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ANALYSE DES BESOINS DES CONSOMMATEURS D’OPIACES EN GRANDE PRECARITE DE L’AGGLOMERATION LYONNAISE SEPTEMBRE 2018

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ANALYSE DES BESOINS DES

CONSOMMATEURS

D’OPIACES EN GRANDE

PRECARITE DE

L’AGGLOMERATION

LYONNAISE

SEPTEMBRE 2018

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CE TRAVAIL A ÉTÉ RÉALISÉ PAR L'OBSERVATOIRE RÉGIONAL DE LA SANTÉ AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

Eve GIOVANNINI, chargée d’études

Patricia MEDINA, responsable des études qualitatives, sociologue

Avec le soutien de l’association OPPELIA

Ce rapport est disponible sur le site Internet de l’ORS Auvergne-Rhône-Alpes :

www.ors-auvergne-rhone-alpes.org

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Remerciements

L’Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes tient à remercier ici toutes les

personnes qui ont contribué à la réalisation de l’étude portant sur l’analyse des besoins des

consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise et tout

particulièrement :

- Le Dr CANAT, médecin généraliste et addictologue au CSAPA du Griffon et au

CAARUD RuptureS pour son aide précieuse dans la mise en place de cette étude et

notamment pour la mise en contact avec les partenaires locaux ;

- Les acteurs interviewés pour leur disponibilité et leur excellente participation.

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Sommaire

CONTEXTE ET OBJECTIFS ......................................................................................................9

METHODE ............................................................................................................................. 12

RESULTATS .......................................................................................................................... 15

1. Les ressources d’addictologie dans l’agglomération lyonnaise ................................... 15

1.1. Les ressources de réduction des risques en matière de consommation de

substances psychoactives ..................................................................................... 15

1.2. Les ressources de soin addictologique ................................................................. 17

2. Les ressources possibles pour les consommateurs d’opiacés en grande précarité .. 19

3. Les consommateurs d’opiacés les plus vulnérables repérés dans l’agglomération

lyonnaise ....................................................................................................................... 23

3.1. Différents publics repérés ..................................................................................... 23

3.2. Problématiques transversales repérées ............................................................... 23

3.3. Caractéristiques, pratiques et parcours de soin des publics repérés .................. 24

4. Points forts et freins repérés à la RDR et à un suivi addictologique des

consommateurs d’opiacés en grande précarité .......................................................... 27

4.1. Points forts ............................................................................................................. 27

4.2. Freins ..................................................................................................................... 29

4.3. Les besoins et les pistes d’actions évoquées par les acteurs interviewés ........... 31

5. Hypothèse « Csapa mobile » ......................................................................................... 34

5.1. Avantages et limites perçues par les acteurs interviewés .................................... 34

5.2. Csapa Mobile, les modalités souhaitées par les acteurs interviewés ................... 35

6. Synthèse et recommandations ...................................................................................... 38

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Contexte

Contexte national

Les opiacés occupent aujourd’hui une place importante dans les consommations des

usagers actifs de drogues. D’après l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies

(OFDT)1, en 2010, plus de 70 % des usagers accueillis dans les Centres d'Accueil et

d'Accompagnement à la Réduction des risques pour Usagers de Drogues (CAARUD) ont

consommé au moins un opiacé au cours du mois. La France compte plus de 180 000

personnes dépendantes à l’héroïne et environ 500 000 personnes en auraient déjà

consommé une fois dans leur vie. Les pratiques associées à ces consommations d’opiacés

sont pour le plus souvent à risque étant donné que le mode de prise est essentiellement

l’injection, le snif ou l’inhalation.

Dans le cadre de la politique de réduction des risques développée au cours des années 1980,

dans un contexte d’épidémie de pathologies virales telles que les hépatites et le VIH chez les

usagers de drogues, les traitements de substitution aux opiacés (TSO), et d’autres outils tel

que le kit d’injection à usage unique, ont permis de ralentir la diffusion de ces virus mais

aussi de réduire les risques encourus de l’usage de drogues.

En 2013, entre 160 000 et 180 000 personnes ont reçu une prescription de Médicaments de

Substitution aux Opiacés (MSO) : 150 000 remboursements de MSO délivrés en ville ont été

recensés et environ 20 000 personnes ont reçu une dispensation de méthadone dans un

CSAPA. La buprénorphine haute dose (BHD) reste largement majoritaire et représente 65 %

des bénéficiaires de TSO. Le nombre total de personnes traitées dans un Centre de Soins,

d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) en raison de leur

consommation d’opiacés était estimé à 53 000 en 2010. Ce nombre a augmenté d’un tiers

entre 2006 et 2010, du fait de la prolongation importante des durées de suivi (à compter en

dizaines d’années pour certains), alors que parallèlement de nouvelles personnes sont

prises en charge.

Ces mesures de réduction des risques ont permis d’endiguer l’expansion rapide de

l’épidémie de VIH/SIDA et des surdoses mortelles. Ces mesures ont favorisé également

l’accès aux soins d’une population extrêmement marginalisée, qui a pu ainsi bénéficier d’une

meilleure prise en charge et d’un meilleur suivi.

Ce constat positif doit toutefois être nuancé. En effet, la situation épidémiologique, vis-à-vis

de l’hépatite C (VHC), reste à ce jour très préoccupante chez les usagers de drogue avec des

taux de prévalence très élevés (près de 60% versus moins de 1% en population générale).

L’observation des pratiques de consommations des usagers fréquentant les CAARUD permet

de constater également une tendance à l’augmentation de la consommation d’opiacés et

notamment d’opiacés synthétiques et l’apparition d’une nouvelle population, poly-

dépendante. Enfin, les opiacés restent les principales substances à l’origine des décès par

surdose.

1 http://www.ofdt.fr/produits-et-addictions/de-z/heroine-et-autres-opiaces/

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Par ailleurs, il persiste une frange de la population en situation de vulnérabilité sociale et

sanitaire importante pour laquelle l’offre de réduction des risques apparaît insuffisante.

L’analyse nationale de l’activité des CAARUD fait état d’une aggravation de l’état de santé

global et d’une augmentation de la précarité de la file active. On observe ainsi une

multiplication des problèmes veineux, une recrudescence des pathologies liées à la

précarité et de nombreux troubles psychiatriques.

Les CAARUD notent aussi une forte accentuation de la marginalité : dégradation des

conditions d’accès à l’hébergement, cumul des problématiques chez les personnes en

situation irrégulière, augmentation des cas de condamnations ou de mesures judiciaires.

Les indicateurs socio-économiques relatifs aux usagers des CAARUD sont explicites : les

personnes accueillies restent avant tout des individus en grande exclusion sociale : 60%

d’entre elles sont sans domicile ou vivent en squat, les autres en logement provisoire. La

moitié est bénéficiaire de prestations sociales (RMI ou AAH) et un quart n’a aucun revenu

licite.

La persistance de comportements à haut risque infectieux, l’évolution des modes de

consommation et l’apparition d’une nouvelle population, poly-dépendante et précaire,

plaident en faveur d’une offre élargie, adaptée et diversifiée de prévention et de soin des

addictions

Contexte local

Sur le territoire rhônalpin d’après les données de l’OFDT2, 0,3% de la population âgées de

15-64 ans, a consommé, au moins une fois dans l’année, de l’héroïne. Toujours d’après les

données diffusées par l’ODICER, dans le département du Rhône en 2014, environ 1 535

personnes ont eu au moins une fois dans l’année une consultation dans un CSAPA en

ambulatoire pour consommation d’opiacés et de stimulants, soit environ 16,1 pour 10 000

personnes âgées de 20 à 59 ans dans le département (versus 17,6 pour 10 000 en France).

Enfin, environ 1 014 patients étaient estimés sous méthadone en 2015 dans le département

du Rhône et 1 144 en 2016.

Les questionnements du CSAPA du Griffon sur la création d’une unité mobile de CSAPA pour la délivrance de Médicaments de Substitution aux Opiacés (MSO)

L’Association OPPELIA (fusion absorption entre l’association ARIA et l’association nationale

Oppelia en 2017) gère 4 établissements médico-sociaux dans le Rhône : le CSAPA Griffon à

Villeurbanne (auquel est rattaché l’équipe mobile d’addictologie), le Csapa Jonathan à

Villefranche-sur-Saône, le Caarud RuptureS, basé à Lyon et le CHRS spécialisé APUS

également basé à Lyon.

Depuis plusieurs années, les membres de l’équipe du CSAPA du Griffon portent le constat de la faible accessibilité des programmes de délivrance de MSO pour les personnes

2 http://www.ofdt.fr/regions-et-territoires/cartographie-odicer/

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marginalisées consommatrices d’opiacés et en situation d’errance du fait, notamment, de

l’organisation des CSAPA : délais de rendez vous, démarche d’aller vers un centre de soins…

A ce jour, il n’existe pas de dispositif spécifique de délivrance facilitée de MSO dans une

approche de réduction des risques dans l’agglomération lyonnaise.

Par ailleurs, les professionnels du CSAPA du Griffon notent un accès à un traitement de

substitution difficile sur la métropole lyonnaise. Les CSAPA doivent gérer une demande

supérieure aux capacités d’accueil, et nombreux sont les usagers à ne pas pouvoir bénéficier

d’un accompagnement ou même d’une initiation à un traitement par méthadone.

Les médecins généralistes limitent également l’accès aux traitements de substitution via la

médecine de ville devant le risque d’être submergé par une patientèle parfois complexe.

Enfin, une partie de la population usagère de drogues ne se rend pas dans les CSAPA du fait

de l’organisation même de ces structures : prise de RDV, démarche d’aller dans un centre

de soins…..

