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939 . MERCURE GALANT DE LA HAYE rec;:u plusieurs pieces en prose et en vers pour ajouter a ce Mercure ». En fin de livraison, on trouve une rubrique intitu- lee «Additions faites en Hollande» (quelques dizaines de pages). Pendant les mois ou Ie Mercure de Paris est divise en quatre parties, on trouve les additions a la fin de chacune d' entreelles. Principaux centres d'interet: les pieces fugitives, la politique internationale. Principaux auteurs etudies et poetes publies : Crebillon, Fontenelle, Fuzelier, Pavilion, Roy, La Motte, Boi- leau. Musicien pub lie: Drouard de Bousset. Table a la fin de chaque tome. 7. Londres, B.L., P.P. 4486; B.N., Lc 2 33 A Qanv.-avril 171 I, janv.-avril 1712). 8. Hatin, G.H., p. 186; Camusat, Histoire critique des jour- naux, 1734, t. II, p. 224. Mentions: Gazette d'Amsterdam, 10 oct. 1710 (LXXX), Le Misanthrope, 19 mai - 24 oct. 1711 (19 annonces publici- taires), La Quintessence des nouvelles, I er juin 1719, nO 44, Lettres historiques et galantes de Mme Dunoyer, Lettre LXII, vers 1711, et Avis du Libraire, t. V, 1712) - Moureau F., Un singulier Moderne, Dufresny auteur dramatique et essayiste (1657-I724), Lille et Paris, 1979, t. I, p. IOO-IOr. - Idem, Le Mercure galant de Dufresny (17IO-I7I4) ou Ie Journalisme a la mode, Studies on Voltaire, t. CCVI, 1982, p. 149-150. - Van Dijk S., Traces de femmes. La presence jeminine dans Ie journalisme fran(:ais du XVIII e siecle, Amsterdam et Maarssen, APA-Holland University Press, 1988, p. 105. Contrairement a ce que nous avions avance en 1979 et en 1982, et depuis la decouverte a Geneve d'un exemplaire d'un Nouveau Mercure galant des Cours de l'Europe par Mme Dunoyer (Van Dijk), il faut renoncer a attribuer ce periodique a 1'active journaliste huguenote refugiee en Hollande. Nous avancions parallelement 1'hypothese d'une production de J. Van Effen, expert en petits journaux a la maniere du Mercure. L'insistance avec laquelle ce dernier fait la publicite du Mercure galant imprime a La Haye chez son editeur favori suggere qu'il ne dut pas etre indifferent a Ia redaction de celui-ci. Le Mercure de La Haye a, dans ses «additions », un gout affirme pour Ies affaires d'Angleterre, ou Van Effen etait expert. En tout etat de cause, Ie Mercure est redige par un homme du Refuge. Ses gouts litter aires sont assez eclectiques, malgre une predilection, comme son illustre aine parisien, pour la production «moderne ». II ne dedaigne d' ailleurs pas d'aller chercher dans Ie Nouveau Mercure de Trevoux (avril 1711, p. 418), proche des Jesuites, des pieces qui lui convien- nent (par ex., des vers de Fontenelle et de Fuzelier derobes en fevr.-mars 171 I au Nouveau Mercure du mois precedent, et une relation de voyage en avril, parue dans Ie numero de fevrier). Mais Ie Mercure de La Haye a des orientations tout a fait originales. II publie, apres un battage publicitaire intense (Moureau 1979), la Satire XII de Boileau «Sur 1'Equivoque» 870 MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE (mai 1711), dont c'est la premiere edition «legale». Tout en faisant 1'eloge de la liberte d'allure du successeur de de Vise (ibid.), il polemique avec Dufresny en soutenant la position britannique pendant les dernieres annees de la guerre euro- peenne: de copieuses correspondances de Londres, venues vraisemblablement des milieux huguenots, meIent vers et politique avec assez de bonheur. Le Mercure de La Haye tire l' essentiel de son interet de ces additions politiques. Mais comme Le Courrier galant (voir ce titre), ne dans Ie meme milieu pour affronter Ie Mercure de de Vise, la novation litteraire n'est pas a la mesure des ambitions en d'autres domaines. Franc;ois MOUREAU 940 MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE 1 (1686-1782) 1. Mercure historique et politique concernant l'etat present de l'Europe, ce qui se passe dans toutes Ies Cours, l'intiret des Princes, leurs brigues, et generalement tout ce qu'il y a de curieux pour Ie mois de Novembre I 686, Ie tout accompagne de Rej1exions politiques sur chaque Etat. Dans certaines collections, pour janvier 1689 (t. 6), on trouve: Memoire de ce qui se passe de plus considerable dans toutes les Cours de l'Europe, Ie tout accompagne de rej1exions, et 1'editeur n'est pas Van Bulderen, mais «Jean Hamel, a Cologne». Tout rentre dans 1'ordre en fevrier. De meme parfois, Ie t. 13 porte d'abord, comme page de titre, Lettres historiques, contenant ce qui se passe de plus important en Europe, et les Rej1exions necessaires sur ce sujet, Tome II, Mois de Juillet I692; A La Haye, chez Adrien Moetjens. Comme ces Lettres historiques existent par ailleurs, mais que leur editeur n'est pas Ie meme que celui du Mercure, cela pose un curieux probleme technique. En aout, on revient au Mercure et a 1'editeur Van Bulderen. En septembre, a nouveau les Lettres historiques et Moetjens. Tout rentre dans l' ordre a partir d' octobre, mais ces «Lettres historiques» reappa- raissent bizarrement dans Ie t. 15 entre les mois de juillet et d'aout 1693, avec une pagination surnumeraire. De janvier 1733 a decembre 1744, dans Ie titre initial (ci-dessus), suppression de «leurs brigues» et de «generale- ment tout». De janvier a mai 178 I, Ie titre est Mercure historique, politique et litteraire. On retrouve Ie titre initial a partir de juin 178 I. 2. Novembre 1686 - avril 1782. Nombre total de volumes: 192. Privilege: Ie nom de 1'editeur etant initialement fictif, Ie privilege« des Etats de Hollande et de Westfrise» n'apparait qu'en mars 1688. Periodicite: elle est indiquee par 1'Avertis- sement qui precede Ie mois de juillet 1688 : «tous Ies premiers jours de chaque mois ». 3. On enregistre parfois un certain flottement pour Ia COInci- dence entre volumes et tomes (il arrive qu'il y ait 3 ou 4

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939 . MERCURE GALANT DE LA HAYE

rec;:u plusieurs pieces en prose et en vers pour ajouter a ce Mercure ». En fin de livraison, on trouve une rubrique intitu­lee «Additions faites en Hollande» (quelques dizaines de pages). Pendant les mois ou Ie Mercure de Paris est divise en quatre parties, on trouve les additions a la fin de chacune d' entreelles.

Principaux centres d'interet: les pieces fugitives, la politique internationale. Principaux auteurs etudies et poetes publies : Crebillon, Fontenelle, Fuzelier, Pavilion, Roy, La Motte, Boi­leau. Musicien pub lie: Drouard de Bousset.

Table a la fin de chaque tome.

7. Londres, B.L., P.P. 4486; B.N., 8° Lc2 33 A Qanv.-avril 171 I, janv.-avril 1712).

8. Hatin, G.H., p. 186; Camusat, Histoire critique des jour­naux, 1734, t. II, p. 224.

Mentions: Gazette d'Amsterdam, 10 oct. 1710 (LXXX), Le Misanthrope, 19 mai - 24 oct. 1711 (19 annonces publici­taires), La Quintessence des nouvelles, I er juin 1719, nO 44, Lettres historiques et galantes de Mme Dunoyer, Lettre LXII, vers 1711, et Avis du Libraire, t. V, 1712) - Moureau F., Un singulier Moderne, Dufresny auteur dramatique et essayiste (1657-I724), Lille et Paris, 1979, t. I, p. IOO-IOr. - Idem, Le Mercure galant de Dufresny (17IO-I7I4) ou Ie Journalisme a la mode, Studies on Voltaire, t. CCVI, 1982, p. 149-150. - Van Dijk S., Traces de femmes. La presence jeminine dans Ie journalisme fran(:ais du XVIII e siecle, Amsterdam et Maarssen, APA-Holland University Press, 1988, p. 105.

