Anatomie et pathologie de la tunique fibreuse de l’œil du ... · °° Unité Pédagogique...

of 24 /24
Introduction L’ophtalmologie du Lapin (Oryctolagus cuniculus), outre sa place importante en physiologie et pathologie comparées, prend depuis peu une importance croissante dans le cadre de la consultation des Lapins de compagnie. Chez ces derniers, les affections de la tunique fibreuse du bulbe (Tunica fibrosa bulbi) sont, après les atteintes des organes oculaires acces- soires (Organa oculi accessoria), les affections les plus fré- quentes et en tous cas les mieux décelées par le propriétaire. Elles constituent donc tout naturellement un motif de consul- tation de plus en plus courant. La tunique fibreuse du bulbe est constituée d’une partie postérieure opaque, la sclère (Sclera), anciennement "scléro- tique", et d’une partie antérieure transparente, la cornée (Cornea), qui se raccordent à hauteur du limbe cornéen (Limbus corneae). Chez le Lapin, la cornée représente 25 % de la surface totale du bulbe oculaire contre 7 % seulement chez l'Homme [20] ; elle est le siège de nombreuses atteintes, traumatiques en particulier. Ce sont les affections cornéennes qui dominent très largement la pathologie de la tunique fibreuse du Lapin. L’objet de cette revue est de présenter, dans cette espèce, l’anatomie de la tunique fibreuse du bulbe pour aborder SYNTHÈSE SCIENTIFIQUE Anatomie et pathologie de la tunique fibreuse de l’œil du Lapin domestique ° P. BARTHELEMY et °° L. MONNEREAU* °Clinique Vétérinaire R. Deschamps et S. Vaqué, 22, avenue de Verdun, F-40130 Capbreton °° Unité Pédagogique d’Anatomie-Embryologie, École Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles, F-31076 Toulouse Cedex 3 * Auteur assurant la correspondance RÉSUMÉ La consultation d’ophtalmologie d’un Lapin domestique ne relève plus de la simple anecdote. Dans cette espèce, les principales affections du bulbe de l’œil auxquelles le vétérinaire est confronté concernent surtout la tunique fibreuse, et tout particulièrement la cornée. L’étude des caractéristiques ana- tomiques et histologiques de la tunique fibreuse de l’œil du Lapin constitue la première partie de cette revue. Celle-ci est ensuite consacrée à la patho- logie. Ainsi, après avoir rappelé les principales malformations congénitales de la tunique fibreuse rencontrées chez le Lapin, les auteurs se proposent de faire le point sur les affections acquises de la cornée décrites dans cette espèce. Sont successivement abordées les kératites ulcéreuses, infectieuses, mycosiques et secondaires, ainsi que les dystrophies et dégénérescences cornéennes. Dans la mesure du possible, l’étiopathogénie, l’approche dia- gnostique et enfin le pronostic et le traitement font l’objet d’une brève syn- thèse. MOTS-CLÉS : sclère - cornée - Lapin - anatomie - kéra- tites - dystrophies cornéennes - dégénérescences cor- néennes - revue. SUMMARY Anatomy and pathology of the fibrous coat of the eyeball of the rabbit. By P. BARTHELEMY and L. MONNEREAU. Ophthalmology examination of a domestic rabbit isn't just a routine task anymore. In this species, the main diseases of the eyeball met by veterina- rians mainly affect the fibrous coat, especially the cornea. The first part of this review will study the anatomic and histology characteristics of the fibrous coat in the rabbit eye. Then, pathology will be considered. Therefore, after recalling the main congenital malformations of the fibrous coat of the rabbit eyeball, the authors will take stock of the diseases of the cornea for this species : successively ulcerative keratitis, infectious kerati- tis, keratomycosis, secondary keratitis, corneal dystrophys and degenera- tions. As far as possible, a brief synthesis will be made on aetiopathogeny and diagnosis as well as on prognosis and therapy. KEY-WORDS : sclera - cornea - rabbit - anatomy - kerati- tis - corneal dystrophies - corneal degenerations - review. Revue Méd. Vét., 2001, 152, 1, 5-28

Embed Size (px)

Transcript of Anatomie et pathologie de la tunique fibreuse de l’œil du ... · °° Unité Pédagogique...

  • Introduction

    Lophtalmologie du Lapin (Oryctolagus cuniculus), outresa place importante en physiologie et pathologie compares,prend depuis peu une importance croissante dans le cadre dela consultation des Lapins de compagnie. Chez ces derniers,les affections de la tunique fibreuse du bulbe (Tunica fibrosabulbi) sont, aprs les atteintes des organes oculaires acces-soires (Organa oculi accessoria), les affections les plus fr-quentes et en tous cas les mieux dceles par le propritaire.Elles constituent donc tout naturellement un motif de consul-tation de plus en plus courant.

    La tunique fibreuse du bulbe est constitue dune partiepostrieure opaque, la sclre (Sclera), anciennement "sclro-tique", et dune partie antrieure transparente, la corne(Cornea), qui se raccordent hauteur du limbe cornen(Limbus corneae). Chez le Lapin, la corne reprsente 25 %de la surface totale du bulbe oculaire contre 7 % seulementchez l'Homme [20] ; elle est le sige de nombreuses atteintes,traumatiques en particulier. Ce sont les affections cornennesqui dominent trs largement la pathologie de la tuniquefibreuse du Lapin.

    Lobjet de cette revue est de prsenter, dans cette espce,lanatomie de la tunique fibreuse du bulbe pour aborder

    SYNTHSE SCIENTIFIQUE

    Anatomie et pathologie de la tunique fibreusede lil du Lapin domestique

    P. BARTHELEMY et L. MONNEREAU*

    Clinique Vtrinaire R. Deschamps et S. Vaqu, 22, avenue de Verdun, F-40130 Capbreton Unit Pdagogique dAnatomie-Embryologie, cole Nationale Vtrinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles, F-31076 Toulouse Cedex 3* Auteur assurant la correspondance

    RSUM

    La consultation dophtalmologie dun Lapin domestique ne relve plusde la simple anecdote. Dans cette espce, les principales affections du bulbede lil auxquelles le vtrinaire est confront concernent surtout la tuniquefibreuse, et tout particulirement la corne. Ltude des caractristiques ana-tomiques et histologiques de la tunique fibreuse de lil du Lapin constituela premire partie de cette revue. Celle-ci est ensuite consacre la patho-logie. Ainsi, aprs avoir rappel les principales malformations congnitalesde la tunique fibreuse rencontres chez le Lapin, les auteurs se proposent defaire le point sur les affections acquises de la corne dcrites dans cetteespce. Sont successivement abordes les kratites ulcreuses, infectieuses,mycosiques et secondaires, ainsi que les dystrophies et dgnrescencescornennes. Dans la mesure du possible, ltiopathognie, lapproche dia-gnostique et enfin le pronostic et le traitement font lobjet dune brve syn-thse.

    MOTS-CLS : sclre - corne - Lapin - anatomie - kra-tites - dystrophies cornennes - dgnrescences cor-nennes - revue.

    SUMMARY

    Anatomy and pathology of the fibrous coat of the eyeball of the rabbit.By P. BARTHELEMY and L. MONNEREAU.

    Ophthalmology examination of a domestic rabbit isn't just a routine taskanymore. In this species, the main diseases of the eyeball met by veterina-rians mainly affect the fibrous coat, especially the cornea. The first part ofthis review will study the anatomic and histology characteristics of thefibrous coat in the rabbit eye. Then, pathology will be considered.Therefore, after recalling the main congenital malformations of the fibrouscoat of the rabbit eyeball, the authors will take stock of the diseases of thecornea for this species : successively ulcerative keratitis, infectious kerati-tis, keratomycosis, secondary keratitis, corneal dystrophys and degenera-tions. As far as possible, a brief synthesis will be made on aetiopathogenyand diagnosis as well as on prognosis and therapy.

    KEY-WORDS : sclera - cornea - rabbit - anatomy - kerati-tis - corneal dystrophies - corneal degenerations -review.

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

  • ensuite ltude de la corne pathologique. Les termes anato-miques et histologiques retenus dans cette synthse ont temprunts, dans la mesure du possible, la nomenclatureofficielle [56, 101].

    1. Anatomie de la tunique fibreuseA) SCLRE

    La sclre du Lapin prsente au plan anatomique trs peu departicularits spcifiques ; en outre, elle nest, notreconnaissance, le sige daucune pathologie propre. Aussinous contenterons-nous de rappeler brivement son organisa-tion.

    a) Caractres gnraux [3, 70, 91, 94, 96, 98, 100]

    La sclre du Lapin a une paisseur variable : elle avoi-sine 0,5 mm hauteur du limbe cornen, 0,25 mm dans largion de lquateur suprieur, 0,2 mm dans celle delquateur infrieur, et 0,18 mm au niveau du ple post-rieur [91].

    Sa couleur dpend de son paisseur et de sa pigmenta-tion ; cette dernire tant lie la pigmentation gnrale delindividu, elle est par exemple de couleur blanche chez leLapin blanc et chez le Lapin albinos.

    La sclre est perce de nombreux petits orifices livrantpassage aux vaisseaux et aux nerfs qui gagnent ou quittent lebulbe de lil. En particulier, les fibres du nerf optique tra-versent sa paroi postrieure trs amincie dans une rgion par-ticulire : laire crible de la sclre (Area cribrosa sclerae),anciennement "lame crible de la sclre".

    b) Structure [70, 91, 100, 103, 107, 123-124]

    La sclre est constitue, de lextrieur vers lintrieur,des trois lments suivants : la lame pisclrale (Laminaepiscleralis), la substance propre de la sclre (Substantia pro-pria sclerae) et la lamina fusca de la sclre (Lamina fuscasclerae).

    La lame pisclrale est spare de la gaine du bulbe(Vagina bulbi), anciennement "capsule de Tenon", par les-pace episclral (Spatium episclerale), sauf certains endroitso elle fusionne avec cette gaine. Constitue de tissuconjonctif lche, trs richement vascularise, elle reprsenteune structure nourricire pour la sclre, par ailleurs pratique-ment avasculaire.

    La substance propre de la sclre, communment appele"stroma", contient tous les lments rencontrs dans le tissuconjonctif, en particulier des protoglycanes et des fibrillesde collagne. A hauteur de lanneau sclral (Anulus sclerae),ces dernires sont intimement mles celles des tendons desmuscles oculomoteurs, assurant ceux-ci un ancrage solide.

    La lamina fusca de la sclre, dorganisation peu prscomparable celle de la substance propre, est la structuresclrale la plus interne, en continuit avec la lame supra-chorodienne (Lamina suprachoroidea) de la chorode(Choroidea). Cest lhomologue de larachnode (Arach-noidea).

    Bien quelle soit le lieu dentre et de sortie des vais-seaux du bulbe de lil, la sclre est trs faiblement vascula-rise, sauf dans la lame pisclrale. Celle-ci est en effet per-fuse par les artres pisclrales (Aa. episclerales) et contientde nombreuses anastomoses artrio-veineuses [103]. Lasclre se nourrit essentiellement par imbibition partir de lachorode sous-jacente. Son innervation est assure par lesnerfs ciliaires (Nn. ciliares) qui donnent en particulier deriches plexus nerveux autour des anastomoses artrio-vei-neuses pisclrales.

    B) CORNEa) Conformation [3, 28, 70, 91, 94, 96, 98, 100]

    La corne est enchsse dans la sclre la manire dunverre de montre, hauteur dune zone de transition, le limbecornen (Limbus corneae), anciennement "limbe sclro-cor-nen". Chez le Lapin, elle est saillante et relativement large.Elle ne prsente quasiment pas de diffrence de courbureavec la sclre, et le sillon sclral (Sulcus sclerae), ancienne-ment "sillon corno-sclral", est de ce fait trs peu marqu[91].

    Sa face antrieure (Facies anterior), convexe, est humi-difie en permanence par le film lacrymal prcornen. Elle aune forme elliptique marque avec un diamtre horizontalmoyen de 15 mm et un diamtre vertical compris entre 13,5et 14 mm [28, 91]. Sa surface est donc proche de 2 cm2, soit25 % de la surface oculaire totale [20, 47]. Sa face post-rieure (Facies posterior), concave, est au contact de lhumeuraqueuse (Humor aquosus) contenue dans la chambre ant-rieure du bulbe (Camera anterior bulbi). Elle est presque cir-culaire car la corne sengage plus profondment dans lasclre par cette face.