Face à ces questionnements, l’association Oppelia, en tant qu’association médico-sociale en

addictologie, souhaite mettre en œuvre un dispositif mobile de délivrance de traitement de

substitution aux opiacés sur l’agglomération lyonnaise.

Le but de ce projet expérimental serait de maintenir un lien et d’accompagner des usagers

qui ne peuvent pas ou ne souhaitent pas intégrer un centre de délivrance de médicaments de

substitution aux opiacés classique type CSAPA. Le dispositif à venir se positionnerait comme

une « structure passerelle » entre les consommations de rue et les dispositifs de droit

commun et permettrait d’accueillir les populations les plus marginalisées qui n’ont pas les

capacités à s’inscrire plus durablement dans des centres d’addictologie classiques.

L’hypothèse de fond est que certaines personnes, éloignées des filières thérapeutiques de

fait, pourraient être amenées, via ce programme, vers des modalités de prise en charge plus

continues et adaptées à leur situation. Le programme de cette unité mobile n’est pas vu

comme une fin en soi, mais plutôt comme un des moyens permettant aux usagers les plus

marginalisés et exclus des soins, de s’inscrire dans une démarche thérapeutique.

Des expériences similaires de bus Méthadone à Paris et Marseille ont permis de dresser un

constat positif de ce type de prise en charge dans le dépistage, la prise en charge et

l’orientation des usagers. D’après l’évaluation du Bus méthadone de Paris, réalisée par

l’OFDT3, ce programme a permis à des usagers d’accéder à la substitution et à une prise en

charge qui corresponde à leurs attentes et à leurs modes de vie. Certains usagers en

situation de grande précarité ont pu également réintégrer la filière de soins classique et

bénéficier d’un soutien médico-psycho-social.

3 http://www.ofdt.fr/BDD/publications/docs/bus.pdf

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Objectif et méthodologie

Objectifs de l’étude

Après avoir exploré l’acceptabilité de ce projet auprès de leurs partenaires en addictologie,

l’association ARIA souhaite dresser une analyse des besoins des usagers d’opiacés de

l’agglomération lyonnaise n’ayant pas de possibilité de recours aux soins, ou ne pouvant pas

être pris en charge par les structures classiques existantes.

L’objectif de l’étude est ainsi d’analyser les besoins des usagers d’opiacés de

l’agglomération lyonnaise et notamment les plus défavorisés qui ne peuvent ou ne

souhaitent pas intégrer un centre de délivrance de médicaments de substitution :

- Caractériser cette population et analyser les freins et leviers à leur accès à la RDR,

aux soins en addictologie ;

- Analyser la pertinence de la création d’un dispositif mobile d’accès facilité aux

traitements de substitution aux opiacés (TSO) dans l’agglomération lyonnaise :

avantages, limites, modalités, lieux de permanences.

Méthodologie

Cette étude qualitative a été réalisée par entretien semi-directifs auprès de professionnels

et bénévoles de structures d’addictologie, structures en lien avec publics précaires

consommateurs d’opiacés et d’un médecin de ville.

Les entretiens ont permis d’explorer, à partir de l’expérience et des représentations des

acteurs interviewés, les besoins et pratiques des consommateurs d’opiacés en grande

difficulté sociale, les ressources existantes, les carences » de couverture repérées et

l’hypothèse de la mise en place d’une unité mobile dans l’agglomération lyonnaise.

Ces entretiens, d’une durée variant d’une à deux heures ont été réalisés par téléphone, de

manière individuelle ou en groupe.

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Liste des personnes interviewées

12 entretiens ont été réalisés auprès de 17 professionnels et bénévoles. Les entretiens

réalisés avec les personnes-ressources se répartissent comme suit :

- Mme LEROUX-MILANETTO, travailleur social, Accueil de Jour association

Fondation AJD

- M. et Mme FROSSARD, bénévoles responsables Samu social association Croix-

Rouge française

- M. GORRIAS, M. CANCIANI, bénévoles responsables mission Bus Médecins du

Monde Lyon

- Mme HAGGOUCHE, référent socio-éducatif, CHRS Carteret association ALYNEA

- DR SOUWEINE, médecin généraliste

- DR JANAUD, psychiatre, EMPP Interface SDF CHS Saint-Jean de Dieu

- Mme TRINTIGNAC, infirmière, Mme TISSIER, éducatrice spécialisée, M.

ROSTANE, M. POCHON, M. SENTER, travailleurs sociaux, CAARUD Pause Diabolo

association Le MAS

- M. Hautain, coordinateur association Keep-Smiling

- Mme Le BRUN, chef de service Csapa-Caarud association 31-32 à Marseille

- M. WOLAK, interprête intervenant au Caarud Pause Diabolo

- Mme KHAM, travailleur social, accueil de jour association ALIS

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Résultats

1. Les ressources en addictologie dans l’agglomération

lyonnaise

1.1. Les ressources de réduction des risques en matière de consommation de

substances psychoactives

Diverses ressources de réduction des risques (RDR) sont présentes dans l’agglomération

lyonnaise. Selon les entretiens réalisés les Caarud et les pharmacies qui participent à un

programme d’échange de seringue sont des ressources bien repérées et utilisées par les

consommateurs d’opiacés en grande précarité (absence de logement autonome).

Deux Caarud sont présents dans l’agglomération lyonnaise dans le centre de Lyon, le Caarud

Ruptures (situé dans le 1er arrondissement) porté par l’association OPPELIA et le Caarud

Pause Diabolo (situé dans le 3ème arrondissement) porté par l’association Le Mas. Ces deux

Caarud proposent en semaine, la journée (un jour par semaine jusque 19h30 au Caarud

Ruptures), des permanences dans leurs locaux et réalisent un travail de rue (maraudes) à

Lyon. La Caarud Pause Diabolo porte également un dispositif dénommé « SOS matos » qui

propose la livraison de matériel de RDR à domicile (ou dans un point de rendez-vous) et

l’envoi postal de matériel de RDR. Ces structures sont fermées le soir après 18h (sauf une

soirée par semaine jusque 19h30 au Caarud Ruptures) et le week-end, à l’exception du Bus

de réduction des risques (porté par le Caarud Ruptures) qui effectue le dimanche en soirée

trois permanences d’une heure dans trois arrondissements (1er,4ème et 9ème arrondissement).

Vingt-deux pharmacies, partenaires du programme d’échange de seringues PEKO, porté par

les Caarud RuptureS et Pause Diabolo, délivrent gratuitement du matériel stérile d’injection

dans l’agglomération Lyonnaise. Ces pharmacies sont situées dans le 1er,2ème, 3ème, 4ème,

5ème, 7ème et 9ème arrondissement de Lyon et dans les communes de Rillieux-la-Pape,

Villeurbanne, Vénissieux et Vaulx-en Velin. Notons également que ces pharmacies sont

fermées le soir (à partir de 20h), à l’exception de la pharmacie de Vénissieux.

D’autres structures de l’agglomération lyonnaise sont également engagées dans une

démarche de réduction des risques et mettent à disposition du matériel de RDR, à savoir :

- Keep-Smiling, une association d’auto-support en milieu festif et gay, propose des

permanences d’accueil dans ses locaux (situés dans le 6ème arrondissement) le

vendredi en début de soirée (17h-21h) et est présente dans les espaces festifs ;

- L’association AIDES met à disposition du matériel de RDR lors de ses permanences

d’accueil en journée (locaux situés dans le 2nd arrondissement) ;

- L’association Cabiria, une association de santé communautaire avec les personnes

protituées à Lyon, propose des permanences d’accueil dans ses locaux situés dans le

1er arrondissement et mène également un travail de rue. L’association fournit sur

demande du matériel de RDR ;

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- Le Centre de Santé et de Sexualité, porté par Virages Santé (réseau VIH Ville-Hôpital),

fournit, sur demande, du matériel d’injection stérile dans leurs locaux situés dans le

1er arrondissement.

Enfin, un automate d’échange et de distribution de seringues est présent dans

l’agglomération lyonnaise, dans le 3ème arrondissement (un second automate situé dans le

premier arrondissement a été supprimé).

Soulignons que la possibilité d’envoi postal de matériel de RDR semble peu utilisé par les

consommateurs d’opiacés très précaires, en raison notamment de l’absence de logement

stable et autonome.

Tableau des ressources RDR de l’agglomération lyonnaise

RDR Description

2 Caarud

Caarud RuptureS (OPPELIA)

Permanences , 1er arrondissement de Lyon, 8 demies-journées/semaine en

journée et un jour par semaine jusqu’à 19h30

Travail de rue (maraudes ) rive droite du Rhône (Lyon 1, Lyon 2)

Bus de RDR les dimanches en soirée, permanences dans 3 arrondissements

(1 heure de permanence chacun) : Lyon1, Lyon 4, Lyon 9

Caarud Pause Diabolo (Le Mas)

Permanences 3ème arrondissement de Lyon, 4 jours semaine l'après-midi : 3

après-midi accueil mixte et mardis après-midi réservé aux femmes. Ferme à

18h

Travail de rue : rive gauche du Rhône (Lyon, 3,6,7,6,8) et Villeurbanne

SOS matos : livraison matériel à domicile ou point de RDV et envoi postal

22 pharmacies

PEKO

Listes des pharmacies participantes au programme échange de seringues

PEKO

2 à Rillieux-la-Pape, 1 à Villeurbanne, 1 à Vénissieux , 1 à Vaulx-en-Velin, 1 à

Lyon 1 , 2à Lyon 2, 3 Lyon à 3, 1 Lyon 4, 1 à Lyon 5, 7 à Lyon 7 , 3à Lyon 9.