Contrairement a ce que nous avions avance en 1979 et en 1982, et depuis la decouverte a Geneve d'un exemplaire d'un Nouveau Mercure galant des Cours de l'Europe par Mme Dunoyer (Van Dijk), il faut renoncer a attribuer ce periodique a 1'active journaliste huguenote refugiee en Hollande. Nous avancions parallelement 1'hypothese d'une production de J. Van Effen, expert en petits journaux a la maniere du Mercure. L'insistance avec laquelle ce dernier fait la publicite du Mercure galant imprime a La Haye chez son editeur favori suggere qu'il ne dut pas etre indifferent a Ia redaction de celui-ci. Le Mercure de La Haye a, dans ses «additions », un gout affirme pour Ies affaires d'Angleterre, ou Van Effen etait expert. En tout etat de cause, Ie Mercure est redige par un homme du Refuge. Ses gouts litter aires sont assez eclectiques, malgre une predilection, comme son illustre aine parisien, pour la production «moderne ». II ne dedaigne d' ailleurs pas d'aller chercher dans Ie Nouveau Mercure de Trevoux (avril 1711, p. 418), proche des Jesuites, des pieces qui lui convien­nent (par ex., des vers de Fontenelle et de Fuzelier derobes en fevr.-mars 171 I au Nouveau Mercure du mois precedent, et une relation de voyage en avril, parue dans Ie numero de fevrier).

Mais Ie Mercure de La Haye a des orientations tout a fait originales. II publie, apres un battage publicitaire intense (Moureau 1979), la Satire XII de Boileau «Sur 1'Equivoque»

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MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE

(mai 1711), dont c'est la premiere edition «legale». Tout en faisant 1'eloge de la liberte d'allure du successeur de de Vise (ibid.), il polemique avec Dufresny en soutenant la position britannique pendant les dernieres annees de la guerre euro­peenne: de copieuses correspondances de Londres, venues vraisemblablement des milieux huguenots, meIent vers et politique avec assez de bonheur. Le Mercure de La Haye tire l' essen tiel de son interet de ces additions politiques. Mais comme Le Courrier galant (voir ce titre), ne dans Ie meme milieu pour affronter Ie Mercure de de Vise, la novation litteraire n'est pas a la mesure des ambitions en d'autres domaines.

Franc;ois MOUREAU

940 MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE 1 (1686-1782)

1. Mercure historique et politique concernant l'etat present de l'Europe, ce qui se passe dans toutes Ies Cours, l'intiret des Princes, leurs brigues, et generalement tout ce qu'il y a de curieux pour Ie mois de Novembre I 686, Ie tout accompagne de Rej1exions politiques sur chaque Etat.

Dans certaines collections, pour janvier 1689 (t. 6), on trouve: Memoire de ce qui se passe de plus considerable dans toutes les Cours de l'Europe, Ie tout accompagne de rej1exions, et 1'editeur n'est pas Van Bulderen, mais «Jean Hamel, a Cologne». Tout rentre dans 1'ordre en fevrier.

De meme parfois, Ie t. 13 porte d'abord, comme page de titre, Lettres historiques, contenant ce qui se passe de plus important en Europe, et les Rej1exions necessaires sur ce sujet, Tome II, Mois de Juillet I692; A La Haye, chez Adrien Moetjens. Comme ces Lettres historiques existent par ailleurs, mais que leur editeur n'est pas Ie meme que celui du Mercure, cela pose un curieux probleme technique. En aout, on revient au Mercure et a 1'editeur Van Bulderen. En septembre, a nouveau les Lettres historiques et Moetjens. Tout rentre dans l' ordre a partir d' octobre, mais ces «Lettres historiques» reappa­raissent bizarrement dans Ie t. 15 entre les mois de juillet et d'aout 1693, avec une pagination surnumeraire.

De janvier 1733 a decembre 1744, dans Ie titre initial (ci-dessus), suppression de «leurs brigues» et de «generale­ment tout».

De janvier a mai 178 I, Ie titre est Mercure historique, politique et litteraire. On retrouve Ie titre initial a partir de juin 178 I.

2. Novembre 1686 - avril 1782. Nombre total de volumes: 192. Privilege: Ie nom de 1'editeur etant initialement fictif, Ie privilege« des Etats de Hollande et de Westfrise» n'apparait qu'en mars 1688. Periodicite: elle est indiquee par 1'Avertis­sement qui precede Ie mois de juillet 1688 : «tous Ies premiers jours de chaque mois ».

3. On enregistre parfois un certain flottement pour Ia COInci­dence entre volumes et tomes (il arrive qu'il y ait 3 ou 4

Miguel Valladares
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Miguel Valladares
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LOMBARD, Jean «MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE (1686-1782)» In: Dictionnaire des journaux, 1600-1789. sous la direction de Jean Sgard. Paris : Universitas, 1991.2 vol. Entry 940; vol. II; pp.871- 878. Baker-Berry Z6956.F8 D55 1991
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MERCURE HISTOR I QUE ET POL I TIQUE

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volumes par an), et aussi d'une collection a l'autre, ]:nais d'une maniere generale, il y a deux volumes par an, couvrant chacun six mois.

Chaque volume compte entre 650 et 700 p. (saufle dernier: 480 p.) en format in-12.

4 . Nov. 1686 - fevr. 1688: «A Parme, chez Juan Batanar», libraire fictif, qui cache Van Bulderen (ci-apres). Mars 1688 -dec. 1715: Henry Van Bulderen, «Marchand libraire dans Ie Pooten, a l'enseigne de Mezerai», a La Haye. Janv. 1716-sept. 1719: les freres Louis et Henri Van Dole, marc hands libraires a La Haye. Oct. 1719 - dec. 1723: Henri Van Dole seul. Janv. 1724 - dec. 1725: veuve Henri Van Dole. Janv. 1726 - juin 1741: Henri Scheurleer, libraire a La Haye. Juil. 1741 - juil. 1761: Frederic-Henri Scheurleer, fils du precedent. A partir de novembre I 75 5, il est precise: «Libraire proche la Cour, sur Ie coin du Cingel ». Puis, en mars I 76 I, Ie libraire ann once qu'il «vient de changer de maison, et qu'il a fixe sa demeure dans Ie second Wagestraat,

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la septieme maison du Pont du Burgwal ». Remarque: en aoiit 1758, on apprend que Ie libraire a, depuis novembre 1756, deux imprimeurs suisses associes, qui d'ailleurs ne Ie paient pas. Aoiit 1761 - janv. 1762: la veuve de Frederic­Henri Scheurleer. Fevr. 1762 - dec. 1762: C.G.B. Hoffman et Compagnie, «au Voorbout pres du Vossen-Tuintje», a La Haye. De janvier a mars 1763: la page de titre ne porte pas d'adresse. Avril 1763: «A La Haye, chez Hoffman et Staatman, libraires sur Ie Kalvermarkt, proche Ie Marechal de Turenne». Mai 1763 - dec. 1770: Frederic Staatman, meme adresse. Janv. 1771 - sept. 1775: Henry Backhuysen et Frederic Staatman, libraires, ces deux noms figurant d'abord dans cet ordre, puis dans l'ordre inverse. Oct. 1775 -oct. 1780: on retrouve Frederic Staatman seul, a la meme adresse. Nov. 1780 - avril 1782: veuve Staatman.

