTRODUCTION

Implantation volontaire d’uneespèce animale ou végétaledans une région différente dela localité d’origine. Cettetechnique est à utiliser defaçon exceptionnelle, parexemple au cas où l’onn’arrive pas à maîtriser lesmenaces régnant sur les sitesd’origine.

RENFORCEMENT

DE POPULATION

Implantation d’individus d’uneespèce dans une région oùelle est présente, et destinéeà recréer une populationviable. On réalise cecomplément d’effectifs dansune population très amoindrie.

RESTAURATION

DES ÉCOSYSTÈMES

Interventions humainesvariées dont le but est dereconstituer des écosystèmesterrestres ou aquatiquesdégradés, voire entièrementdétruits par l’Homme.

Les programmes de réintroduction sont presque exclusivement réservés aux espèces endémiques, sinon aux espèces rares sur l’ensemble de leur aire

de répartition. Dans quelques cas, on s’intéressera à des végétaux peu fréquentsau niveau national voire régional : espèces emblématiques, population isolée

présentant une originalité génétique. La phase de diagnostic doit être réalisée de façon scientifique, argumentée, dans un contexte dépassionné.

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Lexique LES PLANTES N’AYANT PASD’AILES, LA NOTION DE

LOCALITÉ EST TRÈS PRÉCISEEN BOTANIQUE !

EN AUCUN CAS, ON NE FERADE RÉINTRODUCTION

VÉGÉTALE HORS DE L’AIRENATURELLE.CI-CONTRE :

LE SILÈNE VELOUTÉ.

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1. Le lieu dont elle est indigène.

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 10

La stratégie

Le dossierRéintroductions

Vous insistez sur l’importance d’élaborer unestratégie, de réfléchir à une politique globaleet de ne pas réintroduire au coup par coup,au gré des passions ou des intuitions. Querecouvre exactement le terme de stratégie ?

Pourquoi, où, quelle espèce réintroduire ? Cesont trois questions auxquelles doit répondreune stratégie de réintroduction. Il faut savoiraussi qu’une stratégie efficace nécessite de tra-vailler à l’échelle transnationale. Il serait vain,par exemple, d’œuvrer à la réintroduction dugypaète barbu sans le concours desAutrichiens, des Suisses, des Français, desItaliens… L’oiseau ne connaît pas les fron-tières, les bouquetins n’ont plus d’ailleurs !

Tous les pays transfrontaliers collaborent-ilsà ce type de démarche?

Cela dépend. Concernant le gypaète, la réponseest oui. Entre les Pyrénées françaises et espa-gnoles, cela marche très bien. Le bouquetinconnaît une situation un peu plus compliquéedu fait de son statut : l’espèce est protégée enFrance et en Italie, alors qu’elle est chassée enSuisse et en Autriche. Si une part de laréflexion est commune, en revanche, la décli-naison pratique diffère en fonction des pays etdes usages.

La réflexion ne se limite donc pas à l’échellede la région pressentie…

Certainement pas, c’est d’ailleurs une questioninitiale à laquelle doit répondre la stratégie deréintroduction : sur quelle aire biogéogra-phique faut-il agir ? Sur quel territoire évoluaitl’espèce, historiquement ou pré-historique-ment, avant qu’elle ne disparaisse ?

Jean-Pierre MartinotCHARGÉ DE MISSION FAUNE AU PARC NATIONAL DE LA VANOISE

Jean-Pierre Martinot a participéà l’élaboration collective de lastratégie de réintroduction desbouquetins en France, rédigéeen juin 1996.

● Rencontre avec

lieux de lâchers soient assez éloignés d’autressites, potentiellement favorables, et de ceux oùl’espèce existe encore. La présence de corridorsdoit permettre à l’espèce de se répandre rapide-ment. Ces corridors offrent un autre avantage :en autorisant les échanges de populations, ilsévitent les goulots d’étranglement et optimi-sent la richesse génétique. Les individus sontplus à même de résister à la survenue d’unepathologie. Ces diverses stratégies visent àoptimiser l’action. Bien sûr, on n’agira pas àl’identique suivant que l’espèce possède unedémographie lente ou rapide.

La stratégie précise également l’espècequ’il convient de réintroduire ?

Oui, il est nécessaire de définir précisémentl’espèce. Le bouquetin des Alpes, par exemple,n’a pas beaucoup évolué depuis la dernière gla-ciation. Par contre, en France en particulier, ily avait une autre espèce de bouquetin : celuides Pyrénées. L’archéozoologie ou l’archéologienous permet de savoir de quelle espèce ils’agissait et ne pas se tromper. Bien que l’ons’interroge encore pour le Massif Central où lesdeux espèces semblent avoir existé ou coexisté…

Est-ce que l’établissement de la stratégie estégalement l’occasion de réfléchir au pourquoi?Pourquoi cette espèce? Pourquoi agir ?

Bien sûr. Si une espèce a disparu et si lesconditions qui ont déterminé sa disparitionperdurent, il est vain de vouloir la réintroduire.En revanche, si le biotope qu’elle occupait n’apas trop évolué, c’est une bonne raison de vou-loir intervenir.Il ne faut pas seulement défendre l’espèce entant que telle mais aussi son rôle au sein del’écosystème. C’est un devoir de garder toute lachaîne. On peut aussi trouver des argumentsquasi économiques tel un intérêt touristique.Contrairement aux grands prédateurs, le bou-quetin, par exemple, est un animal facilementvisible. On peut également motiver l’existencede l’espèce par une fonction écologique : le faitqu’elle participe au maintien de l’ouvertured’un milieu. L’espèce peut également avoir unintérêt culturel, ce peut être une espèce sym-

Généralement il s’agit de plusieurs pays, voired’un sous-continent. Il n’est pas question dedire : la loutre a disparu dans telle rivière,donc on la réintroduit ici. Non. Il convient deréfléchir sur l’ensemble de l’aire qu’occupaitla loutre. Ensuite, et ensuite seulement, ons’interrogera pour savoir si, au niveau local,les conditions sont encore favorables.

Quelle démarche préalable cela suppose-t-il ?

Les connaissances à réunir font appel à l’ar-chéozoologie. Il faut être certain que c’est bien«cette» espèce qui existait sur «cette aire bio-géographique» et donc sur ce territoire donné.Et puis, pour que cette stratégie soit légitime etreconnue, il convient que tous les spécialistesde l’espèce aient pu se prononcer. Il ne faut pasqu’elle puisse être décriée ou critiquée.

Jusqu’où regarde-t-on arrière ?

Pour les mammifères, on peut considérer queleur forme actuelle existe depuis la dernièregrande glaciation. Nous pouvons donc revenirentre 5000 ou 10000 ans en arrière.Mais les choses sont plus subtiles. Ce n’est pasparce que, dans un endroit donné, on ne trou-ve ni restes de l’espèce, ni traces archéolo-giques ou gravures rupestres que l’on n’estpas dans l’aire biogéographique. Il faut alorssynthétiser les enseignements de la paléonto-logie, de l’archéologie… de la bibliographies’il y en a et puis faire œuvre de déduction.

Concrètement, cela débouche sur l’élaboration d’une carte ?

Oui, c’est un préalable. Il faut réaliser unecarte où la présence de l’espèce est légitime. Ils’agit d’une carte un peu complexe où l’on vapouvoir intégrer certains petits territoires surlesquels l’espèce demeure encore.Cela va permettre de procéder à des réintro-ductions opportunes afin de combler aumieux les hiatus entre ces divers sites.Stratégiquement, on tente de faire regagnerdu territoire à l’espèce, le plus vite possible etle plus opportunément possible.Le «Où» est également déterminé par la pré-sence potentielle de corridors de migration.Pour les bouquetins, on fera en sorte que les

«C’est le document préalable indispensable»

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>>> Mél : >>> [email protected]

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bolique. La stratégie doit répondre à ces ques-tions afin que la réintroduction ne soit pas lefait d’un hasard mais d’une volonté partagée.

La stratégie évoque-t-elle les questions de prélèvement dans une population source ?

Totalement. Tout d’abord sous l’angle éthique.Il convient de s’assurer que la population pré-levée est génétiquement identique à celle quiexistait sur le lieu de réintroduction. Et puis,être sûr qu’elle n’est pas mourante, que l’on neva pas «dépouiller Paul pour rhabiller Jacques».Ce fut le cas lors des premières réintroductionsde gypaète que l’on a voulu prélever enAfghanistan dans des populations moribondes.L’état sanitaire des animaux n’avait pas étévérifié et certaines des quelques rares bêtesqu’on a prises sont mortes de maladies. Plustard, on a choisi de réintroduire à partir desgypaètes élevés dans des zoos. Ce sont lesjeunes, nés en captivité, qui sont lâchés,aujourd’hui, aux quatre coins des Alpes.

Il existe une stratégie de réintroduction du bouquetin, c’est vrai pour d’autres espèces?

Pour la cistude, je crois… et il en existe une encours de rédaction pour la marmotte alpine : jen’en connais pas d’autres, ce qui ne signifie pasqu’il n’y en ait pas. Le ministère en charge del’Environnement a élaboré un document cadrequi se nomme « Les plans d’actions pour lesespèces » et qui aborde l’aspect stratégique.Mais, globalement, l’élaboration de stratégiespour la plupart des espèces en est encore à sesbalbutiements, en France en tout cas.La stratégie du bouquetin a pu voir le joursuite à une proposition du Parc national de laVanoise à la direction de la Nature et desPaysages alors dirigée par Marie-Odile Guth.Une lettre de commande a suivi, elle précisaitque l’ensemble des sensibilités, cynégétiques etnaturalistes, entre autres, devaient être repré-sentées afin que les futures réintroductionssoient bien acceptées. Comme quoi, on peuttoujours souffler une idée ! ■RECUEILLI PAR MOUNE POLI

CRITÈRES ÉCOLOGIQUESDU MILIEU D’ACCUEILLe domaine vital du bouquetin secaractérise par son étendue. Il fautanalyser une surface minimale de20 km de rayon autour du point delâcher. Les lignes de crêtesrocheuses constituent des voies dedéplacement qu’il faut inventorierpour définir les scénarios de coloni-sation à moyen et long terme. Parailleurs, le bouquetin a besoin detrois quartiers saisonniers de qualitéécologique différente : quartier d’hi-ver, de printemps et d’été. Ils néces-sitent des itinéraires fixes de migra-tion qui doivent être inclus dansl’espace considéré.Concernant les besoins écologiques,les caractéristiques de l’environne-ment de l’espèce peuvent être ordon-nées par sensibilité décroissante, dela façon suivante : exigences géomor-phologiques étroites (dominance dusubstrat rocheux stable morcelé ounon) à forte pente • grande superficiedu territoire • maîtrise de l’usage duterritoire par l’Homme (contrôle dubraconnage) ; il peut d’ailleurs êtrenécessaire de réglementer certainespratiques touristiques (chasse photo-graphique, parapente…) • ensoleille-ment • diversité du modelé du relief ;présence d’anfractuosités, d’abrisrocheux • quartiers hivernaux (lesaccumulations neigeuses sont défa-vorables) • maîtrise des multi-usagesavec les animaux domestiques (ovins,caprins, chiens…); maîtriser la pré-sence des chèvres, surtout en périodede rut du bouquetin.

CHOIX DES ANIMAUXRÉINTRODUITSNombre. Le nombre de trente indivi-dus fondateurs paraît nécessaire, defaçon à atteindre d’emblée le seuil dedécollage démographique. En des-sous d’une vingtaine d’animaux, lamortalité accidentelle, même trèsréduite, suffit à déprimer durable-ment l’accroissement initial.Sexe et âge. On cherchera à équili-brer le nombre de femelles et demâles, afin d’obtenir le maximum derecombinaisons génétiques. Onessaiera de respecter l’organisationhiérarchique des groupes : deux àtrois mâles âgés, quatre à six mâlesde quatre à six ans, six à huit mâlesde un à trois ans.Origine des animaux. Afin de garan-tir la diversité génétique, il serachoisi, en priorité, des animauxissus des populations naturelles dela Vanoise et du Grand-Paradis.Période et lieu du lâcher. La périodela plus adéquate est le printemps :fin avril, début mai. Il est intéres-sant de prélever des femelles ges-tantes. Outre l’apport génétiqueaugmenté et la constitution initialede structures sociales familiales,ceci évite le problème de séparationmère-petit à la capture. Les animauxseront lâchés près d’un escarpementrocheux, en veillant à ce que les barres soient visibles par les animaux.

LA TÉLÉ ANESTHÉSIE SERASUIVIE PAR UN VÉTÉRINAIRE.

Ensuite vient la chartevade-mecum des conduites à tenir

Tout projet deréintroductionde bouquetindes Alpes et

de bouquetindes Pyrénées,

sur leterritoire

français, doitfaire l’objetd’un dossier

de candidaturesoumis au

Conseilnational de laprotection de

la nature.Il doit

répondre auxexigences de

la charte.Extraits…

suite page 12 ● ● ●

>>> Réintroduction de bouquetins

© Jacques Perrier - Parc national de la Vanoise

© Christophe Gotti - Parc national de la Vanoise

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 12

SUR LES MODALITÉS DE CAPTUREQue ce soit par piégeage ou par télé anesthésie,les opérations devront être assurées par uneéquipe professionnalisée. La télé anesthésie, présentant des risques, devra être suivie par unvétérinaire.

SUR LES MODALITÉS DE TRANSPORTÉviter au maximum une situation stressante. Unmasque sur les yeux des animaux est indispen-sable pendant toute la durée des manipulations.On préconisera le transport, pattes libérées, dansun véhicule-fourgon obscurci, ou en sabots indi-viduels, de préférence la nuit. L’utilisation del’hélicoptère pour les bouquetins non endormisest à éviter. Des tranquillisants pourront êtreadministrés comme moyen complémentaire, parun vétérinaire spécialiste de la faune sauvage.Des mesures de contrôle sanitaire sur les ani-maux capturés seront effectuées.

SUR LE SUIVILa première année de suivi est capitale pour éva-luer l’utilisation de l’espace par les animaux réin-troduits et définir les lieux de surveillance ulté-rieure. Les techniques de marquage appropriées(bagues auriculaires au minimum, radios émet-teurs recommandés) permettront de réaliser cor-rectement ce suivi et constitueront un moyenefficace de dissuasion contre le braconnage.Le suivi de la démographie, sur trois ans mini-mum, permettra d’évaluer l’adaptation de la colo-nie au nouveau milieu. Les paramètres de réfé-rence sont accroissement annuel : 30% • repro-duction (cabri femelle de deux ans et plus) : 0,8 à1 par an • naissances gémellaires observées.

SENSIBILISATION DES POPULATIONSDès le début du projet, il est nécessaire d’envisa-ger des actions de sensibilisation. Elles doiventcomprendre des réunions d’information sur labiologie de l’espèce et les rapports qu’elle entre-tient avec les autres espèces sauvages ou domes-tiques. Ces réunions incluront des informationssur l’avancement du programme.Enfin, des actions de sensibilisation dans lesécoles, voire des échanges avec des enfants dessites de capture, sont recommandés. Ce sera l’oc-casion de faire circuler l’information et de rappelerla notion de protection de l’espèce. ■

En 1982, aux portes de Bâle, la Petite Camarguealsacienne et la Réserve naturelle du mêmenom voient le jour. Elles bordent la piscicultu-

re impériale de Huningue, bâtie en 1852 suite à ladécouverte, par le professeur Coste, de la techniqueartificielle de reproduction des salmonidés. En périodede reproduction, chaque saumon pêché dans le Rhindevait être expurgé des œufs et de la laitance afin dele reproduire. Cependant, malgré les efforts déployés,le sauvetage du saumon échouera : on avait pensé auxconséquences, mais pas aux causes de sa disparition !

Il n’est pas trop tard pour bien faireUn siècle plus tard, les conditions étant réunies, l’asso-ciation «Saumon Rhin» fait appel à cette pisciculturepour contribuer au retour du saumon. C’est un défi !Dans le cadre de ce programme, la pisciculture élèveprès de 500000 poissons par an. Elle devient, avec lapisciculture fédérale d’Obenheim, un acteur central.L’expérience est une réussite, le poisson remonte etse retrouve bloqué. L’enthousiasme naît et la plusgrande passe à poissons d’Europe est édifiée àIffezheim (300 mètres de longueur, 37 bassins, 11mètres de dénivelé).Devant le succès rencontré par Iffezheim, la secondepasse est en construction à Gambsheim. Mais, pouraccompagner et expliquer ces démarche,s il est indis-

Le dossierRéintroductions

Deux expos pour une>>> Le retour du saumon dans le

Pour sauver le saumon, il faut équiper lesbarrages du Rhin de passes à poissons. Pour cela,

il faut convaincre. Éduquer, informer, faire adhérer…telle fut la stratégie menée par les acteurs du Rhin dont

l’association «Petite Camargue alsacienne », qui a construit deuxexpositions accueillant le public.

● ● ●

L’XPOSITION «MÉMOIREDU RHIN » ÉVOQUE LESLIENS IMMÉMORIAUXENTRE LE FLEUVE ET LESHOMMES QUI ONT VÉCUPRÈS DE LUI, ET TOUTELA DIVERSITÉDU PATRIMOINE NATURELQUI LUI EST ASSOCIÉ.

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Extrait de Saumon Rhin infos - décembre 2000

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PASSE D’IFFEZHEIM.DEPUIS SA MISE EN SERVICEEN JUIN 2000, 380SAUMONS ET 1080 TRUITESDE MER L’ONT FRANCHIE. LE PLUS GRAND SAUMONMESURAIT PLUS D’UN MÈTRE.LA PASSE A VU TRANSITERPLUS DE 84000 POISSONS,SOIT 35 ESPÈCESDIFFÉRENTES…

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pensable d’associer et d’informer étroitement lesacteurs du fleuve et les populations locales. La dyna-mique collective est alors lancée.

La sensibilisation du publicDès 1990, un plan d’interprétation estétabli sur le site de la pisciculture de laPetite Camargue alsacienne en partena-riat avec l’Aten. Aujourd’hui, deux expo-sitions permanentes 1 expliquent lesconséquences de l’aménagement dufleuve sur les milieux ainsi que l’histoirede la pisciculture impériale.• «Mémoire du Rhin» évoque les liensimmémoriaux entre le fleuve et lesHommes qui ont vécu près de lui, ettoute la diversité du patrimoine naturelqui lui est associé.

