Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

47
Programme des subventions ROCARE pour la recherche en éducation / Edition 2011 THEME Analyse socio-économique du rendement de la formation professionnelle continue dans le secteur privé formel au Burkina Faso Rapport final Chercheurs : BAGRE Wendwaoga Olivier BAKO Parfait OUEDRAOGO/SAWADOGO Honorine Pegdwendé. Parrain : Dr KIBORA Ouhonyioué Ludovic Pays : Burkina Faso Recherche financée par le Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE)

Transcript of Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

Page 1: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

Programme des subventions ROCARE pour la recherche en éducation / Edition 2011

THEME

Analyse socio-économique du rendement de la formation

professionnelle continue dans le secteur privé formel au Burkina

Faso

Rapport final

Chercheurs :

• BAGRE Wendwaoga Olivier • BAKO Parfait • OUEDRAOGO/SAWADOGO Honorine Pegdwendé.

Parrain : Dr KIBORA Ouhonyioué Ludovic

Pays : Burkina Faso Recherche financée par le

Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Edu cation (ROCARE)

Page 2: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

II

avec le soutien du projet Centre d’Excellence Régionale de l’UEMOA

et du Ministère des Affaires Etrangères des Pays Bas

----------

Page 3: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

II

Table des matières

TABLE DES MATIERES................................. ........................................................... II

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS ................... ............................................. III

LISTES DES TABLEAUX ................................ ......................................................... IV

INTRODUCTION ........................................................................................................ 1

I. REVUE DE LITTERATURE ............................... ................................................. 6

1.1. Théorie du capital humain : Approche et formalisati on ............................. 6 1.1.1. Aperçu sur la théorie du capital humain ....................................................... 6 1.1.2. Le modèle théorique..................................................................................... 6 1.1.3. La prise en compte de la formation professionnelle continue....................... 9

1.2. Etat des lieux de la formation professionnelle cont inue au Burkina Faso 10

II. ANALYSE ECONOMETRIQUE ET RESULTATS ............. .................................. 15

2.1. Méthodologie de recherche .................... ....................................................... 15 2.1.1. Méthode d’enquête et présentation des données ....................................... 15 2.1.2. Le modèle empirique................................................................................... 18 2.1.3. Techniques d’estimation et présentation des variables .......................... 20

2.1.3.1. Méthodes d’estimations ...................................................................... 20 2.1.3.2. Présentation et justification des variables ........................................... 21

2.2. Analyse et interprétation des résultats....... ................................................... 23 2.2.1. Analyse qualitative des perceptions des chefs d’entreprise sur la formation professionnelle continue ....................................................................................... 23 2.2.2. Déterminants et impacts de la formation professionnelle continue ............. 28

2.2.2.1. Perceptions des employés sur la formation professionnelle................. 28 2.2.2.2. Analyse des déterminants de la formation professionnelle continue ... 28 2.2.2.3. Impacts de la formation sur le revenu................................................... 30

CONCLUSION ......................................................................................................... 33

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES........................ ............................................ 35

Annexe 1 : Fiche d’enquête quantitative ............ ....................................................D

Annexe 2 : Guide d’entretien qualitatif ............ .......................................................H

Page 4: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

III

Liste des sigles et abréviations

ANPE : 'Agence Nationale pour l'Emploi BIT : Bureau International du Travail CNPB : Conseil National du Patronat Burkinabé FAFPA : Fonds d'Appui à la Formation Professionnelle

GIE : Groupements d’intérêt économique

MCO : Moindres Carrés Ordinaires ONEF : Observatoire National de l’Emploi et de la Formation professionnelle ONPE : Office National de la Promotion de l'Emploi PME/PMI : Petites et moyennes Entreprises/ Petites et moyennes industries SA : Société Anonyme SARL : Société Anonyme à Responsabilité Limitée SOFITEX : Société des Fibres Textiles du Burkina Faso UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

Page 5: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

IV

Listes des tableaux

Tableau 1: Répartition des enquêtés par arrondissements et par caractéristiques ... 16

Tableau 2 : Revenus mensuels en FCFA des enquêtés par secteurs d’activité........ 17 Tableau 3: Répartition des enquêtés en % selon le niveau d’éducation et par sexe . 17

Tableau 4 : Les niveaux de revenus en FCFA selon les niveaux d’éducation ............ 17 Tableau 5 : Répartition des enquêtés en % selon l’éducation des parents ................. 18 Tableau 6 : Répartition des enquêtés en % selon le niveau d’éducation des parents.................................................................................................................................................. 18

Tableau 7: Statistiques descriptives :................................................................................. 23

Tableau 8: Résultats de la régression du modèle (3)...................................................... 29

Tableau 9 : Tableau de prédiction du modèle probit ....................................................... 29

Tableau 10 Résultats de l’estimation du modèle (2) et effets marginaux .................... 30 Tableau 11: Résultats d’estimation du modèle (1)........................................................... 31

Page 6: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

1

Introduction L’expérience des Dragons d’Asie a montré dans les années 80 l’importance de

l’éducation et de la formation professionnelle dans le développement des pays. Ces

Etats d’Asie du sud-est ont connu un développement économique fulgurant en axant

leurs politiques sur plusieurs volets dont le développement de l’éducation et la

formation professionnelle. L’éducation et la formation sont reconnues comme étant

des facteurs qui améliorent les compétences et la productivité des individus au sein

d’une nation ou d’une entreprise. Elles sont des composantes de ce qu’on désigne

par le terme général de capital humain. Le capital humain désigne l’ensemble des

facultés qu’un individu peut mobiliser pour s’assurer des revenus monétaires futurs

(ses connaissances et ses aptitudes professionnelles, par exemple). Grâce à cette

notion, il est devenu courant de considérer les travailleurs qualifiés comme un

élément du capital de l’entreprise. Nombreuses sont les sociétés qui, aujourd’hui,

mènent des politiques de formation en faveur de leur personnel, dans le but de

renforcer leurs compétences et de rendre celles-ci compatibles avec les nécessités

techniques qui sont les leurs. La valorisation de ce savoir peut s’analyser de la même

manière que l’évolution d’un élément de capital physique ou financier.

La formation revêt deux aspects : la formation initiale et la formation continue. La

formation initiale, par définition, est la formation de base. La formation continue se

déroule parallèlement, ou même au sein des activités professionnelles des

apprenants. Elle peut prendre différentes formes, dont la reprise des études et la

valorisation des acquis de l’expérience. Les formes d’éducation populaire ou

d’autoformation en font également partie. Toutefois, la formation initiale n’est pas

concurrente de la formation continue. Elle peut même en constituer un déterminant

important (Lillard et Tan, 1986). Le niveau d’éducation élevé dans la plupart des pays

européens n’a pas empêché la mise en place progressive des systèmes de formation

professionnelle continue et le fonctionnement de ces systèmes montre qu’une

meilleure formation initiale tend au contraire à accroître le besoin de la formation

continue (Beji et al, 2004). Tout comme la formation initiale, la formation continue, en

permettant l’adaptation des salariés aux évolutions technologiques et économiques,

est de plus en plus perçue comme un investissement (Carriou et Jeger, 1997). Il faut

cependant noter que les études sur la théorie du capital humain se sont intéressées

Page 7: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

2

dans la majeure partie des cas à la formation initiale. En effet, les chercheurs

estimaient que la rentabilité de la formation professionnelle continue est

essentiellement déterminée par le lien entre expérience professionnelle et évolution

salariale (Beji et al, 2004). De nombreuses études (Bishop, 1991, Bartel, 2000) ont

pourtant montré que la formation professionnelle continue a un impact intrinsèque

sur la productivité des individus et des entreprises. C’est ce qui justifie la nécessité

d’analyser son importance.

Dans son livre Capital humain, Becker (1964, 1975) distingue dans la formation

professionnelle le capital humain général, qui améliore la productivité du travailleur

de la même façon dans toutes les entreprises du capital humain spécifique, dont

l’amélioration n’est perceptible que dans l’entreprise qui l’a formé. Cette distinction

pose la problématique du financement de la formation. Qui doit assurer les coûts ?

Pour Becker, ce sont les travailleurs et non les entreprises qui doivent assurer le

financement de la formation générale car l’entreprise faisant face au risque d’un

départ éventuel de ce dernier (poaching) sera peu disposée à le faire. Dans le cas du

capital humain spécifique, la mobilité potentielle du salarié interdit à l’employeur de

s’approprier l’intégralité des bénéfices de la formation, tandis que l’absence de valeur

de la formation sur le marché s’oppose à la prise en charge intégrale de

l’investissement par le salarié (Simonnet, 2003 ). On assistera donc a un partage

aussi bien des coûts que des bénéfices de l’investissement.

Cet argumentaire de Becker sur le financement de la formation a influencé non

seulement les débats théoriques portant sur le financement de la formation mais

aussi la mise en place de politiques de formation. Lees and Chiplin (1970) ont eu

recourt à l’analyse de Becker pour soutenir leur affirmation que le système de

subvention-taxation dans les actes de formation industrielle de 1964 n’avait pas de

bases économiques logiques. Cependant, certains travaux empiriques dont ceux de

Stevens (1994), Stankiewic (1995), Acemoglu and Pischke (1999), ont abouti à

l’analyse que les entreprises investissent tout de même en formation générale.

L’imperfection et la non-compétitivité du marché du travail surtout dans les pays en

développement seraient l’explication plausible du financement du capital humain

général par les entreprises. En considérant la formation générale comme un facteur

de production du potentiel d’adaptation, Stankiewic (1995) montre que son

financement par les entreprises est un enjeu essentiel de leur stratégie qui ne peut

être abandonnée à la seule initiative des salariés. Pour Katz et Ziderman (1990),

Page 8: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

3

contrairement au postulat de Becker (1964), les employés formés ne peuvent pas

commencer à travailler immédiatement et rapporter la pleine valeur de leur formation

sans couts de transaction. De plus, l’entreprise qui veut recruter un individu « formé »

ne possède pas beaucoup d’informations sur l’ampleur et le type de formation

continue que les candidats ont suivi comme semble le suggérer Becker (1964). Elle

fait donc face à des couts liés à l’information (cout d’opportunité, dépenses réelles,

exposition accrue au risque). Ainsi l’asymétrie informationnelle entre formation et

l’entreprise recruteuse d’une part et les couts de transactions d’autre part réduisent

le bénéfice net que l’employé avec une formation générale peut obtenir en migrant

vers une autre entreprise. C’est donc les entreprises qui seront préparées à investir

dans la formation générale. Ce constat remet donc en cause les prédictions du

modèle de Becker. Pour Stevens (1994), quand les entreprises ont un pouvoir sur le

marché du travail, une entreprise peut obtenir un retour sur investissement en

formation générale, en dépit du fait que ces connaissances sont transférables aux

autres firmes. La conséquence du financement en formation générale est la baisse

de l’investissement global dans le marché du travail dû à l’externalité positive dont

bénéficient les autres entreprises.

La formation professionnelle continue contribue à augmenter la valeur ajoutée

dégagée par l'entreprise toutes choses égales par ailleurs. C’est un investissement

profitable pour l’entreprise et pour les salariés. Pour Aubert et al (2006), la formation

continue est plus profitable pour l’entreprise car elle conserverait la majeure partie du

gain de productivité, l’augmentation de salaire accordée aux salariés après une

formation continue ne dépassant pas la moitié du gain de productivité. Notons

cependant que l’existence de ce gain de productivité est difficile à tester et il faut

convenir avec Blundell et al(1999) que retenir une description très agrégée de la

formation ignore les importantes différences dans les déterminants et les effets

possibles des différents types de formations conduisant ainsi à des erreurs de

mesures.