Le libraire indique de temps en temps les endroits OU l' on trouve Ie Mercure. Par exemple, en decembre 1704, c' est a Maestricht chez de L'Essaert, a Liege chez la veuve de Theo­dore Delmer, a Dusseldorf chez Christian Sluyter et a Cologne chez Philippe Ponet; en mai 1763, il est signale que « Ie veritable Mercure de Hollande ne se distribue en France qu'a Sedan chez les freres J acquemare, libraires, sur la place pres Ie marche; en Flandre, Lille, Jacquez, libraire, en Braband, Gand, Sommers, libraires»; en aoiit 1772, Ie Mercure, qui «parait regulierement et sans retard Ie ler de chaque mois» au prix de 4 S. par mois pour La Haye, est distribue a « La Haye, Amsterdam, Leyde, Rotterdam, Utrecht, Dort, Middelburg, Liege, Lille, Gand, Anvers, Hanovre, Hambourg, Varsovie, Vienne, et aux bureaux des Postes dans les princi­pales villes, et particulierement Londres, Paris, Bruxelles, Lille, Bethune, Tournai, Gand, Louvain, Maseyk, Emmeric, Munster, Cologne, Francfort et ailleurs ». Le prix de la collec­tion complete est par exemple de 140 florins de Hollande pour I I 7 volumes en 1745, de 160 florins pour 130 volumes en 1751.

5. Auteurs: on trouvera toutes les explications utiles sur cette importante question dans un article de Jean Lombard (cf. Bibliographie). Ne figurent ici que les resultats de cette recherche, les points d'interrogation signifiant une ignorance ou une incertitude soit sur la periode, soit sur I'auteur, soit sur les deux; un point d'interrogation entre parentheses signifie une certitude sur Ie nom de l'auteur, mais une incertitude sur son identification exacte. Nov. 1686 - avril 1693: Gatien de COURTILZ DE SANDRAS, fondateur du journal. Avril 1693 - juil. 1710: LA BRUNE (?). Aoiit 1710 -dec. 1715?: SAINT-ELIER? Janv. 1716? - sept. 1722: SAINT-BONNET? Oct. 1722 - juil. 1724: GUYOT (?). Aoiit 1724 - dec. 1750: ROUSSET. Janv. 1751 - dec. 1779:? Janv. 1780 - dec. 1780:? Janv. 1781 - avril 1782: Guil­laume-Rene Le Febure de Saint-Ildephont LE FEBURE.

6. Dans I'Avis au Lecteur du premier numero, Courtilz annonce son intention de presenter les nouvelles utiles pour «I'Histoire », en respectant « la verite ». II ajoute: « Au reste,

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je parlerai des gens de qualite avec quelque sorte de connais­sance; j' ai ete dans plusieurs Cours OU j' ai eu quelques habitudes avec eux. Je voudrais bien pouvoir dire la meme chose du Cabinet des Princes, cela me ferait esperer de contenter Ie lecteur dans les Refiexions politiques que je pretends mettre a la tete de cet ouvrage sur l'etat general des affaires de I'Europe, et a. la fin des Nouvelles de chaque pays. A ce defaut j'y suppleerai par quelque connaissance que j' ai des affaires du monde, et si je suis si malheureux que de n'y pas reussir, ce ne sera pas rna faute». Dans l'expose preliminaire des nouvelles de 1686, il declare qu'il rangera les pays selon un certain ordre, mais qu'il pourra en changer si les lecteurs Ie demandent. II ajoute: «Je ne parlerai pas de l'etat OU se trouvent les Princes plus eloignes; nous prenons trop peu de part a. ce qui les regarde pour nous en embarras­ser; d'ailleurs, les nouvelles qui viennent de ces pays-Ia. sont si vieilles, et d'ailleurs si sujettes a. caution, que ce serait merveille qu'elles arrivassent jusques a. nous saines et sauves ». En janvier 1687, Courtilz ann once qu'il rangera desormais les Etats selon leurs «prerogatives »), c' est-a.-dire: Rome (et Italie) , Allemagne (et Turquie), France, Espagne, Angleterre, Pologne, Suede et Danemark, Venise, Hollande, Cologne. Pour Ie fond, il declare en mars 1687 : « Mon dessein est de parler des choses selon les differents evenements, et non pas de m' assujettir a suivre toujours les memes maximes»).

Ce programme (nouvelles historiques, refiexions politiques, dans l'impartialite) sera repris par les successeurs de Courtilz, qui, souvent, commenceront egalement l'annee par une retrospective. Ainsi, l'auteur de janvier 1717 ecrit: « L' ordre et la methode de ce Journal nous engageant depuis son etablissement a ne point commencer une nouvelle annee sans donner un precis des principaux evenements de la precedente, nous essaierons de nous acquitter ici de ce devoir, en rapportant ceux de I' annee I 7 I 6, de maniere a. en rappeler les idees assez distinctes, sans trop occuper neanmoins de l'espace destine aux nouvelles de ce mois et a la quantite de longues pieces qui nous restent a. in serer dans la capacite d'un si petit volume »). En janvier I 726, Ie libraire avise « qu'il continuera d'imprimer chaque mois et de debiter ledit Mercure, qu'on rendra Ie plus interessant qu'il sera possible sans choquer aucune Puissance ni aucune Religion »). En janvier 1732, Rousset ecrit que les redacteurs qui ont succede a. Courtilz <<ont assez suivi l'esprit du fondateur»), et qu'il veut agir de meme: « C' est pourquoi je prie Mrs les Ministres, et autres Politiques, de m' adresser les Memoires, Actes, Lettres, Relations de faits, etc., qu'ils souhaiteront rendre publics: j'en ferai un usage fidele avec reconnaissance et suivant les ordres qu'ils voudront bien me prescrire ». Et encore au debut de 175 0, Rousset affirme son desir de rester fidele a la methode et a l' esprit du fondateur du journal.

En decembre 178o, un Prospectus annonce les intentions du nouvel auteur: «M. Le Febure continuera, comme ci­devant, a faire connaitre l' etat de l'Europe et les interets des

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differentes Puissances, il conservera a. la curiosite et l'utilite des Lecteurs les pieces qui doivent servir a l'Histoire et l'instruction de la posterite. Mais, or <;a, ce Journal ne sera plus une copie servile des gazettes. II distraira Ie lecteur par des morceaux de litterature, et il in serer a dans son journal, generalement, tout ce qu'il croira capable de l'interesser et de faire fuir la monotonie »). Mais Le Febure, a. la demande de ses lecteurs, renoncera a. ce programme des avril 178I.

La succession des nouvelles et des refiexions par Etats est en principe respectee. Mais il arrive que les nouvelles de tel Etat, ou les refiexions, soient supprimees par manque d'informa­tions ou de place. Certains successeurs de Courtilz supprime­ront systematiquement les refiexions par Etats.

On trouvera assez souvent, en janvier, un Avant-Propos present ant un « Abrege») ou une « Recapitulation» des nou­velles de l' annee precedente.

Aux nouvelles proprement « historiques») s' ajoutent genera­lement des informations variees (vie sociale et culturelle, etat-civil, faits divers, curio sites ). Seul Le Febure essaiera, en 178 I, de modifier Ie caractere du journal en y faisant figurer des rubriques telles que « Litterature », « Decouverte », « Usage ancien »), « Anecdote »), mais sans succes.

D'une maniere generale, les Etats sont ranges dans l'ordre indique par Courtilz en janvier 1687, mais cette liste est assez souvent modifiee pour des raisons diverses, parfois fournies par les auteurs.

L'art du journalisme. Au fil de sa longue existence, Ie Mercure fournit, a la faveur de remarques et d'avis divers, de nom­breuses indications qui permettent de degager une deontolo­gie de la presse et de relever les elements de toute une technique journalistique.

Sur Ie plan des principes, les auteurs s'affirment d'autant plus scrupuleux qu'ils se savent tributaires de lecteurs avertis et exigeants; en aOllt 1688, Courtilz declare meme savoir de bonne part que Louis XIV lit son journal. D' OU la prise en consideration des desirs du public: « c' est pour lui que nous ecrivons, et non pas pour nous »), declare Courtilz en janvier 1687; c'est pourquoi, sur sa demande, it donner a plus de nouvelles, et moins de refiexions. De meme, en avril 1781, Le Febure ecrit qu'il obeira a ses lecteurs, dont plusieurs l'ont « fait prier de restreindre la partie litteraire, pour donner plus d'etendue a. la politique»).