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e appropriation collectivee Rhin

• «Mémoire de Saumon 2 » met en scène l’histoire dusaumon dans le Rhin et le rôle que l’espèce joue dansla fonctionnalité des écosystèmes.Les deux expositions sont conçues de manière trèsdifférente quant au style de la mise en espace : lumi-neuse, suggestive, bon enfant pour la première (ten-tures flottantes, volets de bois à manipuler pour obte-nir des réponses) ; plus dense, éclairages et couleursconcentrés par l’absence de lumière naturelle, circu-lations inattendues et mouvement effectif de l’eaudans l’espace pour la seconde, plus volontairementdidactique.La population découvre également le coût desmesures de réparation et la nécessité d’appliquer leprincipe de précaution. Une glace sans tain donneune vue sur le bâtiment de production des alevins etle travail des pisciculteurs. L’exposition fait aussi lepoint sur le retour des migrateurs amphihalins.Les difficultés ne sont pas occultées et «Mémoire desaumon » pointe les défis qui restent à relever (lareproduction naturelle dans des frayères accessibles,la réalimentation en charge solide du fleuve, les pré-lèvements en mer sur les zones de grossissement oulors des remontées…).Parallèlement, un programme de sensibilisation despublics est effectué à la passe à poissons franco-alle-mande d’Iffezheim par «Saumon Rhin». Les visiteursviennent découvrir l’ouvrage et constater son fonc-tionnement. Devant le succès rencontré, la deuxièmepasse, en cours d’aménagement à Gambsheim, inté-grera un volet pédagogique important.L’appropriation de l’opération par les populationslocales à l’échelle de la région est garante de sapérennité : en faisant la preuve que le retour des pois-sons migrateurs est possible, en investissant massive-

ment et de concert, les acteurs nationaux,européens et locaux ont fait naître d’autresinitiatives (Life Rhin vivant…). Aujourd’huila curiosité et le plaisir ont ramené les visiteurs sur le fleuve. ■PHILIPPE KNIBIELYRÉSERVE NATURELLE DE LA PETITE CAMARGUE ALSACIENNE

Historiquement,le Rhin comme la plupartdes fleuves français,

accueillait d’importantespopulations de saumonsatlantiques. Les aménagementsdu fleuve, la dégradation de laqualité de l’eau, la destruction desfrayères et la surpêche lui ont étéfatals. L’espèce s’éteint au milieudu 20e siècle dans le Rhinsupérieur. Avec lui, la plupart desmigrateurs amphihalinsdisparaissent (en même tempsque les pêcheurs professionnels,d’ailleurs).Il aura fallu la catastrophe deSandoz, à Bâle en 1986, pourqu’un choc psychologique et desplans d’actions dotés de réelsmoyens soient mis en œuvre afinde reconquérir ce qui pouvait l’être.Sous l’égide de la Commissioninternationale de protection duRhin (CIPR), plusieurs programmessont élaborés dont un « Plansaumon 2000 » au début desannées 90. Il vise le retour dupoisson roi dans le fleuve.Sous la coordination del’association «Saumon Rhin 3 », unestratégie est alors mise en œuvre.Trois défis durent être relevés. Lepremier : reconquérir la qualité deseaux. D’importantsinvestissements sont concédéspar les entreprises du Couloir de lachimie. À Bâle, notamment, pourredorer l’image des industriels,des moyens sont injectés pourtraiter les eaux et minimiser lerisque de pollutions accidentelles.Des dispositifs de surveillance dela qualité de l’eau et d’alerte sontfinancés par les collectivités. Peuà peu, la qualité de l’eau redevientacceptable pour les salmonidés.Le deuxième défi consiste àprouver, à partir d’une souche desaumon, que le poisson estsusceptible de vivre dans le Rhin.Il faut également prouver que cettepopulation bute sur des obstaclesinfranchissables empêchant lamontaison. Les usineshydroélectriques construites après1936 n’ont pas été équipées dedispositifs de franchissement :onze barrages infranchissablesjalonnent le Rhin entre Iffezheim etKembs !Le troisième défi vise à équiperces barrages de passes àpoissons, mais il faut au préalableprouver que le saumon remonte etconvaincre les partenaires decette réalité qui nécessite desannées d’efforts pour obtenir unrésultat tangible. ■

UNE PISCICULTURE EN ACTIVITÉ ESTJUMELÉE À LA DEUXIÈME EXPOSITION SANSQU’ELLE DEVIENNE JAMAIS UN MUSÉE CARLES VISITEURS N’EN TROUBLENT PAS LAVOCATION : ILS RESTENT « SCOTCHÉS »DERRIÈRE UNE VITRE SANS TAIN.L’ÉVOLUTION DE « VRAIS » POISSONS ÀDIFFÉRENTS ÂGES DE LEUR VIE, DANS LESBASSINS, ET LA MANIPULATION PAR LESPROFESSIONNELS ONT DÛ FAIRE NAÎTRE PLUSD’UNE VOCATION !

>>> Mél : [email protected]

L’EXPOSITION «MÉMOIRE DU SAUMON » MET EN SCÈNE L’HISTOIRE DU SAUMONDANS LE RHIN ET LE RÔLE QUE L’ESPÈCE JOUEDANS LA FONCTIONNALITÉ DES ÉCOSYSTÈMES.

3. Elle regroupe : l’État, lescollectivités locales, le Conseilsupérieur de la pêche, lesfédérations de pêche, l’Agence del’eau, EDF, les associationsnaturalistes.

1. Réalisées par les scénographes Guy Brun et Frey Gobyn.2. Financée par les collectivités locales, la Fondation EDF, en partenariat avecRéserves naturelles de France.

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endormi, des gestes et des sensations voisins de ceuxqu’ils avaient eus et aimés, avant d’entrer au Parc.Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les espèces (ré)introduites sont, pour l’essentiel, de grands mammi-fères et de grands oiseaux, alors qu’ils ne sont sûre-ment ni les seuls à avoir disparu, ni les plus faciles à(ré) installer. Simplement, leur observation et leurcontact procurent généralement davantage de plai-sir. Des insectes et des reptiles ont certes été réintro-duits, mais pas n’importe lesquels : un beau papillon,l’apollon, réintroduit dans les Vosges ; une tortue, latortue cistude, réintroduite au sud du lac du Bourget(Savoie). Le (ré) introducteur noue une relation par-ticulière à l’animal, qui n’est ni celle de l’éleveur, nicelle du chasseur, ni celle du protecteur, mais qui,par certains aspects, ressemble à chacune d’elles : ilnomme souvent l’animal, comme l’éleveur, il le cap-ture, comme le chasseur, il protège son existence,comme le protecteur.

L’existence d’un projetLes animaux (ré) introduits manifestent l’existenced’un projet où des collaborations et des «complicités»sont nécessaires. En Haute-Savoie, par exemple, deschasseurs se sont fortement impliqués dans la réin-troduction du castor, du gypaète et du bouquetin.Plusieurs opérations ont ainsi permis des rapproche-ments entre des individus appartenant à des groupesréputés s’opposer.Mais ces projets soulèvent aussi des interrogations etpeuvent créer tensions et conflits. Il se trouve desgens pour remarquer que, l’erreur étant humaine,les animaux peuvent être lâchés dans un site, à unmoment ou avec des partenaires qui ne leur convien-nent pas vraiment. Certes, les problèmes pratiquess’aplanissent généralement à mesure que les (ré)introducteurs apprennent à connaître l’animal. Restela question éthique, que soulèvent certains natura-listes et protecteurs : peut-on intervenir dans les pro-cessus naturels ?La question des effets des (ré) introductions est plusépineuse encore. Car en (ré) introduisant des ani-maux, on (ré) introduit les attributs ou les qualitésqui leur sont associés. Or, les (ré) introducteurs nesont pas tout à fait d’accord sur les qualités de l’ani-mal. Ainsi, pour des naturalistes, gestionnaires etprotecteurs de la nature, un lâcher de bouquetinsnaturalise la montagne. Les chasseurs, eux, atten-dent plutôt un ensauvagement que les cerfs, les che-vreuils ou les mouflons, espèrent-ils, accompliront.Pour leur part, les éleveurs remarquent que « les

On n’intervient pas dans les processus naturels sansmodifier, aussi, les processus sociaux.

ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 14Le dossierRéintroductions

Les récits de (ré) introductions sont générale-ment plein d’épisodes imprévus, heureux oumalheureux, parfois franchement rocambo-

lesques. Cependant, ce ne sont pas tant les difficultésrencontrées ni les échecs essuyés qui dominent lesrécits, que l’enthousiasme et l’exaltation qui mar-quent une naissance. Dans toute (ré) introduction,quelque chose qui n’existait pas se met à exister ; c’estun commencement, une aventure ; au sens étymolo-gique de ce qui est à venir. Le lâcher est un momentinaugural, un point de départ.De manière générale, les (ré) introducteurs sont àl’origine d’une histoire radicalement nouvelle dontils peuvent revendiquer la paternité. Dans ces condi-tions, il n’est pas surprenant que les récits ou les pro-jets de (ré) introductions prennent la forme dumythe, comme l’a remarqué Sophie Bobbé à proposde l’ours 1. Le mythe désigne une rupture temporelle,la distinction d’un avant et d’un après, nettementséparés par un événement clairement identifié,auquel se rattache tout ce qui en découle.

Une relation particulièreLes animaux (ré) introduits ont tous été étroitementen contact avec des Hommes. Ce contact est plus oumoins prolongé selon les espèces : il est bref en cas decapture dans le milieu naturel, mais il peut durerplusieurs semaines, voire plusieurs mois, si la réin-troduction comporte une phase d’élevage, éventuelle-ment suivie d’une phase d’acclimatation au milieu dulâcher. En Vanoise, les membres de la première géné-ration d’agents les plus impliqués dans les capturesde bouquetins étaient tous d’anciens chasseurs dechamois. Sans doute retrouvaient-ils, dans le tir aufusil téléanesthésique et dans le transport de l’animal

Une réintroduction estun commencement qui bouleverse

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CISTUDE.

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Biblio1. L’ours et le loup -Sophie Bobbé - 2002.Essai d’anthropologiesymbolique - MSH, INRA.

2. «Histoire desréintroductions en France »M. Bigan et G. Simon -2000 - Le Courrier de lanature - 182 (spécialréintroductions).

Vers un nouvel animalsauvage : le sauvagenaturalisé vivant ? - A. Micoud - 1993. Natures-sciences-sociétés, 1, 3,202-210.

«Du bestiaire au paysage.(Ré) introduire desespèces oubliées » -A. Vourc’h et V. Pelosse -1993 - Études rurales.

CAPTURE DE BOUQUETIN PRALOGNAN (73)SOUS LE ROC DE LA PÊCHE, AVRIL 1991.

CRÉATION D'UNE NOUVELLELOCALITÉ DE BUGLOSSE CRÉPU.

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Trente-cinq ans aprèsle lynx fait son bilan

Le lynx est réapparu en France audébut des années 70. Trente ansplus tard, le bilan laisse apparaître

que les populations croissent et qu’ellecolonisent de plus en plus d’espace. Cebilan a pu être possible à la suite d’unsuivi standardisé mis en place depuis1990. 850 bénévoles appartenant auréseau Lynx sont régulièrement sollici-tés pour consigner leurs observations.Aujourd’hui, on peut noter un noyauprincipal d’animaux, très actifs sur leplan démographique. Située sur le mas-sif jurassien, cette population s’estconstituée à partir d’une colonisationnaturelle par les descendants de lynx duJura suisse. Ceux-ci étant eux-mêmesissus de réintroductions effectuées dèsle début des années 70.Historiquement parlant, le deuxièmenoyau est vosgien. Il a été constitué àpartir de quelques animaux ré-intro-duits dans les années 80. Ce noyau nesemble pas encore vraiment connecté

Alpes s’ensauvagent à un rythme accéléré» et la pré-sence d’espèces (ré) introduites est la preuve patentequ’il y a une volonté, partagée par beaucoup, d’allerdans ce sens. Cependant, l’histoire des réintroduc-tions montre plutôt une série d’initiatives disjointes 2

non orchestrées et sans vision d’ensemble. Les (ré)introductions se sont produites au gré des opportuni-tés et des passions. Alors, pourquoi les milieux pasto-raux sont-ils convaincus de l’existence d’un projetd’ensauvagement des Alpes et pourquoi lui sont-ilstellement hostiles ? C’est qu’il existe une autre entre-prise, vieille de plusieurs siècles celle-là, de domesti-cation de la montagne. Jusqu’à très récemment, lesAlpes, leurs habitants et les troupeaux domestiquesformaient un tout indissociable. Les sociétés alpinesont été qualifiées de « sociétés de la vache» (Poche,1999)… Elles ont condamné les animaux sauvages àdemeurer rares et farouches, notamment par unexercice de la chasse qui ne s’encombrait pas de ges-tion des populations animales sauvages (DallaBernadina, 1989). Or, les (ré) introducteurs d’espècessauvages font, très précisément, le contraire desmontagnards, qui ont domestiqué la montagne. Leuraction est donc perçue comme une « dé »- ou une«anti-domestication».Dans les Alpes, le fossé est actuellement profondentre les (ré) introducteurs et les tenants d’une mon-tagne domestiquée. Voilà qui confirme, si besoinétait, que l’on n’intervient pas dans les processusnaturels sans modifier, aussi, les processus sociaux…et réciproquement. ■À PARTIR DE L’INTERVENTION D’ISABELLE MAUZ AU COLLOQUE

«GESTIONS DURABLES DES ESPÈCES ANIMALES - APPROCHES JURIDIQUES,BIOLOGIQUES ET SOCIOLOGIQUES ». MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE

ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE DU 15 AU 17 NOVEMBRE 2004.

>>> Mél : [email protected] suite page 16 ● ● ●

sur le plan démographique (immigra-tion/émigration) avec celui du massifjurassien.Un troisième noyau est encore en voiede constitution. Il a été détecté sur lemassif alpin. D’ailleurs, dans ce derniercas, la terminologie même de «noyau»est peut-être abusive. Seuls des indices« éclatés » dans l’espace et au cours dutemps ont été récoltés. Sauf sur la partienord des Alpes où le lynx a été réguliè-rement observé et des cas de reproduc-tion documentés, on ne peut parlerd’une vraie récurrence de l’espèce. Parcontre, cette population est très proba-blement en connexion démographiqueavec le noyau jurassien.Si le suivi ainsi mis en place n’a pasd’objectif stratégique affiché (a contra-rio par exemple de l’ours pour lequel leministère en charge de l’environnementa annoncé des objectifs chiffrés), cer-taines études ont eu des applications

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réseaulynxMél : [email protected]

JEUNES LYNX

DE MOINS

DE TROIS MOIS

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Jura

Alpes

Vosges

ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 16

● ● ● suite de la page 15

très pratiques. Ainsi, quand sa présence a posédes problèmes au cheptel domestique (prélève-ment de brebis). Le suivi des lynx par colliersémetteurs a permis une évaluation objectivedu problème et des facteurs déterministes.Dans le massif jurassien, on a pu constater queles attaques étaient concentrées dans l’espace.Certains animaux, profitant du fait que desexploitations étaient enclavées ou proches desmassifs forestiers, s’étaient spécialisés dans leprélèvement de moutons comme ressourcealimentaire. Par ailleurs, le suivi de l’espèce apermis de conclure que la dynamique de lapopulation fonctionnait et qu’il était possible desupprimer quelques individus sans que laconservation de l’espèce soit remise en cause. Lagestion sociale du problème a ainsi été possible.

Les méthodes mises en œuvre

Le suivi du statut du lynx se fait au travers dusuivi de son aire de distribution et de son évo-lution au cours du temps. Tous les indices deprésence (poils, empreintes, proies sauvages etdomestiques, observations visuelles, etc.) col-lectés par les correspondants du réseau sontvalidés selon une méthode standardisée établiepar l’Office national de la chasse et de la faunesauvage.

Superficies colonisées par l’espèce

Présence observée du Lynx bilan 1984 - 2001

Rouge : Présence régulière. Bleu : Présence irrégulière.Jaune : Présence récente

uniquement.

La dernière période triennale de collecte de donnéess’est achevée fin 2004 (*) (données non incluses).

Ceci explique que l’aire totale colonisée fin 2003 est à peine égale à la valeur précédente.

À cette date, l’aire de présence du lynx était déjà dumême ordre de grandeur (Vosges, Jura), voire plus

importante, qu’en 1999-2001. La colonisation par le lynxde nouvelles zones a été régulière, à part en 1996-1998

sur le massif vosgien, zone où, depuis, la superficieoccupée augmente à nouveau.

Cette façon de procéder a été retenue suite àdes comparaisons effectuées entre des don-nées recueillies, sur le terrain, par le réseauet d’autres données obtenues par radio pista-ge de lynx dans le Jura français. Chaquedonnée « réseau » est consignée sur desfiches de terrain et décrite selon plusieurscritères (par exemple, pour une empreinte,on mesure la longueur de la voie, son ali-gnement, les dimensions et la forme desempreintes…).Selon le degré de convergence entre ces cri-tères et les caractéristiques théoriques dessignes de présence du lynx, on retient ou nonl’information correspondante.Chaque information est ensuite cartogra-phiée sur une maille de 9 x 9 km. Ce degré deprécision a été sélectionné car l’image de ladistribution spatiale des lynx ainsi dessinéecoïncidait bien avec celle déduite des locali-sations télémétriques des animaux suivis parradio pistage.Ce faisant, on a effectué une sorte de «vali-dation» de la méthode de suivi par le réseauLynx en la comparant avec une méthode deréférence : la télémétrie.Sur la cartographie, la récurrence des indivi-dus est évaluée par périodes triennales. Ellepermet de caractériser le statut de l’espèceen fonction des régions. On ne peut estimerqu’un ordre de grandeur des effectifs : auminimum environ 150 individus, dont 60%sur le massif jurassien, 20% dans le massifalpin, et autant dans les Vosges. L’aire deprésence détectée est partout en augmenta-tion (cf. carte). ■ÉRIC MARBOUTINOFFICE NATIONAL DE LA CHASSE ET DE LA FAUNE SAUVAGE

>>> Mél : [email protected]

PRIS AU PIÈGE PHOTOGRAPHIQUE(UN APPAREIL PHOTO PILOTÉ PAR UN RADARQUI DÉCLENCHE APRÈS DÉTECTION DESMOUVEMENTS OU D’INFRAROUGES), CE LYNX REVENAIT CONSOMMER SA PROIE,ICI UN CHEVREUIL.

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Il ne restait plus que six ou sept ours dans lenoyau occidental du Béarn. Huit ans après lespremières réintroductions dans les Pyrénées cen-

trales, les ours ont recolonisé une partie importantedu massif et nous avons noté sept portées de un àtrois oursons depuis 1997. Dans l’état actuel de nosconnaissances, on estime que la population com-prend entre quatorze et dix-huit individus, répartisen trois noyaux (cf. carte).Actuellement, nous pouvons considérer que les oursde souche pyrénéenne ont disparu. Après la mortnaturelle de l’ours Papillon âgé de 29 ans enjuillet 2004 et la mort de la femelle Cannelle le1er novembre 2004, abattue par un chasseur, il nereste plus que deux mâles de souche pyrénéenne.

La situation fin 2004Dans le noyau occidental du Béarn : quatre mâles(trois adultes, Néré, Camille, Aspe Ouest, et l’oursonde Cannelle).Dans le noyau central, le suivi de terrain a conduit àestimer la population à neuf à douze individus, dontdeux femelles différentes accompagnées d’oursons :une femelle accompagnée d’au moins un oursonrepérée dans le Val d’Aran au printemps 2004 et unefemelle avec au moins un ourson mâle de l’année(malheureusement retrouvé mort début juillet 2004)dans le massif du Mont-Vallier en Ariège. L’oursPyros a été clairement identifié en Espagne dans leVal d’Aran en juin 2004. Enfin des indices d’oursont été relevés au sud du Val d’Aran, dans le PallarsSubera et, pour la première fois de façon certaine,en Andorre.Dans le noyau oriental, de nombreux indices d’oursrelevés en 2004 à la limite entre la Haute-Ariège,l’Aude et les Pyrénées Orientales sont attribués àdeux mâles adultes, Boutxy et Kouki. Néanmoins,au cours de l’année 2004, nous n’avons pas relevéde localisations simultanées permettant de confir-mer la présence effective de ces deux individus surce secteur.Malgré les incertitudes et la mort de trois ours en2004, on observe que la population d’ours sur l’en-

semble des Pyrénées a doublé depuis 1996, année despremières réintroductions. D’un point de vue biolo-gique, cette opération de renforcement est donc unsuccès. Les ours ont montré leur faculté d’adapta-tion et nous avons maintenant la preuve que lesPyrénées sont encore très favorables aux ours. Enrevanche, d’un point de vue humain, le résultat estplus nuancé, et le monde de l’élevage reste le plussouvent opposé à la présence de ce prédateur.Néanmoins, plusieurs indicateurs montrent que,globalement, la population locale est attachée à laconservation de cette espèce.Le 13 janvier dernier, le ministre de l’Écologie et duDéveloppement durable, Serge Lepeltier, a annoncéla volonté du gouvernement de doubler la popula-tion d’ours d’ici 2008 et de commencer dès 2005 parla réintroduction de cinq femelles (voir p. 6). Leprintemps 2005 sera consacré à une importanteconcertation qui doit permettre de définir les condi-tions de cette nouvelle opération de réintroduction.À terme, l’objectif est de constituer une populationviable dans le massif pyrénéen.■JÉRÔME MORSCHEIDTÉQUIPE TECHNIQUE OURS – FDC 09

L’ours constituel’exemple parfait d’une

espèce à la foispatrimoine naturel et

culturel d’un territoire.La restauration d’une

population viable d’oursdans les Pyrénées esten cours, la mort deCannelle, la dernièrefemelle de souche

pyrénéenne ennovembre dernier a

accéléré les décisionspolitiques, mais le

processus derestauration avaitdébuté en 1996et 1997 avec la

réintroduction à titreexpérimental de troisours adultes (deux

femelles et un mâle)dans les Pyrénées

centrales.