Néanmoins, deux méthodes d’évaluation du gain de productivité sont généralement

rencontrées dans la littérature: les méthodes directes et indirectes. Les premières

intègrent dans une fonction de production en plus du capital et du travail, la formation

comme un déterminant du gain de productivité. Ainsi, Barret et O’Cornell (2001)

utilisent cette méthode et trouvent des impacts positifs et statistiquement significatifs

pour la formation générale et les deux types de formations combinées, mais non

Page 9: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

4

significatif pour la formation spécifique. Elle fut auparavant utilisée dans les travaux

empiriques de Bartel (1991), Carriou et Jeger (1997) et Conti (2005) pour investiguer

l’impact de la formation continue sur les salaires. Cette méthode conduit à des

valeurs surestimées et souvent non significatives des gains issus de la formation

continue (Aubert et al, 2006). Quant aux méthodes indirectes, elles mettent en

évidence une corrélation positive entre formation et salaire ou accroissement du

salaire sans parvenir à établir un impact causal de la formation sur le salaire.

Lynch(1992), Booth(1993), Arulampalam et Booth(2000) ont utilisé cette méthode

pour montrer l’effet de la formation sur la productivité des salariés. Lynch (1992)

montre aussi que les formations spécifiques n’entrainent pas forcément une

augmentation du salaire. Ces études ont aussi révélé un problème d’endogèneïté de

la formation qui peut biaiser les résultats des estimations. Jimenez et Kugler (1987)

et Booth (1993) ont montré que la correction de ce biais contribuait à réduire l’effet

de la formation sur les salaires.

A travers cette brève revue de la littérature théorique et empirique, il apparaît qu’il

n’est pas aisé d’étudier la relation entre la formation en entreprise et l’évolution de la

productivité ou des salaires. Cela justifie-t-il le fait que peu d’études aient été

consacrées à la formation professionnelle continue, surtout dans les pays en

développement comme le Burkina Faso? Dans ces pays, le secteur informel emploie

la plus grande partie de la main d’œuvre urbaine (environ 74% dans les

agglomérations de sept pays de l’UEMOA (UEMOA, 2004), mais concentre

essentiellement une main d’œuvre faiblement qualifiée et sans formation

professionnelle. Aussi, en matière de rémunération, le secteur public est celui qui

protège mieux ses travailleurs moins qualifiés (UEMOA, 2004). Si ce fait peut être

attribué aux facteurs institutionnels qui affectent la fixation des salaires dans ce

secteur, mesurer le rendement de l’éducation ou de la formation dans ce secteur

peut comporter des biais. La présente recherche vise à analyser la relation entre la

formation professionnelle et le secteur privé formel au Burkina Faso. L’étude portera

principalement sur les entreprises du secteur privé formel de la ville de

Ouagadougou. Le choix de cette ville s’explique par le fait qu’elle abrite le plus grand

nombre d’entreprises présentes sur le territoire national.

La question centrale qui se pose est : quelle relation existe-t-il entre la formation

professionnelle continue et la productivité des salariés du secteur privé formel dans

Page 10: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

5

la ville de Ouagadougou ? Cette question générale se scinde en ces trois questions

spécifiques de recherche :

� Quelles sont les perceptions des chefs d’entreprises du secteur privé formel

sur la formation professionnelle continue au Burkina Faso ?

� Quels sont les principaux déterminants de la formation continue ?

� Quel est l’impact de cette formation professionnelle continue sur la

productivité des salariés ?

L’objectif de cette recherche est de mettre en exergue l’importance de la formation

professionnelle continue pour les salariés et les entreprises du secteur privé formel.

Plus spécifiquement, il s’agit de:

� Analyser les perceptions des chefs d’entreprises du secteur privé formel sur la

formation professionnelle continue au Burkina Faso ?

� Analyser les déterminants du choix d’investissement dans la formation

continue dans le cas d’un marché de travail non parfaitement compétitif,

� Evaluer le rendement de la formation professionnelle continue sur la

productivité des salariés en termes d’augmentation de revenus.

Pour atteindre les objectifs ci-dessus formulés, les hypothèses suivantes ont été

formulées pour orienter le travail :

� Au Burkina Faso, les chefs d’entreprises du secteur privé formel

méconnaissent l’importance de la formation professionnelle continue.

� Les facteurs socioéconomiques sont les déterminants principaux de la

décision d’investissement dans la formation continue.

� La formation continue a un impact positif significatif sur la productivité des

salariés

L’étude se présente comme suit : la section I présente une revue de littérature sur le

capital humain et la formation professionnelle. Nous déclinons ensuite l’analyse

économétrique et la discussion des résultats à la section II. Cette section étale aussi

la méthodologie d’enquête et les statistiques descriptives des variables de l’étude.

Enfin, l’étude s’achève sur des recommandations.

Page 11: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

6

I. Revue de littérature

1.1. Théorie du capital humain : Approche et formalisation

1.1.1. Aperçu sur la théorie du capital humain

La théorie du capital humain a contribué à expliquer la croissance économique et la

formation des rémunérations individuelles. Elle suppose que les individus peuvent

améliorer leur productivité par des actes volontaires d’investissement dans

l’éducation ou la santé, ou même encore, en migrant.

Dans sa formulation initiale, la théorie du capital humain suppose qu'il existe une

double liaison : éducation –productivité – rémunération. Pour Mincer (1974), la

relation positive entre la scolarisation d’un individu et son salaire ultérieur doit être

perçue comme le reflet de l’augmentation de sa productivité par l’éducation.

L'éducation, par nature, transmet des connaissances utiles qui vont donc accroître

l'efficacité productive de l'individu, ce qui justifiera alors une rémunération supérieure

dans la mesure où cette rémunération est liée à la productivité du travailleur. Les

écarts de rémunérations s’expliquent donc par le fait que certains individus sont

moins disposés que d’autres à consentir des investissements en formation requis

afin d’occuper des emplois qualifiés. La distribution des salaires rend alors compte

de la dispersion des niveaux d’éducation. Signalons que la théorie du capital humain

est construite dans le cadre du modèle néoclassique qui suppose un environnement

concurrentiel dans lequel l’entreprise maximise son profit en égalisant le salaire réel

de l’individu à sa productivité marginale.

1.1.2. Le modèle théorique

Le modèle théorique sur lequel se base le présent travail est le modèle de gain de

Mincer. Si on attribue attribuer à Becker (1960, 1964) la paternité de la théorie du

capital humain, c’est à Mincer (1974) avec le concept du « schooling model » que

revient le mérite d’avoir su allier rigueur théorique et application empirique. Ce

modèle a constitué le point de départ de la construction de ce qui est devenu courant

Page 12: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

7

d’appeler « la fonction de gains de Mincer ». Ce modèle de départ est construit sur la

base d’hypothèses dont les principales sont (Mincer, 1974) :

� Le taux de rendement du capital humain est constant

� Un changement dans les investissements d’un individu ne modifie pas son

taux de rendement.

� Tous les coûts des investissements sont des coûts en temps.

Au premier niveau, on analyse les effets de la scolarisation. On suppose qu’aucun

autre investissement en capital n’est pris en compte et que le flux de revenu de

l’individu est constant pendant la période active. On exclut tous les changements qui

touchent à la productivité et donc au revenu de sorte que toute modification dans les

revenus est produite par un investissement net dans le stock de capital humain. On

suppose aussi un taux de dépréciation nul du capital pendant la période scolaire et

un investissement net nul pendant la vie active.

Soit :

n : la durée de la période scolaire et de travail, c’est la durée de vie active pour les

non scolarisés.

sY : le revenu annuel d’un individu qui a suivi s années de scolarisation

sV : la valeur actuelle du revenu total d’un individu au début de sa scolarisation,

r : le taux d’actualisation,

t=0, 1, 2……n, le temps en année,

d : la différence en temps de scolarisation en années. On a :

1

1

1

tn

s st s

V Yr= +

= + ∑ .Si le processus d’escompte est continu, on a :

( )n rs rnrt s

s s

s

Y e eV Y e dt

r

− −− −= =∫ d’où ( )( )r s d rns d

s d

YV e e

r− − −−

− = − .

En égalisant Vs à Vs-d, on obtient le ratio de revenu annuel après s années au

revenu après s-d années de scolarisation, soit :

( ) ( )

, ( )

1

1

r s d rn r n d ss

s s d rs rn r n ss d

Y e e ek

Y e e e

− − − + −

− − − −−

− −= = =− −

. (1)

Il est facile de constater que ce ratio est supérieur à l’unité signifiant que les individus

qui ont un plus haut niveau de scolarisation ont un salaire plus élevé. De plus on

peut montrer que le ratio k est une fonction positive du taux d’actualisation r. Cela

montre que la différence de revenu dû à une différence de scolarisation augmente

Page 13: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

8

avec le taux de rendement. On montre en outre que si d est fixé, le ratio k est une

fonction positive de s. En supposant k constant et en redéfinissant n comme la durée

fixe de la vie active, on obtient :

rsnrssn

s

rtss ee

r

YdteYV −

+− −== ∫ )1( _

( ) ( )1n s d

rt rn r s ds ds d s d

s d

YV Y e dt e e

r

+ −− − − −−

− −−

= = −∫ ; ce qui implique

( )

,

r s drds

s s d rss d

Y ek e

Y e

− −

− −−

= = = . (2)

En définissant ,0sk par ,00

ss

Yk

Y= . De la relation (2), on obtient ,0

rssk e= d’où

0

rssYe

Y= .

En prenant le logarithme, on obtient :

0ln lnsY Y rs= + (3).

L’équation (3) montre que le logarithme du revenu est une fonction strictement

linéaire du temps passé à l’école.

Par la suite, Mincer décrit une situation dans laquelle l’accumulation du capital

humain ne cesse pas avec la fin de l’éducation formelle mais se prolonge par des

apprentissages successifs réalisés en cours de vie professionnelle. La rentabilité

marginale des investissements postscolaires est décroissante si bien que l’intensité

des investissements professionnels diminue avec l’âge. Le modèle initial est élargi

pour prendre en compte l’expérience de l’individu et l’utilisation d’une forme

quadratique permet de rendre compte de la décroissance de la rentabilité marginale

des investissements professionnels.

2

0ln ln e x p e x psY Y r s δ γ= + + + . (4)

Au début des années 70, des théories alternatives (théorie du signal, théorie du filtre)

s’opposent à la formulation orthodoxe de la théorie du capital humain. Ces théories

mettent l’accent sur le rôle informationnel de l’éducation.

Mais Blaug (1976) montre que les approches en termes de filtre et de signal sont

beaucoup plus complémentaires que concurrentes de la théorie du capital humain.

Page 14: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

9

Elles permettent de rendre compte des procédures de recrutement alors que la

théorie du capital humain s’attache au comportement de demande de formation

(Gravot, 2007).

En conclusion, il convient de relever que sur le double plan théorique et empirique,

la validité de la théorie du capital humain a été prouvée dans l’espace à la fois

temporel et géographique. Elle a été enrichie par les apports des approches

alternatives connues sous l’appellation de théorie du « filtre » ou du « signal » sans

que ces dernières n’entament vraiment sa pertinence. Des questions

méthodologiques se posent cependant au niveau de la mesure des niveaux de

variables clés, de la forme fonctionnelle du modèle et des spécifications

économétriques.