    Le rayon de courbure cornen varie de 7 7,5 mm [47].Lpaisseur de la corne, quasi constante quelle que soit largion, est en moyenne de 0,4 mm [28, 91]. Elle peut nan-moins tre parfois lgrement plus faible 0,37 mm au niveaudu sommet ou vertex (Vertex corneae) par rapport au limbe0,45 mm [91]. Lpaisseur augmente durant les priodes oles paupires sont closes, suite une hydratation importantede la corne ; cette variation dpaisseur diurne est de lordrede 3 % contre 8 % chez le Chat.

    b) Structure histologique [26, 28, 47, 59, 70, 78, 83, 89,91, 96, 98, 100]

    Une coupe histologique de la corne du Lapin montre(Cf. Photographie A), davant en arrire, les lments sui-vants : lpithlium antrieur de la corne (Epithelium ante-rius corneae) avec sa surface le film lacrymal prcornen,la lame limitante antrieure (Lamina limitans anterior), lasubstance propre de la corne (Substantia propria cornea), lalame limitante postrieure (Lamina limitans posterior), etlpithlium postrieur de la corne (Epithelium posteriuscorneae).

    Le film lacrymal prcornen est compos de troisphases : une phase profonde muqueuse, une phase interm-diaire aqueuse et une phase superficielle lipidique. Il parti-cipe la protection, la nutrition et au maintien de la trans-

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    6 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

  • parence de la corne. Maintenu en place par les microvillosi-ts et microplis des cellules superficielles de lpithliumantrieur, il est indispensable cet pithlium dont il est phy-siologiquement indissociable.

    Lpithlium antrieur de la corne (Cf. PhotographiesA et B), pavimenteux, stratifi, non kratinis, est mis encontinuit avec lpithlium de la tunique conjonctive bul-baire (Tunica conjunctiva bulbi) par une zone de jonction,lanneau conjonctival (Anulus conjunctivae). Dune pais-seur de 30 40 m [91], cet pithlium est constitu de cinq sept couches cellulaires rparties en trois assises parallles :

    une assise basale, constitue dune couche monostrati-fie de cellules cylindriques hautes, parfois qualifies de"columineuses", reposant sur une fine membrane basale ; cescellules assurent par mitose le renouvellement de lpith-lium et sont donc indispensables son intgrit ;

    une assise intermdiaire de deux trois couches de cel-lules polygonales communment appeles "cellules aile deRanvier" ("wing cells") ;

    une assise superficielle de deux trois couches de cel-lules pavimenteuses, dautant plus aplaties quelles devien-nent plus superficielles [26], et dont la surface, hrisse demicrovillosits et de microplis, retient le film lacrymal pr-cornen.

    La lame limitante antrieure (Cf. Photographies A et B),anciennement "membrane de Bowman", est une couche acel-lulaire, applique sans dlimitation nette la face interne dela membrane basale de lpithlium antrieur. Elle nedpasse quasiment jamais 2 m dpaisseur contre 8 14 mchez lHomme [91], ce qui explique que son existence chezle Lapin a t discute par le pass.

    La substance propre de la corne (Cf. Photographies A,B et C), anciennement "stroma cornen", ne mesure jamaismoins de 240 m dpaisseur [89, 91] ; elle reprsente envi-ron les 9/10e de lpaisseur totale de la corne. Cest un tissuconjonctif dont la proportion des constituants et leur agence-ment original assurent la transparence de lensemble : on ytrouve des fibrilles de collagne parallles organises enrubans et des kratocytes (fibroblastes de la corne), agencsde faon trs ordonne dans une substance fondamentalefaite de glycosaminoglycanes acides, de protoglycanes et deglycoprotines de structure. Les kratocytes se distribuentselon un gradient de densit dcroissant dans le sens antro-postrieur [89]. Ces cellules produisent de faon prfren-tielle des protines enzymatiques hydrosolubles, comme latransktolase et laldhyde dhydrognase 1, qui semblentcontribuer la transparence cornenne [58].

    La lame limitante postrieure (Cf. Photographies A etC), anciennement "membrane de Descemet", est assez nette-ment spare de la substance propre [78]. Cest une couchehyaline lastique, dont lpaisseur moyenne de 7 8 m [91]augmente avec lge et dans certains processus pathologiques(comme lulcration profonde de la substance propre de lacorne). Elle reprsente la membrane basale de lpithliumpostrieur de la corne. Trs rsistante, cest souvent la seulestructure cornenne subsister en cas dulcre non perforant ;

    elle reprsente en tout cas la dernire barrire mcanique dela corne avant la rupture de la chambre antrieure.

    Lpithlium postrieur de la corne (Cf. PhotographiesA et C), anciennement "endothlium de la chambre ant-rieure", est un pithlium simple, pavimenteux, fait de cel-lules pentagonales ou hexagonales rgulirement et troite-ment arranges [83]. Chez le Lapin, sa densit cellulaire vo-lue physiologiquement entre 1.800 et 3.500 cellules/mm2

    [28, 83] ; elle diminue de faon significative chez les sujetsgs de plus de un an [28, 83] (notons que lpithliumconserve son intgrit et ses fonctions avec seulement 300cellules/mm2). Lpithlium postrieur de la corne est encontinuit avec celui qui revt la face antrieure de liris ; ilse trouve au contact direct de lhumeur aqueuse. Son intgritest indispensable au maintien de la transparence cornenne,car il rgule de faon active et encore plus importante quelpithlium antrieur le degr dhydratation de la substancepropre de la corne [48, 96]. Toute altration de sa structurepeut entraner un dme de la corne. Chez le Lapin, lpi-thlium postrieur de la corne possde en outre une certainecapacit de rgnration (Cf. 3.E.a.).

    c) Vasculo-innervation [75-76, 78, 91, 96, 100, 121]

    La corne est normalement avasculaire et se nourrit partir du film lacrymal prcornen, de lhumeur aqueuse etdes anses capillaires de la rgion du limbe cornen.

    La corne est, par contre, trs richement innerve par lesnerfs ciliaires qui constituent un plexus sa priphrie. Lesfibres nerveuses qui en procdent pntrent la corne demanire centripte et se distribuent dans son paisseur pourse terminer, chez le Lapin, au sein de lpithlium postrieur[96].

    Cette innervation est essentiellement sensitive [75] etconduit des stimuli tactiles et nociceptifs, point de dpart denombreux rflexes (rflexe corno-palpbral de clignement,rflexes de larmoiement et de vaso-dilatation). La sensibilitthermique semble inexistante. On compte en moyenne pasmoins de 6.000 terminaisons nerveuses sensitives par mm3

    de corne, ingalement rparties puisque lpithlium ant-rieur en contient 20 fois plus que la substance propre. La cor-ne reprsente ce titre un des tissus les plus sensibles delanimal. Cette sensibilit est maximale en son centre et dimi-nue progressivement jusquau limbe cornen.

    La corne reoit par ailleurs une innervation sympathique[75]. On pense que ces fibres adrnergiques jouent, au mmetitre que les fibres sensitives, un rle important dans la tro-phicit cornenne et dans les mcanismes de cicatrisation.Notons quune innervation parasympathique de la corne at rcemment mise en vidence chez le Rat [76].

    d) Limbe cornen [91, 96, 100, 114]

    Le limbe cornen est la zone de transition entre la cor-ne et la sclre. Il est large et taill en biseau, la corne sin-sinuant sous la sclre comme un coin. Par rapport la corneproprement dite, il prsente les principales caractristiquesstructurales suivantes [96, 114] :

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 7

  • lpithlium antrieur est plus pais et contient des cel-lules pigmentaires dont lensemble constitue un anneau depigmentation dont la densit varie avec celle de la pigmenta-tion gnrale du Lapin ;

    la lame limitante antrieure disparat ;

    la substance propre perd son arrangement caractris-tique et devient beaucoup plus riche en cellules (fibroblastes,mlanocytes, macrophages, lymphocytes, plasmocytes) ;

    la lame limitante postrieure disparat ;

    le limbe est richement vascularis par en moyenne huitboucles artrielles issues des artres ciliaires antrieures (Aa.ciliares anteriores) ou des artres ciliaires postrieureslongues (Aa. ciliares posteriores longae).

    Notons que, juste en arrire du limbe cornen, se trouvele plexus veineux de la sclre (Plexus venosus sclerae)constitu de nombreux petits sinus veineux (Sinus venosussclerae) localiss dans la profondeur de la sclre. Il reoitlhumeur aqueuse filtre travers langle irido-cornen(Angulus iridocornealis).

    2. Malformations congnitalesde la tunique fibreuseA) MICROCORNE [21, 23, 27, 67, 77, 84, 87, 100, 110,118]

    La rduction de la taille de la corne est en gnral lie la microphtalmie (Microphthalmia) dont lapparition spon-tane est denviron 4 pour 1.000 chez le Lapin [87]. Lamicrocorne est parfois associe dautres anomalies ocu-laires incluant la cataracte congnitale (Cataracta congeni-talis), les colobomes (Coloboma), la microphakie, la persis-tance de la membrane pupillaire (Membrana pupillaris per-sistens), la diminution de la taille des paupires ou de lor-bite. Dans de rares cas, un glaucome peut se dveloppersecondairement.

    B) MGALOCORNE [2, 4-5, 12-13, 23, 28, 41, 60, 62, 64,70, 77, 84, 88, 110, 117-118]

    Chez le Lapin, la mgalocorne est exceptionnellementisole. Elle peut tre plus couramment associe unemacrophtalmie (Macrophthalmia). Le plus souvent chez leLapin, elle est la consquence de la distension rapide de latunique fibreuse du bulbe (buphtalmie ou hydrophtalmie)chez le trs jeune Lapin atteint de glaucome congnital(Glaucoma congenitale) hrditaire. Cette anomalie se ren-contre chez plusieurs souches de Lapins blancs no-zlandaiset occasionnellement chez des Lapins de compagnie de racesapparentes [12]. Lanomalie est transmise hrditairementpar un gne autosomal rcessif pntrance incomplte. Sonapparition spontane est rare et serait de lordre de 1 pour7.500 [110]. La distension cornenne provoque des altra-tions irrversibles de la lame limitante postrieure ainsi quede lpithlium postrieur de la corne. Un dme cornencomplique et opacifie ainsi souvent la mgalocorne.

    C) DERMODE CORNEN [23, 84, 100, 117]

    Le dermode cornen se prsente chez le jeune animal sousla forme dun lambeau cutan ectopique situ la surface dela corne. Cet lot cutan en relief, plus ou moins ros, circu-laire, assez ferme, peut contenir plusieurs follicules pileuxactifs. Cette affection congnitale rare est bien dcrite chez leChien et le Chat pour lesquels le dermode est souvent lim-bique. Chez le Lapin, lanomalie semble exceptionnelle.WAGNER et al. font part dun cas personnel (Cf. Photo-graphie D) pour lequel ils pratiqurent une exrse totale dudermode suivie dune kratectomie superficielle [117]. Ilsconseillent pour la suite un traitement antibiotique local base de chloramphnicol (Cf. Tableaux I et III). Si latteinteest plus profonde, une blpharorraphie doit suivre la kratec-tomie superficielle.

    8 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    PHOTOGRAPHIES A, B et C. 1. pithlium antrieur de la corne ; 2. Lame limitante antrieure (membrane de Bowman) ; 3. Substance propre de la corne(stroma cornen) ; 4. Lame limitante postrieure (membrane de Descemet) ; 5. pithlium postrieur de la corne (endothlium de la chambre ant-rieure).

    PHOTOGRAPHIE A. Coupe histologique antro-postrieure dune corne normale de Lapin (Hmatoxyline et osine, x 20). Vue densemble. (Clich aimable-ment prt par I. RAYMOND).

    PHOTOGRAPHIE B. Coupe histologique antro-postrieure dune corne normale de Lapin (Hmatoxyline et osine, x 40). Dtail de la partie antrieure. 6.Assise cellulaire basale ; 7. Assise cellulaire intermdiaire ; 8. Assise cellulaire superficielle. (Clich aimablement prt par I. RAYMOND).