2 Associations

Keep-Smiling (association auto-support milieu festif)

Permanences accueil, Lyon 6, les vendredis (17h à 21h), matériel de RDR à

disposition et présence dans espaces festifs (dont squatts)

AIDES

Permanence d’accueil, Lyon 2, les lundis et jeudis après-midi, mise à

disposition matériel de RDR.

Centre de santé

Centre de santé et de sexualité (Virages Santé réseau ville –hôpital VIH), Lyon 1

Permanence hebdo. du Csapa Hôpital Croix-rousse et de l’association keep-

Smiling. Possibilité de se fournir gratuitement en kits stériles (sur demande)

1 Automate

échangeurs

distributeurs de

seringues

Maintenance par la Ville de Lyon Approvisionnement par le CAARUD Pause

Diabolo

situé à Lyon 3 (rue du pensionnat)

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1.2. Les ressources de soin addictologique

Trois centres hospitaliers de l’agglomération lyonnaise disposent d’un service d’addictologie,

et deux d’entre eux délivrent des traitements de substitution aux opiacés : le Csapa de

l’hôpital Edouard Herriot et le CSAPA de l’hôpital de la Croix-Rousse.

- Le service d’addictologie de l’Hôpital de la Croix-Rousse porte une équipe de liaison

en addictologie (ELSA), un Centre de Soins d’Accompagnement et Prévention en

Addictologie (Csapa) qui assure la délivrance des traitements de substitution aux

opiacés. Des sevrages simples et complexes hospitaliers sont possibles (service

addictologie de niveau 2). Une consultation grossesse et addiction est également

proposées.

- Le service d’addictologie de l’hôpital Edouard Herriot porte un Csapa qui assure la

délivrance des traitements de substitution aux opiacés et une équipe de liaison en

addictologie (ELSA) (ainsi qu’une Consultation Jeunes Consommateurs).

- Le service d’addictologie du Groupe Hospitalier Mutualiste des Portes du Sud porte

une équipe de liaison en addictologie (ELSA), des consultations, des sevrages

hospitaliers simples et complexes (service addictologie de niveau 2).

Notons que les équipes de liaison en addictologie (ELSA) présentes dans certains centres

hospitaliers permettent également de prendre en compte la problématique d’addiction de

patients hospitalisés pour d’autres motifs dans l’établissement. L’hôpital Lyon-Sud à Pierre-

Bénite, le Centre Hospitalier de Mongelas à Givors disposent d’une Elsa. Par ailleurs l’Elsa

de l’hôpital de l’Arbresle intervient au Centre Médico-Chirurgical de Réadaptation des

Massues et dans trois cliniques de l’Ouest lyonnais (clinique Charcot à Sainte-Foy, clinique

de la Sauvegarde dans le 9ème arrondissement de Lyon et clinique de Val d’Ouest à Ecully).

Cinq Csapa associatifs sont présents dans l’agglomération lyonnaise dont un assure la

délivrance des traitements de substitution aux opiacés : le Csapa du Griffon.

- Un Csapa porté par l’association OPPELIA : le Csapa du Griffon situé à Villeurbanne.

Ce Csapa assure la prise en charge des polyaddictions (alcool et produits illicites) et

la délivrance des traitements de substitution aux opiacés. Une équipe mobile en

addictologie (rattachée au CSAPA) intervient auprès des usagers de six Centres

d’hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS);

- Deux Csapa portés par l’association LYADE : le Csapa Ainay et le Csapa résidentiel

Fulchanière. Le Csapa Ainay a 3 sites de soin : Lyade-Ainay (situé dans le 2nd

arrondissement), Lyade-Vénissieux et Lyade-Garibaldi (situé dans le 3ème

arrondissement). Historiquement les sites d’Ainay et Vénissieux étaient plutôt

spécialisés dans la prise en charge des addictions aux produits illicites et le site de

Garibaldi plutôt spécialisé dans la prise en charge des addictions à l’alcool et au

tabac. Aujourd’hui ces centres de soins prennent en charge l’ensemble des

addictions. Le Csapa la Fulchanière est un Csapa résidentiel qui accueille des

patients ayant déjà engagé un parcours de soins, pour une consolidation du

traitement.

- Deux Csapa portés par l’association ANPAA, plutôt spécialisés dans la prise en

charge des addictions à l’alcool. La Csapa de Villeurbanne et la Csapa de Givors.

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Enfin, en milieu pénitentiaire, on repère le Csapa de la Maison d’arrêt de Corbas, porté par le

Centre hospitalier Spécialisé Le Vinatier.

Carte des dispositifs d’addictologie de l’agglomération lyonnaise au 1/06/2018

Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

Enfin, en milieu pénitentiaire, on repère le Csapa de la Maison d’arrêt de Corbas, porté par le

Centre hospitalier Spécialisé Le Vinatier.

d’addictologie de l’agglomération lyonnaise au 1/06/2018

précarité de l’agglomération lyonnaise

Enfin, en milieu pénitentiaire, on repère le Csapa de la Maison d’arrêt de Corbas, porté par le

d’addictologie de l’agglomération lyonnaise au 1/06/2018

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 19

L’analyse de la répartition dans l’espace et le temps des ressources d’addictologie (RDR et

soins) de l’agglomération lyonnaise permet de repérer certains « vides » :

- Certaines parties du territoire sont peu couvertes en termes de pharmacies

distribuant gratuitement du matériel d’injection stérile mais cela semble peu

problématique car les publics consommateurs d’opiacés sont très peu nombreux

dans ces espaces, sauf à Givors en raison de la discontinuité géographique et des

distances à parcourir jusqu’aux ressources de RDR. Ainsi, dans les communes de la

première couronne de Lyon et les quartiers en politique de la Ville, si quelques

(rares) publics consommateurs d’opiacés sont repérés, ils bénéficient d’un logement

et leur problématique d’addiction semble relativement stabilisée ce qui leur permet

de mieux gérer leurs consommations et d’anticiper leurs besoins en matériel

d’injection stérile et donc de se déplacer jusqu’aux pharmacies distribuant

gratuitement du matériel stérile d’injection ou aux Caarud de Lyon, même si cela

reste relativement complexe. A l’inverse, à Givors, l’absence de pharmacie

distribuant gratuitement du matériel stérile d’injection est problématique. En effet,

les distances à parcourir pour accéder aux ressources de RDR (pharmacies

partenaires du programme d’échange de seringues ou Caarud) sont importantes et

constituent un obstacle aux démarches de RDR.

- Les structure de RDR et de soin sont fermées le soir après 19h et le week-end, à

l’exception des trois permanences d’une heure du Bus de RDR, le dimanche soir et

d’un soir par semaine jusqu’à 19h30 au Caarud RuptureS ;

- Les délais d’attente pour une prise en charge en Csapa pour un traitement de

substitution aux opiacés sont relativement longs, allant de deux à trois semaines en

Csapa hospitaliers à trois voire 4 semaines en Csapa associatif (en dehors des

périodes de vacances pendant lesquelles les délais sont encore allongés).

2. Les ressources utilisables pour les

consommateurs d’opiacés en grande précarité

2.1. La maraude sociale

Un dispositif de maraude sociale est assuré toute l’année par l’association ALYNEA et la

Croix-Rouge Française (dispositif renforcé l’hiver). Ce type de dispositif a pour objectif d’aller

à la rencontre des personnes à la rue et de maintenir, voire recréer un lien social et de les

orienter si elles le souhaitent vers une solution d’hébergement et des dispositifs d’aide.

2.2. Les lieux d’accueil de jour

Selon les personnes interviewées, les accueils de jour sont bien repérés et fréquentés par

les consommateurs d’opiacés sans domicile fixe.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

20

Les accueils de jour proposent diverses prestations aux personnes SDF allant de la mise à

l’abri en journée, à l’alimentation, à l’hygiène (mise à disposition de douches et machine à

laver), à l’aide administrative et au soutien dans les démarches de soin et d’insertion.

Neufs accueil de jour sont repérés dans l’agglomération lyonnaise, ils sont situés dans le

centre de Lyon et un est à Villeurbanne (métro Charpennes) :

- La Rencontre situé à Lyon 4ème et L’Accueil Saint-Vincent à Lyon 5ème, portés par

l’association Notre Dame des Sans Abris

- L’accueil de jour de l’association ALIS situé dans le 1er arrondissement de Lyon ;

- L’Orée destiné à un public jeunes, située dans le 2nd arrondissement de Lyon, porté

par la fondation AJD

- Péniche le Balajo, (à proximité de la gare de Perrache) ;

- L’accueil de jour de l’association des Petits frères des Pauvres, situé dans le 2nd

arrondissement de Lyon (à proximité de la gare de Perrache) – public âgé ;

- Le CAO, situé dans le 7ème arrondissement de Lyon, porté par l’association Le Mas

- Point accueil social, situé dans le 3ème arrondissement de Lyon, porté par

l’association de l’hôtel social (LHASo) ;

- La Maison Rodolphe situé dans le 8ème arrondissement de Lyon, porté par

l’association Notre Dame des Sans Abri ;

- Les Amis de la Rue situé à Villeurbanne (métro Charpennes), porté par l’association

du même nom

Notons qu’aucun accueil de jour n’est situé dans le 9ème arrondissement alors même que des

publics SDF dont des consommateurs d’opiacés sont repérés dans le quartier de la gare de

Vaise et du métro Valmy, ce qui fait penser à des professionnels qu’il y a des besoins non

couverts dans ces quartiers.

