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MACBETH ICôNE WAGNéRIENNE WALTRAUD MEIER LES TRIBUS DE L’OPéRA éPISODE 3 RENCONTRE AU SOMMET DIANA DAMRAU ET SOPHIE KOCH DANS MIGNON SAISON 12-13 UNE SAISON DE TOUTES LES éMOTIONS VERDI REVISITé PAR CHRISTOF LOY UN PLONGEON VERS LE CAUCHEMAR 11 LE JOURNAL DU CERCLE DU GRAND THÉÂTRE ET DU GRAND THÉÂTRE DE GENÈVE SAISON 11 | 12 N°11 | MAI 201 2 |

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Journal du Cercle et du Grand Théâtre de Genève

Transcript of ACT-0 n°11

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Macbeth

I c ô n e wa g n é r I e n n ewaltraud MeIer

les trIbus de l’opéra é pI s o d e 3

r e n c o n t r e au s oM M etdIana daMrau et sophIe koch dans Mignon

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LE journaL du cErcLE du Grand ThéâTrE ET du Grand ThéâTrE dE GEnèvE

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Directeur de la publication Tobias Richter

Responsable éditorial Albert Garnier

Responsable graphique & artistique Aimery Chaigne

Coordination Frédéric Leyat

Ont collaboré à ce numéroPhilippe Cohen, Daniel Dollé, Bernardino Fantini, Albert Garnier, Frédéric Leyat, Neeme Järvi, Christopher Park, Klaus Scherer.

Impression Kreis Druck AG Parution 4 éditions par annéeAchevé d’imprimer en Mai 20126000 exemplaires

11, bd du Théâtre CP 5126 CH-1211 Genève 11 T +41 22 418 30 00F +41 22 418 30 [email protected]

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BUZZ OP 3Quoi de neuf dans le monde de l’opéra

à Genève et ailleurs

OPÉRATION 4-14« As-tu souffert, as-tu aimé ? »

Macbeth is backUne émotion partagée

EN BALLET 15Le Ballet en balade mondiale

CARNET DU CERCLE 16-17 L’ échange avant tout

PLEIN FEUX 18-21Waltraud Meier, la beauté de Wagner

La création pour tous

DIDACTIQUE 22-31Le trouble des sens (II)

Un engagement fortMa passion pour l’OSR

Les tribus de l'opéra (suite et fin)Deux jours pour voir, écouter... chanter, danser

AGENDA 32

Macbeth

I c ô n e wa g n é r I e n n ewaltraud MeIer

les trIbus de l’opéra é pI s o d e 3

r e n c o n t r e au s oM M etdIana daMrau et sophIe koch dans Mignon

saIson 12-13une saIson de toutes les éMotIons

VerdI reVIsIté par chrIstof loy

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LE journaL du cErcLE du Grand ThéâTrE ET du Grand ThéâTrE dE GEnèvE

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Photo de couvertureManderley dans Rebecca d’Alfred Hitchcock© DR

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macbethgiuseppe verdi | 13 au 24 juin 2012

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Un parcours unique dans les tréfonds de l’âme hantée par l’ambition, le remords et la folie. Christof Loy revisite Shakespeare dans cette nouvelle production avec en prime une Jennifer Larmore en Lady Macbeth.

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Mignonun opéraà succès1866 Création à Paris le 17/111867 Napoléon III assiste à la 22ème.

Il fait donner 15 représentations dans le cadre de l’Exposition Universelle

1868 Mignon est présenté à Weimar et à Vienne

1869 Mignon est à Genève1870 L’opéra est donné à Londres1880 Mignon est joué 19 fois

à Genève avec Célestine Galli-Marié, idole de l’Opéra Comique, créatrice du rôle de Mignon et du rôle de Carmen.

1894 Mignon fête sa 1000ème représentation à l’Opéra Comique. Ambroise Thomas, le compositeur est toujours vivant, il a 83 ans.

1897 la 100ème, le 28/11 à Genève 1924 la 200ème, le 30/01 à Genève

LoydialogueDepuis le lundi 30 avril ont

commencé les répétitions de

Macbeth de Giuseppe Verdi.

Venez nombreux découvrir

le travail de Christof Loy et

dialoguer avec lui, nommé

metteur en scène de l’année

en 2003 et 2004, Le Royal

Opera House obtient le

Laurence Olivier Award

pour sa mise en scène de

Tristan und Isolde. Il vous

donne rendez-vous afin de

vous parler de son travail le

samedi 26 mai à 18h30 au

Foyer du Grand Théâtre.

2 étoiles au foyerLe Théâtre Mariinski et son Ballet Anna Karenina ont créé l’événement au Grand Théâtre en ce début de printemps. Au delà de trois soirées archi combles, les évènements organisés autour des spectacles ont eux aussi fait le plein, la projection publique du film de 1935 avec Greta Garbo, mais aussi et surtout la rencontre avec Maïa Plissetskaïa et le compositeur Rodion Shchedrin ont attiré la foule dans les foyers du Grand Théâtre, pour un moment exceptionnel de rencontre et de partage avec deux artistes mythiques. Au soir de la dernière re-présentation ce sont plus de 150 personnes, artistes et techniciens du Théâtre Mariinski ainsi qu’un parterre d’invités éblouis qui ont envahi les foyers pour célébrer ce succès et la présence de nos prestigieux invités.

Lettre à GloryChère Madame, cher Monsieur, j’ai eu le grand plaisir d’assister au ballet Glory en février dernier. Grande amatrice de danse classique et moderne, j’ai entendu parler du spectacle d’Andonis Foniadakis lors de la répétition ouverte au public en début février. À cette occasion, nous avons pu avoir un aperçu de l’œuvre grâce aux extraits du ballet Glory. Nous avons également eu la chance d’avoir l’intervention d’Andonis Foniadakis en personne à cette même occa-sion, suivi d’un dialogue très enrichissant entre le public, le chorégraphe et les danseurs. J’ai immédiatement voulu voir ce ballet suite à cet événement. Le spectacle a largement dépassé mes attentes, autant d’un point de vue choré-graphique et de mise en scène, que par la qualité des arrangements musicaux. Étant également une grande amatrice de musique baroque, j’ai tout de suite été séduite par l’idée de voir une chorégraphie qui raconte les suites de Haendel et qui offre au spectateur, à travers une mise en scène et des jeux de lumières par-ticulièrement bien réussis, un véritable voyage grâce à ce genre musical si par-ticulier. En quelques mots, ce spectacle a été une véritable réussite qui montre encore une fois la richesse de la scène culturelle genevoise. Nathalie de Preux (Reçue au courrier des lecteurs)

Toux et NatelLa présentation de saison a été comme un grand succès populaire et c’est devant un beau parterre que se sont exprimé Lorella Bertani, présidente de la Fondation, Tobias Richter directeur général, Philippe Cohen directeur du ballet et Daniel Dollé, conseiller artistique et dramaturge. Les questions relatives aux beaux projets de la saison ont fusé, mais d’autres remarques ont attiré l’attention de la rédaction, notamment celles concernant les deux fléaux du spectacle, à savoir toux et téléphones portables… Le premier per-turbe la musique et les voix, les écrans lumineux du second sont la plaie du noir de salle de rigueur pendant la représentation et peut être plus encore avant, quand chacun retient son souffle avant le lever de rideau. Que faire ? Interdire la salle aux malades et aux tousseurs chroniques et confisquer tous les téléphones portables à l’entrée  ? Merci de nous faire part de vos remarques et suggestions, pour encourager à la fois le respect des artistes et des spec-tateurs. [email protected]

macbethgiuseppe verdi | 13 au 24 juin 2012

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Un parcours unique dans les tréfonds de l’âme hantée par l’ambition, le remords et la folie. Christof Loy revisite Shakespeare dans cette nouvelle production avec en prime une Jennifer Larmore en Lady Macbeth.

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Le compositeur d’Anna Karenina Rodion Shchedrin entre la danseuse étoile Uliana

Lopatkina et son épouse la danseuse étoile Maïa Plissetskaïa, inspiratrice de son ballet.

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« As-tu souffert, as-tu aimé ? »

> MIGNON d’Ambroise Thomas DIRECTION MUSICALE : Frédéric Chaslin MISE EN SCÈNE : Jean-Louis Benoît MIGNON : Sophie Koch WILHELM MEISTER : Paolo Fanale PHILINE : Diana Damrau Au Grand Théâtre,

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Pour notre époque en permanente recherche d’émotion, il est bon de se

souvenir que le sentiment, la sensibilité et la mélancolie sont aussi nécessaires pour

faire battre les cœurs. Le Français Ambroise Thomas connut la célébrité en 1866 grâce à

Mignon qu’il tira du classique romantique allemand Les Années d’apprentissage de

Wilhelm Meister de Goethe, une œuvre aux sentiments exaltés et au pittoresque chers au romantisme tardif, flottant

sur les nuages d’une musique indéniablement fredonnable.

Mignon : Second Empire et sentiments

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« As-tu souffert, as-tu aimé ? »par Christopher Park

mode. Le poème de Blier permet de nous situer sur l’horizon des attentes du public du Second Empire, duquel émergera Mignon. Après avoir dédié son poème à Goethe, Blier se lance dans une traduction assez libre de la chanson de Mignon « Kennst du das Land » et enchaîne avec une version très réduite de l’histoire de Wilhelm et Mignon, omettant presque tout du contexte narratif (les bohémiens, la passion de Wilhelm Meister pour le théâtre, le voyage en Italie et quasiment tous les autres personnages du récit). Wilhelm y attend sans cesse la femme qui saura répondre à son amour idéal, tout en ne réalisant pas que Mignon est cette femme. Il finit par se retirer dans un refuge surplombant le Rhin où Mignon lui apparaît, vêtue de blanc comme un ange et sur le point de mourir. Paul Blier introduit le personnage de Laërte (l’acteur qui veille à prévenir les héros de la malice de Philine) pour y faire une leçon de morale finale à Wilhelm:

(...) Ami sur ton cheminN’aurais-tu pas aux pieds foulé, sans la connaître,Cette fleur d’idéal que tu cherches en vain?Interroge ton âme où le remords va naître: Le rêve de ton cœur, serait-ce pas, dis-moi,Cette enfant au cercueil, morte d’amour pour toi?

Aimer et souffrir à l’Opéra ComiqueLorsque Mignon fut créé au Théâtre impérial de l’Opéra Co-mique de Paris le 17 novembre 1866, l’œuvre connut un suc-cès immédiat et fut l’un des opéras français les plus souvent représentés sur scène jusqu’à la fin du XIXe siècle et même au-delà. Barbier et Carré étaient les librettistes les plus aguerris et les plus doués de la langue française et Thomas, bien que de renommée relativement modeste, maîtrisait à la perfection le style et le goût musicaux de son époque. Au sujet de la réputation d’Ambroise Thomas, peut-être convient-il de resituer le compositeur en quelques mots. Des contemporains plus prolifiques et médiatiques (entre autres,

S ’il est une figure de la culture littéraire allemande que la culture française a revendiqué comme sienne, c’est certainement celle de Mignon, personnage secondaire du Bildungsroman de Goethe mais récupérée à part entière en France

et dans la sphère francophone comme sujet de tableaux, de gravures et d’épreuves produites en masse du nouvel art de la photographie, inspiratrice de romans pour Balzac et George Sand, muse poétique pour Nerval et Baudelaire, sujet de théâtre de boulevard et de mélodrames et, enfin, pour le com-positeur Ambroise Thomas, déjà quinquagénaire, la clé d’un succès lyrique et d’une célébrité tardive dont il jouit jusqu’à sa mort en 1896, à l’âge respectable de 85 ans. L’accession au pouvoir politique de Louis-Napoléon Bonaparte en 1851 fut également le point culminant de l’engouement français pour la mystérieuse jeune bohémienne du Wilhelm Meister.

Vers Mignon, l’opéraSans détailler ici les diverses incarnations que nous venons d’évoquer, il est un antécédent à Mignon qu’il convient de mentionner ici, pour les signes prémonitoires de l’opéra-comique d’Ambroise Thomas qui s’y retrouvent. En 1858, un poète provincial du nom de Paul Blier fait paraître simultané-ment à Paris et à Valenciennes un poème narratif d’une cin-quantaine de pages sous le titre un peu ronflant de Mignon. Poème couronné par la Société impériale de Valenciennes, suivi de Chanson et ramages. La pertinence de ce mince pamphlet pour notre itinéraire au pays de Mignon est qu’il contient un poème en hommage à Ambroise Thomas, huit années avant la création de Mignon. Le lien entre Blier et Thomas (s’il y en eut) reste obscur et il n’y a certainement aucun rap-port de filiation directe entre le récit poétique et l’opéra. Il faut cependant se rappeler qu’en 1859 eut lieu la création du Faust de Charles Gounod au Théâtre-Lyrique, sur un livret de Jules Barbier et Michel Carré, les futurs librettistes du Mignon de Thomas. Le choix de thèmes potentiels dans l’œuvre de Goethe pour des créations lyriques était définitivement à la

(ci-dessous)

Paolo Fanale (Wilhelm) et Sophie

Koch (Mignon) au début du 3ème acte

de cette production de Mignon en

avril 2002 sur la scène de Neuve.

(page de gauche)

Mignon, huile sur toile

de Wilhelm Kray (1877)

Mignon : Second Empire et sentiments

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Verdi, Wagner et Gounod) lui ont certainement volé la ve-dette, et sa vocation didactique (il fut directeur du Conserva-toire de 1871 jusqu’à sa mort) a sans doute limité sa produc-tion. On a, par ailleurs, eu tendance à qualifier la musique d’Ambroise Thomas de facile, légère ou mélodieuse. On se rappelle également le gentil persiflage d’Emmanuel Cha-brier : « Il y a deux espèces de musique, la bonne et la mau-vaise. Et puis il y a la musique d’Ambroise Thomas. » Mais, comme le rappelle Alfred Bruneau (1857-1934), chef d’or-chestre et compositeur :« Jeté dans la vie militante au temps facile des Auber et des Adolphe Adam, le doux chantre de Mignon, qui n’était point un novateur, n’eut d’autre ambition que de suivre la route indiquée par la mode. » Quoi qu’il en soit, le public parisien était fin prêt pour une restitution à grande échelle de l’histoire de Mignon et, après que le grand Giacomo Meyerbeer eut dédaigné le projet de Barbier et Car-ré, ceux-ci le proposèrent à Ambroise Thomas.Rien ne fut épargné pour syntoniser la nouvelle production à la « Mignonmanie » du moment. Lorsque la chanteuse Célestine Galli-Marié apparut en Mignon sur la scène de l’Opéra Comique, elle était naturellement vêtue comme dans le tableau d’Ary Scheffer, Mignon regrettant sa patrie (1836), archi-connu du public par d’innombrables reproductions mécaniques et dont la valeur iconique rendait le personnage instantanément reconnaissable. Une ambitieuse ouverture annonçait les deux grands « tubes » de l’opéra. D’abord, l’inévitable « Kennst du das Land wo die Zitronen blühn? », la romance de Mignon que Barbier et Carré métamorphosent, avec une entorse mineure à la bo-

> MIGNON d’Ambroise Thomas DIRECTION MUSICALE : Frédéric Chaslin MISE EN SCÈNE : Jean-Louis Benoît MIGNON : Sophie Koch WILHELM MEISTER : Paolo Fanale PHILINE : Diana Damrau Au Grand Théâtre,

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L a reprise genevoise de la production de Mignon par Jean-Louis Benoît pour l’Opéra-Comique de Paris est servie par deux des plus grandes interprètes du

moment. Dans le rôle-titre, la Française Sophie Koch, qui s’est illustrée dans les quinze dernières années par une carrière impressionnante, où sa voix de mezzo-soprano a emporté les suffrages du public et de la critique dans les nombreux rôles qu’elle a incarné sur les scènes des plus prestigieux théâtres et festivals : Charlotte de Werther à Covent Garden, le Compositeur d’Ariadne auf Naxos à Baden-Baden, Dorabella de Così au Metropolitan… L’épice indispensable sans laquelle Mignon serait bien fade est, évidemment, une Philine d’exception et pour cela le Grand Théâtre a désormais le bonheur de compter sur la présence fidèle de l’une des plus grandes colorature du moment, en la personne de Diana Damrau. Le seul nom de l’Allemande que les Genevois ont rencontrée en Donna Anna, pour le Don Giovanni de Marthe Keller en 2009 et retrouvée avec enthousiasme dans I Puritani en 2010 suffit à faire palpiter les fans d’opéra, séduits par le phénoménal talent de la soprano qui, elle aussi, est une habituée des très grandes scènes. La rencontre en scène d’une maîtresse des Hosenrollen et du rossignol de Bavière promet une version tonique et émouvante du grand clas-sique injustement oublié d’Ambroise Thomas.

