ALCHIMIE D’ÉMAUX

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Maodho BA ALCHIMIE D’ÉMAUX Ou les fresques typographiques d’une brûlante passion (Volume 1)

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Alchimie d’émaux 1. Ou les fresques typographiques d’une brûlante passion

Maodho BA

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Maodho BA

ALCHIMIE D’ÉMAUXOu les fresques typographiques

d’une brûlante passion (Volume 1)

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Préface

Lorsque l’on nous demande de préfacer une œuvre, d’en introduire le propos quel qu’il soit, nous ressentons toujours cette légère appréhension qui drape d’un léger doute le texte à entreprendre. Quand un ami, un frère, un compagnon de plume nous demande, honneur insigne, d’apposer à son œuvre le tracé de notre plume, qu’il nous laisse parmi sa tribune un promontoire vierge où nous épancher, un espace, un havre parmi le souffle de son monde, toujours nous drape cette légère inquiétude de ne pouvoir honorer suffisamment cette invitation. Jours s’écoulent, ainsi que mots, doutes et inquiétudes s’entremêlent, grandissent et s’estompent, sans jamais réellement quitter le fil ténu de notre propos. Et voici qu’au fil de la seconde lecture de l’œuvre, qu’une fois ingéré le gigantesque travail de l’auteur sur son bureau, qu’une fois la montagne de travail escaladée, doutes et inquiétudes paraissent bien insignifiants en regard de la majesté du recueil.

Ainsi me fait ressentir la solitaire contemplation ce vaste recueil de mon ami Maodho.

Solitaire car incessible. Solitaire, car résolument individuelle est la jouissance qu’on peut tirer d’une telle œuvre, irrémédiablement personnelle, l’ébahissement et l’écarquillement devant une telle masse de travail. En vérité, bien que l’on ne mesurât pas réellement la teneur du travail poétique, Maodho, à travers cette œuvre, nous donne un aperçu de celui d’en agencer de la plus belle des façons chaque brique, chaque voûte, chaque mot. A travers cette œuvre nous peint-il, par diaprures successives sur l’espace blanc, par jets structurellement parfaits, une esquisse de l’Architecture poétique. A la manière d’un peintre nous brosse-t-il,

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méthodique quoiqu’enflammé, ce qui apparaît au fil de l’œuvre comme l’in-textuation première de la poésie architecturale.

A quoi tient, après tout, le génie de Maodho ?

En deux caractéristiques essentielles. L’une, incontestable, agrège son génie méthodique et poétique, ainsi que son immense génie architectural. Ce trait – ou plutôt ce don – qui caractérise la plupart de ses poèmes (je ne peux m’empêcher de penser à l’immense « Femme », ensemble d’acrostiches calligrammatiques plus que poème sur lequel je reviendrai) exsude de chacune de ses coups de pinceau, de chacun de ses calligrammes, de chaque acrostiche qui compose le cœur de cette œuvre. La structure, en sa poésie, est autant magnifiée que la musique, et les mots pour rendre leur or s’assemblent d’abord avant que d’éclater. L’on se plait à épouser les circonvolutions avant que d’écouter la mélodie, l’on se surprend, hébété, à admirer une peinture avant que de voir qu’elle est faite de mots.

La seconde essentielle part de son génie poétique, unique chez Maodho, est sa plume suspensive. Accordez une heure à lire ne serait-ce que trois de ses sonnets, lisez et relisez, fermez les yeux, scandez, et allez jusqu’à la fin, une fois, deux fois, cent fois. Cette odeur d’inachèvement qui pend à l’âme, cette senteur frustre de discontinuité que l’on voudrait combler, tout ce vide qui se suspend à la fin des sonnets de l’Architecte appelle, plus qu’aucun gouffre, à se perdre dans l’irréelle beauté des vers qu’il compose. Il n’a été inscrit dans aucun des vers que j’ai lus cette si profonde empreinte de l’élan suspendu au vol, comme figé, comme appelant à être poursuivi en un ailleurs que l’on cherche encore. Il est le seul qui me donne cette impression de chercher encore une fin au-delà de celle qu’on m’offre, de chercher un continuum à un déroulé que le temps est déjà en train de plier et de ranger en sa mémoire. Le suspensif appelle, celui de Maodho agrippe. La fin brutale motive, celle que donne Maodho impose un ultimatum, sommation vers l’à-écrire, l’à-lire. Le vers qui, suspendu sur les lèvres et l’œil, attendant une fin qui déjà s’en va est un vers militant, engagé, résolu dans son entreprise de fédérer en la recherche du beau tous lecteurs, quelque profanes soient-ils.

