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LE GRAND RETOUR ESPAGNOL EN AFRIQUE AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 45 14

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Les titres raccoleurs ne son pas de moi

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LE GRAND RETOUR ESPAGNOL EN AFRIQUE

AFRIQUE EXPANSION Magazine N˚ 4514

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LE GRAND RETOUR ESPAGNOL EN AFRIQUE

S’il fut un temps où les conquêtes religieuses ont poussé les Maures d’Afrique

vers l’Espagne, le XXIe siècle révèle un phénomène inverse et d’une toute autre

ampleur. La crise économique a durement frappé le pays des corridas avec

comme conséquences des taux de chômage et de faillite d’entreprises records.

Une simple observation des flux migratoires qui entrent et sortent d’Espagne

permet aujourd’hui de constater l’ampleur du désespoir économique ibérique.

Confrontés à cette nouvelle et dure réalité, nombreux sont les Espagnols qui

choisissent de franchir le détroit de Gibraltar à la recherche d’une vie meilleure

au Maroc ou en Algérie. Le continent noir serait-il devenu un nouvel havre de

prospérité pour ces Espagnols en quête d’espoir ?

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De nombreuses voitures immatricu-lées en Espagne circulent désor-mais sur les rues de Casablanca, Rabat ou Tanger. Le Maroc est la première destination maghrébine

de ces Espagnols qui fuient le chômage, la récession et le manque de perspec-tives. À l’instar de Pilar, qui s’est retrou-vée sans emploi après 18 ans d’ensei-gnement dans le même établissement. Depuis, elle jongle d’un contrat à l’autre, entre le Maroc et l’Espagne. Chaque année scolaire est source d’incertitude. « Pour l’instant, partir est la seule pos-sibilité. J’étais au chômage pendant des années jusqu’à ce que je puisse travailler comme professeur à l’école espagnole de Rabat », raconte Pilar, entre deux anecdotes sur ce que cela implique côté risques pour une femme seule. « Il faut faire attention. Je me faisais racoler, soudoyer et tout est compliqué, même d’avoir la moindre information. Mais on s’adapte. »

Erena est une ancienne journaliste correspondante en Afrique, basée au Maroc. Elle aussi s’est retrouvée sans travail, mais n’est pas rentrée en Es-pagne pour autant. Le manque de piges l’a motivée à se convertir en professeur d’Espagnol à l’Institut Cervantes de Rabat, une organisation qui vise l’ensei-gnement de la langue espagnole et la promotion culturelle.

L’Institut organise des soirées heb-domadaires aux ressortissants espa-gnols. Miquel s’y rend souvent. Ancien restaurateur à Barcelone, il a dû mettre la clé sous la porte. Il est maintenant chef cuisinier dans un restaurant à Temara, une ville côtière près de Ra-bat. D’entrepreneur chevronné, il est devenu employé dévoué, une réalité malheureuse et cruelle qui a rattrapé des milliers d’Espagnols. En 2013, c’est un record de 8934 entreprises qui ont abdiqué et déclaré faillite, une hausse de 10,4% par rapport à l’année précédente. Si l’augmentation est moindre qu’en 2011 (15,1%) ou 2012 (32,2%), reste que

CRISE ÉCONOMIQUE

Miquel, Pilar, Xavi, Erena,

Sofian… Tous des Espagnols

qui ont fui leur pays pour

trouver meilleure fortune au

Maghreb. La crise économique

qui sévit en Espagne depuis

2008 les a poussés à émigrer

sous d’autres cieux, notam-

ment au Maroc et en Algérie.

L’Afrique serait-elle le nouvel

Eldorado économique

des Européens ?

