5 Désire-Moi - ekladata.comekladata.com/ah4gu36ZtqC0Q6YRVn-k8avaTJ4/Desire-Moi_-_T5.pdf · Puis,...

46

Transcript of 5 Désire-Moi - ekladata.comekladata.com/ah4gu36ZtqC0Q6YRVn-k8avaTJ4/Desire-Moi_-_T5.pdf · Puis,...

HannahTaylor

DÉSIRE-MOI!

SOUSL'EMPRISEDUMILLIARDAIRE

Volume5

1.Conflitsd’amour

AéroportCharlesdeGaulle

Les nuages sont bas et l’horizon est gris. Les larmes d’Anabelle, ma meilleure amie venuem’accueillir à mon arrivée de Shanghai, ne cessent de couler. La nouvelle qu’elle vient dem’annoncer a créé une tempête dans ma tête. Un éclair électrique a brûlé mon cœur et je resteparalyséependantquelquesinstants.

Jules. Notre cher Jules, notre ami de tous les instants, les bons comme lesmauvais. Disparu ?KidnappécommeleditAnabelle?Dansmonstudiomême?Moncœurn’estplusquecendresetjesensàpeinelamaindeChrispassersurmondos,ententativederéconfort.

Jelèvelesyeuxverslui.Sonregarddurettendusemblepouvoirpercerlapierre.Jenel’aijamaisvucommecela.Sespommettessaillantesetsonregardvertetor luidonnentunairde loup,prêtàdévorern’importequelennemi.Jesaisqu’ilsesentcoupabledefairepeserledangerquil’entouresurmoietmonentourage.

Êtreunimmensearchitectemultimilliardaireestcertainementunstatutenviéparbeaucoup,maisles périls encore obscurs qu’il affronte sont bien au-delà de ce que pourrait supporter un hommeordinaire.

Quand je pense qu’il n’y a pas trente minutes nous étions encore enlacés tendrement dans laBusinessClassdeAirChina, insouciantset l’avenirpournous.Chrismepromettaitde trouverunesolution à la nécessité du secret entourant notre relation. En tant qu’ambassadeur du mythiqueconcoursGoldstein,révéleruneliaisonavecl’unedescandidatessigneraitmonrenvoietlafindelaréputation deChris. Et je ne peux imaginer quitter ce concours, le SaintGraal de tout étudiant enarchitecture.

Maiscesconsidérationparaissentbien loinmaintenant.Lachuteestbrutaleet inattendue.J’avaiscru les dangereux événements de Shanghai enfin derrière nous, oubliés à jamais.Mais je ne peuxdésormaiseffacerdematêtel’imagedeladétressedeJules.Oùest-il?Va-t-ilbien?Est-ilencore...envie?Jenepeuxm’empêcherdepenserquesijen’avaispasrencontréChristopher,Julesseraiticiavecnous.Maisjemereprendsvite.C’estinjuste,Chrisn’yestpourrienetjeneregretteraijamaisdel’avoirrencontré.

Lebrouhahaduhalldel’aérogaremeréveillesoudain.Iln'yapasuneminuteàperdre!Ilfautquej’aillevoirl’étatdemonappartementauplusvite,etparleraveclapolice.JeplongediscrètementmesyeuxdansceuxdeChris.C’estunevéritabletorturecarnousallonsdevoirnouslaisserici.Iln'existepasderaisonofficiellepourqueChristopherLordsuiveLucieLerner,simplecandidateduconcours,pourdesproblèmespersonnels...Nousdevonsencorefairesemblant.

– Monsieur Lord, merci beaucoup pour votre compagnie à bord de l’avion. Je dois

malheureusement partir rapidement, mais je serais heureuse de vous revoir pour la prochaineépreuve.

–Leplaisirétaitpourmoi,mademoiselleLerner.J’espèrequevossoucisserésoudrontvite.

Nosregardsendisentbienpluslong.Devoirnousmentircommeçanouscrèvelecœur.Pourtantillefaut...Maispourencorecombiendetemps?

Puis,jesuisAnabelleauparking,noussautonsdanssavieilleFiat500,etfonçonsverslacapitalesous le ciel sombre etmenaçant.Arrivées en bas de l’immeuble, les pneus crissent tandis quemameilleure amie se gare sauvagement à cheval sur le trottoir. Nous montons les marches quatre àquatrequand jem’arrêtenetsur lepalierdemonstudio. J’aiuncoupaucœurenvoyantmaportefracturée. Heureusement, Anabelle y a installé une serrure de fortune. Quelle chance de pouvoircomptercommeçasursesamis ! J’avancemais j’aipeurdeceque jevais trouver.Doucement, jeposemamainsurlapoignée.

Jepousse.

Laporteglissetouteseule.Jefermelesyeuxetavancedequelquespas.JesensAnabellederrièremoietsaprésencemerassure.J’ouvrelesyeux.Mapoitrineseserre.Jenem’attendaispasàcela:toutaétécomplètementretourné.Unvraityphonaravagél’appartement.Mesyeuxparcourentlesol,lesmeublesrenversés,leslivresouvertsetpiétinés,mesvêtementspartoutétalésentâchesdecouleurmaisaussilecanapééventré,lesmurslacérés,lacuisinedétruiteetlavaissellebrisée.

Jenepeuxempêcheruntremblementetdeslarmesmonter.Maisilfautquejesoisforte.Anabelles’estbaisséepourcommenceràramassercequ’ellepouvait.Jeprendsmonportablepourappelerunserrurier.Celameparaît leplusurgent.Puis,sansunmotéchangé, jemebaisseetaideAnabelleàranger.Leserrurierarriverapidementavecuneportederemplacement.Blindée.

–Lucie,jesuisadmirative,meditAnabelle.Tuessicalme.Tuprendsleschosesavecuntelsangfroid.Tuesréellementextraordinaire.

– J’aimeraisbien,Anna.En fait je suisanéantie.Moncerveauest anesthésié. J’essaiedenepluspenseràrien.Iln’yaquelevisagedeJulesquimehante.

À cesmots,Anabelle s’essuie les yeux.Comment faire, que penser quand notremeilleur ami adisparu ? La police s’était chargée d’appeler ses parents. Nous décidons de leur téléphoner pourprendredeleursnouvelles.Mêmes’ilsavaientmisJulesàlaportedechezeuxaprèssoncomingout,toutcelaparaîtbienridiculefaceàundramepareil,etnouslessentonseffondrés.Noustentonsdelesrassurerdumieuxquenouspouvons.Maisjenepeux,àlamanièredeChris,réprimerunsentimentdeculpabilité. Ilss’ensontprisàmonentouragepourattaquerChris,et jesuisunmaillondecetteterriblechaîne.Jamaisjenem’enremettrais’illuiarrivaitquoiquecesoit.

J’appelleChrispour trouverunpeuderéconfort.Va-t-ilconsidérercelacommeleproblèmedetrop et vouloir s’éloigner demoi afin de simplifier sa vie et son travail ? Je le joins sur la lignesécuriséequinouspermetdeparlerlibrement.

Ilrépondàlapremièresonnerie.J’entendsderrièreluidubrouhahaetbeaucoupdemouvements.

–Lucie?Commentçava?Dis-moivite.–MerciChris,je...je...jevaisbien,net’enfaispas.Jesuistrèsinquiète.Julesneméritaitpascela.

C’étaitquelqu’unde...–Cessedeparlerdeluiaupassé.–Tuasraison.Ilyadumondeautourdetoi?–Jepréparemeshommes.–Teshommes?Maisdequoituparles?–Jenepeuxpaslaisserpasserquelquechosecommeçaencroisantlesbras.–Maislapolices’encharge,non?–Lapolice?Lucie,ceshommesenontaprèsmoi.C’estàmoid’yaller.Ilsm’ontfaittropdemal

etilst’ontfaittropdemal.Etmaintenantàtonmeilleurami.C’enesttrop.Jevaislesdétruire,Lucie.Ilsnes’ensortirontpascommeça,dit-ildansungrondementderagecontenue.

Jen’aijamaisentenduChrisparlerainsi.

– Comprends-moi Lucie, continue-t-il d’un ton glacial. On ne touche pas comme ça à ce quicompte lepluspourmoi. Jeneveuxpas te revoir lesyeuxpleinsde larmes.Jecrèvedemesentirresponsabledetoutça.

–Mais tu n’es pas coupable, Chris ! Ce sont ces hommes qui sont terribles. Ton seul tort estd’avoirvouluassainirlaLordcompany!

–Peut-être,maissijen’avaispasétélà,Julesseraitsainetsauf.Pointfinal.

J’entendsàtraverslecombinélavoixd’unhommequiadresselaparoleàChris.

–Attendsuneseconde,Lucie.

Chrisparled’unevoixforteetautoritaireauxpersonnesautourdelui.

–AppelezMichaelpourrassemblerplusd’hommes.Jevaisdébloquerdescréditssupplémentaires.Retrouvercethommeestlapriorité.

–BienmonsieurLord.Jem’enchargedesuite.

Je sens un véritable respect mutuel entre Chris et les hommes autour de lui. Je commence àcomprendre que l’on ne devient pas Christopher Lord par hasard,mais que c’est un exceptionnelmeneur d’hommes qui comprend la valeur humaine. Peu sont comme lui. Trop de puissants segargarisentdeleurpouvoirpourasseoirunorgueilvaniteux.

–Excuse-moiLucie.–Ohnon,Chris,je...–Jedoistedireautrechose.

Sontondéterminém’inquiète...

–Jemeursdenepouvoirtesoutenir.Jevoudraistellementêtreàtescôtés,là,maintenant.–Jesais,c’estunetorturepermanente.Tuessiloin.–Non,Lucie.Ilyaunesolution.Unesolutiontrèssimple.–Comment?Maisàquoitupenses?

–Tuestropimportante,Lucie.LeconcoursGoldsteinn’estrienàcôtédetoi.–Jenecomprendspasoùtuveuxenvenir,Chris.–Jedémissionnedemesfonctionsd’ambassadeurduconcours,Lucie.C’estlaseulesolutionpour

qu’onpuisseêtreensemblesansnouscacher.–Comment?Mais...Mais,ettaréputation?Ettonimagepublique?Quevontdirelesgens?Et

cethonneurd’êtreambassadeurpourleconcoursGoldstein?Çan’arrivequ’unefoisdansunevie,Chris!C’estinestimablepourtacarrière...Tunepeuxpasfaireça.Jetel’interdis.Situfaiscela,jequitteleconcours.Tuasplusàperdrequemoi.Sil’undenousdoitsesacrifier,c’estmoi.

–Nedispasdebêtises,Lucie.Cen’estpasàtoideprendrecettedécision.Jedoisportercelaseul.–Mais...–JedoistelaisserLucie,j'aiuneréunionimportante.Etjedoisappelerlecomitédirecteurdela

Goldstein Foundation. Je vais détruire toutes ces barrières, Lucie. Celles qui empêchent mes brasd’êtreautourdetoi.

–NonChris!Non!–ÀbientôtLucie.Jepenseàtoi.

Etilraccroche.

***

Anabellem’hébergecesoircarmonstudion’estabsolumentpashabitablepourl’instant.Etmêmesinoussommesmoroses,Anabellefaitdesonmieuxpourégayerl’atmosphère.C’estmoiquisuisadmirativedevantelle,devantcettefille,l’amieenjouéeetfêtarde,pulpeuseetdéluréeavecsafortepersonnalitéquel'onpourraitlacroiresuperficielleetvulnérable.Maiselleesteffectivementsolidecommeunroc.C’estdanslesmomentsdifficilesquel’onvoitlavraiepersonnalitédesesamis.

Noustrinquonsensilenceavecnosverresdevinblanc.Àcôté,surlatablebasse,nousavonsserviuntroisièmeverre.Pourl’absent.UnemanièrepournousdefairecommesiJulesétait toujourslà,avecnous.

–Jen'arrêtepasdepenseràl’interrogatoiredelapolice,Anabelle.–Toiaussi?–Tusais,cequim’afaitlepluspeur,c’estdelesvoirinquiets.–Pareil.–Ilst’ontdemandéaussisiJulesavaitdesraisonsdevouloirdisparaître?–Ohoui !C’esthorrible !T’imagines?Etpuis l’inspecteur, là,enchemisebleue. Ilétait super

énervé.Franchement,j’étaismalcommetupeuxpast’imaginer.–Y’aplusqu’àespérer,Anna.Tusais,Chrisaprisleschosesàbras-le-corps.Ilpeutabattredes

montagnes.–J’espèrequet’asraison.

Jem’endorssurlecanapédusalond’Anabelle,sousunemincecouverture.Cen’estpasleluxeduGoldsteinmaislachaleurhumainevauttouslesraffinements!

***

Le lendemain, je prends un café fumant et des tartines grillées tandis que j’entendsAnabelle sepréparerdanslasalledebains.Elleensorttoutepomponnéeetmefaitrapidementlabiseenfilantautravailenretard.

–Çavaaller?luidis-je,inquiète.–Jemesensmalmaisjenepeuxrienfairedeplus.Ilfautvraimentquej’aillebosser.

Jen’aipasletempsdeluirépondrequelefracasdelaportefaittremblerlesmurs.Encoreunequidoitbiens’entendreavecsesvoisins,tiens...

Soudain,montéléphonevibre.j'aiunmessageetc’estChris.

[CaféduMétro.30min.Baisers.CL]

Trente minutes ? Il est dingue ? On voit qu’il n’a pas encore saisi toutes les facettes de mapersonnalité!Jenesuispascertainedeluiavouertoutdesuitequ’àlafaconmesurnomme«LucieRetard»...

Uncoupd’œildanslemiroirdelacuisine:

•Cheveuxébouriffés:OK

•Yeuxbouffisdesommeil:OK

•Visagepasdémaquillé:OK

•Chemisedenuitfroissée:OK

•Paniqueduretard:OK!