Ce suspensif, il se remarque avec d’autant plus de force dans les derniers vers de la plupart de ses sonnets. Dans Soif d’Absolu, par exemple,

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« L’insatiable soif, de foi, de connaissance Piliers d’ascension, vers Vous sans me flancher M’incite pleinement à semer la Substance »

Dans la dernière strophe d’À Ta Manière « Ô bienveillante sœur, méditant sur ces dires Digne de ta pudeur et de tes beaux sourires… Accueille mes souhaits, de bien-être heureux. »

Mais aussi dans l’ultime ligne

« D’un déclic engendré par ce Vide incompris… »

qui clôt Le Vertige Du Néant, on remarque triplement ce pont, cet envol suspendu dessous la course de l’œil, cette invitation au voyage que le corps entier du lecteur tend à saisir. Ainsi, le génie de ce recueil, et par voie de conséquence, celui de son auteur, est de donner envie, de susciter l’appel irrépressible d’aller au-delà de ce qu’il offre. Tant par l’hospitalier ton de ses vers que par leur invitation, ce recueil (r)enferme, du lecteur l’entière tension, pour l’en ressortir transfiguré(e).

Un troisième aspect de ce génie, induit par les deux caractéristiques déjà décrites, est sa diversité poétique. Il ne se trouve pas moins d’une quinzaine de styles d’écriture recensés ici, les principaux utilisés (indifféremment ou concomitamment) étant le sonnet, la terza rima, et l’incontournable calligramme serti çà et là de remarquables acrostiches. Cette diversité à la fois dans la manière d’écrire (l’on devrait utiliser dans le cas de Maodho le terme Composer, plus global, plus dense, plus complet) et dans les sujets d’écriture, dans la manière d’aborder ses compositions, de les assembler et de les restituer, pose résolument une image assez nette du caractère artistique de Maodho : non-appartenant, non-spécialisé, mais aussi militant de l’ouverture.

La non-appartenance de Maodho à un quelconque courant littéraire, à une quelconque cause, à un quelconque dogme ne se mesure pas à la première lecture, ni au parcours passif de l’œil sur l’étendue du recueil, mais ne se voit qu’après une minutieuse lecture de l’ensemble. La non-appartenance n’est pas une faiblesse, une tare, mais s’agrandit de tous les faisceaux de possibilités qu’elle offre, se démultiplie en la diversité de

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chaque duo et de chaque composition, si différente soit-elle, et surtout, rend libre la plume et le pinceau de l’architecte pour la recherche d’autres pistes de compositions. La non-appartenance empêche la qualification de Maodho en un unique écrivain, en un autorat – un écrivanat, oserait-on – unique, figé, prostré sur ses caractéristiques et ses membres. La non-appartenance appelle, impose, somme le non-appartenant à se chercher d’autres abris, à errer dehors, à toujours chercher vers l’ailleurs cette chose en plus qui, à la toute fin, pourrait lui tenir lieu d’Absolu. La non-appartenance n’est pas une faiblesse, répété-je, en tant qu’elle n’exclut pas de faire des rencontres avec des horizons aussi figés qu’épars, mais elle donne un atout supplémentaire : celle de toujours chercher l’Absolu, dût-ce exiger de se désolidariser de luttes essentielles.

Ensuite, la non-spécialisation à une quelconque manière d’écrire, l’ambivalence de Maodho en tant que poète, prosateur, architecte et dessinateur, font de son univers ce qui se rapproche le plus de la recherche et de l’esthétique de l’absolu artistique. Car il faut avoir eu un aperçu de ce qu’offrent d’essentiel chaque art pour les mêler dans sa recherche, il faut avoir vécu, suivi les méandres de chaque discipline pour en faire, d’un seul élan, une concomitance artistique. Ainsi, ce recueil englobe dans son anti-hermétisme la recherche stylistique de la poésie, sa métrique, son style et son art ; il contient aussi la rigueur scientifique et l’ordonnancement de l’architecture verbale – en tant que calligrammiste de génie, l’architecture devient plus que jamais, sous sa plume, un art scientifique, mais encore le vif déroulé de ma prose poétique et l’émotion grave, quelquefois ébahie, mais toujours bouleversante du symbolique tracé dessiné. La non spécialisation de ce recueil, et de son auteur, est alors ce qui fait son unicité ; il semble que, de vouloir d’une si belle façon boire en chaque outre artistique, de pouvoir agencer l’art et la technique, Maodho a fait de cette œuvre quelque chose d’unique, qui dépasse autant l’art que la science, mais en fait un œuvre profondément humaniste.