    PHOTOGRAPHIE C. Coupe histologique antro-postrieure dune corne normale de Lapin (Hmatoxyline et osine, x 100). Dtail de la partie postrieure. 9.Ruban de fibrilles de collagne ; 10. Kratocyte. (Clich aimablement prt par I. RAYMOND).

    PHOTOGRAPHIE D. Dermode cornen (indiqu par la flche) sur lil dun Lapin nain. (Clich aimablement prt par F. WAGNER [117]).PHOTOGRAPHIE E. Ulcre cornen perforant par pntration dun corps stranger vgtal compliqu dune uvite antrieure aigu sur lil dun Lapin nain albi-

    nos. (Clich aimablement prt par F. WAGNER [117]).PHOTOGRAPHIE F. Descemetocle central sur lil dun Lapin nain. Noter la novascularisation superficielle centripte de la corne.(Clich aimablement prt

    par F. WAGNER [117]).PHOTOGRAPHIE G. Diagnostic dun ulcre cornen profond par fixation de la fluorescine sur lil dun Lapin nain. Noter ldme stromal en priphrie de

    la lsion et lintense novascularisation profonde de la corne dans la rgion du limbe cornen. (Clich aimablement prt par F. WAGNER [117]).PHOTOGRAPHIE H. Abcs cornen trs tendu sur lil dun Lapin. Noter la novascularisation superficielle de la corne et laspect luisant de la lsion qui tra-

    duit son pithlialisation. (Clich aimablement prt par J. DUCOS DE LAHITTE).PHOTOGRAPHIE I. Kratoconjonctivite et blpharite chroniques compliquant une dacryocystite chronique Pasteurella ssp. chez un Lapin. 11. Corne (noter

    ldme stromal diffus et la novascularisation superficielle) ; 12. Plis semi-lunaire de la conjonctive ou troisime paupire (noter la procidence, lintensecongestion vasculaire et lpaississement) ; 13. Point lacrymal (noter lpiphoora purulent) ; 14. Paupire suprieure (noter lentropion cicatriciel et la dpila-tion lie lpipoora). (Clich aimablement prt par A. REGNIER).

  • Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 9

  • 3. Kratites ulcreusesLa kratite ulcreuse ou ulcre cornen dsigne une affec-

    tion caractrise par une perte de substance plus ou moinsprofonde de la corne.

    A) TIOLOGIE [2, 4-6, 17, 20, 43, 50-51, 60-66, 72-73, 85,93, 95, 106, 115, 117-120]

    Chez le Lapin, les kratites ulcreuses sont plus raresque chez les Carnivores domestiques. Elles ont souvent uneorigine traumatique comme la pntration cornenne decorps trangers vgtaux (Cf. Photographie E). La prsenceseule d'un corps tranger la surface cornenne peut initierune kratite. Parfois les blessures infliges la corne sontdues des coups de griffes, automutilations conscutives un prurit oculaire intense lors de conjonctivites aigus ou dedacryocystites. Les kratoconjonctivites peuvent d'ailleursconduire elles-mmes l'ulcration de la corne jusqu' saperforation dans les cas extrmes.

    D'autres kratites ulcreuses peuvent tre lies uneinfection Pseudomonas aeruginosa (bacille Gram ngatif,arobie strict, pyocyanique). Cest un agent pathogneopportuniste important dans les affections oculaires desLporids, responsable le plus souvent de conjonctivitesaigus purulentes. Le germe colonise parfois la surface cor-nenne suite un traumatisme oculaire, la pntration duncorps tranger ou une contamination iatrogne (Pseudo-monas aeruginosa peut se dvelopper par exemple dans unedose de fluorescine collyre mal conserve). Cette bactriepourrait, par le biais d'une cytotoxine, augmenter la perma-bilit de l'pithlium antrieur de la corne pour partielle-ment le dtruire. Elle produit aussi une collagnase respon-sable d'une kratomalacie par dsorganisation locale dustroma cornen. Linfection induit aussi lactivation et lalibration par les kratocytes et les leucocytes prsents sur lefoyer infectieux de nouvelles collagnases qui entretiennentet aggravent lulcre cornen. Notons, par ailleurs, que lin-tervention de ces collagnases cornennes semble systma-tique dans lvolution de toute ulcration cornenne, quellesoit dorigine infectieuse ou pas, car leur libration et leuractivation peut seffectuer seulement la faveur de la des-truction de la substance propre de la corne.

    Plus rarement des ulcres cornens touchant l'pith-lium antrieur voire le stroma superficiel de la corne dejeunes Lapins peuvent apparatre la faveur d'anomaliespalpbrales telles que les entropions, les distichiasis ouencore les trichiasis. Enfin, toute altration du film lacrymalprcornen qu'elle soit quantitative (kratoconjonctivitesche, rare chez le Lapin) ou qualitative (dacryocystites ouconjonctivites mucopurulentes, trs frquentes chez leLapin) provoque long terme une souffrance chronique del'pithlium antrieur de la corne qui se concrtise par deszones de dspithlialisation. De telles lsions peuvent ga-lement tre la consquence dun talement insuffisant dufilm lacrymal bien que ce dernier soit tout fait normal. Onobserve ce type dinsuffisance lacrymale relative et par-tielle lorsque locclusion palpbrale ne peut tre complte

    (situation dailleurs appele lagophtalmie par allusion laprominence du bulbe de lil des Lagomorphes), en raisonpar exemple dune anomalie ou dun dysfonctionnementdes paupires, dune buphtalmie volue ou encore duneexophtalmie marque.

    B) CLINIQUE [2, 4-6, 20, 43-44, 50-51, 60-62, 64-66, 68, 72,75, 93, 95, 117-118, 120-121]

    La richesse de l'innervation sensitive de la corne (Cf. 1.B.c.) fait des kratites ulcreuses une affection particuli-rement douloureuse. Cette sensibilit peut tre localementannihile au site de dspithlialisation pour une dure pou-vant atteindre deux semaines suivant la blessure cornenne[68]. Les marges de l'ulcre demeurent cependant extrme-ment sensibles et cette vive douleur se manifeste par un bl-pharospasme, un intense piphora et une rougeur oculairepar congestion des vaisseaux pisclraux. On note gale-ment une procidence du pli semi-lunaire de la conjonctiveou troisime paupire (Plica semilunaris conjunctivae[Palpebra III), et une photophobie. L'atteinte de la corneest quasi systmatiquement associe une conjonctivite quiaccentue lpiphora. La vasodilatation oculaire peut tregnralise avec notamment une congestion des vaisseauxde liris (Iris), dfinissant une uvite antrieure (Cf.Photographie E). Lors de kratites ulcreuses traumatiqueset infectieuses aigus, l'animal est abattu, anorexique. Il peutau contraire tre trs agit, manifestant un violent prurit ocu-laire loccasion surtout daffections traumatiques superfi-cielles de la corne.

    C) DIAGNOSTIC [2, 4-5, 43, 51, 60-62, 64] La rougeur oculaire et le blpharospasme constituent les

    principaux signes d'appel des kratites ulcreuses. L'examenrapproch de la corne au biomicroscope ou l'ophtalmo-scope direct ( 20 D) est alors ncessaire l'apprciation deson tendue et de sa profondeur. On s'affranchit de la douleuroculaire par l'instillation locale d'un collyre anesthsique base de chlorhydrate de ttracane (TETRACANE ophta-doses 1 %ND ; VT Doses TETRACANEND) ou doxybupro-cane (NOVESINEND ; CEBESINEND), 2 gouttes dans l'ilatteint 1 2 minutes avant l'examen renouvelable 3 5minutes aprs la premire administration.

    Les ulcres peuvent tre ponctiformes, rectilignes, en"coup d'ongle". De mme ils peuvent intresser l'pithliumantrieur (rosion), le stroma superficiel (ulcre superficiel),le stroma profond (ulcre profond) voire atteindre la mem-brane limitante postrieure. Le fond de l'ulcre est dfini dansce dernier cas par une protrusion de la lame limitante post-rieure de la corne ou descemtocle (Cf. Photographie F).La profondeur et l'tendue de l'ulcration sont apprcies enlumire blanche l'aide d'un faisceau lumineux circulaireplein.

    L'examen en lampe fente est indiqu dans l'tude desulcres pithliaux et superficiels chroniques et autorise lap-prciation des marges de l'ulcres. Dans le cas d'ulcres trau-matiques rcents, les marges de la lsion sont peu ractives.Seul un lger dme stromal priphrique l'ulcre peut treprsent. Ldme cornen apparat l'inspection sous la

    10 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

  • Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 11

    forme d'une couronne blanche bleute (Cf. Photographie G)qui, au biomicroscope, revt un aspect nuageux, et se traduitpar un paississement de l'image de la fente lumineuse.

    On affine l'tude de l'ulcre par le test la fluorescine(FLUORESCEINE 0,5 %ND) collyre unidose. Aprs rin-age de la surface oculaire avec une solution isotonique dechlorure de sodium, seules les zones dspithlialisesfixent le colorant et apparaissent vertes sous clairage bleucobalt (Cf. Photographie G). Pour les descemtocles, lefond de l'ulcre n'est pas color, seules ses parois retiennentla fluorescine. En cas d'ulcre perforant de petite taille,l'issue d'humeur aqueuse est visualise grce une couleverte la surface cornenne partir du point d'ulcration(signe de SEYDEL). Ces plaies perforantes de petite taillesont galement accompagnes dune hypotonie du bulbe delil apprciable la palpation digite compare des deuxbulbes.

    Les kratites ulcreuses superficielles lies une souf-france chronique de l'pithlium antrieur de la corne (kra-toconjonctivite chronique, entropion, distichiasis, trichia-sis...) requirent dans leur approche diagnostique et pronos-tique un test au Rose Bengale qui met en vidence toutes lescellules pithliales dgnres et mortes destines rapide-ment desquamer. Aprs instillation dune goutte de RoseBengale 1 % (ROSE BENGALE 1 %ND), lil est lavabondamment au srum physiologique. La coloration appa-rat alors sous forme de petites ponctuations ou de tches rosesoutenu. Il existe des ractions faussement positives notam-ment si le test a t prcd de ladministration dun collyreanesthsique (irritation de lpithlium antrieur de la cor-ne) ou de manipulations oculaires diverses comme en parti-culier la ralisation dun test de SCHIRMER.

    D) PRONOSTIC [2, 4, 7, 11, 17, 24, 50-51, 60-66, 92-93,118]

    En raison de la vive douleur oculaire lie l'atteinte cor-nenne et des possibilits d'automutilation qu'elle engendre,lvolution des kratites ulcreuses ne peut tre nglige. Lesulcres superficiels traumatiques sont de bon pronostic. Enrevanche, tout ulcre perforant (en particulier par corpstranger) est de mauvais pronostic pour l'intgrit du bulbede l'il car les complications sont nombreuses, graves etquasi systmatiques (Cf. Photographie E). En ce quiconcerne les kratites ulcreuses Pseudomonas aeruginosa,le pronostic est sombre en raison de la pathognicit proprede ce germe et des nombreuses rsistances aux antibiotiquesquil peut dvelopper.

    E) TRAITEMENT Il est dans tous les cas ncessaire et urgent mais sa nature,

    mdicale ou chirurgicale, et son importance dpendent del'tiologie et de la gravit de l'ulcre cornen. Il doit treavant tout tiologique pour tre efficace et sans rechute :retrait des corps trangers, chirurgie des anomalies palp-brales et ciliaires quand elles existent, correction dune ven-tuelle lagophtalmie, traitement des anomalies du film lacry-mal, traitement spcifique de la kratite ulcreuse infec-tieuse. En fait, les traitements des ulcres cornens du Lapinne diffrent que peu de ceux mis en uvre chez le Chien ou

    le Chat. Seules quelques particularits de la cicatrisation cor-nenne chez le Lapin et les difficults rencontres dans lessuivis postchirurgicaux de cette espce sont source de varia-tions.

    a) Modalits de la cicatrisation cornenne chez le Lapin[19, 20, 28, 40, 42, 44, 47, 52, 55, 58-59, 83, 88-89, 111-112,120-121, 123]

    Pour les lsions cornennes superficielles, le comble-ment est rapide en raison de la vitesse de rgnration cellu-laire (migration et mitoses cellulaires) de l'pithlium ant-rieur de la corne chez le Lapin. 48 96 heures sont nces-saires pour recouvrir la membrane basale de lpithliumantrieur de la corne. Il faut ensuite sept jours pour tablirles fines liaisons existant entre cette membrane basale et lescellules de lpithlium antrieur.