Je me précipite dans la salle de bains. Ah oui, c’est vrai, j’avais oublié que c'est de notoriétépubliquequ’Anabellen’estpaslaprodurangement!Laserviettemouilléeestenbouleparterre,ilyades cotons éparpillés et des cheveuxdans ladouche.Bon,pas le tempsde réfléchir, je retiremaculotteetmachemiseetsautesousl’eau...glacée?Aaah!Unesecondeaprès,c’estbrûlant.C’estpaspossible,iln’yapasmoyendevivreunmatinnormal,non?

L’espritdésembrumé,j’enfilemonjeanbleucieletmonchemisierblanc.Jefixemescheveuxenchignonenungesteavecunstylobille,etessaiedésespérémentd’enfilermesescarpinsrougestoutenmepassantdumascarasurlescils.

Jepeuxmaintenantgarantirquec’estàdéconseiller.

L’œilrougiducoupdebrosseàmascara,jedévalelesescaliersdel’immeubled’Anna.Jefouilledans mon sac à main pour prendre mon portable : quelle heure est-il ? J’ai déjà dix minutes deretard!Mestalonsclaquentsurlapavéparisientandisquejerelèvelatêteetappréciederetrouverl’airdelacapitale.Lesimmeubleshaussmanniensdéfilentàdroiteetàgaucheetilyacepetitje-ne-sais-quoi si français qui flotte dans l’air.Tant de voyages saturent unpeu le cerveau et revenir au

bercailmefaitdubien.

Lecaféestenvueauboutdelarueetenarrivantsur la terrassejevoisChrisquis’installe toutjuste.Unebiserapidebiensûr,noussommesenpublic,maisjesourisenluifaisantremarquersonretard,choseétonnantepourlui.

–MaisLucie, je suisparfaitementà l’heure. Jecomptaisbienentenduavec tonquartd’heurederetardhabituel,dit-ilavecundemi-sourirequiplissesesyeuxdebraise.

Grillée!Etmoiquipensaitavoirsucachercespetitestaresquim’embarrassent...Iln’empêchequerevoiricisonvisageracéetsesyeuxenamandemecaresserduregardmefaitfondrelittéralement.Puissonsouriretombe.

–Oh,désoléLucie.Tuaspleuré,c’estça?Ildemanded’untonattentif.

Illèvelamainversmajoueetlacaressedesapaume,sonpoucesousmonœilrougi.

–Ohnon,Chris,çac’est...euh...

Je n’ose pas trop continuer.MaisChris nem’en laisse pas le temps et approche son visage dumien,toujoursposédanssamain,etposeseslèvresdoucesetsatinéessurlesmiennes.Sonbaiseresttendreetdélicat.Sentimental.

Çatourbillonned’uncoupdansmonesprit.

–ArrêteChris!Toutlemondepeutnousvoir!–Exactement,toutlemondepeutnousvoir.Etilsdevraientgarderlesyeuxouvertsparcequeje

n’aipasenviequ’ilsratentça.–Chris?–JenesuisplusambassadeurduconcoursGoldstein,Lucie. Jesuis libre,dit-ilavecunsourire

ravageur

Etilsepenchedenouveaupourm’embrasser.Alorsquenosbouchessetouchent,jeprendssatêteentremesdeuxmains. Il n’y a pasgrandmondedans le café.Lebarman.Un serveur.Quatre-cinqclientsépars.Toussefichentéperdumentdenotrebaiser.Maiscebaiserenpublic,là,justesousleursyeuxestlepluspassionnéetleplussensuelquenousayonspuéchanger.

Enarrivant,leserveurmetfinànotrebaiseretildéposenoscaféssurlatable.

Chrisreprend:

–Tuasréussiàdormirunpeu?– Anabelle est gentille de m’héberger, mais cela ne pourra pas durer bien longtemps. Son

appartementn’estpasfaitpourdeuxetellevitdansunbazar,euh,commentdire...–...Organisé?–Non,non.Total.Unbazartotal.C’estçalebonmot.

Chrissourit.Jecontinue.

–Maisc’estlecadetdemessoucis,Chris.J’imaginequetun’asaucunenouvelledeJules?–Non,maisc’estencours.–J’aipeur,Chris.Jenepensequ’àça.–Lucie,jedoistedemanderquelquechose.–Oui?–Cequ’ilyaentrenousesttrèsfort,Lucie.Tropfort.–Je...–LaLordCompanypossèdedetrèsnombreuxpalacesdontcertainsàParis.Viensvivredansl’un

demeshôtels,Lucie.

Comment?C’estunpeucommes’ilmedemandaitdevivre...chezlui?

–Je...AttendsChris,jenesaispassitoutçaarriveaubonmoment...Tusais,Jules,je...C’estdurtusais...

–Lucie,tuserasbien,tuverras.C’estconfortable.Jem’occuperaidetoicommeilfaut.

Mes sentiments semélangent... Julesadisparu...Chrisme fait unegrossedéclaration...Mais serend-ilcomptequecen’estpeut-êtrepaslebonmoment?Lebontiming?

–Tuasbesoind’unlieupourvivre,Lucie.

Ilaraison.EtcenevapasêtrepossibletrèslongtempschezAnabelle

– D’accord, Chris. Je te remercie. Mais, disons que c’est provisoire. Jusqu’à temps que monappartementsoitremisenétat.

–BiensûrLucie,toutcequetuvoudras.

Jesuistouchéeetperdue.Malgrélessentiments,jesensunpetitventd’incompréhension.

***

Les lourds rideaux de velours blanc habillent l’immense baie vitrée de la suite du palace.MesaffairesonttoutesétéapportéesdechezmoipardesemployésdelaLordCompany.

Mêmesi jeneveuxpasmefaireentretenir, j’appréciequandmême l’idéededormirdansun litkingsize tous lessoirsetdedînerau restaurantde l’hôtelplutôtquedemefairedespâtesau thondansmakitchenette.

Onfrappeàlaporte.

–Entrez!

Un immense bouquet de fleurs exotiques apparaît devant un tout petit groomqui le tient, cachéderrière.

–DelapartdemonsieurLord,mademoiselle.–Wouah!Ilestmagnifique!

Legroomsouritdiscrètementenvoyantmaréaction.Ildéposelevasesurlaconsole,etseretireensilence.Jemesensunpeugênéeparceservicesicourtois.

Unefoisseule,l’extraordinaireodeurdesfleursembaumelapièceenuninstant.Jefermelesyeuxetmelaisseemporterparl’enivrantparfum.Çamerappellequelquechose...Maisoui,biensûr!CesontlesmêmesfleurssauvagesprésentesenIndonésielorsdenotrepetiteescapadesensuelledanslanature... La douce fragranceme renvoie en un instant dans des souvenirs voluptueux. Je ferme lesyeuxquelquessecondespourygoûterdiscrètement,puisreviensaumonde.Ilsait indiscutablementdispensercertainesattentionsromantiques...

Je descends à la réception pour aller dîner. Chris m’a dit qu’il ferait son possible pourm’accompagner ce soir.Arrivée au lobby, je souris car je le vois effectivement assis sur l’un desfauteuilsdecuir,enpleinediscussionavecunhommededos. Jem’approche.Ohnon !C’estAlanSlyde ! Celui-ci tourne vers moi son long visage blanc et anguleux. Son expression ne changejamais:malsaineetdésagréable.JemedemandetoujourscommentChrispeuttravailleravecuntypepareiltouslesjours.EmbringuédansdesaffaireslouchessouscouverturedelaLordCompany,çamedépasse que Chris puisse avoir un ami pareil, même si apparemment ils se connaissent depuisl’enfance.

–BonjourmademoiselleLerner,melanceobséquieusementAlan.–Bonjour.Commentallez-vous?–Bien,bien...J’aientendudirequevousavezsouffertdeladisparitiond’unproche?Commec’est

malheureux.–Lapoliceestàsarecherche,effectivement.–Oui,lapolice...EtlaLordCompany !J’étais justemententraindedireàChristopherquejene

comprendspastoutcetémoipourunsimplepetitfaitdivers.Et,trèshonnêtement,jenepensepasquecesoitlerôledesfinancesdelaLordqued’êtreemployéespourça.Jeveuxdire,sicepauvregarçonestmort,nousnepouvonsplusyfairegrandchose,non?

–Pardon?Vousêtessérieux?–Oui,Lucie,vousconviendrezquenotreentreprisen’estpasunefondationphilanthropiqueetque

nousnepouvonsvolerausecoursdetoutepersonneappelantàl’aidesurlaplanète.

J’ai le souffle coupépar tant de cynisme et de noirceur. Jeme tourneversChris. Il ne dit rien.Comment?Maiscommentpeut-ilrestersilencieuxfaceàundiscourspareil?

Alanreprend:

–Bienentendu,Lucie,cen’estpasàmoidedécider,maismettonsquejedonnemonaviséclairé.

Éclairéparlaconnerie,oui!

Mespoingsseserrentetjemeretienstoutjusted’envoyervaldingueruncendrier.

C’estalorsqueletéléphoned’Alanretentit.

–Enfinbref,cetteconversationfûtpassionnante,maisjevaisdevoirvouslaisser.J’aiàfaire.

Il se lève sansunau revoir,donnequelquesordres autoritaires aupersonnel,puisdécroche.Ens’éloignant, je crois comprendre dans sa discussion qu’il donne des instructions de dépensespersonnellesàmettresurlecomptedelaLord.

Nonmaispourquiseprend-il?Pourlegrandpatron?Ilsecroitchezluiouquoi?

JesuisoutréeetmetourneversChrispourcomprendresaplaciditéfaceàtoutcela.

Chrisrestesilencieux.Ilsembleenpleineréflexion.

–Chris!Enfin?Pourquoit’asriendit?TuluiasditpourtonenlèvementenChine?Decequet’assouffert?EtdulienprobableavecJules?Illesaittoutça?Maisréponds!

MaisChrisconserveuneexpressionfixeet impénétrable,et sousson regardmétalliqueditd’untonindéfinissable:

–Tunesaispastout,Lucie.Jenepeuxpastouttedire.Pasmaintenant.C’estencoretroptôt.Jet’enprie,neleprendspasmal.Jefaisçapourteprotéger.Tudoismecroire.Tudoismefaireconfiance.

Etsoudain,ilselèveetvientpassersamaindansmescheveux.Ilmefixecalmementavantdemeserrercontrelui.Macolèreretombed’uncoup.

Oui,jelecrois.Oui,jeluifaisconfiance.

2.Latensionmonte

C’estunesouffrancequederepasseràmonstudio,neserait-cequepourunmoment.Maisjedoisaller cherchermon courrier.Mon cœur se serre en arrivant en bas de l’immeuble. Je n’ai aucuneenviedemonterlesétagespourrevoirl’étatdemonappartement.J’attendraiquelesouvriersaientterminélaremiseenordre.J’ouvrelaboîteauxlettresdanslehall,etrécupèrequelquesenveloppes.Facture,pub,impôt,pub,ONG,pub,pubetpub.Jemeretourneetfileenvitesseverslaportecochère.Enouvrantjemanquedecognerunjeunehomme.Jem’excuseetcontinuemonchemin.

Maisj’entends:

–Excuse-moi?

Jemeretourne.

–Oui?–Est-ceque...TuneseraispasLucie,l’amiedeJules?

Jem’arrête,intriguée.Lejeunehommeal’airtroublé.

–Euh...Oui,effectivement.Jepeuxvousaider?–Jet’aireconnuegrâceàunephotoqueJulesm’avaitmontrée.JesuisNoah,lecopaindeJules.Et

je...jenecomprendspas.Jen’aipasdenouvelles.Ilnerépondplusautéléphone,niàmesmails.Jenele vois plus sur Facebook non plus. C’est vraiment super bizarre. Je suis vraiment désolé de tedemander ça, je ne veux pas t’embêter, mais je commence à m’inquiéter. Ça fait deux joursmaintenantquejeviensicietpersonnenerépondaustudio,je...

Jemefige.MonDieu!Commentvais-jepouvoirannoncer lanouvelleàNoah?Monvisagesedécompose.Visiblement,Noahs’enrendcomptecarjevoisunéclairdedésarroidanssesyeux.

–Quoi?Dis-moicequ’ilya...

JefaisdemonmieuxpourexpliqueraveccalmeetdouceurlesortdeJules.Noahaccuselecoup.Jeprendssonnuméropourleteniraucourantetj’essaiedelerassurersurlefaitquetoutestmisenœuvrepourleretrouver.Jecroisqu’enm’appliquantàl’apaiserj’essaieaussidemepersuaderdenepasm’inquiéter.J’espèreêtreconvaincante.J’enaibesoinpourlemoral.

Jeluifaislabise,etlequitteenlelaissant,désemparé,surletrottoir.Sapeineravivelamienneetc’estlecœurserréquejeretourneaupalace.

Heureusement,j’airendez-vousavecAnabelle.Onvaseremonterlemoraltouteslesdeux.Jel’aiinvitéespécialement«àl’hôteloùjelogemaintenant»pourregarderensemblelaretransmissiondesrésultatsdel’épreuveprécédente,celledeShanghai.Çameremetleconcoursentête,unpeumisdecôtéavecladisparitiondeJules.

J’arrivedevantl’hôtel.Lafaçadeesttouteenvolutesdepierrestyleartnouveau.Leportierfaitlepied de grue devant l’entrée tandis qu’un ballet de voitures luxueuses se relaient en glissantsilencieusement sur le bitume parisien. J’entre d’un pas vif en saluant l’homme en uniforme. Ilsoulèvesonképi.

–BonjourmademoiselleLerner.

Jeluisourisetpénètredanslebâtiment.Jecommenceàmesentircommechezmoiici...Mauvaiseidée!Ilnefautpastropquejem’habituecarjenedoispasoublierquecen’estqueprovisoire.Lestravauxdansmonstudioserontbientôtterminésetleretournedoitpasêtretropbrutal.