Lila Ait

ARMADA ESPAGNOLE À L’ASSAUT DU MAGHREB

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dire non, donc ils donnent des excuses. Je me demande toujours quel est le fond de leurs pensées. Ça prend beaucoup d’énergie et ça cause autant de fatigue. »

PARA BUSCARSE LA VIDA

Malgré certaines différences cultu-relles appréhendées, 65% des Espagnols disent vouloir quitter leur patrie : Para buscarse la vida, chercher une meil-leure vie. Le nombre de ressortissants a presque atteint les deux millions de personnes et pour cause : le taux de chômage espagnol (26%) est le pire en Europe après celui de la Grèce, avec près de 6 millions de demandeurs d’em-ploi. Ce taux atteint les 60% chez les moins de 25 ans.

« Beaucoup de gens viennent pour demander des informations, faire du réseautage », raconte Alberto Gomez Font, directeur de l’Institut Cervantes à Rabat. « Beaucoup sont diplômés, dans le domaine de la construction, l’architecture, le tourisme, l’hôtellerie et la restauration, parmi les secteurs les plus touchés par la crise. » Dans une Espagne bridée par une crise immobi-lière sans précédent, le Maroc constitue de fait le second pays en termes d’oppor-tunités d’emplois pour les ingénieurs et les ouvriers du bâtiment.

« Les Espagnols qui viennent au Maroc s’insèrent dans des activités où il y a un besoin, où il manque des compé-tences ou une expertise que l’employeur n’a pas trouvée », explique Najib Akesbi, économiste. « C’est un apport enri-chissant. Pour les Marocains qui les embauchent, forcément ils les payent

Malgré certaines différences culturelles appréhendées, 65% des Espagnols disent vouloir quitter leur patrie. Ce taux atteint les 60% chez les moins de 25 ans.

plus cher que les Marocains puisqu’ils correspondent à des postes pour lesquels ils sont appropriés. Pour moi c’est une expression assez éclatante de l’ampleur de la crise en Espagne. Pour que des individus en arrivent à faire ce choix, c’est que la crise doit être terrible. »

La directrice de la Chambre de commerce espagnole de Tanger dit recevoir beaucoup de CV en prove-nance d’Espagne. Elle explique que le nombre d’Espagnols qui veulent tra-vailler dans le royaume est croissant. Le premier ministre marocain Abde-lilah Benkirane est même allé jusqu’à déclarer : « Pour trouver du travail, les Espagnols devraient venir au Maroc ». C’était lors d’une visite officielle en Es-pagne il y a deux ans. Il invitait ainsi les Espagnols à venir travailler dans son pays. Ces déclarations avaient fait couler beaucoup d’encre dans la presse marocaine qui rappelait que le royaume chérifien connaît ses propres difficultés économiques toujours sans réponse.

« Ici, le régime de croissance est caractérisé par l’instabilité. Il est stricte-ment lié à l’activité agricole », poursuit Akesbi. « C’est un régime de croissance à la fois insuffisant et très instable, en fonction des aléas climatiques. La plu-part des Espagnols qui viennent sont à la recherche d’opportunités particu-lières bien spécifiques. »

Le Maghreb attire des travailleurs, mais aussi des investisseurs. Le Maroc accueillait déjà plus de la moitié des investissements espagnols sur le conti-nent africain (soit 52%) ; et plus de 800 entreprises espagnoles sont installées au royaume, tous secteurs confondus. En 2012, le pays est même devenu le

les tristes histoires s’accumulent par milliers depuis 2007 (1147 faillites).

Soufian quant à lui est né au Maroc avant d’immigrer en Espagne où il est resté six ans. Faute de travail comme agent de sécurité et après avoir perdu sa maison, il a dû rentrer dans sa ville natale de Khemisset où il travaille dans des cafés et restaurants. Et ce n’est pas sans regrets, puisqu’un sentiment d’échec ponctue le retour au foyer familial. « Je connais des personnes dans de pires situations. De toute façon, les gens sont devenus racistes là-bas, pour eux, les immigrés prennent leurs places. » Un re-tournement de situation pour l’Espagne qui compte la deuxième diaspora maro-caine de la planète (environ un million de personnes) derrière la France.

Les exemples sont nombreux et innombrables.

