André Morin/Le Crédac Voyage au...

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76 Les Inrockuptibles numéro 596 / 2 mai 2007 EXPOS CETTE SEMAINE VERNISSAGES MIRCEA CANTOR A partir du 4 mai à Reims Le Frac Champagne- Ardenne offre à l’artiste roumain Mircea Cantor sa première expo monographique en France. Une exposition intitulée Ciel variable, mi-apocalyptique mi- cosmogonique, qui retrace la pensée non linéaire d’un artiste qui pratique avec la même aisance la photo, la vidéo, l’installation, l’écriture ou l’édition. Au Frac Champagne-Ardenne, 1, place Museux, tél. 03.26.05.78.32, www.frac-champagneardenne.org JOACHIM MOGARRA A partir du 4 mai à Marseille Le Frac Paca rend hommage au photographe d’origine espagnole Joachim Mogarra. L’occasion de découvrir, avec cette exposition, ses mises en scène délicates composées d’éléments du quotidien détournés avec humour et tendresse. Au Frac Paca, 1, place Francis-Chirat, tél. 04.91.91.27.55, www.fracpaca.org ELINA BROTHERUS A partir du 3 mai à Genève Au Centre pour l’image contemporaine, la photographe d’origine finlandaise Elina Brotherus expose l’une de ses dernières séries, The New Painting, dans laquelle elle confronte son écriture photographique aux codes et à l’esthétique de la peinture classique. Au Centre pour l’image contemporaine, 5, rue du Temple, tél.00.41.22.90.82.000, www.sgg.ch N ous plongeons progressivement dans les profondeurs du sous-sol en béton – stop. Là, les bruits de la ville très vite ne nous atteignent plus. Aucun espace n’est pourvu de fenêtre. Au- cune communication avec l’extérieur. Une fois là, nous sommes coupés du monde – stop. Le centre d’art est une île. Un laboratoire. Comme ce bunker que les rescapés de la série Lost découvrent au cœur de la jungle. Nous descendons toujours un peu plus – stop. Latitude Est, une barque en bois nous attend, échouée sur le sol blanc de la salle d’exposi- tion – stop. On raconte qu’une certaine Thu Van Tran l’aurait construite sur le toit d’un immeuble, et déplacée jusqu’ici. Mais com- ment ? Sur la barque, une partie de go a été commencée. Nous en faisons le véhicule mental et symbolique de notre expédition – stop. Egarés avec nous, les géologues confirment la présence continue de sols en pente douce. Nous remarquons en silence l’absence de tout effet scénographique – stop –, rien d’autre que la vérité nue des œuvres choisies par les deux commissaires de l’expédition, fichés aux noms de Jean-Paul Felley et Olivier Kaeser. On rap- porte qu’ils dirigent à Genève un autre labo- ratoire de recherches, le centre d’art “atti- tudes”. Les espaces d’art communiquent leurs isolements – stop. Nous continuons notre avancée. Virage à droite, latitude Est-Ouest, altitude stabilisée – stop. L’expédition est maintenant maritime. Par le hublot, nous apercevons les variations climatiques du monde antarctique. Nous restons là des heures, peut-être même des jours entiers, balancés par le mouvement des flots. Sur le mur du fond, nous visitons du regard un lieu désaffecté, occupé par une co- lonie de phoques, vieux port de pêche à la ba- leine de l’île de Stromness, au sud-est des Ma- louines – stop. Sur la paroi blanche, l’artiste expéditionnaire Simon Faithfull a accroché quelques-uns des trois mille dessins réalisés avec son Palm Pilot. Comme un carnet de notes, un journal de voyage. Nous nous ap- prêtons à redescendre – stop. Soudain, une remontée d’alcool : à l’entrée de l’antre, un étrange personnage au nom d’ex- plorateur, Samuel Herzog, nous a servi trois rhums différents provenant de l’île fictive de Santa Lemusa. Nous sentons s’augmenter en nous les sensations physiques de la perturba- tion spatiale. Plus au Sud – stop – latitude Ouest, très basse altitude, espace confiné. Le site dévoile un atoll pacifique construit par un certain Peter Regli au beau milieu d’un lac de Suisse cen- trale. Notre rapport d’activités enregistre ce dérèglement de l’ordinaire du monde sous le titre Hacking Reality, dossier “RH 200”. L’île a la forme d’un point d’exclamation – ou d’in- terrogation ? – stop. Nous abordons enfin les basses profondeurs – stop. Obscurité, raréfaction de l’air. Suspen- due au plafond, une immense sculpture en bois des frères Chapuisat, Métamorphose d’im- pact, dissimule en son centre une excavation encore inexplorée – stop. L’un après l’autre, nous rampons sous la structure pour en at- teindre le centre… Fin de la transmission. Jean-Max Colard Jusqu’au 20 mai au Crédac, 93 av. Georges-Gosnat, Ivry-sur-Seine (94), tél. 01.49.60.25.06. /// www.credac-and-co.com Voyage au centre Rapport d’expédition au Crédac d’Ivry-sur-Seine pour des “EXPÉRIENCES INSULAIRES”. Mircea Cantor Courtesy galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois, Paris Courtesy gb agency, Paris Métamorphose d’impact des frères Chapuisat (2007) Courtesy André Morin/Le Crédac 08 EXPOS 596 ok 27/04/07 15:26 Page 76