Dansl’immensehalldelaréception,lesmurmuresfeutrésdesclientssemêlentettapissentlefonddel’aird’uneambiancecotonneuseetrassurante.Anabelleestaffaléedansundesspacieuxfauteuilsetjevoissursonvisagequ’ellen’enrevientpasdetoutceluxe.

– Ben dis-donc Lucie, je vois que t’es sacrément montée en grade ! dit-elle, fascinée par ledécorum.

Ducoindel’œil,jelavoiscaresserduboutdel’indexl’accoudoirdesonfauteuil,toutendaim.Ses yeux brillent en passant des lustres aux tables de designers, et des plantes exotiques auxmajestueuxescaliers.

J'interrompssarêverie.

–Bon,onyva?Outupréfèresglandouillerdanslaréceptiontoutelasoirée?

Anabellemesourit.

–Mmh,mafoi,s’ilfallaitchoisir,jemedemandeenfaitsi...–Ohnedispasdebêtises,etlève-toi!dis-jeenriant.

Nousnoustenonslebrasenmontantl’escalier.Nouscontinuonslelongdescouloirssurl’épaistapisdeveloursmenantàmasuite.Anabellemarchecommehypnotisée.Jevoisdanssonregardlemêmetyped’éblouissementquej’aipuavoiràmesdébutsauconcoursGoldstein.Commeçasembleloinaujourd’hui !C’estcommeuneautrevie.Maisà la finduconcours, il faudra redescendresurterre,etretrouvermavied’avant...

J’ouvrelaportedemachambrequandAnabellenepeuts’empêcherdesortirun:

–Putain!

Elles’éloignecinqpasdevantmoiettournesurelle-mêmedanslapièceenregardanttoutautour.J’ail’impressionqu’ellesesentcommedansuncontedefées.

–NonmaissérieusementLucie,c’estuneblagueouquoi?C’estlàquetuvisencemoment?–Hé!Anabelle,tuesmignonne.Maisnet’emballepas,c’estprovisoiretusais.–Hébenduprovisoirecommeça, je signe toutde suite !Et si tumedonnes lemilliardaireen

prime,jesuismêmeprêteàarrêterlevinetlechocolat.Àvie!

Je ris et jem’installe sur le canapé de la suite. J’ouvremon ordinateur pour lancer la page deconnexionausitedelafondationGoldsteinetj'attendslelancementdudirect.

Anabelles’installeàcôtédemoi,etnousnousserrons l’unecontre l’autre.Sous lesemblantdegaieté,noussavonsbientouteslesdeuxquelatristesseaffleure.Quenousnepensonsqu’àJules,etquedenoussentirensemble,soudées,celan’apasdeprix.

–Tusaisquej’aicroiséNoah,lecopaindeJules,devantl’appart’?–Non!Mincealors.Qu’est-cequ’ilvoulait?–Beniln’étaitaucourantderien.Alors...alorsjeluiaidit.–Ohlepauvre!C’estdur...QuandjepensequeJulesattendaittonretourpournousleprésenter.Il

aréagicomment?–Ilétaitcalme.Maisjecroisqu’ilvoulaitfairebonnefigure.Ilavaitl’airbrisédel’intérieur.

Etnousnous serronsunpeuplusennous tenant lebras, faceà l’écranqui faitdéfilerdespubsineptesenattendantl’émission.J’enprofitepournousservirdeuxverresdeChablispremiercruquenousdégustonsavecrecueillement.

Anabellesetourneversmoi.

–Tuesstressée?–Euh...Unpeu,oui.Tusais,ilyaforcémentunéliminé,etc’estpeut-êtremoi.Sic’estlecas,ciao

lacompagnieetfinilesjolisrêves.Commeça,d’uninstantàl’autre,enunclaquementdedoigts.Engros,siçase trouve,danstrenteminutes, jeredeviensLucieLerner,petiteétudianteà laSorbonne.Voilà.

–Enfaittufaisbonnefigure,maisaufondtubalisescarrément.–Oui.

Jemeradosseaucanapéetpousseunlongsoupir.Anabellemesourit.

Soudain,l’écrans’obscurcitetcommencealorslegénériquedel’émissionduconcoursGoldstein.Lamusiqueet les titrescolorés flashentdans tous lessenspourenfins’arrêteret laisser laplaceàl’inévitableprésentateursurexcitéauqueljemesuismaintenanthabituée.

–Dis-donc,Lucie,tonconcours,c’estpasn’importequoienfait!T’asvulatailledustudio?Leseffets,lepublic,toutça,moijepensaisquec’étaituntrucassommantd’universitairesquipapotaienttechniqueentreeux,maisenfaitc’estduvraishow,là.

–Mouais Anna, te laisse pas trop impressionner. LaGoldstein Foundation aime bien faire leschosesengrand,etne lésinenteffectivementpasà ladépense.Maiscrois-moi, leboulot,c’estplusquedusérieux,etlesépreuvessontdetrèstrèshautniveau.

–Mmh...Mouais,enfait,j’auraispeut-êtredûfairearchiàlafac,moi.J’auraisvoyagétranquillouà travers la planète, et me serais trouvé un chouette petit milliardaire beau comme un dieu quim’invitedanssespalacespourmedévorertoutecruequandbonluisemble.

–HahaAnabelle!Jesuiscontentequetusoislà.J’avaisbesoinqu’onmeremontelemoral.

Nousrionstouteslesdeux.Maisnousnoustaisonsvitecarleschosessérieusescommencent.Leprésentateurparaîtencoreplusexaltéqued’habitude,etsonairdepantindésarticulélerendlimiteunpeueffrayant.Sondébitdevoixencascadeinterminablefaitsuffoquernosoreilles.

–Mesdames etmessieurs c’est un réel plaisiiiiiir que de vous retrouver aujourd’hui, comme àchaquefoisdanslajoieetlabonnehumeur!Voicidoncunenouvellefois,endirectdelagrrrrrandesalle du château Goldstein, la retransmission des résultats du concours. La dernière épreuve sedéroulaitàShanghaietétaitpa-ssio-nnante!Lescandidatsonttravaillédur–commeàchaquefois–commesileurvieendépendait.Ehbien,leurvieendépendpeut-êtreunpeu!(rires)Lejuryabienentenduétéin-tran-si-geant,commeilssedoit.Etencoreunpeudepatiencepourconnaîtrelenomdugrrrrandgagnantdecetteépreuve!

Etblablabla...

–Maisqu’est-cequ’ilestpéniblecetype!s’écrieAnabelle,parfaitementsidéréeparcequ’elleestentraindevoir.

J’éclatederire.

–Haha!Ons’yhabituetusais.Jeterassure,ilsnesontpastouscommeçaauGoldstein!–Ahbentantmieux.Surtoutquejedoisavouerqu’ilyenaunoudeuxdanslepublicdeVIPqueje

croqueraisbienpourmonquatreheures,situvoiscequejeveuxdire!Tumeprésenterasunjouràtesnouveauxamis?

–Tusais,jevoissurtoutlesautrescandidats.Lesgrandspontes,moi,jelescroisepas.–Oualorsjustedansleurlit,styleChristopherLord.Jevoisquetuastoutcomprisàlavie,Lucie

Lerner!

Noustrinquonsenriant.Lagorgéedevinnousfaitredescendrecarnotreregardnepeutraterletroisième verre que nous avions servi pour Jules, comme la dernière fois.On pense à lui.On nepensequ’àlui.

Retourversl’écranetleprésentateuràressort.

– Toujours en direct du ma-gni-fique château Goldstein, voici un bref rappel du déroulé duconcours. Il se compose de six épreuves au total. Un éliminé pour les trois premières, puis deuxéliminésàchacunedestroisépreuvessuivantes.Legrandgagnantseradésignéautotaldunombredepointsremportésàchaqueépreuve.Dixcandidatsaudépart,ungrandgagnant,c’esttoutlesuspensedusupeeeerbeetmaaaagnifiqueconcoursGoldstein!

–Pfiou...Etilnesefatiguepastoutseul,cetype?mechuchoteAnabelle.

Çacontinue:

–...Jefaismaintenantunapartéimportantconcernantcertainschangementsdansleconcours.Eneffet,lecomitédirecteurduconcoursGoldsteinvoudraitfaireuneannonceexceptionnelle.

Onsentqu’unsilencesefaitetquel’attentionredouble.

–Notre très chermonsieurChristopherLord,nomméambassadeurduconcours cette année,nepourramalheureusementpasmenersonmandatàsonterme.Eneffet,pourdesraisonspersonnelles,monsieur Lord nous prive de ses compétences exceptionnelles et de son savoir-faire sans pareil.Nousluisouhaitonstoutlemeilleur.

Jemesens rougird’uncoup. Jene l’avaispasprévucelui-là !Évidemment, je savaisqueChriss’était désisté du concours, mais de l’entendre, de la voix d’un autre, là, à l’écran, devant tout lemonde...Çamefaittoutdrôle!Biensûr,ilneprécisepasquellessontces«raisonspersonnelles»,mais je sais que les rumeurs vont vite. J’ai l’impression d’apparaître en image dans les têtes dechaquepersonneassistantàl’émission...Jeredouteunpeulaprochainefoisquejevaisdevoirfairefaceàmescollèguesduconcours.

Bon, va falloir faire avec ! Anabelle me lance un regard apaisant en me serrant la main.Heureusementquejepeuxcomptersurelle.

Leprésentateurpoursuit:

–EtmêmesimonsieurLordestparessenceirremplaçable,ilnousfautunhommedeterrainpourtenirlabarre.Quelqu’unconnaissantdéjàtouslescandidats,quelqu’unsachantfairelatransitionsansaccroc,quelqu’und'indépendantdujury.Jevousannoncelanominationautitred’ambassadeurcetteannéede...

Maisdequipeut-ilbienparler?

–...d’AlanSlyde!Untonnerred’applaudissementspourlui!

Alan?Non!Maisqu’est-cequec’estquececauchemar?

–Etmaintenant voici l’heured’annoncer le lieude la quatrièmeépreuvedu concours.Après lamodernité flamboyante de la cité chinoise, nous voici dirigés vers une villemillénaire. Une villed’amour,d’artetdepoésie.Laseuleetunique«villelumière»,ils’agitbiensûrde...Paris!

Paris?Ouah,super!Mespenséestourbillonnent.Enfinjevaismeposerunpeu.Travaillerdansune ville connue est une excellente nouvelle !Ah tiens, je comprendsmieuxmaintenant pourquoiAlanestici,enFrance...

Anabelles’écrie:

–Ohchouette!Commeçaonvapouvoirsevoirunpeu.Çac’estbien.

Maistoutàcoupunfrissonmeparcourtledos:jenesuismêmepassûredenepasêtreéliminée!Çayest,lestressmegagne.Mesmainssecrispentetjemetends.Vite,lesnoms,vite...

Leprésentateurcontinue:

–VoiciMariaVenney,membredujury,quivanousdonnerlenomdelapersonneéliminée,ainsiquedugagnantdecetteépreuve.MadameVenney,jevousenprie.

Maria Venney, une plantureuse blonde nordique, se dirige vers le pupitre. Sa voix profonde,rauqueetautoritairerésonnedansleshaut-parleurs.

–Nousavonsétéunpeudéçusparlesprojetsrendusàcetteépreuve.

J’avalemasalive.

–Autantcertainssortentdulot,autantnousavonssentidurelâchementchezd’autres.Leschoixontdoncétérelativementévidents.

MonDieu,MariaVenneynerigolepas...Lestressmonte...

–J’ouvredonclapremièreenveloppe.Celledelapersonneéliminée.Ils’agitde...

Bruitdepapier

–...FiorenzaGratelli.

Ohnon!Quelledéception.Jesuissitristepourelle.Etjen’osepenseràJack.Ilsenouaitquelquechoseentreeux...Maisjeressensunepointedeculpabilitécarlestressestredescendud’uncoup:jereste!

–Quantaugagnantdecetteépreuve,jesuisfièredeféliciterunprojetremarquable,ils’agitde...JackFratt!

Etsaphotoapparaîtengrandsurl’écran.Visagelongetfin,cheveuxpoètes,châtainstirantsurleroux.Lesapplaudissementscrépitent.

Anabellemelance:

–Maisdis-donc,leJackKratz,là...–Fratt!–Oui,bon,commetuvoudras.Ben,c’estpasluitonami?–Sisi.–Maisilestsuperbeau!Situveuxfaireunebonneactionpourtasupercopine,présente-ledonc

moiàParis,lorsdel’épreuve.–Pfff...Anabelle...– Mais si ! Regarde-le, là, avec son air british, et son sourire de côté craquant. Moi, je suis

carrémentcliente!–Nonmaisilestpris...Enfin,entraind’êtrepris.Enfin,jecrois...

JerepenseàFiorenza.Déjàqu’ilsnesontpasfichusd’arriveràseparler tousseulscommedesgrands,alorssilatornadeAnabellevientymettresongraindesable...

Bipbip!

Unmessage.Jeregarde:Chris!

[Lemondeestmaintenanttémoindenotreamour.Tuesplusimportanteàmesyeuxquetoutcequej’aidéjàvu.J’aienviedetevoir.Detesentir.CL]

Hé ben ! Je continue le concours et je reçois unmessage enflammé de Chris, que demande lepeuple?Maislajoiepassevite.LevisagedeJulesmereviententête.Anabelleaussial’airpensive.Décidément,lestempsàvenirneserontpasfaciles...

***

IlsefaittardetAnabelledoitrentrerchezelle.Jelaraccompagneaucouloiretluifaislabise.Unefoislaportefermée,jereviensdanslapièce,mesentantseuleetmélancolique.J’aivusurInternetlanotequej’aieueauconcoursetc’estassezpitoyable.Jenemesenspastrèsàl’aise,etjemelaissetombersurlelit,lesbrasécartés.Combiendeminutespassentainsi?