Xavier est ingénieur de son à Casa-blanca. La précarité de son métier le pousse à faire des allers-retours entre l’Espagne et le Maroc. Mais les contrats se font rares. « C’est difficile d’intégrer le marché du travail au Maroc. Les sociétés marocaines sont en compétition les unes contre les autres et n’aiment pas faire affaire avec les employés d’autres compagnies », confie Xavi qui cultive sa patience. « Ce que j’ai trouvé diffi-cile aussi, c’est de savoir la vérité. Ça marche beaucoup de bouche à oreille et c’est difficile de savoir ce qu’il en est, tout le monde se renvoie la balle. On me dit toujours de rappeler ou de repasser plus tard, qu’ils sont occupés. Après, personne ne répond. Quand ils promettent de me rappeler, ils ne le font pas. Même chose pour trouver un logement. C’est comme s’ils n’osent pas

ARMADA ESPAGNOLE À L’ASSAUT DU MAGHREB

Miquel, Pilar, Xavi, Erena, Sofian…

DOSSIER : QUAND L’EUROPE IMM

IGRE VERS L’AFRIQUE

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deuxième partenaire commercial de l’Espagne, devant la France. Environ 20 000 de ses PME exportent vers le Maroc.

L’HISTOIRE SE RÉPÈTE

De fait, les Espagnols n’ont jamais autant fui l’Espagne depuis le régime franquiste dans les années 60 et 70. La population qui quitte le pays est plus nombreuse que celle qui y entre. Cette donnée ne tient même pas compte de ceux qui se déplacent dans l’espace Schengen.

Quels sont alors les déterminants qui motivent les Espagnols de tenter leur chance au Maroc ? Les bas coûts de la vie, l’histoire – le Maroc est un ancient protectorat espagnol – mais aussi la proximité géographique. Le détroit de Gibraltar, entre l’Espagne et le royaume chérifien, fait 14 kilomètres. Ce qui permet aux Espagnols de rentrer facilement voir leurs proches.

La plupart des Espagnols s’installent au nord du Maroc. Dans les villes de Tanger et Tétouan, beaucoup de Maro-cains parlent encore espagnol, et ne re-gardent que le soccer de la Liga de Messi et Ronaldo. De plus, les villes de Ceuta et Melilla – des territoires espagnole - sont les dernières colonies d’Afrique.

L’Ambassade espagnole répertorie près de 14 000 ressortissants. « Il n’y en a jamais eu autant depuis l’indé-pendance du Maroc à l’Espagne en 1956 », note le Père Navarro, conseiller de travail à l’Ambassade d’Espagne. « Il y a nettement plus d’activités écono-miques entre les deux pays et ce, pour deux raisons : on augmente les relations commerciales et la création de PME au Maroc, contrairement à l’Espagne. Habituellement, les Espagnols partent au Maroc pour faire affaire avec des entreprises espagnoles ou comme entre-preneurs, plutôt que de faire affaire avec des entreprises marocaines. J’aimerais qu’il y ait plus d’Espagnols, ce serait bien pour le Maroc et pour l’Espagne. Nous avons des jeunes qualifiés mais ce n’est pas une destination facile. La langue est le principal problème. »

Reste que même si le Maroc n’est pas un Eldorado, les déplacements ont nettement augmenté entre les deux pays. « Maintenant c’est une véritable

immigration économique, avec des gens qui viennent investir », explique Moha-med Berriane, chercheur spécialiste de l’immigration au Centre d’études et de recherches géographiques, à l’univer-sité Mohammed V de Rabat. « C’est comme les Marocains qui vont s’instal-ler en Europe pour gagner leur vie. Par exemple, j’ai rencontré dans le Sud un Espagnol spécialisé dans la réparation de pompes, parce que dans les oasis, on utilise beaucoup les moto-pompes pour pomper l’eau. Il a un savoir-faire à ce niveau là et il a ouvert un petit atelier. »

Beaucoup d’Espagnols arrivent encore toutefois sans se signaler aux consulats. Pour l’instant, leur nombre réel reste inconnu. Le Maroc n’impose pas de visa touristique aux ressortis-sants européens, qui peuvent rester au pays jusqu’à trois mois. Après quoi, ils peuvent se rendre aux enclaves pour tra-

verser la frontière espagnole et repartir à zéro. L’année dernière, le ministère de l’Intérieur marocain a émis un commu-niqué où il demandait aux étrangers ins-tallés au Maroc de s’enregistrer auprès des services consulaires, afin d’assurer leur sécurité.