Toutefois, Ie souci constant des auteurs, c' est la verite. Certes, Courtilz remarque, en juin 1691, que l'on peut tres bien rapporter des nouvelles fausses: « Que si on me demande pourquoi je les rapporte, puisque je ne les crois point, je repondrai que c'est parce qu'il est souvent aussi necessaire de savoir ce qui se dit que ce qui est vrai, pourvu qu'on sache bien distinguer ces deux choses; surtout lorsqu' on peut savoir que ces nouvelles sont avancees par ceux qui gou­vernent. Un habile homme peut tirer de la des conjectures pour connaitre ce qui se passe effectivement, et surtout les dispositions des Puissances qui font rep andre ces bruits »).

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Mais il est primordial de procurer des informations sures. Pour cela, il ne faut pas hesiter a attendre confirmation en cas de nouvelle douteuse, ni a se rectifier soi-meme si on s' est laisse abuser. Courtilz ne neglige pas les details: en juillet I689, il demande a ses correspondants de lui ecrire les nombres en lettres, et non en chiffres.

Quant a la necessite de l'impartialite, elle est naturellement rappelee sans cesse. Mais, a en juger par les reactions des lecteurs, elle n'est pas toujours facile a observer. Rousset, en novembre I 738, deplore la difficulte du metier: «Les uns se plaignent lorsque les nouvelles ne sont pas accompagnees de reflexions; d'autres voudraient qu'on ne leur racontat les faits que nument et simplement; d'autres enfin voudraient des reflexions, mais suivant leurs idees. La Religion s'en mele meme: les uns voudraient que je fusse Janseniste, et d'autres, qu'emporte par Ie torrent, je ne pensasse qu'en Moliniste. Comment faire? ». Courtilz resout Ie probleme en adoptant successivement les points de vue des differentes puissances: «Voila de quelle maniere no us devons expliquer les choses, c'est-a-dire en les tournant toujours en bonne part» (dec. I 686). Au contraire, Rousset lui-meme opte pour une impar­tialite mitigee: en janvier I749, il declare que, maintenant que la paix est retablie, il va pouvoir abandonner «cette espece de partialite indispensable, et meme de devoir pour tout ecrivain public» envers sa patrie, la Republique de Hollande. «Au reste, ajoute-t-il, nous promettons a nos lec­teurs de rester dans de justes bornes par rapport aux affaires de Religion et d'avoir Ie plus profond respect pour les Souve­rains, suivant la maxime anglaise que le:Roi ne peut faire de fautes».

Pour les rapports avec les autres journaux, les attitudes sont variees. Le Mercure n'hesite pas a saluer l'apparition de nouveaux confreres. Courtilz manifeste son interet pour Ie Journal des savants (dec. I687). La Brune ne tarit pas d'eloges sur Du Breuil et fait de nombreux emprunts a ses Nouvelles extraordinaires. Mais plus souvent, c'est la critique ou 1'hosti­lite qui dominent. La victime constante est Ie Mercure galant, declare «fade» et d'une insupportable partialite en faveur de la France. Courtilz releve aussi des erreurs dans la Gazette d'Utrecht (janv. I690), mais s'en prend surtout avec acrimo­nie a Le Noble, qui Ie lui rend bien (mars et oct. I69I). La Brune critique Ie Gazetier d'Anvers, qui «n'est qu'un impudent et un faquin» (sept. I702). En novembre I729, Ie libraire Henri Scheurleer fait etat d'un arret de justice rendu en sa faveur contre un confrere, Jean Van Duren, auteur des Lettres serieuses et badines. Quant a Rousset, dans un Avis au lecteur de I743, il est fier de faire savoir que, grace au nouveau journal d'un inconnu, intitule Le Courrier veridique ou l'Anti-Rousset, il prend rang parmi les «Anti », avec Baillet, Machiavel, etc. Cet auteur reproche a Rousset d'etre trop favorable a la Maison d' Autriche, aux depens de la France. «II promet que son Courrier sera 1'antipode de mon Mercure. Voila Ie Franc;ais, voila cet esprit tyrannique qui veut que chacun pense comme lui ».

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Pour Ie fonctionnement du journal, les auteurs ont recours a des reseaux de correspond ants ou d'amis dans to us les pays; on apprend' ainsi qu'en 1780, «M. Gatien, libraire a Rouen, tient la correspondance de France », II y a aussi des informateurs interesses; Van Bulderen les avertit en mars I689: inutile de lui envoyer «de certains libelles contre Ie gouvernement d' Angleterre et contre celui des Provinces Unies », car il ne les publiera pas. De son cote, Rousset, en mai I735, se plaint de ce que certains s'amusent a lui faire parvenir des fausses nouvelles, qu'il est en suite oblige de dementir. Quant aux personnes «qui envoyeront des Me­moires a l' Auteur du Mercure, pour les y mettre », elles sont priees d'affranchir leurs lettres, sinon on les refusera (mars I700).

Les illustrations sont tres rares; on ne trouve guere que quelques plans et croquis a caractere scientifique. Mais Ie Mercure connait les nouvelles de derniere heure, et aussi les petites annonces, par exemple, en octobre 1763, celIe qui signale 1'existence a Sedan, chez les freres Jacquemart, li­braires, d'« un tres curieux Cabinet litteraire pour la lecture des Nouvelles en tout genre, des Gazettes de France, d'Hol­lande, Etrangeres, Journaux, Mercures et autres ouvrages periodiques, a des conditions tres favorables, pour commen­cer Ie 7 du mois prochain, et dont l' Avis se distribue chez eux gratis»,

La verification des informations est un point important, car c'est Ie libraire qui est responsable de ce qui est ecrit dans Ie journal, et c' est a lui que les lecteurs mecontents adressent leurs reproches. Ainsi, en janvier I769, F. Staatman fait savoir qu'il a rec;u de l'Academie franc;aise 1'injonction de publier un certificat montrant la faussete de ce que Ie Mercure de novembre 1768 avait dit de certains academiciens, en particulier de 1'abbe d'Olivet; Staatman veut d'abord se renseigner aupres de sa source; et en fevrier il publie Ie certificat en question, mais en se disculpant: il a tire son anecdote du Courrier du Bas-Rhin, Pour plus de surete, Ie libraire exerce generalement un controle sur son redacteur. C'est ce que n'a pas fait Van Bulderen, oblige de s'excuser, en septembre I688, pour I4 p. virulentes contre la Papaute parues en aout alors qu'il etait absent, ce qui a entraine 1'interdiction du Mercure «a Liege et dans tout Ie Pays-Bas espagnol» ; pour cette fois il essaie de disculper aussi Courtilz en pretendant que c'est «quelque malintentionne» qui lui a fourni de mauvais memoires, mais il ne se laissera plus surprend~e. D'ailleurs, pour echapper aux critiques, Ie Mer­cure, a toutes les periodes, reproduit de tres nombreux textes, longs parfois de plusieurs dizaines de pages, sans les commen­ter.

Enfin, Ie Mercure assure sa propre publicite; ainsi, en sep­tembre 1774, on lit: «Le public eclaire est convaincu que ce Journal, etabli depuis presque un siecle, 1'emporte de beaucoup sur toutes ces petites productions nouvelles en ce genre, nonobstant leurs titres fastueux, alambiques, et rencherissant les uns sur les autres. Ceux qui veulent se

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procurer un corps complet de Politique et d'Histoire, depuis un siecle, trouveront, dans ce Journal, ce qu'ils ne cherche­raient qu'avec beaucoup de peine dans d'autres livres plus couteux et moins veridiques ». Regulierement parait aussi la liste des livres nouveaux que 1'0n peut trouver chez l'editeur du Mercure. Quant aux auteurs, certains d'entre eux, tels Courtilz et Rousset, ne dedaignent pas de faire indirectement, dans Ie journal, de la reclame pour leurs prop res ouvrages.