1.1.3. La prise en compte de la formation professionnelle continue

Selon Mincer (1962), même si l’éducation est considérée comme un processus

d’investissement dans la main d’œuvre, il est important de rappeler que l’instruction

scolaire ne saurait constituer ni une méthode exclusive, ni une méthode suffisante

pour former la main d’œuvre. De plus, la fin des cycles de formation au lieu de

signifier l’achèvement d’un processus de formation, marque habituellement la fin

d’une étape plus générale et préparatoire et le commencement d’un processus plus

spécialisé et souvent prolongé, d’acquisition de compétences professionnelles. Pour

Carriou et Jeger (1997), c’est un investissement au même titre que la formation

initiale.

Pour ce type d’acquisition de connaissances, Becker (1964) distingue le capital

humain général du capital spécifique.

Le premier augmente la productivité du travailleur dans toutes les entreprises tandis

que le second augmente la productivité et donc le salaire de l’individu dans

l’entreprise qui l’a formé. Il s’en suit que ces deux formes de capital humain ne

confèrent pas à l’individu les mêmes possibilités de migration d’une entreprise à une

autre et ont par conséquent des implications directes en termes de financement de

cet investissement. Fort heureusement, il convient de noter que peu de formations

Page 15: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

10

sont purement spécifiques. Chaque formation est la combinaison particulière d'une

composante spécifique et d'une composante générale (Stevens, 1994).

1.2. Etat des lieux de la formation professionnelle continue au

Burkina Faso

La notion de secteur privé désigne la partie de l’économie nationale qui concerne les

entreprises ou entités économiques dont la majorité du capital est détenue en propre

par un ou plusieurs entités. Au Burkina Faso, le secteur privé est perçu comme le

moteur de l’économie nationale. C’est pourquoi L’Etat s’efforce de travailler en

partenariat avec ce secteur pour instaurer son développement afin qu’il soit efficace

et compétitif. Cette volonté de l’Etat s’est concrétisée par la onzième (11ème)

rencontre gouvernement secteur privé qui s’est tenue le 18 juillet 2011, placée sous

le thème : « Enjeux et modalités de réalisation des projets de partenariat public-privé

pour la croissance économique du Burkina Faso ».

Toutefois, le secteur privé rencontre de multiples obstacles. C’est ce que révèlent les

résultats d’un atelier de restitution du document provisoire de l’étude sur la politique

salariale du secteur privé au Burkina Faso1. Tenu les 15 et 16 Mars 2011 à

Ouagadougou et Organisé par le Conseil National du Patronat Burkinabé (CNPB)

avec l’appui du Bureau International du Travail (BIT), il est ressorti des conclusions

de cette étude qu’en termes de pratiques salariales, plus de 40% des entreprises

concernées par l’étude utilisent une grille salariale propre du fait de l’absence de

barème sectoriel ou de l’inadaptation des barèmes existants. L’étude a aussi révélé

une forte concentration des salaires minima avec un écart type de quarante mille (40

000) à quarante quatre mille (44 000) FCFA liée aux effets de la politique de

nivellement des taux d’augmentation du bas vers le haut. Une pratique qui permet

certes de réduire les inégalités en matière de traitement salarial mais porte atteinte

au principe de l’équité entre les catégories socioprofessionnelles et aux stratégies

d’incitation des cadres supérieurs. Cette pratique ne permet pas aux entreprises

d’être compétitives.

Afin d’améliorer la productivité des entreprises et les rendre compétitives sur le

marché, les employeurs ont besoin d’agents qualifiés et compétents. Un recyclage

1 Rapport de synthèse de l’atelier de restitution de l’étude sur la politique salariale du secteur prive au Burkina Faso

Page 16: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

11

des agents est indispensable d’où la mise en place au Burkina Faso de la formation

professionnelle continue. L’organisation du système de formation au Burkina Faso

dépend de l’articulation entre trois pôles formateurs que sont le système

d’enseignement, les centres de formation (publics ou privés) et enfin l’appareil de

production. La répartition des rôles entre ces entités est fonction du contexte

économique, politique, culturel et social dans lequel s’inscrit la formation. Au plan

économique, l’analyse coût/bénéfice permet de fournir des indications quant au choix

de la modalité de formation la plus efficace pour une qualification donnée. Dans le

contexte Burkinabè, deux structures s’occupent essentiellement de la formation

professionnelle continue: l’ANPE et le FAFPA.

Créé par décret n°2004-523/PRES/PM/MTEJ/MFB en lieu et place de l'Office

National de la Promotion de l'Emploi (ONPE), l'Agence Nationale pour l'Emploi

(ANPE) structure rattachée au ministère du Travail, de l’Emploi et de la Jeunesse

met en application la politique du gouvernement en matière d’emploi et de formation

professionnelle. Elle dispose des centres de formation professionnelle, et

d’évaluation. Une étude conduite par l’ONEF2 en 2007 portant sur le recensement

des centres de formation professionnelle3 montre qu’il y a 35 271 entreprises

installées sur le territoire Burkinabé, mais dont la répartition géographique est

inégale. La grande partie des entreprises se retrouve dans les régions du Centre

(81%) et des Hauts Bassins (9,8%). Les onze autres régions se partagent le reste

des entreprises soit 9,2% du total des entreprises. Une telle répartition des

entreprises au Burkina fait ressortir le fait que plus de 90% de l’activité économique

se déroule dans les deux grandes villes du pays que sont : Ouagadougou et Bobo-

Dioulasso.

70,4% de ces entreprises sont des entreprises individuelles ; 19,6% des sociétés

anonymes à responsabilité limitée (SARL) ; 6,5% des sociétés anonymes. Les 3,5%

restant sont des sociétés en nom collectif, des associations de personnes, des

sociétés d’économie mixte, des sociétés d’Etat et des Groupements d’intérêt

économique (GIE).

2 L’Observatoire National de l’Emploi et de la formation en abrégé (ONEF) est une cellule de l’ANPE. Cet organe est rattaché à la Direction Générale de l’ANPE et a pour mission de contribuer à l’amélioration de l’Emploi et de la Formation au niveau national et régional en favorisant une meilleure régulation du marché du travail. 3 Ministère de la jeunesse et de l’emploi, ONEF, enquête nationale sur l’emploi et la formation, (ENEF 2008), rapport final, mai 2009.

Page 17: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

12

La proportion très élevée des entreprises individuelles témoigne du fait que le tissu

économique au Burkina est embryonnaire.

L’étude portant sur l’organisation du travail au sein des entreprises révèle que 93,6%

des entreprises fonctionnent avec une seule direction. Cette direction joue à la fois le

rôle de direction générale, technique, commerciale, etc., d’où une concentration des

responsabilités au niveau d’une seule entité. Le dirigeant de l’entreprise (quelque soit

son niveau) préfère administrer l’ensemble des sous - directions techniques que d’en

créer officiellement et désigner des responsables pour ces sous – directions

techniques.

Par ailleurs, il faut noter que 52,3% des entreprises ne disposent d’aucun service. Ce

type d’information conforte l’idée selon laquelle les entreprises au Burkina Faso ne

disposent pas d’organigramme, ce qui a un impact négatif sur l’organisation du travail

et la productivité de l’entreprise. Les chefs d’entreprises gagneraient mieux à

déléguer leur pouvoir et partant, responsabiliser leur personnel de la base jusqu’au

sommet.

Parmi les entreprises structurées en services, 33,4% disposent d’un service

comptable, 19,7% possèdent un service commercial. Il ressort également que 21%

des entreprises possédant un organigramme disposent d’un service technique

propre à leur type d’activité. La création de services répond principalement aux

besoins de gestion des ressources financières, de commercialisation de la

production mais aussi de gestion du système de production. Les entreprises

accordent très peu d’importance à la gestion des ressources humaines (premier

capital de production), qui est reléguée au second plan. En effet, seulement 7,1%

des entreprises reconnaissent avoir en leur sein un service de gestion des

ressources humaines.

3,2% des entreprises sont composées d’une seule personne qui est le dirigeant.

67,5% emploient deux à neuf personnes, 25,1% des entreprises emploient entre dix

et cinquante personnes. 4,2% peuvent être considérées comme de grandes

entreprises qui emploient plus de cinquante personnes. Ce dernier groupe qui devrait

employer des effectifs importants ne représente malheureusement qu’une faible

proportion des entreprises. Les entreprises burkinabé dans leur majorité sont de

petite taille et emploient de ce fait des effectifs limités.

Alors que l’ONEF est un observatoire de synthèse et d'analyse d'informations

statistiques sur l'emploi et la formation professionnelle, le FAFPA a pour mission de

Page 18: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

13

contribuer à la mise en œuvre de la politique du Gouvernement en matière de

formation professionnelle initiale, continue et par apprentissage. le FAFPA est créé

par décret n° 2003-337/PRES/PM/MTEJ/MFB et placé so us la tutelle technique et

financière du ministère de la Jeunesse et de l’emploi et du ministère de l’Economie et

des finances. Il vise à appuyer et soutenir les initiatives des opérateurs de formation

professionnelle ainsi que les actions individuelles et collectives de formation rapide à

finalité de l'emploi. Il est à cet effet une structure d’appui financier à la formation

professionnelle après avoir défini un certain nombre de critères d’intervention. Ces

deux structures (ONEF et FAFPA) travaillent en synergie pour l’atteinte des résultats

de la mise en œuvre de la formation professionnelle. Le FAFPA vient satisfaire les

besoins en compétence de l’économie nationale tout en offrant des qualifications

nécessaires à l’insertion du système productif national dans le marché du travail. .

« A priori, tous les secteurs d’activités, tous les métiers sont pris en compte par le

FAFPA, mais à l’expérience, ce sont surtout les métiers de l’artisanat qui sont les

plus demandés », explique la directrice du Fonds. Près de 600 personnes ont ainsi

bénéficié de formation de perfectionnement et d’apprentissage dans l’artisanat contre

environ 13 demandes de formation continue en informatique et en marketing

formulées par des entreprises. La plus forte demande concerne principalement la

coiffure et la couture, deux métiers très pratiqués par les femmes. Le FAFPA finance

également des formations dans la peinture, le tissage, la maçonnerie et la

mécanique, très demandée surtout à Ouagadougou. « Les demandes viennent des

quatre coins du pays surtout que les gens savent maintenant qu’il existe une

structure de financement », souligne la directrice.

Pour le responsable de la formation des entreprises au niveau de FAFPA, (I.B.O), il a

rappelé que la mission principale du Fonds d’Appui est de financer l’élaboration et

l’exécution des actions de formation. Dans l’exécution de cette mission, le FAFPA

apporte sa contribution financière à hauteur de 75% au maximum. Lorsqu’ il est

sollicité pour les actions de formation technique, la contribution du promoteur est de

25%. La formation est un investissement rentable. Une entreprise peut présenter

cinq actions de formation par an, a souligné le responsable de la formation des

entreprises. Selon lui, il y a des textes qui régissent la formation professionnelle

continue au Burkina Faso et la majorité des employeurs les connaissent. Seulement,

Page 19: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

14

les conditions d’éligibilité semblent contraignantes pour certains qui feignent

d’ignorer l’existence de ces textes.