« Nous avons un secteur informel très fort. De petits réparateurs peuvent s’installer sans qu’il y ait aucun recen-sement. La ville espagnole de Ceuta est à côté, on sort et on retourne dans la journée », ajoute Monsieur Berriane. « Pour les Subsahariens, les contrôles se font de façon très musclée. Pour les autres, on a fait un communiqué… Ça veut dire que beaucoup sont en situation irrégulière, ils n’ont pas toujours les moyens de faire les allers-retours entre le Maroc et l’Espagne. »

Entre-temps, les autorités espa-gnoles et marocaines continuent de contrer l’immigration clandestine des africains qui tentent de traverser la fron-tière hispano-marocaine. L’Organisa-tion internationale pour les migrations (OIM) propose que les deux royaumes financent leur retour au pays d’origine. « Il existe toujours l’immigration vers le Nord, mais on constate maintenant que

les pays du Sud sont aussi arrivés à un statut intéressant pour l’immigrant », explique Anke Strauss, représentante de l’OIM à Rabat.

« Dans le monde, le f lux migratoire Sud-Nord est aussi important que ce-lui du Nord-Sud. La plupart des gens restent dans leurs régions, dans un contexte culturel similaire », poursuit Anke Strauss. « Au Maroc, ceux qui travaillent au salaire minimum, c’est sûr que c’est temporaire. Il y a aussi des gens qui profitent de cette opportunité pour ouvrir un commerce. S’ils ont des idées innovantes. Il y aurait des possibilités pour eux de rester. »

À la croisée des civilisations, la méditerranée a toujours été un bassin d’immigrations complexes, particulière-ment au Maroc, avec sa position char-nière entre l’Europe et l’Afrique. « Le Maroc a toujours été un pays d’immi-

gration. Que ce soit les Marocains qui partent pour l’Europe, que pour le f lux transitoire subsaharien, des retraités... mais les gens qui cherchent du travail ici, c’est relativement nouveau. C’était plutôt un pays de transit que d’installa-tion. Maintenant, avec la fermeture des frontières, les gens restent parce qu’ils ne peuvent ni rentrer ni sortir », ajoute Anke Strauss. « Ce sera intéressant de voir comment cela sera géré au niveau politique, de la façon la plus humaine possible et dans l’intérêt du pays. »

L’AUTRE FRONTIÈRE

Le phénomène s’étend aussi à l’Algérie, où des entreprises espagnoles s’installent quotidiennement, principa-lement au Nord-Ouest, où elles raflent une grosse part de marché.

Contrairement au Maroc, l’Algérie impose un visa pour les ressortissants européens. Tous les Espagnols qui viennent travailler le font donc avec un permis de travail et un poste obtenu au préalable. La plupart d’entre eux sont des spécialistes recrutés par une société espagnole. Il y a un an, un accord a

L’Ambassade espagnole répertorie près de 14 000 ressortissants. « Il n’y en a jamais eu autant depuis l’indépendance du Maroc

en 1956 »

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été signé pour faciliter les visas entre les deux pays.