Et cet humanisme se retrouve avec une force renouvelée dans un dernier trait de l’homme et de l’œuvre. Cet homme est un homme de défi et d’Ouverture : induit des deux premiers traits, il s’ouvre sur le monde, curieux de nouvelles façons de faire sans juger de leur morale, toujours considérant d’abord le défi à relever plutôt que sa teneur. C’est un homme de

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perspectives et de conquêtes, un homme à la recherche élargie, au front haut, qui toise chaque jour plus avant les lointaines limites de l’Art. Maodho est un homme incomplet qui cultive cette incomplétude, artiste qui voit son humanité – entendre ici, l’humanité individuelle de chacun des artistes qu’il croise – comme une piste supplémentaire à exploiter, comme un enrichissement à son patrimoine, comme, enfin, l’unique prétexte à l’extension de son Art. L’art chez l’autre est ce qu’il cherche, et cette recherche, qu’il combine à celle d’absolu, fait de ce recueil un témoignage unique d’humanisme et d’ouverture.

* * *

L’humain au sein de l’art de Maodho

« Toi qui fus malmené dans cet abominable Acte Que tes frères de sang, pour leur gain marginal Avec le Charlatan, conclurent par un pacte

Toi qui fus exilé de ton fief communal Coupé de tes enfants et de ta femme aimée Réduit à travailler dans un champ infernal »

Ces deux tercets, par leur contenu symbolique, expriment deux cris : celui de l’abomination de la traite, mais aussi celui, plus général, de l’appel à l’humain, de cet impératif humain qui doit vibrer en chacun de nos cœurs. Ainsi, entendu qu’il n’est nul besoin de rappeler l’horreur de l’esclavage, il convient ici de s’intéresser à celle, plus récente, de la transition dite démocratique, de 2012 au Sénégal. Il régnait alors, en ce moment, un dramatique sentiment de révolte impuissante en chaque exilé, une intolérable injonction au silence, qui ne pouvait se rompre sous-peine de se voir retirer la légitimité de l’indignation. Ici, ce cri est celui démultiplié des frères de sang et de lutte pour rejoindre celui de ceux qui marchaient sous les trombes de l’injustice, c’est celui, rugueux car impuissant, amer car silencieux, presqu’illégitime mais tellement douloureux, de ceux qui ressentirent avec la même violence l’injustice qui ne se pouvait forclore. L’exilé, même par choix, en reste un, et le premier

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tercet marque ce ressenti lointain de la douleur, qui grandissait à l’aune de son impuissance.

Mais l’humain ne se recèle pas seulement en ses cris de douleur, scandés haut dans des sonnets impeccablement tracés. L’humain se révèle aussi en ce paradoxe dont il me loua : ce poème altruiste qu’il composa en mon seul honneur, ce paradoxe parfait qu’il me dédia est une marque indéniable de son humanité. Car il est paradoxal de voir le poème altruiste composé en mon honneur, alors que de sonnet jamais je n’en fis, et de rimes je n’adopte que rarement. Paradoxal de voir le transport que cet altruisme me procure, alors que ce style m’est étranger. Paradoxal, enfin, de tomber à genoux devant l’immensité de cette œuvre alors que mon cri est si différent du sien. Car c’est peut-être qu’à travers nos respectifs élans, à travers sa précision affichée et ma désinvolture apparente, sourd le même amour de la chirurgie verbale, dont d’aucuns nous affublent, qui transparaît, pour l’œil qui ne se limite à la première lecture, au travers de mon émotion et de son érudition.