Soudain,onfrappeàlaporte.Quicelapeut-ilbienêtre?Jen’attendspersonne...Jemerelève,merecoiffed’ungeste,etvaisouvrir.

–Chris?JetecroyaisenSuisse!

Jesuissurprise,maisjemelaissecharmerparsasilhouetteencontre-jourdansl’encadrementdelaporte,beaucommeundieu,seslargesépaulesmusclées,soncoldechemiseunpoildéfaitsoussoncostume impeccable, et sonparfumviril...Non, jecroisque finalementcen’estpas trèsgravequel’onmedérangedecettemanière!

–EnSuisse,oui.Maisêtreloindetoitroplongtempsnemeréussitpas.Regardedoncmeslèvrescommeellessouffrent.

Jesourisetm’approchedelui.Jesuispiedsnusetjedoisdoncleverlatêtepourêtreàsahauteur.Jedéposeundélicatbaisersursesbelleslèvres.Ilfermelesyeuxetselaissefaire.

–Voilàquidevraitlesapaiser.–Metstesescarpinsrouges,Lucie.Nousyallons.

Unpeurefroidieparcetondirectif,jeleregardedebiais.

–Qu’ya-t-ilChris,tun’espasbien,ici?–Jesuisbienavectoin’importeoù.Maistuserasheureusedehors,dansmesbras.

Je ne sais trop quoi répondre. Mes mauvais résultats et Jules disparu, je ne sais pas si c’estvraiment le bon moment pour sortir. J’hésite. Chris devrait s’en rendre compte, non ? Ne lecomprend-ilpas?

Maisilsepassequelquechosed’extraordinaire.Chrisrestemuetetimmobile.Ilplongesesyeuxvertsetordanslesmiens.Jesuishappéeparsonregard.C’estcommes’ilprenaitpossessiondemoirienqu’avecunregard.Unregarddepanthère.Commentarrive-t-ilàfairecela?Jemesenssaisie,agrippée,hypnotisée...

Jesourisenfin.

–Chris,tugagnescesoir.Maisattentionàtoi,larevanchepeutarriveràtoutmoment!

Ilsouritégalementetmeprendparlamain.J’aiàpeineletempsd’attrapermeschaussuresetunmanteau que nous filons à travers les couloirs du palace pour rejoindre une grande berline noire.Nousmontonsàl’arrière.Visiblementquelquechoseestprévu,maisjenesaispasquoi...

Lavoiturenousmènedanslesoirnaissantau-dehorsdelaville.Unvirage,etnousvoicifaceàl’aéroport. Nous bifurquons alors sur une route annexe et filons directement sur une piste dedécollage, non sans passer par plusieurs barrières de sécurité. La berline s’arrête au pied d’un jetprivémarquéauxcouleursdelaLordcompany.

JevoisqueChrismesortlegrandjeu.Ilmeguide,chevalier,versl’avion.Mestalonscessentdeclaquer quand je marche sur l’épais tapis rouge déroulé sur l’escalier d’accès. Je ne veux pasdemander où nous allons. Je goûte la belle surprise.Le jet décolle et file d’une traite dans le soirétoilé.Levolpasseviteenpartageantunecoupedechampagneetendiscutantdesujetspassionnantsàbâtons rompus. Nous atterrissons doucement sans que je reconnaisse les lieux. À l’arrivée, unevoiture nous attend en bas des marches. En roulant, les vitres fumées m’empêchent de voir despanneaux qui me donneraient des indices. Puis, nous nous arrêtons et la porte s’ouvre. Chris medonnelamainet jesors.Nouspénétronsdansunbâtimentancien.Unascenseur,etnousarrivonsàl’accueild’unrestauranttrèschic.Unedemoisellebruneautrèsbelaccentespagnolnousmènesousde grandes tentures maures accrochées au plafond, parmi de nombreuses tables somptueuses. Laclientèleesttrèshautdegammeetlesmurmuressemêlentàlamusiquedélicateetenchanteressed’unjoueurdeoudarabe.

Nous nous asseyons à une table, sur la terrasse surplombant tout juste un palais arabo-andalouséculairequejereconnaisimmédiatement:l’Alcazar!NoussommesàSéville,noustrinquonsavecun sublimeRibera delDuero, et les étoiles sont témoins de notre soirée romantique dominant lesarabesquesmagiquesdelacitéespagnole.

–Crois-tuaudestin,Lucie?–Jecroisquenoussommesmaîtresdenotredestin.–Moiaussi.Etcommentvois-tunotredestin?–Notre...?

Jesuistroublée.C’estlapremièrefoisqueChrisparledenousaufutur.

–Lucie,jenousvoisvivredeschosesmerveilleusestouslesdeux.Tuaschangémavie.–Jevisunrêvedepuisquejet’airencontré.–As-tuuneidéedecequetuveuxfaireaprèsleconcours?– Je neme suis pas encore vraiment posé la question... Peut-être enseigner ? À la Sorbonne ?

Enfin,cequicomptec’estsurtoutdecommuniquermapassionauxautres...

À ces mots, Chris me sourit et prendmamain posée sur la table. Il la lève vers ses lèvres etl’embrassetendrement.

Lasoiréesepassecommedansunrêve.Lesplatsexquissesuccèdentetjesenslevinchauffermesjoues etmoncorps.Chris est tellement charmant ! Ilme fait rire. Il est... parfait. J'aurais tellementaimépartagermonbonheuravecmesamisAnabelleetJules.Enrepensantàsadisparition, jesensmonregards’assombrir.

–Qu’ya-t-ilLucie?Quelquechosenevapas?–J’avaisjusteunepenséepourJules.

LeregarddeChrissedurcitàsontour.

–Oui, c’estvrai, jen’aipasencoredenouvelles.Mais je teprometsque jemets tout enœuvrepourréglerçaauplusvite.

Jeprendssesdeuxmainsetjeplongemesyeuxdanslessiens.

–Jesais,Chris.Etjeneteremercieraijamaisassezpourtoutcequetufais.C’estjusteque...C’estdur.

Ilmecaresse la joueduboutdesdoigts.Nos lèvres se touchent.Le serveurnous interrompt enamenant ledessert.J’ai lesyeuxquibrillent :unfondantchocolat-noisetteavecdesamandesetdesagrumes. Jedécidede fairedemonmieuxpourchassermespréoccupationsetdeprofiterdecettesublimesoirée.

Nous échangeons de douces paroles sur nos visions respectives de l’avenir. La lune est hautemaintenant,etc’estcommeunecompagneànotreamour.Soudainjemeretourneetjevoisqu'iln'yapluspersonnedanslerestaurant!Lesheuressontpasséesenunéclair.Chrismefaitunclind’œiletselèveenprenantmamain.Nousquittonslasalleàpasdeloup,entreleslanternesetlesdrapésdevelours.

Nous revenons à Paris dans la nuit. Chrisme raccompagne à la porte dema chambre où nouséchangeonsunbaiserlangoureux.

–BonnenuitmacharmanteLucie.

Ilvamelaisserseulecettenuit?

JecomprendsalorsqueChristientàmereconquérir,àmeséduiredenouveau.Qu’ilveutcréerunnouveaudépartenlaissantnotredésirensuspens.

Laportesefermeetjemedirigeversmonlit,latêtedanslesnuages.Maisàpeineuninstantsepasseetj’agrippemonportableettapeuntextoàtoutevitesse.

[J’invoquelaclausenumérocinqdenotrecontrat.]

Àquoisertdonccecontratd’amouretd’attachementmutuelqueChrism’aproposésionnes’ensertpas?

Quelquesminutes etChris revient. Lesmots sont de trop.Nos caresses pas assez. Et la volupténousemportemerveilleusementdanslanuit.

3.Coupdefrais

L’épreuveparisiennearrivantbientôt,jemeremetsautravailtrèsvite.Etpuis,j’avouequecelamepermetdenepastroppenseràJules.JeretournedoncàlaSorbonnerevoirRacheletsonpetitbureaupittoresque.

–Entrez,ditRacheld’untonfroidetlaconique.

Brrr!Ah,c’estdoncundecesjours-là...

J’ouvredoucementlaporteenarborantlesourirelepluschaleureuxdontjesuiscapable.

–MadameKraft!J’espèrequetoutvabien?Jenevaispasvousdéran...–Asseyez-vousLucie,etcessezlebavardageinutile.Vousavezdutravail.

Racheln’amêmepaslevélesyeuxdesespapiers.Pourl’ambiancedetravaildétendue,styleopen-spacesympa,jerepasserai!

Jemetourneverslepetitbureausurlequeljem’installehabituellement,et...quelqu’unestassisàmaplace!

–AhouiLucie,j’aiprislalibertédelaisservotrebureauàClémentine.Étantdonnéquevousêtesparmontsetparvaux,auconcoursetjenesaisoù,j’aipréféréoffrirlaplaceàquienavaitleplusbesoin.

J’accuselecoup.J’aibienentendul’accentqu’elleamissurle«jenesaisoù».M’envoudrait-ellepourmarelationavecChris?Ellevientsansdouted’enprendreconnaissance.M’enveut-elledenepasluiavoirdit?

Clémentine, elle, se retourneetme fait unpetit sourire contrit.Ellen’yestpour rien lapauvre.C’est une chouette amie de la fac, vraie fille à bouquins, timide et un poil complexée maisparfaitementadorable.Elleporteunelonguenattenoireetdeslunettesenplastiquenoirépais.Avecsondouxvisageauxtraitsdélicats,elleestmignonnemaisnesemetpastropenvaleur.

Je lui faisun signede la têtepour la rassurer.Aucunproblèmepourmoi. Jem’installe surunepetitetablebancalesurlecôté,quejedoisd’aborddébarrasserdedeuxtonnesdelivresetdepapiers.

LetravailcommenceetRachelmeguidecommed’habitude.L’échangeesttendu.J’aienviedeluidire«Maisvas-y,crache-le!Dis-moicequivapas!».Bienévidemment,jemetaisetattendsqueçapasse.Clementinesentantl’ambiancepesantedécided’apaiserleschoses.Ellelanced’untonenjoué:

–Dis-doncLucie,c’estchouettepourtoicetteépreuveàParis,non?Ducoup,commetuconnaisbienlaville,lestravauxpréparatoiresserontbienplusfaciles.Etpuismêmepourl’épreuveenelle-même.T’enasdelachance!

Sauf que la gentille intervention de Clementine a l’effet parfaitement inverse de ce qui étaitescompté...Rachellancealorsd’untonaigreetimpatient:

–Maisc’estvraiça,Lucie!Etbienvuquecelavaêtretelleunepromenadedesanté,j’imaginequevous allez sans problème pouvoir prendre une charge de cours ici à la fac, n’est-ce pas ? C’estformidable. Cela m'arrange terriblement, j’étais justement bien embêtée pour le remplacement deDidierRoccapourlemoduledujeudimatin.

Jemesensblêmir.Lamassede travaildemandéepar leconcoursestdéjà tellementénormequel’idéed’unechargesupplémentairemefaitdescendrelecœurdansl’estomac.Clémentineécarquillelesyeux.J’oscilleunpeulatêtededroiteàgauchepourluisignifierqu’ellen’yestpourrien.Ellevaserasseoirsansbruit.

Je ne peux pas vraimentme plaindre ou contester.Refuser ce type de proposition de la part del’universitéquimeprésenteauGoldsteinne se faitpas.Etpuis jepensepar exempleàXiao,monamieduconcoursqui,elle,doitassurerunechargedecoursdémesuréeenplusdetoutlereste!Jemelesuisdéjàdit,etjemelerépète:non,jeneveuxpasêtretaxéed’enfantgâtée!

–Bien,madameKraft.Jevousremercie.Jem’yattelleauplusvite.–Excellent.

Puis,enfouillantdanssespapiers,ellemetenduneenveloppejaune.

– Tenez, pour changer de sujet, voici votre carton d’invitation pour l’inauguration de l’expo«ArchitectureetconstructionsauMoyen-Orient»dedemainsoir.Attention,ilyauradubeaumonde.

–Ah,mercibeaucoup.–J’imaginequemonsieurLordnousferal’honneurd’yêtreégalement.

Ah,cettepetitepiquedeRachel!Jenecomprendspas,ellesemblepourtantbeaucoupaimerChris.Qu’est-cequipeutbienlagênerainsi?

–Oh,monsieurLord,toutcommeAlanSlydej’imagine.

Rachelpâlit.Cettephraseanodinel’avisiblementperturbée.

–Commentsavez-vouscela,Lucie?–Euh...Jel’aicroiséaupalace...Jesuishébergéevoussav...–Comment!IlestdéjààParis?s’exclameRachel,commepourelle-même.

Ellesembleglacée,malàl’aise.Jerelancelaconversation.

–Àquelleheurepensez-vousyêtre,madameKraft?–Comment?Ah,maisjen’yseraipas.Undîner.Prévudepuisbienlongtemps.

Pourquoiment-elle ainsi ? Pourquoi cherche-t-elle à éviterAlan ? Il y amanifestement un lienmystérieuxentrecesdeux-là,auvudecequej’aipuobserverlorsdenosvoyagesprécédents...

***

Jesuisdevantlagrandeentréedel’Institutdumondearabe.Dubeaumondesepresseàl’intérieur,et j’attendsChrisquidoitm’accompagner.Jedoisavouerque jen’aipas trop la têteauxfestivités.J’ai tellement de travail en cours, et toujours aucune nouvelle de Jules. Enfin, je ne me sens pastoujoursàmaplacedanscesévénementstrèspeople.