Les conditions d’éligibilité 1) Le promoteur doit s’acquitter régulièrement de la taxe patronale d’apprentissage

(TPA)

2) Le plan de formation accompagné de la demande d’agrément doit parvenir au

FAFPA avant le 30 novembre précédent l’année de réalisation des formations.

3) Les formations sont réalisées prioritairement sur le territoire burkinabé ou hors du

territoire sur décision du conseil de gestion.

4) La durée d’une formation ne peut dépasser une année civile.

5) Le plan de formation ne doit pas dépasser trente millions de F CFA par an.

Nonobstant ces conditions quelque peu contraignantes, de nombreux employés

bénéficient de la formation professionnelle continue. En effet, Grâce au Fonds

d’appui à la formation professionnelle et à l’apprentissage (FAFPA), six

professionnels du secteur de la menuiserie métallique ont pu se perfectionner 20

jours durant en menuiserie aluminium.

La raison principale de cette formation est expliquée par le porte- parole du groupe:

"Depuis 2005, nous attendions une telle formation. On savait que le marché allait

être envahi par l’aluminium. On a voulu aller le faire au Ghana et au Togo, mais cela

nous revenait trop cher. On nous demandait autour de 9 millions. Nous avons alors

confié notre dossier à la Fédération nationale des artisans du Burkina Faso (FENA-

BF) dont nous sommes membres qui, avec l’appui du FAFPA, nous a procuré cette

formation et vraiment, aujourd’hui on est très content du résultat". La finalité du projet

était d’augmenter les capacités techniques de ces acteurs souvent formés sur le tas,

afin qu’ils puissent répondre aux exigences d’un marché qui se développe avec le

boom du bâtiment au Faso et d’améliorer ainsi leurs revenus.

C’est aussi l’exemple de la Société des Fibres Textiles du Burkina Faso (SOFITEX)

qui du 25 septembre au 1er octobre 2011, a organisé une séance de formation à

l’intention de ses agents. Le séminaire s’est déroulé à l’Eau Vive de Bobo-Dioulasso.

C’est une formation continue que la filière coton pratique depuis un certain nombre

d’années au profit de son personnel technique afin d’avoir des repères d’objectifs à

atteindre dans un monde concurrentiel qui requiert le besoin d’être sans cesse en

adéquation avec la technologie, a affirmé le secrétaire général de la SOFITEX

Mahomet Hamadine Ba qui a présidé l’ouverture des travaux du séminaire.

Page 20: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

15

II. Analyse économétrique et résultats

2.1. Méthodologie de recherche

2.1.1. Méthode d’enquête et présentation des données

La démarche méthodologique a consisté à la collecte de données quantitatives et

qualitatives à travers des enquêtes sur terrain dans les cinq arrondissements de la

ville de Ouagadougou. Un questionnaire quantitatif et un guide d’entretien qualitatif

ont été administrés respectivement auprès de 304 travailleurs et de 11 chefs

d’entreprise du secteur privé formel de Ouagadougou. L’enquête terrain s’est

déroulée dans le mois de Septembre en deux semaines et a mobilisé cinq

enquêteurs. La collecte de données a porté sur 110 entreprises du secteur privé

formel dont le nombre d’employés enquêtés dans chaque entreprise dépend de la

taille de l’entreprise. Il a été collecté au sein de chacune de ces entreprises un

nombre variant d’un à six enquêtés; et cela dans le but de prendre en compte un

grand nombre d’entreprises. L’échantillon est constitué d’entreprises de tailles

différentes (PME/PMI et grandes entreprises) de statuts juridiques différents

(entreprise individuelle, SARL, SA, GIE etc.) exerçant leurs activités dans divers

secteurs d’activité que nous avons regroupés en trois classes (commerce, services,

production). La collecte de données a fourni 62 entreprises individuelles (soit

61.38%), 25 SARL (24.75%), 8 SA (7.87%) et 6 Associations de personnes (6%).

L’enquête a consisté à collecter des données sur les caractéristiques des entreprises

et celles des employés. Il a été collecté des informations sur le capital de l’entreprise,

son secteur d’activité principale, l’effectif de son personnel, son statut juridique, les

possibilités de formation continue en son sein. Les informations portant sur les

employés ont porté sur l’âge, le sexe, le niveau d’éducation, le statut matrimonial,

l’expérience professionnelle, le niveau d’éducation des parents, le revenu mensuel et

son évolution, les formations antérieures suivies et le profit tiré de ces dernières. Les

sources de financement de ces formations ont aussi été renseignées. Comme le

montre le tableau 1 ci-dessous, 235 enquêtés exercent dans les PME/PMI, soit

77.3% contre 69 (22.7%) dans les Grandes entreprises. Baskuy est l’arrondissement

qui compte le plus d’enquêtés avec 178 enquêtés (58.55%), ensuite vient Bogodogo

(24.34%). L’arrondissement de Sig Noghin ferme la marche avec seulement 4

enquêtés (soit 1.31%). Cela est le reflet de la forte concentration des entreprises

Page 21: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

16

dans l’arrondissement de Baskuy et Bogodogo dans une moindre mesure que nos

données et bien d’autres ont relevé.

Tableau 1: Répartition des enquêtés par arrondissements et par caractéristiques

Caractéristique de la structure

PME PMI Grande entreprise

Total % par arrondissement

Baskuy 122 8 48 178 58.55 Bogodogo 63 0 11 74 24.34 Boulmiougou 28 0 5 33 10.85 Nongr Massom 13 0 2 15 4.95

Arrondissement abritant l'entreprise

Sig Noghin 1 0 3 4 1.31 Total 227 8 69 304 % par caract. de la structure 74.67 2.63 22.7 100

100

Source : Construit par les auteurs à partir des données de l’enquête

Une répartition des enquêtés par secteur d’activité révèle que le secteur du

commerce emploie plus de personnes que les autres secteurs (production,

services,…). En effet, 44.7% des personnes enquêtées exercent dans le commerce

de gros ou de détail contre 29.9% et 25.3% respectivement pour les secteurs de

production et de services. Une analyse plus poussée montre que 55.6% des

enquêtés sont employés dans les entreprises individuelles contre 4.6% pour les

associations de personnes. Les SARL et les SA emploient respectivement 26.6% et

13.2% des enquêtés.

L’enquête terrain a concerné 236 hommes (77.6%) et 68 femmes (22.4%) salariés du

secteur privé formel de la ville de Ouagadougou avec 42.43% de célibataires,

57.23% de mariés et 0.34% de veufs. L’âge moyen des enquêtés de l’échantillon est

d’environ 33 ans (extrême 18 ans et 60 ans). Les revenus mensuels sont très

disparates allant de 10 000 FCFA à 2 000 000 FCFA selon le poste occupé. Les

salaires mensuels moyens se situent à 127 192.3 F, 144 820.8 F et 115 955.6 F

respectivement pour les secteurs du commerce, des services et de la production

(voire tableau 2 ci-dessous).

Page 22: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

17

Tableau 2 : Revenus mensuels en FCFA des enquêtés par secteurs d’activité

Rev. minimum Rev. Moyen Rev. maximum

Secteur du commerce 25 000 127 192 2 000 000

Secteur des services 10 000 144 820 1 200 000

Secteur de production 25 000 115 955 1 200 000

Source : Construit par les auteurs à partir des données de l’enquête

Le niveau d’éducation est assez élevé (tableau 3): 93.1% des enquêtés sont

scolarisés. De ces inscrits, 13.15% ont le niveau d’enseignement primaire, 52.96% le

niveau secondaire (25.33% pour le niveau secondaire 1er cycle et 27.63% pour

secondaire 2ème cycle) et 27% le niveau supérieur. Les hommes sont les plus inscrits

mais les femmes de l’échantillon sont toutes scolarisées. Les non scolarisés sont les

personnes effectuant des travaux subalternes tels les vigiles, les gardiens

principalement.

Tableau 3: Répartition des enquêtés en % selon le niveau d’éducation et par sexe

Niveau d’éducation de l’enquêté Pas fréquenté

Primaire Secondaire Supérieur

Masculin 6.9 12.17 37.5 21.05 Féminin 0 0.98 15.46 5.95

Total

Total 6.9 13.15 52.96 27 100 Source : Construit par les auteurs à partir des données de l’enquête

Cependant pour les individus scolarisés, le niveau de revenus moyens s’élève avec

le niveau d’éducation comme le montre le tableau 4. Aussi, le salaire moyen est de

152 875 FCFA pour les personnes qui ont subi des formations de toute sorte mais il

se situe à 122 842.1 FCFA pour les non formés. Ceci indique que la formation suivie

par un individu améliore le niveau de revenu de celui-ci.

Tableau 4 : Les niveaux de revenus en FCFA selon les niveaux d’éducation

Rev. moyen Rev. minimum Rev. maximum

Pas fréquenté 114 047.6 25 000 200 000

Primaire 63 025 25 000 300 000

Secondaire 88 962.26 10 000 1 000 000

Supérieur 249 425 30 000 2 000 000

Source : Construit par les auteurs à partir des données de l’enquête

Page 23: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

18

L’enquête montre que 53.95% ont au moins un des parents scolarisés contre 46,05%

qui ont les deux parents non scolarisés (Tableau 5).

Tableau 5 : Répartition des enquêtés en % selon l’éducation des parents

Total Proportion en % Père et/ou mère scolarisés 164 53.95 Père et mère non scolarisés 140 46.05 Total 304 100 Source : Construit par les auteurs à partir des données de l’enquête

Quant au niveau d’éducation des parents scolarisés, le tableau 6 fournit les

informations nécessaires. Il ressort du tableau 6 que 44.32%, 39.77% et 15.91% des

mères des enquêtés ont respectivement le niveau primaire, secondaire et supérieur.

Pour le niveau d’éducation des pères des individus, on a 34.81%, 47.47% et 17.72%

respectivement pour les niveaux primaire, secondaire et supérieur.

Tableau 6 : Répartition des enquêtés en % selon le niveau d’éducation des parents

Niveau d’éducation des parents Père Mère

Primaire 34.81 44.32 Secondaire

47.47 39.77

Supérieur 17.72 15.91 Total 100 100 Source : Construit par les auteurs à partir des données de l’enquête

Au plan de la formation continue, 78.29% des enquêtés estiment que leurs

entreprises n’accordent pas d’importance à la formation continue de leurs employés

alors que 21.71% déclarent le contraire. L’absence de plan de formation pour la

plupart des entreprises de l’échantillon renforce l’idée que les entreprises n’accordent

pas de l’importance à la formation continue car 73.36% des enquêtés déclarent que

leurs entreprises ne disposent pas de plan de formation contre 26.64% déclarant le

contraire.

2.1.2. Le modèle empirique

Le modèle empirique qui permet d’appréhender l’impact de la formation

professionnelle continue sur la productivité se base sur le modèle théorique ci-

dessus (4) mais en prenant en compte certaines spécifications.

Page 24: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

19

Nous convenons premièrement avec Jarousse et Mingat (1986) que sans dénaturer

le modèle de gain de Mincer, il est possible de relaxer l’hypothèse selon laquelle

toutes les années passées sur le marché du travail ont le même impact sur

l’évolution des gains. Nous supposons que la formation professionnelle continue dont

l’individu bénéficie a un impact intrinsèque sur sa productivité et donc son revenu.

Il est aussi devenu presque courant dans les modèles d’analyse des taux de

rendement privé de l’éducation de considérer cette dernière comme endogène.