    Pour les ulcres intressant les couches cellulaires lesplus profondes de l'pithlium antrieur voire mme lestroma, un comblement provisoire s'opre par glissement descellules pithliales des couches superficielles bordant lesmarges de l'ulcre. Dans un deuxime temps, les krato-blastes migrent vers le foyer lsionnel. Ce type de cicatrisa-tion est souvent accompagn dune novascularisation de lasurface de la corne. La cicatrisation des ulcres cornensprofonds, des descemetocles et des pertes de substancescornennes tendues se solde par une perte localise de latransparence cornenne. Ces opacits cicatricielles ou taiesde la corne apparaissent sous la forme de taches blanchesopalescentes non volutives. Les novaisseaux cornens res-tent fonctionnels pendant quelques semaines puis disparais-sent partiellement. Seule leur trame peut persister sous laforme de "vaisseaux fantmes".

    La cicatrisation des ulcres perforants est plus probl-matique car elle implique une rparation de l'pithlium pos-trieur de la corne qui passe par un talement et/ou une pro-lifration cellulaire. Chez le Chien et le Chat, seul ltale-ment cellulaire peut permettre de combler lespace videlsionnel. Chez le Lapin, par contre, ce phnomne est complt par une relle prolifration cellulaire [20].

    b) Traitement mdical

    Les ulcres cornens du Lapin font lobjet de traitementsmdicaux locaux identiques ceux mis en uvre chez lesCarnivores domestiques. En premire intention on associedes collyres antibiotiques et des collyres anticollagnases.Les cycloplgiques, les anti-inflammatoires et les cicatrisantscornens peuvent complter cette association. Seul le traite-ment mdical par voie gnrale diffre car il est spcifiquedes atteintes infectieuses de la corne du Lapin.

    1) Traitement mdical local [2, 4, 8-10, 17, 25, 29, 31, 40,42, 45, 46, 60, 62, 64, 66, 93, 108, 117-118, 119]

    N.B. : il semble opportun de privilgier ici les collyres parrapport aux pommades car ces dernires gnent loxygna-tion correcte de la corne et freinent donc sa cicatrisation.

    Le traitement local commence par le nettoyage de la sur-face cornenne qui permet dliminer du foyer lsionnel lesventuels corps trangers et tous les dbris ncrotiques afinde retrouver du tissu sain exclusivement. On ralise ce net-toyage grce une solution de rinage oculaire strile : poly-

  • 12 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    vidone iode dilue au 50me, acide borique ou chlorure debenzalkonium.

    Lorsque la kratite infectieuse nest pas la cause directede lulcre, elle en est souvent la premire consquence. Untraitement antibiotique local sera donc systmatiquemententrepris. Une liste des principales molcules utilisables chezle Lapin domestique est dresse dans les Tableaux I et II.Nous y distinguons les molcules que lon administre en pre-mire intention, et les antibiotiques quil vaut mieux rserveraux cas plus svres, aux checs thrapeutiques dus auxrsistances bactriennes ou aux rcidives. Parmi les famillesantibiotiques reprsentes, les Aminosides dont la gentami-cine, notamment en raison de leur large spectre dactivit,occupent une grande place dans le traitement de premireintention. La gentamicine est souvent prescrite dans le traite-ment des ulcres cornens des Carnivores. Chez le Lapin, lesconcentrations suprieures 0,3 % et son administrationrpte ne sont pas conseilles, car la gentamicine serait undes antibiotiques possdant dans cette espce leffet qualita-tif le plus toxique sur lpithlium antrieur de la corne, sur-tout lorsque celui-ci est dfectueux [8].

    Parmi les consquences de la destruction de l'pithliumantrieur de la corne et de lafflux de polynuclaires neutro-philes et de kratocytes au foyer lsionnel, la libration etl'activation de collagnases cornennes constituent les princi-paux facteurs limitants de la cicatrisation cornenne. On lut-tera contre cette fonte enzymatique de la substance propre dela corne par l'instillation 3 4 fois par jour d'un collyrecontenant une anticollagnase comme la N-actyl-cystine(NAC COLLYREND, GENACND, MUCOMYSTND en pr-paration magistrale 5 %) ou ldtate disodique (thylnediaminettraactique) ou E.D.T.A. (associ des nuclosidesdans le VT CICND). Cette activit semble sexercer dailleursplus lencontre des collagnases bactriennes (produites parPseudomonas aeruginosa) que contre les collagnases lib-res par lpithlium cornen ls ou les leucocytes locale-ment actifs. Selon WILSON [119], lE.D.T.A., dans un pre-mier temps, chlaterait les ions calcium du milieu, les emp-chant ainsi dactiver les collagnases. Dans un second temps,il formerait des complexes avec les enzymes dj activespar le calcium et les rendrait de cette manire inactives.Malheureusement, les cintiques dinteraction collagne-col-lagnase, et lapport continu de calcium partir des larmes etde lhumeur aqueuse, rendraient linhibition dfinitive descollagnases in vivo impossible. Cest pourquoi ladministra-tion de tels collyres doit tre rpte le plus frquemmentpossible dans la journe, jusqu toutes les heures pendant lespremires 48 heures de traitement. Des rsultats comparablespourraient tre obtenus par ladministration dhparine asso-cie la gentamicine en prparation magistrale (7,5 ml dh-parine CHOAYND + 1 ml de GENTALLINEND dans 6,5 mlde larmes artificielles). Enfin, les Ttracyclines, outre leuractivit antimicrobienne, possdent in vitro et in vivo des pro-prits anticollagnases sur divers tissus humains et animaux[71]. Cependant, ladministration par voie locale oculaire dettracycline chez le Lapin ne semble pas inhiber significati-vement lactivit dune collagnase particulire, la mtallo-protase 1 de la matrice extracellulaire de la substance proprede la corne [40].

    Les mydriatiques cycloplgiques comme le tropicamideou latropine sont des molcules parasympatholytiques quidilatent la pupille en entranant un relchement du musclesphincter de la pupille (M. sphincter pupillae). Ces sub-stances bloquent aussi la contraction du muscle ciliaire (M.ciliaris), trs peu dvelopp chez le Lapin. Seul le sulfatedatropine (ATROPINE COLLYREND 0,3 %, 0,5 % ou 1 %)est utilis en thrapeutique. On rserve lemploi de ces col-lyres aux kratites ulcreuses extrmement douloureuses.Leur utilisation est galement incontournable lors de kratiteulcreuse complique duvite. Le traitement ncessite uneadministration trs frquente savoir toutes les 2 heures pen-dant 24 heures maximum. De mme lors dulcre perforant,en prambule au traitement chirurgical (Cf. 3.E.c.), lilsera abondamment et trs souvent trait latropine pour vi-ter tout staphylome irien. La mydriase obtenue limite en effetles risques de protrusion de liris travers la brche cor-nenne. Aucun effet systmique de ladministration entopique datropine na t dmontr chez le Lapin. Toutefois,afin dviter une raction locale on privilgiera en premireintention la concentration de 0,3 %.

    Les cicatrisants cornens constituent un vaste groupehtrogne et controvers. Il regroupe les vitamines A(VITAMINE A DULCIS pommadeND ; VITAMINE AFAURE collyreND), B6 (CYSTINE B6ND), B12 (VITA-MINE B12 DULCISND), C (VITAMINE C FAURE collyre 2 %ND), des anabolisants comme la nandrolone (KERA-TYLND), des nuclosides (VITACIC collyreND), et enfin desacides amins (AMICICND).

    Lors de kratite ulcreuse complique duvite svre,de forte congestion des vaisseaux conjonctivaux et piscl-raux ou lorsque la douleur oculaire reste rfractaire au traite-ment par latropine, on peut associer aux topiques prcdem-ment dcrits un collyre contenant un anti-inflammatoire nonstrodien tel lindomtacine. On prfrera la solution 0,1 % la suspension 1 % (INDOCOLLYRE 0,1 %ND), 1 goutte 4 fois par jour pendant 24 48 heures. En ce quiconcerne les anti-inflammatoires strodiens, leur utilisationest, dune manire gnrale, contre-indique dans le traite-ment des ulcres de la corne. Chez le Lapin, lapplicationdun collyre la dexamthasone serait sans consquencenocive durant la premire semaine suivant la formation delulcre, mais serait en revanche trs dltre durant ladeuxime et la troisime semaine [8], vraisemblablement paractivation des collagnases pithliales et stromales et/ouinhibition de la rgnration et de la migration des fibro-blastes cornens [8, 10, 25].

    Les gels lacrymaux et les larmes artificielles assurentune protection mcanique, contribuent lpithlialisationcornenne et sont indispensables dans le traitement adjuvantdes scheresses oculaires vraies (kratoconjonctivite sche)ou relatives (lagophtalmie) (Cf. 5.C.).

    2) Traitement mdical par voie gnrale [2, 4-7, 11, 22, 4,43, 48, 50-51, 60, 62-65, 71, 74, 85, 92-93, 97, 105, 116-117]

    Un traitement antibiotique par voie gnrale s'imposelorsquun ulcre (kratite ulcreuse infectieuse Pseudo-monas aeruginosa et ulcre perforant en particulier) menacel'intgrit du bulbe de l'il, de l'orbite, ou encore la vie de

  • TABLEAU I. Collyres antibiotiques et antibactriens utilisables en premire intention dans le traitement des kratites ulcreuses et/ou infec-tieuses du Lapin.

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 13

  • 14 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    TABLEAU II. Collyres antibiotiques et antibactriens utilisables en seconde intention dans le traitement des kratites ulcreuses et/ou infec-tieuses du Lapin.

  • TABLEAU III. Pommades et gels ophtalmiques antibactriens et antibiotiques utilisables dans le traitement des kratites infectieuses du Lapin.

    ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 15

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

  • 16 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    l'animal lui-mme. Il convient de choisir un antibiotique fort pouvoir de pntration au sein mme des milieux dubulbe de lil, cest--dire une molcule capable de franchirles barrires hmato-oculaires : la barrire hmato-aqueusepour le segment antrieur et la barrire hmato-rtiniennepour le segment postrieur. Les difficults lies lantibio-thrapie par voie gnrale chez le Lapin (risques dentro-toxmie et dentrite mucode iatrognes) rduisent ce choix quelques antibactriens (Cf. Tableau V).

    Parmi les Fluoroquinolones de troisime gnration,lenoxacine, active in vitro sur Pseudomonas aeruginosa, afait lobjet dune tude spcifique de son efficacit par voielocale et gnrale sur des kratites ulcreuses exprimentales Pseudomonas aeruginosa chez le Lapin [31]. Cette tudemontre que ladministration par voie parentrale denoxacinecomplte lefficacit de son administration locale mais sapntration intra-oculaire semble cependant limite puis-quelle ne pntre pas dans le corps vitr (Corpus vitreum). Ilnexiste actuellement aucune prsentation de cette molculeutilisable par voie gnrale chez le Lapin.

    Il semblerait par ailleurs que toute ulcration cornenne,infectieuse ou pas, puisse faire lobjet dun traitement parvoie gnrale base de Ttracyclines. Seules les Ttra-cyclines de deuxime gnration comme la doxycycline et laminocycline pntrent efficacement dans lil mais leur uti-lisation nest pas courante chez le Lapin. La ttracycline etloxyttracycline ne pntrent pas dans lil mais se retrou-vent en concentration efficace dans la tunique conjonctive.Plus que leur activit antibactrienne, cest leur effet anticol-lagnase que lon pourrait exploiter dans le traitement parvoie gnrale des ulcres Pseudomonas aeruginosa. Eneffet, bien quinactive in vivo contre ce germe, la ttracy-cline injecte par voie intramusculaire chez le Lapin (50 mg/kg/jour) diminue de faon significative lincidencedes perforations cornennes dans un modle exprimentaldtude de ce type de kratites [71].

    c) Traitement chirurgical [17, 51, 60, 62-63, 66, 93]

    Il savre indispensable pour les ulcres du stroma pro-fond, urgent pour les descemtocles, les ulcres perforantset les ulcres dus un corps tranger intracornen. Il constitueune alternative intressante pour les ulcres rcidivants, lesulcres atones ou les ulcres rfractaires au traitement mdi-cal. Enfin, il reprsente le traitement tiologique des ulcrespar corps tranger ou dus aux malformations palpbralestelles que les entropions, les distichiasis et les trichiasis.