Mignon, duo de dames

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tanique de Goethe, en « Connais-tu le pays où fleurit l’oran-ger ? », qui est sans doute aucun la plus accrocheuse et fre-donnable de toutes les versions du texte de Goethe. Onze ans après la création, un album commémoratif s’extasiait encore sur son interprétation par Galli-Marié : « Elle réalisait le rêve du poète, et jamais la chaste figure de l’héroïne de Goethe n’apparut plus touchante et plus lumineuse. » Ensuite, la po-lonaise de Philine, « Je suis Titania la blonde », texte absent du corpus des chansons du Wilhelm Meister mais fournis-sant un air de bravoure pour soprano colorature, obligatoire aux yeux du public parisien et accédant instantanément au répertoire des incontournables de la tessiture. Romance, barcarolle, styrienne, madrigal, rondeau en gavotte, prière : les pièces de genre s’enchaînent dans Mignon jusqu’au finale joyeux et triomphant (au prix d’une nouvelle entorse, cette fois plus conséquente, au récit de Goethe) où Mignon recon-naît sa patrie d’origine et reçoit avec transport la déclaration d’amour de Wilhelm, sous les yeux attendris de son vieux père, revenu à la raison. Dans le Paris du Second Empire, complètement accro au spectacle lyrique grandiose, Mignon fait figure de bijou dans son genre, un somptueux produit de consommation.Nous savons que l’intention première de Barbier et Carré était de rester fidèle à la fin tragique de l’histoire de Mignon dans le Wilhelm Meister. Leur projet était de le produire comme grand opéra au Théâtre-Lyrique, sis boulevard du Temple (le prédé-cesseur de l’institution qu’on connaît aujourd’hui comme le Théâtre de la Ville), où Faust avait été créé quelques années auparavant. Le refus de Meyerbeer et le peu d’expérience du «  vint ensuite  » Ambroise Thomas dans le genre du grand opéra, contraignirent les créateurs à porter leur projet à la Salle Favart. L’Opéra Comique avait ses propres conventions: l’action y était portée, non par des récitatifs entre les numéros musicaux, mais par des dialogues et, surtout, on ne pouvait y représenter une œuvre avec une fin tragique ! C’est ainsi qu’au lieu de mourir d’une ultime crise de l’espèce d’épilepsie que provoque sa jalousie maladive pour les femmes qui rivalise-raient avec elle pour l’amour de Wilhelm, Mignon apprend que Wilhelm n’aime qu’elle seule et reprend vie afin de partici-per, à gorge déployée, au trio final. Une adaptation allemande fut rapidement réalisée pour Ber-lin, avec Pauline Lucca dans le rôle-titre. La performance de la soprano autrichienne fut unanimement saluée mais la cri-tique allemande était naturellement dépitée par les libertés françaises prises avec l’original de Goethe. Ambroise Thomas eut donc l’obligeance de composer un finale plus court, res-pectant le récit de Goethe, où Mignon tombe morte dans les bras de Wilhelm. Cette nouvelle version allemande n’eut pas beaucoup plus de succès mais elle permit aux créateurs de réaliser une « version d’origine » française, qui est, avec le remplacement des dialogues par des récitatifs (tâche à laquelle Thomas s’attaqua en 1870 pour la première londo-nienne de Mignon) celle qui sera proposée au public genevois ce mois de mai 2012.« Le Mignon de Carré et Barbier n’ayant qu’une vague res-semblance extérieure au Mignon de Goethe, la tuer serait de la cruauté gratuite. » Ce commentaire facétieux du musico-logue étasunien Henry Krehbiel sur la question des finales à géométrie variable de Mignon est cependant inexact. À bien des égards, l’intrigue de Mignon est plus proche du Wilhelm Meister que ses nombreuses autres adaptations au dix-neu-vième siècle (ce qui ne veut pas dire grand chose, en défini-tive). Mignon y est ni garçon ni fille, elle y est rachetée d’une bande de bohémiens pittoresques et pugnaces, elle y devient amoureuse de Wilhelm et jalouse de sa rivale Philine (la seule des nombreuses conquêtes féminines de Wilhelm Meister à survivre à l’adaptation du roman en opéra), elle y souffre d’un mystérieux mal entre neurasthénie et épilepsie qui lui pro-voque une faiblesse de cœur redoutable, et à la fin de l’opéra,

elle reconnaît sa maison natale en Italie. Mais seuls deux des célèbres Mignon-Lieder du Wilhelm Meister passent au livret de Barbier et Carré: « Kennst du das Land? », que nous avons déjà évoqué, et « Nur wer die Sehnsucht kennt » que Thomas présente comme un duo alterné avec Lothario (le vieux har-piste Augustin chez Goethe) : « As-tu souffert, as-tu aimé ? »Au-delà des réussites (mille représentations à Paris du vivant du compositeur) et des vicissitudes (un incendie terrible et meurtrier ravagea la Salle Favart lors d’une représentation de Mignon en 1887) de la pièce et sa relative disparition du canon moderne des ouvrages lyriques, Mignon est une œuvre remarquablement accomplie sur le plan artistique et le succès qu’elle connut en son temps en font un phéno-mène culturel d’importance considérable. Après les tableaux iconiques d’Ary Scheffer et les vers oubliés de Paul Blier, Mignon fut le meilleur véhicule de la figure goethéenne dans la sphère culturelle francophone car l’œuvre eut l’ambition sincère de restituer le sens narratif et dramatique du texte d’origine, et ne se contenta pas de n’être qu’une série de vignettes. Le demi-siècle qui suivit sa création vit déferler un tsunami de productions culturelles portant l’étiquette de « Mignon » — cartes postales, pièces de théâtre, fictions narratives, sculptures, musique de salon, allusions dans des textes littéraires (dont une très frappante dans la dernière nouvelle, « Les Morts », des Gens de Dublin de James Joyce) — et la force de cette inondation de Mignons ne peut être due qu’à la totale satisfaction par Ambroise Thomas en 1866 des appétits sentimentaux de la bourgeoise parisienne, et non, hélas, au sublime génie de Goethe. ChP

(page de gauche)

Sophie Koch (Mignon) et Paolo

Fanale (Wilhelm)

(ci-dessus et ci-contre)

Scène finale du deuxième

acte, l’incendie du Château de

Rosemberg ; Diana Damrau (Philine)

entonne la célèbre polonaise.

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> MACBETH de Giuseppe Verdi DIRECTION MUSICALE : Ingo Metzmacher MISE EN SCÈNE : Christof Loy DÉCORS : Jonas Dahlberg MACBETH : Davide Damiani BANCO : Christian Van Horn LADY MACBETH : Jennifer Larmore Au Grand Théâtre,

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« Demain, et demain, et demain ! C’est ainsi que, à

petits pas, nous nous glissons de jour en jour jusqu’à la

dernière syllabe du temps inscrit sur le livre de

notre destinée. »William Shakespeare extrait de Macbeth

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chanteuse devait exprimer la monstruosité du personnage, ainsi que l’horreur qu’il doit inspirer. En conséquence de quoi, il favorisa les « scènes » plus propices à la logique théâ-trale. C’est la première utilisation de la parola scenica : « Tutto è finito » qui résume l’essentiel de l’action. Macbeth a tué le sommeil, la mort du jour n’existe plus, les deux protagonistes doivent supporter en permanence le poids de leurs crimes. Macbeth devient ainsi l’opéra des réminiscences.C’est la première fois que le compositeur se tourne vers le dra-maturge élisabéthain qui continue à inspirer des musiciens de notre temps, Giorgio Battistelli pour Richard III, Thomas Adès pour La Tempête, ou encore Aribert Reimann et son Roi Lear. Il reviendra vers lui à deux autres reprises pour Otello et Falstaff, son ultime ouvrage lyrique que seul lui pouvait concevoir et écrire. Macbeth a vu le jour pendant « les années de galère » comme il les appelait. Verdi se battait pour s’im-poser sur la scène lyrique italienne. Le sujet avait tout pour séduire un compositeur romantique comme lui, de surcroît, Shakespeare connaissait un renouveau d’intérêt au début du

B ien avant Alfred Hitchcock, Giuseppe Verdi avait su installer dans Macbeth une ambiance mystérieuse et angoissante. En dramaturge musical avisé, il élabore une intensité dra-matique qui va croissant, il suffit d’écouter

les arias ou les cabalettes de Lady Macbeth qui vont de l’air vocalisant et conventionnel d’entrée, qui permet de présen-ter le personnage, à l’air du somnambulisme (Una macchia è qui tuttora) où elle apparaît dépouillée de tout artifice. L’air semble marquer la fin de toutes les illusions et tous les espoirs pour Lady Macbeth. Cet ouvrage marque une nou-velle période musicale pour le compositeur. Il a voulu que la musique soit en phase avec le texte et pour cela il fait usage de grands moyens quitte à décevoir.En mai 1846, Verdi accepte d’écrire un nouvel opéra pour Florence dans le genere fantastico qui représentait la dernière mode en matière d’opéra. Il avait d’abord songé à Grillparzer et à Schiller avant de choisir Macbeth, une pièce où le rôle principal serait confié à un baryton, car le théâtre ne pouvait pas s’attacher le ténor qu’il voulait. Malgré les réticences de la critique, la création fut un véritable succès. Plus tard, son éditeur français, Escudier, lui demanda d’ajouter un ballet, ou deux ou trois pièces dansées. Verdi profita pour remanier l’œuvre à fond. Mais à Paris, l’opéra fut accueilli avec une re-lative froideur. En 1848, Verdi avait écrit : « Il y a deux pièces principales dans mon opéra : le duo entre Lady Macbeth et son mari, et la scène du somnambulisme. Si ces deux mor-ceaux sont abandonnés, il n’y a plus d’opéra. » L’œuvre révi-sée en 1865 gagne en force dramatique qui, à l’époque, était devenue une priorité absolue, et c’est pour cela qu’il voulait que son opéra fut presque entièrement déclamé afin de se rapprocher de l’univers shakespearien. Pour Lady Macbeth, il exigea une cantatrice « qui ne chantât pas du tout », il refu-sa Eugenia Tadolini, arguant qu’elle chantait trop bien. Mais qu’on ne se méprenne pas sur les propos de Verdi, car les preuves du bel canto sont suffisamment nombreuses dans l’ouvrage, il voulait simplement signifier que la voix de la

Macbeth is backAprès 13 ans d’absence...

par Daniel Dollé

(ci-dessus et page de gauche)

infographie 3D de la production créée

pour le Grand Théâtre en juin 2012.

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mystérieux qu’aucun philosophe encore n’a su déterminer  : celui où l’originalité de notre moi, la prétendue liberté de notre volonté se heurte au cours nécessaire du Tout. »Les propos des êtres rencontrés sur la lande, les sorcières, ont une odeur de soufre. Leurs sentences ne font qu’inquiéter et leurs propos sont ambigus. Elles diffusent des prophéties injonctives plutôt que prédictives. Elles offrent le paradigme des causes qui sèment le chaos et qui, par antithèse et inver-sion, permettent d’y confronter les conduites conformes à la norme du bien ou de l’ordre.Deux thèmes se dégagent fortement de cette œuvre, celui de la quête du pouvoir et celui des apparences, et notamment l’apparence que le pouvoir pourrait être source de bonheur. Macbeth a rencontré les sorcières, elles lui ont prédit que la forêt se déplacera, il se fourvoie, il se fait manipuler par un destin qui l’entraîne vers des abysses. Il devra attendre la mort pour apprendre la vérité. Lorsque le surnaturel fait irruption, cela devient de l’illusion. Lorsqu’on prend des informations pour ce qu’elles ne sont pas, ou confondre les apparences avec la réalité, alors on entre dans le domaine de l’illusion. Il serait erroné de considérer Macbeth comme un lâche, uniquement manipulé par son épouse, une sorte d’Ève bis qui l’oblige à goûter le fruit défendu, celui du crime. Elle est tout simplement la force motrice, celle qui active les noirs desseins de son époux. Mais au fond, Macbeth aurait-il pu être autre chose qu’un meurtrier usurpateur ? Il sait que le crime le met au ban de l’humanité, car il a transgressé la loi. Après le premier meurtre, il ne trouve plus la paix, il est poussé en avant par l’inquiétude, afin d’éliminer tout ce qui pourrait attenter à sa personne. Macbeth et son épouse de-viennent peu à peu victimes de leurs instincts, de leur aveu-glement, de leur solitude et de leur folie. Le crime les a unis, le châtiment les séparera.Macbeth nous parle de l’homme dans son infamie et reste une fleur vénéneuse, une énigme dont on n’est jamais sûr de trouver la clef. Mais il s’agit d’une histoire qui nous reste bien proche, l’Écosse moyenâgeuse de la fiction se retrouve sous d’autres latitudes. Ils n’ont plus pour nom Macbeth, la géo-graphie de l’horreur se déplace en permanence. Non, l’hor-reur n’est malheureusement pas morte.Ne prononcez pas le mot Macbeth dans un théâtre, car la légende nous apprend que cela porte malheur et voue la repré-sentation à l’échec. Utilisez une périphrase, et dites plutôt : « Je vais voir, ou écouter the Scottish play (la pièce écossaise). » Dans son périple à travers les capitales lyriques de l’Europe, Christof Loy s’arrête une nouvelle fois place de Neuve avec ses collaboratrices et collaborateurs afin de nous offrir leur vision de ce monument verdien. La scénographie impres-sionnante qui nous emporte dans un univers hitchcockien est signée par Jonas Dahlberg, nouveau venu dans l’équipe de Christof. Il s’agit d’un artiste suédois qui fait ses débuts dans le lyrique au Grand Théâtre, auteur de nombreuses expositions à travers le monde. Diplômé de l’Académie des Arts de Malmö, il est le créateur de vidéos qui sont principa-lement à base de mouvements ralentis à travers des espaces architecturaux. Gageons, qu’une nouvelle fois, Christof Loy et son équipe nous donneront une lecture théâtrale forte de ce chef-d’œuvre de Verdi, dans une ambiance mystérieuse, où, comme dans un rêve, le noir et blanc sont omniprésents et ne seront troublés que par les couleurs du ballet chorégra-phié par Thomas Wilhelm. Les murs du castel malgré leur épaisseur n’empêcheront ni les apparitions, ni la nature de faire irruption. Lorsque nous aurons dit que l’Orchestre de la Suisse Romande sera sous la direction d’Ingo Metzmacher que nous retrouverons au cours de la saga du Ring, et que Lady Macbeth sera interprétée par Jennifer Larmore entourée par une pléiade d’artistes à découvrir absolument, il ne vous res-tera plus qu’à vous précipiter pour être de l’événement. DD

XIXème siècle. Tous les ingrédients pour une grande œuvre romantique étaient réunis : les sorcières, les scènes d’hal-lucination, le grotesque et la grandeur qui s’entremêlent, il ne manquent que les histoires d’amour omniprésentes dans les ouvrages de cette période. Le désespoir et les désillusions qui s’expriment à la fin et qui vont croissant font songer à la dépression et au mauvais rêve, au cauchemar. Ils font peser une chape de plomb sur l’ouvrage et ne permettent jamais au spectateur de souffler, et ne parlons pas de sourire. Verdi s’est laissé guider par les célèbres vers de Shakespeare qui écrit : « Out, out, brief candle! / Life’s but a poor player / That struts and frets his hour upon the stage, / And then is heard no more; / It is a tale Told by an idiot, / Full of sound and fury / Signifying nothing ». (« Éteins-toi court flambeau ! / La vie n’est qu’un pauvre acteur / Qui s’agite et se pavane durant son heure sur la scène, / Et puis qu’on n’entend plus ; / C’est un conte dit par un idiot, / Plein de fracas et de furie / Et qui ne veut rien dire. »)Verdi fera dire à Macbeth au IVème acte : La vita... che impor-ta ?... / È il racconto d’un povero idiota  ; / Vento e suono che nulla dinota !Certains avaient reproché à Verdi de ne pas connaître la pièce du dramaturge élisabéthain, mais l’écoute ou la relec-ture du livret vous persuaderont du contraire. Le musicien et l’écrivain sont en phase.Shakespeare a écrit la pièce en 1605. Elle est inspirée par les chroniques de Macbeth, roi d’Écosse. Il a réuni deux récits distincts pour leur donner une coloration magique et tragique. Il condense les événements et recourt de façon intense au fantastique en incluant le surnaturel qui n’existe pas dans les chroniques. Finalement la tragédie n’a que peu à voir avec le règne du roi picte qui gouverna l’Écosse de 1040 à 1057. Shakespeare interroge les forces corruptrices du sa-voir, de l’avoir, du pouvoir, les pulsions barbares de l’homme et la destinée. Shakespeare avait su fasciner Victor Hugo, il enchanta Verdi tout comme Goethe, dans le Discours de Strasbourg : « Ses pièces tournent toutes autour d’un point

(au-dessus)

La demeure de Manderley dans

le film Rebecca d’Alfred Hitchcock

semble avoir inspiré la scénographie

de Christof Loy et Jonas Dahlberg .