L 'inten~t documentaire. C' est naturellement l' essen tiel, mais, comme il s'agit de pres d'un siecle d'Histoire, il n'est pas possible d'entrer dans les details, ni d'etre complet.

Evenements politiques: c'est l'aspect Ie plus important, comme Ie laisse pre voir Ie titre, mais aussi peut-etre celui sur lequel il est Ie moins utile de s'etendre ici. On trouve dans Ie Mercure tout ce qui concerne les alliances, les guerres et les traites de paix, la mort et l'avenement des souverains, en particulier des papes, avec les brigues des conclaves. Les affaires interieures de chaque Etat. dans tous les domaines. sont expo sees avec precision, et, a partir de 1781, Le Febure y ajoute celles de l' Amerique.

Religion: elle occupe une place de choix, surtout en ce qui concerne la France. Questions traitees : les persecutions contre les protestants, avec les «dragonJ1ades» et la revolte des Camisards dans les Cevennes (en aofrt 1709, la Hollande offre «la naturalisation generale des protestants refugies»); l'affaire du Quietisme; la lutte contre Ie Jansenisme et la querelle engendree en France par la bulle Unigenitus; la mise en cause des Jesuites dans la question des rites chinois.

Histoire des idees: on s'interroge sur les phenomenes d'appa­rence surnaturelle; Courtilz croit qu'il y a truquage de la part d' Aimar. «Ie devin de Lyon». «l'homme a la baguette» (mars 1693); La Brune se montre sceptique sur Ie saint Suaire de Turin (mai 1697) et, en septembre 1698, pense que les faits de ce genre ont une explication naturelle. car on est maintenant. dit-il, dans un siecle «eclaire», ou «les hommes sont devenus philosophes. ou pour mieux dire rai­sonnables»; en novembre 1737. Rousset s' en prend au miracle de saint Janvier, a Naples.

On relate aussi quelques faits marquants a propos d'ecrivains celebres. En juin 1762, I'EmiIe de Rousseau est condarnne a etre brUle, parce qu'y est defendue !'idee d'une religion naturelle. soumise a l'examen de la raison. En juin 1764. evocation de l' affaire Calas. avec reference au Traite sur la tolirance de Voltaire. et a ce sujet, eloge du «meilleur des Rois». mais condamnation du «zele ignorant» et de la« haine pernicieuse» de quelques ecclesiastiques; mais en 1760. rien sur l' affaire La Barre. En mai 1765, nouvelle de Russie. ou !'imperatrice va donner de grandes fetes pour honorer, «en la personne du philosophe Diderot, chef des < nouveaux illu­mines >. la philo sophie et les lettres. utiles aux Etats, qu'elles eclairent et ornent. lorsqu'elles ne les corrompent pas».

II arrive aussi que les auteurs du Mercure fassent eux-memes des professions de foi qui revelent I'eclosion d'idees nouvelles.

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Ainsi, l'inconnu qui succede a Rousset declare. en janvier 1751: «Nous nous proposons. avec l'aide de Dieu. d'ecrire ce journal en vrai cosmopolite, ou en vrai philosophe»; il se veut «simple habitant» de I'Europe. II parle a plusieurs reprises de I'Europe en tant que telle, du point de vue politique et commercial, et reaffirme son cosmopolitisme en janvier 1772.

Une question importante est celIe du developpement de la franc-mac;onnerie. La premiere mention qui en est faite date de mars 1738: «Les Francs-Mac;ons, qu' on ne regarde pas en Lorraine comme ailleurs, ont donne a Luneville une superbe fete, a l'occasion du Carnaval» (une page de descrip­tion). En mai 1739. on lit, dans une note sur les francs­mac;ons, qui ont traverse Londres en cortege: «Cette Societe. l'une des plus anciennes de I'Europe, y compris tous les Ordres de Chevalerie, augmente ici en nombre et en reputation, a proportion qu'elle est persecutee au dehors». On apprend, en avril 1776. que les assemblees de francs-mac;:ons sont interdites dans Ie Royaume de Naples, mais. en juin. que les francs-mac;ons de Harnbourg sont honores de la vi site du duc Ferdinand de Brunswick et du prince de Hesse-Cassel. En mai 1778. on annonce que Voltaire a ete rec;u franc­mac;on dans la Loge des Neuf-Samrs.

Faits de societe: la encore, c' est surtout la France qui alirnente !'information. Le journal semble se complaire a souligner, au til des annees, la misere du peuple, accable d'impots malgre la prosperite du royaume. La criminalite se developpe. Des bandes de voleurs sevissent a Paris et en province. parfois par compagnies de plusieurs centaines d'individus (1714. 1718, 1775). Cartouche est execute en 1721. La disette et Ie chomage entrainent aussi des desordres. En mars 1699, des troubles sont causes a Lyon par «les ouvriers en soie, qui y manquent de travail». Encore a Lyon, en octobre 1709, on compte plus de 10000 mendiants «par la cessation de travail», et 400 enfants «apportes dans les eglises». Ce dernier phenomene est enregistre normalement dans les donnees de l' etat-civil; ainsi, en 1751, il y a eu a Paris 5013 mariages, 12 321 baptemes, 16 673 enterrements et 3783 enfants trouves.

Par nature, la presse rend plutot compte de la malfaisance que des actes vertueux. Les corsaires defraient la chronique: de la Mediterranee ils etendent leur action jusqu'en Norvege (aofrt 1687). En France, a !'image de la Loterie du Roi, des particuliers mettent sur pied des loteries privees, mais elles sont souvent truquees (avril 1687). En mars 1700. on peut lire Ie texte d'une lettre demandant aux magistrats de Liege de verser une ranc;on de 30 pistoles. sous peine de destruction de biens, et de mort s'ils viennent en armes au lieu indique.

Les proces ne sont pas oublies et nous renseignent parfois sur I'histoire des institutions: en mars 1687, I'Universite de Paris, qui veut defendre son monopole, intente une action judiciaire contre «plusieurs maitres qui tiennent des ecoles» ; «I'instance est au Parlement. ou si I'Universite a Ie droit de son cote, les autres ont beaucoup d'amis. La plupart des

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Conseillers, qui savent ce que c'est que des colleges, OU fort souvent la jeunesse se debauche, ont leurs enfants dans ces ecoles, OU l' on en a bien plus de soin; ainsi l' on ne doute pas qu'ils ne soient portes a les conserver. D'ailleurs les Jesuites, qui ne sont pas des amis de I'Universite, ne seront pas filches qu' on lui donne cette petite mortification, ce qui les pourrait bien faire agir sous main».

Faits divers: il s'agit surtout des tremblements de terre (Mes­sine, mars I693; Saint-Domingue, I770), des eruptions du Vesuve, des grands incendies, des hivers terribles (fevr. I 709), des invasions de loups (regions d'Orleans et de Tours en I 7I 3 et I 7I4), sans compter quelques curiosites, comme les naissances de monstres ou les cas de longevite exception­nelle.

L'orientation idiologique. Elle varie naturellement en fonction des auteurs et des epoques, mais offre neanmoins quelques constantes. D'une maniere generale, on critique la politique de Louis XIV et celIe de Rome. On s' en prend surtout aux jesuites. On admire la Hollande et l' Angleterre. On met en avant la liberte, la tolerance et la raison. Mais on evite la polemique trop vive, Ie Mercure historique et politique se voulant impartial, objectif, mesure et respectueux des Puis­sances.