Répartition par commune des indices d’ours en 2004

FranceEspagne - Andorre

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L’ours fait ses comptes>>> En Ariège

PLUSIEURS INDICATEURSMONTRENT QUE LAPOPULATION DESPYRÉNÉES EST ATTACHÉEÀ LA CONSERVATION DECETTE ESPÈCE. CI-CONTRELÂCHER DE L’OURS PYROS.

Le dossierRéintroductions

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>>> Equipe technique ours - ONCFS Mél : [email protected]

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 18Le dossierRéintroductions

Réintroduire la cistudequelle faisabilité?

Tout d’abord, il fallu établir l’indigénat. Entendezpar là, faire la preuve que la cistude était bienprésente en Savoie lors des siècles passés : mon-

trer, démontrer qu’elle avait bien disparu.Cette toute première étape ne fut pas aisée. En effet,en Savoie, il est peu de littérature qui, entre le 17e et19e siècle, se réfère à l’étude des amphibiens. Quantaux données archéologiques, si elles sont nom-breuses, elles ne sauraient faire référence. Ellesremontent en effet au Moyen Âge. Or, entre-temps, le«petit âge glaciaire» 2 est intervenu, il a pu empêcherle retour d’espèces peu mobiles.C’est finalement en s’appuyant sur les quelques don-nées naturalistes recueillies et sur la logique d’unhydrosystème continu Rhône/lac du Bourget quel’indigénat de la cistude d’Europe en Savoie a été éta-bli. Il aura d’ailleurs fallu une très forte pression deterrain pour démontrer la disparition de l’espèce. Lasituation fut ainsi plus simple à appréhender au planéthique et conceptuel. En effet, si la cistude avait étéencore présente, on se trouverait en configuration de«renforcement de population», un cas de figure pluscomplexe.

Neutraliser les causes de disparition

La deuxième étape a alors consisté à identifier lescauses de disparition pour les neutraliser.Chronologiquement, la première cause de disparitionest liée à la prédation directe par l’Homme. Elle aperduré bien après les temps préhistoriques. Chezune espèce au taux d’éclosion (5 %) et à la surviejuvénile très faibles (corollaires d’une grandelongévité : plus de cinquante ans en nature), le prélè-vement sélectif d’adultes ne peut être compensé. Ilprovoque rapidement l’effondrement de la population.Aujourd’hui, la mortalité à travers la pêche (noyadedans des nasses appâtées, ingestion d’hameçons)voire le prélèvement direct, reste élevée. Ces risquesont été jugés minimes dans une zone protégée, inter-dite à la pêche et à la navigation. Restait alors àcontrer deux «ennemis» de la cistude : la circulationroutière, et la perte de sites de ponte par embrous-saillement ou urbanisation.

La qualité du milieuMais il fallait encore vérifier la qualité du milieu pré-senti. Au sud du lac du Bourget, le caractère contraintet les fortes pressions humaines (zones navigables etde pêche, routes nationales) exigeaient de minimiserles risques de dispersion hors-site, et donc de satisfaireintra-muros à tous les besoins saisonniers (figure 1).L’examen d’une carte de végétation a permis de validerla qualité alimentaire du site. Si les milieux aqua-tiques sont très présents, la mise en place d’une dunecentrale s’est avérée nécessaire afin d’optimiser à lafois la sécurité des pondeuses, et l’incubation desœufs. Par ailleurs, la question de la qualité clima-tique doit être posée : nombre et répartition des joursde gel, ensoleillement, et températures sont simi-laires à celles de Brenne (figure 2).

Connectivité du milieuUne véritable réintroduction vise une implantationdurable et autonome : pas question de saturer unpetit paradis isolé, qui ne puisse ensuite, spontané-ment, coloniser d’autres sites connexes et favorables.Une cartographie fine des habitats, tout autour du lacdu Bourget, a permis d’établir le jalonnement desnoyaux d’habitats de la future population, dont le suddu lac n’est que le premier noyau fondateur. À ce pro-pos, la figure 3 quantifie les biotopes disponibles(toujours en surface et linéaire de berge), et leur éloi-gnement entre eux et avec le sud du lac; la berge du lacétant considérée comme un corridor, par excellence,entre ces sites.

Approvisionnement en animauxL’approvisionnement s’est appuyé sur une analysegénétique de la dernière population rhôdanienne. Ellea révélé que cette cistude appartenait à la sous-espèceEmys orbicularis orbicularis, soit la même qu’enBrenne (où l’espèce est assez abondante). Une autori-sation de capture de trente-six animaux adultes, moi-tié mâles moitié femelles, a alors été obtenue. Biensûr, une telle filière n’est guère durable, aussi unefilière élevage a-t-elle été montée en parallèle, pour lesphases ultérieures du projet. À moyen terme, ces deuxapports devraient être complémentaires, ils permet-tront d’équilibrer, au plus tôt, la pyramide des âges.

Réintroduire la cistude(Emys orbicularis) en

Savoie aura pris 10 ans. La première

année a été consacréeà l’élaboration du

dossier de validationpar le ministère del’Environnement.

En effet, le Conseilnational de la

protection de la nature(CNPN) veille au

respect des critères de validation énoncés

lors du colloque deSaint-Jean du Gard 1.

La démarche fut à la fois scientifique,

technique etdéontologique…

1. J. Lecomte, M. Bigan et V. Barre (ministère del’Environnement), 1990 -« Réintroductions et renforcementsde populations animales en France». Compte rendu du colloquede Saint-Jean du Gard, 6-8 décembre 1988 : 1-350.

2. Durant trois siècles, de 1550 à 1830.

>>> Réintroduction en Savoie

CISTUDE

CISTUDE MUNIE D'UN EMETTEUR.

© CPNS

© Denis Palanque

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>>> Mél : [email protected]

FIGURE 1 - Carte des habitats - sud du lac du Bourget (2001)

FIGURE 2 - Évolution des températuresSud du lac du Bourget et Brenne

NOMBRE SURFACELINÉAIREDE BERGE

Mares, étang 14 13,3 ha 9400 mCanaux 3 3,4 ha 6000 mRoselières littoralesabritées- nupharaies 1 11,9 ha 2400 m

Total biotopes aquatiquesfavorables 18 28,6 ha 17800 m

…Et la tortue à tempes rouges ?La concurrence interspécifique n’a été étudiée quelors des bains de soleil. Cependant, hors cette «par-tie émergée de l’iceberg », l’essentiel de la vie de lacistude, notamment alimentaire, se passe sous l’eau.Une concurrence active reste donc fort possible, ellese traduit en stress.On sait par ailleurs que la « tortue de Floride »devance la cistude sur tous les traits de vie : poids,nombre et poids des jeunes, longueur des cycles sai-sonniers, polyvalence alimentaire… Dès lors, le plusélémentaire principe de précaution exige de rabattreà un seuil aussi bas que possible le stock d’exogènesdans le site, ainsi qu’une communication et unerécupération.

AccompagnementLa faisabilité ou «acceptabilité sociale» doit être éta-blie et améliorée. Dans le cas présent, une fois passéeune certaine surprise amusée du public en apprenantqu’une tortue appartenait à la faune savoyarde (et unefois balayée la suspicion de piscivorie ressentie parcertains pêcheurs), le capital sympathie de la tortue apu jouer en faveur du projet.Mais le projet était-il pertinent? Un suivi scientifiqueindividuel intensif par radiopistage a été mis en place.Il visait trois objectifs :- objectif de sécurité, pour des animaux sauvages pré-cieux et imprévisibles, de manière à pouvoir les récu-pérer en cas de dispersion et d’exposition à risques ;- objectif scientifique, pour une première sur cetteespèce, afin de recueillir les enseignements d’ordreéco-éthologiques pour les projets suivants ;- objectifs de gestion, pour révéler d’éventuelles amé-liorations quant aux orientations ou aux modalitésd’intervention sur le milieu.C’est ce suivi qui, par la suite, a confirmé la pertinencede l’étude de faisabilité. ■

ANDRÉ MIQUETCONSERVATOIRE DES ESPACES NATURELS DE LA SAVOIE

FIGURE 3 - Disponibilité du sud du lac du Bourget en milieux aquatiques favorables à la cistude

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HABITAT PROPICE À LA CISTUDE.

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 20

C’est une drôle d’idée de concevoir un lieupour observer la nature !

Pourquoi ? Quoi qu’il en soit, les gens ne nousont pas attendus pour venir observer les vau-tours. Après leur réintroduction, l’adhésion dupublic a été immédiate. De nombreuses per-sonnes venaient dans les Grands Causses 1. Nousn’avons fait qu’accompagner ce mouvement etleur permettre de mieux observer, sans déranger.Et de rencontrer des ornithologues aussi.Nous ne sommes pas dans une approche scienti-fique, ou savante, nous sommes sur le terrain dela rencontre, de l’écoute, de l’art… Du cœur à

cœur avec la nature.

Concrètement, comment cela se passe-t-il ?

Il y a bien sûr une terrasse d’observation,avec des longues-vues mais également unesalle de retransmission d’images. Trois

caméras sont installées sur des reposoirsque les vautours fréquentent. Ces caméras

sont commandées depuis le belvédère. Les visi-teurs peuvent ainsi observer les vautours endirect, soit dans leur aire de nidification, soit surune place de nourrissage. De temps en temps,nous déposons des animaux morts, principale-ment des brebis. Les gens peuvent alors assisterà la curée. Et puis, il y a un espace muséogra-phique, un ornithologue apporte des explicationset répond aux questions.

Cela peut ressembler à la consommation de loisirs, cette manière d’observer ?

Jamais, rarement… En fait c’est tout le contraire.Nous avons 32000 entrées par an. Je peux vrai-ment témoigner que cette rencontre déclenchedes «choses». Je suis toujours frappé de ce quedisent les gens après cette expérience. Leurs pre-

miers mots sont toujours les mêmes : « C’estbeau. » Nous leur avons permis de voir les

choses sous un autre angle. C’est d’autant

VAUTOURFAUVE

ADULTE.

En Lozère, depuis une terrasse d’observation, tout un chacun peut venir contempler les vautoursfauves ou les vautours moines qui nichent dans la région depuis leur réintroduction. De temps entemps, on peut même apercevoir deux couples de vautour percnoptère, le seul vautour migrateur,

plus remarquable que les vautours sont associésà la mort, à la saleté. Or le seul fait de prendre letemps, le temps de regarder, le temps d’admirer,de se mettre en symbiose avec l’environnement,ouvre les esprits et affûte l’intelligence sensible.C’est vrai pour tous : les enfants, les adultesmais également les personnes âgées que nouspensions être un public plus consommateur.Le Belvédère des vautours, c’est un temps de rencontre.

Vous iriez jusqu’à dire que, depuis les premièresréintroductions, quelque chose a changé dansl’inconscient collectif ?

En Lozère, c’est sûr, les vautours ont été démy-thifiés. Non seulement ils n’ont plus d’imagenégative, mais ils font aujourd’hui partie denotre patrimoine naturel. Leur silhouette planedésormais sur tous les dépliants touristiques. LaLozère, c’est avant tout la nature, or le vautourest devenu le symbole de cette nature libre.C’est très intéressant de voir comment, en quinzeans, on a renversé la perception d’une espèce,comment s’est faite l’appropriation. Ici, les gensobservent le vol des vautours pour avoir desindications sur le sens du vent et sur la météo.On partait pourtant de loin : les derniers vau-tours fauves ont été observés en 1940. Quant-àla disparition des vautours moines, elle remonteà la fin du 19e. Le travail de vulgarisation et desensibilisation que nous avons mené, auBelvédère des vautours, a eu un rôle actif dansce processus.

Vous traduisez bien comment les genss’émerveillent pour cette nature qu’ilsviennent observer, mais il y en a bien quirestent sceptiques et qui vous interrogent : à quoi ça sert, toute cette énergie pourintroduire quelques couples d’oiseaux?

Effectivement, on m’interroge sur l’utilité depréserver les vautours. Je réponds que c’estnotre rôle à nous, êtres humains, de sauvegar-der ce qu’il y a sur Terre. Et nous, d’ailleurs, àquoi sommes-nous utiles ? Et puis, qui sait ?Actuellement par exemple, la recherche sur leSida étudie les pouvoirs gastriques des oiseauxcharognards. Nous avons encore beaucoup àdécouvrir. ■

>>> Belvédère des vautours (Lozère)

L’élégante séduction du charognard

>>> Mél : [email protected]

revenu spontanément. Il avait disparu, lui, en 1955. La réintroduction de cesvautours est un succès unique au monde. Le vautour fauve a été lâché en 1981,le vautour moine en 1992, le Belvédère à ouvert quelques années plus tard en

1998 pour répondre a une demande du public.

Constant BagnoliniORNITHOLOGUE, RESPONSABLE ZOOTECHNIQUE DU BELVÉDÈRE

DES VAUTOURS

● Rencontre avec

1. Les réintroductions devautours fauves (1981),puis de vautours moines,(1992) ont suscité unafflux touristique inattendu.Les élus s’en sont saisis,appuyés par la Ligue deprotection des oiseaux etle Parc national desCévennes. Le Belvédèredes vautours, c’est lacréation de quatre emploispérennes.

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Le buglosse crépu est une espècerare, endémique cyrno1-sarde, enforte régression, poussant sur

les plages et cordons dunaires.En 1992 et 1994, dans le cadre deprogrammes européens deconservation de la flore, leConservatoire botanique nationalméditerranéen de Porquerolles atenté avec ses partenaires locauxdes renforcements de populationdans des sous-secteurs où la planten’avait jamais été observée. Desplantules issues de graines récoltéessur le site ont été mises en place àl’intérieur de ganivelles. Au cours deces années, un suivi minutieux a étéassuré par l’Agence de gestion desespaces naturels de Corse. Il montrequ’un pourcentage élevé de piedsmères a fleuri pendant un ou deuxans et fructifié avant de mourir. Denombreuses germinations ont étéobservées, avec de forts taux demortalité en saison sèche. Même siles pieds implantés ont tous disparu,cette opération a donc contribué à unaccroissement de la banque desemences du sol. Suite à la mortdes pieds mis en place, l’espèce n’aplus été observée sur le site del’opération pendant plusieursannées. Mais dix ans après la miseen place, une petite population aréapparu à l’endroit de l’implantation(une vingtaine d’individus en 2004,une cinquantaine en 2005). On peutdonc raisonnablement émettrel’hypothèse qu’il s’agit de ladescendance des individusplantés. ■

1. Les Grecs appelaient la Corse Cyrnos.

D’après A. Aboucaya, I. Guyot, C. Piazza,M. Virevaire, 1999. Plans de gestionconservatoire mis en place en Corse pourcinq espèces végétales endémiques etprioritaires de la directive Habitatsin Actes du colloque de Brest 15-17oct.1997 « Les plantes menacées deFrance ». Bulletin de la Société botaniquedu Centre-Ouest, 19 : 251-278.

Le buglosse crépunous enseigne

la modestieOn croyait avoir échoué. La réintroduction du buglossecrépu s’était, disait-on,soldée par un échec. La nature n’avait pas dit sondernier mot : dix ans après

il réapparaissait.

suite page 22 ● ● ●

>>> Espèces végétales

Les échanges génétiquesne sont pas toujours préjudiciables mais…

Introduction, réintroduction, renforcement de populations… Que se passe-t-il quand les espècesvégétales introduites ne sont pas strictement issuesdes espèces locales?

Cependant, cette observation est insuf-fisante, notamment dès qu’il s’agitd’entités apparentées.L’introgression doit alors être confir-mée par l’utilisation de marqueurs dia-gnostiques.Un variant de l’ADN, par exemple, ouencore une enzyme précise peut servirde marqueur. En revanche, pour êtreconsidéré comme tel, l’allèle doit êtreprésent en fréquence importante(>50%) dans une espèce et absent dansl’autre.

Quelques problèmesmajeurs

D’une manière générale, les introgres-sions génétiques se maintiennent d’au-tant plus longtemps, que les gènes spé-cifiant les caractères sont peu soumisaux pressions de sélection. On peutainsi observer, pour la plupart descaractères morphologiques, un certainretour vers les formes parentales, leplus souvent à la forme locale.

Le problème génétique est posé. Eneffet, les introductions peuventprovoquer des occasions d’hybri-

dations et d’introgression génétique.C’est-à-dire une dispersion naturelledes gènes, entre plantes introduites etplantes indigènes.Elles entraînent alors de profondesmodifications de la structure génétiquedes espèces, pouvant aller jusqu’auremplacement d’un type de matérielvégétal par un autre.Le processus qui conduit à la modifica-tion du patrimoine génétique de l’espècelocale est progressif. Après l’hybrida-tion entre les deux espèces, suivie soitde croisement entre hybrides, soit decroisement en retour entre ceshybrides et les formes autochtones, onaboutit à la création de nouveaux végé-taux. Proches de l’une des espècesparentales pour certains caractères,ceux-ci peuvent également conserverune partie du génome de l’autre espèce.La détection des introgressions géné-tiques s’opère souvent à partir d’obser-vations morphologiques qui révèlentl’existence de plantes « intermédiaires».