2.3. Les possibilités d’hygiène et d’alimentation

Les possibilités de douche pour les personnes SDF semblent particulièrement restreintes

dans l’agglomération lyonnaise : une seule structure de « bains-douche publics », portée par

la Ville de Lyon, existe, dans le 7ème arrondissement (Gerland).

Par ailleurs, si des possibilités de douche existent dans les accueils de jour, les 2 Caarud et

au Point hygiène du Centre Gabriel Rosset (porté par l’Association Notre-Dame-des-Sans-

Abri), celles-ci semblent saturées et ne peuvent répondre à l’ensemble des besoins.

En revanche, les possibilités d’alimentation gratuite ou à prix modique destinées aux

personnes en précarité, semblent nombreuses dans l’agglomération lyonnaise et répondent

aux besoins, d’après les professionnels.

2.4. Les ressources d’hébergement

Plusieurs dispositifs d’hébergement sont possibles pour les consommateurs d’opiacés sans

domicile stable.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 21

Les places d’hébergement d’urgence et les Centres d’Hébergement et de Réinsertion

Sociale (CHRS) sont principalement situées à Lyon et Villeurbanne. Aucun CHRS du territoire

n’a de mention spécifique « addictologie» mais ils accueillent de fait, un public en grande

difficulté, très concerné par les problématiques d’addiction.

Dans le territoire, un seul CHRS dit à « haut seuil de Tolérance » est identifié : le CHRS

Carteret (porté par l’association ALYNEA). Dans cet établissement, les consommations

d’opiacés sont possibles dans la partie individuelle (chambre), des outils de RDR sont

disponibles et un accompagnement aux soins d’addictologie est proposé (notamment

présence de l’équipe mobile d’addictologie) ;

Le CHRS APUS, porté par l’association OPPELIA, propose également un hébergement (6

appartements dans Lyon et sa première couronne et un accompagnement médico-social

historiquement pour un public ayant une problématique d’identité de genre et souvent

d’addiction.

Par ailleurs, certains dispositifs médico-sociaux offrent un hébergement et un

accompagnement individualisé sur le plan médical et social pour des personnes à la rue

dont la pathologie et l’état de santé somatique ou psychique ne nécessite pas une

hospitalisation mais sont incompatibles avec la vie à la rue : lits d’accueil médicalisé (LAM),

Lits Halte Soins Santé (LHSS) ou encore les Appartements de coordination thérapeutique

(ACT). Dans l’agglomération lyonnaise trois associations portent ce type de dispositif :

- L’association ORSAC dispose de 20 Lits d’Accueil Médicalisé et de 30 Lits Halte Soins

Santé et de 22 places à la Villa Hestia et de 22 places d’ACT (ACT Villeurbanne) ;

- L’association Basiliade dispose de 16 places d’ACT (ACT Basiliade) ;

- L’association ALYNEA dispose de 29 places d’ACT (ACT Entr’aids).

Enfin, le Csapa du griffon dispose de 6 appartements thérapeutiques relais, pour des

patients en phase de stabilisation et de consolidation des soins addictologiques.

2.5. Les ressources de soins somatiques et psychiatriques destinées aux publics

précaires

Plusieurs dispositifs de santé destinés aux publics précaires existent dans l’agglomération

lyonnaise :

- Le Bus, le Centre d'accueil, de soins et d'orientation (CASO) et la mission squatt et

bidonvilles de l’association Médecins du Monde. Le bus de Médecins du Monde est

présent les mardis et jeudis en soirée (19h-22h) Place Carnot dans le 2ème

arrondissement et les dimanches en début de soirée (17h-22h) Place Jean-Macé

dans le 7ème arrondissement. Le CASO est situé dans le 1er arrondissement de Lyon.

La mission squatts et bidonvilles est une action mobile dans l’agglomération

Lyonnaise. Ces dispositifs proposent une prise en charge médicale (soin, prévention,

dépistages), sociale et juridique aux personnes ;

- Les Permanences d’Accès aux Soins de Santé (PASS). Les PASS ont pour mission de

faciliter l’accès aux soins des personnes précaires, sans couverture sociale, et de les

accompagner dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits.

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Observatoire Régional de la Santé AuvergneAnalyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande

22

Certaines PASS disposent de con

PASS de l’Hôpital Edouard H

Joseph (dispositif mobile présent dans certains CHRS

avec des partenaires comme le Samu So

Forum Réfugiés et prochainement un lieu fixe de consultation

psychiatrique du Centre Hospitalier Spécialisé Le Vinatier. On repère é

PASS dentaire de l’hôpital Edouard Herriot

- L’Equipe Mobile Précarité Psychiatrie Interface SDF porté par l’Hôpital Saint

de-Dieu se déplace dans les accueils de jours, les Caarud, les CHRS, centre

d’hébergement d’urgence et dans la rue (en lien avec les équipes de maraude

sociale) pour rencontrer un publ

proposer une évaluation et

Carte des accueils de jour et bain1/06/2018

Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

Certaines PASS disposent de consultations médicales gratuites, c’est le cas de la

PASS de l’Hôpital Edouard Herriot, de la PASS mobile de l’hôpital Saint

dispositif mobile présent dans certains CHRS et dans la rue

avec des partenaires comme le Samu Social, Interface SDF, Médecins du Monde,

Forum Réfugiés et prochainement un lieu fixe de consultation

psychiatrique du Centre Hospitalier Spécialisé Le Vinatier. On repère é

ôpital Edouard Herriot ; ile Précarité Psychiatrie Interface SDF porté par l’Hôpital Saint

se déplace dans les accueils de jours, les Caarud, les CHRS, centre

d’hébergement d’urgence et dans la rue (en lien avec les équipes de maraude

sociale) pour rencontrer un public sans prise en charge ou en rupture de soins et

proposer une évaluation et une prise en charge psychique ;

Carte des accueils de jour et bain-douches publics – agglomération Lyonnaise au

précarité de l’agglomération lyonnaise

sultations médicales gratuites, c’est le cas de la

ôpital Saint-Luc-Saint-

et dans la rue en collaboration

, Médecins du Monde,

Forum Réfugiés et prochainement un lieu fixe de consultation) et de la PASS

psychiatrique du Centre Hospitalier Spécialisé Le Vinatier. On repère également la

ile Précarité Psychiatrie Interface SDF porté par l’Hôpital Saint-Jean-

se déplace dans les accueils de jours, les Caarud, les CHRS, centre

d’hébergement d’urgence et dans la rue (en lien avec les équipes de maraude

ic sans prise en charge ou en rupture de soins et

agglomération Lyonnaise au

� Les accueils de

jour, et les Caarud

fréquentés par les

publics SDF

consommateurs

d’opiacés

� Pas d’accueil de

jour dans le 9ème

arrondissement

mais présence

repérée de publics

SDF

consommateurs

d’opiacés dans le

quartier de Vaise

� Bains-douche

publics, une seule

structure : des

difficultés d’accès à

l’hygiène pour

publics SDF dans

l’agglomération

lyonnaise

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 23

3. Les consommateurs d’opiacés en grande

précarité repérés dans l’agglomération lyonnaise

3.1. Différents publics repérés

Les consommateurs d’opiacés en grande précarité (absence de logement autonome) de

l’agglomération lyonnaise repérés par les acteurs interviewés peuvent être décrits de

manière synthétique de la manière suivante :

- Une majorité d’hommes mais aussi des femmes en couple ;

- Des personnes sans domicile fixe, vivant dans la rue, en camion, en squatt;

- Des publics à distinguer entre un public jeune (18-30 ans) et un public plus âgés (30-

50 ans), mais également entre un public « routard » de passage dans l’agglomération

lyonnaise et un public installés durablement dans la métropole de Lyon;

- Des publics spécifiques : les migrants ressortissants d’Europe de l’Est

- En journée, une présence repérée essentiellement à Lyon et Villeurbanne : à

proximité des gares de Perrache, Part-Dieu et Vaise, des accueils de jour, des deux

Caarud, du quartier de la Croix-Rousse (Place de la Croix-Rousse et hôpital de la

Croix-Rousse), de la Presqu’île (2ème arrondissement) et Charpennes à Villeurbanne.

- Des publics mobiles dans Lyon, même si certains ne se déplacent qu’à pied.

3.2. Problématiques transversales repérées

Les entretiens menés permettent de mettre en lumière des problématiques transversales

aux consommateurs d’opiacés vulnérables dans l’agglomération lyonnaise qui recoupent les

données de la littérature4 pour la situation française :

- Des publics polyconsommateurs : les publics consommateurs d’opiacés (dont

Skenan) sont également consommateurs d’alcool (souvent le premier produit

consommé pour un public âge de 30 à 50 ans), de tabac, de cannabis, de stimulants

(cocaïne, amphétamines), de traitements de substitution (principalement

Buprénorphine Haut Dosage) et autres médicaments détournés de leur usage (dont

Benzodiazépines) ;

- Des publics qui bénéficient d’un traitement de substitution aux opiacés,

principalement par Buprénorphine Haut Dosage (BHD), prescrit par un médecin

généraliste mais également par un approvisionnement de rue répandu et régulier.

Pour la BHD, les mésusages (surconsommation et injection) sont fréquemment

repérés. Concernant la méthadone, peu de personnes dans ces publics très précaires

semblent en bénéficier, en raison notamment des difficultés de ces publics à

respecter le protocole d’initiation ;

- Une problématique d’affection psychiatrique marquée : une partie de ces publics est

concernées par des troubles psychiatriques mais ne bénéficie pas d’une prise en

charge ou de manière très irrégulière.