    Les corps trangers cornens superficiels non pntrantssont retirs laide dun coton tige imbib dune solutionantiseptique strile. Les corps trangers pntrants acces-sibles sont extraits laide dune pince de PAUFIQUE. Lesplus profonds sont dgags par incision superficielle de lacorne, ralise laide du biseau dune aiguille extrme-ment fine (22 G). Lutilisation dun systme grossissant(loupe frontale) savre indispensable.

    Les plaies perforantes de petite taille (sans staphylomeirien) sont rapidement oblitres par un thrombus de fibrine-fibronectine propre lhumeur aqueuse seconde (humeuraqueuse noforme suite la fuite de lhumeur aqueuse ini-

    tiale). Une profondeur normale de la chambre antrieureindique ltanchit naturelle de la plaie. Le traitement mdi-cal sera ici suffisant. Ladministration datropine est alorscapitale dans la prvention de tout staphylome irien. Lasuture cornenne est envisageable pour les ulcres cornensprofonds de faible diamtre (infrieur 5 mm). Elle est obli-gatoire dans les ulcres perforants avec affaissement de lachambre antrieure et dans le traitement des staphylomesiriens. Elle requiert lutilisation dun matriel adapt : micro-scope opratoire, pinces MOSQUITO pour la fixation dubulbe de lil par des fils de traction, pinces de BONN, porteaiguille de CASTROVIEJO, porte lame de BARRAQUER,lames "Gillette" jaunes pour le parage ventuel des lvres dela plaie cornenne. La suture intresse les 2/3 proximaux dustroma cornen. Elle est pratique laide dun fil de Nylon10/0. Si lulcre ou la plaie sont importants, on peut raliserdes points en U (poss en premier) alternant avec des pointssimples. La prsence ventuelle dun dme cornen dimi-nue nettement la solidit de la suture. Une blpharorraphieest dans ce cas indique (vide infra).

    La cautrisation chimique est indique pour le traite-ment des ulcres rcidivants et des ulcres atones car ellestimule la novascularisation et donc la cicatrisation cor-nenne et assure une bonne dtersion des foyers ncrotiqueset/ou infectieux. Elle peut tre ralise sur un animal anes-thsi ou vigile. Dans ce dernier cas, elle sera prcde deladministration locale dun collyre anesthsique base dettracane ou doxybuprocane. Les bords de lulcre sontpars par grattage au coton tige ou la microsponge imbibsde polyvidone iode dilue au 10e. Une kratotomie ponc-tue ou quadrille par (scarifications linaires croises) peuttre galement envisage. Sa ralisation ncessite une anes-thsie gnrale et lutilisation dun microscope opratoire.Elle consiste en la ponctuation ou en la scarification lai-guille trs fine du tiers proximal du stroma cornen sur lazone lse et a pour but de favoriser les attaches de lpith-lium antrieur de la corne sur un nouveau tissu cicatricielplus solide.

    La tarsorraphie est une technique en thorie applicablechez le Lapin. Toutefois il vaut mieux lviter dans cetteespce car la troisime paupire est mobilise par un musclestri ("muscle de LIERSE") dont la position est transversaledans lorbite. On lui prfre donc la blpharorraphie. Chezles Carnivores domestiques, la tarsorraphie complte gnra-lement demble la cautrisation chimique ou la kratotomieponctue. Elle consiste en lapplication transitoire de la facebulbaire de la troisime paupire sur lensemble de la surfacecornenne et joue le rle de "pansement biologique" pour lazone de la corne en cours de cicatrisation. La blpharorra-phie correspond une occlusion palpbrale force, mainte-nue par des sutures cutanes transpalpbrales. Les temps chi-rurgicaux des deux techniques pour le Lapin sont en touspoints identiques ceux dvelopps chez les Carnivores. Onveillera surtout labsence de contact entre le fil et la corne(risque important de cisaillement cornen). Il est remarquerque la troisime paupire, plus fragile chez le Lapin, ne doitsubir aucune tension importante sous peine de se dchirer. Cepansement biologique doit tre maintenu 15 jours. Un carcan

  • ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 17

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    de protection peut tre install autour du cou du Lapin afin deprvenir toute automutilation. Cependant, ce type de matrielnautorise pas la ccotrophie, vitale chez le Lapin. Aussi, ildoit tre retir frquemment, plutt dans la matine, toujourssous surveillance. Un apport en vitamines (B en particulier),par voie parentrale si possible, est indispensable.

    Enfin, lautogreffe conjonctivale est en thorie possiblechez le Lapin. Le matriel de microchirurgie est ici aussiindispensable. Un volet de tunique conjonctive bulbaire(Tunica conjunctiva bulbi) est dissqu pour tre sutur auxmarges de lulcre laide de points simples Nylon 10/0. Cevolet doit conserver une attache naturelle avec le reste de laconjonctive bulbaire afin de lui assurer une vascularisationnormale. Il comble lulcre dfinitivement, constitue sonprincipal tissu cicatriciel et reste opaque.

    4. Kratites infectieuses et myco-siquesA) KRATITES INFECTIEUSES BACTRIENNES

    a) Etiopathognie [2, 5-7, 11, 24, 43, 51-52, 60, 62, 64-65,72, 74, 85, 88, 92-93, 97, 99, 104, 117-119]

    Ltude tiologique des kratites infectieuses du Lapinmet en avant ce jour diffrents agents bactriens compre-nant Staphylococcus aureus, Pseudomonas aeruginosa et desbactries du genre Pasteurella en (particulier Pasteurellamultocida) qui pourraient tre responsables de srieusesatteintes cornennes primitives. Latteinte cornenne est sou-vent lie ou conscutive celle de la tunique conjonctive(conjonctivites Staphylococcus aureus, Pseudomonas ssp.ou Pasteurella multocida) ou des voies lacrymales (dacryo-cystites dues des germes du genre Pasteurella).

    Lapproche des kratites Pseudomonas aeruginosasinscrit compltement dans ltude des kratites ulcreusesdorigine bactrienne (Cf. 3.A.). La pathognie de cetteaffection est lie laction des collagnases et cytotoxinesbactriennes sur la substance propre de la corne.

    La kratite Staphylococcus aureus (coque Gram posi-tif arobie-anarobie facultatif) se caractrise par une infil-tration neutrophilique du film lacrymal prcornen et de lasubstance propre de la corne en priphrie du site infectieux.Leffet pathogne de la bactrie est donc li son fort chi-miotactisme et linflammation aigu des zones infiltres quien rsulte.

    Les infections Pasteurella ssp. (bacilles Gram ngatifsanarobies facultatifs) sont trs polymorphes chez les Lapins ;elles vont du coryza bnin la septicmie foudroyante. Legerme est naturellement prsent dans les culs-de-sacconjonctivaux (Fornix conjunctivae) de nombreux Lapinssains. A la faveur dun stress ou de changements importantsdans les facteurs environnementaux, une pasteurellose cli-nique peut se dclencher. Trs souvent, une conjonctiviteaigu volue simultanment des signes respiratoires.Cependant une kratite Pasteurella multocida peut appa-ratre seule demble, par contamination de la surface ocu-laire partir de la tunique conjonctive ou plus souvent descavits nasales via les conduits naso-lacrymaux (Ductus

    nasolacrimalis). Notons que Pasteurella multocida peut ga-lement causer des affections oculaires plus graves : uvites,endophtalmies, panophtalmies, cellulites orbitaires, abcsorbitaires, dacryocystites obstructives ou atrophiantes.

    b) Clinique [2, 4-7, 11, 51, 60, 62, 64, 72, 93, 95, 104, 117,119-120]

    Au site infectieux cornen, la pathognicit bactriennesexprime par une altration directe de lpithlium antrieurde la corne jusqu sa destruction ou mme de la substancepropre de la corne. Il en rsulte une perte locale de la trans-parence cornenne qui apparat sous la forme dune tacheopalescente blanchtre le plus souvent, diffuse voire nua-geuse. Linfiltration de la substance propre se caractrise parle dveloppement dun dme cornen, parfois dun abcsstromal la cause initiale dans ce cas tant un corps trangervgtal ou un coup de griffe compliqu dune infection. Cedernier se prsente sous la forme dune opacification blan-chtre, localise, ronde, de diamtre variable, pithlialise etpouvant dformer la face antrieure de la corne (Cf.Photographie H).

    Les kratites Staphylococcus aureus saccompagnentdune trs forte blpharite ainsi que dune inflammationaigu de la troisime paupire. Lors de kratites Pseudomonas aeruginosa on rencontre des lsions cor-nennes caractristiques facilement identifiables. Le siteinfectieux apparat sous la forme dun magma jauntre assezfragile. La kratite Pasteurella multocida nest quexcep-tionnellement isole et les signes ophtalmologiques sont sou-vent domins par une conjonctivite purulente.

    c) Diagnostic [2, 4, 6-7, 24, 51, 60, 62, 64, 92-93, 117-118]

    Le diagnostic tiologique repose sur ltude cytologiqueet/ou bactriologique partir de grattages cornens au siteinfectieux. Lexamen bactriologique doit tre complt parun antibiogramme. Le portage asymptomatique de Pasteu-rella multocida est frquent chez le Lapin. Lisolement de cegerme ncessite toujours une interprtation prudente, confronter aux signes gnraux.

    d) Pronostic [2, 4-7, 11, 24, 51, 62, 64-65, 85, 92-93, 117-118]

    Les kratites infectieuses du Lapin sont des affectionssvres dvolution souvent nfaste. Le pronostic est tou-jours rserv. Les lsions cornennes dues Staphylococcusaureus conduisent une perte de transparence partielle outotale de la corne et parfois des complications endocu-laires telles que des uvites. Les kratites Pseudomonasaeruginosa voluent rapidement et la kratomalacie auto-entretenue peut provoquer une rupture cornenne.

    e) Traitement

    Il est bas sur ladministration de collyres ou de pommadesantiseptiques ou antibiotiques (Cf. Tableaux I, II et III). Lespommades assurent une action plus durable au cours de lajourne. Les injections sous-conjonctivales dantibiotiquessont indiques dans les kratites bactriennes volues, chro-niques ou trs svres, car la diffusion du principe actif estmeilleure et mieux rpartie dans le temps (Cf. Tableau IV).La prcocit de la mise en place du traitement conditionne sa

  • 18 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    TABLEAU IV. Antibiotiques et antibactriens injectables par voie sous-conjonctivale dans le traitement des kratites infectieuses et/ou ulc-reuses du Lapin.

  • ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 19

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    russite. Dans les kratites exprimentales Staphylococcusaureus, les chances de striliser la corne infecte diminuentaprs la dixime heure suivant le dbut de linfection [14].Lisolement de la bactrie responsable et ltablissementdun antibiogramme assureront les meilleurs rsultats.

    1) Traitement local [2, 4, 9, 14-16, 31, 45-46, 54, 62, 64,69, 82, 116-118, 122]

    Le traitement anti-infectieux local est gnralement suf-fisant pour les atteintes superficielles (Cf. Tableaux I, II etIII). En premier lieu, on peut utiliser le sulfate de cuivre, anti-septique et astringent, bactricide et fongicide local. On lap-plique sous forme de pommade (CAMPHO-CUIVREND) 2 fois par jour pendant 5 jours. Lantibiotique de premireintention est la gentamicine. En cas de rsistance lors dekratite Pseudomonas aeruginosa, la tobramycine repr-sente lalternative la plus intressante. De nouvelles prsen-tations, dans lesquelles la tobramycine serait vhicule parun film protecteur de collagne, sont actuellement ltude[15]. Leur avantage repose sur une diminution de la fr-quence dadministration pour une efficacit similaire voiresuprieure. Parmi les Fluoroquinolones, la norfloxacine,lofloxacine et la ciprofloxacine se retrouvent en concentra-tions efficaces dans les larmes du Lapin cinq minutes aprsleur administration en collyre. Dans une tude exprimentalede kratite Staphylococcus aureus ralise chez le Lapin, laciprofloxacine apparat plus efficace que la tobramycine pourles stades prcoces de linfection et moins efficace pour lesstades plus tardifs [16]. Toutefois son spectre dactiondemeure plus large, notamment vis--vis des souches deStaphylococcus aureus rsistantes la mthicilline [14-16,82]. Dautres antibiotiques ont fait lobjet ces derniresannes dtude pour le traitement local de kratites expri-mentales Staphylococcus aureus chez le Lapin. Ainsi, laminocycline, lrythromycine, la vancomycine, la cphazo-line et plus rcemment la clarithromycine se sont toutes rv-les efficaces mais aucune prsentation en collyre de ces sub-stances nest actuellement commercialise [14, 54].