* * *

De l’amour et de la contemplation humaine dans l’œuvre

de l’Architecte d’Emaux

Des mots d’amour comme des mots de bravoure, sait-il écrire avec la justesse de l’alchimiste ; la rencontre, la séduction et enfin la félicité. L’on sent le doute préalable aux histoires d’amour, et tout à la fois l’assurance de vivre avec celle qui la partagera ; l’on sent le doute nécessaire à la séduction et l’entièreté de la sincérité de l’amour. Ainsi, la précision de l’alchimiste n’est en rien (uniquement) ratiocinée : elle est ornement du cœur en plus d’être sophistication de l’esprit. Comme si ce don coulait de l’esprit vers le cœur, comme si du potentat cérébral irradiait vers les entrailles la dextérité et la maîtrise de cet agencement verbal. Moi, qui ai toujours considéré que l’amour empêchait la poésie, l’accepte alors comme muse. Moi qui toujours crus que le sentiment heureux, loin de magnifier l’ode, la dévoyait en les niaiseries de sa simplicité, moi qui toujours crus que la poésie amoureuse n’est autre chose que ballade, chanson, rhapsodie au mieux, vois

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manifestement que, dans le cas de Maodho, c’est l’inverse. Le sentiment amoureux n’est plus seulement magnifié, mais est aussi ce qui permet, qui prétexte de la grandeur de la poésie : en chaque calligramme dont elle drape l’atour, l’amour plus qu’autre chose justifie l’écrit.

« Un Amour infaillible pourtant si sensible », est dans cette perspective un bijou de sonnet. Épuré, sobre, majestueux dans sa robe simplifiée et dans sa syntaxe, il épelle un à un les canons de l’amour que « Peine-ombre » vient bouleverser de sa tranchante désillusion. Son titre tient toute sa promesse. Elle trahit, dans une relative sobriété picturale, l’illusion et sa déception, le cénacle amoureux et la chute du trône, d’ivresse et le sevrage. Et l’architecte n’en est que plus beau, plus resplendissant dans son long feutre d’hiver au col relevé, arpentant silencieux les ruelles obscures de la mélancolie.

* * *

En matière contemplative, il convient de magnifier quatre textes fondamentaux de ce recueil. Tout d’abord, « L’évidence du jour », haïkesque (poème à retrouver dans le volume 2) s’accorde et converge en la paix de l’âme, module tour à tour le changement et la continuité, accompagne sans le brusquer l’être en la transition des saisons diurnes. Elle montre qu’au même titre qu’il y a deux saisons du soir, il existe deux saisons du jour qui se succèdent en les saisons, se ressemblent sans jamais donner au cœur le même ressenti. Deux quatrains, deux soleils lumineux, un flux et un reflux de l’émotion que l’âme vole au jour. En ce ressac ainsi modulé s’arrime définitivement la grandeur de cette plume.

Ensuite, les immenses Acrostiches et calligrammes gondés en gigognes ou puzzles sur la Femme. Que dire sur cette œuvre qui soit plus grand que Silence ? Qu’apporter d’éloges et de pâmoisons, qui soit plus expressif que l’immobilité de l’’hébétude ? Ecoutez plutôt parler ces trois mots :

Effloraison Nouaison Et liaison

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Qui, plus que discours, présentent ainsi avec une précision inégalée les trois saisons de la femme. Trois faces mutuellement exposées au soleil des cieux, trois épithètes qu’elle porte, trois conditions qu’elle vivifie de sa nature. Ainsi est-elle effloraison, léger bris dessus la violence de cet univers, souffle imperceptible et pourtant essentiel au fracas du dehors. Elle est ensuite nouaison, lieu d’achoppement, voûte et lieu initiatique de la vie ; elle enceint en son clos le germinal futur de toute ascension. Elle est enfin liaison, entre éléments, entre être, transition indispensable aux formes et aux paroles.

Ainsi, trois facettes au travers desquelles, par le transport du verbe de l’Architecte, on fait d’une figure une trinité.

Trois galons de vie. Trois saisons du monde.

Ensuite, au même titre que « L’évidence du jour », les deux excellents « Fresque saisonnière » et « Dans l’en-nui, une voix susurre » portent ce mouvement ininterrompu de la contemplation.

« Le soleil de printemps s’est estompé d’un pagne ; Laissant mollement choir ce tableau lumineux, Par des larmes de pluie et la torpeur qui gagne »

Et que t’évoque alors, lecteur, ce pagne qui cache la luminescence printanière, sinon la sombreur de quelque plantureuse cuisse nègre ?