4 ] Cadet-Taïrou A. et Dambélé S., « Héroïne et autres opiacés » dans OFDT, Drogues et addictions, données essentielles. Saint-Denis, OFDT, 2013, pp. 242-250.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

24

3.3. Caractéristiques, pratiques et parcours de soin des publics repérés

• Les jeunes

Lieux de vie et mobilité

Pratiques de consommation

Pratiques de RDR

Parcours de soins

Jeunes hommes SDF 18-30 ans, en rupture familiale, jeunes souvent issus de l’aide sociale à l’enfance

Présence

« durable »

dans

l’agglomération

lyonnaise

Hébergement

Squatt

Présence

(en journée) :

Croix-Rousse,

presqu’île (Place

Bellecour, rue de

la République),

Accueils de jour

Mobilité : mobiles,

à pied

Polyconsommations

alcool, cannabis,

stimulants (MDMA,

Cocaïne…),opiacés (dont

Skenan) et

benzodiazépines.

Approvisionnement BHD

médecin généraliste et

rue

Mesusage BHD ++

(injection, consommation

++).

Certains injecteurs actifs

Des pratiques d’injection

à risque repérées :

injection dans la veine

fémorale, aiguilles

cassées… faibles

conditions d’hygiène et

partage de matériel

Certains

fréquentent

les CAARUD

Affirment

utiliser du

matériel

stérile mais

en squatt :

mauvaises

conditions

d’hygiène,

partage de

matériel

Pas de demande de suivi

social

Des demandes de soin

addictologiques

« urgentes»

Majorité bénéficient d’un

TSO BHD via l’ordonnance

d’un médecin généraliste

Des cas de

polyprescriptions repérés

(traffic)

Routards : pas de suivi

régulier de leur problème

d’addiction, ruptures

fréquentes (consultent

auprès d’un médecin

généraliste une fois et ne

reviennent pas)

Une partie est concernée

par des troubles

psychiatriques, mais pas

de PEC psychiatrique ou

irrégulière

Jeunes hommes routards 18-30 ans De passage

dans

l’agglomération

lyonnaise (dont

des saisonniers)

Hébergement

Squatt, camion

Mobilité : mobiles,

à pied

Jeunes femmes (de 16 à 27 ans) en couple dans une communauté masculine (routards ou

« fixes »)

Hébergement

Squatt ou rue

Mobilité : mobiles,

à pied

Présence en

journée idem

jeunes hommes

Idem jeunes hommes et

des spécificités

Approvisionnement rue

� risques accru pour les

femmes (agression

sexuelle)

Dépendance au geste

d’injection ++ (en lien

avec traumatisme,

violences)

Certaines

fréquentent

les CAARUD

et notamment

l’ « espace

femmes » du

Caarud pause

Diabolo

(plages

horaires

réservées aux

femmes)

Idem jeunes hommes et

des spécificités

Prises de risques sexuels

++ en lien avec la

prostitution

(ponctuellement ou sur

une courte période par

internet, dans des

appartements)

Victimes de violences

Et d’autres publics jeunes repérés : quelques jeunes SDF de 20-25 ans qui travaillent et des jeunes ressortissants d’Europe de l’Est

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 25

• Les adultes

Lieux de vie et mobilité

Pratiques de consommation

Pratiques de RDR

Parcours de soins

Hommes 30-50 ans SDF isolés, desocialisés

Long

parcours

de vie à la

rue

Hébergement :

Rue

Présence en

journée (en groupe

) : Presqu’île, Lyon

1er, Gares de la

Part-Dieu,

Perrache et Vaise

et à proximité des

CAARUD

Mobilité : mobiles,

déplacements à

pied

Polyconsommations

anciennes, L’alcool est le

premier produit. Autres

produits consommés : , cannabis, opiacés (dont

Skenan), benzodiazépines,

BHD et ponctuellement

stimulants (MDMA, cocaïne)

Approvisionnement BHD

médecin généraliste et rue

Mesusages BHD ++ (injection, sur consommation)

Injection dans la rue (conditions d’hygiène

mauvaises).

Connaissance

possibilité

RDR

Approvisionne

ment en

matériel

stérile en

pharmacie et

CAARUD

Une majorité bénéficie d’un

TSO de BHD via l’ordonnance

d’un médecin généraliste. Le

médecin généraliste a le

sentiment de prescrire la dose

maximum et qu’elle ne baisse

pas .

MTD : difficultés respecter

protocole initiation

Des cas de polyprescriptions

(traffic)

Troubles et affections

psychiatriques très présents,

mais pas de prise en charge ou

de manière très irrégulière

Hommes 35-50 ans isolés originaires Europe de l’Est, notamment géorgiens

Hébergement

Rue, squatt

(quelques uns

hébergés en

appartements de

coordination

thérapeutiques)

Périodes

d’incarcération

Mobilité : mobiles

Injecteurs actifs (forte

addiction psychologique à

l’acte d’injection)

Dans leur pays d’origine

accès à de l’héroïne de très

bonne qualité.

En France, injection BHD et

méthadone

Consommation ponctuelle de

cocaïne (si un peu d’argent,

contexte festif)

Pays d’origine

pas de RDR,

ici possibilité

kits injection

gratuits

appréciés.

Approvisionne

ment en

matériel

d’injection

stérile dans

les CAARUD (présence

traducteurs)

Prévalence VIH, VHC ++�

arrivés en France pour accéder

aux soins.

Un Public perçu comme

autonome dans sa démarche

de soin: informations

structures addictologie via leur

réseau personnel et CAARUD

TSO : BHD et MTD. Ce public

arrive à respecter le protocole

d’initiation de la MTD, malgré la

barrière de la langue

Exemple de parcours : CAARUD

Diabolo, orientation vers le

CSAPA de l’hôpital Edouard

Herriot. En attente ouverture

droits de santé et du RDV en

CSAPA, approvisionnement à la

rue. Ensuite relais vers MG

russophone (si droits santé

ouverts).

Et quelques hommes 30-50 ans isolés, SDF, originaire Europe de l’Est (Pologne), forte vulnérabilité : pas de pratique de RDR, pas de demande d’aide ou de suivi addictologique, pas d’accès aux soins (droits de santé non ouverts, barrière

de la langue), mortalité ++. Public repéré par la maraude sociale de la Croix-Rouge Gare de Perrache et de Vaise, Place Foch et Charpennes (Villeurbanne).

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

26

Lieux de vie et mobilité

Pratiques de consommation Pratiques de

RDR

Parcours de

soins

Quelques personnes schizophrènes, isolées et seules

Hébergement

Alternance

périodes à la

rue,

incarcération,

hospitalisation

en psychiatrie

Mobilité

Mobiles,

errance dans

la ville

Polyconsommations

Des consommations

repérées d’héroïne, de BHD

et benzodiazépine.

Pas d’informations Ce publics bénéficie d’un TSO

Approvisionnement

via MG et ou dans la

rue

Difficulté de prise en

charge en en CSAPA

en lien avec difficultés

de comportement

Prise en charge

psychiatrique

irrégulière, certaines

personnes prises en

charge par l’EMPP

Interface SDF

Femmes de 30-40 ans isolées relativement insérées (

certaines

travaillent),

avec ou sans

enfants

Isolement

social ++.

Logement

stable (Lyon et agglomération)

Mobilité

Public mobile

mais pas

véhiculé

Arrêt ou gestion de leur

consommation

(consommation

conscientisée, plus

maîtrisée) : consomment

encore (quotidien ou

ponctuel) ou pas.

Alcool moins présent

Connaissances des

dispositifs de RDR et

consommations

programmées (et prise

de conscience du soin

de soi) : bonne gestion

approvisionnement en

matériel stérile et

container.

Des difficultés

approvisionnement en

matériel de RDR pour

celles qui résident hors

de Lyon (pharmacie, se déplacent au CAARUD

ou envoi postal)

Bénéficient d’un suivi

addictologique par un

médecin généraliste

ou Csapa

Méthadone :

parviennent à

respecter le protocole

d’initiation du

traitement

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 27

4. Points forts et freins repérés à la RDR et à un

suivi addictologique des consommateurs

d’opiacés en grande précarité

4.1. Points forts

Les acteurs interviewés soulignent les éléments facilitants l’accès des consommateurs

d’opiacés en grande précarité à la réduction des risques et aux soins addictologiques dans

l’agglomération lyonnaise.

• L’abaissement du seuil d’exigence dans les CSAPA délivrant la méthadone et ouverture aux démarches de RDR

Les professionnels interviewés considèrent que les CSAPA initiant en ambulatoire les

traitements de substitution aux opiacés par méthadone (CSAPA hospitaliers de l’hôpital de la

Croix-Rousse et de l’hôpital Edouard Herriot et le Csapa Griffon) ont aujourd’hui une

approche de réduction des risques et une souplesse qui facilite l’accueil et la prise en charge

de publics en grande précarité. Ces services prennent en compte et tolèrent le maintien des

consommations. Ils adaptent, autant que possible, le soin au parcours de vie des personnes

et acceptent dans le service les personnes alcoolisées.

• La prise en compte des polyconsommations dans les CSAPA délivrant la méthadone

Les acteurs interviewés constatent que les prises en charge proposés dans ces centres

(Csapa hospitaliers de l’Hôpital de la Croix-Rousse et de l’Hôpital Edouard Herriot et CSAPA

du Griffon) sont bien adaptées aux polyconsommateurs (pour rappel l’alcool est un produit

très présent dans les consommations de substances psychoactives des consommateurs

d’opiacés SDF).