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>>> Golfe de Propriano

Le dossierRéintroductions

© Gilles Faggio - CEN de Corse

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 22

>>> Mél : [email protected]

En revanche, concernant les caractèresbeaucoup plus neutres, les plantes prove-nant de l’hybridation conservent des par-ties de génomes provenant des plantesintroduites. Une longue durée de vie favo-rise également le maintien des introgres-sions génétiques sur de longues périodes.Mais les échanges génétiques ne sont pastoujours préjudiciables. Ainsi, dans le casde populations isolées et affectées par unedépression consanguine, le flux de gênesentre plantes locales et introduites peutcontribuer à renforcer génétiquement lespopulations locales et concourir à leurexpansion.Cependant, les introgressions génétiquesentre espèces locales et introduites peu-vent être à l’origine de problèmesmajeurs. C’est le cas lorsque les introduc-

Risque de dérive…En réponse à la dégradation accélérée des milieux

naturels, l’écologie de la restauration a pris uneimportance grandissante. D’ailleurs, sous un titre

volontairement provocateur, le ministère de l’Environnement a,en 1996, organisé un colloque intitulé «Recréer la nature ». Il a eu

pour mérite d’ouvrir le débat sur un sujet des plus délicats. Jusqu’où doit-on allerdans la «manipulation » de la nature? Quelle est notre technicité en la matière? Ne risque-t-on pas une remise en cause de la protection in situ ? Ce sont desquestions que l’on doit se poser face à la demande croissante de déplacementsd’espèces animales et végétales. Pour un aménageur, déplacer un élément gênantest bien évidemment la solution idéale. Celui-ci ne se prive donc pas, en général,de proposer ce type d’intervention comme mesure compensatoire aux impactsenvironnementaux. En théorie, la législation ne prévoit pas cette possibilité, sansdoute parce que cela ouvrirait le champ à toutes les dérives. Dans la pratique, leschoses sont plus complexes. Tout est une question d’échelle. Si le projet met en péril l’unique population d’une espèce mondialement menacée,c’est généralement le projet qui sera déplacé, voire annulé. Si l’enjeu naturel est moindre et le projet d’utilité publique, ce sont alors quelques animaux ouvégétaux qui seront déplacés, comme cela a été le cas en Guyane pour le barragede Petit-Saut.Il n’existe pas de règles absolues en la matière. Pour l’instant, le déplacementd’une espèce est considéré comme une solution exceptionnelle, strictementdérogatoire. Sur le plan technique, c’est une opération souvent délicate quidemande un investissement financier et humain sans rapport avec le bénéficeattendu. Le déplacement d’espèces animales et végétales ne peut donc êtrepratiqué que dans des cas bien particuliers, lorsque toutes les autres solutions ont été épuisées. ■

MARC CHEYLAN

Le dossierRéintroductions

● ● ● suite de la page 21

tions ont lieu dans des milieux représen-tant de fortes contraintes écologiques(parfois des milieux extrêmes), la hautemontagne par exemple 1 ou encore cer-tains milieux très humides, salés ou auclimat méditerranéen très prononcé.Dans ces milieux, les populations subis-sent des pressions de sélections trèsimportantes. Elles se maintiennent grâceà des adaptations génétiques.L’introduction de matériel végétal alloch-tone qui, le plus souvent, n’a pas subi lesmêmes modifications adaptatives, contri-bue à créer des individus génétiquementdéséquilibrés et mal adaptés aux condi-tions locales. Dans certains cas, les effetsnéfastes peuvent perdurer sur de trèslongues périodes.Pour éviter ces inconvénients, uneconnaissance de base des principalescaractéristiques biologiques des popula-tions autochtones d’espèces identiques ouproches de celles introduites est nécessaire.Dans la mesure du possible, un matérielvégétal proche génétiquement du maté-riel autochtone ou présentant au moinsdes caractéristiques adaptatives analoguesdoit être choisi. ■ROSELYNE LUMARETCENTRE D’ÉCOLOGIE FONCTIONNELLE ET ÉVOLUTIVECNRS MONTPELLIER

1. C’est un problème qui se posenotamment, lors du réengazonnementdes pistes de ski.

DANS LES ALPES, LE CHARDON BLEUCONNAÎT UNE POLITIQUE DE RENFORCEMENTDE POPULATION.

Biblio◗«Déontologie et méthodologieapplicables aux renforcements,réintroductions et introductionsde flore dans le milieu naturel. »M. Bournerias et L. Olivier,1989.In Plantes sauvages menacées,Actes Brest. BRG oct. 1987 :379-385◗Cahier des charges pour les Conservatoires botaniquesnationaux.Direction de la nature et des paysages, servicechasse-faune-flore,mars 1990 et juin 1996. 25 pages.◗Le Courrier de la Nature,janvier 2000. Spécialréintroductions.◗ Lignes directrices à suivrepour les plans de conservationet de récupération desvégétaux. PS Wyse Jackson etJR Akeroyd, 1994. Sauvegardede la nature. Les éditions duConseil de l’Europe.

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méthodologie

CARTE DES GROUPEMENTS VÉGÉTAUX - BOIS DES ARESQUIERS

Groupement à Salicornia fruticosaGroupement à Quercus ilex et Ruscus aculeatusGroupement à Quercus ilex et Viburnum tinusPelouse graminoïdeCistaie à Cistus albidusGarrigue à Quercus coccifera et Pistacia lentiscus

ONF Montpellier

Placettes

Àquatorze kilomètres de Montpellier,le site du Bois des Aresquierss’étend sur 86 hectares. L’objectif

sylvicole n’est pas axé sur la productionligneuse mais sur la préservation de labiodiversité et sur l’accueil du public. Lepropriétaire du site, le Conservatoire dulittoral 1, souhaite maintenir l’aspect pay-sager offert par une futaie de pins d’Alepavec un sous-étage de feuillus autoch-tones qui s’installent sous ces résineux.L’ONF, opérateur technique, doit doncintervenir régulièrement, à bon escient etau bon moment. En effet, en l’absence degestion sylvicole, la forêt (voir schéma, lasérie évolutive, page 24) évoluera naturel-lement vers un bois de chênes verts etpubescents, caractéristique des forêtsméso-méditerranéennes.Intervenir au bon moment est d’autantplus déterminant qu’une fois la chênaiemixte installée, il n’est plus possible derevenir en arrière (sauf incendie).Pour savoir quand agir, le gestionnaire amis en place une méthodologie pratiqueadaptable pour tout écosystème forestier.Sa simplicité est son atout premier puis-qu’elle consiste à observer si oui ou nonquatre espèces sont présentes, sur cinqplacettes identifiées.

Le protocoleDans un premier temps, le gestionnaire apratiqué un suivi régulier de quinze pla-cettes de vingt ares environ (elles serontréduites à cinq par la suite). Le protocolede suivi visait au comptage des espècesvégétales et inventoriait les caractéris-tiques dendrométriques des arbres.La méthode était lourde (et chère par voiede conséquence). Aussi, plutôt que decontinuer à prendre en compte la typolo-gie du peuplement de pins d’Alep, le ges-

tionnaire eut l’idée de considérer la dyna-mique des groupements végétaux instal-lés en sous-bois (ce travail a été réalisépar François Giraud et Ombelline Devauxsous notre encadrement scientifique).Autrement dit, plutôt que de regarder enhaut, il porta son regard vers le sol pouridentifier les espèces végétales installéessous les arbres. En effet, à chaque stadeévolutif de la forêt correspond un groupe-ment végétal particulier et précis qui évo-lue en fonction de l’âge du peuplement etdes actions sylvicoles entreprises.En identifiant les espèces végétales instal-lées, il devenait possible de savoir à quelstade d’évolution se situait la forêt. Était-on toujours dans une typologie de pinsd’Alep ou bien la forêt était-elle en traind’évoluer vers un bois de chênes verts et

pubescents ?

La méthodePrenant en compte les principaux stades dela série évolutive de la chênaie méditerra-néenne, nous avons défini, pour le cas par-ticulier de la forêt des Aresquiers, les cor-tèges floristiques qui leur sont associés.C’est d’ailleurs ce que retrace plus préci-sément le tableau 1. Faisant état des rele-vés phytosociologiques, il met en évidencesix groupes d’espèces qui vont permettrede cartographier la biodiversité de la végé-tation au bois des Aresquiers :- espèces de la chênaie pubescente ;- espèces de la chênaie verte ;- espèces de la garrigue à chênes kermès ;- espèces de la cistaie ;- espèces de la pelouse dominée par lebrachypode rameux ;- espèces halophytes de la sansouire à salicornes.Cette méthode a l’avantage de simplifier le

Au Bois des Aresquiers, les choix de gestion forestière sont déterminés parles résultats d’un suivi scientifique. Sa particularité ? La simplicité de sa miseen œuvre. Ce suivi repose en effet sur la mesure de la biodiversité floristiqueprésente dans le sous-bois. Au nombre des avantages : des résultats fiablesobtenus à moindre coût.

Évaluation de la biodiversitéde la végétation en forêt aménagée

>>> Le Bois des Aresquiers (34)

suite page 24 ● ● ●

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 24scientifique - chercheur

méthodologie

nombre d’espèces électives à suivre. En effet, uncoup d’œil rapide à la liste des cortèges floris-tiques (p. 25), nous le confirme: le gestionnaire n’aque quatre espèces à surveiller (carex, chèvrefeuilledes Baléares, fragon, viorne-tin).Ainsi, la présence de la grande coronille ou duchèvrefeuille des étrusques indique le stade leplus évolué de la forêt (chêne pubescent).L’observation du fragon et de la viorne-tin indiquele deuxième stade évolué, dominé par la chênaieverte. Dans un tel cas, on constate d’ailleurs que lafutaie de pins d’Alep se ferme et que le pin se régé-nère très difficilement. La présence de tellesespèces dans la forêt des Aresquiers révèle lanécessité d’une très forte éclaircie si l’on veutrépondre au vœu du propriétaire de maintenir unpaysage de pinède.Par contre, les groupements de sous-étages consti-tués par les espèces de la garrigue, de la cistaie,favorisent une bonne régénération du pin d’Alep etrestent défavorables à l’installation des espèces del’association de la chênaie verte.Après inventaire, les placettes sont alors cartogra-phiées (carte). Elles sont réparties par type degroupement végétal de la série évolutive de lachênaie mixte qui commence à se réinstaller souspin d’Alep.

1. Le Bois des Aresquiers estpropriété du Conservatoire del’espace littoral et des rivageslacustres. Le gestionnaire du site estla Communauté d’agglomération del’étang de Thau.

2. Jérôme Felissiak. « Contribution àl’étude de l’évaluation et de lacartographie de la biodiversitévégétale en forêt aménagée :application à la forêt des Aresquiers(34) » - Mémoire d’initiation à larecherche - Université Montpellier II.

>>> Mél : [email protected]

LA SÉRIE ÉVOLUTIVE DE LA VÉGÉTATIONGARRIGUES DU BAS-LANGUEDOC

ARBOUSIER.

PRÉSENTÉE EN1980, PAR LOUISTRABAUD, LA SÉRIEÉVOLUTIVE DE LAVÉGÉTATION DANSLES GARRIGUES DUBAS-LANGUEDOCDÉMONTRE QU’ENCAS D’ABSENCED’INCENDIE, LAVÉGÉTATION SOUSPIN D’ALEP ÉVOLUEPOUR ATTEINDRE LACHÊNAIE MIXTE.

Mesure de la naturalitéIl nous restait à finaliser cette méthode par unemesure chiffrée, nous permettant de savoir si nousétions réellement en présence de formationstypiques d’un stade évolutif. Nous avons donc appliqué (avec Jérôme Felissiak 2)l’indice d’intégrité photocénotique tel que définipar Noirfalise en 1984 (voir encadré). Cet indicemesure la représentativité de chaque formationvégétale par rapport une formation théorique (lesgroupements sont de plus en plus typiques au fur età mesure qu’on évolue vers le climax 3).Pour évaluer le nombre P d’espèces potentiellessur le site des Aresquiers, nous avons pris lesassociations repérées par Braun Blanquet (1952). Quant au le nombre R, il est défini par des relevésde terrain.Nous avons alors mis en évidence le fait que :au niveau de la chênaie verte, l’indice d’intégritéphytocénotique est relativement faible au stadegarrigue à chêne kermès (IP = 22,80), elle aug-mente légèrement au stade évolutif suivant avec laprésence de la viorne-tin (IP = 25). En revanche,elle accuse une augmentation rapide (IP = 33,03)au stade encore plus évolué avec la présence dufragon.La valeur de cet indice éclaire donc le forestier surla valeur patrimoniale du site. Il peut ainsiprendre des décisions éclairées en correlation avecses objectifs sylvicoles.

PériodicitéUn relevé floristique complet doit être réalisé lapremière année. Il permet de comptabiliser lesespèces à différentes saisons. Ensuite, la périodi-cité de suivi dépend de l’habitat concerné, des for-

3

3. Le climax originel est un « concept ».Il veut décrire l’étatd’équilibre de lavégétation une foisstabilisée du fait d’un climat stable et del’absence d’interventionhumaine.

Calcul de l’indice d’intégrité

phytocénotique

I (%) = R 100P

R : nombre d’espèces de l’alliance et de l’association

(voir cortèges floristiques p. 25)présentes dans le relevé de terrain.

P : nombre d’espèces potentielles.

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● ● ● suite de la page 23

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PAGE 25 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10scientifique - chercheur

méthodologie

LA PREMIÈRE ÉTAPE DE CETTE MÉTHODE DE SUIVI REPOSE SURL’ÉLABORATION DES CORTÈGES FLORISTIQUES.

CI-DESSOUS LE FRAGON. IL S’AGIT D’UNE DES QUATRE ESPÈCES CORTÈGES FLORISTIQUES

■ CHÊNAIE PUBESCENTEGrande coronilleLierreChèvrefeuille des étrusquesChêne pubescentRonce

■ CHÊNAIE VERTEEspèces de l’associationidentifiées spécifiquement sur le territoire du bois des AresquiersCarexChèvrefeuille des BaléaresFragonViorne-tin

Espèces de l’alliancespécifiques à la régionArbousierAspergeBuplevreCoronille glauqueEuphorbe des garriguesTérébinthePistachier de SaportaChêne-vertViolette

■ GARRIGUE À CHÊNES KERMÈSBuplevre rigideDoycniePin d’AlepChêne kermès

■ CISTAIECiste cotonneuxCiste de MontpellierCiste à feuille de saugeCytinet

■ PELOUSEPoireau sauvageMouron des champsGueule-de-loupAvoine stérileBourrache officinaleBrachypode phoenicoïdeBrachypode rameuxBromeCrépis bulbeuxCynosoreDactyle agloméréDactyle du littoralCarotte sauvageInule visqueuseChardon laiteuxÉpervièreMillepertuisLavande à feuille largeLin de NarbonneMuscari à houppeOnomisOphrysOrchidée de RobertOrnithogale

Reproduire la méthode

Le suivi de la biodiversité sous l’angle floristique peut se concevoir par uneméthode lourde, revenant aux fondamentaux : des relevés phytosociolo-giques exhaustifs sur un réseau de placettes permanentes, une analyse et

un classement de ces relevés à partir des espèces caractéristiques et com-pagnes mises en évidence par les travaux de phytosociologie. Moyennant unéchantillonnage adéquat, cette méthode donnera des résultats riches et fiables.Sauf que… la lourdeur en temps à consacrer à ces relevés et leur traitement (etdonc sa lourdeur en coût) est aggravée par la nécessaire répétition des opéra-tions au fil du temps suivant une périodicité à définir mais guère supérieure àcinq ans.Le mieux sera une fois de plus l’ennemi du bien car, dans ces conditions, on ris-quera fort de ne pas avoir de suivis du tout ou limités dans l’espace et le tempsaux opportunités budgétaires.La démarche (évolutive) mise en œuvre sur le bois des Aresquiers (34) présentel’intérêt d’être transposable pour la gestion de tous les espaces naturels, en par-ticulier ceux de grandes superficies, soumis à des dynamiques évolutives plus oumoins rapides.Pour reproduire cette méthode sur d’autres territoires, on pourra se référer auxCahiers d’habitats qui indiquent les stades évolutifs des habitats d’intérêt com-munautaire, l’état de biodiversité voulue avec la présence de quelques espècesélectives parmi les plus communes. Ils proposent même des recommandationsde gestion. On pourra se faire préciser la ou les séries évolutives locales par desscientifiques ou leurs écrits. Le gestionnaire arrivera ainsi à lire la dynamique dela végétation sur les peuplements forestiers qu’il gère et pourra ainsi caler aumieux ses interventions. ■

JACQUES GOURCRESPONSABLE ENVIRONNEMENT À LA DIRECTION TERRITORIALE MÉDITERRANÉE DE L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS.

mations végétales présentes et des actions de ges-tion prévues.Dans l’ensemble, pour une formation forestièregérée, on doit tenir compte de l’étendue des peu-plements, des actions sylvicoles et, bien entendu,du coût.Un relevé floristique simplifié peut suffire dans lamesure où il prend en compte, en priorité, desespèces indicatrices de l’évolution d’un groupe-ment à l’autre, conçues dans la série évolutive. Deplus, les espèces rares, signalées dans la zoned’étude, peuvent être recherchées. On profiterapour ce faire, du relevé réalisé en saison de végéta-tion active.La surface du relevé n’est ni limitative, ni exagé-rée. Elle répond aux conditions homogènes sta-tionnelles du groupement étudié pour ne pas sor-tir de l’aire du relevé. Elle correspond à l’aireminimale dans laquelle les espèces du groupementvégétal étudié ont été relevées.Par ailleurs, il semble logique de solidariser lapériodicité du suivi avec des prises de photosaériennes tous les cinq ans environ. ■LAMRI ZERAIADOCTEUR ÈS-SCIENCES, INGÉNIEUR, CHARGÉ DE L’APPUI SCIENTIFIQUEOFFICE NATIONAL DES FORÊTS.

LA SANSOUIRE À SOLICORNES(D'INTÉRÊT PATRIMONIAL).

(ESPÈCES DE L’ASSOCIATION) QUI, IDENTIFIÉES LORSDU SUIVI, ALERTENT LES GESTIONNAIRES DE LA FORÊT

DES ARESQUIERS.

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 26scientifique - chercheur

devoir de mémoire

2004, le géographe Lionel Laslaz publie un ouvrage retraçant l’histoire du Parcnational de la Vanoise 1. Une réflexion historique sur un « objet » contemporain, est-ce possible ?

L’histoire,miroir des espaces protégés…

V anoise, 40 ans de Parc national…Après quarante ans d’existence dupremier Parc national français, le

géographe s’est octroyé le droit de regarderdans le rétroviseur… Et d’aborder l’évolu-tion des hautes vallées savoyardes depuis lacréation de cette structure de protection, entotale indépendance. Le chercheur savoyarda tenté de faire la synthèse du passé et dedégager des perspectives, tout en étantaccessible au grand public. Un défi, car ils’agit du premier ouvrage de synthèse trai-tant d’un Parc national français. Mais qua-rante ans, n’est-ce pas trop jeune pour unedémarche historique?

Méthodologie de rechercheLa problématique principale repose surl’écart entre la dimension nationale duParc et ses implications locales. Le fonc-tionnement du Parc national de la Vanoisene peut se comprendre sans le replacerdans un contexte plus large. La lecture dugéographe a donc privilégié une approchemultiscalaire 2, de la chapelle d’alpage à lapolitique européenne de protection de l’en-vironnement, et la profondeur historique,des premières politiques de protection ini-tiées dans le monde et en France, aux der-niers débats (en juin 2003) autour de laréforme des Parcs nationaux.Pour dresser cet état des lieux, l’auteurs’est appuyé sur un travail de terrain étalésur plus de dix ans, en partie sur un DEAde géographie, repris, épuré et réécrit pourle grand public, et sur un travail derecherche spécifiquement historique.

Faire parler l’histoire…Les sources du travail furent multiples :documents d’archives (conseil d’adminis-tration, comité scientifique, conseils géné-ral et municipaux), projets de création,documents administratifs (textes de loi,plans d’aménagement, enquêtes de fré-quentation), articles de revues et de jour-naux, en plus des ouvrages plus classiques.

- les productions officielles ou scientifiques(perspective institutionnelle ou scientifique);- la même thématique quelques annéesauparavant (perspective temporelle).Dans tous les cas de figure, le scientifiquene peut dégager que des tendances et doitse méfier des généralisations hâtives.Quelques avis similaires ne fondent pasune «vérité». Pour autant, nous sommesbien souvent hors du domaine du vrai/faux,mais plus dans celui du « ressenti » et du«vécu»…La difficulté réside aussi dans le choix desinformations accumulées et dans la perti-nence de leur mise en contexte. Les cinqconflits environnementaux qui constituentla cinquième partie ont été plus retenusselon la problématique de l’écart entredimensions nationale et locale que selonleur intérêt intrinsèque.