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Une émotion partagée

La saison des anniversaires

M ais n’est-il pas vrai, qu’il est des nourri-tures dont on ne se lasse jamais, plus on les consomme et plus on en redemande ? La satiété n’existe pas en art qui demeure une des composantes essentielles de la

vie. Concernant les œuvres qu’on croyait connaître, on dé-couvre sans cesse de nouvelles facettes grâce aux interprètes qui les font renaître, mais également, il se crée partout des œuvres nouvelles grâce à des esprits créatifs qui permettent à l’art de rester vivant. Il nous faut également évoquer tous ces trésors qui, très souvent, sont tombés dans l’oubli par la responsabilité de quelques censeurs qui les ont jugés ininté-ressants afin de laisser la place à des ouvrages qui correspon-daient davantage à leurs critères. Quand viendra-t-il ce temps où chacun aura la possibilité et les moyens de se forger une opinion personnelle qui ne sera plus tributaire des influences

médiatiques et des goûts du moment ? Quand viendra-t-il le temps où le mot respect retrouvera tout son sens ?En 2012-2013, le Grand Théâtre vous invite à une croisière du XIXème siècle à nos jours, au cours de laquelle la fête sera omniprésente. Quatre anniversaires au cours de la saison, sans parler des 10 ans de présence de Philippe Cohen à la tête du Ballet du Grand Théâtre, ou des 50 ans de LYRIA, une association d’amis du lyrique qui depuis 50 ans fait confiance au Grand Théâtre, et vient avec ses adhérents, saison après saison, nous offrir son soutien et ses applaudissements. En commençant la présentation de la saison au personnel, aux médias et aux abonnés en fin de journée, la présidente du Conseil de Fondation, Madame Lorella Bertani a commencé par des chiffres, 300, 200 et 50, précisant qu’il ne s’agissait nullement des prix de billets, mais qu’ils représentaient les chiffres clés des anniversaires célébrés tout au long de la

Alors qu’il reste deux opéras, un concert de musique de chambre et un récital à l’affiche, le Grand Théâtre dévoile les projets de la saison prochaine...

par Daniel Dollé

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saison. En effet, il y a trois siècles naissait à Genève Jean-Jacques Rousseau, il y a deux siècles naissaient deux com-positeurs, Verdi et Wagner, qui allaient s’observer, s’inspirer et laisser une forte empreinte musicale sur le XIXème siècle. Le 10 décembre 1962, le Grand Théâtre rouvrait ses portes place de Neuve, après un exil de plus de dix ans, avec la ver-sion française de Don Carlos de Giuseppe Verdi avec Alfonso La Morena (Don Carlos), Suzanne Sarroca (Elisabeth de Valois) et un certain Gabriel Bacquier en Marquis de Posa. Heureusement, l’incendie du 1er mai 1951 avait préservé le foyer, ce qui nous permet de contempler son allure originelle.Les titres que nous avons choisis pour vous se répondent, se complètent et contribuent à célébrer tous les anniver-saires que nous venons de vous annoncer. Certains d’entre vous regretteront l’absence de Mozart, d’autres pointeront le manque du répertoire russe, d’autres encore, auraient souhaité un programme complètement différent. Mais ras-surez-vous, le Maître de Salzbourg sera bientôt de retour, et n’oubliez jamais, nous ne sommes en mesure que de vous présenter 8 titres lyriques par saison. Le choix est souvent difficile, voire crucial, lorsqu’on doit respecter de nombreux paramètres, notamment la cohérence dramaturgique de la saison, les moyens budgétaires, les capacités de produc-tion des ateliers… Viendra-t-il le temps où satisfaire tout le monde ne sera plus une chimère ? Au menu, trois ouvrages italiens, trois ouvrages français, un ouvrage allemand et une merveille slave, trop rarement jouée, des co-productions ou des productions venant des plus grandes scènes lyriques du monde, sans compter les productions réalisées dans les extraordinaires ateliers du Grand Théâtre. Qu’ à ce stade, il nous soit permis de rendre hommage à tout le personnel de l’institution qui chaque jour offre ses talents, son pro-fessionnalisme afin de fabriquer de nouveaux rêves et de nouvelles émotions. En visitant nombreux les ateliers du Grand Théâtre, vous leur avez rendu un très bel hommage, ils n’oublieront pas de sitôt vos yeux émerveillés et votre attention pour leur art. En nous accompagnant tout au long de la saison, vous retrouverez les « tubes » de l’opéra, mais également, d’autres ouvrages qu’il faut s’empresser de décou-vrir afin d’enrichir votre palette de « lyricomane » avec des choses rares et précieuses. Des stars confirmées et de jeunes talents, que vous serez peut-être les premiers à découvrir, vous attendent pour vous faire partager leur passion et leurs émotions. Il ne nous sera pas possible de nous arrêter sur toutes les facettes de ce joyau 2012-2013 que nous voulons vous faire découvrir et partager avec vous, mais permettez-nous de vous livrer quelques réflexions qui ont guidé la taille de ce nouveau bijou de fête.Une pluie d’étoiles s’abattra sur la place de Neuve. Toute la saison sera tel un bouquet final d’un feu d’artifice, les fusées seront nombreuses et colorées, elles auront des reflets d’or et d’argent. Grâce au soutien du Cercle du Grand Théâtre, à El1na Garanca, accompagnée par un orchestre, succèdera Renée Fleming. Gageons que la très célèbre mezzo nous fera revivre quelques instants une célèbre bohémienne surgie de la plume de Bizet. Vous entendrez également le grand bary-

ton français Ludovic Tézier, avant de savourer le retour de Diana Damrau, fidèle depuis plusieurs saisons à Genève. Elle se produira accompagnée à la harpe par un maître ab-solu de l’instrument, Xavier de Maistre, virtuose qui reste le premier musicien français admis au sein du Philharmonique de Vienne. La saison des récitals se terminera avec Barbara Frittoli, une autre star qu’on ne présente pas, ou plus. Qui osera encore affirmer que les stars sont rares ou absentes sur la scène de Neuve en attendant Waltraud Meier ? Grâce à vous les récitals connaissent un succès croissant. Si vous n’avez pas encore osé franchir le pas, n’hésitez pas à nous re-joindre pour goûter des plaisirs si subtils et si extraordinaires dus à la voix, cet instrument si magique.

Rousseau côtoie Rossini grâce à la plume de Philippe Fénelon et d’Ian Burton…La nature prend possession du BFML’opéra et le ballet ne seront pas en reste. En ouverture de sai-son, vous pourrez voir ou revoir Il Barbiere di Siviglia sous la baguette d’Alberto Zedda, le maître de la musique rossi-nienne, dans la production qui avait fasciné les spectateurs de tous âges. Elle sera de retour pour quatre représentations avant d’être présentée à Saint-Étienne au début de l’année 2013. Elle vous sera proposée dans la version pour mezzo-so-prano. Trois nouveaux artistes viendront rejoindre ceux que vous avez, peut-être, entendus en septembre 2010. Il s’agit de Lawrence Brownlee, un des meilleurs ténors rossiniens avec Juan Diego Flórez, de Roberto Scandiuzzi, dans le rôle de Basilio, le maître de musique, le conseiller de Bartolo, l’in-trigant toujours du côté de la bourse, et Sophie Gordeladze qui vient de rejoindre la troupe des jeunes artistes en rési-dence. Des instants de pur plaisir en perspective pour la rentrée. Le 11 septembre, nous vous donnons rendez-vous au Bâtiment des Forces Motrices pour un hommage à Jean-Jacques Rousseau, le citoyen de Genève avec JJR (Citoyen de Genève). Après avoir brûlé certains de ses écrits du temps de son vivant, Genève célèbre celui qui est né dans ses murs le 28 juin 1712. Depuis le mois de janvier les festivités du tri-centenaire de la naissance se succèdent. C’est un moment essentiel pour la vie du Grand Théâtre de pouvoir s’associer à ces manifestations et de pouvoir vous présenter une créa-tion mondiale, la première depuis l’arrivée de Tobias Richter à la direction du Grand Théâtre. Grâce à une aide supplé-mentaire de la Ville de Genève, l’institution a pu comman-der une œuvre lyrique au compositeur français, Philippe Fénelon, un élève de Messian, avec Ian Burton, le librettiste, et Robert Carsen, ils ont imaginé un ouvrage en sept scènes et un vaudeville en adoptant la structure du Devin du vil-lage, une œuvre lyrique dont Rousseau a écrit le livret et la musique. Ne perdons jamais de vue que pendant plus de 40 ans, le Citoyen de Genève a vécu au service de la musique, qu’il a pris une part active dans la Querelle des Bouffons, qu’il a développé une nouvelle notation musicale, qu’il est l’auteur du Dictionnaire de la musique, et qu’à la demande de Diderot, il participa à la réalisation de l’Encyclopédie. Philosophe du siècle des Lumières, il aura également donné de nouvelles

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spectacles se jouent à guichets fermés et le scénario de fin demeure immuable, une ovation vient saluer leurs talents et l’extraordinaire qualité de leurs performances. Leur calen-drier se remplit à une vitesse vertigineuse et de nombreuses demandes restent insatisfaites car leur mission première restera de créer à Genève de nouveaux spectacles pour nous émouvoir et nous plaire.

Mais qui est donc ce Roi Pausole ?Laissez-vous surprendre…Mais que diable vient faire Arthur Honegger en période de fêtes ? Ne serait-ce pas là une mauvaise plaisanterie de mettre à l’affiche un compositeur plutôt connu pour son austérité, alors que flotte un parfum de fête et de liesse  ? Probablement, la plupart d’entre vous sera surpris comme le public de l’époque, car notre compatriote est bien plus célèbre pour ses oratorios et ses œuvres sérieuses. Sans nul doute, on pourra observer des moues dubitatives lorsque vous découvrirez l’affiche des Aventures du Roi Pausole. Qui pourrait se douter qu’Arthur Honegger soit l’auteur de ce chef d’œuvre d’opérette en 29 numéros musicaux et des dia-logues sur un livret raffiné et plein d’esprit de son ami Albert Willemetz ? Le 12 décembre 1930, au Théâtre des Bouffes-Parisiens, Arthur Honegger surprit le monde musical avec une authentique opérette qui deviendra le plus grand succès populaire de sa carrière. N’hésitez pas à faire, l’espace d’un soir ou d’une matinée, un tour au royaume de Tryphème où règne le Roi Pausole qui veut avant tout le bonheur de son peuple. En proie à l’incertitude, il a 366 femmes, une pour chaque jour de l’année, et une prévue pour les années bissex-tiles. Le code pénal du pays est à la fois simple et complexe et se résume en deux phrases : Ne nuis pas à ton voisin. / Cela étant bien compris, fais ce qu’il te plaît.Comme bien souvent l’opérette aborde des questions plus complexes qu’il n’y paraît, le tout dissimulé derrière le non-dit et le sous-entendu. Tryphème apparaît comme le lieu des plai-sirs décomplexés grâce à un livret inspiré par Pierre Louÿs, un ami de Debussy. En 1900, ce dernier avait fait paraître un ro-man, Les Aventures du Roi Pausole, un conte philosophique qui garde un ton très XVIIIème siècle. On se croirait chez Voltaire ou Diderot. À l’époque de sa parution, on pouvait lire : Attention roman euphorisant ! Willemetz réussit un livret exquis et Arthur Honegger une partition pleine d’imagination et de jeu-nesse. Le saxophone s’y taille une place de choix. Alors pour-quoi se priver d’un tel plaisir, des clins d’œil au jazz et des allu-sions au style 1900 ? Malgré un érotisme ambiant, tout est dans le raffinement, le suggestif, la vulgarité n’a pas de place dans cet éloge de la simplicité et la condamnation de l’artifice. À dé-couvrir sans aucun doute, une œuvre confiée au jeune metteur en scène suisse, Robert Sandoz qui fait ainsi ses débuts dans le monde de l’opéra après avoir triomphé au Théâtre de Carouge avec Monsieur Chasse de Feydeau.

Le Ring est de retour…Le mois de mars 2013 marquera le début d’une colossale aventure pour célébrer le bicentenaire de la naissance de

orientations à l’art lyrique. Sept dates pour être avec nous et nos fidèles partenaires de l’Ensemble Contrechamps, car un rendez-vous avec la création ne se manque jamais.

Que serait une maison d’opéra sans Ballet ?En octobre, le Ballet tirera ses premières fusées pour des salves festives dignes de grands anniversaires. Il nous pro-posera deux grands ballets classiques. Les danseuses et les danseurs du Ballet du Grand Théâtre vous invitent à revoir Giselle. Philippe Cohen réalise ainsi son rêve depuis son arri-vée place de Neuve, car il a enfin trouvé le chorégraphe pour revisiter cet ouvrage phare du ballet romantique. Pontus Lidberg, un jeune chorégraphe dont le succès va croissant et qui avait été membre du Ballet du Grand Théâtre, nous entraînera dans sa vison de l’univers où règnent les Willis. Vingt-deux danseurs vous attendent pour vous faire partager ce conte qui ne prend pas de rides et qui semble appartenir à chaque époque qu’il traverse. À peine la compagnie et l’Or-chestre de la Suisse Romande, sous la baguette de Philippe Béran, auront-ils quitté le plateau du théâtre, que viendra le fabuleux Ballet National du Chine pour nous inviter à revoir un autre monument de la danse : Le Lac des cygnes dans une chorégraphie classique d’après Marius Petipa. Cette compa-gnie fait actuellement partie des plus grandes compagnies de danse au monde, aussi c’est un réel bonheur de pouvoir l’accueillir à Genève afin de vous présenter un ouvrage qui n’a jamais été donné sur la scène de Neuve. Un rendez-vous à noter dès à présent avec ce ballet le plus joué au monde qui nous narre le fol amour du prince Siegfried pour Odette prisonnière des maléfices du sorcier Von Rothbart. Une par-tition dont on ne se lasse pas qui révèle les aspirations et le tempérament de Tchaïkovski poursuivi par la fatalité : les amours féminines lui sont interdites.Mais les ambitions chorégraphiques ne s’arrêteront pas là. Au début de l’année 2013, nous aurons rendez-vous au BFM pour une soirée consacré à Stravinski devenu célèbre grâce aux Ballets Russes de Diaghilev. En confiant la chorégraphie du Sacre du printemps à un homme, et celle de Les noces à une femme, Philippe Cohen a souhaité faire un clin d’œil à l’époque de la création de ces deux ouvrages. Originellement Le Sacre du printemps ou Tableaux de la Russie païenne, avait été chorégraphié par Vaslav Nijinski. Mai 2013, marquera le centenaire de la création de l’œuvre. À la création des Noces, le 13 juin 1923, Ernest Ansermet dirigeait l’orchestre et la choré-graphie était confiée à Bronislava Nijinska, la sœur du célèbre danseur. À Genève Philippe Cohen invite Andonis Foniadakis et Didy Veldman, une ex-danseuse du Ballet du Grand Théâtre. D’origine néerlandaise, elle est l’invitée des grandes compa-gnies à travers le monde : Ballet Royal de Nouvelle-Zélande, Ballet Gulbenkian, Grands Ballets Canadiens de Montréal, Ballet Culberg, Rambert Dance Company, … Mais où sont les danseuses et les danseurs lorsqu’ils ne sont pas à l’affiche du Grand Théâtre ? Ils sillonnent le monde à la conquête de nouveaux fans de leur talent. Ils sont les mer-veilleux ambassadeurs du Grand Théâtre et de la Ville de Genève. Quelle que soit la latitude où se produit le Ballet, les