Unelonguevoiturenoires’arrêteuninstantetChrisendescend.Ilaungrandsourireauxlèvresenmevoyant.J’ai lesoufflecoupépar tantd’élégance.Moncœurfrissonneet j’ai lespoilsquisehérissent. Il est grand et athlétique avec une démarche de panthère dans son costume sombre. Sescheveuxépaisetfousauvent,sesyeuxenamandebrillentdansl’obscuriténaissante.Sansunmot,ilm’embrasseetmeprendparlebras.Jetrembleunpeucarc’estlapremièrefoisquenousallonsnousmontrerenpublicdepuisnotrecomingout,etjesensquelesrumeursvontallerbontrain.Jenesaispassicen’estquedansmatête,maisenpénétrantdanslebâtiment,j’ail’impressiond’êtrelacibledetouslesregards.Maisensentantsamaindanslamienne,sapeaucontrelamienne,lagênefaitplaceàunautresentimentbienplusagréable:jemesensfièreetamoureuse.

–Chris...–Oui?– Je... Je ne sais pas si c’est une bonne idée. Là, ici. Tous les deux. Je suis inquiète pour ta

réputation.Jenevoudraisvraimentpasêtrelasourcedequoiquecesoitquipuissetenuire.Jem’envoudraistellementsicesgenste...

Chris se tourne vivement vers moi et me fait taire immédiatement en un baiser fougueux etpassionné.J’ailatêtelégèrementpenchéeenarrièretandisqueseslèvrescaressentlesmiennesavecardeur.

OnnedictepassaconduiteàChristopherLord!

Enseredressant,nosyeuxnesequittentpasetnousportonslemêmesouriresurnosvisages.Jenetiensmêmepasàregarderlesréactionsautourdenous.Notreamourestplusfortquetoutcela.

Chris me caresse doucement le bras et disparaît un instant pour revenir avec deux coupes dechampagne puis, il me susurre quelques mots doux en se dirigeant vers le chef de cabinet duMinistère de laCulture. Il le salue commeunevieille connaissance etmeprésente comme l’étoilemontantedel’architecturefrançaise.Jerougisetbafouillequelquesmots.Chrisembraye,charmeuretvolubile,toutsimplementparfait!Sourires,amabilités,riresetpetitsfours.Chrisfaitdesonmieuxpours’occuperdemoi,et...çamarche!Ilestadorable,attentif.C’estunbonheurquedelesentiràmescôtés.Jemesensprotégéeetsoutenue.Jemesensterriblementfemmeaveclui.

Nousquittonslechefdecabinetetc’estalorsqu’Alanfaitsonapparition.Toujoursautopdubongoût,catégorie«blingvulgaire»,Alanest,commetoujoursenpublic,entourédedeuxbimbosauxrobestropcourtesettropcolorées.Ils’approchedenousetadresselaparoleàChris,sansmêmeunbonjour.

–Christopher,neleprendspasmal,maisjepensequepourlecontratPékin-Bangkok,ilfaudrait

mieuxquecesoitmoiquiyaille.Tuasl’airterriblementoccupéencemoment,etilfautquelqu’unquiaitl’espritclairetconcentrésurlebusiness.Tuvoiscequejeveuxdire?

–Euh,bonsoirAlan,dis-jecalmement.– Une minute Lucie, nous discutons travail avec Christopher. Certaines choses sont plus

importantesquelesjoliesrobesetlesamourettes.

Jesuissouffléeparlamufleriedecetype!

Chrisrépondcalmement.

–Voyonscelaaubureaudemain,Alan.Prendsdoncunmomentpourappréciercettemagnifiqueetpassionnanteexposition.

–OhChristopher!Non,leMoyen-Orient,c’est...oh,c’estassommant!Toutescesvieilleries.Tume connais pourtant,moi ce sont les tours, les hauteurs, le brillant... Tous ces trucs en terre et enpierreçamefatiguerienqued’ypenser.

Lesdeuxbimbospouffentderireàsescôtés.Chrisneditrienetlèvesonverretandisqu’Alanfaitunsigneetsedirigeverslebuffet.JemetourneversChris.

–CommenttupeuxlaisserAlanteparleretmeparlercommeça?Qu’estcequicepasse?

Ilmemurmure:

– Reste discrète Lucie, c’est une façade. Pour l’instant il faut laisser faire. Il ne faut pas qu’ilsoupçonneque je lesurveille. Jecherchedespreuvessuffisantespourcontre-attaquer.C’estdurdegardersonsang-froid,maisc’estcommeça.JeveuxnettoyerlaLordCompany.

Décidément,moiquicroyaisavoir toutcomprisetquivoulaitsermonnerChristopherLord,voilàquec’estmoiquiparaît…

Quoi?J’interrompsd’uncoupmespenséescarRachelarrive,robedesoiréeetdémarchefière.Elles’approchedenous.EllesalueChrisensouriant.Jenepeuxm’empêcherdem’écrier:

–MadameKraft!Quellebellesurprise.Je...Onnevousattendaitpas.–Ohmondîneraétéannuléauderniermoment.Riendegrave,jevousrassure.C’estenfaitun

plaisirquedevenirvousretrouverici.–Plaisirpartagé,répondChris.

Rachelsourit.

Pourquoicesmensonges?Qu’est-cequec’estqueceshistoires?Àtouslescoups,Racheln’aurapassupportéimaginerAlanàParissanslevoir,mêmesimanifestementelleluienveut.

Mais tous ces soucisme polluent.Chris a compris et ilm’entraîne vers la suite de l’expositionpourprendrel’airetadmirerlasuperbemiseenespace.

Aufuretàmesurede lavisite,Chrisdevientdeplusenplus tactile. Jesensunechaleurmonter

doucement enmoi. Imperceptiblement, nous nous éloignons de la foule pour rejoindre une petiteportedérobée.Enunclind’œil,nousnousretrouvonsdel’autrecôté,dansdescouloirsvides.Nousglissonsversdessallesferméesaupublic,plongéesdansunesemi-obscurité.Nosmainsseprennent.Ellessecaressent.Nosbouchessetrouvent.Noslanguessegoûtent.Nousfaisonsquelquespasversunescalier.

Soudain, une porte s’ouvre et un homme surgit dans le couloir. Un invité de la soirée, un peuaviné,quis’estvisiblementperdu.

–OhChristopher!Tiens,quellesurprise!Jenesavaispasquetuétaisinvité.C’estunplaisirdetevoir.

–Demême,Wilfried,unplaisir...,ditChrisd’untonpassablementagacé.–Deplus,celatombebien,vois-tujecroisquejemesuiscomplètementperdu!

EtWilfriedpartd’ungrandrire.Ilreprend:

–Tiens,raccompagne-moi,ettuvasmeracontertesnouvelles.Oh,pardon,jenevousavaispasvue.Bonjourmademoiselle...

–...Lerner.Maisappelez-moiLucie.–Oui,voilà,Lucie,dit-ild’untonindifférent.

llseretourneversChrisetleprendparl’épaule.

–Ouienfinbon,allons-y.Àcequ’ilparaîttuesauGoldsteinencemoment?Super,non?–Plusvraiment,Will,maisjevaisteracontertoutcela.

Chriss’approchedemoietmeglisseàl’oreille:

–JesuisdésoléLucie,ilfautquejeparte.Maisnotrepetiteentrevueestjustereportée...Àtoutàl’heuremachérie.

Chris me fait un signe de la main et j’entends leurs voix s’éloigner progressivement jusqu’àdisparaîtreetmelaisserseule.SiChrisadûlesuivrecommecelademanièresiabrupte,c’estqu’ils’agitdequelqu’und’extrêmementimportant...Pasdesoucipourmoi,maisc’estuneinterruptionauplusmauvaismoment!

Jereplacemarobeenungesteetmeplacedevantunevitrepourmeremaquilleravantderevenirdanslagrandesalle.Mais...J’entendsdeséclatsdevoix.Jem’approchediscrètement.Unepetitepiècedeserviceestalluméeetdeuxpersonness’ydisputentcopieusement.Jenepeuxpasmerapprochersansmefairevoir.Jetendsalorsl’oreille.

Ils’agitd’AlanetRachel!Impossibledesetromper.J’ensuissûre.Quedisent-ils?Letonestvif.Rachel semblevouloirconvaincreAlan.Luiparaîtagressif.Lesvoixsont loin,maiscertainsmotsressortent...

«Lord»«Argent»

«Daniel»«Guerre»

4.Amourenversetcontretout

Bip!Bip!Bip!Bip!Bip!

Commentéteint-oncefichuréveil?Pfff...Sixheurespile.Cedevraitêtreinterditparlaloideseleveràcetteheure-là!Lecoursquejedonneàlafaccommenceàhuitheures,etpasquestionnepasarriverenavance!

«Enavance»,pourmoi,çaveutdire«àl’heure»,bienentendu.

Chrisestpartidans lanuit. Ilm’avaitprévenu. Ilgère tantdeboulot !Ducoup, j'aiprogramméquatre réveils différents, à une demi-heure d'intervalle, et les ai éparpillés dans la suite du palace.Ainsi, je serais obligée de me dépêcher et d’aller les éteindre. Imparable ! Sept heures trente,quatrième et dernière sonnerie. Mince, je ne sais plus où je l’ai planqué celui-là, je le cherchepartout...Tiens,manqueraitplusqueça,d'arriverenretardàcauseduréveilquisonne!

Finalement,toutvabien,etj’arriveàl’amphiàl’heure.Alorsquecelaparaîtparfaitementnaturelàtouslesétudiantsquicommencentàremplirlesgradins,jenepeuxm’empêcherdechanterdansmatête.

Yes!Lasuperwinneuse!Tropdefièredemoi,méga-championne!

Jestresseaussipasmalcarc’est toutdemêmemapremièrefoisducôté«prof»,monpremiergrandcoursenamphi,etjen’aiaucuneidéedecommentjevaism’ensortir...

Le silence se fait et, ça y est, on n’attend plus quemoi. Je respire bien profondément. J’espèrequ’ilsneserendrontpascomptedemoninexpérience!Allez,àlaune,àladeux...

Àlatrois!

–Bonjour à tous.Commevous l’avez compris, je reprends le cours deM.Rocca, qui s'intitule«Sociologieetpsychologiedesespacesurbains».JesuisLucieLerner,etjevousproposed’entrerdirectementdanslevifdusujet.

J’entendsma voix qui tremblemais je continue.Ma langue fourche parfois.MonDieu, que cedébut est laborieux ! Je commence à avoir chaud... Très chaud ! Les mots semblent sortir de mabouche en purée. Oh non, c’est un cauchemar ! J’ai juste envie de me faire toute petite pourdisparaîtresousmonbureau...

Soudain, un étudiant se lèvepour poser unequestion. Jeme retournepour lui donner la parolequandj’aperçois,justeàsadroite,assisdiscrètementcommeunétudiantlambda,Christopher!

Jeretiensunpetitcri.

Unmurmurepassedansl’assemblée.

Vitejemereprends,etrépondsàlaquestion.Maisducoindel’œil,l’imagedeChrismerassure.Jevoissonregarddefauveperceràtraverslagrandesalle,etsesyeuxsontcommedeuxinvitationsvoluptueuses.Une tensionamoureuse semble électriser lapièce.Une tensionquenous sommes lesseulsàressentir?

Je suis touchée par cette attention, que Chris soit présent pour ma première prestation. Il mesoutient.Commeunenchantement,jecontinuemoncoursd’unemaindemaître.Chris,lemagicien,m’atransforméeparunsortmystérieuxenprofesseurmaîtressed’elle-mêmeetdesoncours.

Le cours se termine en un éclair. J’ai adoré faire ça ! Les étudiants quittent tranquillement lesgradinspoursortir.Certainsmeremercientpourlecours,etcelameréchauffelecœur.J’enéprouveuneréellefierté!

Lasalleestmaintenantsilencieuse. Iln'yaplusquemoisur l’estrade,etChris. Ilse lèvedesonbancetvientmevoir.

–Alors,queleffetcelafait-ild’êtrelanouvelleprofstardelafac?–Arrêtedemecharrier!dis-jeenriant.–Ce n’est pas de l’humour. Tu as été formidable. Les étudiants étaient suspendus à tes lèvres...

Normalementiln’yaquemoiquiaitcedroit,non?

Ilmefaitunclind’œiletposedélicatementseslèvressurlesmiennes.

–Allonsfêtercela.

Ilmeprendparlamain.Jenecroispasl’avoirlâchéedelajournée.

Nidelanuit...

***

Denouveau,leréveilestdifficile.Peudesommeil,peuderepos,maisaucunregret!

Cependant, lesmatins s’enchaînent toujours sans nouvelle de Jules. J’ai un pincement au cœur.Mais je dois me dépêcher. Cette-fois ci je n'ai pas de cours, mais enfin la quatrième épreuve duconcoursGoldstein.Jebalanceentreexcitationetappréhension.Eneffet,jevaisrevoirmescollègueset je saisquedans leursyeux j’auraisun tamponsurmon frontmarqué«ChristopherLord» !Etpuis, m’en voudront-ils de ne rien leur avoir dit ? Et, surtout, me jugeront-ils opportuniste etsuperficielle?Croiront-ilsqu’ils’agitd’unvéritableamour,etnond’unepassadedemilliardaire?

Toutescesquestionstournentdansmatêtequandj’arriveauSaintJames,lepalacequiaccueillelescandidatsduconcourspourcetteépreuve.Maisc’estdecourtedurée.Heureusement, tout lemondesemblebienpluspréoccupéparletravailàvenirqueparmamodestepetitepersonne.

Ouf!

En effet, la tension est palpable dans le groupe. Elaine, cette redoutable rivale, cinglante ethautaine, ne faitmêmeplusd’effort de cordialité, etme saluede loind’unbref signe. Il y a aussiXiao,magentilleamie,Hakim,lejoyeuxbosseur,Istvàn,lemystérieuxintroverti,Svetlana,lafroideéruditeettousparaissentstressés.Deuxéliminésàcetteépreuve,labatailleestouverte!SeulJackal’espritailleursetsemblemélancolique.Etoui,Fiorenzan’estpluslà...