Courtilz de Sandraz: pour les idees exprimees par cet auteur dans Ie Mercure, voir Jean Lombard, Courtilz de Sandras et Ia crise du roman a Ia fin du Grand SiecIe, PUF, I980, p. 35 I-355. Bornons-nous ici a dire que, contrairement a une opinion repandue, Courtilz ne se montre nullement partial en faveur de la France, ni systematiquement hostile a Rome. Ce qui Ie guide, c'est son opposition au machiavelisme et son adhesion aux principes de I'Evangile. II prone Ie respect de la morale en politique. II denonce les persecutions contre les protestants. Sur Ie plan theorique, il fait l' eloge du parlemen­tarisme anglais, mais sans mettre en cause Ie regime monar­chique; il trouve bien que les republiques ont plus de «dou­ceur» que les monarchies, mais il les juge moins effis;aces. En religion, son anticlericalisme Ie fait surtout se dresser contre les ]esuites et les moines. II se prononce contre Ie celibat des pretres. Globalement, ce Fran9ais, catholique, ancien mousquetaire et capitaine de cavalerie, reste assez conformiste.

La Brune est un calviniste. II s'en prend presque aut ant aux lutheriens qu'aux catholiques; pour ces derniers, il critique en particulier la devotion a la Vierge et l' attachement aux images pieuses. En politique, il est systematiquement favo­rable aux Hollandais et aux Anglais, et hostile a la France et a la Papaute. Annon9ant en mai I 704 la mort de Bossuet, il trouve que celui-ci suivait trop la politique de Louis XIV. Au contraire, en fevrier I 707, il fait l' eloge de Bayle.

Le successeur de La Brune est plus modere, en politique comme en religion. II con teste Ie principe de l'infaillibilite pontificale, mais sans marquer d'animosite a l'egard des papes.

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L' auteur suivant revient a un ton plus polemique. II fait l'eloge du Regent, surtout par opposition a Louis XIV. II s'en prend sans cesse au pape, mais se montre egalement hostile a I'egard des Turcs, en tant qu'ils sont d'une religion non chretienne, estimant qu'il faut s'opposer a l'imperialisme du «Croissant ».

Quant a Guyot, il reste moins de deux ans au Mercure. II essaie de garder une certaine mesure, se refusant par exemple a condamner Ie corps des Jesuites en bloc.

Et c'est la longue periode (26 ans) marquee par la personna­lite de Rousset. Protestant refugie en Hollande, Rousset est evidemment hostile au catholicisme et a la politique fran-9aise. Mais il fait surtout profession de tolerance et d'impar­tialite. C'est un «philosophe». Se demandant, en avril I736, pourquoi les Etats sont maintenant moins soumis a la Papaute, il ecrit: «La superstition et l'ignorance avaient etabli cette aveugle soumission: la Science et une Religion eclairee ont dissipe ces tenebres». Et il precise, en septembre I 73 7, qu'il n'admet pas qu'une autorite ecclesiastique I'em­porte sur un pouvoir politique temporel. «Je deteste partout la tyrannie et l'intolerance», dit-il encore (fevr. I737). C'est pourquoi il n'hesite pas a rendre hommage ala vertu d'un pape ou a l'esprit pacifique du cardinal Fleury. D'ailleurs, tout au moins dans Ie Mercure, il ne manifeste pas Ie caractere vindicatif et violent qu' on lui attribue en general. II se montre surtout attache a la liberte; c'est ainsi qu'en juillet I 73 7, il rapporte avec sympathie les protestations suscitees en Angleterre par un bill destine a « limiter la liberte du theatre» : on ne peut pas faire de «reglements ou contraintes generales sur des choses qui d'elles-memes n'ont rien de mauvais», sans attenter a «1' esprit de liberte».

Le successeur de Rousset reste au Mercure encore plus long­temps que ce dernier (29 ans), peut-etre en raison de sa relative moderation. A part quelques rares attaques contre les Jesuites (par exemple, en octobre I 757, a propos de la condamnation de Damiens: «une societe religieuse qui semble, depuis plus d'un siecle, avoir pris la detestable tache de justifier les forfaits les plus en ormes et d'innocenter les plus grands scelerats»), il essaie de se montrer objectif. Ainsi, en aout I 770, il proteste contre Ie clerge de France, qui s'en est pris a la «liberte effrenee» regnant en Angleterre; mais en novembre I 77I, dans les Nouvelles de Grande-Bretagne, il semble rectifier sa position: «S'il est un pays en Europe, ou l' on fasse un plus grand abus de la liberte de la presse, c'est assurement celui-ci, qui, depuis quelque temps, semble etre inonde d'ecrits satiriques et de libelles diffamatoires, qui attaquent impunement, et souvent aussi injustement, les personnes les plus respectables de I'Etat». D'une maniere generale, il apprecie la rigueur et la dignite. C'est ainsi qu'en juillet I776 il critique Voltaire, «dictateur de la litterature fran9aiSe», pour «son inconstance et Ie peu de fonds qu'on peut faire sur les eloges qu'il prodigue». Quant a Beaumar­chais (fevr. I 78o), «c'est un de ces enfants perdus que, selon les circonstances, on lache en avant et qu'on desavoue,

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punit meme, quand la mission fut indiscrete ou se trouve malheureuse ». Se proclamant citoyen de 1'Europe, notre auteur traite des differents Etats avec impartialite: comme il est question, en avril 1780, de demolir la Bastille pour pro ceder a des embellissements, il remarque que cela serait d'autant plus realisable que sous Ie present regne on pourrait aisement se passer de cette prison. Mais ce qui Ie caracterise surtout, c'est son esprit religieux, d'ou son commentaire sur la condamnation par Rome de La Pucelle d'Orleans, en juillet 1757: «ouvrage abominable [ ... ], production dans laquelle tout ce que la Divinite a de plus auguste et les Mysteres de la Religion de plus respectable, est profane avec une impiete et une indecence des plus criminelles ; ouvrage infernal, dans lequel1'auteur, pour donner carriere a sa malice, emploie les allusions les plus scandaleuses pour rep andre son venin sur tout ce qu'il y a de plus eleve, soit pour Ie rang, soit pour la puissance; ouvrage enfin ou ni Ie diademe ni les dignites que donne la naissance, ou que procurent les services, ne sont a couvert des traits satiriques de son auteur, dont la plume sale, livree a l'impurete et au blaspheme, n'emprunte ses portraits odieux que des idees les plus obscenes et les plus horribles qu'a pu lui suggerer son creur gate et corrompu».

L'auteur suivant, egalement inconnu, se differencie nette­ment de tous ses predecesseurs: violente attaque contre les Anglais en juillet 1780 (<<L'Anglais est un peuple qu'on ne pourra jamais reprimer, il faut Ie detruire, devaster son ile»), long plaidoyer en faveur des Jesuites en septembre, eloge appuye de la France en octobre, ces prises de position ex­pliquent sans doute qu'il n'ait passe qu'un an au Mercure.

Enfin Le Febure, un medecin, ne se charge du journal, d'ailleurs agonisant. que pour rendre service a la veuve Staatman. II ne manifeste aucune orientation ideologique particuliere.

Tables: Elles sont toutes integrees a la collection. En principe. on trouve une «table» ou «indice» des matieres a la fin de chaque tome. et parfois. en plus, une table chaque moist

7. II n'est pas prudent de se fier aux catalogues de certaines bibliotheques. On ne trouve dans aucune d'entre elles la collection complete des 192 volumes. Voici les principales: B.U. Leyde: 185 vol. (manquent 1-3 et 6-9); Ars.: 182 vol. (manquent 183-192); B.M. Lille: 183 vol. (manquent 184-192. et 178. 179, 181 et 183 sont incomplets); B.M. La Rochelle: 168 vol. (manquent 169-192; 46 et 168 sont incomplets); B.N.U. Strasbourg: 157 vol. (manquent 104-107, 122-123, 154-165. 176-192); Bibliotheque de la Societe d'histoire du protestantisme fran9ais, Paris: 153 vol. (manquent 1-2. 156-192); B.V. Amsterdam: 129 vol. (manquent 130-192); B.N.: 126 vol. (manquent 86 et 128-192 ).