    Le traitement antibiotique local des kratites Pseudomonas aeruginosa se verra complt par ladministra-tion locale trs frquente danticollagnases (Cf. 3.E.b.1.).Les parois des bactries Gram ngatif sont altres sous lac-tion de lE.D.T.A. Les germes deviennent ainsi plus sensiblesaux antibiotiques. Une tude mene par WOOLEY et JONEStend montrer la potentialisation de leffet antibactrien de lagentamicine en prsence dE.D.T.A. [122]. Par ailleurs, invitro, lE.D.T.A. seul se rvle trs actif sur Pseudomonasaeruginosa, entranant sa lyse rapide [45]. Notons enfinquaucun effet anticollagnase des Ttracyclines na tmontr lorsquelles sont administres en topique.

    2) Traitement par voie gnrale [4, 6-7, 11, 22, 24, 43, 50-51, 64, 74, 85, 92, 97, 105, 117]

    Les kratites bactriennes svres ncessitent un traitementantibiotique par voie gnrale. Ce traitement est impratifpour toute suspicion de kratite Pseudomonas aeruginosaou Pasteurella multocida car laffection nest en principepas limite lil. Les recommandations sont les mmes quecelles prsentes dans le chapitre consacr aux kratites ulc-

    reuses (Cf. 3.E.b.2.). et Tableau V). Lantibiothrapie gn-rale devrait comme la locale suivre lantibiogramme tabli.Dans une suspicion de pasteurellose, on peut utiliser lenro-floxacine, les Ttracyclines ou la pnicilline G procane(60.000 UI/kg, IM 1 fois par jour pendant 10 jours). Ce der-nier traitement doit tre ralis sous surveillance mdicalecar il peut provoquer une entrite mucode rapidement fatalepour le Lapin. Pour les kratites Staphylocoques on admi-nistre du chloramphnicol, de lrythromycine ou de la gen-tamicine. Enfin, le traitement gnral des kratites Pseudo-monas ssp. repose sur ladministration denrofloxacine ou dfaut de gentamicine.

    B) KRATITES INFECTIEUSES VIRALES [2, 8, 33-39,80, 93, 118]

    Mc LEOD et LANGLINAIS ont dcrit en 1981 sur unLapin g de 10 mois une kratite Poxvirus sans dterminerexactement son tiologie [80]. De faon gnrale, le Lapindomestique est susceptible de dvelopper plusieurs infec-tions Poxvirus comme la myxomatose, le fibrome du Lapin,le fibrome de lEcureuil et enfin la variole du Lapin (infec-tion par le virus pox du Lapin). La kratite dcrite par McLEOD et LANGLINAIS, isole et sans atteinte de ltatgnral de lanimal, tait certainement cause par le virus dufibrome du Lapin ou de lEcureuil [80]. Lanimal prsentaitau centre de la corne droite une petite masse ferme, jauneple, arrondie, denviron 75 mm de diamtre, constitue dunamas de cellules sous-pithliales. La plupart dentre ellescontenaient de nombreux groupes de particules virales detype Poxvirus sous forme dinclusions intracytoplasmiquesosinophiles ou sans coloration. Les autres organes de lani-mal ne prsentaient aucun signe histologique dune infectionpar un Poxvirus. Il nexiste aucun traitement spcifique despoxviroses chez le Lapin. Le traitement de cette kratitevirale spontane du Lapin nest pas, notre connaissance,documente.

    C) KRATITES MYCOSIQUES [73]Un cas de kratite mycosique a t dcrit sur un jeune

    Lapin de compagnie par MAHENDRA et al. [73]. La mycosentait pas primitive mais compliquait un traumatisme cor-nen souill par des dbris vgtaux et trait par applicationlocale dantibiotiques et de corticostrodes. Grce la rali-sation de grattages cornens suivis dune mise en culture,lagent fongique tiologique fut identifi comme tant unchampignon opportuniste, Cochliobolus lunatus. Lanimalprsentait un piphora marqu, un ulcre et un dme cor-nens ainsi quun hypopion. Le traitement ventuel adminis-tr ce Lapin na pas t communiqu.

    5. Kratites de complication oukratites secondairesA) KRATITES COMPLIQUANT UNE AFFECTION DESORGANES OCULAIRES ACCESSOIRES [2, 4-5, 7, 24,43, 51, 60, 62, 64, 85, 92-93, 95, 104, 117-118]

    Chez le Lapin, toute conjonctivite ou dacryocystite aiguou volue peut provoquer une contamination infectieuse

  • * IM : injection par voie intramusculaire ; SC : injection par voie sous-cutane

    TABLEAU V. Antibiotiques et antibactriens utilisables par voie gnrale dans le traitement des kratites ulcreuses et/ou infectieuses du Lapin.

    20 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

  • ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 21

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    * IM : injection par voie intramusculaire ; SC : injection par voie sous-cutane

    TABLEAU V. (suite) Antibiotiques et antibactriens utilisables par voie gnrale dans le traitement des kratites ulcreuses et/ou infectieusesdu Lapin.

  • et/ou une infiltration inflammatoire de la corne, donc unekratite (Cf. Photographie I). Les bactries responsables de lacontamination infectieuse appartiennent aux genresPasteurella, Pseudomonas, Treponema (Treponema cuniculien particulier, agent de la syphilis du Lapin), Chlamydophilaou Staphylococcus (Staphylococcus aureus en particulier).Linfiltration de la corne par des cellules de linflammationpeut faire suite une conjonctivite virale (myxomatose ouvariole) ou des affections conjonctivales et palpbrales noninfectieuses : traumatisme, poussires, mauvaises conditionsdentretien, malformations palpbrales (entropion, distichia-sis, trichiasis). Le traitement doit tre tiologique : traitementantibiotique, correction chirurgicale des anomalies palp-brales, matrise des conditions dentretien...

    B) KRATITES POSTANESTHSIQUES [51, 118]Lors danesthsies, la xylazine (ROMPUNND) et la

    ktamine (IMALGENEND) en association notamment, lespaupires du Lapin restent ouvertes. La surface cornennereste alors expose au milieu extrieur et se dessche en par-tie. Ladministration peropratoire de gels ophtalmiques haute viscosit base de collagne ou de carbomre 934 Pvite lapparition dune kratite sche dexposition postanes-thsique.

    C) KRATOCONJONCTIVITE SCHE Chez le Lapin, la kratoconjonctivite sche ne correspond

    pas, comme chez le Chien, une affection oculaire spcifiquepour laquelle une anormalit du film lacrymal prcornenapparat spontanment. Elle dfinit en revanche lensembledu tableau anatomo-pathologique oculaire, et en particuliercornen, conscutif une scheresse oculaire chronique ouxrophtalmie. Elle se dveloppe secondairement desatteintes locales ou gnrales.

    a) Etiopathognie [5, 51, 62, 64, 79, 86, 88, 106, 118]

    Les dacryocystites chroniques se compliquent parfoisdatteintes infectieuses cornennes. Le pus pais, mis enpermanence, altre quantitativement et qualitativement lefilm lacrymal prcornen ce qui provoque des kratocon-jonctivites chroniques, sches le plus souvent.

    La lagophtalmie, quelle soit conscutive un dysfonc-tionnement palpbral, une buphtalmie ou encore uneexophtalmie, provoque une kratite voire une kratoconjonc-tivite sche, localise, par dfaut dtalement du film lacry-mal prcornen.

    Une carence prolonge en vitamine A entrane chez leLapin une xrophtalmie trs proche de celle dveloppe parlHomme dans les mmes conditions, ce qui fait du Lapinun excellent modle dtude [115]. Cette carence, souventalimentaire, peut aussi tre secondaire une affection hpa-tique chronique ou une malabsorption intestinale deslipides. Une carence de quatre six mois suffit pour provo-quer lapparition de signes de xrophtalmie. Celle-ci semanifeste principalement par une diminution voire uneperte totale des cellules mucus conjonctivales ainsi que

    par une kratinisation des cellules pithliales conjoncti-vales et cornennes, la vitamine A jouant un rle essentieldans la diffrenciation des pithliums pavimenteux. Ladiminution du nombre de cellules mucus provoque vi-demment la rduction voire la disparition de la phase pro-fonde muqueuse du film lacrymal prcornen, ce qui dsor-ganise lensemble du film, y compris la phase aqueuse quinadhre pas correctement la surface cornenne. De plus,la carence en vitamine A semble galement tre directementassocie une diminution de la production de la phaseaqueuse des larmes [106].

    b) Signes ophtalmologiques [53, 79, 88, 95, 106, 115]

    Les signes oculaires de la kratoconjonctivite sche duLapin sont identiques ceux observables chez le Chien.Lil est sale, chassieux. La corne prend un aspect ternedpoli, facettes. Dans le cas de la xrophtalmie parcarence en vitamine A, les premires lsions apparaissentau centre de la corne. La perte de brillance est rapidementsuivie (en sept dix jours) par la formation de multiplesrosions cornennes ponctiformes qui progressivementconfluent pour donner la corne un vritable aspect de"peau dorange". Lpithlium antrieur de la corne sekratinise peu peu et, dans les cas volus, prend une pig-mentation bruntre. Les carences svres et prolonges sesoldent par une kratinisation cornenne complte, desulcrations profondes voire une ncrose de la substancepropre de la corne. La scheresse oculaire favorise le dve-loppement des kratoconjonctivites infectieuses. Dans cer-tains cas, linflammation et les coulements oculaires asso-cis peuvent partiellement masquer voire pallier le proces-sus de xrophtalmie.

    c) Diagnostic [1-2, 62, 64, 93, 118]

    Le diagnostic est essentiellement bas sur lobservationdes signes ophtalmologiques voqus prcdemment. Lascheresse lacrymale peut tre objective par le test deSCHIRMER bien quil soit de ralisation et dinterprtationdifficiles chez le Lapin. Les valeurs normales chez le Lapinauraient pour moyenne 5,3 +/- 2,9 mm/min [1]. Cependantles valeurs observes admettent de nettes diffrences entreles individus, puisque des Lapins nains no-zlandais peu-vent prsenter des valeurs exceptionnellement leves : 12,0 +/- 2,5 mm/min [1], alors que dautres sujets ont desvaleurs trs basses, voire nulles. Le test de SCHIRMER chezle Lapin serait en fait plus prcieux dans lapprciation dunphnomne inflammatoire ou dune irritation oculaire valeurleve en raison de lpiphora que dans le diagnostic dunekratoconjonctivite sche.

    d) Pronostic et traitement [51, 53, 79, 95, 106, 113, 118]

    La xrophtalmie par carence vitaminique est rversible.Peu volue, elle rpond trs bien ladministration localeet gnrale de vitamine A. Localement on ladministre sousforme de pommade (VITAMINE A DULCISND) 2 fois parjour jusqu amlioration. Le traitement par voie gnraleest amorc par injection intramusculaire dun complexevitaminique A.D3.E (COFAVIT 500ND) la posologie de10.000 20.000 U.I. de vitamine A/kg. Le relais est prisensuite par voie orale raison de 100.000 U.I. de vitamine A

    22 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

  • ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 23

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    par litre deau de boisson et par jour (COFAVIT 100ND).Ladminis-tration par voie systmique de vitamine A sembletre efficace elle seule. Les lsions cornennes disparais-sent avant mme la rgnration des cellules mucusconjonctivales.