Heureusement,Sergio,notreintendant,estégalàlui-mêmeavecsamoustachefineetsescheveuxgominés.Coquetetanachroniquedanssescostumesdelin,ilirradiedebonnehumeuretapaiselescœurs.Enpassantprèsdemoi,voyantmanervosité,ilmemurmuredoucement:

–VoyonsLucie,c’estparfaitementnormal.Tusais,j’enaivud’autres!C’estàchaquefoispareilàlaquatrièmeépreuve,lestressmontededeuxcransd’uncoup.Çapassera.Tuesfortecommeunrocetdouéecommepersonne.Tiensbon!

Jesourisetleremercie.Ilsaitêtresirassurant.

Quantàl’épreuve,elleestmenéeparAngusRouerg.C’estunarchitectemembredujury.S’ilestexpérimenté,entoutcas,ilestmalaimableetplutôtégocentrique.Racheladéjàeudesdémêlésaveclui,etcelan’augureriendebon.

Le sujet qu’il propose est technique et très difficile, mais je vois qu’il nous passionne tous àégalité.Ils'agitd'ungrandgroupeprivéquiarachetéuneîlesurlaSeineetquiveutycréerungrandparcd’attraction.Ceserauntourdeforcecarilfaudraresterrespectueuxdel’environnementtoutense fondant dans le paysage parisien, autant que dans celui de l’île. L’agencement, le style, lacirculation,toutelamiseenœuvretechniquenécessiteradevéritablesprouesses.C’estunchantierdetitan!Nousnousregardonstousavecdesyeuxbrillants.

Àl’attaque!

***

Jesuisépuisée.Allongéesurmonlit,lesyeuxfixesauplafond,moncerveausatureetjevoudraispouvoirlevidercommeunecruchequel’onverse.

Ontoqueàlaporte.Chrism’aditêtrepartiloincematin,cenepeutpasêtrelui.J’aiunegrosseflemme de me lever. Mais on toque une seconde fois. Avec lassitude, je m’arrache du matelasmoelleuxetvaisouvrirlaporte.

–OhJules!MonDieu!

Julesmecoupeensejetantdansmesbras.Commec’estbondelesentircontremoi!Deslarmessemettentàcoulerlelongdemesjoues.Jesenssajouecontrelamienne,etnoslarmessemêlent.Dansmesbras, je lesens faible. Jemereculepour le regarderen face : ilestcerné,paraîtépuisé,maisilestradieux.Songrandsouriresidélicatmefaitfondreetnouspleuronsetrionsàlafois,debonheuretdenervositérelâchée.

Cesinstantspassés,jeremarqueChris,deuxpasderrièreJules.Ilsourit,calmeetmodeste,adosséàl’encadrementdelaporte.Luiaussiestvisiblementépuisé.

Julesprendlaparole:

–PetiteLucie,tunepeuxpassavoircommejesuisheureuxdeterevoir.Jen’ycroyaisplus...–Oh,ilfautquetumeracontestout.Vas-y!Ohnon,attends,vienst’asseoir.Vienstereposertuen

asbesoin.

Julessouritetselaisseguider.Ils’assoitsurlecanapécossudemasuite.Illâcheungrandsoupir,etsemblereprendresesespritspendantquelquesinstants.Chris,quantàlui,setientenretrait.

Jesersungrandverred’eauàJulesetàChris.D’unmouvementdelatêtej’inviteChrisàs’asseoirégalement,mais il refused’unairnonchalant.Commes’iln’étaitpas important etque Julesdevaitresteraucentredel’attention.C’estalorsquejeremarquequeChrisestblesséàlajoue!

–Chris!Je...

Ilm’inviteausilenceenposantl’indexsurseslèvres.Jemedemandecequiabienpusepasser...

JeretourneauprèsdeJulesetluidemandedemeracontertoutel’histoire.

–Tu sais, j’ai eu très peur,Lucie. Peur pourmoi,mais peur de ne plus tous vous revoir :mesparents,mesamis,toi,Anabelle...

–Maistueslà!–Jedormaistranquillementaustudio.Bon,jedoist’avouerquej’étaisrentrétardetquejem’étais

affalésur lecanap’.J’étaiscomplètementclaqué.Àunmoment, ildevaitêtregenretroisheuresdumat’, j'ai entendu laportegrincer et lapoignée remuer. J'aidistingué troishommescagoulés et letempsquejecomprennecequ'ilsepassait,lestroistypessesontjetéssurmoi.J'aivoulucriermaisl'un deux m'a bâillonné. Ils ont ravagé ton appart pendant que je me débattais... Je suis tellementdésolé...

–OhnonJules!C’estmoiquisuissidésoléepourtoi!–Lucie,machérie,tun’yespourrien!–Si.Cestypesenavaientaprèsmoi.Etc’estsurtoiqu'ilssonttombés.–Maisqu’est-cequ’ilsvoulaient?–Ilsvoulaientravagermonappartpourm’intimider,Jules.Enfin...pournousfairepeuràChriset

moi.PourqueChrisarrêtedefouinerdansleursaffaires.–Mince!–Etpuis,qu’est-cequ’ils’estpassé?–Quandj'aitentédemedébattre,j'aisentiuncoupsurlanuqueetçaaétélenoirtotal.Jemesuis

réveillédansunecave,sansrepère,ligotéet...

Savoixsebrise.Jeleprendsdansmesbraspourleconsoler.Uncoupsefaitalorsentendreàlaporte.JevaisouvriretcesontlesparentsdeJules.Ilssejettentdanslesbrasdeleurfilsetlespleursjaillissent.

PuisilssetournentversChris.

–Merci denous avoir appelé si vite.Etmerci d’avoir sauvénotre fils.Nous sommes tellementreconnaissants.

– J’ai peudemérite.Tousmeshommes étaient sur cette affaire.Ce sont desprofessionnelsquicollaborentaveclapolice.

–Mais,etvous?Jevoisquevousêtesblessé?–Votrefilsestlibre,etc’estleplusimportant.

Julessetourneverssesparents.

–C’estChristopherquiadébouléenpremierdanslepavillon.L’assautavecseshommesaétébrefmaisintense.Chris,encoreunefois:merci.

ChrisserrelamaindeJulesenluitenantl’épaule.Ilssesourient.PuissesparentsemmènentJulespourlerameneràlamaison.Ilsnoussaluenttousavecémotion,etremercientChristophermilleetmillefois.

Jesèchemeslarmes,etmetourneversChris.Jeleregardelentementetpatiemment.Droitdanslesyeux.Celaatropduré.Celadoits’arrêter.

–Chris,dis-jed’untonferme.–Oui?

Ilsoutientmonregard.Ilcomprendquej’aiquelquechosed’importantàluidire.

–Jen’enpeuxplus.C’estmaintenantoujamais.–Jenecomprendspas...

Jenesaiss’ilnecomprendpasous’ilneveutpascomprendre...

–Situveuxquenotreamoursoitcompletetquej’yrépondeavecautantdesincéritéquepossible,ilfautquetusoisclairavecmoi.

–Oui?– Raconte-moi la vérité. Cesse de me cacher des choses. Au sujet de tout : la Lord Company,

d’Alan,desravisseursdeJules...Jeveuxtoutsavoir.–C’estpourteprotégerquejenetedispastout!Lucie,tuneterendspascompte.–Maissituparlais,peut-êtrequedeschosescommeçan’arriveraientpas!–Tu n’as pas idée de ce dont ces hommes sont capables, Lucie. Tu n’as pas idée. Ils sont sans

scrupule, et ils n’ont aucune limite quand des millions sont en jeu. Ils procèdent par enlèvement,intimidation.C’estprécisémentpourquoij’avaispeurd’entamerunerelationavectoi.Àcausedetouscesdangers.Aussi,maintenant,àtoidefaireunchoix.Jecomprendraisparfaitementquetuveuillespartir.

–Je...–Lucie,jetejurequejeferaitoutcequ’ilestpossiblepourteprotéger,toiettesproches,mais...–Mais?– Mais je ne peux rien te garantir. C’est dangereux. Es-tu prête à avoir une vie aussi

mouvementée?

Ilm’aprisedecourt.Jenesaisplusquepenser.Toutd’uncoup,millepenséessebousculentenmoi.Jerevoisnosbaisers.Nosconversations.Noscâlinsfougueux.Maiségalementl’enlèvementdeJules,lecrashenjet...Est-cequejesuisréellementprêteàtoutça?Jesuisconfuse.Chrismemetaupied du mur. C’est de bonne guerre, je lui ai fait la même chose. Nous jouons cartes sur tablemaintenant.

Etpuisunflash.Commentai-jepuhésiteruninstant?

–Mieuxvautvivredansledangeravectoi,qu’autristecalmesanstoi.

Nosregardssontmagnétisés.L’émotionemplitlapièce.

–Lorsquej’étaisenfant,j’aiétékidnappé.C'étaittrèsviolent.C’étaientdescollaborateursvéreuxde mon père, Daniel Lord. Il a toujours trempé dans des affaires louches, et a entraîné la LordCompanydedans.Monpèrem’arécupéré,maisilestmortpeuaprès…Defaçonassezmystérieuse.

MonDieu!Jesuishorrifiée...

–Depuis,jenefaisquechercherdesréponsesetdescoupables,Lucie.C’estmaquêteperpétuelle.Surtoutqu’aujourd’hui,Alanentretientlestraficsd’armesetleblanchimentd’argentdeDaniel.

–Alan?Maisqu’a-t-ilàvoiravectoutceci?–Alanestmonfrère,Lucie.Mondemi-frère.Ilahéritédelafacesombredenotrepère...Etilfaut

quejemetteuntermeàtoutçaavantqu’ilnesoittroptard!Nousavonsgrandiensembleàl’internaten Suisse, et une rivalité malsaine s’est développée entre nous. C’est un fils illégitime et c’estpourquoiilestsiaigri.Ilnepossèdepasceàquoiilpenseavoirdroit.

–Mince!Ceciexpliquedonctantdechosesàsonégard...Maiscetinternat...Pourquoiyas-tuétéenvoyé?Ettamère,oùest-elle?

–C’estpeut-êtreassezpourl’instant,Lucie.Celatesuffit-il?Jeteprometsdet’ouvrirtoutmoncœur,maisj’aibesoindetemps.Jenesuispashabitué.

Nosmainssetouchent.

–Jesuistellementdésolée.Jenevoulaispastefairesouffriravecmesquestions.–C’estmoiquisuisdésolédetefairesupportertoutlepoidsdelamalédictiondesLord...–TuesbeauChris.–Tuesmagique,Lucie...

Nousfermonslesyeux,etnoslèvrestrouventseulesleurcheminpoursegoûtervoluptueusement,alorsquenoscœursbattentfortàl’unisson.

Ladouceur satinée de sa lèvre supérieure passe entre lesmiennes. Je l’agrippedoucement et laserre un instant, pour ensuite la libérer en ne la retenant qu’un peu pour faire durer le plaisir. Sabouchepasse endouces caresses surma joue,mais revient à l’attaqued’un coup.C’est à son tourd’emprisonnermalèvre,etjesenssasalivedélicatementl’humecter.Petitàpetit,malèvredevientsihumideque,goutteàgouttesurmalangue,jepeuxsavourermonhomme.

Il tientma lèvre si fermement que je ressens une pointe de douleur très excitante. Et il relâcheaussitôt sa prise. J’éloignemon visage de quelques centimètres et je rouvre les yeux pourmieuxobservercevisageadoré. Ilporteaujourd’huiune très finebarbenaissante,drueetvirile. Jene levoisjamaisainsi,etjecomprendsquelarecherchedeJulesaétésaprioriténuméroun.

Mesyeuxreviennentalorssursajouegauchesurlaquelleilaétéblessé.Mamaintientsonvisage,mesdoigtssontsursanuquetandisquejepasseimperceptiblementmonpoucesoussabalafre.Ilauntrès léger tressaillement. Ilme sourit. J’approchemabouchede sa blessure.Puis je promènemonindextoutlelongdesabalafre,commeunonguent.Chrisfermelesyeuxdeplaisir.Iltournealorslégèrementlatêteetattrapemonindexavecsabouche.Jesenssesdentsmaintenirmondoigttandisqueseslèvresl’entourentdechaudescaresses.

Petitàpetit,salanguevientlécherleboutdemonindexemprisonné.Lesmouvementsdeviennentde plus en plus voluptueux, il embrasse et goûtemon doigt de tout son long. Je sens enmoi unechaleurmonter.Quelquesfrissonsmeprennent.LamaindroitedeChrisvientprendremonpoignetgauche.Ildescendmapaumepourlaposerauniveaudesonsexe.J’appréciecequejesensàtraversletissudesonpantalon.Jecaressedoucementdehautenbassondésirgrandissant.

– Dis-moi, Lucie, comment peux-tu être aussi douce et adroite ? Je ne savais pas que c’étaitpossiblederessentirdeschosespareilles.

–Jenefaisqu’obéiràmonseigneur,myLord,dis-jeavecunsourire.–Etbien,myLady,c’estmoiquisuistoutàvotreservice.

Chrisdescendsamaindroiteauniveaudemonsexeetcommenceàlecaresseràtraversmarobe.Maistrèsvite,jeprendssonavant-brasmuscléd’unemain,etjesoulèvemarobedel’autre.Puisjelaisse l’expert faire. Il passe sa paume sur mon pubis, à travers ma culotte. Je sens ses doigtsdélicatementpassersousmoietuntressaillementdeplaisirvoyagelelongdemondos.