• Les démarches d’« aller vers » Les démarches qui permettent de faciliter le premier contact et le suivi de ces personnes

dans un cadre souple et non institutionnel sont facilitantes. En effet, elles permettent de

toucher un public ne se rendant pas dans des lieux fixes de RDR et de soin (voire qui les

évitent), ayant une demande ambivalente vis-à-vis du soin, de dédramatiser le soin et de

faciliter les suivis (éviter les ruptures). Les interventions de l’équipe mobile d’addictologie

dans certains CHRS sont saluées et mériteraient d’être encore développées selon les

acteurs interviewés car elles facilitent le 1er contact avec une équipe de soin addictologique

et les suivis. De même, le travail de rue des Caarud permet de toucher un public qui ne

fréquente pas les structures de RDR et de soin addictologique.

• Les possibilités d’aide pour ouvrir ou réactualiser des droits en santé (couverture sociale)

L’ouverture de droits en santé, complexe pour les personnes étrangères, ou la non

actualisation des droits à la couverture maladie universelle (CMUc) ne permettent pas aux

consommateurs d’opiacés précaires, en l’absence de remboursement, de consulter auprès

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

28

d’un médecin généraliste et d’acheter en pharmacie un traitement de substitution. Les

possibilités d’aide administrative, en particulier dans les associations caritatives, les

accueils de jour, les Caarud et les permanences d’accès aux soins de santé sont facilitantes

de ce point de vue.

• Les temps d’interprétariat Les possibilités d’interprétariat dans les Caarud et les Csapa permettent d’accueillir un

public étranger et d’améliorer leur prise en charge. Mais ces possibilités restent couteuses

et limitées (sur rendez-vous en général, sauf dans les Caarud qui ont dans leurs équipes du

personnel bilingue ou trilingue permanent).

• Les médecins généralistes qui acceptent de prescrire des traitements de substitution aux opiacés

Les médecins généralistes qui acceptent de prescrire et de renouveler les traitements de

substitution offrent une possibilité de suivi souple (grandes plages d’ouverture et

ordonnance pour un mois) qui répond à la demande et aux besoins d’une partie des

consommateurs. Dans l’agglomération lyonnaise, une quinzaine de médecins généralistes

ayant une grande expérience en matière d’addictologie sont repérés : ils ont une file active

conséquente de patients en traitement de substitution qu’ils accompagnent sur le plan

addictologique au-delà du simple renouvellement de leur traitement.

• La prise en compte des publics féminins et de leurs problématiques spécifiques La prise en compte des publics féminins et de leurs problématiques spécifiques, comme la

violence, la prostitution et la question du consentement, permet de toucher et d’améliorer

l’accompagnement des femmes consommatrices d’opiacés. Certaines structures ont

développé des dispositifs spécifiques. Le Caarud Diabolo propose, par exemple, un espace

sécurisant réservé aux femmes, il s’agit d’un accueil hebdomadaire avec une plage horaire

réservée aux femmes et éventuellement à leurs enfants en bas-âge, qui permet de toucher

un plus grand nombre de femmes consommatrices d’opiacé en grande précarité. De même,

la consultation addiction et grossesse au CSAPA de la Croix-rousse permet de mieux

prendre en compte la question des addictions chez les femmes enceintes.

• Enfin, l’accès à une solution de logement stable permet une disponibilité psychologique des personnes pour la réduction des risques, le soin et une meilleure

anticipation des consommations et gestion des traitements de substitution. Dans ce

domaine, des dispositifs d’hébergement adaptés aux personnes vulnérables ayant une

problématique d’addiction existent dans l’agglomération Lyonnaise (CHRS Carteret, CHRS

Apus, Lits d’Accueil Médicalisés, Lits halte Soins Santé, Appartement de coordination

Thérapeutiques …), néanmoins, les places sont limitées et peinent à couvrir l’ensemble des

besoins.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 29

4.2. Freins

Des freins à la réduction des risques et à un suivi addictologique sont également identifiés.

Ils tiennent à la situation des personnes et à l’offre d’addictologie dans l’agglomération

lyonnaise.

• Les conditions de vie à la rue des consommateurs d’opiacés précaires Les consommateurs d’opiacés vulnérables bénéficient difficilement des solutions

d’hébergement d’urgence, notamment parce que les hommes isolés ne sont pas prioritaires

(par rapport aux femmes, aux familles) dans un contexte de manque de place. Par ailleurs,

une minorité d’entre eux accède aux CHRS, en raison parfois des réticences des structures à

héberger des personnes ayant une addiction aux opiacés mais également d’un cadre jugé

comme trop contraignant par les personnes (horaires à respecter, chambre à occuper, suivi

social, interdiction de consommer).

• La temporalité : plus les personnes sont précaires, plus les difficultés liées à la temporalité des prises en charge sont importantes

Les difficultés de temporalité des consommateurs d’opiacés vulnérables sont un obstacle

important à la mise en place de traitement de substitution aux opiacés par méthadone et

entraîne des ruptures fréquentes de soin et de traitement.

Ainsi, selon les professionnels, ces publics éprouvent des difficultés à respecter le protocole

d’initiation de la méthadone : ils ne se présentent pas quotidiennement dans le service, ce

qui, pour des raisons médicales (risque d’overdose), entraîne de recommencer le protocole

d’initiation au départ (avec une faible dose de méthadone) et favorise le maintien de

consommations parallèles.

Les difficultés de gestion du traitement semblent également fréquentes : la

surconsommation, l’absence d’anticipation (rendez-vous non pris) ou les rendez-vous non

honorés chez le médecin généraliste ou en CSAPA aboutissent à des situations de manque le

week-end, les jours fériés et le recours à des solutions de dépannage auprès de l’entourage

et d’achat dans la rue (et donc au maintien du contact avec les consommateurs de produits

illicites et le trafic de drogue).

• Les difficultés de comportement des personnes en lien avec une problématique psychiatrique

Les difficultés de comportement des personnes, la violence, en lien avec une problématique

psychiatrique, mettent en difficultés les équipes et les usagers des Caarud et Csapa et

peuvent aboutir à l’exclusion des personnes.

• L’accès contraint à la réduction des risques dans l’agglomération lyonnaise Plusieurs difficultés et manques sont repérés en matière de réduction des risques dans

l’agglomération lyonnaise.

- Certaines parties du territoire de l’agglomération lyonnaise, comme Givors,

ne sont pas couvertes en pharmacie distribuant gratuitement du matériel

d’injection stérile. De plus, toutes les pharmacies distribuant gratuitement du

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

30

matériel d’injection stérile sont fermées la nuit, à l’exception de celle de

Vénissieux ;

- Un seul automate de distribution et échange de seringue en état de

fonctionnement dans l’agglomération lyonnaise est situé dans le 3ème

arrondissement. Par ailleurs, le lieu d’implantation d’un autre automate

continue à faire débat;

- Les deux Caarud de l’agglomération lyonnaise sont fermés la nuit et le week-

end, à l’exception du bus de réduction des risques le dimanche soir (mais avec

des créneaux horaires restreints : une heure de permanence dans chacun des

trois arrondissements couverts) ;

- Des besoins de supervision des pratiques d’injection et d’espace sécurisé et

hygiénique d’injection sont repérés et non couverts dans le territoire, en lien

avec des pratiques à risques repérées et les mauvaises conditions d’hygiène

dans la rue et en squatt.

• Les modalités d’accès et de prise en charge en Csapa, encore des besoins de souplesse pour les publics en grande précarité

Les modalités d’accueil et de prise en charge en Csapa sont encore repérées comme

insuffisamment adaptées aux consommateurs d’opiacés les plus vulnérables, au regard de

leurs conditions de vie et de leurs pratiques. Les professionnels repèrent en particulier :

- Les horaires d’ouverture classiques, en journée les jours de semaine, qui n’offrent

pas de possibilité de délivrance de substitution le week-end et jours fériés ;

- Les modalités de prise en charge sur rendez-vous, qui restent difficiles à honorer en

lien avec les difficultés de temporalité des publics vulnérables ;

- Les délais d’attente pour un premier rendez-vous longs, deux à trois semaines en

Csapa hospitalier et un mois en Csapa associatif au moment de l’étude5, qui

engendrent des renoncements, des retards de prises en charge et la poursuite de

l’approvisionnement de rue dans l’attente d’une prise en charge ;

• La volonté de pas entrer dans un suivi régulier, l’évitement des lieux institutionnels, pour certains

Une partie de ce public, en particulier les jeunes et les routards, ne souhaitent pas

« entrer » dans une prise en charge régulière, un suivi social. Ils semblent percevoir les

suivis en Csapa comme contraignants et évitent les institutions et tout ce qui pourrait à leurs

yeux constituer une forme de contrôle social.

De même, les hôpitaux et dans une moindre mesure les Csapa peuvent constituer un frein

symbolique pour des publics très marginaux, qui ne fréquentent que les dispositifs mobiles

proposant un accueil sans rendez-vous et souple (équipes mobiles comme la maraude

sociale, Bus de Médecin du Monde qui proposent un accueil sans rendez-vous, dans un

dispositif mobile).

5 Mai 2018

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lyonnaise 31

Enfin, les difficultés d’acceptation des chiens dans les structures de soin, sont également

repérées comme un frein à l’accès au soin et à une prise en charge régulière.

• Les contraintes spécifiques au traitement par méthadone et l’absence de dispositif spécifique de délivrance facilité de TSO dans l’agglomération lyonnaise

En raison des risques d’overdose, l’initiation d’un traitement par méthadone nécessite une

surveillance particulière et des rendez-vous quotidiens pour adapter la posologie. A ce jour,

cette initiation est uniquement possible en Csapa et à l’hôpital.