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Richard Wagner. Vous aurez l’occasion de partager avec nous le premier volet de la Tétralogie, le prologue du Ring des Nibelungen, Das Rheingold. L’Anneau sera complété au cours de la saison 2013-2014 et finira en apothéose avec la présen-tation de deux cycles complets présentés comme à Bayreuth. Une telle entreprise est et restera toujours un challenge pour un théâtre, nombreux sont ceux qui désireraient se lancer dans un tel projet, mais conscient de toutes les difficul-tés, ils abandonnent le projet au domaine des rêves. Nous sommes enchantés de pouvoir vous associer à cette Saga des temps anciens, mais qui reste tellement proche des réalités de chaque époque, les dieux n’ont plus pour nom Wotan, Donner, Loge, Freia ou Fricka, mais ils existent toujours, tout comme les filles du Rhin, les nornes ou les géants, et la fièvre ainsi que la convoitise de l’or demeure d’actualité.Depuis des mois, les équipes s’activent autour de ce projet qui leur tient à cœur, comme chaque projet d’ailleurs. Avec fébrilité, elles préparent un festival pour le Ring grâce à votre soutien. Pour cette aventure exceptionnelle, le Cercle du Grand Théâtre, partenaire privilégié de chaque instant, ainsi que le Credit Suisse nous rejoignent, afin de donner au pro-jet des bases saines ainsi que la sérénité nécessaire pour que le rideau se lève sur environ 16 h de spectacle. Pour visiter cette œuvre monumentale de quelques 8 000 vers et 80 leit-motive, nous avons le privilège de pouvoir compter sur une des équipes les plus chevronnées du monde théâtral : Dieter Dorn et Jürgen Rose, le complice de longue date du metteur en scène. Présents sur les plus grandes scènes internatio-nales, il ne leur manquait plus, sur leur carte de visite impres-sionnante, que le Grand Théâtre. Après Tristan und Isolde au Met et Der fliegende Holländer à Bayreuth, Dieter Dorn nous offre sa lecture théâtrale du Ring, car enfin il n’a plus la charge d’un théâtre et d’une cinquantaine d’acteurs. Une charge et une grande responsabilité qui ne lui permettaient pas de quitter son institution munichoise et d’accepter les multiples sollicitations des théâtres européens. À présent le rideau est tombé sur sa carrière de directeur du Bayerisches Staatsschauspiel, et Dieter Dorn peut se consacrer aux fi-gures intemporelles et à la magie scénique. Genève ne peut que se réjouir et s’enorgueillir de pouvoir compter sur de tels talents pour perpétrer la vocation internationale du Grand Théâtre. Vous allez également entendre et voir une pléiade d’artistes, connus ou à découvrir, qui au moment de la signa-ture de leur contrat n’avaient pas encore chanté le rôle que la scène de Neuve leur proposait. Mais, aux âmes bien nées la valeur n’attend pas le nombre des années, depuis certains d’entre eux font une carrière fulgurante dans ce répertoire et leur calendrier ne désemplit pas.

Connaissez-vous Rusalka, la naïade ?Pour clore la saison, une œuvre rare, Rusalka d’Antonin Dvorak, un conte lyrique qui pourrait être le répondant de Giselle, cependant un conte qui a plus à voir avec Freud qu’avec les contes pour enfants, encore que… Nombreux sont les com-positeurs qui se sont laissés inspirer par les légendes slaves.

Trop longtemps absente, ou jamais représentée sur la scène du Grand Théâtre, l’histoire de la sirène, de l’ondine, qui pour aimer un humain, renonce à son immortalité ne peut que sé-duire par son lyrisme et la somptuosité de son orchestre où dominent les vents et les bois. Rusalka reste toujours l’œuvre lyrique la plus populaire et la plus célèbre du compositeur.Mais que se cache-t-il derrière ce conte ? Les lectures de l’ouvrage peuvent être multiples selon l’approche dramatur-gique. Mais n’est-ce pas là l’apanage, la force de ces contes intemporels qui au-delà de leur charme premier, recèlent des problématiques plus profondes et qui empêchent le temps d’avoir prise sur eux. Qui d’entre nous n’a pas souhaité quit-ter le monde qu’il connaît pour aller chercher ailleurs le bon-heur, ou un autre bonheur ? Cependant nos nouvelles orien-tations ne répondent que très rarement à nos attentes. Aux illusions succèdent le désenchantement et bientôt, renaît le désir de retourner vers des horizons familiers, mais le retour reste souvent impossible. La naïade Rusalka a une grande fra-trie à chaque époque. L’opéra n’échappe pas aux approches psychanalytiques des fantasmes humains et des abymes qui séparent parfois les hommes, certains seront dérangés, bousculés dans leur vision de l’œuvre, d’autres s’enthousias-meront, mais nul ne pourra rester insensible à la poésie, au charme envoutant de l’ouvrage, ressenti à la création comme un ouvrage national. Nul doute, la vision de Josi Wieler et de Sergio Morabito ne laissera personne indifférent. Mais l’in-terpellation n’est-elle pas une des vocations de l’œuvre d’art. Chacun le sait, derrière de belles images se dresse une autre vérité plus complexe qu’il convient de décrypter.

Au terme de ce voyage que nous pourrions qualifier d’initia-tique, il est aisé de nous reprocher d’avoir omis de parler de deux ouvrages italiens parmi les plus populaires et qui nous tiennent également à cœur. La Traviata, donnée dix fois pour célébrer le bicentenaire de la naissance de Giuseppe Verdi et Madama Butterfly, une coproduction avec le Houston Grand Opera, une manière d’affirmer combien les coopérations avec les grandes scènes internationales sont au cœur des préoccupations du Grand Théâtre. Deux œuvres où le titre du livre de Catherine Clément, L’opéra ou la défaite des femmes, est particulièrement bien adapté. Violetta victime de la société bourgeoise et des on-dit, comme le fut Verdi lorsqu’il vivait en union libre avec Giuseppina Strepponi à Sant’Agata, et Cio-Cio-San victime de traditions ances-trales, des marieurs et de l’impérialisme américain. Sont-elles naïves, ont-elles trouvé d’autres espaces de liberté, ou d’autres valeurs, les vraies valeurs ?

D’ici quelques semaines nous dévoilerons les « plus » du Grand Théâtre et toutes les festivités qui accompagneront le cin-quantenaire de la réouverture de la salle de Neuve. Mais n’ou-bliez pas, une fête sans vous serait bien insipide et que c’est avec vous que nous voulons partager les émotions. Le Grand Théâtre vous accueille, escaladez rapidement les quelques marches qui vous séparent du rêve et de la féerie. DD

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R êver et être sur terre en même temps, telle pourrait être la devise des danseurs du Ballet du Grand Théâtre de Genève qui sont sur les routes une bonne partie de l’année. Car, partir en tournée, c’est comme conquérir d’autres

continents au travers des théâtres qui nous accueillent, et la rencontre d’un public à chaque fois différent, avec ses re-pères artistiques, sa sensibilité, son histoire.Cette mise en danger permanente requiert de la part des danseurs une maîtrise quasi absolue de leur art car, si les théâtres désignent un contexte, la scène, elle, est ce qui se passe dans et par le danseur. Et c’est cette lente alchimie qui conduit l’interprète à un essentiel : incarner et transcender le geste qui dit l’émotion d’être au monde. Et c’est cette émo-tion teintée de virtuosité et d’humanité qui conquiert les publics des cinq continents.Mais en dehors de la dimension artistique et de la gratifica-tion de porter les couleurs de Genève à travers le monde, les tournées sont aussi l’occasion de s’enrichir des architectures rencontrées, de découvrir des nouveaux modes de vie, de se nourrir différemment, que la nourriture soit terrestre ou spi-rituelle… Ouvrir ses horizons encore et toujours, ne jamais se figer dans un seul mode de pensée, rester attentif aux autres…. En somme, une école de la vie ! Voilà pour la partie artistique et humaniste des tournées.Mais une tournée c’est aussi savoir gérer la fatigue des voyages, le décalage horaire, les heures passées sur les routes en bus, gérer une proximité permanente avec ses collègues de travail… Un exemple pour illustrer ce que représente une tournée : mercredi 11 avril 2012 11 heures du matin, la com-pagnie s’envole pour Los Angeles. Après 16 heures de voyage, arrivée à 18 h, heure locale soit 3 heures du matin pour nous. Jeudi 12 avril, 11 heures du matin, les danseurs se retrouvent au théâtre pour la classe et la première répétition sur scène jusqu’à 18 heures. Vendredi 13 avril, classe et répétition de midi à 17 h 30 et première représentation à 19 h 30, soit 4 h 30 du matin pour les danseurs…  En tant que directeur, com-ment ne pas être admiratif de l’énergie des danseurs et de leur foi en leur art ! Le spectacle est un triomphe, et c’est de-bout que les 2800 spectateurs du « Music Center » acclament le Ballet du Grand Théâtre de Genève !Enfin, le descriptif serait incomplet si on ne parlait pas des moments de détente indispensables au bon équilibre de chacun. Mais là, il y a la partie visible comme les rencontres autour des piscines de certains hôtels, les repas conviviaux dans les restaurants typiques… Quant à la partie invisible, le directeur ne peut rien en dire car elle entre dans la sphère privée de chacun, mais il est convaincu qu’avant l’extinction des feux, la « troisième mi-temps » bat son plein… PC

Le ballet en balade mondialepar Philippe Cohen, directeur du Ballet du Grand Théâtre

(dans le sens des aiguilles d'une montre)

Les tournées 2011-2012 du Ballet du

Grand Théâtre : la marquise du Joyce

sur Broadway arbore le nom de Genève ;

les affiches du Music Center de Los

Angeles et du Grenada Theater de Santa

Barbara ; Vitorio Casarin, adjoint du

directeur du Ballet, profite d'un rayon

de soleil ; la coupole de la salle de

l'opéra de Reims ; le décor du Roméo et

Juliette de Joëlle Bouvier à Taormine et

quelques moments de délire en drag

sur Times Square.

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BureauMme Françoise de Mestral, présidenteM. David Lachat, vice-président M. Gabriel Safdié, trésorier Mme Véronique Walter, secrétaire

Autres membres du comitéMme Diane d’ArcisS. A. S. la Princesse Andrienne d’ArenbergM. Luc ArgandM. Friedrich B. BusseMme Muriel Chaponnière RochatM. Gerson WaechterM. Pierre-Alain Wavre

Membres bienfaiteursM. et Mme Luc ArgandMme René AugereauM. et Mme Guy DemoleFondation de bienfaisance de la banque PictetGonet & Cie, Banquiers PrivésM. et Mme Pierre KellerMM. Lombard Odier Darier Hentsch et CieM. et Mme Yves OltramareMrs Laurel Polleys-CamusSFG - Société Fiduciaire et de Gérance SAUnion Bancaire Privée – UBP SAM. Pierre-Alain WavreM. et Mme Gérard Wertheimer

Membres individuelsS.A. Prince Amyn Aga Khan Mme Diane d’ArcisLL. AA. SS. Le Prince et la Princesse Etienne d’ArenbergMme Dominique ArpelsMme Véronique BarbeyMme Christine Batruch-HawrylyshynM. et Mme Gérard BauerM. et Mme Pierre BenhamouM. et Mme Philippe BertheratMme Antoine BestMme Saskia van BeuningenMme Françoise BodmerProf. Julien BogousslavskyM. Jean BonnaM. Alain BoucheronComtesse Brandolini d’AddaMme Robert BrinerM. et Mme Yves BurrusM. Friedrich B. BusseMme Caroline CaffinMme Maria Livanos CattauiMme Muriel Chaponnière-RochatMme Anne ChevalleyM. et Mme Neville CookM. Jean-Pierre CubizolleM. et Mme Alejandro DahlhausM. et Mme Claude DemoleMme Virginia Drabbe-SeemannGrace, Countess of DudleyM. et Mme Olivier DunantMme Denise Elfen-LaniadoMme Maria EmbiricosMme Diane Etter-SoutterMme Catherine Fauchier-MagnanMme Clarina FirmenichMme Pierre FollietMme Pierre-Claude FournetM. et Mme Eric FreymondMme Elka Gouzer-WaechterMme Bibi GrittiMme Claudia GroothaertM. et Mme Philippe Gudin de La SablonnièreM. et Mme Philippe JabreMme Marie-Josèphe JacquetM. et Mme Jean KohlerMme Maria Pilar de La BéraudièreM. et Mme Pierre de LabouchèreM. David LachatM. Marko LacinMe Jean-Flavien Lalive d’EpinayM. Christian Langlois-MeurinneM. et Mme Pierre Lardy

Mme Michèle LarakiM. et Mme Guy LefortMme Eric LescureM. et Mme Thierry de LoriolMme Eva LundinM. Ian LundinM. Bernard MachMme France Majoie Le LousM. et Mme Colin MaltbyM. Thierry de MarignacMme Mark Mathysen-GerstM. Bertrand MausMme Anne MausM. Olivier MausM. et Mme Charles de MestralM. et Mme Francis MinkoffM. Pierre G. MirabaudM. et Mme Bernard MomméjaM. et Mme Christopher Mouravieff-ApostolMme Pierre-Yves Mourgue d’AlgueM. et Mme Trifon NatsisMme Laurence NavilleM. et Mme Philippe NordmannM. et Mme Alan ParkerM. et Mme Shelby du PasquierMme Sibylle PastréM. Jacques PerrotM. et Mme Gilles PetitpierreM. et Mme Charles PictetM. et Mme Guillaume PictetM. et Mme Ivan PictetM. et Mme Jean-François PissettazMme Françoise PropperMme Ruth RappaportMme Karin RezaM. et Mme Gabriel SafdiéComte et Comtesse de Saint-PierreM. Vincenzo Salina AmoriniM. et Mme René SanchezM. et Mme Paul SaurelM. et Mme Julien SchoenlaubMme Noëlie SchoenlaubBaron et Baronne SeillièreM. Thierry ServantMarquis et Marquise Enrico SpinolaMme Christiane SteckMme Isabelle StoffelsM. André-Pierre TardyM. et Mme Riccardo TattoniM. et Mme Kamen TrollerM. Richard de TscharnerM. et Mme Gérard TurpinM. et Mme Jean-Luc VermeulenM. et Mme Olivier VodozM. Gerson WaechterMme Véronique WalterM. et Mme Lionel de WeckMme Paul-Annik Weiller

Membres institutionnels1875 Finance SAActivgest SAChristie’s (International) SAFondation BNP Paribas SuisseFondation BruFondation de la Haute HorlogerieGivaudan SAH de P (Holding de Picciotto) SAJT International SA Lenz & StaehelinMandarin Oriental, GenèveMKB Conseil & CoachingMM. Mourgue d’Algue & Cie, GenèveNotz, Stucki & Cie, SALa Réserve, GenèveSGS SAOrgane de révision : Plafida

REJOIGNEZ-NOUS !Nous serions heureux de vous compter parmi les passionnés d’arts lyrique et chorégraphique qui s’engagent pour que le Grand Théâtre de Genève conserve et renforce sa place parmi les plus grandes scènes européennes.Adhérer au Cercle du Grand Théâtre, c’est aussi l’assurance de bénéficier des avantages suivants :• Priorité de placement• Service de billetterie personnalisé• Echange de billets• Dîner de gala à l’issue de l’Assemblée Générale• Cocktails d’entractes réservés aux membres• Voyages lyriques• Conférences thématiques « Les Métiers de l’Opéra »• Visites des coulisses et des ateliers du Grand Théâtre. Rencontre avec les artistes• Possibilité d’assister aux répéti-tions générales• Abonnement au journal ACT-O• Envoi des programmes• Vestiaire privé

Pour recevoir de plus amples informations sur les conditions d’adhésion au Cercle, veuillez contacter directement :Madame Gwénola Trutat (le matin, entre 8 h et 12 h)T + 41 022 321 85 77 F +41 022 321 85 [email protected] Cercle du Grand Théâtre de Genève Boulevard du Théâtre 11 1211 Genève 11

Fondé en 1986, le Cercle du Grand Théâtre s’est donné

pour objectif de réunir toutes les personnes et

entreprises qui tiennent à manifester leur intérêt aux

arts lyrique, chorégraphique et dramatique. Son but

est d’apporter son soutien financier aux activités

du Grand Théâtre et ainsi, de participer à son

rayonnement.