Christienttoujoursmondoigtprisonnierdesdouceursmoitesetmouvantesdesabouche.Maisilnes’arrêtepaslà,ets’attaqueaurestedemamain.Salanguepassedelabasedemapaumejusqu’auxextrémitésdemesdoigts.Lachaleurqu’ilapporteàmamainsemblerayonnerdanstoutmoncorps.J’aichaud.Desperlesdesueurcommencentàfilersousmonchemisier.Marespirations’accélère.JesenscelledeChrisfairedemême,etledouxsouffledesabouchevientcaressermajoue.Nousnoussentonscommedeuxfauvesavantl’attaque.Enembuscade,c’estàceluiquibondiralepremier.

Chrism’aprisede court, il se jette surmoi, et vientmedévorer.Mabouche,ma langue, je luilaisse tout. Qu’il me prenne et se repaisse demoi !Mais je n’ai pas arrêtémes caresses sur sonpantalon.Mesdeuxmainsmaintenantlibres,ettandisquemaboucheestattachée,jedéfaissaceinture.Je descends la fermeture éclair. Je descends un peu son boxer et, sans le voir, je prends à pleinesmainssonsexe.Douxetsatiné,mesmainsleflattentdehautenbas,doucementourapidement.Maisfiniladouceur,j’attrapesesboursesd’unemainettiensfermementsavergedel’autreenva-et-vientvigoureux.

Jelesensgémirdansmaboucheetapprécier.Sondésirs’emballeetilpassesesdeuxmainssurmeshanchespourdescendremaculotted’uncoup.Maisplutôtquedetoucherdirectementmonsexe,ilreprendsescaressesàtraversmarobe.Jesensletissurêchefrottercontremonsexeetl’excitation

montemillefoisplusfort.

C’estalorsqueChriss’arrêtenetetmeprendparlataille.Ilmesoulèveetmecoucheallongéesurlecôté,surlecanapé.Majambedudessusestpliée,j'ailegenoupresqueàlapoitrine,etl’autreesttendue,unpeuenarrière.Jeporteencoremarobeetmesescarpins.Jesensledésirchaudenmoi.Jen’attendsqu’unechose...

Majouecontrelecanapé,jeregardeChrispar-dessusmonépauleretirersachemise,etjevoissesmusclesluiredanslapénombredelapièce.Ilenlèvealorssonpantalonetsonboxer.Ilestnu,ilestbeau.Jevoissataillefine,fermeetmusclée,etlacourburedescôtésdesesfessessuivresesjambessolides et athlétiques. Ses abdominaux se contractent à la force de sa respiration. Son souffle estprofond,sonvisagevirilsedessineencontre-jour.Jeleveux.Etvite.

Ilsebaisseetposesalanguesurlehautdutalondemajambetendue.Doucement,ilremonteversle creux demongenou, tout en prodiguant caresses et baisers. Sa langue est douce et chaude.Leschatouillesmefontfrissonnerdetoutmonlong.Arrivéprèsdemonsexe,Chrissepencheunpeudecôté et embrasse d’abord mes fesses. Il descend alors et passe sa langue juste à l’entrée de monintimité. Une telle moiteur me prend... Je gémis. Il m’a à peine touchée, mais je suis une braiseardente.

Sa langue reste à l’entrée demon sexe, titillant et jouant avecmes lèvres.Debas en haut,maisaussidecôté.Illècheetsuçotepuisilmepénètre,maisjusteuntoutpetitpeu.Pastroploin.Iljoueavecmonexcitation, il joue avecmonplaisir.Mais, petit àpetit, ses à-coupsviennent enmoiplusprofond.Sesmainscaressentmesfessesetpassentsurmondosenvolutesgracilesetincendiaires.

Avecsonbras,ilsoulèvemajambepliéepourluilaisserlibreaccèsàmonsexeentier.Salanguepassesurmonclitorispourjoueravecsanslebrusque.Mamainprochedesatêtevas’enfouirdanssescheveux.Jepassemesdoigtsdanssanuqueetjepressesatêtecontremoi,pourqu’ilvienneplusloin.

J’entendsChris ouvrir le sachet d’un préservatif. Jeme tournemaintenant complètement sur leventre,mesdeuxjambestenduesetserrées.Ilestau-dessusdemoi,derrièremondos,ets’agenouilledepartend’autredemescuisses.Jecambrelesreinsetfaitremontermonbassinpourm’offriràlui.Je sens alors son imposante virilité entrer enmoi, doucement, très loin, jusqu’à sentir le pubis deChris sur mes fesses. Nous gémissons de concert. Je cambre mon dos encore plus. Mon bassins’écartetantqu’ilpeutentrelesjambesdeChris.

Ilcommencedesva-et-vientaffolants.Sesmainsmecaressentledos,lanuque,lescheveux.C’estsibonde lesentirenmoi. Je tendsmesbrasderrièremondospour l’agripper. Je trouvesesbras.Nous nous tenons fort tandis queChris continue deme pénétrer avec folie. Le plaisirmonte.Nosrespirationsetnosgémissementsserépondent.

Sesmains descendent alors le long demes bras et passent sousma poitrine pour attrapermesseins. La douceur de ses mains est extraordinaire et je sens ma poitrine gonfler d’envie. Il estmaintenant trèsbassurmoi, jepeuxquasimentsentirsapoitrinemuscléesurmondos.Jepliemesjambespourprendreplusdeplaisir,pourqu’ilvienneplusenmoi.

Mais je veux le voir en face, dans les yeux. Sentir son regard vibrant me transpercer. Je meretourneetreprendlepouvoir.Ilestlà,agenouillésurlecanapé,plusbeauquetout.Sonsexedresséestcommesculpté,etvaavec lerestedesonanatomie,sasilhouetteélancéeetathlétique, ledessinsaillantdesesmuscles,sespommettesdessinantsonvisageauregardsiromanesqueetromantique.

–J’aimecequetues,Chris.Etjepeuxmoiaussitedomptersijeveux,dis-jevivement.–Voyonsvoirdequoituescapable.Montre-moicequ’ilyaaufonddetoi,dit-ild’untondedéfi.

Çayest,sonregardvertetordardeenmoi.Jelepousseduboutdesdoigtspourlefairebasculerenarrière.Ilestcalésurl’accoudoir.Jeviensenfourchersonbassinetjeprendsàpleinesmainssonsexe.Jeveuxleguiderenmoipourquejelesenteàmaguise.Jeveuxjoueraveclui,jeveuxjoueravecsaverge.Jem’assiedslentementetsensleboutdesonsexevenircaresserlemien.J’enprofite,en le tenant, pour faire jouer sa virilité contremon clitoris et jeme caresse en faisant glisser enhauteurtoutelalongueurdesavergeentremeslèvresavides.

Puis, je l’introduis en moi. J’ai les pieds à plat de part et d’autre de son bassin et je sens lapénétrationdeChrisme tenir fermement, si loin enmoi.Chris laisse échapperungémissement. Ilm’agrippealorsleshanchesetfaitjouermesfessesd’avantenarrière.D’unemain,ilfaitglisserlesbretelles de ma robe le long de mes épaules.Mon décolleté est libéré. D’un geste sûr, Chris faittombermonsoutien-gorge. Il se relèveetattrapemonseingaucheentreses lèvres.Sa langue joueavecmontétontandisqu’ilcaressemonseindroitavecsamain.

Ilfaitnaviguersesmainspartoutsurmoncorps.Ilmerendfolle.Samainremontelelongdemondosetpassedansmanuque.Iltientfermementmatêted’unemain,etmahanchedel’autre.Jedeviensunjouetentresespoignesfermesetviriles.Notrecorps-à-corpssefaitplusdenseetfrénétique.Mesmainsglissententrelescreuxdesmusclesdesapoitrineetdesesabdominaux.Jegémisdeplaisir.Instinctivement, j’enfonce mes ongles dans sa peau. Il gémit également et se laisse faire. Noussommesredevenusdeuxfauves,etnotreanimalitéatotalementprisledessus.

Chrissejetteenavantpourmedévorerdenouveau.Sabouchevienttoutcontrelamienneetnoslangues seperdent endemoites caressesdivines et interminables.Nosdents s’entrechoquent, nousnous mordons de désir et de plaisir. Je prends son menton entre mes dents, il croque ma lèvresupérieure. Nos bassins vont de plus en plus vite. Une frénésie électrique s’empare de nous. Nosmains s’agrippent, se tendent et se perdent, elles attrapent nos corps, poussent et griffent dans unedanseinsenséeetembrasée.

Desgémissementsnousprennent.Nosgestessontsifortsetviolentsquelecanapémanquedeseretourner.Nosvoixsefontplussonores.Chrismemordl’épaulesauvagement.Jehurledeplaisir.Jecroque soncoupuissant et il gémitdemême. Je sensmonter enmoiunedouceeuphorie sans fin.Nous allons si vite que je sens un vertigeme prendre.Nos respirations effrénées s’entremêlent etnotreplaisirmutuelarriveàsonapogée.Encoreunpeu.Rienqu’unpeu.Untoutpetitpeu...

Çayest,nosjouissanceséclatentdeconcert,parfaitementsynchronisées,superbementenflamméesetsemblantinfinies.

Noscorpsrestentsoudéslongtemps.Cettenuitseralàpourtoujours.

5.Sombrestourments

Jem’activepouraller rejoindremescollèguesduconcours.Pourune fois,Chrisn’estpasdéjàparti.Malgrélanuitmerveilleuseetpleinedepromessesquenousavonspasséensemble,jelesensrenfermé, en pleine réflexion intérieure. Son visage est plus dur qu’à l’accoutumé.Mais quand jem’adresseàlui,sestraitssedétendentenuninstantetsonmagnifiquesourires’offreàmoi.

–Pardonne-moi,Lucie.Jesensquejesuisailleurs.– Ne t’inquiète pas. Ne sois pas gêné de me montrer ce qui te tracasse. C’est une marque de

confiancequedelepartager.

Ilsouritetplongeenmoisonregardvertetor.

–J’aiétéaveugléLucie.Maquêtedelaperfection.Monsoucidelajustice.Tropdemalaétéfait.Jeneveuxplusmettrepersonneendanger.Ilestmaintenanttempsd’arrêterlesfrais.

Ilsembletantsouffrirdecespensées...

–Chris, tunepeuxporter le poidsdesproblèmesdumonde sur tes épaules, lui dis-jed’un tonrassurant.

–Tuasraison,Lucie.C’estvrai.C’estmondéfaut.

Chrismeregardeintensément.Ils’arrêteuninstant,puisreprend:

–Mais ça va s’arranger rapidement. C’est bon, j’en sais assez. Nous avons recueilli tellementd’informationssurlestraficsauseindelaCompany,jecroisquec’estlemoment.Ilnefautpasqu'ilss'entirent!

–Net’inquiètepas,jen’aipaspeur,jetesoutiendrai...–J’aiappelémescontactsdanslapolice.Toutcelaserabientôtdel’histoireancienne.Onvaenfin

pouvoirpenseràcequicomptevraiment.Ànousdeux.Etonpourraitvivreensemble,qu’est-cequet’endis?Loindetoutça,construirenotreavenir.Ceseravitefinidetoutesceshistoiresdemauvaispolar.

Chriss’estapprochédemoienparlant.Ilmecaressedoucementenpassantleboutdesonindexduhautdemonfrontendescendantlelongdemonnez,puisdescendsurmeslèvres.J’attrapesondoigtavec ma bouche et le mordille délicatement. Je le maintiens avec mes dents et passe ma languedoucementdessous.

–J’adoresentirtalanguesurmapeau.–J’adoresentirtapeausurmalangue.–Tuessiexcitante,Lucie.–Tonregardmefaitpartir...

Maisl’heurepasseetjedoisyaller!Nousavonschacununsoupirdefrustration.

–Nousnousretrouvonstoutàl’heure,Lucie.–Sansfaute.

Je l’embrasse tendrement. Je prends samain et caresse sa paume avant de partir rapidement autravail.

Arrivéeaupalace, jemereplongedans l’ambiancedecetteépreuve,plus tenduequed’habitude.L’attituded’AngusRouergn’estpaspouraiderleschoses...Ilestsec,arrogant,etn’hésitepasànousrabrouerpourunouioupourunnon.Heureusementque lesujetde l’épreuveenvaut lapeine!EtpuisjegardelemoralcarJulesestsauf,etChrism’aditlavérité.

Letravailesttrèsintense.Heureusementquecettephasenecourtquependantquelquesjours,carjen’aurais jamais pumenerma charge de cours en parallèle. L’une des choses les plus difficiles duprojet est de s’adapter à des éléments parfaitement nouveaux pour nous : une grande roue, desmontagnesrusses,etdesattractionscomplètementfollesimaginéesparlasociétédecréationcommeune fusée horizontale, une piscine partagée avec un aquarium exotique, un vol en chute libre surd’immensesventilateurs...Difficile,maiscaptivant!

Lemidi,jeprendsquelquesminutespourmemettreàl’écart.J'aibesoindesouffleretd’unpeudesolitude.

Ohmais tiens!Çafait longtempsquejen’aipasappeléFiorenza.Denepas l’avoirparminouschange l’ambiance, iln’yapasàdire.Quand jepensequedeuxd’entrenousserontéliminéspourcetteépreuve...

Hohé,jemelamentecommesic’étaitdéjàlafinalorsqu’onestencoreenpleintravail!Allez,dunerfetdelajoie!

JelanceSkypesurmonordi,etj’entendslebruitfamilierdelademandedeconnexion.Fiorenzarépond!L’écrans’éclaireetjelavois,toutebelle,toutepimpante,dansunemaisondecampagne.Parlafenêtrejedevineunbeaupaysageitalien.

–Lucie !Ohquellebellesurprise. Jesuiscontenteque tum’appelles.Commentçavadis-moi?Vousdevezêtreenpleinboulot?

–CoucouFio!Oui,toutvaàmerveille.Moi,jesuissurtoutheureusedevoirquetuvasbienetquetunevispastropmal...euh...tusais...l'élimination.