Science de l’Homme,nature de la science

L’auteur a tenté de livrer une réflexion histo-rique, par croisement des sources, plusqu’une « mémoire » ou un enchaînementd’histoires ou d’anecdotes qui, pour autant,constituent le caractère démonstratif etillustratif de la présentation. Ce sont essen-tiellement les évolutions qu’a connu le Parcet ce, en comparaison des autres espacesprotégés, qui permettent d’exercer une lec-ture réflexive et circonstanciée de son histoi-re. Le «recul» nécessaire pour cette analyses’inscrit dans le temps et l’espace, mais n’es-tompe pas les avis et la sensibilité de l’auteur(résultats d’un vécu, d’expériences, de lec-tures, voire de postulats), qui n’a pas préten-du à l’objectivité, mais à une relative neutra-lité. C’est déjà beaucoup sur ce type de sujetpolémique. ■LIONEL LASLAZAGRÉGÉ DE GÉOGRAPHIE, LABORATOIRE EDYTEMUNIVERSITÉ DE SAVOIE - CHAMBÉRY

LE LAC DETIGNES, VALCLARET ET LAGRANDE MOTTE(RÉSERVENATURELLE).ENTREDÉVELOPPEMENTTOURISTIQUE ETPROTECTION DEL’ENVIRONNEMENT,SUR FOND DEDÉSHÉRENCEAGRICOLE.

© Lionel Laslaz

Plus de 130 entretiens ont été effectués avecles acteurs passés et actuels du massif. Laprudence et la critique permanente de cessources sont le premier garant du caractère« scientifique » du travail : un article deL’Humanité ou de Minute ne s’interprètentpas de la même façon et, par exemple, leursprises de position lors de « l’affaire de laVanoise » 3 répondent plus à une logiqued’opposition au gouvernement qu’à unedéfense de l’environnement…Pour établir une démarche scientifique,chaque information, chaque entretien a étéconfronté à:- la réalité du terrain (perspective spatiale);- la comparaison à des cas similaires dans lemême Parc national, ou dans d’autres (pers-pective spatiale);- l’avis d’une autre personne, opposée ounon (perspective socio culturelle);

>>> Mél : [email protected]

>>> Parc national de la Vanoise

1. Vanoise : 40 ans de Parc national ; bilan etperspectives - Lionel Laslaz, 2004. Édition L’Harmattan,coll. «Géographies en liberté », 434 pages.

2. Plusieurs échelles.

3. En 1969, le projet de construction d’une station deski sur la commune de Modane avait provoqué unemobilisation sans précédent des défenseurs del’environnement (350000 pétitions). L’abandon de ceprojet en 1971, sur intervention de Georges Pompidou,est considéré comme la première grande victoire desprotecteurs de la nature en France.

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PAGE 27 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10animateur - formateur

évaluation

Cap gypaèteLa volonté d’évaluer l’action,

la méthode pour le faire

>>> Programme d’éducation à l’environnement en milieu scolaire

«APRÈSÉVALUATION,

IL S’AVÈREQUE L’EFFORTPÉDAGOGIQUE

A DAVANTAGE PORTÉSES

FRUITS DANS LEDOMAINE DES

CONNAISSANCESQUE DANS CELUI

DES SAVOIR-ÊTREET DES

SAVOIR-FAIRE. CECIMALGRÈ LE SOUCI

DE L’ÉQUIPEPÉDAGOGIQUE ».

Quel impact cette action a-t-elle eu surle public cible ? Qu’a-t-il retenu denotre message ? Avons-nous permis

une modification des comportements?Partant de ce constat, le réseau pyrénéenÉducation conservation casseur d’os (Ecco)s’est engagé dans un vaste processus d’éva-luation de ses projets pédagogiques Capgypaète menés auprès d’un ensemble declasses du primaire et du secondaire. Et,afin de garantir la rigueur de la démarcheet l’objectivité du traitement des données,nous avons sollicité le laboratoire de psy-chologie sociale de l’université Paul-Valéryà Montpellier et l’association Arecs spécia-lisée dans le traitement statistique des don-nées. Notre parcours s’est alors déroulé enquatre étapes :1- choisir une méthode compatible ;

2- identifier les compétences à évaluer ;3- choisir la technique de mesure ;4- mener l’évaluation et traiter les réponses.

Choisir une méthodeLes « protocoles expérimentaux » les plusrigoureux préconisent d’évaluer les compé-tences du public avant, puis après la réalisa-tion du programme. Hélas, le programmeavait déjà été lancé lorsque le dispositif d’éva-luation a pu se mettre en place! Nous avonsalors opté pour une méthodologie dite des« groupes de comparaison statique »(Campbell et Stanley, 1963). C’est ainsi quele très grand nombre d’élèves ayant bénéficiéde cette action de prévention (classes expéri-mentales) nous permettait de comparer leursrésultats à ceux de classes « témoins »

n’ayant pas bénéficié de ces interventions.Ces dernières ont été choisies en fonction deleurs niveaux scolaires et de leurs implanta-tions géographiques dans des écoles desPyrénées. L’appariement selon ces variablesrendait la comparaison possible entre descompétences initiales «probables», et cellesdes classes «expérimentales».La mesure des changements, induits par lesinterventions, est appréhendée en compa-rant les résultats des classes expérimentéeset témoins. Un test statistique de comparai-son des fréquences observées permet de diredans quelle mesure les différences peuventbien être attribuées aux effets de l’interven-tion ou, au contraire, aux effets du hasard.

Des actions de communication, de sensibilisation ou d’éducation à l’environnement,nous, acteurs de la conservation de la nature, nous en menons régulièrement…mais avec quels résultats? Dans bien des cas, nos seuls critères d’évaluation serésument à une auto-évaluation sommaire, à la satisfaction d’avoir fait une belleplaquette, à la mesure d’un indice de satisfaction, à un nombre de tirages ou à unnombre de personnes ayant participé à notre action…

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animateur - formateurévaluation

En 1997, le ministère chargé del’environnement se dotait d’un plande restauration du gypaète barbu

sur le massif des Pyrénées. Dans cecadre, la Ligue pour la protection desoiseaux initiait la création d’un réseauconstitué d’associations oud’organismes spécialisés en éducationà l’environnement : le réseau Ecco. À présent, cette dynamique a franchi lafrontière espagnole, un réseautransfrontalier est né : ÉducationPyrénées vivantes rassemble dix-neufstructures françaises et quinzeorganismes espagnols. Il favorisel’émergence de projets pédagogiquesautour de la biodiversité pyrénéenne. Validée par chaque structure, unecharte pédagogique vise à maintenirune cohérence dans les interventions.Elle se décline en quatre points :◗ Principes. Travailler autour du gypaètepermet de découvrir un milieumontagnard complexe. Le travail desensibilisation au sein de chaque projetdépasse la problématique deconservation de l’espèce.◗Objectifs - Objectifs sensoriels : rendre l’enfantsensible à la beauté et à la fragilité dela nature.- Objectifs notionnels : prendreconscience des relationsHommes/milieux naturels. Connaîtrel’espèce et le milieu montagnard.- Objectifs comportementaux : permettreaux enfants, d’agir à bon escient…◗Méthode de travail. Le travailpluridisciplinaire, la participation desenfants à leur propre formation, ladécouverte du terrain, la mobilisationde l’imaginaire et des émotions… sontautant d’axes de travail.◗Outils pédagogiques. La dynamique deréseau a permis de créer des outilspédagogiques dont Cap gypaète, aveconze outils notamment destinés àappréhender la conservation desespaces montagnards au travers d’uneespèce menacée. ■ P. S.

Un réseau,une charte pédagogique

ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 28

d’objectivité et de précision, les change-ments de compétences d’un grand nombred’enfants.Toutefois si le QCM est bien adapté pourévaluer des savoirs, il permet plus difficile-ment de mesurer des comportements oudes attitudes.Il a donc fallu se contenter de poserquelques questions susceptibles de révélerles connaissances sur les pratiques appro-priées et sur les intentions des élèves.Cependant, s’agissant de déclarations, il estdifficile de conclure sur le comportementréel de l’enfant dans une situation préciseen pleine nature.Nous avons alors bâti un questionnaire, deconcert entre les acteurs du réseau Ecco etle laboratoire de psychologie sociale del’université de Montpellier. Il comportaitune cinquantaine de questions.Pour compléter cette technique, et afin derecueillir des informations plus qualita-tives, une dizaine d’interviews ont égale-ment été réalisées, un an plus tard.

Traiter les réponsesDès la fin des projets scolaires (fin juin), lesquestionnaires ont été transmis, par lesmembres du réseau Ecco, via les ensei-gnants, à tous les enfants ciblés (classestémoins et expérimentales).Près de 350 questionnaires ont été rensei-gnés et recueillis. Leur traitement a pu êtreréalisé rapidement par l’Arecs, grâce à desoutils informatiques appropriés (scanner etlogiciel de traitement). L’exploitation desdonnées a ensuite été faite par le laboratoirede psychologie sociale. ■PHILIPPE SERRE - LPO

GÉRARD PITHONLABORATOIRE DE PSYCHOLOGIE SOCIALEUNIVERSITÉ DE MONTPELLIER 3

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>>> Programme Pyrénées vivantesLou Tucot - Chemin Larroudé - 64290 GanMél : [email protected] www.pyreneesvivantes.com.>>> Laboratoire de psychologie socialeMél : [email protected]

Identifier les compétencesLes compétences visées par un programmetel que Cap gypaète étaient à la fois cognitives (concernant les espèces et leursmilieux de vie) mais aussi sociales(valeurs, conscience, attitudes et pratiquesfavorables à la protection des espècesmenacées ou, plus généralement, à l’éco-citoyenneté).Ces compétences peuvent être classées(travaux de Flavell), selon plusieursniveaux d’acquisition et d’intégration.- LE NIVEAU DU SAVOIR. L’évaluation s’inté-resse à l’acquisition de connaissances, oudes connaissances déclaratives, que lesujet peut restituer en déclarant, par écritou oralement, «ce qu’il sait».- LE NIVEAU DU SAVOIR-FAIRE. Il s’agit d’éva-luer la maîtrise des comportements, per-formances, ou connaissances procédu-rales… à savoir les opérations maîtriséespar le sujet pour réaliser une tâche.- LE NIVEAU DU SAVOIR ÊTRE. C’est l’évalua-tion de l’engagement, l’investissement,parfois stratégique, du sujet dans sesactions, et les attitudes qu’il adopte dansune situation donnée (connaissancescontextuelles). Comment l’élève réagiraitdans une situation particulière?Notre premier travail a donc été d’établirun échantillon des compétences à évaluer.

Choisir la technologieLa technique du questionnaire à choixmultiples (QCM) nous a semblé la plusappropriée à notre situation (publicjeune, nombreux, captif) : nous devionsévaluer rapidement, avec le maximum

LA MALLETTE PÉDAGOGIQUE PRÊTEÀ L’UTILISATION SUR LE TERRAIN.

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POURCENTAGE DE RÉPONSES CORRECTES DES GROUPES EXPÉRIMENTAL ET TÉMOIN

% MOYEN DERÉPONSES

CORRECTES POUR

GROUPEEXPÉRIMENTAL

203 ÉLÈVES

GROUPETÉMOIN

145 ÉLÈVES

GAINS MOYENSAPPORTÉS PARL’INTERVENTION

gypaète 70.22% 45.52% 24 ,7%

rapaces 69.13% 47.76% 21,37%

environnement 75.62% 64.14% 11,48%

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évaluation

Et si c’était à refaire?Vous travailleriez encore avec une structureextérieure pour mettre en place un simple QCM?

PHILIPPE SERRE : J’y vois tous les avantages. Le labora-toire de psychologie sociale de Montpellier nous aaccompagnés dans la méthode, il nous a guidés pourl’élaboration du questionnaire. Il nous a égalementpermis d’exploiter rapidement les 350 enquêtes parcequ’il disposait d’un logiciel de dépouillement.Tout au long de la démarche, ils ont amené un pro-fessionnalisme indispensable. Comment faire ensorte, par exemple, qu’une question du QCM n’induisepas la réponse à une question suivante ?

Quel bilan tirez-vous de cette démarched’évaluation ?

GÉRARD PITHON : Les bons résultats de cette évaluationauraient certainement été encore meilleurs si l’équi-pe d’intervention avait pu se mettre en contact avecl’équipe d’évaluation bien avant l’intervention et nonpas pendant l’intervention. Le choix de la méthode etla conception du questionnaire ont été effectués troptardivement et donc trop rapidement.

Que diriez-vous du coût de l’évaluation ?

GÉRARD PITHON : Bien souvent, en croyant bien faire,on met le maximum de ressources dans l’interven-tion en utilisant parfois des moyens spectaculaires…Il faut bien montrer qu’on a fait des choses ! Pourtantune analyse préalable permettrait de concevoir desdispositifs d’évaluation sur un simple échantillon dela population concernée. Cela éviterait des coûtsinutiles, en donnant tout de même les moyens d’évaluer

les changements opérés avant et après l’interven-tion, aussi bien sur le plan des attitudes, desconnaissances (interviews, questionnaires, tests…)que des pratiques (certains jeux de simulation per-mettent d’enregistrer des comportements)… mais,hélas, c’est l’observation des conduites quotidiennesqu’il faudrait mettre en place ! Et là, nous rencon-trons un autre problème, celui de la déontologie :jusqu’où peut-on aller dans le suivi des effets d’uneaction?

À la lecture des résultats de l’enquête,qu’allez-vous modifier dans l’avenir ?

PHILIPPE SERRE : Il y a un écart important entre lespopulations d’enfants qui n’ont pas suivi le pro-gramme et les enfants qui y ont participé. Nousavons donc bien fait notre travail ! Cependant, nousnous sommes aperçus que l’écart était beaucoupplus important dans le domaine des connaissancespures que dans ceux des savoir-faire et savoir être.Nous pensions que nos interventions fortementaxées sur la pédagogie de projet et sur le terrainaboutiraient à plus de changement de comporte-ments. Or, nous découvrons que nous avons priori-tairement fait « passer » de la connaissance. Alors,oui, effectivement, nous sommes partis de cette éva-luation pour repenser nos interventions.

Concrètement…

PHILIPPE SERRE : Suite à ce programme d’évaluation,nous avons élaboré une charte avec les membres duréseau espagnol. Elle contient la philosophie del’éducation à l’environnement et une dimensionconcrète sur la manière d’intervenir lors de nos ani-mations. Cette charte est très axée sur la pédagogiede projet, la coopération, l’aspect comportemen-tal… Cette évaluation, c’est un peu comme un boo-merang qui nous revient en direct. C’est une remiseen question pour l’ensemble des animateurs duréseau. À l’avenir, forcément, nous allons réfléchir,même inconsciemment à la manière de transmettreles savoir être. ■

«LES ATTITUDES APPROPRIÉES SEMBLENT PLUS DIFFICILES À FAIRE ACQUÉRIR QUE LES CONNAISSANCES. DESPROJETS PÉDAGOGIQUES S’INSCRIVANT DANS LE LONG TERME POURRAIENT PORTER DAVANTAGE DE FRUITS. »

EXTRAIT DU RAPPORT D’ÉVALUATION.

Philippe Serre estresponsable transfrontalierPyrénées vivantes pour la

Ligue pour la protectiondes oiseaux et initiateur

du programme Capgypaète.

Gérard Pithon est psycho-sociologue, à l’université

de Montpellier 3. Il aparticipé à la conception,

au suivi et audépouillement

de l’enquête d’évaluationCap gypaète.

Rencontre avec

PhilippeSerre

«CONFORMÉMENT AU PRINCIPE DE L’INDÉPENDANCE, L’ÉQUIPE D’UNIVERSITAIRES GARANTE DU

DISPOSITIF D’ÉVALUATION N’A PAS PARTICIPÉ À LA CONCEPTION DU DISPOSITIF D’INTERVENTION

ET, DE SURCROÎT, IGNORAIT TOUT DU GYPAÈTE BARBU AU MOMENT DE LA PREMIÈRE RENCONTRE.CE PRINCIPE OFFRE UNE MEILLEURE GARANTIE D’OBJECTIVITÉ MAIS COMPLIQUE LE TRAVAIL ENTRE

LES DEUX ÉQUIPES, ET DONC LES COÛTS, PUISQU’IL FAUT MULTIPLIER LES ÉCHANGES ENTRE LES

ÉQUIPES POUR FACILITER L’APPROPRIATION DES OBJECTIFS DE L’ACTION PAR L’ÉQUIPE

D’ÉVALUATION ET EXPLICITER LES CONDITIONS DE FAISABILITÉ DE L’ÉTUDE.»EXTRAIT DU RAPPORT D’ÉVALUATION.

etGérardPithon

MAQUETTE DE GYPAÈTE.

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Le suivi de la faune sauvage s’appuie de plus en plus sur les technologies de pointe. Si les observations visuellesd’animaux marqués restent laprincipale source de récolte dedonnées, le repérage à distances’est considérablementdéveloppé, tout d’abord à l’aidede colliers radio-émetteurs(années 70), puis, depuis 1994,grâce au GPS (Global positioningsystem). Cette évolution résulted’une recherche de techniquesefficaces permettant de localiser

les animaux à distance, le plus exactement

et le plus souventpossible (voire

en continu), en tout temps et en tout lieu.BOUQUETIN

ÉQUIPÉD’UN

COLLIERGPS.

Le positionnement par GPS utiliseune constellation de vingt-quatresatellites qui évoluent à près de

20 000 km au-dessus de la Terre, et quiémettent des signaux en permanence.Situé à terre, un récepteur mesure letemps de réception de ces signaux etdétermine, par ce calcul, sa position géo-graphique. Il est nécessaire cependantque les signaux d’au moins trois satellites(pour une localisation en 2 D: latitude etlongitude) ou quatre satellites (pour unelocalisation en 3 D : altitude en plus)puissent être perçus simultanément.L’exactitude de la localisation dépend dunombre de satellites visibles (théorique-ment au moins quatre sur 99,6 % de lasurface terrestre) et de leur configura-tion (hauteur sur l’horizon et positionne-

ment des uns par rapport aux autres).D’autres paramètres (propagation desondes électromagnétiques au travers desdifférentes couches de l’atmosphère,erreurs des horloges des satellites…) ris-quent d’occasionner des imprécisions,pouvant, au besoin, être corrigées à partirde stations fixes ou de satellites.Sur le terrain, des obstacles entre lesatellite et le récepteur peuvent limitervoire bloquer la propagation des signaux(phénomène d’obstruction). Ces obstaclessont principalement dus à la canopée(hauteur et diamètre des arbres, présencede feuilles…), et au relief (falaises, valléesencaissées). Dans le cas de falaises, unéloignement de quelques mètres seule-ment permet d’améliorer grandement laréception des signaux.

Choisir le GPS adéquat>>> La technologie GPS et ses limites

L’enregistrement des localisations s’effec-tue automatiquement, selon un pas detemps préprogrammé (cinq minutes à xheures). Un trop grand espacement (plusde six-huit heures) entre les enregistre-ments entraîne, toutefois, une surcon-sommation d’énergie. En effet, le délaid’acquisition des données est d’autantplus long que la configuration des satel-lites a évolué. Les batteries du GPS sontdonc sollicitées plus longtemps. Dans cer-tains cas, selon le type de matériel, unere-programmation à distance est possible,par l’intermédiaire de liaisons radios.La récupération des données contenuesdans le collier GPS porté par un animal,peut se faire (selon le matériel utilisé) :- par liaison filaire entre le GPS et unordinateur après récupération des colliers(re-capture des animaux ou ouverturedéclenchée à distance),- par téléchargement via une liaisonradio, GSM ou satellite avec le collier.