On trouve encore 98 vol. a l'Inst., 75 a Ste G., 72 a La Haye. 71 au Centre des Fontaines a Chantilly, 49 a Amiens, etc.

8. B.H.C., H.P.G.; G.H.; D.P. 2, art. «Courtilz», «Guyot», «La Brune». «Rousset».

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Contrefa90ns: A part deux cas, toutes les contrefa90ns signa­lees dans Ie journal se situent entre 1743 et 1769. - Aout 1696: «Henry Van Bulderen aver tit Ie public que Georges de Bakker, libraire a Bruxelles, fait to us les mois contrefaire Ie Mercure historique, ou il ajoute ce qui lui monte a la tete, et en ate tres sou vent ce qu'il y a de plus curieux ». - Fevrier 1701: Ie Mercure de janvier a ete contrefait par Fran90is Broncaert, libraire a Liege, qui en a retranche Ie texte du testament du roi d'Espagne. Van Bulderen ecrit: «Je declare que je desavoue ledit Mercure. On trouvera dorenavant Ie mien a Maestricht chez M. de Lessaert, et a Liege chez la veuve de Theodore Delmer. De plus, ledit Broncaert imprime actuellement toutes sortes de me chants livres, qui n'ont jamais ete imprimes ici, et se sert de mon nom ou de celui de quelque autre libraire de Hollande ». - Mai 1743: une « contrefaction» est denoncee par Rousset, et Ie libraire signale encore, en novembre, qu'elle est imprimee sur du papier «plus grossier et plus brun avec un caractere tres use qu' on a de la peine a lire ». - Fevrier 1745 : «F.-H. Scheurleer avertit Ie public qu'il ne reconnait point d'autre Mercure historique et politique pour original et veritable que celui qui est marque de sa signature tel que ci-bas ». - Decembre 1745: «F.-H. Scheurleer avertit Ie public qu'il fait fondre de nouveaux caracteres pour l'impression de ce Journal, avec lesquels il commencer a d'imprimer son Mercure pour Ie mois de Janvier 1746, ainsi que les suivants, afin qu'on en puisse encore distinguer plus facilement sa veritable et origin ale edition, de celIe qu' on en contrefait dans les pays etrangers, laquelle est tout a fait tronquee et remplie de faussetes ». -Janvier et fevrier 1746: Scheurleer se plaint toujours de contrefa90ns. - Juillet 1757: une contrefa90n est publiee «dans une ville d'Allemagne». - Mai 1763: contrefa90n par <de Sieur Philipart, de Liege». - Fevrier 1769: F. Staatman signale deux contrefa90ns du Mercure, 1'une sous son pro pre nom, mais avec une pagination differente, l' autre a Geneve, chez Pellet et fils.

Mentions dans la presse du temps: Bayle, Nouvelles de la Republique des Lettres, dec. 1686. Thomasius, Monats­gespriichen. Halle, 1690, 1. f. 66-83. Le Noble, La Pierre de touche politique, en particulier sept., oct., nov. 1690 et mai 1691. Sallengre, Memoires de litterature, La Haye, 1715. Niceron, Memoires pour servir a l'histoire des hommes illustres dans la RepubJique des Lettres, Paris, 1727, t. II. Brequigny, Journal des savants, oct. 1760.

Lettres, articles, monographies et livres: lettre de Minutoli a Bayle, 8 sept. 1690 (Choix de la correspondance inidite de Pierre Bayle, edt Gigas, Copenhague, 1890, p. 542); lettre de Bayle a M. Constant,s janv. 1691 (Lettres choisies de Bayle, Rotter­dam, 1714, t. I, p. 299); lettre de Bayle a Minutoli, 6 oct. 1692 (ibid., t. II, p. 384); lettre de Bayle a Minutoli, 14 sept. 1693 (ibid., t. II, p. 440); - Bayle, Reponse aux questions d'un provincial, Rotterdam, 1704, t. I, p. 447. - Fevret de Fontette, reed. de la Bibliotheque historique de la France du pere Lelong, Paris, 1771, t. II, p. 626. - Meusel. Bibliotheca

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historica, Leipzig, 1782, t. I, p. 163. - Runge H., Courtilz de Sandras und die Anfiinge des « Mercure historique et politique »,

Halle, 1887. - Bourgeois et Andre, Les Sources de I'Histoire de France, Paris, 1913-1935, 3e partie, t. IV, p. 44. - Woodbridge, Gatien de Courtilz, sieur du Verger, Baltimore et Paris, 1925. - Lombard J., Courtilz de Sandras et la crise du roman d la fin du Grand Siecle, PUF, 1980, p. 11-12, 88-89, 273-285, 347-357· - Lombard J., «Les redacteurs du Mercure historique et politique de La Haye (La Haye, nov. 1686 - avril 1782) », dans Langue, Litterature du XVrF et du XVIIr e siec1e, Paris, CDU-SEDES, 1989.

C' est Courtilz de Sandras qui fonde ce journal en novembre 1686, a 1'adresse fictive de Juan Batanar, a Parme; il s'agit en rea lite de Henry Van Bulderen, libraire a La Haye, dans Ie Pooten dont Ie nom apparait en fevrier 1688. Courtilz declare qu'il veut pallier l'insuffisance et la partialite du «Mercure de Paris», mais c'est surtout avec Le Noble qu'il entretiendra la polemique, tout en essayant de se montrer objectif et me sure a 1'egard de la France. Courtilz reste Ie redacteur du Mercure, non pas jusqu'en mars 1689, comme on l'a longtemps repete a la suite de Runge, mais jusqu'en avril 1693, date a laquelle il est mis a la Bastille en raison de ses activites clandestines; ce Fran<;ais, ancien capitaine de cavalerie, passe en Hollande en 1683, se livre en effet au commerce de livres interdits, dont beaucoup d'ailleurs sont de sa propre plume, entre la Hollande et la France. D'autre part, contrairement a une affirmation souvent reprise, la participation de Bayle au Mercure en I689 et 1690 est fort peu vraisemblable. .

Le successeur de Courtilz de Sandras n'est pas, comme on Ie dit toujours, Rousset de Missy, alors age de 6 ans, mais un certain La Brune, dont l'identite exacte n'est pas facile a etablir. C'est un calviniste ne en France et passe en Hollande. Son orientation est nette: attitude favorable aux Anglais et aux Hollandais, hostilite a l' egard de la France et de la Papaute. II reste au Mercure jusqu' en juillet 17 I 0. .!

A partir du mois d'aout 1710, Ie journal est redige par un auteur qui s'appelle peut-etre Saint-Elier, mais dont on ne sait rien. Relativement modere en politique comme en religion, il reste sans doute au Mercure jusqu'en decembre 1715.

En tout cas, en janvier 1716, changement de libraire: a Van Bulderen succedent les freres Louis et Henri Van Dole. Et il est probable que les nouveaux proprietaires ont egalement engage un autre redacteur. Mais de celui-ci non plus on ne sait rien, si ce n'est qu'il se nomme peut-etre Saint-Bonnet. Son ton est plus polemique (contre la France et Rome) que celui de son predecesseur.

En octobre 1719, Henri Van Dole reste seul possesseur du Mercure. II prend un nouveau redacteur en octobre 1722, Guyot. Contrairement a ce qu'on dit generalement, il ne s'agit sans doute pas de Guyot de Merville, mais plutot de son pere, Edme Guyot. Quoi qu'il en soit, Henri Van Dole etant decede, sa veuve, qui lui succede a partir de janvier 1724, congedie Guyot en juillet de la meme annee, «sur les

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plaintes qu'elle a re<;ues de divers endroits que son Mercure etait rempli de choses peu convenables » (on ne voit d' ailleurs pas a quoi elle peut faire allusion). Elle Ie remplace par «un autre auteur tres capable, qui remettra Ie Mercure sur l' ancien pied»: il s' agit de Rousset.