Le carnet du Cercle

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DIANE D'ARCIS

L’échange avant tout

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Diane d’Arcis, comment êtes-vous devenue membre du Cercle ?

DdA Je suis abonnée au Grand Théâtre depuis une trentaine d’années et j’ai rejoint le Cercle en 2002. J’avais entendu parler du Cercle par des amis et ma curiosité a été éveillée. Je sou-haitais m’impliquer concrètement dans la vie culturelle ge-nevoise et particulièrement au Grand Théâtre, cette institu-tion qui m’est très chère, de manifester mon soutien et de me familiariser avec le répertoire moderne que je connais moins. L’accueil chaleureux qui m’a été témoigné et l’ouverture qu’offre le Cercle sur de multiples horizons m’ont convaincue du rôle fondamental que joue cette association pour mainte-nir le rayonnement du Grand Théâtre sur la scène genevoise et au-delà. Ce dernier aspect me tient très à cœur puisque mon activité professionnelle s’est déroulée dans les milieux internationaux.

Parmi vos souvenirs relatifs au Grand Théâtre et au Cercle, quels sont ceux qui vous sont les plus chers.

DdA Le souvenir de la magnifique et bouleversante réalisa-tion de Peter Grimes de Benjamin Britten en 2009 reste bien vivant dans ma mémoire par sa force dramatique et musi-cale. Dans cet opéra, le conflit se situe entre Peter Grimes, le rôle-titre, et la communauté d’un village de pêcheurs de la côte sud-est de l’Angleterre. Comme je suis anglaise et qu’il s’agit là d’événements pris au vif de l’histoire de mon pays, j’ai été particulièrement sensible à cette œuvre. Stephen Gould excellait dans le rôle-titre, avec sa voix puissante et une diction impeccable. Tous les solistes, d’ailleurs, ont don-né la plénitude de leur grand talent. Les chœurs, admirables, sont présents tout au long du spectacle en groupes plus ou moins nombreux ; ils sont aussi un « acteur » incontour-nable dans cet opéra. Un autre souvenir qui reste très vivant est le voyage organisé par le Cercle en 2009 au Festival de Glyndebourne à l’occasion du 75e anniversaire du Festival. Un bonheur musical ! Nous avons pu assister à deux opéras : The Fairy Queen de Henry Purcell (direction musicale par William Christie) et Giulio Cesare de George Frideric Handel (direction musicale de Laurence Cummings et mise en scène de David McVicar). Danielle de Niese triomphait dans le rôle de Cleopatra et Stéphanie d’Oustrac interprétait bril-lamment le rôle de Sesto. Nous étions dix-sept membres du Cercle : un magnifique souvenir de promenade dans cette campagne bucolique d'Angleterre aux alentours du théâtre ; une très grande joie partagée !

Le Cercle est un groupe de soutien du Grand Théâtre mais aussi un cercle d’amis, est-ce un élément impor-tant pour ses membres ?

DdA Certainement, car nous sommes tous passionnés d’arts lyrique et chorégraphique avec le « common denomina-tor » de partager et de soutenir cette belle maison qu’est le Grand Théâtre. Le Cercle organise régulièrement des cycles de conférences au cours desquelles l’on rencontre parfois quelques protagonistes ou quelques autres artistes ou arti-sans d’une production particulière. Par ailleurs les cocktails d’entracte sont des moments privilégiés pour échanger nos impressions et nos émotions de vive voix, ce qui resserre les liens entre les membres présents.

Le financement privé du Cercle est essentiel pour le Grand Théâtre, pensez-vous qu’un renouvellement na-turel des membres est possible ?

DdA À l’heure actuelle et dans un contexte économique de plus en plus incertain, il devient indispensable et essentiel de faire les démarches qui fidéliseront nos mécènes. Par ailleurs, si le Grand Théâtre veut conserver la qualité de son opéra (reconnue largement au-delà de notre cité), l’apport financier extérieur en est une condition sine qua non. Le nombre de ses abonnés dé-pend aussi de cette qualité ! Depuis sa création, chaque saison, le Cercle offre une importante contribution au Grand Théâtre. Les efforts du Cercle doivent donc impérativement se poursuivre.

Vous avez sans doute d’autres activités culturelles ou des passions, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

DdA Je suis aussi passionnée par l’histoire de l’art, notam-ment par l’art moderne et par le contemporain. Les déplace-ments lyriques qu’organise le Cercle me donnent ainsi l’occa-sion de visiter des expositions à l’étranger.

Que vous inspire la nouvelle saison annoncée fin avril ? Avez-vous déjà en tête des spectacles à ne rater sous aucun prétexte ?

DdA En tant qu’abonnée, je me réjouis de chacun des spectacles. En tant que membre du Cercle, je fais entièrement confiance au choix des spectacles que le Cercle a décidé de soutenir. Lorsque les chœurs du Grand Théâtre participent aux productions, je relève avec plaisir leur constante qualité. La saison prochaine, ballets et concerts me semblent très prometteurs.

Un entretien avec Albert Garnier

Stephen Gould dans Peter Grimes

de Benjamin Britten sur la scène de

Neuve en 2009. Un moment d’une

force dramatique et musicale unique

pour Diane d’Arcis.

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« Le chant est l’aboutissement de l’expression d’une personnalité.Le miroir de soi-même. »Waltraud Meier

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en 1980, pour la première fois, dans une mise en scène de Jean-Pierre Ponnelle, une référence pour la mise en scène ly-rique au XXe siècle, un maître qu’elle garde en mémoire et qui l’a fortement impressionné : « J’ai eu tout de suite la chance de travailler avec les très grands…  Avec eux, les mises en scène étaient toujours fortes et donnaient le sens de l’œuvre…» Si elle a une profonde admiration pour Patrice Chéreau, tous les metteurs en scène ne trouvent pas le même crédit à ses yeux, notamment ceux dont elle considère les productions stupides. Si elle est, sans conteste, une grande cantatrice, elle est également une extraordinaire actrice, ce qui se comprend aisément lors qu’on connaît sa prédilection pour le théâtre et le cinéma qui passent avant l’opéra.Pour cultiver la souplesse mélodieuse de sa voix, qui de vraie mezzo est devenue plutôt une voix de soprano dramatique, elle aborde régulièrement le domaine du lied avec une rare subtilité. Elle est le lied, comme elle est Isolde ou tous les personnes qu’elle incarne avec la même fougue et un excep-tionnel charisme. Au crépuscule d’une saison et dans la perspective de nouvelles aventures lyriques, Waltraud Meier vous invite à un programme somptueux qui nous fait parta-ger les univers de Schubert, Schumann et Mahler dont nous entendrons quelques mélodies sur des textes Des Knaben Wunderhorn (Le Cor enchanté de l’enfant), pour terminer avec les cinq Rückert Lieder, dont Liebst du um Schönheit (Si tu aimes pour la beauté)

Liebst du um Schönheit,O nicht mich liebe!…. Liebst du um Liebe,O ja, mich liebe!Liebe mich immer, Dich lieb’ ich immerdar.

Pendant des mois, Mahler avait hésité à épouser Alma dont la beauté et le charme le fascinaient et l’effrayaient à la fois. En 1902, il met le poème en musique qui devient un message d’amour pour sa jeune épouse. Il cache le manuscrit dans la partition de Siegfried qu’Alma a coutume de déchiffrer. Hélas, pendant plusieurs jours, elle n’ouvre pas la partition. La dé-ception du compositeur est grande, et il décide de provoquer la découverte. Le manuscrit tombe de la partition. Ensemble, ils le jouent au piano. Alma découvre ce lied «  intime entre tous  ». Fortement impressionnée, elle le joue et le rejoue, dans son journal intime, elle avoue qu’elle en a presque pleuré et prend, une nouvelle fois, conscience de l’incommensurable richesse de Gustav Mahler. Un lied subtil jusque dans les der-niers détails à l’image de la cantatrice qui portent les mots et les sentiments au paroxysme.Nul doute que vous serez nombreux à vouloir partager un nouveau moment exceptionnel, et à retrouver cette perfec-tion et cet immense talent pour clore une somptueuse sai-son de récital qui pourrait laisser augurer une prochaine édition tout aussi grandiose. Décidément, les grandes stars se donnent rendez vous sur la scène de Neuve. N’hésitez pas à les rejoindre. DD

Dans le célèbre journal allemand Die Welt on pouvait lire : « Pour Waltraud Meier, la plus grande chanteuse wagné-rienne actuelle, la beauté vocale n’est pas une fin en soi, mais un moyen d’expression artistique. » Lorsque l’artiste est à l’affiche sur toutes les grandes scènes du monde, le public se presse, les guichets sont encombrés et connaissent les embouteillages rares des grands jours. Personne ne voudrait rater une occasion pour entendre ou réentendre cette artiste qui irradie le firmament des grandes stars. Comédienne sen-sible et magicienne, elle ouvre les portes d’un monde mer-veilleux et sublime, celui du chant, de l’art. Certes, elle est, et reste une grande mezzo-soprano wagnérienne, mais une telle définition serait trop réductrice pour cette vedette qui possède le talent de nous transporter en-dehors du temps et de l’espace. Wagner a rapidement pris une place impression-nante dans sa carrière, mais n’oublions pas qu’elle a chanté Elvira, Cherubino, Dorabella de Mozart, Carmen de Bizet, Marie de Wozzeck d’Alban Berg, Leonora de Fidelio, Jeanne d’Arc dans La Pucelle d’Orléans de Tchaïkovski, ou encore Marguerite dans La Damnation de Faust de Hector Berlioz. Pour qui veut connaître la véritable émotion, doit aller l’en-tendre et la voir en scène.C’est dans sa ville natale de Würzburg que Waltraud Meier fait ses débuts, à vingt ans, en chantant le rôle de Lola dans Cavalleria rusticana de Mascagni. En 1980, elle débute sa carrière internationale à Buenos Aires dans le rôle de Fricka (Das Rheingold et Die Walküre). Cependant, sa propulsion vers le zénith des célébrités ne viendra que trois ans plus tard. Après avoir remporté un concours de jeunes chanteurs, elle obtient, en 1976, des places pour le Ring du centenaire dirigé par Pierre Boulez et mis en scène par Patrice Chéreau. Cette expérience sera déterminante dans le choix de son répertoire wagnérien. Audacieuse, elle ose, en 1980, auditionner pour le Festival de Bayreuth, elle est engagé pour chanté le rôle de Kundry dans Parsifal sous la direction de James Levine, mis en scène par Götz Friederich. Elle aurait voulu chanter Fricka ou Waltraute, et on lui propose Kundry qui lui paraissait alors impossible. Le regretté Wolfgang Wagner, le maître des lieux, parvient à la persuader du contraire. Elle accepte, elle va suc-céder à Leonie Rysanek sur le verte colline, excusez du peu. Désormais, commence la phase ascensionnelle vertigineuse de sa carrière. Les portes des plus grands théâtres s’ouvrent pour elle. Pendant 17 ans, elle chante à Bayreuth. Grâce à sa puissance vocale expressive, elle bouleverse les auditoires. Le chant wagnérien n’a plus, ou peu de secrets pour elle, car de-puis le début de sa carrière, elle a inscrit 17 rôles des œuvres de Richard Wagner à son répertoire.Avant d’aborder Kundry à Bayreuth, elle le chanta à Cologne,

Lorsque l’immense cantatrice paraît, tout fait silence, chacune et chacun succombe à son charme et se trouve séduit par cette artiste à la fois simple, amicale et mystérieuse.

Si tu aimes pour la beauté,O, ne m’aimes pas!…Si tu aimes pour l’amour,O, oui, aimes moi!Aimes moi toujours,Je t’aimerai pour toujours.

La beauté de WagnerWaltraud Meier chante Schubert, Schumann et Mahler

par Daniel Dollé

Son calendrier23 mai 2012 Les Nuits d’Été (Hector Berlioz) Orchestre National de Paris Dir. mus. : Philippe Jordan Opéra de Paris

1er, 6 et 9 juin et 22 juillet 2012 Wozzeck (Alban Berg) Dir. mus. : Kent Nagano Bayerische Staatsoper, Munich

23 juin 2012 Schubertiade Schwarzenberg 2012 Récital : Liederabend Piano : Joseph Breinl Angelika-Kauffmann-Saal, Hohenems, Allemagne

29 juin 2012 Wesendonck-Lieder (Wagner) Dir. mus. : Kent Nagano Bayerische Staatsoper, Munich

1er juillet 2012 Wesendonck-Lieder (Wagner) Rheingau Musik Festival Radio-Sinfonieorchester Berlin Dir. mus. : Marek Janowski Kurhaus, Wiesbaden, Allemagne

13 juillet 2012 Concert Récital La 9ème symphonie (Beethoven) West Eastern Divan Orchestra Dir. mus. : Daniel Barenboim Terrasses du Château, Versailles

27 juillet 2012 Concert Récital La 9ème symphonie (Beethoven) West Eastern Divan Orchestra Dir. mus. : Daniel Barenboim Royal Albert Hall, Londres

30 octobre 2012 Opéra version concert Fidélio (Beethoven) Gastspiel Bayerisches Staatsorchester Dir. mus. : Kent Nagano Théâtre des Champs-Élysées, Paris

Son dernier enregistrementMAHLER Das Lied von der Erde

Waltraud Meier Siegfried Jerusalem

Chicago Symphony Orchestra Dir : Daniel Barenboim Erato, 2011 B004RQO0FO

> WALTRAUD MEIER Mezzo-soprano RÉCITAL PIANO : Joseph Breinl Au Grand Théâtre,

20 juin 2012 à 20 h

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Sami Kanaan, le 30 mars vous avez lancé la Journée européenne des métiers d’art à Genève. Quand et com-ment avez-vous pris connaissance pour la première fois de cet événement?

SK Les Journées européennes des métiers d’art ont été initiées en France en 2002. Cette année, ces Journées se sont dérou-lées entre le 30 mars et le 1er avril et elles se sont développées en Espagne, Italie, Belgique et pour la première fois en Suisse, à Genève. L’an prochain, d’autres pays proposeront certaine-ment ces Journées, comme au Portugal ou en Irlande. L’objectif premier de ces Journées est de mettre en lumière, l’espace de quelques jours, toutes les professions créa-trices, celles qui imaginent, alimentent, restaurent notre patrimoine collectif. Leurs savoir-faire, leurs maîtrises tech-niques, leurs spécialités sont extrêmement rares, précieuses, mais aussi bien souvent méconnus du grand public. Ce sont ces professionnel-le-s qui font l’excellence, le rayonnement et l’exception de nos institutions culturelles, théâtres, mu-sées ou bibliothèques. Les métiers d’art sont indispensables à leur fonctionnement, et les professionnel-le-s interagissent

également, bien plus qu’on ne le pense, avec l’ensemble des secteurs économiques. Arrivé à la tête du Département de la culture et du sport, j’ai rapidement pris connaissance, à travers de nombreuses visites et rencontres, de la richesse que signifiait ce « patri-moine vivant  ». L’idée d’organiser des journées de ce type permet non seulement de partager avec la population la découverte de cette palette de professionnel-le-s atypiques et très souvent passionné-e-s, mais elle s’inscrit également dans une démarche d’ouverture générale des institutions de la Ville de Genève afin de provoquer la rencontre avec un public qui ne franchit pas forcément toujours le pas. Durant mon mandat, je souhaite continuer à faire sortir la culture de ses murs institutionnels, mais de la même manière, provo-quer des rencontres plus inattendues entre créateurs, artiste, artisans et grand public.

Un magistrat en charge de la culture qui aborde l’art par « l’artisanat », c’est insolite ?

SK Aborder l’art par « l’artisanat » n’a ainsi rien d’insolite. Il s’agit simplement de reconnaître et de valoriser les profes-sionnel-le-s qui se cachent derrière les productions lyriques, les expositions ou encore les accès à des œuvres restaurées.C’est une manière de valoriser toutes celles et tous ceux qui participent aux créations, mais qui ne saluent jamais le public à l’issue des spectacles, qui ne sont jamais applaudis. Pourtant, leur capacité à innover, leurs compétences, leur investissement, leurs facultés d’adaptation font que sans eux, rien ne serait possible. Ils allient avec brio compétences techniques et artistiques, qu’ils ou elles soient tapissiers-ac-cessoiristes, menuisier-e-s, cordonnier-e-s, costumier-e-s, perruquier-e-s, serrurier-e-s et j’en oublie plein d’autres !