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fiche technique

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© Ludovic Imberdis - Parc national de la Vanoise

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fiche technique

Afin de caractériser lesdéplacements de bouquetinsentre les Parcs nationaux de

la Vanoise (France) et du Grand-Paradis (Italie) (domaines vitaux,dates et corridors de migration,caractéristiques écologiques),vingt-trois animaux ont étééquipés, en 2003, de colliersGPS programmés pour effectuerhuit localisations par jour (unetoutes les trois heures).Les dix-huit colliers récupérés en2004 ont enregistré 1375localisations en moyenne (± 533, minimum = 85, maximum= 2071) sur une période de 245jours (± 94, minimum = 12,maximum = 335). La fortevariabilité des résultats est àrelier à des facteurs techniques(rupture d’antennes GPS,oxydation de batteries) oucomportementaux (arrêttemporaire des enregistrementsen période hivernale,probablement dû à unelocalisation contre des falaises ousous des vires, du fait desintempéries).La taille des domaines vitauxs’est avérée très variable selonles individus (125 à 620 ha),certains utilisant un même sitetoute l’année, d’autres étantlocalisés sur deux à troisquartiers saisonniers, éloignésjusqu’à 16 km. Le changement dequartier était généralementeffectué de nuit (24h à 6h), enquelques heures.L’ensemble de ces données, dontl’analyse est en cours, apportedes informations majeures quantaux déplacements des individus,de jour comme de nuit. Ellespermettront de mieux définir lesbesoins écologiques de l’espèceafin d’en améliorer la protectionet celle de ses habitats. ■ I. G.

>>> Mél : [email protected]

TABLEAU 2. Liste (non exhaustive) de fournisseurs en colliers GPS

FIRME (PAYS) POIDS NOMBRE POTENTIELDE LOCALISATIONS *

www.lotek.com (Canada) 200 g – 950 g 2 400 – 12000

www.positioning.televilt.se (Suède) 90 g – 8000 g 450 – 48000

www.blueskytelemetry.com (Royaume-Uni) 498 g – 1275 g 770 – 12500www.telonics.com (États-Unis) 425 g – 1700 g 1 848 – 12600www.environmental-studies.de (Allemagne) 300 g – 1400 g 2 000 – 46000www.wildlifetrack.com (États-Unis) 1100 g 1900www.atstrack.com (États-Unis) 1100 g 8190

* Information très variable selon la programmation (une localisation par heure pour la plupartdes indications ci-dessus), la température (les températures basses diminuent la longévité desbatteries) ou encore la topographie (la présence de masques naturels vis-à-vis des satellitesallonge le temps nécessaire au collier GPS pour les localiser).

Suivi du déplacementtransfrontalier

de bouquetins des Alpes

références concernant le type de matérielactuellement disponible. Toutefois, ilconviendra de se rapprocher de personnesayant déjà utilisé le matériel pressentiafin d’en vérifier l’adéquation avec lesobjectifs de l’étude.Dans tous les cas, le choix du modèledépend tout d’abord de l’objectif de l’étude,puis de l’espèce suivie, déterminant lepoids maximal du collier (- 3% du poidsde l’animal) et donc la taille des batteries,et enfin du mode de récupération desdonnées (directe, par modem radio, GSMou système Argos) ou d’autres caractéris-tiques spécifiques à l’étude.Toutefois, l’évolution très rapide de latechnologie fait que l’on peut s’attendretrès prochainement à une diminution dupoids et une augmentation du nombrepotentiel de localisations.Enfin, il convient de rester prudent quantà l’utilisation de cet outil qui, s’il offre despossibilités inégalées de suivi, reste néan-moins soumis aux aléas techniques, encoretrès présents.■IRÈNE GIRARDPARC NATIONAL DE LA VANOISE

MatérielL’intérêt principal de cette technologieréside dans la possibilité d’acquérir ungrand nombre de données (plusieurs mil-liers, suivant le matériel et la programma-tion) indépendamment de toute contrainteextérieure (hormis les problèmes d’obs-truction). Elle s’avère particulièrementintéressante en milieu accidenté (accessibi-lité réduite, conditions météorologiquesdifficiles, haute altitude,…) ainsi que pouracquérir des données à toute heure de lajournée et en toute saison. Ainsi, son usageest très adapté pour les études concernant :- l’occupation spatiale (domaines vitaux,dates et corridors de migration, suivi deréintroductions),- l’utilisation de l’habitat (caractéristiquesécologiques du milieu),- certains traits comportementaux (rythmed’activité…), notamment en disposant decapteurs d’activité, de mortalité, ou enco-re de température.Le tableau 2 fournit quelques-unes des

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CARTE 1. Localisation de bouquetins - Vanoise et Grand-Paradis

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 32

Ce raid alpages ménageait rencontreset débats entre les acteurs écono-miques, culturels et politiques des

vallées traversées. Le scénario se déroulaitau rythme de la marche, en plusieursactes : impromptus théâtraux, musicaux(accordéon, violon et tronçonneuses…).La tomme d’Abondance, le Reblochon, leChevrotin et les vins de Savoie alimen-taient les haltes festives. Félicie, Lily etNénette, trois élégantes mules, faisaientfigure d’ambassadrices.L’événement devait permettre de fairereconnaître les perspectives de l’agro-pas-toralisme. Il cherchait à valoriser cer-taines options de gestion durable de l’agri-culture et de la forêt. Mais aussi, réunis-sant les élus et les acteurs des vingt-neufcommunes du programme Leader duHaut Chablais en un scénario commun, lepériple visait à décloisonner les modes defonctionnement et à engendrer des sym-pathies prometteuses d’avenir.Mais, est-ce bien le rôle des financementsde type Leader (ou tout autre…) d’abonderce type de démarche de communication? Etcomment répondre sans se préoccuper desrésultats espérés, et obtenus?

Évaluer L’évaluation d’une telle action de commu-nication peut se faire en écoutant« l’écho» qui revient vers le Groupe d’ac-tion local (Gal) déjà sollicité pour organi-ser le même événement l’année prochaine.La mobilisation préalable, pourtant, n’apas été facile…- En jaugeant la participation du public :les journées de marche ont attiré de quinzeà vingt personnes (c’était un peu déce-vant), davantage le dernier jour. Mais cin-quante personnes autour d’une soupe desalpages, c’est l’optimum ! Beaucoup plus(jusqu’à 200) pour les soirées festives orga-nisées par les communes participantes.- En mesurant l’impact des messages émiset reçus: c’est le plus délicat tant les sujetsont été multiples et variés. En effet, com-ment mesurer « ce qui passe » dans uneintervention de spécialistes ou d’hommes demétier, comment évaluer la qualité deséchanges? Tout juste pourra-t-on savoir quia rencontré qui. Ce n’est pas négligeable :une voix au téléphone, un nom, deviennentalors un visage, un souvenir partagé.- En quantifiant les retombées dans lapresse : quatre journalistes ont participé

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Un événement, ça parle én>>> Raid alpages et forêts en Chablais (74)

Plutôt qu’un classique voyage de presse, les animateurs du programmeLeader+ avaient organisé un raid. Aussi, l’été dernier, a-t-on pu voir une caravane hétéroclite formée de journalistes, de promeneurs, de résidents, parcourir le Haut Chablais, cinq jours durant.

ponctuellement. Une dizaine d’articles oud’émissions de radio ont été publiés ou diffusées.

Presse, que fais-tu d’un « événementiel » !

Connaissant les fameuses « lois de proxi-mité » de la presse :- un sujet intéresse un lecteur en relationdirecte avec sa proximité géographique(ça s’est passé près de chez vous),- spécifique (ça parle d’un thème qui vouspassionne),- psycho-affective (ça «vous» touche per-sonnellement),- chronologique (ça vient de se produire),qu’est-ce qui peut émerger dans un organede presse à la suite de l’organisation de cetype d’événement ?Au-delà de la publication du communiquéde presse annonçant l’événement, difficiled’espérer une participation de la pressenationale même s’il est toujours possibled’accrocher un journaliste souhaitantfaire une page « terroir »… En revanche,localement, on peut escompter un échodans une émission radiophonique, unarticle dans une rubrique régionale, uneannonce… Le résultat sera très différent,selon qu’il s’agit d’un premier contact ou,au contraire, si la relation avec le journa-liste est plus suivie.Les «représentations» préalables de la pres-se sur le sujet jouent un rôle de premier

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>>> En savoir plusGal - Pascale LioutierMaison de la Côte - Le Petit Lieu74550 PerrignierTél. : 0450722413

SAE Pierre Lachenal - DDAF Citéadministrative rue Dupanloup74040 Annecy cedex Tél. : 0450884185

Chambre d’agricultureBernadette Jordan16, rue Hirmentaz - 74200 ThononTél. : 0450817800

• UNE FORTE DEMANDE fait exploser les prixde l’immobilier, du foncier et des chaletsd’alpages (10000 recensés en Haute-Savoie). Pour y faire face, les associationsfoncières pastorales (vingt-six dans ledépartement de Haute-Savoie) réunissent3800 propriétaires (34000 ha) pour gérer,coordonner les activités et équiper lesterrains qu’elles regroupent.

• MORZINE ET VAILLY, deux communes detailles très inégales sont engagées dansdes opérations de maîtrise foncière auxbénéfices des éleveurs : rénovation du bâti(étable, salle de fabrication, cave),restauration d’alpages, installation d’unenouvelle exploitation agricole, pluri-activités(repas à la ferme)… Morzine aide la récoltedes foins dans des conditionsgéographiques difficiles et reverse auxpropriétaires des pistes de ski la recetted’une taxe perçue sur les remontéesmécaniques.

• LE PÂTURAGE BOISÉ (pré-bois) est àl’essai. C’est un contrat entre deuxcultures : le forestier, qui doit concevoir quel’alpagiste ne « s’emploie » pas comme unsalarié ; et pour l’alpagiste, dont les modesd’action doivent évoluer pour que lesalpages regagnés sur la forêt ne sereboisent pas aussi vite.

• UN GROUPEMENT DE DÉVELOPPEMENTAGRICOLE (GDA) piloté par la Chambred’agriculture met en relation une vingtainede communes pour une réflexionprospective : quel rôle voulons-nous jouerdans ce territoire d’ici vingt ans?Remembrement, maîtrise de l’urbanisation,gestion des effluents agricoles, filière « lait »et « qualité », organisation du travail dansl’exploitation : rechercher plus decohérence, moins de saupoudrage.

• UNE «CHARTE DES ALPAGES, DES EAUX ETFORÊTS» doit adopter (en 2005) des «Cahiersde recommandations» concernant lespriorités:- la protection du foncier et de l’activitéagropastorale,- le respect du patrimoine culturel, paysageret architectural,- les itinéraires (pédestre, équestre, vtt…)et les usages hivernaux des alpages(raquette, ski de fond),- les modalités d’accès et de circulation desvéhicules à moteur,- la qualification et la délimitation desespaces pastoraux,- la sauvegarde des espèces, des milieux etde la biodiversité,- la préservation des ressources en eau,- l’exploitation du bois et le débardage,- les pratiques cynégétiques.

plan. Idem pour la ligne éditoriale dumédia qui applique une grille de lecturesur les faits vécus : le texte qui s’échafaudealors peut paraître divergent avec lesintentions des organisateurs. Mais, faut-ilattendre des journalistes qu’ils écoutentet retranscrivent ? Ou bien qu’ils argu-mentent, critiquent, confrontent les faitset les opinions ?Soit, leur perspective est de promouvoirune démarche : ils se contenteront d’ex-traire l’angle du sujet qui leur paraîtra leplus opportun. Un papier, un angle : c’estla règle pour être lisible. Or la réalité esttoujours complexe… Le papier est doncpartiel.Soit, leur propos est polémique, au bonsens du terme : il veut interpeller le lec-teur en émettant des opinions en contra-diction avec la version officielle, celle quevous leur avez présentée. Et le papier serapartial (le journaliste pensera : critique).

Application pratiqueJustement, après ce traitement de l’infor-mation, qu’en reste-t-il pour Leader+ etChablais ?Une réflexion collective s’est organisée :comment voit-on sa vallée, son agriculture,sa forêt, son village, dans dix ans, vingtans? Quels sont les enjeux, les actions pos-sibles, les priorités qu’on se donne ? Deschartes de territoires, des associations fon-cières, l’acquisition et la restauration d’al-

RepèresSommairesnormément...

pages et de chalets par les collectivités,des installations agricoles. Un facteurde réussite : que des élus s’emparentdes problèmes et tentent de mettre enœuvre des solutions à une échelle per-tinente. Un questionnement aussi, icicomme partout dans le monde rural :les acteurs de l’élevage sont bien làmais minoritaires, autour d’eux sedémènent quantité d’organisations,d’élus et de techniciens, aujourd’hui

inséparables de la gestion administrée dumonde rural.On notera toutefois l’absence de représen-tants d’associations écologiques ou d’or-ganismes exerçant une compétence àl’égard des espaces naturels (Réservesnaturelles, Conservatoires de sites,Diren…) dans l’organisation du périple.Comme si alpages et environnement seregardaient avec une certaine méfiance.Il semble apparaître, justement, que laprincipale vertu des programmes Leaderest d’amener les parties prenantes à tra-vailler ensemble sur le terrain. Reste queles logiques internes d’organisations nefusionnent pas automatiquement…La dynamique de projet est-elle la clé dusuccès ? ■MICHELLE SABATIERESPACES NATURELS

«L’EXISTENCE D’UNE RELATION ENTRE

DIVERSITÉ FLORISTIQUE ET RICHESSE

AROMATIQUE DE CERTAINS FROMAGES

CONFIRME QUE LA DIVERSITÉ PRAIRIALE

POURRAIT ÊTRE UNE DES QUESTIONS

CLÉ DE LA PROBLÉMATIQUE DES

TERROIRS EN MATIÈRE DE FROMAGE

ALPIN. »J-M. DORIOZ, INRA, LE COURRIER

DE L’ENVIRONNEMENT, JUIN 2000.

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 34

Politique agricole communeune question de survie La Politique agricole commune évolue. La réforme vise à adapterl’agriculture au contexte économique international tout enintégrant un développement plus durable. La responsabilité de samise en œuvre appartient aux États. Ce qui change…

31 décembre 2005. La commission euro-péenne autorisant dans certaines limites,de maintenir le couplage (le lien entre l’aideet la production), la France a choisi demaintenir ce lien au maximum autorisépar les textes.Par exemple, les cultures SCOP (surfacesde céréales, d’oléoprotagineux et dejachères aidées) restent couplées à 25 %.Cela signifie que pour percevoir 100 % del’aide qu’il percevait avant la réformel’agriculteur doit continuer les mêmesproductions. S’il fait un autre choix de production, il n’en percevra plus que 75%(bien évidemment, sur les surfaces concer-nées par les cultures SCOP).- Un calcul fondé sur la référence histo-rique. Le calcul du DPUE 2 se fait sur labase d’une référence historique individuelle,représentant la moyenne des aides directesperçues par l’agriculteur entre 2000et 2002. La France aurait pu choisircomme l’Allemagne de baser ce calcul sur

Le compromis de Luxembourg, du26 juin 2003, instaure de nouvellesrègles 1 pour une Politique agricole

commune. S’agissant du premier pilier(organisation des marchés), les modalitésde financement du secteur agricole sontprofondément modifiées. Contrairementau système actuel, les aides ne seront quepartiellement liées au type de production.La plupart des paiements directs serontdonc forfaitisés et remplacés par un Droità paiement unique à l’exploitation (DPUE)dont les modalités de mise en œuvre sontdéfinies par chaque pays membre. C’est ceque l’on appelle le découplage des aides.La responsabilité de la mise en œuvre de laréforme appartenant aux États, la France apris des options qui bouleversent le moinspossible la situation des agriculteurs, maisqui complexifient le système :- Un découplage le plus partiel possible. LaFrance appliquera le découplage dès le

Au lendemain de la SecondeGuerre mondiale, les Étatseuropéens expriment la volonté

de construire une paix durable. La miseen commun des économies semble alorsl’une des voies les plus sûres. Si bienque le 25 mars 1957, cet accord devolontés se concrétise par la signaturedu traité instituant la Communautééconomique européenne (CEE).C’est dans ce contexte qu’apparaît, en1962, la première politique intégrée,véritable ciment de la constructioneuropéenne : la Politique agricolecommune (PAC). Il s’agit d’unepolitique de soutien à l’agriculture,secteur dont l’économie est alorsparticulièrement préoccupante. Dèslors, il importe d’établir une politiquecapable d’accroître la productivité àl’échelle européenne pour enrayer lapénurie, tout en garantissant auconsommateur des prix convenables etdes produits standards.La PAC de 1962 subira nombre deréformes visant à rectifier lesincohérences du système et à répondreaux besoins et impératifs se développantau fil des décennies. C’est dans ce cadrequ’est décidée, le 26 juin 2003, unenouvelle réforme.Celle-ci a pour objectif de répondre auxexigences inhérentes aux négociationsdes Organisations communes demarché (OCM 8). Elle vise également àpréparer l’entrée des dix nouveauxmembres de l’Union européenne. Dansle même temps, cette réforme doitcontribuer au développement d’uneagriculture équitable, durable etsoucieuse des souhaits desconsommateurs quant à la qualité deleur alimentation, tout en continuant àgérer l’espace rural.

managernouvelles règles

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nouvelles règles

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Le 13 mai 2004, la Fédération des Parcsa organisé pour son réseau unséminaire intitulé « Politique agricole

commune et territoires ». Ce séminaire aconstitué une première étape pour mieuxappréhender la réforme de la politiqueagricole commune.Il en ressort une vive inquiétude pourl’avenir de ces territoires au patrimoineriche mais fragile. Les Parcs souhaiteraientune Politique agricole commune qui colledavantage aux enjeux des territoires,favorise la culture de projets collectifs etmulti-acteurs et renforce le lien entreconsommateurs et producteurs.Il existe peu de marges de manœuvre dansle dispositif pour renforcer ces aspects.L’article 69, dont le but est d’inciter lesagriculteurs à mettre en place des objectifsenvironnementaux et de qualité, pourraitconstituer une opportunité pour favoriserune meilleure prise en compte des enjeuxde territoires, pour autant que sonapplication soit possible en dehors deslogiques de secteurs. L’application de cetarticle en France n’est pas aujourd’huiprogrammée de façon certaine alors quequelques autres pays envisagentsérieusement sa mise en œuvre. Le conseilagricole, malheureusement réservé auxexploitations à fortes subventions, estégalement une piste à creuser avec lespartenaires de l’ingénierie territoriale afind’orienter les pratiques vers une meilleureprise en compte de l’environnement. Parailleurs, la réserve de droits pourrait enpriorité être redistribuée en faveur deterritoires riches et fragiles au bénéfice desprojets les plus durables.Ce séminaire a également montré combienil était nécessaire pour des espacesfragiles comme les Parcs naturels régionauxd’anticiper cette réforme à l’échelle dechaque territoire et des exploitations. Lesaides ne seront plus que très partiellementliées à une production donnée. Des choixnouveaux pourront ainsi être faits, souscondition de respect de bonnes pratiquesqui doivent être encore affinées. Orienterles choix dans le bon sens et construirel’avenir de l’agriculture des territoires passepar un travail prospectif. Cette réflexion doits’organiser avec les différents partenairesdes Parcs et en particulier les collectivitésterritoriales. C’est très certainement danscette même perspective que doiventtravailler tous les espaces protégés. ■

une répartition moyenne à l’hectare (parrégion).- Mise en place d’un mécanisme detransfert des DPUE et de taxation strictsafin de répondre à trois objectifs : freinerles comportements spéculatifs, éviter ladéprise, favoriser l’installation. Cesobjectifs sont renforcés par la mise enplace d’une réserve nationale permettantde corriger les déséquilibres éventuelsentre agriculteurs.