L’on se sent ici porté, appelé, happé par la nuit et son indicible paix. L’on sent ici, « Dans l’en-nui, une voix susurre », que couve la nuit les mille angoisses de l’être. L’on sent hantises, l’on sent solitude. L’on sent la caresse douce et paisible de la nuit se muer en ostensible peur. Littéralement, on le sent, on l’éprouve, on l’appréhende par le rythme des mots qui se font voix. Cette voix peut autant être celle du poète qui murmure, celle de la femme qui berce, que celle du père qui, dans les nuits de Dakar, égrène sa foi millénaire. Celle du placide écho de la mer autant que celle, enfin, démultipliée, de la foule, là dehors, qu’on ne voit jamais, mais qu’on sent battre tel un cœur extérieur.

Cette sensation, nous la vivons souvent, nous, exilés vivant sur la terre francilienne.

« L’ultime bruissement s’étiole

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Comme en un gouffre à sol ouvert »

Et n’as-tu pas souvent, quelquefois que sur toi chutaient, lascifs, ces automnales feuilles qui semblaient ne plus rien vouloir de ce monde sinon en orner de mélancolie le va, n’as-tu pas souvent ressenti sous le silence et le bruissement du temps gris, n’as-tu pas eu cette sensation que l’on te parlait ? Oh, pas d’une voix distincte, ni définissable, mais de ce vague murmure créé de contemplations et de pas furtifs sur le tapis floral, qui meurt plus que revit, et que l’on farfouille encore de notre mélancolie. Ainsi qu’arrive l’ultime bruissement de l’automne, arrivent ainsi tous les maux de notre époque que l’hiver ne fait que raviver.

« Les seuls démons de ce monde sont ceux qui grouillent en nos cœurs » disait Gandhi. Et ces démons se réveillent au minuit hiémal de nos saisons. Le sanglot

« Et mon ventre est rempli de nuit »

est ainsi le statut inaccessible et incessible de l’individualité du mal. Ce vers contient, seul, toute l’individuation de l’ombre, que l’être ne partage pas, que l’être, seul, élève et entretient. Et lorsqu’il s’interroge, anxieux, sur « Combien de maux séquestrés en notre Âme », entend-on alors le cri apogéen, zénithal, d’une soif qui se voudrait duelle, qui se voudrait éteinte dans l’antre de la muse, qui se voudrait, frustrée et insoumise, inondée de l’encre profusionnelle de l’inspiration.

* * *

Enfin, pour revenir sur la poésie proprement dite de Maodho, il est à préciser que j’ai rarement eu à lire – je ne lis pas beaucoup, certes, au même titre que lui s’en revendique – d’aussi précises notes. Les mots s’enchevêtrent en de savantes circonvolutions, sans se piétiner, sans même s’emmêler. Chaque mot livre son émotion propre. L’on sent le détachement des mots avec la même force que l’on sent les fouets inextinguibles de ses cisailles verbales, qui nous secouent l’Âme autant que le ferait le verbe d’un héraut qui nous harangue.

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Ainsi, en sus de ses nombreux titres et qualificatifs, il convient d’adjoindre celui de pédagogue, tant pour l’immense portée didactique de cette œuvre, que pour sa vêture qui attire l’être à se lover en le giron hospitalier de la poésie. Elle transmet, sinon grandit, l’apprentissage de la poésie aux aspirants. Elle explique par l’exemple sans vulgariser ce que l’émotion a pris comme otage, et, sans rien concéder à l’empire de la raison et de la science, elle instaure une discipline nouvelle : La Science Poétique.

Par Mamadou Lamine Faye alias Lyncx Le 15/02/2014 à Colombes, Paris.

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Les Vers Attiques

Les petits mots savants, désuets ou précieux Promènent leur pas sur ses pages

Et, quintessenciés, ils caressent les dieux Ou rendent l’amer aux naufrages.

Ils dessinent les traits d’un papillon en fleur Voltigent dans le corps d’un ange :

Les phrases vont alors en courbes jusqu’au cœur Aussi sûrement qu’une alfange.

Les vers, dans leur carcan classique et bien huilé, Sont mesurés au pantomètre

Car c’est dans ces calculs que tout est décuplé Sans déborder d’un pied de lettre.

Ils sont sans nescience et offrent leur pardon À ceux qui ne peuvent les suivre

Quand sa calligraphie est trop boustrophédon – Mais c’est cela qui nous enivre.

Par Eliawe (Auteure de « Encre de mondes »

Administratrice sur le site francophone de Poésie « La Passion Des Poèmes »)

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Ô poète Maodho !