L’idée est que plusieurs facteurs comme les aptitudes individuelles et les

caractéristiques sociales contribuent pour sa détermination et qu’en ne prenant pas

en compte ces facteurs à l’aide d’une régression simultanée, on risque de biaiser

l’estimation des taux de rendements privés de l’éducation (Njobo et al, 2011). Cette

correction se fera à l’aide de la méthode en deux étapes de Heckman.

Enfin, selon Lillard et Tan (1986), la formation initiale peut déterminer le besoin de

formation continue. Beji et al (2004) soutient qu’une meilleure formation initiale

accroît le besoin de formation continue. Mais, Mincer (1962) note que dans

beaucoup de cas, le même degré de compétence professionnelle peut être acquis en

raccourcissant l’instruction formelle et en allongeant la période de formation ou par

l’inverse, ce qui milite pour une relation inverse entre formation initiale et formation

continue.

La prise en compte des ces spécifications nous conduit vers un modèle en cascades

comme suit :

)3(Pr_

__

)2(_Pr_

_Im

)1(__

543

210

543

210

54

23210

iiii

iii

iiii

iii

iii

iiii

AgeSeximTemsmis

MEducPEducEduc

MarriedEmpemFormPlan

FormportEducFormat

tetLncapstructCarac

ExperExperFormatLnsal

ηδδδδδδ

ϑββββββ

εαααααα

++++++=

++++++=

++++++=

Le modèle (3) est le modèle d’instrumentation de l’éducation. Elle est nécessaire

pour corriger le biais d’endogéneité de cette variable. C’est un modèle linéaire, la

Page 25: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

20

variable « Education » étant continue. Il convient cependant de noter que cette

endogéneité intervient dans l’explication de la formation professionnelle continue.

Le modèle (2) permet d’analyser les déterminants de la formation professionnelle

continue. De plus, la formation intervenant comme une variable explicative dans le

modèle (1), l’estimation de ce modèle à l’aide des techniques appropriées permettra

de corriger le biais d’endogéneité dans l’estimation des paramètres du modèle (1). Il

est important de signaler que la variable « Formation » étant dichotomique, le modèle

(2) permet de déterminer l’impact des variables explicatives sur la probabilité de

suivre une formation professionnelle continue. Les modèles appropriés pour cela

sont les modèles logit et probit, le choix entre les deux modèles relevant plus du goût

que d’autres considérations. Pour notre étude, le modèle probit est utilisé. La forme

fonctionnelle du modèle probit s’écrit comme suit : Soit la préférence de l’individu de

suivre une formation continue matérialisée par la variable latente *iY telle que

εβ +′= ii XY* ,

0* >iY si l’individu a suivi une formation

0* ≤iY Sinon

X est un vecteur colonne de variables explicatives

β ′ un vecteur ligne des paramètres,

ε une perturbation aléatoire.

Alors la probabilité iP pour un individu de suivre une formation professionnelle

continue est donnée par: ( ) i

X

iiii deXFXPPi

i

επββεε

β 2

2

12/12)()( ∫

∞−

−=′=′<=

avec iε suivant une loi normale et avec )( iXF β ′ la fonction de répartition de la loi

normale au point iXβ ′ .

Le modèle (1) est le modèle adapté de Mincer. Il permettra de mesurer l’impact de la

formation professionnelle continue sur la productivité et donc du salaire.

2.1.3. Techniques d’estimation et présentation des variables

2.1.3.1. Méthodes d’estimations

La technique d’estimation utilisée est la méthode des variables instrumentales

(Heckman, 1978, 1979): L’estimation du modèle (3) se fait à l’aide de la méthode des

Moindres Carrés Ordinaires (MCO). Cette régression permet de capter les valeurs

Page 26: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

21

non biaisées de l’éducation que l’on incorpore dans le modèle (2). L’estimation du

modèle (2) en même temps qu’elle permet d’analyser les déterminants de la

formation continue fournira les ratios de Mills qui interviendront comme variable

explicative dans l’estimation du modèle (1). Cette dernière estimation se fait à l’aide

des MCO.

2.1.3.2. Présentation et justification des variable s

Educ

La variable Educ représente le nombre d’années d’éducation de l’individu. Selon

Mincer (1974), le nombre d’années passées à l’école est positivement corrélé au

niveau de salaire de l’individu. C’est une variable continue.

Educ_P et Edu_M

Elles renseignent si le père de l’individu respectivement la mère de l’individu a été

scolarisé. L’idée est que le fait que le père ou la mère de l’individu ait été à l’école

peut favoriser son inscription à l’école et même son maintien dans le système. Ce

sont des variables binaires prenant les valeurs 1 si le père, respectivement la mère a

été à l’école et 0 sinon.

Tempsmis_Prim Le temps mis pour rejoindre l’école quand l’individu était au primaire peut aussi avoir

une influence sur ses chances de réussite. Selon Card (1995) et Cameron et Trivedi

(2005), un des meilleurs instruments lorsque l’on veut corriger le biais d’endogénéité

de l’éducation est la proximité par rapport au collège. Dans cette recherche c’est une

variable multinomiale prenant 4 modalités : 1 si l’individu mettait moins de 15 mn

pour rejoindre l’école au primaire, 2 s’il met entre 15 et 30 mn, 3 s’il met entre 30 et

45 mn et 4 s’il met Plus de 45 mn.

Formation Comme cela a été mentionné aussi bien dans la revue théorique, la formation

professionnelle continue est une forme de capital humain qui peut impacter sur la

productivité de l’individu et donc sur son salaire. Dans cette recherche, la variable

formation regroupe toute forme de formation dont l’individu a bénéficié dans son

activité. Cela inclut les formations diplômantes qui débouchent généralement sur

l’obtention d’un diplôme supérieur, les formations de spécialisation dans lesquelles

tout en restant dans son emploi l’agent approfondit certains aspects particuliers de

son activité professionnelle et les formations de perfectionnement au cours

desquelles l’agent actualise ses connaissances ou adapte sa formation technique

Page 27: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

22

aux progrès techniques et scientifiques. La variable Formation est ici une variable

dichotomique prenant la valeur 1 si l’individu a suivi l’une des formations ci-dessus

mentionnées et 0 s’il n’a suivi aucune des formations au cours des 12 derniers mois.

Import_Form et Plan_Form Ces variables renseignent respectivement si l’individu pense que la formation

professionnelle continue a une importance dans sa carrière professionnelle et si

l’entreprise qui l’emploi dispose d’un plan de formation. L’idée est que si l’individu

accorde une importance à la formation, cela peut déterminer sa participation. De

plus, si l’entreprise qui l’emploie dispose d’un plan de formation, il a plus de chance

de bénéficier de formations. Les variables Import_Form et Plan_Form sont des

variables binaires qui prennent la valeur 1 si l’individu accorde de l’importance à la

formation et respectivement si l’entreprise dispose d’un plan de formation et 0 dans

le cas contraire.

Prem_Emp

Il s’agit d’une variable binaire qui informe sur la nature de l’emploi c’est-à-dire si c’est

le premier emploi (1) ou non (2).

Married

Cette variable renseigne sur le statut matrimonial de l’individu. Elle prend la valeur 1

si l’individu est marié et 0 sinon. Le signe de l’effet attendu de cette variable est

négatif puisque le mariage en augmentant la charge de l’individu, peut réduire sa

disponibilité pour suivre des formations.

Lnsal

C’est le logarithme naturel du salaire mensuel de l’individu. Elle servira à approcher

la productivité de l’individu. Il s’agit d’une variable continue.

Lncap_tet

C’est le logarithme naturel du capital par tête. Cette variable participe à la description

des caractéristiques des entreprises. Elle peut avoir une incidence sur le niveau de

salaire de l’individu. C’est une variable continue.

Caract_struc

Il s’agit d’une variable qui renseigne sur la caractéristique de la structure. C’est une

variable binaire qui prend la valeur 1 s’il s’agit d’une PME/PMI et 2 si c’est une

grande entreprise. La caractéristique de l’entreprise peut expliquer le salaire perçu

par les employés de cette structure.

Exper et Experq

Page 28: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

23

Il s’agit du nombre d’années d’expérience du salarié et du carré de cette variable.

Depuis Mincer (1974) il a été établi que le nombre d’années passées en entreprise

détermine une part non négligeable du niveau de salaire. La prise en compte du

carré du nombre d’années d’expérience permet d’apprécier son effet quadratique.

Elles sont toutes deux des variables continues.

Age et Sex

Ces variables renseignent sur les caractéristiques personnelles de l’individu. Le sexe

est une variable binaire prenant la valeur 1 si l’individu est de sexe masculin et 2 s’il

est de sexe féminin. L’âge est une variable continue.

Les statistiques descriptives résumant les variables quantitatives sont contenues

dans le tableau 7 suivant :

Tableau 7: Statistiques descriptives :

Variables Obs. Mean Std. Err Min Max

Educ 304 12.40132 5.536271 0 37 Age 304 33.00658 7.080393 18 60 salt 304 130050 180340.7 10000 2000000

Exper 304 8.625 6.156177 1 40 cap_tet 304 4359983 1.38e+07 28571.43 9.38e+07 Experq 304 112.1645 193.6892 1 1600

Source : construit par les auteurs à partir des données d’enquête

2.2. Analyse et interprétation des résultats

2.2.1. Analyse qualitative des perceptions des chefs d’ent reprise sur la formation professionnelle continue

Tous les 11 chefs d’entreprise interviewés exercent dans des Petites et Moyennes

entreprises (PME), plus particulièrement dans le commerce et les services. Cela

montre le fait qu’au Burkina Faso, l’industrie burkinabè reste très embryonnaire.

L’essentiel du tissu industriel se trouve dans l’agro alimentaire, dans l’industrie du

textile et du cuir, dans la petite chimie et dans le secteur des métaux. Les burkinabè

préfèrent investir dans le commerce et les services qui présentent des avantages

comparatifs par rapport à l’industrie, secteur peu productif compte tenu des

contraintes diverses.

Page 29: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

24

Les chefs d’entreprises ont tous d’abord reconnu l’importance de l’emploi dans la vie

sociale avant de donner leurs perceptions sur la formation professionnelle continue.

Selon eux, l’emploi confère à l’individu un statut social. Il est la condition sine qua

none de l’insertion sociale car il permet de vivre dignement, de satisfaire les besoins

essentiels, de s’épanouir pleinement dans la société, l’emploi décent assure la

quiétude dans les familles, ont-ils souligné. Par ailleurs, en ce qui concerne la

formation professionnelle continue, les enquêtés ont souligné qu’elle est un

renforcement de capacité assurant le développement des compétences des

employés en plus de leur formation initiale. Ainsi que le souligne S.I, Directeur

exécutif d’IN’TIME, PME, niveau supérieur: «Ma compréhension de la formation

professionnelle continue se situe à deux niveaux. Le premier concerne ceux qui ont

une base en termes de formation classique et qui ont besoin d’apprendre plus en

termes de stage, de formation qualifiante et de la formation diplômante que je

prospecte. Je négocie un partenariat avec une société française pour la valorisation

des acquis professionnels. C'est-à-dire, faire en sorte qu’un professionnel ne soit pas

empêché d’occuper un poste par manque de diplôme alors qu’il a toute l’expérience

qu’il faut. Le second concerne la valorisation des acquis des non scolarisés

(compétences). C’est aussi ce que souligne O.F, Architecte, chef de l’agence

ARCADE, PME, niveau supérieur: « pour moi, la formation professionnelle continue

est une mise à jour régulière qu’un professionnel doit avoir dans le cadre de son

travail. Comme les technologies évoluent, il faut se mettre à jour par rapport au

niveau. Je sais que pour les comptables et les auditeurs, c’est presqu’une obligation.