Dans l’agglomération lyonnaise, il n’existe pas de dispositif spécifique proposant un

protocole souple et un accès facilité à la méthadone permettant d’initier rapidement le

traitement et de proposer un dosage minimum de méthadone aux personnes, même si elles

ne se présentent pas quotidiennement.

De ce fait et en raison des difficultés de temporalité, les consommateurs d’opiacés les plus

vulnérables ne parviennent pas à respecter le protocole d’initiation (rendez-vous quotidiens)

et accèdent difficilement aux traitements de substitution par méthadone.

4.3. Les besoins et les pistes d’actions évoqués par les acteurs interviewés

Les besoins et pistes d’actions évoqués par les acteurs interviewés pour favoriser l’accès à

la réduction des risques et le suivi en addictologie des consommateurs d’opiacés

vulnérables s’articulent autour de l’amélioration des conditions de vie des personnes et

aussi de l’évolution de l’offre addictologie du territoire.

• L’amélioration des conditions de vie pour faciliter la stabilisation et l’entrée dans une prise en charge addictologique

Il s’agit de développer des solutions d’hébergement et de logement adaptées aux

consommateurs d’opiacés SDF, car les conditions de vie indignes ne permettent pas

aux personnes, tant sur le plan matériel que psychologique, d’entrer dans une

démarche de réduction des risques et de soin.

▫ Solutions de logement

o Augmenter le nombre de places en CHRS « Haut seuil de tolérance »

c'est-à-dire tolérant les consommations de produits illicites, mettant à

disposition des outils de réduction des risques et proposant un

accompagnement sur les questions d’addictions ;

o Augmenter les solutions de logements à bas seuil d’exigence, sans

condition, du type démarches « Un chez soi d’abord » ;

o Développer encore des solutions de logement avec un

accompagnement social renforcé pour des personnes dont l’addiction

est stabilisée mais qui sont en situation de grande fragilité sociale.

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▫ Hygiène : Renforcer les possibilités de prendre une douche dans l’agglomération lyonnaise (Les possibilité d’hygiène dans les accueils de jour

sont saturés et une seule structure de bains douches publics existe dans

l’agglomération à Gerland).

• Addictologie : renforcer la réduction des risques et faciliter l’accès aux soins des publics en grande précarité

▫ Renforcer la communication orale, écrite, internet sur possibilités réduction des risques et de soins addictologiques. Ces possibilités sont parfois

difficiles à identifier et les informations disponibles sur internet ne pas

toujours actualisées.

▫ Réduction des risques

o Renforcer les possibilités de se fournir en matériel stérile gratuit la

nuit, le week-end, selon des modalités diversifiées :

� augmenter le nombre de pharmacies PES, notamment dans les

arrondissements de Lyon et les communes non couvertes de

l’agglomération lyonnaise, comme le 8ème arrondissement,

Bron et Givors ;

� augmenter le nombre d’automate de distribution de matériel

stérile et améliorer leur maintenance.

o CAARUD : développer des permanences d’accueil de CAARUD le

week-end et en soirée, un manque identifié dans le territoire.

o Développer encore le conseil et la supervision des pratiques

d’injection, à l’image des ateliers autour de la technique d’injection, de

l’accompagnement à l’injection à domicile (dont participation au projet

Outsider) mis en place par les Caarud et développer un espace de

consommation supervisé, en lien avec les faibles conditions d’hygiène

de consommation à la rue et en squatt et les pratiques d’injection à

risques repérées.

o Développer encore les démarches de réduction des risques et des

dommages liés à l’alcool dans les Caarud et les accueils de jour afin

d’accompagner et conseiller les polyconsommateurs vers une

consommation à moindre risque, un meilleur contrôle de leur

consommation. Pour rappel, les consommateurs d’opiacés grand

précaires sont souvent des polyconsommateurs et l’alcool est pour

certains, en particulier les adultes SDF de 30 à 50 ans, le produit

majoritairement consommé.

▫ Soins

o Renforcer la présence d’équipes mobiles d’addictologie dans les CHRS

et les Accueil de Jour, en prenant en compte l’enjeu de discrétion sur

les Accueil de Jour où l’accueil est collectif.

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lyonnaise 33

o Développer un dispositif type « Bus méthadone » dans l’agglomération

lyonnaise, passerelle entre la réduction des risques et le soin : mettre

en place des protocoles plus souples et rapide de délivrance de la

méthadone, développer une possibilité de délivrance de traitement de

substitution aux opiacés le week-end pour dépannage TSO (cette piste

d’action est étudiée comme une hypothèse dans la partie suivante de

ce rapport d’étude).

▫ Femmes : Il s’agit de développer encore un accueil et accompagnement spécifique pour les femmes, soit un accompagnement assuré par des

professionnels formés à la prise en charge des femmes et des modalités

d’accueil spécifiques (plages horaires ou espace réservées aux femmes), afin

d’offrir un espace sécurisant. Certains acteurs ont même évoqué la possibilité

de développer un dispositif CAARUD-CSAPA réservé aux femmes.

De même, la prise en compte de l’enjeu pour les femmes de ne pas être

repérées comme consommatrices doit être pris en compte pour proposer un

lieu d’accueil discret ou des déplacements à domicile.

Enfin, il semble pertinent de renforcer l’articulation des structures

d’addictologie avec des dispositifs accueillant un public féminin comme le

Planning familial, ou le Centre d'Information sur les Droits des Femmes et

des Familles (CIDFF) pour favoriser l’accès aux soins addictologiques des

femmes fréquentant ces structures et réciproquement favoriser l’accès des

femmes ayant une problématiques d’addiction aux possibilité de suivi de

santé et d’accompagnement dans ces structures.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

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5. Hypothèse « Csapa mobile »

5.1. Avantages et limites perçues par les acteurs interviewés

Avantages Limites, points de vigilance

Un dispositif moins « institutionnel », une barrière symbolique faible, plus accessible et qui

apparaît « sans risque de contrôle social ». Une

partie des publics marginalisés évitent les

institutions et les professionnels pouvant, à leurs

yeux, constituer une forme de contrôle social.

Dispositif mobile : une proximité géographique facilitante pour l’initiation et la délivrance

quotidienne de traitements de substitution, en

particulier la méthadone.

Si inclusion rapide et protocole plus souple Si le dispositif reçoit rapidement les personnes

et développe des possibilités de « doses

dépannage » (dose minimum pour des personnes

suivies par des Csapa ou médecins généralistes),

alors il permettra :

• De favoriser l’accès à la méthadone de

publics qui n’en bénéficient pas et pour

lesquels on constate des mésusages et le

maintien consommations parallèles avec

la buprénorphine (soit une possibilité

d’alternative thérapeutique) ;

• D’éviter l’approvisionnement dans la rue

ou auprès de l’entourage en cas de

situation de manque (éloignement de la

personne des consommateurs d’opiacés

et du trafic, risques liés à la qualité du

produit acheté) ;

• De faciliter l’attente d’une prise en

charge en Csapa (deux semaines à un

mois de délais d’attente pour un premier

rendez-vous), en proposant un accès à un

traitement de substitution et éviter

l’approvisionnement de rue.

Délivrance quotidienne de traitement de substitution : la nécessite de se rendre quotidiennement dans le bus,

est difficile pour les usagers et ne

répond pas aux attentes d’une partie

des personnes en termes de

souplesse de prescription et de

délivrance du traitement, même si

celles-ci ont des difficultés à gérer

leur traitement de substitution.

Difficulté de ce type de dispositif à toucher les femmes, car la rue est synonyme de risque (agressions) et de

stigmatisation accrue pour les

femmes. Ainsi, l’équipe du Bus de

Médecins du Monde, constate que le

dispositif est peu fréquenté par les

femmes.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération

lyonnaise 35

5.2. Csapa Mobile, les modalités souhaitées par les acteurs interviewés

Les professionnels interviewés se sont exprimés autour de l’offre et des modalités d’accueil

qu’il serait souhaitable de proposer dans le cadre d’un Csapa mobile, dans l’hypothèse où un

tel dispositif se mettrait en place dans l’agglomération Lyonnaise.

• Une offre diversifiée : de la réduction des risques à la prise en charge des polyaddictions Le dispositif envisagé par ces acteurs, est une réponse possible aux manques

identifiés dans le territoire en matière d’addictologie.

o Travail de rue (démarches d’ « aller vers ») : intérêt de développer un travail

de rue autour du bus mais également dans les squatts pour un public éloigné

des démarches de RDR et de soin ;

o Travail de réduction des risques autour de l’alcool, du cannabis, des autres

produits illicites et des médicaments détournés de leur usage pour ce public

polyconsommateur : proposer un accueil, des conseils et mettre à disposition

du matériel de réduction des risques

o Soins : proposer une prise en charge des polyaddictions (alcool, cannabis,

produits illicites) et dispenser des traitements de substitution aux opiacés,

méthadone et buprénorphine

o Protocole allégé d’initiation et délivrance de la méthadone : mettre en œuvre

un protocole souple, simple et rapide d’initiation à la méthadone et une

possibilité de « dépannage » pour les TSO, dans une optique de faciliter

l’accès aux soins et de réduction des risques (évitement de

l’approvisionnement à la rue en situation de manque ou en attendant une

prise en charge en Csapa)