Offre soumise à conditions

La réforme subordonne l’octroi desDPUE au respect de normes découlantde dix-neuf règlements et directives(neuf à compter du 1er janvier 2005), aurespect de bonnes conditions agricoleset environnementales, et au maintiendes prairies permanentes (ce que l’onappelle la conditionnalité). En cas demanquement avéré, le montant de laDPUE des agriculteurs sera réduit pro-portionnellement à la gravité de la viola-tion. Ils ont tous reçu, fin décembre 2004,deux livrets explicatifs. La conditionnali-té sur Natura 2000 a, quant à elle, étérepoussée à 2006.Par ailleurs, une réduction progressive desaides directes aux grandes exploitations 3

(3 % en 2005, 4 % en 2006 et 5 % dès2007) permettra de financer le développe-ment rural (deuxième pilier de la PAC).Enfin, un mécanisme de disciplinefinancière vise à maintenir les dépenses

Repères

>>> Séminaire «PAC et territoires » des Parcs naturels régionaux :

Anticipez!1. LES RÈGLES sont établies parles règlements 1782/2003 et1783/2003 et leurs règlementsd’application.2. DPUE : Droit à paiementunique d’exploitation.3. PAR « GRANDE EXPLOITATION »,on entend celles percevantplus de 5000 eurosd’aides/an.4. LE BUDGET COMMUNAUTAIRE

atteint, pour 2005 :109,5 milliards d’euros, dont50,7 milliards attribués àl’agriculture (6,8 milliards pourle développement rural).5. ICHN : Les indemnitéscompensatoires de handicapnaturel ont pour objet decompenser des handicapspermanents tels que l’altitude,la pente ou un contexteéconomique et socialdéfavorable.6. MAE : Les mesures agro-environnementales visent àadapter les méthodes deproduction agricole auxexigences en matière deprotection de l’environnementet d’entretien de l’espacerural. Cofinancées par l’Europeet l’État, elles se traduisentpar des aides financièresaccordées aux exploitantsagricoles volontaires pourmodifier leurs pratiques.7. FEADER : Fonds européenagricole pour le développementrural.8. OCM : Organisationscommunes de marché. Ellesspécifient pour chaque famillede produits, le niveau et lesrègles d’intervention. Lesfamilles sont ainsiconstituées : blé dur,protéagineux, riz, fruits àcoque, cultures énergétiques,pommes de terre féculières ;produits laitiers, grandescultures, semences, ovins,caprins, viande bovine,légumineuses à grain.

EN 1999, L’ACCORD BERLIN AVAIT CRÉÉUN MODÈLE AGRICOLE EUROPÉEN REPOSANTSUR DEUX PILIERS : LE PREMIER PILIEREST CONSACRÉ AU SOUTIEN DES MARCHÉS, LE SECOND PILIER EST DÉDIÉ AUDÉVELOPPEMENT RURAL (CET ASPECT SERATRAITÉ DANS LE PROCHAIN NUMÉROD’ESPACES NATURELS).

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nouvelles règles

agricoles dans les limites budgétairesdécidées au Conseil européen d’oc-tobre 2002 (plafond fixé à 45 milliardsd’euros/an jusqu’en 2013 4). Son objectifest de financer l’adhésion des dix nou-veaux États membres sans réduire les res-sources disponibles pour l’actuelle Unioneuropéenne des quinze.

Le développement ruralL’accord de Berlin (1999) avait créé unmodèle agricole européen reposant surdeux piliers : le premier consacré au sou-tien des marchés, le second dédié au déve-loppement rural.Ce dernier connaît aujourd’hui un projetde réforme (projet de règlement du14 juillet 2004) présentant deux objectifs :un renforcement et une simplification dela politique de développement rural. Samise en application s’opérera dès 2007.Tandis que les mesures existantes durèglement 1257/1999 sont maintenues et,notamment, l’Indemnité compensatoire

>>> Mél : [email protected]

● ● ● suite de la page 35

de handicap naturel (ICHN) 5 et lesMesures agro-environnementales 6, lerèglement 1783/2003 instaure un nouveaumécanisme. Il incite les agriculteurs à laqualité, les soutient dans le respect desnormes, les aide s’ils décident de s’engagerdans des mesures supplémentaires. Unsystème de conseil agricole est destiné àaccompagner les agriculteurs volontairespour leur permettre de satisfaire aux exi-gences de la conditionnalité. Les Étatsmembres doivent le mettre en place auplus tard le 1er janvier 2007. Il pourraitdevenir obligatoire à partir de 2010.

SimplificationLe projet de réforme envisage égalementune réorganisation des vingt-deux mesuresde développement rural selon trois axes :- Axe 1. Amélioration de la compétitivitédes secteurs agricole et forestier : amélio-ration du potentiel humain, restructura-tion du potentiel physique, mesures tran-sitoires pour les nouveaux États membres.Un minimum de 15% de l’enveloppe natio-nale doit être consacré à cet axe.

- Axe 2. Aménagement de l’espace (utilisa-tion durable des terres agricoles -qui per-mettra notamment un financement accrudes zones Natura 2000, utilisation durabledes terres sylvicoles) : au minimum 25 %de l’enveloppe nationale.- Axe 3. Diversification de l’économierurale, amélioration de la qualité de vie enmilieu rural, acquisition de compétenceset animation : au minimum 15% de l’en-veloppe nationale.Ces axes devront intégrer ce qu’il estconvenu d’appeler « l’approche Leader »,laquelle comprend des priorités territo-riales et thématiques en matière de déve-loppement rural pour chaque axe, demême qu’une approche ascendante(local/national/communautaire).Cette simplification sera également assu-rée par le Feader 7, désormais unique ins-trument de financement de la politique dedéveloppement rural, abondé à hauteur de12,7 milliards d’euros/an. ■FRANCE DRUGMANT, CHARGÉE DE MISSION

AGRICULTURE À LA FÉDÉRATION DES PARCS

MARIE-ODILE NEURRISSE, STAGIAIRE

À LA FÉDÉRATION DES PARCS D’AVRIL À OCTOBRE 2004

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PAGE 37 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10juriste

responsabilité de l’employeur

Informer et formerOutre les instructions et règles de sécuritéqui figurent au règlement intérieur, lesconsignes données au salarié doiventprendre en compte les risques non éliminéslors du choix des techniques et méthodesde travail. Elles doivent informer le person-nel des risques résiduels présentés par letravail, lui indiquer les mesures de sécuritéà prendre et, si nécessaire, exiger le portd’équipements de protection individuelle.Cette obligation d’informer prend égale-ment corps dans le Document unique deprévention des risques. Mis régulièrementà jour, celui-ci est à la disposition de tous(voir Espaces naturels n°9). Par ailleurs,le chef d’entreprise est tenu d’organiser etde dispenser à tous les salariés une infor-mation sur les risques et les mesures deprévention prises. Les cadres, nouveauxrecrutés, salariés temporaires ou ceux quichangent de fonction doivent recevoir uneformation sur ce thème.L’employeur doit également examiner lescapacités des salariés à prendre les pré-cautions nécessaires. Il doit consulter leséventuels représentants du personnel,notamment pour l’introduction de nou-velles technologies et leurs effets.

Depuis la loi du 31 décembre 1991(reprise par l’article L.230-2 ducode du Travail), les employeurs ont

l’obligation de s’engager dans unedémarche de sécurité globale à l’égard deleurs salariés. La jurisprudence a graduelle-ment amplifié cette exigence. Aujourd’hui,au-delà de simples moyens et objectifs, ellea constitué une obligation de résultat 1.Pour synthétiser : l’employeur doit toutfaire pour atteindre le zéro accident doubléd’un zéro maladie professionnelle (et il a ungrand intérêt à les atteindre!).En cas de litige ou d’accident, la jurispru-dence se fonde sur la conscience, laconnaissance et l’évaluation des risquespar l’employeur. Elle reconnaît même lafaute inexcusable s’il est démontré quel’employeur était conscient du risque. Lesjuges cherchent à estimer s’il y a eu res-pect et adaptation permanente de l’entre-prise aux neufs principes généraux de pré-vention, ainsi définis :- éviter les risques ;- évaluer les risques évitables ;- combattre les risques à la source ;- adapter le travail à l’Homme (conceptiondes postes de travail, choix des équipements,des méthodes de travail et de production ;limitation du travail monotone et cadencéet anticipation de leur effet sur la santé…);- tenir compte de l’évolution technique ;- remplacer ce qui est dangereux par cequi ne l’est pas ou par ce qui l’est moins ;- planifier la prévention avec cohérence ens’intéressant à la fois à la technique, l’or-ganisation du travail, les conditions detravail, les relations sociales et l’influencedes facteurs ambiants ;- prendre des mesures de protection (lescollectives sont prioritaires sur les mesuresindividuelles) ;- donner les instructions appropriées auxtravailleurs.

Conséquences juridiquesEn cas de non-respect de ces obligations etsi la faute inexcusable est retenue, l’em-ployeur peut : - voir son taux de cotisation accident detravail relevé (Cram) et complété CPAM,- être condamné à verser à l’intéressé lesindemnités journalières accident de travailet à régler rente majorée et dommages-intérêts ;- subir l’engagement de sa responsabilitéfinancière personnelle au regard de la CPAM.Au titre d’homicide involontaire (risquemaximal en droit pénal), les sanctions peu-vent aller jusqu’à trois ans d’emprisonne-ment et 45000 euros d’amende.Le salarié, quant à lui, n’est pas affranchide toute responsabilité. En effet, il doitprendre soin de sa sécurité et de sa santé,mais aussi de celles des autres personnesconcernées par ses actes au travail ou sesomissions d’agir. Les juges sont sévèresavec les salariés surtout si l’employeur arespecté ses propres obligations. ■

PATRICE PARTHENAYCONSULTANT

L’obligation générale de sécuritéfaite aux employeurs

1. Cass.soc. 28février2002 BC Vn° 3 •cass. soc.26novembre2002, BC Vn° 356 •cass. soc.2003, n° 560FSD.

>>> Mél : [email protected]

En 2001, 737499 accidents du travailavec arrêts ont causé 730 décès ;24220 maladies professionnellesindemnisées pour la première fois ontété suivies de 318 décès.

CORRECTIF : contrairement à ce que nousindiquions dans notre précédent numéro, lesemployeurs de la fonction publique sont tenusde réaliser un Document unique d’évaluationdes risques professionnels.

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 38

Dix ans auront été nécessaires avant de réintroduire le cheval dePrzewalski dans son milieu d’origine: la Mongolie. Le fruit d’unelongue préparation en Lozère et dans le Khomiin Tal.

Le projet remonte à 1990. Pourredonner sa liberté au cheval dePrzewalski et afin de le réintroduire

en Mongolie, aire historique de l’espèce,l’association « Takh » 1 voit le jour. Saspécificité réside dans une prise encompte très poussée du comportementde l’espèce dans son milieu naturel(éthologie).

La préparation au VillaretC’est en Lozère, sur le causse Méjean que«Takh» élève des chevaux de Przewalski.Venus de zoos, les fondateurs du trou-peau sont arrivés en 1993 et 1994.Ils vivent là, en semi-liberté, sur ce pla-teau calcaire lozérien qui réunit desconditions naturelles très proches decelles de la Mongolie. L’élevage, qui s’étendsur presque 400 ha, est situé dans le Parcnational des Cévennes. Si les interven-tions humaines sont quasi inexistantes

(généralement les animaux ne sont pasnourris, les juments poulinent seules,aucun vermifuge n’est administré…), unmonitoring sanitaire et éthologique trèspoussé est par contre appliqué.Aujourd’hui, les chevaux ont retrouvéleurs aptitudes à se nourrir et à se repro-duire seuls. Ils ont pu, chose extrême-ment importante, reformer la structurefamiliale en harem, caractéristique deschevaux vivant en liberté. Un harem secompose d’un étalon, de une à troisjuments et de leur progéniture jusqu’à lapuberté. Dans cette structure, chacunjoue un rôle précis et indispensable à lasurvie de l’espèce : les poulains transmet-tent le patrimoine génétique de leursparents ; les juments expérimentées sontà l’initiative des déplacements à caractèrealimentaire ; les étalons protègent lesjeunes des prédateurs. Le maintien decette structure familiale est donc fonda-mental pour que l’adaptation à un nouveau milieu ait toutes les chances deréussir. C’est pourquoi il est nécessaire de

transplanter des familles formées delongue date et dont la structure est parfai-tement rodée. Au Villaret, en dix ans, plu-sieurs familles ont pu se constituer. Lesdonnées éthologiques, recueillies depuisle début du projet, permettent d’affirmerque certaines familles sont parfaitementaptes à être transportées en Mongolie.

La préparation en MongolieConformément aux directives del’Alliance mondiale pour la nature(IUCN), les lâchers de chevaux furent pré-vus dans un espace protégé ; à savoir dansla région de Khomiin-Tal, une zone péri-phérique du Parc national de Khar-Us-Nuur dans l’ouest du pays.En l’échange du financement pour laréhabilitation de puits, « Takh » a obtenudes autorités locales qu’elles mettent unespace de 13000 ha à disposition exclusivedu cheval de Przewalski. Réservée pourtrente ans, la zone a été clôturée en 2003,permettant à la steppe de bénéficier d’uneannée de pousse sans aucun prélèvementpar les troupeaux. Cette clôture limite,par ailleurs, les risques d’hybridation avecles chevaux domestiques. Et, de la mêmemanière, elle supprime la concurrenceavec le bétail pour l’herbe.

LLee rreettoouurr àà llaa lliibbeerrttéé dduu ddeerrnniieerrcchheevvaall ssaauuvvaaggee

1. Cheval de Przewalskien languemongole.

2.Partenairessurl’opération de transport :WWF-Mongolie,WWF-France,ITG, Tour duValat, Parcnational desCévennes,RégionLanguedoc-Roussillon.

3.InternationalTakhi Group.

ailleurscoopération internationale

MONGOLIE : SITE DE LÂCHER.

© Frédéric Joly/Takh

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>>> Tour du ValatLe Sambuc, 13200 ArlesMél : [email protected]él : 04 90 97 23 13 www.tourduvalat.org/rubrique : structures hébergées>>> Possibilité de participer à des stages d'éthologie équine.

La réimplantation des chevaux

Une fois les familles choisies et le sited’accueil prêt, les chevaux devaient encoreparcourir 6000 km. Septembre semblaitfavorable. La densité en insectespiqueurs avait décru après le pic estivalet la température était encore clémente.Le premier transport eut lieu en 2004.Au Villaret, douze chevaux furent char-gés dans des caisses individuelles. Ilsfurent ensuite amenés, par camion, jusqu’à l’aéroport de Nîmes-Garons �. Unvol long-courrier � les a alors acheminésjusqu’à Khovd (mille kilomètres à l’ouestd’Oulan Bator, capitale de la Mongolie).C’est un avion cargo de Miat (la compa-gnie mongole) qui les a transportés jus-qu’au centre de Khomiin Tal �. La fin duvoyage (jusqu’au site de lâcher clôturé �)fut assurée par un camion tout terrain.L’ensemble du transport aura duré plusde quarante heures (enfermement dansles caisses et phase de test de nervositécompris) 2. Pendant toutes ces phases, leschevaux ont voyagé sous tranquillisants.Les soigneurs de l’association ainsi qu’unvétérinaire de l’ITG 3 ont assuré uneconstante surveillance.

Le futur à Khomiin Tal…Ces douze chevaux seront rejoints pardouze autres en 2005. En tout, vingt-quatre individus seront les fondateursd’une population qui, à terme, doit êtreviable et autonome.La capacité d’accueil du site devrait êtreatteinte d’ici dix à quinze ans. Un temps,qui sera d’ailleurs mis à profit pour mettreen œuvre un plan de pâturage valable pourle reste de Khomiin Tal. Après le contextepolitique mouvant qu’a connu la Mongolieau début des années 90, ce plan s’avèreessentiel : il devrait permettre de prévenirles risques de surpâturage.Ce plan sera couplé à un programme dedéveloppement local en partenariat avecle WWF Mongolie, l’administration duParc de Khar-Us-Nuur, les ONG compé-tentes et bien sûr «Takh». Ce programmepermettra au cheval de Przewalski et auxautres ongulés sauvages de cohabiter enbonne intelligence avec les troupeaux desNomades ; constituant de ce fait une pré-vention contre les facteurs qui ont faitdisparaître l’espèce au siècle dernier.

Et en Mongolie…Deux autres réimplantations du mêmetype ont déjà eu lieu en Mongolie : à1000 km à l’est et 400 km au sud dans desParcs nationaux. Cette séparation géogra-phique permet de disperser les risques liésà une catastrophe climatique (événementfréquent en Mongolie), épidémique ouautre. À terme, des échanges d’individusseront organisés pour assurer un mini-mum de brassage génétique. Et, dansquelques dizaines d’années, quand les che-vaux seront assez nombreux pour se dépla-cer et se rencontrer entre populations,alors nous pourrons dire : le cheval dePrzewalski est redevenu libre ! ■

FRÉDÉRIC JOLYASSOCIATION POUR LE CHEVAL DE PRZEWALSKI : TAKH

Le cheval de PrzewalskiEquus ferus przewalskii estle seul cheval véritable-

ment sauvage: il n’a jamais été ni dresséni attelé ni monté. Il a été découvert à la findu 19e siècle par Nicolaï Przewalski, alors enexpédition entre la Chine et la Mongolie. Cecolonel de l’armée impériale russe lui alégué son nom. Cette découverte aura un telretentissement en Europe qu’elle entraînerade vastes campagnes de capture à l’initiativede zoos ou d’élevages privés. Ces cam-pagnes, ajoutées à la concurrence des trou-peaux domestiques pour l’herbe et des casde braconnage sporadiques, entraîneront ladisparition de l’espèce 1. Les derniers indivi-dus en liberté furent observés dans lesannées 70 en Mongolie. Les spécimens cap-turés par les zoos permettront toutefois àl’espèce de ne pas disparaître de la surfacede la Terre. Après des débuts difficiles, lareproduction en captivité marchera plutôtbien. Ainsi, bien qu’elle ne descende que detreize individus, la population mondiale attein-dra 1600 chevaux à la fin du 20e siècle. ■

1. En fait, sous-espèce de son cousin lecheval domestique, Equus ferus caballus.VOYAGE EN SOUTE.

Contexte

▼ LÂCHER.

▲ IL N’EXISTE, NI AÉROPORT NI PISTE EN ASPHALTE, MAIS LES

PILOTES MONGOLS SAVENT ATTERRIR À MÊME LA STEPPE.