C’est pourquoi chaque fois, il est organisé des sessions de formations et des ateliers

à leur intention. Nous, nous sommes dans le domaine des prestations de services,

on peut parler de formation sur les logiciels, sur les codes de l’urbanisme et les

nouveaux textes en matière d’urbanisme, mais c’est surtout la formation sur les

logiciels». En outre, les interviewés n’ont pas manqué de souligner l’importance de

cette formation professionnelle continue. «C’est important de former les employés

car c’est toujours mieux de savoir plus. Même si le temps de la formation va ralentir

le travail, il est toujours utile de former les agents», souligne C.I, chef d’entreprise

ABM, niveau secondaire. La formation professionnelle est donc très importante et

doit être assurée pour permettre l’acquisition de compétences par les employés pour

le bon fonctionnement de l’entreprise et aussi par souci de déontologie. «La

formation, c’est bien mais on n’a pas les moyens. Parce que, c’est toujours mieux de

Page 30: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

25

bien traiter ses employés car on n’en sait jamais. Aujourd’hui, ils sont mes employés

mais demain, ça peut changer, et je peux devenir à mon tour l’employé de ces

derniers. Donc, il faut faire attention».

Par ailleurs, les interviewés ont relevé le lien qu’il y a entre emploi et formation

professionnelle. Sans formation professionnelle, il n’y a pas d’emploi, ont-ils souligné.

Ce sont donc deux éléments liés et qui vont de pair. C’est ce que souligne T. J,

Gérant du cabinet d’expertise comptable SOFICO, PME, niveau

supérieur: «Effectivement lorsqu’on parle d’emploi souvent les gens oublient un peu

l’aspect formation. Le chef d’entreprise court le risque de perdre beaucoup de

ressources financières tout simplement parce que l’agent à un moment donné n’aura

plus les compétences nécessaires pour l’évolution de l’entreprise, ou du moins, pour

pouvoir rentabiliser l’entreprise. A ce titre, la formation professionnelle et l’emploi

sont des éléments indispensables».

Cependant, le manque de moyens et l’ignorance des textes qui régissent la

formation professionnelle font qu’elle est le plus souvent négligée et réduite à une

simple formation sur le tas, poursuit C.I, «La formation continue est bien mais où va-

t-elle se passer? Qui va supporter les coûts? À notre niveau, la formation se limite à

l’atelier; c’est donc une formation qui ne bénéficie d’aucune attestation. Or de nos

jours, c’est toujours mieux d’avoir un papier qui certifie que tu as telle ou telle

compétence». Toutefois, les entreprises ne disposent pas toujours de moyens

financiers et font face à des taxes insupportables. C’est ce que relève S.I en ces

termes: « Il faut donner les moyens aux entreprises d’accompagner les employés.

Les entreprises font face à une fiscalité insupportable. Dès que l’entreprise est créée,

le premier souci, c’est de payer l’impôt. Les sommes que nous pouvons dégager

pour la formation, les impôts comme les charges font que vous ne pensez plus à la

formation. Cela pouvait se régler si les prestations étaient payées à leur valeur. Les

intellectuels sont ici [Burkina Faso] dans l’abstrait. Leur travail n’est pas une priorité

par rapport à quelqu’un qui a fourni tels ou tels articles. Il faut mettre l’intellect

devant. Les gouvernements ne favorisent pas les interrelations, les partenariats.

Nous avions les meilleurs textes mais le problème se situe au niveau de ceux qui

sont chargés de la mise en œuvre. Ca fait 4 ans que je négocie un partenariat avec

une université européenne pour une formation ici. Mais c’est difficile. J’ai décidé de

me reposer avant de voir clair».

Page 31: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

26

Les chefs d’entreprises ont reconnu que la formation continue est incontournable

pour toute entreprise qui se veut compétitive sur le marché. Ils s’accordent sur le fait

que la formation professionnelle continue profite à l’entreprise et aux employés. Plus

on avance, plus on a besoin de comprendre certains fonctionnements et démarches.

On découvre d’autres aspects en capitalisant. La formation permet à l’employé

d’avoir un plan de carrière. Pour l’entreprise, la formation professionnelle continue

est une plus value, car lorsqu’on embauche un agent, ce qu’il peut apporter a des

limites d’où la nécessité de le former pour améliorer sa productivité. Nonobstant

l’importance de la formation, certains chefs d’entreprise ne sont pas prêts à investir

dans la formation professionnelle continue de leurs agents, non pas par manque de

moyens, mais de peur d’investir à perte. En effet, selon eux, les employés peuvent

démissionner pour aller dans une entreprise qui offre des salaires plus élevés. A

moins que la formation professionnelle continue soit suivie de motivation salariale,

elle est perçue comme un enjeu pour l’entreprise, ont-ils souligné.

Par ailleurs, il faut souligner que plusieurs employeurs ne disposent pas de plan de

formation; c’est le cas des responsables d’entreprise exerçant dans le commerce et

ayant un niveau d’instruction peu élevé. Par contre, les chefs d’entreprise ayant un

niveau supérieur et exerçant dans le domaine des services disposent d’un plan de

formation annuel même si ce dernier n’est pas toujours respecté. «Chez les experts

comptables, selon la loi, il est un impératif pour ceux qui sont inscrits à l’ordre des

experts comptables d’avoir au minimum 40 heures de formation professionnelle par

an. Et les jeunes, quand ils sortent de l’université de Ouagadougou, ils ont le

minimum, mais le reste s’apprend sur le terrain pour une meilleure maîtrise. Ceci

nous oblige à avoir un plan de formation. Nous étions en vacances et nous avions

repris ce lundi. D’ici nous aurions des réunions, et à l’issue de celles-ci, nous aurions

toutes les formations pour l’année. On a une idée de ce qu’on va faire en interne.

Seulement, il y’a aussi des cas ponctuels. Chaque année, par exemple, la loi de

finances est votée par l’Assemblée Nationale, il y’ a une nécessité de former les

agents pour appliquer les nouveaux textes, pour que le travail soit bien fait. J’ai

quinze (15) employés. En dehors du gardien et du chauffeur, tous les autres suivent

des formations au cours de chaque année», atteste T.J, niveau supérieur, Gérant

du cabinet d’expertise comptable (SOFICO) .

Page 32: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

27

Cette absence de plan annuel de formation s’explique par le fait que la quasi-totalité

des chefs d’entreprise disent ignorer les textes qui régissent la formation

professionnelle. Toutefois, le responsable de la formation des entreprises au niveau

du FAFPA, atteste qu’il y a des textes qui régissent la formation professionnelle

continue au Burkina Faso. Seulement il y a une obligation légale des entreprises de

participer au financement de la formation professionnelle de leurs salariés à hauteur

de 25%, le reste (75%) étant supporté par l’Etat. Selon lui, c’est cette obligation de

supporter 25% de la formation qui n’encourage pas les employeurs qui auraient

préféré une formation gratuite de leurs employés. En plus de cela, le responsable de

la formation des entreprises au FAFPA a souligné que peu d’entrepreneurs viennent

vers eux pour mieux s’informer sur les conditions d’éligibilité. En témoigne le propos

de Z.S, niveau primaire, Directeur de Plomberie Sanita ire du Faso (PSF): «Je

pense que les tords sont partagés de part et d’autre. C’est vrai que moi-même, je ne

mets pas d’efforts pour aller vers la professionnalisation. S’il y’avait des

encouragements de l’Etat, je serai apte à former tous mes employés mais ce n’est

pas le cas…On est tous coupables. Chacun devait jouer sa partition. Pour les

entreprises, ça devait être comme pour la circulation routière. Quand quelqu’un vient

du village, il y’a des policiers, des feux tricolores pour orienter comment bien

circuler…de même, comme nos entreprises génèrent des ressources, l’Etat doit

encourager les entrepreneurs en subventionnant toute la formation des employés,

les amener à former le personnel». C’est aussi ce que relate O.S, niveau primaire,

propriétaire de Maxibell (commerce de cosmétiques), «Moi-même, je n’ai pas été

formé. Je ne connais pas où on peut bénéficier d’une formation. J’ignore qui donne

ces formations, et où il les donne. On n’a pas ces informations. Même s’il y’en a,

c’est des choses très couteuses».

Il ressort de tous ces entretiens que la formation professionnelle au Burkina Faso est

perçue comme un élément très important et qu’elle a une incidence positive sur la

compétence des employés et sur la productivité de l’entreprise. Toute fois, elle est

caractérisée par son inorganisation et son émiettement institutionnel. La formation

professionnelle continue n’est pas encore une obligation pour les entreprises

burkinabè. Elle dépend de la décision du chef d’entreprise et des besoins de

l’entreprise. Cela est dû au fait que, perçue pendant longtemps, à tort ou à raison,

comme un appendice du sous-secteur enseignement technique et professionnel, la

Page 33: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

28

formation professionnelle a été reléguée aux seconds rôles et a bénéficié de peu

d’attention et dans son organisation et dans l’allocation des ressources nécessaires

à son développement. Ce qui fait que dans les pays en développement comme le

Burkina Faso, où le marché du travail connaît de plus en plus des évolutions

significatives dues au contexte socio-économique instable, les changements liés à la

mondialisation ont entraîné l’apparition de nouveaux emplois, exigeant des

compétences nouvelles et rendu de nombreux travailleurs et surtout les demandeurs

d’emploi plus vulnérables. Les compétences deviennent très vite obsolètes du fait de

l’évolution rapide des technologies sur le marché du travail.

2.2.2. Déterminants et impacts de la formation prof essionnelle continue

2.2.2.1. Perceptions des employés sur la formation professionnelle

Sur les 304 employés enquêtés, 238 soit 78,29% de l’échantillon ont reconnu que la

formation continue est importante pour leur carrière professionnelle contre 21,71%

qui pensent le contraire. En plus de ce résultat, la totalité de ceux qui ont déjà suivi

une formation (100%) affirment que la formation a apporté des modifications

qualitatives dans leur productivité. Cela montre que la formation professionnelle a

impact positif sur la productivité des salariés du privé dans la ville de Ouagadougou.

Nous tenterons de vérifier ce résultat sur le plan économétrique, mais avant, voyons

ce qui détermine le choix d’une personne de suivre une formation une fois en activité

dans le privé formel.

2.2.2.2. Analyse des déterminants de la formation professionnelle continue

La régression du modèle (3) a pour but essentiel de permettre d’obtenir des valeurs

non biaisées de la variable éducation qui sont utilisées dans la suite de la recherche.

Néanmoins nous pouvons donner les résultats essentiels suivants contenus dans le

tableau n°8 ci-dessous : la régression donne un coe fficient de détermination R2 =0,4.

Les variables Education du père et Education de la mère sont significatives à 1%.

Les signes positifs montrent que le passage du statut de « non scolarisé » à

« scolarisé » des parents augmente le nombre d’années d’éducation de l’individu.