Quels étaient les défis de cette journée?

SK Le défi majeur dans cette organisation était de réussir à toucher les divers publics cibles. Il s’agissait de cibler premiè-

Pour la première fois à Genève dans le cadre des Journées européennes

des métiers d’art, la population était invitée à découvrir de l’intérieur les

métiers d’arts durant une journée qui leur a été dédiée, le vendredi

30 mars 2012. Le public a pu visiter la quinzaine d’ateliers du Grand

Théâtre de Genève, dans le cadre d’un circuit émaillé de diverses

démonstrations et activités.

Un entretien avec Sami Kanaan, Conseiller administratif pour la culture et le sport de la Ville de Genève, par albert Garnier

La création pour tous !Premières Journées européennes des métiers d’art en Suisse

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ou de la Fête de la musique, je pense que ces occasions sont excellentes pour que la population s’invite dans un lieu dont le prestige, la somptuosité des spectacles, les lumières ou la taille peuvent intimider. Au-delà des vocations que susciteront peut-être ces visites chez certain-e-s jeunes, des découvertes des lieux et du tra-vail réalisé en amont de toutes les productions, j’espère sin-cèrement que ces visites donneront envie au public présent de revenir, de voir le résultat d’un costume en cours d’éla-boration, la concrétisation en taille réelle d’une maquette de décor, ou d’aller reconnaître sur scène à quoi servait finale-ment l’accessoire créé avec tant de minutie. Enfin, le Grand Théâtre de Genève a déjà une longue tradi-tion de visites publiques. Je pense particulièrement à celles organisées en faveur des classes scolaires, via le service péda-gogique, en collaboration avec les professionnels du plateau,

le chœur ou le ballet, mais aussi à celles qui sont organisées pour le public abonné. Ces expériences ont été alors très utiles à la mise sur pieds de cette Journée dans ces lieux. Aussi, l’engouement suscité conforte ma volonté de déve-lopper ces Journées des métiers d’art dès l’année prochaine, dans d’autres lieux, comme les musées et les bibliothèques de la Ville de Genève, mais également dans d’autres insti-tutions culturelles publiques ou privées que j’encouragerai à participer à ce projet. Elles regorgent également de nom-breux métiers d’art à découvrir !

Comment s'est déroulé l’organisation et la collabora-tion avec le Grand Théâtre de Genève ?

SK Très bien ! J’ai été très touché par l’accueil réservé par tous les ateliers. Cela a suscité beaucoup d’enthousiasme à l’interne ce qui démontre une volonté manifeste de faire découvrir le travail en cours, mais également leurs plus belles pièces, les trésors, les éléments qui ont nécessité temps, ingé-niosité. Je tiens ici leur rendre hommage et à remercier toutes celles et tous ceux qui ont partagé leur talent et leur passion !

rement les jeunes et surtout, les jeunes en formation profes-sionnelle. Ce sont peut-être eux qui demain s’ouvriront à une de ces voies d’excellence, qui repose sur la transmission des savoirs et des savoir-faire. Mais les portes étaient ouvertes à toutes et tous, aussi bien aux séniors, qu’au public élargi. Pour notre grand plaisir, cette Journée découverte des ateliers a connu un très grand succès avec 820 visiteuses et visiteurs inscrit-e-s en pas moins de 48h ! Le retour a été excellent pour cet événement qui se voulait gratuit, public, ouvert. Le succès a été tel, que nous avons du refuser de nombreuses demandes.Le second défi consistait à recueillir l’adhésion des travail-leuses et travailleurs de l’ombre. J’avais bien conscience des impératifs de délais auxquels ils doivent répondre, afin que les spectacles en cours et à venir puissent être prêts dans les temps. J’ai été agréablement surpris du temps, de l’appropria-

tion et de la générosité dont ils ont fait part envers le public et qui ont permis le succès de cette Journée. Concernant le financement de cette opération, je tiens à saluer et à souligner l’excellente collaboration avec la Manufacture Vacheron Constantin qui nous a soutenus dans ce projet. Ce partenariat public-privé, sur un projet concret, a été exemplaire et j’espère vivement que des suites pourront y être données.

Le choix du Grand Théâtre s’imposait-il ?

SK La reprise du concept français a débuté cette année au Grand Théâtre de Genève, comme première expérience. Mon choix s’est opéré logiquement vers cette institution phare de la Ville de Genève parce que c’est celle qui concentre la plus grande diversité et la plus grande richesse des métiers d’art dans la région. Mais c’est aussi une institution qui doit aussi déployer beau-coup d’efforts pour inviter le public à franchir ses portes, à oser entrer et à faire connaître plus largement ses activités. À l’instar des Journées de la danse, des Journées du Patrimoine

La création pour tous !Premières Journées européennes des métiers d’art en Suisse

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L a production, par le Grand Théâtre, de l’opéra Elektra en novembre 2010 a été le point de dé-part du projet de collaboration avec le Centre Interfacultaire en Sciences Affectives de l’Uni-versité de Genève (CISA). Les objectifs étaient

d’évaluer la pertinence des méthodes développées au CISA pour mesurer les émotions des spectateurs et, plus précisé-ment, pour comprendre leurs réactions émotionnelles à des performances lyriques. D’autres expérimentations ont été menées ou seront menées pendant la saison 2011-2012. Durant la pré-générale de Richard III de Giorgio Battistelli en janvier 2012, les chercheurs ont cherché à connaître com-ment, lors d’un opéra, les émotions du public sont affectées par leur propre connaissance de la musique et de l’intrigue. Pour ce projet expérimental, 45 personnes ont assisté à la pré-générale de Richard III et ont été invitées à indiquer les émotions ressenties pendant l’opéra ainsi que l’intensité des émotions ressenties lors d’une scène spécifique. Avant la représentation, ils ont été séparés en trois groupes. Le pre-mier groupe a suivi une introduction sur l’intrigue et la mise en scène, le deuxième sur la musique et le troisième n’a eu aucune introduction. L’analyse préliminaire des résultats montre une tendance à ressentir plus fréquemment et plus intensément des émotions positives pour les participants ayant bénéficié des introductions. Inversement, les émotions négatives ont été ressenties moins fréquemment et moins intensément par les deux groupes de participants qui ont suivi les introductions. Ces premiers résultats tendent à confirmer l’importance d’offrir aux spectateurs des occasions de mieux connaître une œuvre avant d’assister à la représentation de celle-ci. Notons que le Grand Théâtre organise déjà, depuis plusieurs années, en marge des spectacles, de nombreuses conférences et des cours. Des informations sur les œuvres sont également disponibles sur le site web et des documents pédagogiques sont spécialement édités pour chaque opéra à l’attention du jeune public. Profiter de cette offre rend véritablement l’expé-rience émotionnelle encore plus intense!La seconde partie de cette expérimentation, initiée avec Richard III, est d’ores et déjà prévue lors de la générale de l’opéra Macbeth de Giuseppe Verdi, le 11 juin prochain. Elle visera aussi à comprendre comment les émotions du public sont affectées par leur propre connaissance de la musique, de l’intrigue et de la réalisation scénique. Plus particulièrement, quelle est l’influence sur le ressenti émotionnel de la connais-sance d’un moment précis de l’opéra.Une semaine après cette expérimentation et pour clore cette

Le trouble des sens (II)

L es émotions sont des états mentaux et physiques qui répondent à des stimuli ou à des événements consi-

dérés comme pertinents pour un individu. Ces états sont produits suite à un proces-sus complexe d’évaluation de la situation qui prend en compte les diverses consé-quences possibles. Mise à part la capacité de définir une situation comme pertinente pour un individu, ce processus d’évaluation gère simultanément des changements aus-si bien psychologiques que physiologiques et qui le préparent à réagir à une situation donnée. Il s’agit, par exemple, de réactions physiques (la variation des rythmes car-diaques, la transpiration), de l’expression émotionnelle (ex-pressions faciales ou vocales), des actions compor-tementales (le départ en courant en cas de danger) ainsi que de divers processus mentaux. Il est important de souligner que ces épi-sodes émotionnels sont relativement brefs (de l’ordre de la seconde) et sont ressentis pour un objet particulier ou dans une situa-tion spécifique.Cette définition de l’émotion s’applique à un sous-ensemble particulier d’émotions nommées les émotions utilitaires. La co-lère, la crainte, la joie, le dégoût, la tristesse, la honte ou la culpabilité en sont des exemples. Elles sont considérées comme utilitaires car elles permettent à l’individu de s’adapter rapidement à un événement

qui contribue à améliorer son bien-être. Toutefois, la palette des émotions vécues quotidiennement est plus large que les seules émotions utilitaires. Il y aussi les émotions dites esthétiques.Les émotions esthétiques jouent un rôle primordial dans le ressenti d’une œuvre musicale ou d’une œuvre d’art. Elles inter-viennent dans des situations où la survie ou le bien-être ne sont pas les préoccupations premières de l’individu. Ces émotions ne semblent donc pas être déclenchées pour répondre à un but spécifique lié au bien-être corporel de la personne, mais par la qualité intrinsèque d’un objet ou d’un événement.Dans une série d’études, nous avons ainsi

pu démontrer que la musique va produire plus fréquemment des émotions esthétiques que des émotions

utilitaires. Les chercheurs du CISA ont développé, dans le cadre de ces études, le Geneva Emotional Music Scale (GEMS). Cet outil de recherche regroupe une série de termes émotionnels, ressentis en écoutant de la musique et qui se distinguent très clai-rement des émotions utilitaires. L’échelle comporte trente-six émotions classées en douze catégories, à savoir: l’étonne-ment, la transcendance, la tendresse, la nostalgie, la sérénité, le pouvoir, la joie, la tension, la tristesse, les sentiments esthé-tiques, la connaissance des sentiments et l’ennui.

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26 27 ACT.0 | N°5 | Le magazine du grand ThéâTre de genève | SaiSon 10 | 1 1 SaiSon 10 | 1 1 | Le magazine du grand ThéâTre de genève | ACT.0 | N°5

assister à un spectacle d’opéra est une expérience synes-thésique, qui met en jeu plusieurs sens et des capacités cognitives liés aux différentes expressions artistiques : la musique, la voix humaine, le texte littéraire, la peinture et la sculpture, les lumières et les couleurs, la danse, les gestes et les mouvements dans l’espace. mais, dans un opéra, tout se fond sur la musique, sur sa capacité de construire un monde sonore qui unifie et donne du sens aux autres expressions artistiques et constitue le véhicule qui transporte le publique dans une expérience cognitive et émotionnelle d’une grande profondeur.d’où vient cet extraordinaire pouvoir émotionnel de la musique ? La musique constitue un phénomène ubiquitaire et très ancien  ; aucune culture connue, actuelle ou historique, n’est dépourvue de musique. Si les formes musicales, les pratiques vocales et instrumentales, les rôles sociaux montrent une très grande diversité, cela ne masque pas l’existence de certains caractères communs à toutes les cultures, lies à la manière d’organiser et comprendre les phénomènes sonores, ce qui fait penser à une base au même temps biolo-gique et socioculturelle. Le phénomène musical a toujours été interprété en termes émotionnels car la musique semble porter, produire, repré-senter et induire des états émotionnels d’une grande intensité. Les musiciens, les philo-sophes, comme les histo-riens et les théologiens, ce sont interrogés sur la nature de ce phénomène, sur les mécanismes qui le produisent, sur les moyens techniques et formels qui en sont la cause. depuis quelques décen-nies, les développements techniques et méthodo-logiques de la recherche scientifique, et notam-ment les méthodes de la psychologie expéri-mentale et l’imagerie biomédicale ont permis d’étudier d’une manière beaucoup plus appro-fondie les phénomènes physiologiques, psycho-logiques et cognitifs liés à la musique. il s’agit d’un important travail interdisciplinaire (neurobiologistes, psychologues, philo-sophes, historiens, musiciens, musicologues, artistes), qui permet d’étudier le phénomène musical et son évolution biologique et culturel de points de vue différents et com-plémentaires.il y a beaucoup d’éléments sonores qui semblent avoir un pouvoir émotionnel spécifique en soi : le timbre seul d’une voix ou d’un instrument peut nous émouvoir, un rythme lent et un contour mélodique descendant nous parle de tristesse et de mélancolie, des changements de dyna-mique entre blocs sonores puissants créent de la tension

et de l’énergie. Le but de la recherche scientifique et musi-cologique sur le pouvoir émotionnel de la musique est ce-lui d’isoler et comprendre les mécanismes physiologiques et psychologiques avec lesquels chaque élément musical, chaque dimension de la musique et leur combinaison peuvent produire ou décrire une émotion spécifique. et, au même temps, il s’agit de comprendre les émotions esthétiques et épistémiques produite par la perception et la compréhension de l’intégralité d’une ouvre musicale ou d’un opéra.définir la nature du pouvoir émotionnel de la musique comporte un ensemble de questions entrelacées  : quels sont les mécanismes d’action du pouvoir émotionnel de la musique  ? Sont-ils physiologiques, psychologiques ou socioculturels  ? de quelle manière la musique peut-elle produire et communiquer des émotions auprès du compo-siteur, de l’interprète et de l’auditeur ? Quelle est la nature des émotions transportées ou produites par la musique ? Sont-elles identiques, ou très similaires, aux émotions ordinaires ? Ou sont-elles d’une différente  nature?

Les recherches sur la base causale et la nature du pouvoir expressif de la musique comme des implications pour son pouvoir de régulation de contrôle ont été dans l’histoire centrées au-tour d’un nombre limité de théories de base. une théorie souligne le rôle des associations entre un morceau particulier de musique et les expé-riences individuelles ou collectives. un second type d’idée affirme que la musique est un objet cognitif et la réponse émotionnelle est pro-duite par la musique et par sa structure in-trinsèque, exactement comme les émotions produites par la beauté d’une peinture ou d’une œuvre littéraire. une autre idée suggère un étroit parallélisme entre le processus corporel et cognitif lié aux émo-tions, et notamment leur expression, et la structure ou la forme de la musique. Ces posi-tions sont vivement dis-cutées et font objets de la recherche actuelle.

un phénomène particulièrement intéressant est la carac-térisation émotionnelle souvent attribué à la musique (agitée, tendre, calme, triomphante, abandonnée, joyeuse, ennuyeuse, etc.). L’utilisation d’un langage émotionnel en musique semble être justifiée par la correspondance méta-phorique entre deux formes de mouvement: l’expression corporelle des émotions et la dynamique de la musique. On peut caractériser une figure musicale comme ‘triste’, par exemple le tétracorde mineur descendant à l’époque baroque, si elle permet à l’auditeur de reconnaître dans ces caractères des analogies avec les mouvements corporels et

Le Pôle de recherche national en Sciences AffectivesFondé le 1er septembre 2005, le Pôle

de recherche national en Sciences

Affectives (PRN Sciences Affectives), est

l’un des vingt-huit Pôles de recherche

nationaux en Suisse f inancés par la

Confédération helvétique et administrée

par le Fonds National Suisse de la

recherche scientif ique (www.snf.ch).

Il est le premier centre national de

recherche au monde dédié à l’étude

interdisciplinaire des émotions et

de leurs effets sur le comportement

humain et la société. Il est dirigé par

le Professeur Klaus Scherer et géré

administrativement par le Centre

Interfacultaire en Sciences Affectives

(CISA) de l’Université de Genève.

Le PRN Sciences Affectives travaille

sur les mécanismes de déclenchement

et de contrôle des émotions, ainsi que

sur leurs influences dans les relations

interpersonnelles et les interactions

sociales. Il offre aussi un programme

ambitieux de formation doctorale et

postdoctorale, qui vise à former une

nouvelle génération de chercheurs, et

est impliqué dans divers partenariats

avec des acteurs privés et publics.

Le PRN Sciences Affectives regroupe

environ 120 chercheurs des Universités

de Genève, Neuchâtel, Fribourg, Berne

et Zurich, dans dix projets de recherches

fondamentaux ainsi que dans des « Foci »

de recherche. Ces derniers rassemblent

des scientif iques issus de différents

domaines sur une même thématique de

recherche. La musique est, par exemple,

l’un des points d’intérêts majeurs du

Focus sur les émotions esthétiques.