L’Architecte des mots, tu es le créateur Qui lève l’encre au ciel, un mur infranchissable ;

Riche carnation d’un poème aguicheur, – Où voltige un féal-poète inégalable. !

Ô merveilles des vers, tu scelles un recueil Pied par pied des dessins forment des calligrammes

Et l’onde sépia signe un très bel accueil À l’homme qui écrit de vastes oriflammes.

Ô mon ami poète ! Ô toi l’œuvre des vers ! Éblouit la splendeur des nobles best-sellers

Tel Baudelaire, Hugo – Inventeurs de poèmes !

En tes mains un flambeau étincelle nos cœurs, Illustre concepteur tes dessins sont des fleurs

Qui papillotent l’or de nos iris Bohèmes !

Par Poète James Denis (Auteur de « Symphonie Amoureuse » et de 3 Anthologies

Membre de la Société des Poètes Français

Membre de la Société des poètes et Artistes de France

Fondateur & Administrateur du Forum « Plume de Poésies »)

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L’Architecte

L’

A Pô G

Râ est là.

Ciel peu gris,

Houle zen qui a

Imaginé sur le rêve,

Travaillé l’Do de l’âme

Et chanté car il a créé.

Celons l’Ré et l’art,

Tout est encre

En Sol, sur

l’air nu

d’ta

vie.

Les

ans

ont

volé

sous

terre.

Par Lunastrelle

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Majestueusement, les mots s’inclinent sous sa plume

Dorlotant les formules et les emblèmes

Moulant une expression dans un beau diagramme

Géométrique, où se mêlent la chimère et le concret suprême

Berçant l’Amour tels des Astres dans le Dôme

Arrosant chaque site de beaux poèmes.

Son regard flotte sur les ailes des idées Scintillant pour faire naître un avis approprié

Ses arguments expliquent des théories diverses L’esprit consacré à dénouer des mystères.

Ses apparitions furtives fascinent les lieux Séduisent les présents et invitent les absents

Quand sur le mur, souvent ses écrits charment les yeux Aux petites formules, mais qui ont l’air de présents

Bien élevé, auguste, chapeau à ses parents Qui, sur un bateau, l’ont déposé en enfant

Avec leur souffle et leur amour, l’ont fait ramer Vers le défi de la vie de tout côté.

Grand, devenu le complice de son destin Puisque de sa volonté, il trace le chemin

Son cœur animé aussi d’une présence sacrée Celle de Dieu, des Prophètes et la foi à jamais.

Par Houria

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Hommages des Sannin à l'Architecte d'émaux

Archer de l’aube au dard rutilant, nitescence séraphique à la fresque Olympienne

Romance éthérée, subtil mélange d’art et de poésie, valses volubiles entre le rocher et l’eau

Chantre chevronné à la plume aiguisée, alchimiste aux élixirs fleuris

Hommage à toi héraut des nuées, transcendant l’écrit à travers arcades et dédales

Intrépide aventurier de l’art, ingénieux architecte à la toile élégiaque

Truculente, voilà la plus singulière définition de tes œuvres, qui ne fut émerveillé par le pittoresque

de leur forme et la justesse de leur fond ?

Efflorescence et sublimation d’un art si parfait, nous en fûmes les témoins, puisse nous être donnée

l’opportunité d’en témoigner.

Continûment, nous te vîmes gravir les marches, allant à la Table des immortels, polissant ta forme,

exaltant ton verbe et toutim.

Thot, regarde ton digne héritier s’élever, contemple ce samouraï à la plume aussi affûtée qu’un

wakizashi,

Etendre ses ailes d’ambre, dans ce ciel céruléen, admire cet Imothep des Mots caresser son acné ; tel

était ton destin.

Deo gratis, pour cet honneur de s’enivrer de tes créations, puisses-tu continuer, avec succès, ce

beau trekking.

Eclosion d’une plume trempée dans l’encre de la prud’homie,

Splendeur d’un talent, d’un génie et d’une passion inapaisée,

Maodho, le self-made artiste, l’intellectuel complet et peintre talentueux,

Offre son monogramme au patrimoine culturel de l’humanité,

Triomphe de l’accomplissement du rêve d’un architecte émérite,

Soudé à la terre et attaché au ciel, à l’image d’un Spirituel.

Par Bocoum, Chimère & Thiam Ming