Cette réduction est de 2,72 si le père n’a pas fréquenté et 2,92 si la mère n’a pas

Page 34: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

29

fréquenté. De plus le temps mis pour rejoindre l’école au primaire a un impact négatif

sur le nombre d’années d’éducation

Tableau 8: Résultats de la régression du modèle (3)

Variables Coef. Std. Err P>|t|

Educ_ P 2.72092*** .6244286 0.000

Educ_M 2.920922*** .654284 0.000

Sex .9884113 .6201727 0.112

Age .0927217** .03688 0.012

Temps_prim2 -1.31856* .7214932 0.069

Temps_prim3 -.991153 .8063332 0.220

Temps_prim4 -6.892426*** 1.035506 0.000

_cons 18.78132*** 1.937574 0.000

Number of obs =304 F(7,296)=28.32 Prob > F= 0.0000, R 2 = 0.4011 *** : significatif à 1% ** : significatif à 5% * : Significatif à 10%

Source : Résultats d’estimation

L’estimation du modèle (2) permet d’appréhender l’impact des variables retenues sur

la probabilité de suivre une formation continue au cours des 12 derniers mois. D’une

manière générale, on peut dire que ce modèle est adéquat au regard du taux de

prédiction correcte qui est de 88,16% et de la probabilité de la vraisemblance qui est

significative à 1% (Tableau 9)

Tableau 9 : Tableau de prédiction du modèle probit

Pseudo R² 0.4408 Prob>khi2 0,000 Taux de prédiction correcte

88.16%

Source : Résultats d’estimation

Les variables significatives de la régression sont l’éducation, l’importance de la

formation, la disponibilité d’un plan de formation. Les variables « Premier emploi » et

le « statut matrimonial » ne sont pas significatives (tableau 10).

Page 35: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

30

Tableau 10 Résultats de l’estimation du modèle (2) et effets marginaux

Formation Coef. Std. Err. P>|t X dy/dx

Educpred .0906169*** .0331108 0.006 12.4013 .0242263 Import_form 1.346211*** .4566766 0.003 1.21711 -.3599079

Plan_form 1.934198*** .2102669 0.000 1.73355 -.5171057

Prem_emp -.2389901 .2062286 0.247 1.52961 -.0638937 married -.0581093 .2024232 0.774 1.57237 -.0155355

_cons 3.429955*** .8903 0.000

Number of obs =304 LR chi2(5)= 160.47 *** significatif à 1% Source : Résultats d’estimation

Les résultats du tableau permettent de faire les commentaires suivants :

Une année supplémentaire d’éducation accroît la probabilité de suivre une formation

continue de 0,024 points. Cela montre donc que la formation initiale est un déterminant de

la formation continue. Ce résultat est semblable à ceux de Beji et al (2004) et de Lillard et

Tan (1986). Le fait que l’individu pense que la formation professionnelle n’a pas une

importance pour son activité professionnelle réduit ses chances de suivre des

formations de 0,35 points. L’impact le plus important est observé au niveau de la

disponibilité d’un plan de formation. En effet le fait que l’individu évolue dans une

entreprise qui n’en dispose pas réduit la probabilité de suivre une formation de plus

de moitié (0,517). Ce coefficient est très évocateur et milite pour une politique en

vue d’encourager les entreprises à disposer de plans de formation au regard des

statistiques. En effet, les données d’enquêtes ont montré que seulement 26,64% des

enquêtés ont déclaré évoluer dans des entreprises qui disposent de plans de

formation.

2.2.2.3. Impacts de la formation sur le revenu

La régression du modèle (2) a aussi permis de générer les ratios de Mills qui sont

utilisés pour l’estimation du modèle 1. Les résultats sont contenus dans le tableau

11:

Page 36: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

31

Tableau 11: Résultats d’estimation du modèle (1)

Variables Coef. Std. Err. P>|t|

Formation .3180464*** .1194952 0.008

imr .1760428*** .0583468 0.003

Exper .035702* .0184076 0.053 Experq -.0003228 .0005846 0.581

caractstruc .2873874** .1189886 0.016 lncaptet .1003792*** .0283034 0.000

_cons 9.032913*** .3851927 0.000 Number of obs =304, F(5,298)= 10.56 Prob > F= 0.000 0 R2= 0.1758

*** significatif à 1% ** Significatif à 5% * significatif à 10%

Source : Résultats d’estimation

La régression donne un coefficient de détermination R2=0,17. La significativité (à 1%) des

ratios de Mills montrent qu’effectivement la formation est endogène dans l’explication du

revenu de l’individu. La variable formation présente un coefficient positif et significatif à 1%.

La valeur du coefficient montre que le fait pour un individu de suivre une formation

professionnelle accroit son salaire de 0 ,3180%. La formation professionnelle continue a

donc un impact positif sur la productivité et le salaire des agents dans le secteur privé

formel. La faiblesse relative de cet impact pourrait être expliquée par l’accaparement des

gains de la formation par les entreprises dont font cas Aubert et al (2006). En effet dans

un contexte de partage des coûts et des bénéfices de la formation entre l’entreprise

et l’employé et où plus de 60% des formés déclarent que les coûts des formations

sont supportées par leurs entreprises, il est à craindre que ces formations ne soient

essentiellement spécifiques, ce qui limite la mobilité de l’employé pour rentabiliser

l’investissement dans d’autres entreprises. Le partage des gains sera dans ce cas à

l’avantage de l’entreprise.

L’expérience professionnelle agit positivement sur le revenu des salariés du privé

formel mais l’effet quadratique n’est pas significatif.

Le logarithme du capital par tête a un impact positif significatif (à 1%) sur la

productivité et donc le salaire de l’individu. Si le logarithme du capital par tête

augment de 1% le salaire mensuel augmente de 0,10%. De plus le fait d’être dans

une grande entreprise au lieu d’une PME/PMI accroit le salaire de 0,28%. Ces

Page 37: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

32

derniers résultats montrent que les caractéristiques de la structure ont un effet non

négligeable sur les revenus dans le secteur privé formel de la ville de Ouagadougou.

Page 38: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

33

Conclusion

L’objet de cette recherche était d’analyser l’impact de la formation en entreprise sur la

productivité des salariés du secteur privé formel de la ville de Ouagadougou. Au total, 304

salariés issus de 110 entreprises ont été enquêtés et un échantillon de 11 chefs

d’entreprises ont été interviewés. Les grands enseignements de cette recherche sont les

suivants :

Aussi bien les salariés que les chefs d’entreprises ont une perception positive de la

formation continue. En d’autres termes, ils pensent que celle-ci contribue fortement à

accroitre la productivité des salariés et des entreprises. Cette vision est donnée par

l’enquête quantitative et les entretiens qualitatifs, mais elle reste essentiellement théorique

car très peu d’entreprises disposent de plans de formation et le nombre de salariés ayant

déjà suivi une formation continue est très faible.

La non disponibilité d’un plan de formation dans l’entreprise réduit de plus de moitié les

chances pour un individu de suivre une formation continue. A côté de cet élément, l’analyse

a montré que la formation initiale est un déterminant important de la formation continue.

La formation professionnelle continue a un impact positif sur la productivité des salariés du

secteur privé, mais cet effet est faible. La formation permet d’accroître les compétences et

les aptitudes professionnelles des salariés, ce qui se répercute sur leurs salaires.

L’étude comporte cependant des limites sur le plan méthodologique. L’approximation de la

productivité par le niveau de salaire comporte des limites soulevées par la littérature et

l’étude n’a pas prévu un temps de réaction pour la formation.

Les résultats permettent de formuler des recommandations à l’endroit des décideurs

politiques et des chefs d’entreprises.

L’Etat doit œuvrer à la vulgarisation des textes régissant la formation continue dans le privé

car la méconnaissance de ces textes a été relevée sur le terrain. Cela peut se faire par des

actions de sensibilisation. Aussi, il devra être ferme sur leurs mises en œuvre et pour cela, il

doit au paravent assumer les responsabilités qui sont les siennes, notamment celles qui ont

trait au volet financier.

Les chefs d’entreprises doivent doter leurs structures de plans de formation et rendre ces

formations effectives pour les agents qui ont le profil et la volonté et mettant effectivement

Page 39: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

34

les moyens. De plus, il faut à l’intérieur de l’entreprise une politique de valorisation des

acquis de la formation.

La conjonction de ces actions peut être un stimulant pour le développement de la formation

professionnelle dans les entreprises du privé formel au Burkina Faso.

Page 40: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

35

Références Bibliographiques

Acemoglu D. and Pischke J.-S (1999 ), Beyond Becker: Training in Imperfect Labour

Markets, The Economic Journal, Vol. 109, No. 453, Features, pp. F112-F142.

Arulampalam W. and Booth A. L. (2001), Learning and Earning: Do Multiple Training

Events Pay? A Decade of Evidence from a Cohortof Young British Men, Economica, New

Series, Vol. 68, No. 271, pp. 379-400

Bartel A. (2000), Measuring the employer’s return on investment in training: evidence from

the literature, 23p.

Becker G. (1975) , Human Capital: A Theoretical and Empirical Analysis, with Special

Reference to Education, 2nd edition, National Bureau of Economic Research, New York.

Distributed by Columbia University Press.(1ère édition, 1964).

Becker, G.S. (1964) , Human Capital: A Theoretical and Empirical Analysis, with Special

Reference to Education

Béji K. Fournier G. Filteau O. (2004), La formation professionnelle continue : Quelle

ampleur pour quel rendement de la loi 90 ? Rapport final, CRIEVAT, 209p.

Béji K. Fournier G. Filteau O. (2004): La formation professionnelle continue : Quelle ampleur pour quel rendement de la loi 90 ? Rapport final, CRIEVAT, 209p.

Bishop J. (1991), The Impact of Previous Training on Productivity and Wages, NBER,

Volume ISBN: 0-226-49810-7 p. 161 – 200

Cameron C. A. AND Trivedi K P.(2005) : Microeconometrics (methods and applications) Card D. (1995), “Earnings, schooling and ability revisited”, in Solomon Polachek, ed., Research in labor economics, Vol. 14 (JAI Press, Greenwich, CT) pp. 23-48. Carriou Y. et Jeger F. (1997) : La formation continue dans les entreprises et son retour sur Investissement, Economie et statistique, N°303. pp. 45-58. Heckman, J. J. (1978) : Dummy endogenous variables in a simultaneous equation system. Econometrica 46:931–59. Heckman, J. J. (1979): Sample selection bias as a specification error. Econometrica 47:153–61.

Page 41: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

B

Katz E. and Ziderman A. (1990) : Investment in General Training: The Role of Information and Labour Mobility, The Economic Journal, Vol. 100, No. 403, pp. 1147-1158 Lillard L.A. and Tan H. W. (1986): Private sector training. Who gets it and what are its effects, The Rand corporation, 98p.

Lynch L. M. (1992), Private-Sector Training and the Earnings of Young Workers

Mincer J.(1962) : On-the-job training : Costs, returns and some implications, The Journal of Political Economy, Vol. 70, No. 5, Part 2: Investment in Human Beings, pp. 50-79 Mincer, J. (1958). “Investment in human capital and personal income distribution”. Journal of Political Economy 66 (4), 281–302. Mincer, J. (1974). Schooling, Experience and Earnings. Columbia University Press for National Bureau of Economic Research, New York. Mingat A. et Jarousse J-P. (1986) : Un réexamen du modèle de gains de Mincer, Revue économique. Volume 37, n°6, pp. 999-1 032.