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ailleurscoopération internationale

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ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 40lecteur

penseur

Oui, je sais, mon propos est impertinent, non conforme….Mais dois-je taire mes doutes? Suis-je payé pour nejamais m’interroger sur l’efficacité des programmes

européens, et plus spécifiquement sur celui que j’ai suivi : leprogramme Phare en Pologne?Là-bas, l’Europe finance les conditions d’un partenariat avecd’autres pays afin que la Pologne gagne du temps et construiseplus rapidement son réseau Natura 2000.Mais entrons dans les faits, puisque les faits nous interpellent :un appel d’offre international fut lancé au printemps 2004.Inspiré du guide méthodologique français, le cahier des chargesspécifiait qu’il convenait d’« aider à la réalisation de sept Docobdans sept sites pilotes choisis par le ministère del’Environnement polonais ». Le tout devant être bouclé endécembre 2004 : sept mois plus tard.Des cabinets polonais ont soumissionné. C’est une entrepriseitalienne qui fut retenue.Sept Docob, sept sites, sept mois… c’est drôle ce chiffre septqui revient tout le temps, d’autant qu’en France il a fallupresque dix-huit mois pour que le moindre site commence àbalbutier son Docob ; pour que celui-ci soit élaboré dans desconditions de concertation réelles.Ils sont rapides les consultants étrangers…! Surtout lorsquel’on sait qu’ils sont parachutés sur le site, sans connaissancesni de l’histoire, ni de la culture locale. Sans suivi ultérieur.J’imagine ce que l’on dira plus tard : « Les résultats deséchanges internationaux et des jumelages ne sont guèreconcluants. » Comment le seraient-ils ?On veut des documents? Ils seront produits. Mais seront-ilsutiles, seront-ils utilisables?Et puis (vous voulez le fond de ma pensée ?) : qui mandateréellement l’expert ? Quelle place laisse-t-on au pilotage local ?Si j’étais responsable d’un site, j’aimerais bien qu’un regardextérieur m’aide à mettre en perspective les connaissancesaccumulées. J’aimerais aussi que l’on me soutienne afin quesoient valorisés les efforts passés et les actions quotidiennes.Mais n’est-ce pas l’inverse… Comme si, en participant à desprogrammes européens, on contribuait à faire une Europe de

« projets de papier » : descriptifs parfaits, rigoureux, objectifsévaluables.Et… dans les faits, aucune vérification d’un effet tangible.D’ailleurs, qui mesure l’effet psychologique produit quand lesbudgets généreux de l’Europe arrivent dans un pays connaissantla gêne financière? Qui demande l’avis des gens de terrain surla meilleure façon de dépenser cet argent ?Le fait est : la confrontation des modèles de pensée est de plusen plus réelle. D’un côté il y a les rouleaux compresseurs d’unmodèle libéral, les grandes ONG avec plusieurs centaines demilliers d’adhérents, les jeux opaques de lobby, les experts.Ceux-là sont champions du raisonnement cartésien : ilsvéhiculent un modèle théorique, un process qu’il faut appliqueravec l’aide d’un érudit, en gommant les singularités.D’un autre côté, il y a les réseaux de coopération, demutualisation. Ils jouent la transparence et comptent sur desapports réciproques pour alimenter l’effort commun. C’estl’espace de la méthode empirique, l’espace de la penséecomplexe et systémique. C’est le monde de « la base aux mainscalleuses ».Si l’écart entre ces approches grandit, quelles seront lesconséquences sur l’efficacité des actions européennes? Sur laprotection de la nature?Enfin, pour ce cas particulier de la Pologne, un sociologuepourrait-il dire comment ces façons de faire sont perçues par lesmembres d’une société dont l’histoire est faite dedémantèlements, de passages sous des tutelles diverses, voirede disparitions pures et simples? Ce n’est qu’en 1945 que laPologne est reconnue comme un pays avec des frontières et ungouvernement autonome, et encore, la domination soviétique n’adisparu que récemment… mais c’est un autre débat. ■

GERVAIS PETIT - GESTIONNAIRE D’ESPACES NATURELS

“Humeur de la Baltique

Mais que finance l’Europe?

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Je suis co responsable d’unMaster Pro intitulé «GénieÉcologique ». J’ai pu

consulter un exemplaired’Espaces naturels et ilconstitue une sourced’informations indispensablespour nous enseignants, et pourles étudiants de notre Master.Aussi, je viens de prendre deuxabonnements (un pour lesenseignants, un pour lesétudiants) et commander tousles numéros précédents. La lecture des numéros que je viens de recevoir ne fait que confirmer ma premièreimpression mais je souhaiterais compléter la collection, or deux desnuméros sont épuisés. Le numéro 1 est épuisé

également mais vous le proposiez sur votre site,téléchargeable en format PDF.Serait-il envisageable d’obtenirles numéros 3 et 6 de cettefaçon? Ou bien envisagez-vousde les rééditer ? J’espère quevous pourrez accéder à mademande, votre revueconstituant à mes yeux un document de référence. ■

ROLAND RAIMONDFACULTÉ DES SCIENCES DE POITIERS

NDLR : Dorénavant, cher lecteur, vous pouveztélécharger les numérosépuisés au format PDF sur la page d’archives du site de l’Aten.>>> www.espaces-naturels.fr

numéros épuisés

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PAGE 41 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10

Partout en France fleurissent déchetteries et points de collecte

sélective auxquels s’associent divers containers pour les

verres, papiers, cartons et emballages. Chacun est incité à

trier… Chacun est encouragé à économiser les ressources, à limiter

les pollutions, à protéger l’environnement. L’effort d’éducation fut

(est) tel, que la majorité des citoyens a abandonné le geste fatal

consistant à jeter n’importe quoi, n’importe où, le plus vite possible.

Cette révolution culturelle s’est d’ailleurs réalisée rapidement,

prouvant notre capacité à réagir devant un environnement menacé.

Tant mieux ! Reste encore de petites poubelles, non sélectives,

installées sur les aires de repos des voiries, le long des rues des

villes, dans les cours d’école, sur les espaces verts ou les parkings

de grandes surfaces… Il faut les dénoncer. Leur influence est

néfaste et contre-productive. En effet, la contradiction est lourde

entre, d’un côté, les sommes investies dans la création de

déchetteries et dans l’effort éducatif… Et, de l’autre, l’implantation

d’un mobilier urbain qui offre la possibilité de jeter tous les déchets

pêle-mêle. Quand on sait l’importance, en matière d’éducation,

d’être cohérent et de défendre sans faillir la même logique, on

mesure le risque d’un retour en arrière.

Sans compter qu’il n’est pas pertinent de déplacer une benne à

ordures sur un grand parcours, pour récolter quelques kilos de

déchets non triés. En période de vacances d’ailleurs, aucune

collectivité ni aucun service de l’État ne sont capables de gérer

correctement ces poubelles. Du même coup, celles-ci incitent plutôt

au dépôt anarchique de déchets.

Devant l’aberration pédagogique et technique de ces poubelles

dangereuses, certains réagissent : ainsi l’Office national des forêts

déséquipe les parkings forestiers. On y est venu en voiture. On peut

donc repartir avec ses déchets et les gérer chez soi.

Cette politique nécessite, bien sûr, un nettoyage régulier des

espaces. Si le site est propre, les citoyens hésiteront à le salir.

Au contraire, si la poubelle déborde, qu’elle est éventrée par les

chiens ou les renards, elle incitera les comportements négatifs.

D’autres initiatives confortent cette réflexion et méritent d’être

imitées, c’est le cas de l’aéroport de Munich, où la poubelle se

compose de trois mini-containers (verre, papier, autres). On notera

aussi que la Ville de Paris vient de mettre en place des poubelles

sélectives dans sept espaces verts ; qu’au centre Terre vivante de

Mens (38), les poubelles des espaces de jeux et de pique-nique

possèdent des bacs spécialisés ; que, dans les bureaux, les

employés de la mairie de Crolles (38) disposent de poubelles avec

un casier spécial papier.

Il importe donc de bien réfléchir aux effets pervers de l’installation

et du maintien de poubelles non sélectives, contradictoires avec nos

objectifs de recyclage. C’est également aux entreprises spécialisées

de nous proposer un mobilier urbain plus adapté et conforme. En tout

état de cause et, au minimum, la mention «Ne jeter que les déchets

non recyclables » devrait figurer sur ces poubelles.

Ainsi nous aurons une chance de réellement progresser vers une

société plus propre.■ JEAN-FRANÇOIS NOBLET

dangerPoubelles

Qu’est-ce qui n’est pas durable à l’échelle de lamilliseconde? À cette échelle, on pourrait mêmeparler, sans faire rire, de l’espérance de vie des

éphémères. Et pourtant… c’est bien un peu de cela qu’ils’agit quand on parle de développement durable : de la relationentre le temps, l’action et ses effets.L’Homme a spontanément tendance à limiter l’échelle de sontemps à sa propre durée : le temps humain. Quand sa penséeprospective s’aventure au-delà de la limite qui conclut sa vieconsciente, son quotidien de physiquement vivant, c’est leplus souvent pour signifier égoïstement son passage à lapostérité, pour signer au-delà de lui-même son existencepassée.Les cimetières sont pleins de ces symboles.Vision bien étriquée, tellement contradictoire avec l’idée mêmede durabilité ! Pourtant, parler de développement durable, c’estsortir du temps humain, c’est passer de cette échelle dutemps à celle qui ouvre la perspective d’une solidarité avecnos suivants (non seulement les nôtres, directs, mais ceux dela multitude anonyme), c’est commencer à envisager le tempsdes humains dans leurs successions.Il est d’ailleurs une autre échelle du temps encore plusétriquée et perverse dans ses effets : le temps du mandat.Celui-ci impose de rendre des comptes au présent,simplement au présent. Celui dans lequel l’avenir importe peu.Celui dans lequel les seuls censeurs sont les contemporains.Que l’on s’affiche conservateur ou progressiste ne change rienà l’affaire.Et la conscience humaine, et les valeurs là-dedans? Rien n’estsimple en ce bas monde et même ceux qui, laïques oureligieux, prêchent le bien et la solidarité peuvent être pris aupiège de leur propre générosité. Comment concilier le principede durabilité avec le précepte fondateur judéo-chrétien«Croissez et multipliez » que l’on traduit aujourd’hui dans lelangage économico-laïque contemporain par le terme«croissance»? ■ LUCRÈCE

Tout est durable

Parler dedéveloppementdurable,c’est sortir du tempshumain.

Question de temps

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PARUTIONS ESPACES NATURELS • N° 10 • AVRIL 2005 • PAGE 42

● Aménagement

● Biodiversité

Biodiversité etchangement global.Dynamique desinteractionsScientifiques etdocumentés, ces actesde colloque dressent unétat de la recherche surles risques desdérèglementsclimatiques et leurimpact sur labiodiversité. Discours,contributions, tablesrondes et débats…toutes les figures destyle d’un recueild’actes de colloque sont au sommaire. Lesthèmes de rechercheabordent tous lesaspects du problème:mesures, dynamiques,prospectives et moyensd’action.ACTES DES DEUXIÈMES JOURNÉES

DE L’INSTITUT FRANÇAIS DE LA

BIODIVERSITÉ • 140 PAGES •SUR DEMANDE À L’IFB :[email protected]

● Usages● Conservation

La cohabitationHommes/grandsprédateurs en FranceLoups et ours peuvent-ilscohabiter avec lesactivités humaines?Quelles sont lesdifficultés et quelle est laposition des acteurslocaux? Ces questionsd’actualité trouvent ici untraitement de fond.Chercheurs et acteurs deterrain y présentent leurstravaux. Aux chapitresconsacrés au loup et àl’ours, s’ajoutent unregard sur desexpériences étrangères etune réflexion sur lepastoralisme.RECHERCHES NATURALISTES

EN RÉGION CENTRE N°14 •216 PAGES • 12 EUROS •WWW.NATURECENTRE.ORG

● Écosystèmes

● Droit ● Commande publique

● Écosystèmes

Gestion des plantesexotiquesenvahissantesLes Pays de Loire sontconfrontés à laprolifération des plantesenvahissantes en coursd’eau et zone humides.Afin de coordonner leursmoyens, institutions,scientifiques etgestionnaires se sontregroupés en comitétechnique. Ce guide estle fruit de leurs travaux.Les outils qu’il proposeintéresseront lesgestionnaires.GUIDE TECHNIQUE • 70 PAGES •À TÉLÉCHARGER SUR LE SITE DUFORUM DES MARAIS ATLANTIQUES :WWW.FORUM-MARAIS-ATL.COM

ajoutée pour lespraticiens. Onappréciera aussi larichesse des notes derenvoi qui font, tour àtour, appel aurèglement, à lajurisprudence et à ladoctrine. Les lecteursd’Espaces naturelsferont un détour par lechapitre surl’application du critèreenvironnemental.

JÉRÔME MICHON • 520 PAGES •ÉD. LE MONITEUR • 48 EUROS

WWW.EDITIONSDUMONITEUR.COM

Dégâts dus auxsangliers: que faire?Certes, ces sangliers-làsont suisses, mais cetopuscule sera précieuxà tout gestionnaireconfronté aux dégâtsdes sangliers. On ytrouve un inventaire etun calendrier desdégâts selon les milieuxet les saisons.L’ouvrage comporte unoutil d’aide au choix destechniques deprévention et secomplète d’un descriptifde chaque mesure.24 PAGES • DIFFUSION : SERVICE

ROMAND DE VULGARISATION

AGRICOLE • 12 EUROS •[email protected]

● Gestion

L’édition 2004 de ceclassique est bienentendu consacrée au nouveau code des marchés publics. Le plan, construit sousforme de questionspratiques, couvre toutle champ de lacommande publique,du choix d’unestratégie jusqu’à lamise au point dumarché. De nombreuxschémas, tableaux etguidesméthodologiquesapportent une valeur

Construire ensembleun développementéquilibré du littoralRiche, fragile etconvoité, le littoralconstitue un enjeumajeur pour unepolitiqued’aménagement duterritoire. Après avoirdressé un état des lieux,la Datar propose quatreobjectifs d’action pourune politique dedéveloppement durablequi conjugue protectionde l’environnement,régulationdémographique etfoncière, développementéconomique etpromotion de l’identité.Le dernier chapitre estconsacré aux outils.DATAR • 160 PAGES • LA DOCUMENTATION FRANÇAISE •18 EUROS •WWW.LADOCUMENTATIONFRANCAISE.FR

Nouvelle réglementation marchés publicsMémento de laréglementationenvironnementalefrançaise et européenneCe guide propose unpoint complet sur lesréglementationsapplicables à chacundes secteurs del’environnement(déchets, eau, air…).Un mémento tout encouleur, accessible auplus grand nombre.P. MELQUIOT • 152 PAGES •RÉCYCONSULT • 20 EUROS •WWW.ACTU-ENVIRONNEMENT.COM

Stratégieeuropéenne relativeaux espècesenvahissantesCe recueil constitue lafeuille de route des 45États du Conseil del’Europe en matière deprotection de labiodiversité indigène. Ilpropose une stratégiecoordonnée de luttecontre les effetsdévastateurs de ladissémination desespèces envahissantes.Le texte va à l’essentielet s’enrichit de nombreuxencadrés et exemplesde bonnes pratiques. Un tableau final dresseun inventaire desinstrumentsinternationaux.SAUVEGARDE DE LA NATURE N°137• 76 PAGES • ÉD. DU CONSEIL

DE L’EUROPE • 10 EUROS •HTTP ://BOOK.COE.INT

Camargue incertaineHistorique,géographique,biologique, économiqueou sociologique…Raphaël Mathevetcroise les regards.Prenant la Camarguepour exemple, iltémoigne des usagescontemporains deszones humides etsouligne la difficilepréservation de lanature. Un essai quimet en perspective lesinteractions entreévolutionssocioéconomiques etécologie des milieuxnaturels.La qualité d’écrituremérite d’être soulignée.Elle invite à la lecture.RAPHAEL MATHEVET •

200 PAGES • BUCHET-CHASTEL ÉCOLOGIE •15 EUROS • DIFFUSION SEUIL

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Patrimoine de paysDimanche 19 juinLa Journée du

patrimoine de pays veutpromouvoir le patrimoine

rural non protégé, endonnant l’opportunité au public dedécouvrir des sites ou des savoir-faire. Le thème de cette

8e édition: «Fer, verre. Utiles et décoratifs». Organisé par la Fnassem.◗ www.associations-patrimoine.org

PAGE 43 • AVRIL 2005 • ESPACES NATURELS • N° 10 l’AGENDA● Écophysiologie

Les poissons et leurenvironnementCe volumineux traitéd’écophysiologie offreun inventaire desconnaissances sur lesmécanismesphysiologiques et lescomportementsadaptatifs despoissons. Il estorganisé en troisgrandes partiesabordantsuccessivement lesécosystèmes etl’évolution, lesexigencesécophysiologiques etles stratégiescomportementales. Lepropos est richementillustré de plus de 800schémas et graphiquesexplicatifs. Un ouvragede référence, pourlecteur averti.JACQUES BRUSLÉ & JEAN-PIERRE

QUIGNARD • 1522 PAGES • TEC

& DOC • LAVOISIER • 295 EUROS.

OISEAU MENACÉ

Pratiques des sports de pleine nature20 et 21 mai - SalavasC’est en Ardèche que sedéroulera ce séminaire organisépar Réserves naturelles deFrance. Des ateliers sur le terrainpermettront d’échanger, dans lecadre d’une pratique sportive,sur les problématiques degestion des sports de nature. Sixateliers thématiques (en salle)sont également prévus: mise enplace d’un plan de circulation,réglementation de l’espaceprotégé, sensibilisation du public,formation des encadrants,études de fréquentation.◗ www.reserves-naturelles.org

Plantes envahissantes des régions méditerranéennes25 - 27 mai - MontpellierAtelier international de travail

organisé par le Conservatoirebotanique national méditerranéende Porquerelles.◗ [email protected]/workshop

Développement durable30 mai au 5 juinPour de plus amplesrenseignements surl’organisation de la Semaine dudéveloppement durable, sereporter au site du ministère. ◗ www.ecologie.gouv.fr

Rencontres entomologiques3 et 4 juin - Nièvre«Les insectes : de l’inventaire à la gestion», sur ce thèmeprofessionnels et amateurs duGrand Ouest pourront échangersur leurs expériences.◗ Tél. : 0380675289Mél : [email protected]

Évaluation environnementale et développement d’une agriculture durable20 au 24 juin - AngersL’association «Secrétariatinternational francophone pourl’évaluation d’impact» (SIFEE)organise son 10e colloqueinternational annuel sur le thème,annoncé en titre. ◗http://www.sifee.org

Odonates24 - 27 juin - Vallet (44)Au programme de cesrencontres : communicationsscientifiques et tables rondessur les différentes approches del’odonatologie, sans oublier lessorties sur le terrain (près deNantes).◗ Tél. : 0134601122Mél : [email protected]

Énergie et climat1er juillet - ParisSubir ou conduire les mutations?Ce colloque en direction des élus et professionnels se déroulera au palais du Luxembourg.◗ Collège des hautes études de l’environnement et du développement durableTél. : 0141131500

Outils pour la gestion des prairies naturelles6 au 8 juillet - ToulouseCe symposium internationalorganisé par l’INRA, s’adresse àceux concernés par les fonctionsagricoles ou environnementalesdes prairies naturelles:chercheurs, conseillerstechniques, décideurs,étudiants…◗ http ://capoul.toulouse.inra.fr/centre/vista-wp5/

COUP DE CŒURSites naturels de PicardieUne petite musique, sensible et nostalgiques’en dégage: voici un opuscule quimériterait un opus. Faites le détour par cet inventaire de sites et, surtout, prêtezattention aux photos et à leur légende.◗ Conservatoire des sites naturels de Picardie • 36 pages • 10 euroshttp ://www.conservatoirepicardie.org

«C’est merveilleux pour les enfants dedécouvrir une richesse exceptionnelle à portéede leur main… Ils peuvent ainsi se valoriser etsouvent, ils sensibiliseront leurs parents. »

Martin-pêcheurDécouvrir le monde

fascinant des oiseaux dubord de mer pour mieuxle respecter. Tel est le

credo de cette collectionsur les oiseaux du littoral.

Le texte est simple etconviendra aux petitscomme aux grands.

L’illustration crayonnée etchaude du pastel sertavantageusement le

propos pour nous offrirune véritable proximité

avec l’oiseau. Les autresvolumes de cette

collection sont autantd’invitations : macareuxmoine, flamant rose,sterne pierregarin,

cormoran huppé, fou deBassan, avocette

élégante…Un ouvrage recommandé

par la LPO.>>> P. Huet

& J. Chevallier •Conservatoire du littoral• Hesse • Dexia éditions

• 11 euros

© Christian Baraja

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