    La protection de la corne sche passe aussi par ladmi-nistration trs frquente 2 gouttes 6 fois par jour de collyres faible viscosit senss remplacer ou suppler la phaseaqueuse du film lacrymal dfaillant : NaCl isotonique(LARMES ARTIFICIELLES MARTINETND), dextran(DIALENSND), alcool polyvinylique (LIQUIFIMND). Lesgels ophtalmiques haute viscosit garantissent une actionprolonge sur la corne et sont administrs raison de 1 goutte 3 4 fois par jour : collagne (HUMISCREENND),polyvinyle pyrolidone (DULCILARMESND), carbomre934 P (OCRYGELND), chondrotine sulfate (LACRY-POPSND), acide polyacrylique (LACRIGELND), mthylcel-lulose (METHYLCELLULOSEND). Un collyre antibiotique large spectre peut savrer indispensable afin dviter toutecomplication bactrienne de la xrophtalmie( Cf. Tableau I).Un gel ophtalmique base dacide fusidique (FUCITHAL-MICND) peut tre galement indiqu en raison de son actionantibactrienne et de son effet mouillant (Cf. Tableau III).

    Les kratinisations tendues et les pigmentations cor-nennes sont irrversibles. Les pigmentations sans ulcrepeuvent tre attnues par ladministration dun collyre ladexamthasone (MAXIDEXND) 2 fois par jour pendant 7 jours. Les pigmentations tendues lensemble de la cor-ne peuvent tre corriges par kratectomie superficielle,quon ne peut entreprendre que lorsque la scheresse oculaireest convenablement contrle.

    D) KRATITES CONSCUTIVES AUX DYSTROPHIESET AUX DGNRESCENCES CORNENNES [2, 5,13, 18, 28, 55, 88, 95, 111, 118]

    Il existe chez les Lagomorphes, comme chez lesCarnivores domestiques, des dgnrescences et des dystro-phies cornennes (Cf. 6.) responsables de remaniementsstructuraux cornens plus ou moins importants. Il peut sagir,pour certaines dgnrescences, de dpts minraux ou lipi-diques concernant la substance propre de la corne. Dans lesdystrophies et les autres dgnrescences, on peut rencontrerune dsorganisation de lagencement des cellules pithlialesantrieures, des fibres de collagne et/ou des kratocytes dela substance propre de la corne, ou encore de lpithliumpostrieur de la corne. Lensemble de ces modifications peuttre lorigine dun chimiotactisme local et par consquentdune infiltration vasculo-cellulaire ou dmateuse des dif-frentes couches de la corne. Le traitement dpend de lanature du remaniement cornen responsable de la kratite.On utilise le plus souvent des anti-inflammatoires non stro-diens comme lindomthacine (INDOCOLLYREND), enlabsence dhmorragie locale. Les topiques base de corti-costrodes comme la dexamthasone (MAXIDEXND) peu-vent tre utiliss en labsence dulcre cornen ou de glau-come congnital.

    6. Dystrophies et dgnres-cences cornennes

    A) DFINITIONS [18, 30, 81, 90, 110] De faon courante, les deux termes sont tord confon-

    dus mme si la confusion des signes ophtalmologiquesdemeure souvent lgitime. Les diffrences thoriques sontpourtant significatives. Etymologiquement et dune maniregnrale, la dystrophie (du Grec : nourrir) dsigneune modification de la forme et du fonctionnement dunorgane la suite dune nutrition dficiente. En ce quiconcerne la corne, la dficience nutritionnelle est rarementmise en vidence et la dystrophie rpond plus souvent uneanomalie de dveloppement. Elle dsigne donc une affectionprimitive, spontane, en principe non associe une maladiesystmique. Latteinte est initialement non inflammatoire(corne avasculaire), bilatrale, symtrique et peu volutive.Les premiers signes apparaissent chez le jeune Lapin puisquecertaines dystrophies cornennes sont reprables ds lge dedeux semaines.

    La dgnrescence cornenne dsigne une modificationstructurale pathologique acquise de la corne correspondant une perte de ses qualits intrinsques, quelles soient anato-miques ou physiologiques, secondaire une affection localeou gnrale prexistante. Ainsi, une dgnrescence cor-nenne peut apparatre la faveur dune affection systmiqueinfectieuse ou mtabolique, dun traumatisme local profond,dun acte de chirurgie oculaire ou secondairement nim-porte quelle atteinte oculaire grave. En outre, la dgnres-cence cornenne peut suivre, accompagner ou dclencherune inflammation locale qui se manifeste par une infiltrationvasculo-cellulaire de la corne, une mlanose ou un dmein situ. La dgnrescence cornenne est uni- ou bilatrale,pas forcment symtrique. Sa vitesse et sa dure dvolutiondpendent de laffection primitive et de son contrle . Elleconcerne plus gnralement les Lapins adultes gs de plusdun an. Ainsi, suivant le stade dvolution de latteinte cor-nenne et pour peu quune dystrophie soit complique dune kratite inflammatoire, dgnrescence etdystrophie cornennes peuvent tre effectivement difficiles distinguer cliniquement dans certains cas.

    B) DYSTROPHIES CORNENNESa) Dystrophies de lpithlium antrieur de la corne [2,

    5, 81, 90, 118]

    Ces affections cornennes sont couramment dcriteschez lHomme ainsi que chez le Chien. Elles se manifestentle plus souvent par une opacification cornenne progressivemarque et par la formation dulcres cornens pithliauxdouloureux et rcidivants. Les dystrophies pithliales primi-tives du Lapin de compagnie ou de laboratoire sont ce jourtrs peu documentes. PORT et DODD ont rapport en 1983le cas de deux Lapins blancs no-zlandais femelles ges dequatre mois prsentant des opacits cornennes unilatrales[90]. Une dystrophie de lpithlium antrieur cornen a ga-lement t dcrite chez le Lapin American Dutch Belted parMOORE et al. en 1987 [81]. Dans tous les cas, lanomalie

  • semble hrditaire mais les modalits de transmissiondemandent de plus amples explorations.

    Les opacits se prsentent sous la forme dune pelliculelimbique lisse, en relief, qui progresse irrgulirement vers lecentre de la corne de faon former une vritable couronnetout autour de celle-ci. Lexamen au biomicroscope montreque les lsions sont pithliales et sous-pithliales, focales,curvilignes, linaires ou en plaques. La densit optique de cesopacits varie du piquet granuleux la tache opaque. Ellespeuvent voluer en huit jours seulement, sans aucune mani-festation inflammatoire locale ou loco-rgionale associe.

    A lhistologie, lpaisseur de la membrane basale delpithlium antrieur de la corne est souvent diminue enregard de la zone affecte. Dans les aires cornennes intens-ment touches, les fibres de collagne de la substance propresont dsorganises. Pour les cas les plus graves, les cellulesbasales de lpithlium antrieur se dtachent localement deleur membrane basale.

    Aucun traitement de cette affection cornenne nest pos-sible. Seule la prvention par le retrait de la reproduction desadultes porteurs semble primer ce jour.

    Remarque

    Ltude de la dystrophie cornenne antrieure du Lapinprsente un double intrt. Dune part, sa connaissance et samatrise sont indispensables la bonne interprtation desrsultats des tudes exprimentales de toxicologie oculaire.Dautre part, la dystrophie de lpithlium antrieur de la cor-ne du Lapin American Dutch Belted est morphologique-ment unique. Elle est toutefois, sur le plan biomicroscopiqueet histologique, trs proche de celle connue chez lHommepour lequel elle reprsente une des premires causes dul-cres cornens rcidivants. Ces Lapins reprsentent donc desmodles cls dans ltude des mcanismes de formation de lamembrane basale de lpithlium cornen et des relationsquelle entretient dune part avec le stroma et dautre partavec les cellules basales de lpithlium antrieur de la cor-ne.

    b) Dystrophies de la substance propre de la corne oudystrophies stromales [30]

    Une dystrophie stromale profonde hrditaire a t dcriteen 1998 chez le Lapin no-zlandais albinos par DURAND-CAVAGNA et al. [30]. Les modalits exactes de la transmis-sion et lhritabilit de cette anomalie nont pas t prcis-ment dtermines. Elle se traduit, en avant de la lame limi-tante postrieure, par lapparition spontane et isole de dis-crtes opacits focales ou multifocales au centre ou en pri-phrie de la corne. Les lsions sont observables ds lge dedeux semaines. La microscopie montre dans les rgions opa-cifies de minuscules agrgats cellulaires linaires "pr-des-cemtiques" constitus de cellules ectopiques de lpithliumpostrieur de la corne. Cette affection bnigne nvoluepresque pas et naffecte pas la vision. Aucun traitement nestncessaire mais il convient videmment dcarter les ani-maux affects de la reproduction. A notre connaissance, ladystrophie stromale profonde du Lapin blanc no-zlandaisdemeure actuellement le seul modle dcrit dans cetteespce.

    C) DGNRESCENCES CORNENNES

    a) Dgnrescences cornennes pithliale et sous-pi-thliale antrieures conscutives aux kratites chroniques[18, 79, 110, 115, 118]

    Il sagit, comme chez les Carnivores domestiques, de dg-nrescences pigmentaires compliquant les souffrances cor-nennes chroniques comme celles rencontres dans laxrophtalmie, les kratites chroniques par malformations pal-pbrales (pigmentation mlanique en regard de la zone defrottement), et les dacryocystites chroniques (colonisation dela surface cornenne par des cellules conjonctivales). Ilnexiste pas de traitement spcifique de ce type de dgn-rescence ; il faut soigner la kratite chronique.

    b) Dgnrescence lipidique de la corne ou lipidosecornenne

    1) Etiologie [2, 32, 49, 51, 57, 62, 88, 102, 109, 117-118]

    Si la lipidose cornenne hrditaire a dj t dcrite chezle Lapin [62], la cause alimentaire semble cependant domi-ner. En effet, une alimentation quotidienne trop riche en cho-lestrol et autres matires grasses peut tre lorigine de lipi-doses cornennes chez le Lapin de compagnie. Le type dergime alimentaire (2 % de cholestrol, 6 % dhuile de noixpendant 3 mois) spcifiquement mis en place pour lesmodles exprimentaux dans les tudes sur lathrosclrose[32], peut tre accidentellement reproduit pour lentretiendun Lapin domestique. Une corrlation a pu tre tablieentre une forte cholestrolmie (10 mmol/l contre un tauxnormal infrieur 2,27 mmol/l) et lobservation de lsions delipidose cornenne chez des Lapins dexprimentation [102].Notons que la lipidose cornenne a galement t dcritechez des Lapins nourris avec un rgime alimentaire conte-nant 10 % de poisson [102]. De mme, une lipidose oculairebilatrale a t diagnostique sur un Lapin queue de coton(Sylvilagus florida) apprivois qui avait reu une alimenta-tion lacte pendant 20 mois [49].

    2) Signes ophtalmologiques et diagnostic [32, 49, 57, 102,109]

    Les lsions oculaires sont bilatrales symtriques et se pr-sentent sous la forme dopacits cornennes pithlialesblanchtres ou cristallines, localises ou diffuses, semi-circu-laires en priphrie de la corne. Parfois le dpt se ralisedans la substance propre de la corne o il prend une formearrondie. La lipidose peut se compliquer dune uvite ant-rieure car les dpts lipidiques peuvent infiltrer liris ; ilsapparaissent alors sous la forme de rayons granuleux blancs la face antrieure (Facies anterior) de celui-ci. La sclre peuttre galement concerne par ces dpts. La corne, la cho-rode, liris et le corps ciliaire (Corpus ciliare) sont infiltrsde macrophages chargs de lipides. Le diagnostic diffrentieldoit prendre en compte les lymphosarcomes oculaires ouautres noplasmes, les kratites chroniques, les uvites trau-matiques et les inflammations granulomateuses dues unemycose systmique, une mycobactrie atypique ou une infes-tation par Encephalitozoon cuniculi.