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76 Les Inrockuptibles numéro 596 / 2 mai 2007

EXPOSCETTE SEMAINE

VERNISSAGESMIRCEA CANTORA partir du 4 mai à Reims

Le FracChampagne-Ardenne offre à l’artisteroumain MirceaCantor sapremière expomonographiqueen France.Une exposition

intitulée Ciel variable, mi-apocalyptique mi-cosmogonique, qui retrace la pensée non linéaired’un artiste qui pratique avec la même aisance laphoto, la vidéo, l’installation, l’écriture ou l’édition.Au Frac Champagne-Ardenne, 1, place Museux,tél. 03.26.05.78.32, www.frac-champagneardenne.org

JOACHIM MOGARRAA partir du 4 mai à Marseille

Le Frac Paca rend hommage au photographed’origine espagnole Joachim Mogarra. L’occasion de découvrir, avec cette exposition, ses mises enscène délicates composées d’éléments du quotidiendétournés avec humour et tendresse.Au Frac Paca, 1, place Francis-Chirat, tél. 04.91.91.27.55,www.fracpaca.org

ELINA BROTHERUSA partir du 3 mai à Genève

Au Centre pour l’image contemporaine, laphotographe d’origine finlandaise Elina Brotherusexpose l’une de ses dernières séries, The NewPainting, dans laquelle elle confronte son écriturephotographique aux codes et à l’esthétique de lapeinture classique.Au Centre pour l’image contemporaine, 5, rue du Temple,tél.00.41.22.90.82.000, www.sgg.ch

Nous plongeons progressivement dansles profondeurs du sous-sol en béton– stop. Là, les bruits de la ville trèsvite ne nous atteignent plus. Aucunespace n’est pourvu de fenêtre. Au-

cune communication avec l’extérieur. Unefois là, nous sommes coupés du monde – stop.Le centre d’art est une île. Un laboratoire.Comme ce bunker que les rescapés de la sérieLost découvrent au cœur de la jungle. Nousdescendons toujours un peu plus – stop. Latitude Est, une barque en bois nous attend,échouée sur le sol blanc de la salle d’exposi-tion – stop. On raconte qu’une certaine ThuVan Tran l’aurait construite sur le toit d’unimmeuble, et déplacée jusqu’ici. Mais com-ment ? Sur la barque, une partie de go a étécommencée. Nous en faisons le véhicule mentalet symbolique de notre expédition – stop.Egarés avec nous, les géologues confirment laprésence continue de sols en pente douce.Nous remarquons en silence l’absence de touteffet scénographique – stop –, rien d’autre quela vérité nue des œuvres choisies par les deuxcommissaires de l’expédition, fichés aux nomsde Jean-Paul Felley et Olivier Kaeser. On rap-porte qu’ils dirigent à Genève un autre labo-ratoire de recherches, le centre d’art “atti-tudes”. Les espaces d’art communiquent leursisolements – stop. Nous continuons notreavancée.Virage à droite, latitude Est-Ouest, altitudestabilisée – stop. L’expédition est maintenant

maritime. Par le hublot, nous apercevons lesvariations climatiques du monde antarctique.Nous restons là des heures, peut-être mêmedes jours entiers, balancés par le mouvementdes flots. Sur le mur du fond, nous visitons duregard un lieu désaffecté, occupé par une co-lonie de phoques, vieux port de pêche à la ba-leine de l’île de Stromness, au sud-est des Ma-louines – stop. Sur la paroi blanche, l’artisteexpéditionnaire Simon Faithfull a accrochéquelques-uns des trois mille dessins réalisésavec son Palm Pilot. Comme un carnet denotes, un journal de voyage. Nous nous ap-prêtons à redescendre – stop.Soudain, une remontée d’alcool : à l’entrée del’antre, un étrange personnage au nom d’ex-plorateur, Samuel Herzog, nous a servi troisrhums différents provenant de l’île fictive deSanta Lemusa. Nous sentons s’augmenter ennous les sensations physiques de la perturba-tion spatiale.Plus au Sud – stop – latitude Ouest, très bassealtitude, espace confiné. Le site dévoile unatoll pacifique construit par un certain PeterRegli au beau milieu d’un lac de Suisse cen-trale. Notre rapport d’activités enregistre cedérèglement de l’ordinaire du monde sous letitre Hacking Reality, dossier “RH 200”. L’île ala forme d’un point d’exclamation – ou d’in-terrogation ? – stop.Nous abordons enfin les basses profondeurs– stop. Obscurité, raréfaction de l’air. Suspen-due au plafond, une immense sculpture enbois des frères Chapuisat, Métamorphose d’im-pact, dissimule en son centre une excavationencore inexplorée – stop. L’un après l’autre,nous rampons sous la structure pour en at-teindre le centre…Fin de la transmission. Jean-Max Colard

Jusqu’au 20 mai au Crédac, 93 av. Georges-Gosnat,Ivry-sur-Seine (94), tél. 01.49.60.25.06./// www.credac-and-co.com

Voyage au centreRapport d’expédition au Crédacd’Ivry-sur-Seine pour des“EXPÉRIENCES INSULAIRES”.

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