• Une articulation avec les acteurs sanitaires et médico-sociaux du territoire Au-delà des liens avec les structures d’addictologie de l’agglomération lyonnaise, les

professionnels soulignent la pertinence de développer plus particulièrement des

articulations entre le Csapa mobile et les acteurs suivants :

o les médecins généralistes : l’articulation avec les médecins généralistes

ayant des patients en situation de vulnérabilité et ayant une problématique

d’addiction pourrait permettre aux médecins d’orienter rapidement un patient

pour l’initiation d’un traitement de méthadone et inversement le médecin

généraliste pourrait prendre le relais d’un suivi en Csapa mobile pour un

patient « stabilisé » mais ne souhaitant pas bénéficier d’un suivi

pluridisciplinaire en Csapa classique ;

o la fondation AJD : la fondation AJD dispose d’un camping car aménagé pour

des soins infirmiers et de l’expérience « d’entrée dans les squatts ». En effet,

dans le cadre de la mission bus 69 (une action de prévention santé pour les

enfants de 0 à 3 ans) des professionnels de la PMI, médecins du Monde,

fondation AJD, se rendaient quotidiennement l’été dans les squatts et

bidonvilles de l’agglomération Lyonnaise. Aujourd’hui cette action se poursuit

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dans un lieu fixe et le camping-car qui n’est plus utilisé pourrait

éventuellement servir au Csapa mobile ;

o Liens avec l’Equipe Mobile Précarité Psychiatrie Interface SDF : une partie

des consommateurs d’opiacés très vulnérables sont concernés par des

troubles psychiatriques et ne bénéficient pas d’une prise en charge en santé

mentale. De fait, l’équipe d’interface SDF rencontre peu de consommateurs

d’opiacés. L’articulation entre ces deux dispositifs pourrait faciliter l’accès

aux soins psychiques de ces personnes ;

o Liens avec les Caarud et les accueils de jour, des structures fréquentées par

les consommateurs d’opiacés vulnérables, afin de communiquer sur le

dispositif de Csapa mobile et orienter vers celui-ci.

• Des possibilités de temps d’interprétariat. Il s’agit de disposer de temps d’interprétariat afin de favoriser un accueil et une prise en charge de qualité pour des

publics ne maîtrisant pas la langue française.

• Des plages horaires d’ouverture 7j/7, voire en soirée Les professionnels interviewés souhaitent unanimement que le Csapa mobile soit

ouvert tous les jours de la semaine y compris le week-end. Selon eux, ceci

permettrait de délivrer quotidiennement des traitements de substitution à des

publics très vulnérables, mais également de constituer un relais lorsque les

structures d’addictologie et les cabinets de médecine générale sont fermés (et une

réponse aux situations de manque pour éviter l’approvisionnement à la rue).

Dans la même idée, certains acteurs interviewés ont également souligné l’intérêt de

proposer des permanences en soirée.

• Des lieux de permanences possibles Plusieurs lieux de possibles permanences sont identifiés par les acteurs, à savoir :

o à proximité des lieux de présence des publics consommateurs sans domicile

fixe pour aller vers ces publics et faciliter l’accès géographique au dispositif

(Cf. nécessité de se rendre quotidiennement au dispositif pour la délivrance

des traitements de substitution).

- les gares de Perrache, Part-Dieu et Vaise

- Autour des Caarud (Lyon1, Lyon 3)

- Lyon 1er : présence de nombreux squatts et départ du CSAPA Griffon

- Lyon 4 : Place de la Croix-Rousse

- Lyon 7 : Place du Pont, avenue Jean Jaurès entre Saxe-Gambetta et

Jean Macé

- Presqu’île : Bellecour

- Villeurbanne et Lyon 8 : « de la consommation et peu d’offre

addictologie » (mais depuis le 1er juin 2018 le Csapa Griffon est

implanté à Villeurbanne dans le quartier de Charpennes).

o à proximité des hôpitaux, car se sont des lieux discrets, bien repérés dans

l’agglomération lyonnaise et vécus comme « sécurisant » par les femmes.

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lyonnaise 37

Le choix du lieu d’implantation doit ainsi prendre en compte plusieurs paramètres, à savoir :

- la facilité d’accès géographique : les acteurs interviewés ont souligné l’importance

d’effectuer des permanences dans des quartiers bien desservis en transports en

commun (à proximité d’un métro);

- la non stigmatisation : il s’agit de choisir un quartier suffisamment fréquenté mais

une rue discrète pour profiter d’un certain anonymat, par opposition à d’autres

quartiers où le contrôle social et le risque de repérage des consommateurs d’opiacés

seraient forts ;

- la sécurité pour les femmes.

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Observatoire Régional de la Santé Auvergne-Rhône-Alpes | 2017 Analyse des besoins des consommateurs d’opiacés en grande précarité de l’agglomération lyonnaise

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6. Synthèse et recommandations

6.1. Un constat majeur : le besoin de souplesse dans la prise en charge

Favoriser l’accès des publics consommateurs d’opiacés les plus précaires de

l’agglomération lyonnaise à une prise en charge en addictologie ne semble pas relié à un

problème d’accès géographique, car ces publics sont mobiles. L’enjeu concerne plutôt les

des délais de prise en charge, la souplesse du protocole de soin, les plages d’ouverture et le

besoin d’articulation avec les médecins généralistes (acceptant de prescrire des traitements

de substitution aux opiacés et de prendre le relais des Csapa pour des patients stabilisés) et

avec les pharmaciens (acceptant de distribuer gratuitement du matériel d’injection stérile).

Les consommateurs d’opiacés en grande précarité n’ont pas forcément besoin de dispositifs

« à la porte » mais ont des besoins de souplesse pour s’impliquer dans la réduction des

risques et les soins : ouverture sept jours sur sept, protocole d’initiation TSO notamment

méthadone rapide et souple, possibilités de « dose de dépannage » pour des personnes

suivies par des Csapa ou médecins généralistes.

L’aspect mobile du dispositif, à savoir un bus, peut cependant être facilitant pour des publics

ayant un mode de vie marginal. En effet, un bus apparaît souvent comme moins

« institutionnel » et ne présentant pas de risque de contrôle social.

6.2. Zones non couvertes dans l’agglomération : des connaissances à affiner à

Vaise et à Givors

L’analyse de la couverture géographique des ressources ne permet pas de repérer de

carence dans l’agglomération lyonnaise, à l’exception de deux zones où il conviendrait

d’affiner l’analyse :

- Quartier de Vaise : des publics consommateurs d’opiacés sont repérés dans le

quartier de Vaise et de Valmy où aucun dispositif d’addictologie n’est présent, à

l’exception du Bus du Caarud Ruptures (Oppelia), une heure, le dimanche et aucun

accueil de jour n’est présent. Et ce, alors que la gare de Vaise est un nœud modal et

une plateforme d’échange importants avec l’ouest lyonnais et le nord-ouest du

Rhône, où d’autres études ont montré qu’il y avait des consommateurs et des besoins

pas toujours couverts ;

- Givors : des ressources de soins addictologiques sont présentes à Givors (ELSA du

Centre hospitalier de Givors et CSAPA ANPAA), mais aucune ressource de réduction

des risques n’y est accessible (pas de pharmacie distribuant gratuitement du

matériel d’injection stérile, pas de Caarud). Par ailleurs, la situation géographique

spécifique de Givors dans l’agglomération lyonnaise (discontinuité géographique) et

les distances soulèvent la question des besoins de RDR qui seraient insuffisamment

couverts pour la population du bassin givordin.

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lyonnaise 39

6.3. Les recommandations pour un dispositif mobile d’addictologie dans

l’agglomération lyonnaise

Au regard des constats faits par les acteurs interviewés en matière d’addictologie sur le

territoire et dans l’hypothèse de la mise en place d’un Csapa mobile dans l’agglomération

lyonnaises, plusieurs recommandations se dessinent et s’articulent entre-elles pour que ce

dispositif mobile réponde aux besoins non couverts et apporte une plus-value forte dans la

prise en charge des publics consommateurs d’opiacés en grande précarité, à savoir :

- Souplesse des prises en charge et « étiquetage » non institutionnel de cette prise en

charge :

o Prise en charge addiction : proposer un protocole rapide et souple pour

l’initiation et la délivrance de méthadone et de buprénorphine (avec la

possibilité de « dose de dépannages » pour des publics suivis en Csapa et par

des médecins généralistes) et assurer la prise en charge des polyaddictions ;

o Plages de permanences : assurer une ouverture du dispositif les week-ends

et éventuellement en soirée.

o Le dispositif mobile, en camion, la présence dans la rue, l’accueil sans

rendez-vous, peuvent favoriser l’accès de personnes en situation de

marginalité aux soins addictologiques qui fuient actuellement tout « risque de

contrôle social », de contraintes et d’insertion dans une norme.

- Activité de réduction des risques : proposer, à minima, la mise à disposition de

matériel de RDR.

- Articulation avec les médecins généralistes et l’équipe Mobile Précarité Psychiatrie :

L’articulation nécessaire de l’activité de ce dispositif souple avec les médecins

généralistes et l’Equipe Mobile Précarité Psychiatrie, doit permettre d’inscrire les

consommateurs d’opiacés les plus précaires dans un maillage et de favoriser l’accès

à des soins psychiques.

- Localisation : Le dispositif mobile « souple » permet d’envisager deux lieux de

permanences, l’un dans le centre de Lyon, dans l’un des quartiers cités par les

professionnels (soit à proximité des lieux de présence des consommateurs d’opiacés

ou à proximité d’un hôpital) et l’autre éventuellement dans l’une des deux zones où

les besoins semblent peu couverts et pourrait permettre de toucher des publics

éloignés de Lyon, à savoir gare de Vaise ou Givors.

Les lieux de permanences du Csapa Mobile devraient être choisis avec attention : il

s’agit de déterminer un lieu facile d’accès, sécurisé mais permettant une certaine

discrétion, afin de garantir l’anonymat aux personnes recourant au dispositif. Ces

lieux devront également être définis en concertation avec les pouvoirs publics

(municipalités, services de police et de justice…).