Ministère de la jeunesse et de l’emploi , ONEF, enquête nationale sur l’emploi et la formation, (ENEF 2008), rapport final, première partie, mai 2009, 35p.

Ministère de la jeunesse et de l’emploi , ONEF, enquête nationale sur l’emploi et la formation, (ENEF 2008), rapport final, deuxième partie, mai 2009, 72p. Ministère de la jeunesse et de l’emploi , ONEF, tableau de bord du marché du travail 2000-2008, Population, Emploi, Travail et sécurité sociale, St ructures de financement, Dépenses et revenu, 2009

Ndjobo P.M.N., Kamgnia Dia, B. Epo’ B. N. (2011): Une analyse empirique de la rentabilité privée de l’éducation au Cameroun: Estimation d’un modèle Tobti de type III structurelle, JERA n°3, 2011, PP 50-58. Schultz T. W. (1960) : Capital formation by education," journal of political. Economy. Schultz T. W. (1961) : Investment in human capital, the American Economic Review, vol. 51, no. 1, pp. 1-17 Simonnet V. (2003) : Le capital humain, 16p. Spence M. (1973), « Job Market Signalling », Quaterly Journal of Economics, 87, pp. 355-374.

Page 42: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

C

Stankiewicz F. (1995), Choix de formation et critères d'efficacité du travail: Adaptabilité et

financement de la formation générale par l'entreprise, Revue économique, Vol. 46, No. 5,

pp. 1311-1331

Stevens M. (1994), A Theoretical Model of On-the-Job Training with Imperfect Competition,

The American Economic Review, Vol. 82, No. 1, pp. 299-312

Rapport de synthèse de l’atelier de restitution de l’étude sur la politique salariale du secteur prive au Burkina Faso, mars 2011, Ouagadougou

Page 43: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

D

Annexe

Annexe 1 : Fiche d’enquête quantitative

ENQUETE SUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE D ANS LE SECTEUR PRIVE FORMEL AU BURKINA FASO

(Recherche financée par le ROCARE sous la tutelle scientifique de l’INSS/CNRST)

Questionnaire adressé aux salariés des entreprises du secteur privé formel de la ville de Ouagadougou

Ce questionnaire est confidentiel une fois rempli. A. Identification

A01. Date de collecte : |___|___| |___|___| |___|___|

A02. Code agent enquêteur : |___|

A03. Code contrôleur : |___| A04. Numéro du questionnaire : |___|___|___|

B. Informations générales sur l’entreprise :

B01. Arrondissement : ____________________________ B02. Secteur : |___|___|

B03. Nom ou raison sociale de l’entreprise :__________________________

B04. Adresse : _______________________ B05 : Tél. :______________

B06 : Statut juridique : |___| 1 = Entreprise individuelle 2 = Association de personne 3 = SARL 4 = Société en nom collectif 5=

Société anonyme 6 = EPIC 7= Société d’économie mixte 8 = Société d’état 9 = GIE

B07 : Activité principale de l’entreprise : ____________________________ B08/ : Activité secondaire : _______________________________________

B09 : Capital de l’entreprise (en millions de francs CFA) |___|___|___|___|

Page 44: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

E

B10 : Caractéristique de la structure : |___| 1.PME 2.PMI 3. Grande entreprise

B11 : Effectif du personnel : |___|___|___|

C. Informations générales sur l’enquêté C01. Quel est l’âge de l’enquêté (années révolues) : |___|___| C02. Sexe de l’enquêté: |___| 1.M 2.F C03. Statut matrimonial:|___| 1. Célibataire 2.Marié(e) monogame 3.Marié(e) polygame 4.Divorcé(e) 5.Veuf/veuve

C04. Poste de responsabilité occupé (profession) :____________________________

D. Informations sur l’éducation D01. Quel est votre niveau d’éducation? |___|

1. Primaire. 2. Secondaire 1 3.Secondaire2 4.Supérieur 1 5. Supérieur 2 6.Supérieur 3 7. Ecole coranique 8.Pas fréquenté Si réponse = 7 ou 8, aller à D08.

D02. Quel est le dernier diplôme que vous possédez ? |___|___| 1. Aucun 2.CEPE 3.BEPC 4.BAC 5.DEUG/BTS/DUT 6.Licence 7.Maîtrise

8. DEA/DESS/Master 9.Doctorat/PhD 10. Autres (à préciser)

D03. Quel type d’enseignement avez-vous suivi au secondaire ? |___| 1.Général 2.Technique D04. En quelle année (Nom) a débuté ses études primaires |___|___||___|___|

D05. Quelle est l’année de fin de scolarité de (Nom) |___|___||___|___|

D06. Combien de fois (NOM) a redoublé|___|___|

D07. Combien de temps (Nom) mettait-il pour aller à l’école quand il était au primaire(en min) |___| 1. Moins de 15 mn 2. 15 à 30 mn 3. 30 à 45 mn 4. Plus de 45mn

D08. Est-ce que le père de (NOM) a-t-il fréquenté : |___| 1.Oui 2.Non.

D09. Si oui quel est le niveau atteint : |___| 1. Primaire, 2. Secondaire 3.Université

D10. Est-ce que la mère de (NOM) a-t-elle fréquentée : |___| 1.Oui 2.Non.

D11. Si oui quel est le niveau atteint : |___| (1. Primaire, 2.Secondaire 3. Supérieur)

Page 45: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

F

E. Informations sur la formation professionnelle E01. Depuis combien d’années êtes-vous employé dans cette entreprise ? |___|___|

E02. Avez-vous acquis/changé de poste de responsabilité dans l’entreprise depuis votre arrivée ? |___| 1.Oui

2.Non. Sinon, aller à E04.

E03. Si oui, qu’est-ce qui justifie selon vous cette promotion ? |___| 1. Ancienneté, 2.Expérience professionnelle 3.Nouveau diplôme/Formation 4.Autres raisons

E04. Cet emploi dans cette entreprise est-il le premier de votre carrière ? |___| 1.Oui 2.Non.

E05. Si non, dans combien d’entreprises avez-vous exercé ? |___|

E05-1. Pendant combien de temps ? |___|___|___|

E05-2. Quelle est votre expérience professionnelle ? (en nombres d’années) ? |___|___|

E06. Pourquoi avez-vous changé d’entreprise ?_________________________________________ ___________________________________________________________________________

E07. A combien estimez vous votre revenu mensuel dans votre emploi actuel au cours des 12 derniers mois? (en milliers de francs) |___|___||___|___|

E08. A combien estimez vous vôtre revenu mensuel l’an dernier (Avant septembre 2010) ? (en milliers de francs) |___|___||___|___|

E09. Pensez-vous que la formation professionnelle continue est importante pour votre carrière professionnelle ?

|___| 1.Oui 2.Non.

E10. Avez-vous poursuivi vos études après l’obtention de l’emploi ? |___| 1.Oui 2.Non.

E11. Pensez-vous que l’entreprise accorde de l’importance à la formation professionnelle continue de ces employés ? |___| 1.Oui 2.Non.) E11-1. Pourquoi ?________________________________________________________________________ ______________________________________________________________________________________

E12. Votre entreprise dispose-t-elle d’un plan de formation annuel au bénéfice des agents ? |___| (1.Oui 0.Non.)

E13. Au cours des 12 derniers mois, avez-vous suivi les types de formations suivantes : |___| 1.Oui 2.Non E13-1. Formations pour la spécialisation : |___| E13-2. Formations de perfectionnement: |___| E13-3. Formations diplômantes : |___| Sinon de E13-1 à E13-3., aller à E18.

Page 46: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

G

E14. Si Oui aux questions E.13.1. E.13.2 ou E.13.3, Pendant quelle durée ? E14-1. Formations pour la spécialisation (En heures) : |___||___||___| E14-2. Formations de perfectionnement (En heures) : |___||___||___| E14-3. Formations diplômantes (En mois) : |___||___||___| E15. Qui a supporté les couts de cette formation ? |___| [codes : 1. Vous-même 2. Votre entreprise 3. l’Etat/Gouvernement 4. Autres à préciser]

E16. A combien s’élevaient ces couts ? (en milliers de francs)| ___|___|___|___|

E17. Précisez les domaines dans lesquelles ces formations ont été effectuées : ______________________________________________________________________________________ _______________________________________________________________________________________

E18. Avez-vous suivi des formations continues au cours avant septembre 2010 ? |___| 1.Oui 2.Non

E18-1. Formations pour la spécialisation : |___| E18-4. Si oui pendant quelle durée ? |___|___|___| E18-2. Formations de perfectionnement: |___| E18-5. Si oui pendant quelle durée ? |___|___|___| E18-3. Formations diplômantes : |___| E18-6. Si oui pendant quelle durée ? |___|___|___|

E19. Ces formations ont-elles apporté des modifications importantes de votre productivité/efficacité ? |___| 1.Oui 2.Non. Sinon, aller à E20.

E19-1. Si oui, lesquelles ?__________________________________________________________________ ______________________________________________________________________________________

E19-2. Si non, pourquoi ?__________________________________________________________________ _______________________________________________________________________________________

E20. Existe-t-il selon vous des textes réglementaires régissant les formations professionnelles dans les entreprises ? |___| 1.Oui 2.Non 3.Ne sait pas (Si non, fin de l’enquête) E20-1. Si oui, connaissez-vous ces textes ? |___| 1.Oui 2.Non E21. Croyez-vous que ces textes sont appliqués de manière satisfaisante ? |___| 1. Non 2.faiblement 3. Oui (moyennement) 4. Oui (bien) 5. Ne sait pas E22. Selon vous, que faut-il faire pour vulgariser ces textes ? _________________________________________

_______________________________________________________________________________________________________________________________________________________

Merci pour votre collaboration !

Page 47: Analyse socio-économique du rendement de la formation ...

H

Annexe 2 : Guide d’entretien qualitatif

Collecte de données sur les perceptions des chefs

d’entreprises sur la formation professionnelle cont inue au Burkina Faso

I- Identification 1. Nom ou raison sociale de l’entreprise :……………………………………………………... Nom et prénoms de l’enquêté:………………………………………………………………… 2. Adresse:………………………………………….. 3. Sexe: M /___/ F /___/ 4. Statut matrimonial: Célibataire /___/ Marié(e) monogame /___/ Marié(e) polygame /___/ Divorcé(e) /___/ Veuf/veuve /___/ 5. Caractéristique de la structure: PME /___/ PMI /___/ Grande entreprise /___/ 6. Poste de responsabilité occupé (profession):……………………………….. 7. Secteur d’activité de la structure:………………………………………………

II- Perceptions sur la formation professionnelle continue 8. Importance de la formation professionnelle continue pour votre entreprise

- Qui en est le principal bénéficiaire? L’entreprise ou le salarié?

- Combien d’employés reçoivent au moins une formation par an dans votre entreprise

- Quelle proportion représente ce nombre dans votre personnel

9. Droit de connaissance de ces textes par les salariés - Quel est l’enjeu?

10. Point sur le contenu des textes qui régissent les formations professionnelles continues dans votre secteur d’activité. 11. Mode d’application de ces textes dans votre entreprise?

- Sont-ils appliqués ou pas?

12. Point de vue sur les textes - Vous satisfont-ils?

- Ou sont-ils contraignants pour votre entreprise?

13. Quelles suggestions faites-vous pour une meilleure collaboration entre employeur et employés et pour une plus grande vulgarisation de ces textes au profit des salariés?

Merci pour votre collaboration.