    24 BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

  • ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE LIL DU LAPIN DOMESTIQUE 25

    Revue Md. Vt., 2001, 152, 1, 5-28

    3) Pronostic et traitement [18, 32]

    Ces lsions sont irrversibles mais le changement alimen-taire simpose toutefois. Toute inflammation oculaire simul-tane la lipidose cornenne (kratite, uvite) ncessite untraitement local laide dun anti-inflammatoire strodiencomme par exemple la dexamthasone (MAXIDEXND) rai-son de 1 goutte 2 fois par jour pendant 7 jours. Les opacitscornennes trop tendues peuvent justifier une kratectomiesuperficielle.

    c) Dgnrescence de lpithlium postrieur de la cor-ne associe au glaucome [2, 4-5, 12-13, 18, 23, 41, 51, 59,62, 77, 93, 110, 117-118]

    Dans lvolution dun glaucome congnital, laugmen-tation du diamtre cornen due la buphtalmie et lhyperten-sion oculaire dtruisent tout ou partie de lpithlium post-rieur de la corne. Apparaissent alors un dme cornen dif-fus (par hyperhydratation cornenne) et des stries isoles oudendritiques sur la lame limitante postrieure. Si la pressionintra-oculaire se normalise (suite latrophie des corpsciliaires), ldme peut sattnuer mais les stries persistent.Si la pression intra-oculaire demeure leve de faon prolon-ge, la corne peut partiellement ou totalement se ncroser.Une rupture cornenne est alors craindre.

    Le pronostic est plus li lvolution du glaucome qula dgnrescence cornenne elle-mme. Il est toujours trssombre car, chez le Lapin, le glaucome est souvent hrdi-taire et ne rpond vritablement aucun traitement mdical.La buphtalmie est irrversible et la vision trs vite perdue.Lopacification cornenne nest alors que secondaire et soncontrle relve plus de lesthtique que du souci fonctionnelde lorgane.

    Ldme peut tre attnu par administration locale decollyres hyperosmotiques base de srum glucos 30 %, deglycrine anhydre ou, pour les traitements au long cours, base doctyl-phnol polyoxythylne ou polysilane (OPH-TASILOXANE collyreND), 2 gouttes 5 6 fois par jour, puis2 instillations quotidiennes quelques jours plus tard. La for-mation des stries sur la lame limitante postrieure est irrver-sible et nadmet aucun traitement. Quand elle existe, lancrose cornenne impose lnuclation.

    d) Dgnrescence de lpithlium postrieur de la cor-ne conscutive une uvite antrieure [2, 5, 51, 60, 117-118]

    Les uvites antrieures du Lapin domestique ont des causesaussi varies que des traumatismes oculaires, des infectionssystmiques (pasteurellose, staphylococcie), et des rupturesde la partie antrieure de la capsule du cristallin (Capsulalentis), quelles soient dorigine traumatique ou parasitaire(infestation Encephalitozoon cuniculi). Les uvites svrespeuvent se compliquer dune atteinte voire de la destructionde lpithlium postrieur de la corne qui entrane la forma-tion dun dme stromal dense, diffus et permanent. Bienque lpithlium postrieur de la corne du Lapin se dis-tingue par sa capacit de rgnration suite une altrationlgre (Cf. 3.E.a.), une destruction massive ne bnficie enrevanche daucune cicatrisation. Dans tous les cas, il faut

    imprativement traiter luvite, en sattachant son tiologieprcise.

    e) Dgnrescence cicatricielle de la corne [18]

    La cicatrisation des kratites ulcreuses profondes conduit une perte locale de transparence de la corne (taie cor-nenne) par dsorganisation de sa substance propre.

    f) Dgnrescences cornennes iatrognes

    Toute chirurgie ncessitant une incision cornenne perfo-rante (chirurgie de liris, du cristallin) peut se compliquerdune destruction partielle de lpithlium postrieur de lacorne ou dune dsorganisation des fibres de collagne de sasubstance propre le long de lincision. Des opacits cicatri-cielles ou des dmes cornens postchirurgicaux peuventalors apparatre secondairement.

    RemerciementsLes auteurs tiennent adresser leurs plus vifs remercie-

    ments :

    Madame Yvette GRAS (E.N.V.T.1) pour son aide pr-cieuse dans la ralisation de la planche photographique ;

    Monsieur Franck WAGNER (Tierrztliche Hochschule,Hannovre) pour le prt de photographies [117] ;

    Mademoiselle Isabelle RAYMOND (E.N.V.T.),Messieurs Jacques DUCOS DE LAHITTE (E.N.V.T.) etAlain RGNIER (E.N.V.T) pour le prt de photographies.

    Bibliographie1. ABRAMS K.L., BROOKS D.E., FUNK R.S. et al. : Evaluation of the

    Schirmer tear test in clinically normal rabbits. Am. J. Vet. Res., 1990,51, 1912-1913.

    2. BAGLE, L.H. et LAVACH D. : Ophthalimic diseases of rabbits.Calif. Vet., 1995, 49, 7-9.

    3. BARONE R., PAVAUX C., BLIN P.C. et al. : Atlas dAnatomie duLapin. Paris, Masson & Cie, 1973, 219 pages.

    4. BAUCK L. : Ophthalmic conditions in pet rabbits and rodents. Comp.Cont. Educ. Pract. Vet., 1989, 11, 258-268.

    5. BELHORN R.W. : Laboratory animal ophthalmology. In : GELATTK.N. (d.). Veterinary ophthalmology , 2e ed., Philadelphia, Lea &Febiger, 1991, 656-679.

    6. BEYNON P.H. et COOPER J.E. : Manual of exotic pets. Chelthenam,British Small Animal Veterinary Association, 1991, 312 pages.

    7. BOUCHER S. et NOUAILLE L. : Maladie des lapins. Manuel pra-tique. Paris, Ed. France Agricole, 1996, 255 pages.

    8. BRARD C. : Effet dune association gentamicine-dexamthasone-EDTA-Tris sur un type dulcre cornen exprimental (alkali-burned-cornea) chez le lapin. 52 p. Thse : Md. Vt. : Toulouse : 1985, 85-TOU-061.

    9. BROWN M.R.W. et RICHARDS R.H.E. : Effect of ethylenediamine-tetra acetate on the resistance of Pseudomonas aeruginosa to anti-bacterial agents. Nature, 1965, 207, 1391-1393.

    10. BROWN S.I., WELLER C.A. et VIDRICH A.M. : Effect of corticos-teroids on corneal collagenase of rabbits. Am. J. Ophthalmol., 1976,70, 744-747.

    11. BRUGERE-PICOUX J. : Pathologie du Lapin de Compagnie et desRongeurs Domestiques. cole Nationale Vtrinaire dAlfort,Service de Pathologie Mdicale du Btail et des Animaux de Basse-cour, 1989, 322 pages.

    1. cole Nationale Vtrinaire de Toulouse.

  • 12. BUNT-MILAN A.H., DENNIS M.B. et BENSINGER R.E. :Hereditary glaucoma and buphthalmia in the rabbit. Prog. Clin. Biol.Res., 1987, 247, 397-406.

    13. BURROWS A.M., SMITH T.D. ATKINSON C.S. et al. :Development of ocular hypertension in congenitally buphthalmicrabbits. Lab. Anim. Sci., 1995, 45, 443-444.

    14. CALLEGAN M.C., HILL J.M., INSLER M.S. et al. : Methicillin-resistant Staphylococcus aureus keratitis in the rabbit : therapy withciprofloxacin, vancomycin and cefazolin. Curr. Eye Res., 1992, 11,1111-1119.

    15. CALLEGAN M.C., ENGEL L.S., CLINCH T.E. et al. : Efficacy oftobramycin drops applied to collagen shields for experimental sta-phylococcal keratitis. Curr. Eye Res., 1994, 13, 875-878.

    16. CALLEGAN M.C., ENGEL L.S., HILL J.M. et al. : Ciprofloxacinversus tobramycin for the treatment of staphylococal keratitis. Invest.Ophthalmol. Vis. Sci., 1994, 35, 1033-1037.

    17. CHAUDIEU G. : Les corps trangers intraoculaires. Le point vtri-naire, 1994, 26, 117-124.

    18. CHAUDIEU G. et MOLON-NOBLOT S. : Dystrophies et dgn-rescences cornennes. P.M.C.A.C., 1997, 32 suppl. 4, 103-111.

    19. CHEVALIER-DUCLUZAUX P. : Contribution ltude de la cica-trisation cornenne : influence dun gel de collagne IV placentairehumain sur le recouvrement pithlial aprs brlure chimique. 83 p.Thse : Md. Vt. : Lyon : 1991, 91-LY-009.

    20. CHRISTIAENS G. : Les tests dirritation oculaire. tude exprimen-tale de lemploi des courants thermostimul. 122 p. Thse : Md.Vt. : Alfort : 1993, 93-ALF-070.

    21. CLAVERT A. : tudes des malformations oculaires dtermines chezlembryon de Lapin par le cyclophosphamide. Arch. Anat. Histol.Embryol., 1970, 53, 209-271.

    22. COLLINS B.R. : Utilisation des anti-infectieux chez le lapin, les ron-geurs et autres petits mammifres. In : Symposium international dethrapeutique anti-infectieuse des nouveaux animaux de compagnie,Orlando (Floride), 18 janv. 1995. Veterinary Learning Systems Co,Inc, 1995, 3-10.

    23. COOK C.S. : Ocular embryology and congenital malformations. In :GELATT K.N. (d.). Veterinary Ophthalmology 3e ed., Baltimore,Lippincott Williams & Wilkins, 1999, Chap. 1, 3-30.

    24. DELONG D. et MANNING P.J. : Bacterial diseases. In : MANNINGP.J., RINGLER D.H., NEWCOMER C.E. (eds). The biology of thelaboratory rabbit, 2e ed. : Londres, Academic Press Inc, 1994, Chap.8, 129-162.

    25. DONSHIK P.C., BERMAN M.B., DOHLMAN C.H. et al. : Effect oftopical corticosteroids on ulceration in alkali-burned corneas. Arch.Ophthalmol., 1978, 96, 2117-2120.

    26. DOUGTHY M.J. : Scanning electron microscopy study of celldimensions of rabbit corneal epithelium surface. Cornea, 1991, 10,149-155.

    27. DOUGHTY M.J. et SIVAK J.G. : Scanning electron microscope eva-luation of the corneal endothelium in a case of unilateral microph-thalmos with retrobulbar cyst in the pigmented rabbit. Cornea, 1993,12, 341-347.

    28. DOUGHTY M.J. : The cornea and corneal endothelium in the agedrabbit. Ophthalmol. Vis. Sci., 1994, 71, 809-818.

    29. DUKE-ELDER S. et ASHTON N. : Action of cortisone on tissuereactions of inflammation and repair with special reference to the eye.Br. Ophthalmol., 1951, 35, 695-701.

    30. DURAND-CAVAGNA G., HUBERT M.F. GERIN G., et al. :Spontaneous pre-Descemets membrane corneal opacities in rabbits.Lab. Anim. Sci., 1998, 48, 310-313.

    31. ESPOSITO S., THADEPALLI H., BENLER H.A. et al. : Enoxacintherapy for experimental Pseudomonas keratitis. J. Chemother.,1991, 3, 147-151.

    32. FALLON M.T., REINHARD M.K., DARIF C.A. et al. : Diagnosticexercise : eye lesions in a rabbit. Lab. Anim. Sci., 1989, 38, 612-613.

    33. FENNER F. : Poxviridae. In : OSTERHAUS A.D.M.E. (d.) : Virusinfections of vertebrates. Vol 5 : Virus infections of rodents and lago-morphs. Amsterdam, Elsevier Science BV, 1994, 1-4.

    34. FENNER F. : Squirrel fibroma viruses. In : OSTERHAUS A.D.M.E.(d.) : Virus infections of vertebrates. Vol 5 : Virus infections ofrodents and lagomorphs. Amsterdam, Elsevier Science BV, 1994,Chap. 6, 41-43.

    35. FENNER F. : Poxviruses of lagomorphs. In : OSTERHAUSA.D.M.E. (d.) : Virus infections of vertebrates. Vol 5 : Virus infec-tions of rodents and lagomorphs. Amsterdam, Elsevier Science BV,1994, 47-49.

    36. FENNER F. : Rabbitpox virus. In : OSTERHAUS A.D.M.E. (d.) :Virus infections of vertebrates. Vol 5 : Virus infections of rodents and lagomorphs. Amsterdam, Elsevier Science BV, 1994, Chap. 8,51-57.

    37. FENNER F. : Myxoma virus. In : OSTERHAUS A.D.M.E. (d.) :Virus infections of vertebrates. Vol 5 : Virus infections of rodents and lagomorp