La collaboration avec le Grand Théâtre

s’inscrit, dans le cadre de ce Focus, dans

une volonté de décrire les processus

émotionnels en lien avec le monde de la

musique. Elle vise à mieux comprendre

quelles sont les émotions spécif iques à

la musique et quels sont les mécanismes

psychologiques et corporels impliqués

dans la perception des émotions

musicales.

Dans ce but, une première

expérimentation s’est tenue le 6

novembre 2010 lors de la pré-générale

d’Elektra avec une quarantaine

d’étudiants. Les résultats de cette

enquête permettront de caractériser

les émotions ressenties pendant l’opéra

et de les comparer, dans un deuxième

temps, avec des données émotionnelles

liées à d’autre type de musique.

www.affective-sciences.org

Le trouble des sens

Le pouvoir émotionnel de l'opéra

Ita volo ipsum sim et liqui

quamus molenda ndenim

eos dolesec epuditiberum

fugitiorum, nemoloris rem-

pore peraecumquia vel

inctotatias ipic tem qui dem

quia perumqu amust, abori

nonsenducia quatusdae.

Itationseni blaccum untet

volest acero quam, coriae

voluptatem. Et ulpa conserf

ercimet mo ius

Des moments d'intenses émotions ces dernières années au Grand Théâtre

pour certains d'entre vous. Rappelez-vous Madame Butterfly (97-98),

Cio-Cio San (Chen Sue) dans la scène finale.

Mariella Devia (Konstanze) dans L'Enlèvement au sérail (95-96).

Hamlet (96-97), Ophélie (Natalie Dessay) et Hamlet (Simon Keenlyside).

Le Tour d'écrou (02-03) dans l'acte I, Ciara Power de dos (Flora), Emma Bell

(Miss Jessel) et Joan Rodgers (La Gouvernante).

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Cette étude sur le pouvoir émotionnel de l’opéra fait suite à la publication d’un premier article dans notre numéro 5 d’ACT-O en décembre 2010. Nous suivons, cette fois, les expérimentations du Pôle de recherche en sciences affectives sur Richard III, Der Rosenkavalier et Macbeth.

par Klaus Scherer & Bernardino Fantini, professeurs à la Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation de l'université de Genève

Une émotionc’est quoi ?

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riche collaboration, un colloque sera organisé au Grand Théâtre les 15 et 16 juin 2012 sur le thème des émotions chez Shakespeare et dans les opéras tirés de ses œuvres. À cette occasion, les résultats des expérimentations menées lors des représentations de Richard III et de Macbeth seront présentés et discutés. Nous essayerons ainsi de comprendre comment les émotions ressenties se réfèrent à la musique, à la narra-tion et ou encore au moment historique.Lors de la représentation de Der Rosenkavalier de Richard Strauss, le 25 mars dernier, l’étude menée par le CISA s’est concentrée sur l’influence du facteur de localisation. Les ex-périences émotionnelles vécues par les spectateurs (retenus dans le premier groupe de l’expérimentation) lors de la repré-sentation seront comparées avec les réponses d’un second groupe de spectateurs qui assisteront, dans un laboratoire (et non au Grand Théâtre), à la projection d’un enregistrement audio-visuel de l’opéra. Le but est ici de comprendre l’impact émotionnel que suscite une représentation vécue en direct, dans une salle comme celle du Grand Théâtre de Genève, par rapport aux émotions ressenties pour la même performance artistique mais dans un tout autre contexte (laboratoire, à la maison, dans la télévision, etc.).Toujours dans le cadre de cette expérience, les réponses émo-tionnelles de deux groupes de « spectateurs en laboratoire » seront comparées : le premier groupe assistera à une projec-tion audio-visuelle de l’opéra tandis que le second groupe en-tendra uniquement une version audio de celui-ci. L’objectif est d’analyser, de manière indépendante, l’influence de la musique d’une part et de l’intrigue d’autre part sur les réponses émotion-nelles des participants et ce, en fonction de l’environnement.

Le Pôle de recherche national en Sciences AffectivesFondé le 1er septembre 2005, le Pôle de recherche national en Sciences Affectives (PRN Sciences Affectives), est l’un des vingt-huit Pôles de recherche nationaux en Suisse financés par la Confédération helvétique et administrée par le Fonds National Suisse de la recherche scientifique (www.snf.ch). Il est le premier centre national de recherche au monde dédié à l’étude interdisciplinaire des émotions et de leurs effets sur le comportement humain et la société. Il est dirigé par le Professeur Klaus Scherer et géré administrativement par le Centre Interfacultaire en Sciences Affectives (CISA) de l’uni-versité de Genève. Le PRN Sciences Affectives travaille sur les mécanismes de déclenchement et de contrôle des émotions, ainsi que sur

leurs influences dans les relations interpersonnelles et les interactions sociales. Il offre aussi un programme ambitieux de formation doctorale et postdoctorale, qui vise à former une nouvelle génération de chercheurs, et est impliqué dans divers partenariats avec des acteurs privés et publics. Le PRN Sciences Affectives regroupe environ 120 chercheurs des universités de Genève, Neuchâtel, Fribourg, Berne et Zurich, dans quinze projets de recherches fondamentaux ainsi que dans des « Foci » de recherche. Ces derniers rassemblent des scientifiques issus de différents domaines sur une même thé-matique de recherche. Un de ces « Foci » porte sur l’étude du pouvoir émotionnel de la musique et des émotions. Quatre axes de recherche y sont principalement développés : les types d’émotions pro-voquées par la musique, l’influence respective des facteurs individuels, contextuels et culturels sur les expériences émotionnelles provoquées par la musique, les bases neu-robiologiques des émotions déclenchées par la musique et, finalement, les similitudes et différences entre les expres-sions vocales et instrumentales de l’émotion. L’approche de recherche choisie vise à impliquer des chercheurs aussi bien en sciences humaines qu’en sciences dures. Ce « Focus » bénéficie ainsi de la participation de philosophes, psycho-logues, neuroscientifiques, musicologues, ethnomusicolo-gues, historiens, médecins et artistes, ainsi que d’instituts culturels comme des salles de concerts et des festivals de musique. (Plus d’informations sur www.affective-sciences.org/node/2980)La collaboration avec le Grand Théâtre s’inscrit dans une volonté d’analyser et de comprendre les processus émotion-nels liés avec le monde de la musique et ce, quel que soit le contexte (en concert ou dans la vie de tous les jours). Elle participe à mieux comprendre quelles sont les émotions déclenchées par un opéra, quels sont les mécanismes psy-chologiques et corporels impliqués dans la perception de ces émotions, quel est le rôle respectif de la musique, de l’his-toire et des aspects visuels, et quelles sont les éventuelles différences quant aux émotions ressenties par le public lors d’une performance vécue en directe ou via un enregistre-ment audio-visuel. D’une manière générale, les expériences menées au Grand Théâtre ont pour intention d’analyser la façon dont les émo-tions sont reproduites et véhiculées par la musique, en pre-nant en compte l’influence des changements culturels et des styles musicaux spécifiques à travers le XIXème et le XXème siècle. Elles visent ainsi à comprendre comment la structure musicale est utilisée pour exprimer ces émotions. KS & BF

Richard III (Tom Fox) et Lady

Anne (Marion Ammann) dans la

production de Richard III mis en scène

par Robert Carsen au Grand Théâtre

en janvier 2012.

Octavian (Alice Coote) et Sophie

(Kerstin Avemo) dans la production

de Rosenkavalier mise en scène par

Otto Schenk au Grand Théâtre en

avril 2012.

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La Fondation Neva, baptisée ainsi en hommage à la rivière qui baigne la ville de Saint-Pétersbourg, a été fondée en 2008, à Genève, par la famille Timtchenko afin de renforcer les liens entre la Russie et la Suisse et de mettre en œuvre active-

ment des projets d’échange culturel dans les domaines artis-tique, scientifique, humanitaire et sportif. Qu’il s’agisse des écrivains, des peintres ou des musiciens, les artistes ont joué un rôle important dans l’Histoire de la Russie et la Fondation Neva souhaite partager avec le public suisse les trésors de cette culture en soutenant des projets emblématiques. Afin de créer des ponts entre nos deux cultures, la Fondation Neva a conclu avec l’Orchestre de la Suisse Romande un partenariat qui a permis à cet ensemble renommé de se pro-duire en Russie en février 2012. Sous la direction de Marek Janowski, son directeur artistique depuis 2005, l’OSR a inter-prété les œuvres de Weber, Schumann et Franck et rempor-té un grand succès devant le public de la Philharmonie de Saint-Pétersbourg et de la Salle Tchaïkovski à Moscou. Cet événement marquera son histoire. Car, étonnamment, l’OSR,

fondé en 1918 par Ernest Ansermet et qui possède tant de liens avec les plus célèbres compositeurs et interprètes russes, ne s’était jamais produit en Russie auparavant. L’an dernier, au Grand Théâtre de Genève, la Fondation a soutenu l’opéra comique de Sergueï Prokofiev L’Amour des trois oranges, inspiré d’une fable italienne de Carlo Gozzi avec une mise en scène de Benno Besson et Ezio Toffolutti.Dans le domaine théâtral, avec le concours du Théâtre de Carouge, la Fondation a invité, à l’automne 2011, l’un des plus grand metteur en scène russe, Piotr Fomenko, et sa troupe mythique. Là aussi, avec un immense succès qui nous fait penser que, malgré la barrière de la langue, il fallait permettre au public genevois de découvrir ce créateur exceptionnel.Autre projet théâtral, en partenariat avec le Théâtre de Vidy à Lausanne, au mois de mars 2012, la Fondation a offert son appui à une création conjuguant le théâtre, la danse et la musique. En prenant pour matériaux de base un poème de Maïakovski, une pièce de Cocteau et le célèbre opéra de Gluck, le metteur en scène Vladimir Pankov, figure de proue de la nouvelle génération d’artistes russes, a présenté au public romand une création d’envergure autour de la figure d’Orphée. Par ce mélange de cultures les artistes russes, suisses et les danseurs du Rudra Béjart Ballet ont réalisé une œuvre pour l’avenir du théâtre. La Fondation accorde de l’importance au théâtre contemporain, car le futur, nous le construisons aujourd’hui.Mais notre action s’inscrit aussi dans la continuité. Dans le domaine scientifique, la Fondation Neva et l’EPFL ont ins-tauré une collaboration inédite avec la Russie dans la lutte contre le diabète. Ce projet de recherche dans le domaine de la chimie bio-organique et de l’imagerie moléculaire, unit

Un engagement fortFondation Neva

pour la culture, la science et le sport

Grâce au fidèle soutien de la Fondation Neva, la culture russe a été présente fin avril à Genève avec le ballet en deux actes Anna Karenina d’après l’œuvre de Léon Tolstoï.

Mme Elena Timtchenko ,

présidente de la Fondation Neva

Février 2012 , concert de l’OSR à la

Philharmonie de Saint-Pétersbourg

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les scientifiques russes de la Perm State Pharmaceutical Academy et les chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne. Grâce au financement de la Fondation Neva, l’EPFL a pu créer une nouvelle chaire dans cette discipline. Quant au sport, la Fondation Neva soutient le tournoi inter-national Genève Futur Hockey Challenge. Lancé au printemps 2011, ce tournoi permet à 500 jeunes de quatre continents de partager leur passion commune pour le hockey et de se mesurer lors de joutes de haut niveau. Ces rencontres offrent également à ces jeunes sportifs l’occasion d’échanges enrichissants et multiculturels, dans un esprit de partage et d’amitié. D’autres projets seront annoncés prochainement, car les es-poirs dans tous ces domaines sont immenses. La Fondation remplit ainsi son rôle de mécène pour les initiatives en accord avec ses valeurs que sont le partage, la créativité et le progrès.

L e ballet en deux actes Anna Karenina, composé par Rodion Chtchedrine en 1972, s’inspire du chef d’œuvre homonyme de Léon Tolstoï. Le célèbre

roman, publié en 1877 et inspiré d’un fait divers réel, sou-lève les questions universelles du sens du bonheur, et de la liberté mais aussi de l’opposition entre le conformisme et la passion, et entre l’amour et la trahison. Le compositeur, qui jouit d’une grande renommée en Russie et dans le monde, a écrit cette œuvre pour sa femme, la danseuse étoile russe Maïa Plissetskaïa, qui a incarné le rôle titre avec le Ballet du Bolchoï. Le chorégraphe, Alexei Ratmansky, a été directeur artis-tique du Ballet de Bolchoï et a réalisé de nombreuses chorégraphies pour l’Opéra de Paris ou l’American Ballet Theatre. La venue à Genève de la compagnie de ballet du Théâtre Mariinski, l’une des plus prestigieuses au monde, qui se produisait pour la première fois sur la scène du Grand Théâtre, et l’illustre orchestre du Théâtre Mariinski sous la direction musicale de son chef Valery Gergiev, tout autant réputé mondialement, ont été un moment culturel fort de ce printemps.

De l’universalité de la liberté et du bonheur

(ci-contre à gauche)

Novembre 2011, Piotr Fomenko et

sa troupe au Théâtre de Carouge

(en-dessous)

Mars 2012, Le Syndrome d’Orphée au

Théâtre de Vidy-Lausanne

(ci-dessus)

Avril 2012, Svetlana Ivanova (Kitty) et

AlexeÏ Timofeyev (Constantin Levine)

dans Anna Karenina au Grand Théâtre

de Genève

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ARTS & CULTURERECHERCHE SCIENTIFIQUEHUMANITAIRE

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M a relation à Genève remonte à plus de 30 ans. Tout a commencé en 1983, année de mon premier concert, au Victoria Hall. J’avais des concerts avec le City of Birmingham Symphony Orchestra.

Je me suis retrouvé sept ans plus tard dans la même salle, mais cette fois-ci à la tête du légendaire Orchestre de la Suisse Romande, pour une série de concerts de fin de sai-son. Ce n’est qu’en 1993 que j’ai pu véritablement me rap-procher des musiciens, lors du 75ème anniversaire de l’OSR, pour l’enregistrement de cinq CDs d’un cycle Stravinsky, effectué lors des répétitions en 1993 et puis des séances d’enregistrement de studio l’année suivante. J’ai le souvenir de musiciens vifs, bien qu’étonnés par ma façon de travail-ler. Mais ils se sont adaptés très vite, comme seuls les grands professionnels savent le faire. Nous avons repris des œuvres que l’OSR avait créées, par exemple Le Chant du rossignol, mais les membres de l’orchestre de l’époque n’avaient plus tellement l’habitude du style stravinskien. Le résultat parle de lui-même : époustouflant ! Et toutes mes idées précon-çues à propos des musiciens suisses francophones se sont envolées quand j’ai demandé d’enregistrer le Circus Polka à la dernière minute, profitant d’un bout de temps libre à la fin d’une séance. Les délégués de l’orchestre m’ont d’abord ex-pliqué que c’était impossible, imprévu, « on ne change pas le planning comme ça », personne ne savait où se trouvaient les partitions, et d’autres choses encore. Je leur ai fait un grand sourire, j’ai haussé les épaules et les sourcils, puis j’ai émis un petit « Oh ! » suppliant – et les délégués ont fait l’impossible.Malgré mon absence entre 1994 et 2010 (sans compter les invitations de mes fils Paavo et Kristjan), année où j’ai été nommé directeur artistique et musical de l’OSR, j’ai toujours gardé une affection et une admiration particulières pour cet orchestre. Grâce à mon expérience de première main, mais aussi à sa réputation incontestable, je sais que l’OSR possède une âme qui est le produit de sa tradition mais aussi de l’en-gagement personnel de chacun des musiciens et de la rigu-

eur dans leur travail. Je suis sensible au fait que l’orchestre est soutenu d’une façon exceptionnelle par sa communauté, et cet engagement contribue sans aucun doute à leur succès.Mon plus grand souhait est d’inspirer les membres de l’OSR par ma passion pour la musique et de les encourager à se laisser emporter par un élan artistique qui est seulement possible grâce à leurs bases techniques solides. Un mot me vient tout de suite à l’esprit quand je fais de la musique : c’est le mot « joie », et je me réjouis de partager cette émotion avec mes amis romands.Nous mettrons un accent tout particulier sur le renouvelle-ment du répertoire, avec une volonté de faire découvrir des perles oubliées. Il y a mes compositeurs de prédilection issus des pays scandinaves et baltes, mais aussi des œuvres moins connues sorties de la plume des compositeurs de renom. J’ai une faiblesse pour les bis, même lors des concerts d’abon-nement, et nous trouverons des occasions pour monter des programmes résolument festifs. Les compositeurs vivants ont toujours occupé une place d’honneur dans l’histoire de l’OSR, et je suis heureux de pouvoir prolonger cette tradition.Il n’y aura pas la moindre diminution d’activité au niveau des enregistrements discographiques ou des tournées, bien au contraire. Nous travaillons sur plusieurs projets concrets cette année, principalement autour des œuvres de Joachim Raff et d’Emmanuel Chabrier, et d’autres seront développés pour les années à venir. L’OSR joue un rôle primordial au Grand Théâtre de Genève depuis des décennies, en accompagnant huit productions par année. Les musiciens sont stimulés par cette dualité. J’espère pouvoir participer à un opéra à Genève bientôt, car rares sont les occasions de diriger un orchestre aussi bien dans le répertoire symphonique que lyrique.En Estonie, nous disons, Kis hiljaks jääb, sii ilma jääb, kis kaua magab, see kahjatseb, soit « Celui qui arrive en retard recevra rien, celui qui dort trop longtemps le regrettera ». Je me ré-jouis de profiter du temps que je passerai avec les musiciens de l’OSR : nous le vivrons pleinement. NJ