Selon José Antonio Doñoro, ana-lyste de marché à l’Office écono-mique et commercial de l’ambassade d’Espagne, ils seraient environ 1000 Espagnols en Algérie selon les contrats d’entreprises. Surtout des ingénieurs, des experts en bâtiment, en transport, des techniciens, des chefs d’équipe. « Ce sont plutôt les sociétés qui cherchent

du travail à cause de la crise », dit-il. « Comme exception, le ministère de l’Éducation nationale algérien a proposé au gouvernement espagnol de recruter 400 professeurs espagnols de langue anglaise », raconte M. Doñoro. « Un appel a été lancé en Espagne. »

C’est que les partenariats culturels entre l’Algérie et le Maroc se sont éga-lement multipliés. « Plus qu’au Maroc », précise M. Doñoro. « Ce sont des décisions politiques. On cultive des liaisons plus étroites qui poussent toute l’Europe à se rapprocher de l’Algérie pour des raisons liées à l’immigration, l’islamiste, etc. »

À Oran, ville occupée par l’Espagne il y a trois siècles, les entreprises espa-gnoles prospèrent. Des opérateurs ibé-riques sont notamment responsables de la construction du palais des Conven-tions, du tramway et du métro, de la gestion d’aqueducs, des fertilisants pour toute l’Oranie, de la construction d’im-meubles, de la production d’emballages, de céramique.

Les projets espagnols dans la capi-tal de l’Ouest se multiplient même en dehors des chantiers. Elles sont 150 entreprises espagnoles à Oran et 1000 dans l’Ouest algérien. Gargotes, bars et cabarets… la fiesta s’exporte aussi !

MISSION ÉCONOMIQUE

« La crise actuelle en Espagne fait que le marché algérien est un marché d’opportunités », explique Djaoued Salim Allal, président du Cercle du commerce et de l’industrie algéro-es-pagnol, une chambre de commerce mixte, inaugurée l’année dernière par des entreprises privées espagnoles qui vise à établir des alliances et favoriser

des échanges économiques entre les industries des deux pays. « L’Algérie est le premier partenaire de l’Espagne en terme d’énergie. Il y a un immense intérêt des entreprises espagnoles ici. Les pouvoirs publics investissent sur les autoroutes, les logements, les infrastruc-tures et l’agriculture. »

La directrice du Cercle, Sofia, vit à Alger depuis plusieurs années avec son mari – qui est opérateur en télécom-munications – et leurs enfants. Chose rare puisque très peu d’Espagnols s’ins-tallent en famille. La plupart viennent seuls, selon les besoins des entreprises espagnoles. Pour Sofia, la crise n’a fait qu’accélérer le processus de coopération entre les deux pays.

Dans un contexte de crise écono-mique généralisée, Mohammed Ber-riane note que l’image de l’Europe s’effrite. « C’est une image très ambigüe. C’est à la fois encore un continent qui fait rêver, mais les gens deviennent de plus en plus réalistes. Ils disent : je n’ai pas le choix je veux y aller, mais je sais que ce n’est pas le paradis », relève-t-il. « Mais de plus en plus de gens disent aussi : je préfère rester puisqu’en rai-

son de la crise, les immigrés sont mal perçus, ils sont les premiers mis au chô-mage. Ils en sont conscients. On évolue d’une image d’Eldorado vers une image de l’Europe qui est plutôt négative. »

Pour Monsieur Berriane, ces nouvelles trajectoires migratoires s’inscrivent dans un mouvement de mondialisation. « Lorsqu’on parle

d’immigration, on ne parle que de la dimension Sud-Nord. Automatique-ment, c’est une immigration de misère, des miséreux qui vont envahir l’Europe. Mais il n’y a pas que ça. Aujourd’hui il y a des f lux Nord-Sud qui ne sont pas seulement des touristes. C’est aussi des gens qui viennent faire de l’argent parce qu’ils ne pouvaient pas en faire dans leurs pays. Ça rééquilibre ces mobilités. »

À l’échelle de l’histoire, le Maghreb a toujours été une région qui s’est consti-tuée dans l’interaction. À fortiori avec l’Espagne, lors de la conquête mau-resque. « On a passé plusieurs siècles chez eux et là, ils reviennent. Notre relation avec l’Espagne est assez parti-culière », rappelle Nadjib Akesbi. « Les gens enjambent le détroit de Gibraltar de part et d’autre de manière presque naturelle. C’est normal, c’est l’espèce humaine. »

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IGRE VERS L’AFRIQUE

Tanger

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