Rousset va rediger Ie journal a partir d'aout 1724 jusqu'en decembre 1750, et verra, pendant cette longue periode, trois libraires se succeder a la tete du Mercure. En effet, en decembre 1725, «la veuve de H. Van Dole ayant resolu de quitter Ie commerce» vend Ie journal a Henri Scheurleer, egalement libraire a La Haye, qui Ie cede a son tour a son fils Frederic-Henri en juillet 1741. Rousset jouit d'une notoriete internationale: il est «membre des Academies des Sciences de Petersbourg et de Berlin». Protestant refugie en Hollande, il est naturellement hostile a la France et au catholicisme, mais sans manifester, du moins dans Ie Mer­cure, la violence dont on Ie taxe habituellement.

En janvier 1751, sans qu'on en sache la raison, Rousset quitte Ie journal. II est remplace par un nouvel auteur qui, d'entree, declare qu'il veillera soigneusement a ce qu'on ne puisse 1'identifier. II y reussit fort bien, grace en particulier a la neutralite de ses idees, et c'est dommage, car c'est lui qui restera Ie plus longtemps au Mercure: jusqu'en decembre 1779. En novembre 1755, on apprend que Ie libraire F.-H. Scheurleer est installe sur Ie Cingel; en mars 176 I, il change d'adresse et se fixe «dans Ie second Wagestraat». Mais en aout de la meme annee, il meurt subitement d'une apoplexie; c'est sa veuve qui lui succede, pour peu de temps d'ailleurs, car il est annonce, en fevrier 1762, qu'elle a vendu Ie Mercure et tout Ie reste de son fonds a Hoffman et Compagnie, toujours a La Haye, «au Voorbout pres du Vossen-Tuintje». En avril 1763, apparait Ie nom d'un asso­cie: «Hoffman et Staatman» sont installes sur Ie Kalver­markt, nouvelle et derniere adresse du Mercure. Le mois suivant, Ie nom de Hoffman disparait. En novembre et decembre 1770, une annonce fait savoir que «Henry Back­huysen et Frederik Staatman sont de venus proprietaires de tout Ie fonds du Journal, universellement connu, intitule Mercure historique et politique », et ce sont ces deux noms qui apparaissent sur la page de titre a partir de janvier 1771; mais en octobre 1775, F. Staatman reste seul.

Un nouvel auteur arrive au Mercure en janvier 1780, mais ses idees sont trop differentes de celles de ses predecesseurs (hostilite a l' egard de l' Angleterre, eloge de la France et des Jesuites), de sorte que la veuve de F. Staatman, qui succede a son mari a la tete du journal en novembre, cherche un autre redacteur plus conforme aux habitudes de ses lecteurs.

Elle croit Ie trouver en la personne de Le Febure de Saint­IIdephont, un ami de son mario qui prend en charge Ie Mercure a partir de janvier 1781. Mais Le Febure, qui est medecin, n'a accepte que pour «obliger une veuve chargee d'enfants»; il n'a guere de temps a consacrer a son nouveau metier; en fevrier et mars, il doit s'excuser pour les nom­breuses fautes que Ie correcteur laisse passer. En outre, il a voulu donner un objet supplementaire au journal, qui est

Page 9: 940 MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE 1 (1686-1782)mavall/libguides/documents/... · 940 . MERCURE HISTORIQUE ET POLITI QUE . je parlerai des gens de qualite avec quelque sorte de connais

940 ' MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE

devenu Ie Mercure historique. politique et litteraire, Mais les lecteurs protestent. et en juin on retrouve Ie titre et la formule anterieurs, Cependant Ie journal vit ses derniers mois. En fevrier 1782. la veuve Staatman. qui veut manifestement mettre fin a son activite. fait savoir qU'elle a encore quelques exemplaires complets de la collection. et. avec Ie mois d' avril 1782 et Ie t. 192. sans explications, Ie Mercure historique et politique de La Haye cesse de paraitre, apres presque un siecle d' existence.

Jean LOMBARD

941 MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE 2 (1738-1739)

1. Mercure historique et politique, «Contenant I'Etat present de I'Europe, ce qui se passe dans to utes les Cours, les Interets

MERCURE HISTORIQUE

ET

PO L ITIQUE, COiltenant I'Etat preftnt de rEuropt t­

ee quift paffi dtln.f to ute! lu Courl. /e.s lnte'rhs 'de.! Princes, f.5 (6 Cju 'if J a de plus curieux pour Ie

Mois de Fevr ier-1739. Le tout accompagne de Reflexion's

Poliriques fur chaque Erar.

STOCK H OLM, a l'hnpri'I1'lerie R oyale . .Apr,cs l'Edirion de Hollande

& allgment~ M. Dec. )1 XXIX.

des Princes, & ce qu'il y a de plus curieux pour Ie [date]. Le tout accompagne de Reflexions Politiques sur chaque Etat».

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MERCURE HISTORIQUE ET POLITI QUE

2. Juin 1738 - aout 1739; 2 volumes, mensuel.

3. Les deux volumes sont designes par Tome CV et Tome CVI; t. CV: 762 p., t. CVI: 642 p.; Ie nombre de pages du cahier varie de 102 a 112.

Cahier: 75 x 130, in-I2.

Illustrations: sur la page de titre un Mercure tenant dans sa main droite Ie caducee; differents culs-de-Iampe.

4. Stockholm, l'Imprimerie royale.

Imprimeur-libraire-editeur: Peter Momma. A la derniere page de la livraison de novembre 1738, on trouve cette indication: «Ceux qui souhaitent avoir ce Mercure pour l' an nee 1739, plairont de prenumerer avant la fin du mois de janvier pro chain avec 10 dalers 16 are Kopparmunt [monnaie de cuivre] pour toute l'annee. On n'imprimera pas un Exemplaire au-dela du nombre des Prenumerans ».

5. Peter MOMMA.

6. Contenu annonce: voir Ie titre; il n'y a ni prospectus ni preface.

Contenu reel: nouvelles d'Italie, de Turquie, de Hongrie, d'Allemagne, de la Grande-Bretagne, de Suede, etc.; princi­paux centres d'interets: nouvelles politiques.

Tables: t. CV se termine par une Table alphabetique, non paginee, du genre d'un index des noms et des matieres.

7. Localisation: B.U. Uppsala, Sv. Allm. hist. Tidskr. (man­quent mai et juin 1739); B.R. Stockholm, Sv. Saml. Tidskr. 77 a (mai et juin 1 739 manquent); B.D. Lund, Tidskr., Sv.; B.D. Goteborg, Tidskr. Sv. (fevrier 1739); B.D. Helsinki, P-972.

8. Sylwan 0., Svenska pressens historia till statshviiljningen I772, Gleerupska Universitets-bokhandeln, Lund, 1896,

P·I3·

Peter Momma etait depuis mars 1738 proprietaire de l'Impri­merie royale a Stockholm. Sa famille etait d'origine hollan­daise (son arriere-grand-pere, Willem Momma, s'etait installe en Suede au milieu du xvne siecle et y avait fonde, avec ses deux freres, plusieurs grandes entreprises). Peter Momma avait herite de la capacite et de l'energie de ses ancetres, et pendant ses voyages a l'etranger, en Hollande surtout, il avait appris Ie metier d'imprimeur. II crea la premiere fonderie de caracteres en Suede, et il joignit aussi a l'Imprimerie Royale une papeterie et une maison d'edition importante .

Le Mercure historique et politique, qui commence a paraitre trois mois apres que Momma est entre en possession de l'Imprimerie royale, n' est pratiquement qu'une reimpression de l'edition de Hollande. C'est aussi ce qu'on lit en bas de la page de titre a partir de la deuxieme livraison. Le numero de juillet porte: «apres I'Edition de Hollande» et les numeros suivants: «Apres I'Edition de Hollande & augmente ». On serait enclin a croire que les articles qui portent sur la Suede

Miguel Valladares
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Miguel Valladares
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