Ma passion pour l’OSR

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R ares sont les maisons d’opéra qui offrent également une programmation de ballet. Encore plus rares celles qui maintiennent une saison lyrique en même temps que la grande tradition du corps de ballet, héritée de l’époque des premiers opéras français, où la danse occupait une place aussi importante dans l’œuvre que le chant: l’Opéra de Paris, le Bolchoi, le Corpo di ballo de La Scala... La plupart des grands théâtres lyriques ont choisi une solution de compromis, avec des compagnies de plus petite taille et une pratique de la danse moins atta-

chée aux formes et au répertoire classique, à l’image de Genève et du Ballet de son Grand Théâtre. Mais ne serait-ce pas plus logique et économique de simplement séparer les deux genres, lyrique et chorégraphique, leurs salles, leurs programmations? Eh non, parce que depuis la nuit des temps, cachée dans la jungle des grandes scènes, il existe des tribus dont la raison d’être est leur passion exclusive pour la danse, et pas toujours par intérêt artistique. Depuis les dandys parisiens du Jockey Club sous le Second Empire, planqués derrière la scène de l’Opéra dans le Foyer de la Danse pour voir évoluer les ballerines de près et s'en faire des maîtresses jusqu'aux innombrables fans des beaux yeux d’un Benjamin Millepied, venus par le biais du cinéma et de la pub pour participer au star-effect lors des créations de ce talentueux chorégraphe... Le public de la danse est une ethnie bien distincte, mais indissociable des tribus de l’opéra. Son âge, en général moins canonique (tout comme ses goûts vestimen-taires) et son attitude plus détendue quant au décorum habituel des grands théâtres la définissent comme un cas à part... Entre la blancheur anorexique et éthérée du spectre romantique d’Adolphe Adam et le pantin borderline, causeur de rixes et de polé-miques, que Stravinski lâcha sur les Parisiens désabusés, le public du ballet se reconnaît à ses fétiches.

L a tribu des amateurs de la musique dite ancienne (à savoir, tout ce qui a été composé avant 1760), que les plus mainstream du public d’opéra appellent, non sans un certain dédain, les « baroqueux », sont une tribu apparue assez

récemment dans l’ethnographie du lyrique. Mais ils ont vite acquis une masse critique suffisante pour agacer les inten-dants et directeurs de maison d’opéra qui, sans être particu-lièrement convaincus par les tragédies lyriques de Rameau, ou les opere serie de Haendel, se sentent obligés de les ajouter à leur programmation ou en tout cas d’excuser leur absence par des révérences dignes d’une entrée de ballet de Lully. Les opéras baroques posent des dilemmes scéniques (perruques poudrées et éclairage à la bougie ou fripe post-moderne et mise en scène Regietheater ?) et musicaux (instruments anciens? diapason baroque? dimensions de la salle ?...). Ils sont souvent chers à monter (tous ces ballets à intégrer aux parties chantées, ça alourdit vite la note) et sont inconnus au bataillon, ne pesant pas lourd contre des Traviata ou des Lohengrin. Malgré ces obstacles, les « baroqueux » sont des acharnés et leurs clameurs de castrat survolté sont de plus en plus difficiles à ignorer. Surtout quand les chanteurs qui exécutent le répertoire « classique » ont aussi de plus en plus de rôles baroques à leur actif...

Avançant toujours plus loin dans la forêt plus si vierge que ça de l’opéra et du ballet, les envoyés spéciaux d’ACT-O ont découvert de nouvelles peuplades, identifiables par leurs fétiches choisis parmi le bestiaire lyrique et chorégraphique. Et c'est ainsi que nos explorateurs se préparent à rentrer de leur périlleuse expédition et que se concluent...

Les Giselle et les Petrouchka

Des textes de Christopher Park et des illustrations de LUZ

Les Boréades et les Alcina

Les tribus de l’opéra

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Les Veuves Joyeuses et les Orphées aux Enfers

C omme la tribu de la danse, le clan des ado-rateurs de la muse légère a souvent des lieux de culte distincts dans le monde de l’opéra, portant des noms équivoques, trahissant leur parti pris pour le bon temps et l’absence

de prise de tête : Théâtre des Variétés, Le Comédia, La Zarzuela, Le Mogador, The D'Oyly Carte, The Hippodrome, Le Casino-Théâtre, les Bouffes Parisiens... Les amateurs d’opérette sont plus Phi-Phi que Phidias, plus La Belle Hélène que Liebestod et préfèrent la rengaine polis-sonne à l’aria da capo. Et malgré leurs vers de mirliton et leurs fréquentes escapades aux limites de l’humour potache ou porno-graphique, les opérettes ont tout de même leurs lettres de noblesse et le talent de compositeurs comme Lehár et Offenbach est tout sauf lé-ger. L’opérette, comme bien d’autres plaisirs dits « cou-pables », a de nombreux amateurs dans le placard. On la dédaigne comme genre mineur de sa grande sœur lyrique mais program-mez-en une et c'est salle comble garantie... C'est ainsi que les mêmes nobles scènes habituées aux Pelléas et Mélisande pourraient bien vous proposer, pour la saison festive, une œuvre moins connue mais certainement moins barbante, dans le genre de Pédéraste et Médisante...

Les tribus de l’opéra Les Einstein sur la plage et les Trois Soeurs

E ntre la smala de la musique sérielle, la maison des minimalistes, la phratrie des polystylistes, le catalogage de cette tribu de l’opéra, la dernière que nos intrépides explorateurs ont rencontré dans leur périple aux terrae incognitae de l’art lyrique, leur a donné bien du fil à retordre. Tout opéra a été, au moins une fois au début de sa carrière, contemporain. Et nous savons que les créations lyriques ont suscité de tous temps des polémiques esthétiques, dramatiques, politiques... Mais dites « opéra contemporain » au plus grand nombre des abonnés des maisons lyriques et c'est la débandade. Ils feraient bien de se rappeler que des grands noms comme Gluck, Wagner ou Debussy ont eu aussi maille à partir avec le

goût de leur temps... Disons, pour simplifier un peu, que la tribu de l’opéra contemporain se reconnaît par sa capacité d’encaisser une musique qui ne sonne pas comme de la musique (atonale, percussive, électro-acoustique, voire silencieuse), un chant qui ne sonne pas comme du chant (Sprechgesang, modulations, glissandi, onomatopées, chromatismes, voire silence), et des configurations orchestrales qui n’ont souvent pas grand chose à voir avec les orchestres conventionnels (ondes Martenot, bandes magnétiques, pianos préparés, pou-belles et truelles de maçon, voire instruments silencieux)... et cela pendant des périodes de temps qui feraient peur à ceux qui se délectent de deux heures et demi de Donizetti. Pourtant, lorsqu'un contemporain comme Peter Eötvös propose sa version ly-rique d’un monument de la scène moderne dû à la plume de Tchékhov, il ne fait rien d’autre que suivre l’exemple d’un Mozart et d’un Rossini qui s'étaient emparés des textes révolutionnaires de Beaumarchais... Et les cinq heures sans entracte d’Einstein on the Beach de Philip Glass ont intégré à l’expérience dramatique la liberté pour le public de sortir et de rentrer dans la salle ad libitum, l’affranchissant de sa condition « prisonnière » de simple spectateur. En fin de compte, cette tribu des avant-gardistes si mal-aimée ne propose-t-elle pas aux peuples du lyrique une importante leçon de savoir-vivre? ChP

(suite et fin)

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V ous fréquen-tez l’opéra de Genève ? Un peu, beau-coup, assi-

dûment, pas du tout ? Vous rêvez de rencontrer des artistes lyriques qui vous ont fait vibrer  ou tout sim-plement de pénétrer pour la première fois dans la véné-rable institution de la place Neuve pour danser ? Alors la journée du 12 mai 2012 est incontestablement la vôtre car cette année, un heureux hasard de calendrier fait que la Fête de la danse et les Journées européennes de l’Opéra ont lieu simulta-nément. Et le Grand Théâtre de Genève, haut lieu de l’art lyrique et chorégraphique de Suisse romande y participe bien évidemment. La Fête de la danse est une manifestation nationale initiée en 2006 par Reso (Réseau danse suisse) à Zurich. Le Grand Théâtre de Genève y participe depuis 2007, année de la pre-mière édition genevoise, en accueillant des cours mais aussi le grand bal, qui est devenu au fil des éditions, l’événement phare de la manifestation. Aujourd’hui, la Fête de la danse est organisée dans toute la Suisse. De leur côté, les opéras d’Europe et au-delà ouvrent, chaque année, leurs portes à l’occasion des Journées européennes de l’opéra. Depuis 2010, le Grand Théâtre de Genève ouvre les siennes et vous invite à découvrir l’art lyrique et ses coulisses. Les présentations étant faites, penchons-nous à présent sur le programme de cette journée. Tout au long de l’après-midi, vous pourrez écouter, dans le cadre intime de la salle de répétition du chœur du Grand Théâtre, plusieurs artistes accompagnés par Reginald Le Reun, pianiste et chef de chant maison. Vous aurez notam-ment le plaisir de partager un moment d’exception avec deux interprètes de l’opéra-comique d’Ambroise Thomas Mignon à l’affiche du Grand Théâtre du 9 au 20 mai 2012 : la mezzo-soprano genevoise Carine Séchaye, membre de la Troupe des jeunes solistes en résidence du Grand Théâtre de Genève (de 14 h15 à 15 h15) et le ténor sicilien Paolo Fanale qui fait ses débuts sur la scène de la place de Neuve dans le rôle de Wilhelm Meister qu’il chante pour la première fois (de 16 h 30 à 17 h 30). Vous pourrez également rencontrer deux artistes du chœur du Grand Théâtre en assistant à une séance de travail de la chorale des enfants sous la direction de la soprano Fosca Aquaro (de 15 h 15 à 16 h 15) et en par-ticipant au voyage musical que vous propose l’alto Varduhi Khachatryan (de 17 h 45 à 19 h).Vous aurez la liberté de bouger votre corps, dès 12h30, en suivant des cours de danses classique, contemporaine, fla-menca, orientale ou encore japonaise qui auront lieu sur la

scène, dans les foyers et au studio Balanchine occupé généra-lement par le ballet du Grand Théâtre. De 12 h 30 à 14 h, vous pourrez, par exemple, participer à un atelier chorégraphique animé par Nathanaël Marie, danseur au sein du Ballet du Grand Théâtre. Vous aurez également la possibilité de fouler la scène de 14 h à 15 h lors d’un cours de danse classique don-né par Philippe Cohen, directeur du Ballet du Grand Théâtre. Puis, vous prendrez place dans la salle à 19 h pour assister à Amoveo de Benjamin Millepied et à Sed Lux Permanet de Ken Ossola donné par le Ballet du Grand Théâtre de Genève. La journée se terminera par deux bals (de 21 h à 23 h 30). L’un sur la scène « La danse fait son cinéma » et l’autre dans les foyers « Tudansesmonchou ? ». Vous aurez donc le loisir de choisir entre vous trémousser sur des musiques de film ou vous laisser surprendre par des DJ d’un genre un peu particu-lier. Ah, j’allais oublier, pour les bals, venez déguisés ! Années 50, 60 ou 70 ou en personnage de film de danse. Le samedi 12 mai 2012, l’artiste ce sera vous ! FLJournées européennes de l’OpéraProgramme et inscriptions sur www.geneveopera.chFête de la danseUn pass à Fr. 15.- (gratuit pour les moins de 16 ans) permet l’accès à tous les cours et à la plupart des activités. www.fetedeladanse.ch

Deux jours pour voir, écouter... chanter, danser

JOURNÉES DE LA DANSE & JOURNÉES EUROPÉENNES DE L’OPÉRA par Frédéric Leyat

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Ne dansez plus seulement dans votre salon ! Ne chantez plus uniquement sous votre douche ! Sortez ! Le Grand Théâtre de Genève vous donne rendez-vous le samedi 12 mai 2012 à l’occasion de la Fête de la danse et des Journées européennes de l’Opéra.

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À RETOURNER AU GRAND THÉÂTRE DE GENÈVEAbonnement ACT-O / 11 bd du Théâtre, CP 5126 - CH 1211 Genève 11

REMPLISSEZ CE BULLETIN EN LETTRES CAPITALES.

BALLETS

GISELLEBallet-pantomine en 2 actes de Adolphe AdamChorégraphie Pontus LidbergBallet du Grand ThéâtreAu Grand Théâtre2 | 4 | 5 | 6 | 7 octobre 2012

LE SACRE DU PRINTEMPS LES NOCESd’Igor StravinskiChorégraphies Andonis Foniadakis (Le Sacre)Didy Veldman (Les Noces)Ballet du Grand ThéâtreAu BFM16 | 17 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24 février 2013 LE LAC DES CYGNESBallet en 3 actes de Piotr Ilitch TchaïkovskiChorégraphie Natalia MakarovaBallet national de ChineAu Grand Théâtre11 | 12 | 13 | 14 octobre 2012

OPÉRAS

JJR (CITOYEN DE GENÈVE)Opéra en un acte de Philippe FénelonAu BFM11 | 13 | 16 | 18 | 20 | 22 | 24 septembre 2012

IL BARBIERE DI SIVIGLIAMelodramma buffo en 2 actes de Gioacchino RossiniAu Grand Théâtre10 | 12 | 15 | 17 septembre 2012

SAMSON ET DALILAOpéra en 3 actes et 4 tableaux de Camille Saint-SaënsAu Grand Théâtre7 | 10 | 13 | 16 | 19 | 21 novembre 2012

LES AVENTURES DU ROI PAUSOLEOpérette en 3 actes d’ Arthur HoneggerAu Grand Théâtre12 | 14 | 16 | 19 | 22 | 27 | 29 | 31 décembre 2012

LA TRAVIATAOpéra en 3 actes de Giuseppe VerdiAu Grand Théâtre28 | 29 | 31 janvier & 2 | 3 | 5 | 7 | 9 | 10 | 12 février 2013

DAS RHEINGOLDPrologue en 4 scènes à la Tétralogie de Richard WagnerAu Grand Théâtre9 | 12 | 15 | 18 | 21 | 24 mars 2013

MADAMA BUTTERFLYDrame lyrique en 3 actes de Giacomo PucciniAu Grand Théâtre20 | 23 | 26 | 29 avril & 2 | 5 mai 2013

RUSALKAConte lyrique en 3 actes de Antonin DvorakAu Grand Théâtre13 | 16 | 19 | 21 | 24 | 27 juin 2013

RÉCITALSAu Grand Théâtre

RENÉE FLEMINGSOPRANO5 décembre 2012

ELINA GARANCAMEZZO-SOPRANO30 janvier 2013

LUDOVIC TÉZIERBARYTON8 mars 2013

DIANA DAMRAUSOPRANO COLORATURE24 mai 2013

BARBARA FRITTOLISOPRANO 9 juin 2013

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