–C’est un peu dur,Lucie.C’est pourquoi je suis ici, dans lamaison demes grands-parents, enOmbrie.Jeprendsunpeuderecul,etdurepos!Minederien,letravailpourleconcoursétait trèsintenseetleverlepiedétaitnécéssaire.D’ailleurs,jenesaispascommentvousarrivezencoreàtenir,tous!Maisenfinlabonnehumeuraidebeaucoup,non?

–Ohtusaisl’ambiances’estpasmaltendueici.–Ahmince,pourquoi?– Ben, l'équipe est resserrée, deux éliminés bientôt, une épreuve difficile et Angus Rouerg est

imbuvable...–Et...Etcommentva...Jack?

Fiosembleavoirvoulumeposerlaquestiondepuisledébutsansoser.

–C’estbon,Fio, tupeuxme l’avouermaintenant. J’avaisbien saisi cequi sepassait entrevousdeux.

JevoisFiorougir.

–OK,Lucie.J’avoue.Jen’airiententéparcequej’avaispeurqueçajase.

Làc’estmoiquirougit,jesuispasmieuxavecChris!MaisFioreprend.

–Maisilmemanque.Jesuislibéréedetoutçamaintenant,maisj’aipeurque...Quecenesoitpasréciproque.Sic’étaitlecas,ilm’auraitdéjàappelée,non?

–Pasréciproque?MaisJackesteffondrédepuisquetuespartie!–Commentpeux-tuêtresûrequec’estàcausedemoi?–Fio,nesoispasbête!Ets’ilnet’apasencoreappelée,c’estpouruneraisonbiensimple:c’est

unGAR-ÇON. Ils sontmanches et empotés, il faut leur tenir lamain pour tout, et surtout pour cegenredechoses.

Fioritdeboncœur.

–Net’inquiètepas,jevaism’occuperdetoi,luiassuré-jeavecentrain.–Riendetropévident,hein,Lucie?Nemegrillepass’ilteplaît.

Jeluifaisunclind’œil.Nousfinissonsvitelaconversationcarjedoisrepartirtravaillermaiscelam’afaitunbienfoudelarevoirunpeu,etjecliqueàregretsurleboutonraccrocher.

Jemedisquec’estvraimenttropbêtecettehistoire!Ilssontfaitspourêtreensemblecesdeux-là,c’estclair.Jememetsen têted’essayerd’arranger leschosespourmesdeuxbonsamis.Le travailavancetranquillementl’après-midiquandjevoisJackseleverpourunepausecafé-clope.

C’estlemoment!

Commesiderienn’était, jemelèveégalementetvaislerejoindredanslapetitepiècederepos,ornéededoruresetmeubléedefauteuilsLouisXIV.Ilsefaituncafé.Ilsortunecigarette,etouvrelabaievitréepourlaissersortirlafumée.Puis,ils’installesurl’undesbeauxfauteuilstoutenlaissantsonregarderrerpar-dessuslestoitsdesimmeublesenvironnants,danslecielparisien.Jedoisavouerqu’ilesttrèsbeau,là,assis,avecsonairpoèteetboudeur,sontypebritishetsonélégancedandyetcasual.

–Dis-moiJack...

Ilsursaute!

–Oh,Lucie,jen’avaispasvuquetuétaislàaussi.–Jevoulaistedemander...Tuasl’airbienpréoccupéencemoment.Toutvabien?–Oui,çavamerveilleusementbienLucie.

Bon,encoreunedecesphrasesqu’il fautdéchiffreretprendrepour l’exactcontraire. Il faudraitinventerundécodeurlangagemecs

–OK,doncjerésumeenbonfrançais:çanevapasdutout.Dis-moicequ’ilya.

Ilsouritetbalaiel'aird’ungeste.

–Oh tu sais, la tension dans le groupe... Rouerg a une personnalité particulière...Mais rien dedramatique.Net’enfaissurtoutpaspourmoi.

–Sijenem’enfaisaispas,jeneseraispastonamie,Jack.

Unsilence.

Jackesttrèspudiquesurlesquestionsamoureuses.Ilfautquejeprennedesgants.Jereprends:

–Et...EtFiorenza?Elle...elletemanque?

Jackrougitoujerêve?

Etc’estalorsqu’unevoixforteetgravecoupel’atmosphère,c’estElaine!

–Ohmaisc’estpasvrai,Jack!Quelboulettupeuxêtreparfois.T’asencorerienpigé?T’aspasencoreremarquélegringuequeFiorenzan’arrêtaitpasdetefaire?EttunecomprendspasnonpluscequenotreLucie-sauveuse-du-mondeessaiedefaire?ElleadûparleravecFiorenzaetlavoilàquifaitlespetitesentremetteuses,collège-style,pourdeuxempotéscommevousquinesavezmêmepasvous y prendre pour discuter comme deux adultes. On vous croirait sortis du plus mauvais soapoperajamaisdiffusé!

Etellepartd’ungrandriresonore.

Nonmaisquelespritméchant !Si j’avaisencoreundoutesur lavacheried’Elaine,mevoilàaumoinsfixée.

Etquellep***!

Jackmelanceunregardaccusateur.Puisilselève.

–Oh,Jack,non,attends!N’écoutepascettep...Cettepeste!–C’estbon,Lucie,laisse-moiunpeud’airs’ilteplaît.

Et il filedans la sallede travail. Jeme tourneversElaine.Ellearboreunpetit air satisfait.Elleessaievisiblementdenousdéstabiliser.Tous.Etc’estcommeçaqu’elleveutgagnerleconcours?

Sofair-play,Elaine,sofair-play.Maistuneperdsrienpourattendre.Lesboomerangsreviennenttoujours,etsouventenpleinetête!

Lesoir,jereviensdormir,épuisée.Heureusement,Chrisestlàpourm’apaiseretmeremonterlemoral.

–TusaisElaineaététrèsdureaujourd’hui.–C’estlacompétition.Çanerévèlepastoujourslameilleurepartdesgens.–Peut-être,maisenattendant,çafaitmal.–Qu’est-cequ’ellet’afait?

Chrissembleprêtàpartirenguerrepourvengermonhonneur.Jesourisdevantsonénergie.

–Non,riendebiengrave.Entoutcasmoi,iln’yapasdesouci.C’estplutôtpourJack.Tusais,ilestpudiqueetElainesaitjouersurlesfaiblessesdesgenspourlesdéstabiliser.

–Net’enfaispas.Jackettoivousêtesbienplusfortsqueça.Elainesesentvulnérable.Doncelleattaque.C’esttout.

–MerciChris.Celafaitdubiencequetumedis.

Sesbrassontlemeilleurréconfortquejeconnaisse,iln’yapasàdire.Lanuitestdouceetcâline.Cethommeaundondesorcierpourenvoûtermoncorpsetmonesprit!

***

Lesquelques joursde travailavecAngusRouergse terminent,etc’estpour lapremière foisunsoulagement!Ouf,quittercetteatmosphèrepesanteetélectriquen’estpasunmal.Fiorenzaaraison,jemedemandebiencommentnouspouvonssupportertoutecettepression,deplusenplusforte.

Lesaurevoirsontcalmes.Nousavonstouslatêteàautrechose.J’espèrequelaprochaineépreuveseramenéedansuneambiancepluscordiale.Sergiomerassuresurcepoint,lestressvatomberàlafaveurd’uneémulationpositive.Ilenestsûr.

J’espèrequ’ilaraison!

Àlaminutemêmeoùjequittedesyeuxmescollègues,montéléphonevibre:Chrisveutmevoir.C’esturgent.

JedevaisallervoirAnabelle,maiscemessagesoudainm’inquiète.J’espèrejustequ’iln’yariendegrave.

Jecours le rejoindreàsonpied-à-terreparisien,petithôtelparticulieren retraitde la rue,entredeuximmeubleshaussmanniens.

Avec soulagement, je le retrouve souriant. Je ne peuxm’empêcher de sourire aussi.Mes jouesrosissent et mon corps n’attend qu’un peu de tendresse et d’attention. Et Chris me le procure aucentuple!Jefermelesyeux,etmelaissepartir,entièrementcaptivedesesdésirs.

Nous passons lamoitié de la journée enlacés, passant du lit au canapé. En fin d’après-midi, laconversationreprend.C’estalorsquej’annonce,enprenantmilleprécautions,quemesparentssontàParis,etquejevoudraisenprofiterpourorganiserundînertousensemble,avecChris.

J’aipeurdesaréponse.Va-t-ilaccepter?N’est-cepasunpeutroptôt,trop«officiel»?

Chrissourit,mecaresselajoue,etmedit:

– Avec très grand plaisir. J’ai hâte de faire leur connaissance, et de comprendre d’où tant decharmepeutvenir.

***

Jetoqueàlaportedel’appartementparisiendemesparents.Celafaitunbailquejenelesaivus!Monpèrevienttoutjustederentrerd’Indonésie,etjesuiscontentdel’attraperavantqu’ilnereparteétudierd’autresvolcansàl’autreboutdelaplanète.Mamère,elle,s’occupaitd’unprojetdedesignàNaples,etdoitavoirrejointsespénatesparisiensilyaàpeineunesemaine.Letimingestbonpourunefois!

Laportes’ouvre,et jevoislesvisagesradieuxdemesparentsenmevoyant.Nousnoussautonsdanslesbras.Quelplaisir!Lessentirdansmesbrasmeréchauffelecœuràunpointinimaginable.Àtelpointquejesensquelqueslarmesmouillermesyeux.

–BenalorsLucie?Toutvabien?s’inquiètemonpère.–Oui,oui,biensûr,jesuisjustetrèscontentedevousvoir,dis-jeavecungrandsourire.

Mesparents sont tous lesdeuxéhontémentbronzésetheureux,et c’estungrandbonheurde lesvoir ainsi. Je les trouve beaux, là, devant moi, si amoureux et pourtant si différents. Mon père,l’auvergnat taiseux qui étudie les volcans, tout à l’opposé de ma mère, danoise pleine d’énergieterrienne.Jenepeuxm’empêcherdem’imaginerlà,àleurâge,amoureuse,avec–quisait–Chris?

Toutvientàpoint àqui sait attendre ! Jevaisméditer cettemaximeet la fairemienne. Jeme lepromets!

Pasuninstantàperdre,j’aiprévuunrepasdeprince,etnousn’auronspastropdetoutel’après-midipourtoutpréparer.Nousenfilonstoustroisdestabliersentoiledejuteetnousnousjetonssurlesvictuaillesquej’aiamenéespourabattreletravaildetitanquinousattend.

Toutcecisefaitdansunemerveilleuseambiancejoyeuseetharmonieuse.Monpèreabranchélaradiodanslacuisine,etnouschantonsdevieuxtubesàtue-tête,chacunfaisantàtourderôlelavoixprincipale ou les chœurs. En cuisine, je mets tout mon cœur dans les préparatifs car je veuximpressionnermonhomme!Mesparentss’enrendentcompte,etsontplutôtémusdemevoirainsi,aussi amoureuse. Cela faisait longtemps que je n’avais pas été aussi gaie et euphorique, tout enattendantavecimpatiencel’arrivéedeChris!

Le tempspasse, et lespréparatifs se terminent tranquillement.L’heured’arrivéedeChrisarrive.Noussommestousimpatientsetexcités,mêmemonpère!Etçamefaitbienrire.

Chris est en retard... Mais qu’est-ce qu’il fait ? Cela ne lui ressemble pas. Nous attendons,tranquillement.

Letempspasse.Jeluienvoieunpetittexto.

Pasderéponse.

L’ambiance retombe petit à petit. Je n'ai aucune nouvelle de Chris. Il a une heure de retardmaintenant.Jecommenceàressentiruncertainembarras,et jem’excuseauprèsdemesparentsquimerassurentimmédiatement.

Maisletempspassetoujours...

Uneheuretrente,deuxheures...Nosvisagesnerientplus.L’embarrasfaitplaceàlaconfusionetàlacolère.Ilsefoutdemoiouquoi?C’estunmomentextrêmementimportantpourmoi,commentpeut-ilprendrecelaautantàlalégère?Jesensmonterlacolère.

Deuxheures trente. Iln'yaplus rienàespérer.Moncœurest redescendudedixétageset tombedans mes talons. J’ai un nœud dans la gorge. Comment Chris pourra-t-il bien justifier un telagissement?Est-cequejeleconnaissibienfinalement?Mecache-t-ilencoredeschoses?

Jequittemesparentslatêtebasse.Jen’aimêmepaslecœurdemangercequenousavonspréparé.Avecungoûtamerdanslabouche,jefaisunsigned’aurevoiràmesparents,etdescendslesescaliersenleslaissantsurleurpalier,l’airdésoléetcompatissant.

Surlecheminverslepalacej’envoieplusieurstextos.

Aucuneréponse.

Lacolèrefaitmaintenantplaceàl’inquiétude,etj’arriveàl’hôtelunpeudésemparée.Mince!JetombesurAlan.Non,cen’estvraimentpaslebonmoment!S’ilyabienquelqu’unquejeneveuxpasvoirencemoment,c’estbienlui...Surtoutivrecommeilest.Ilmelanced’untonrailleur:

–BenalorsLucie,onestperdu?Unpetitsouci?Qu’est-cequec’estquecetairabattu,hein?

Etilpartd’ungrandrire.

Jetentedel’éviter,maissoudainilm’attrapevivementlebras.

–Lâchez-moi,Alan!Enlevezcettemaindemonbras!Toutdesuite!

Alanritdenouveau.Ilvacilleetsetortilleenparlant.Sontonestmalsain.

– Oh la paaaauvre petite Lucie ! Si fragile. Si vulnérable... Mais il va falloir vite changer decomportementpetitechérie!Vafalloirdevenirbiengentilleetobéissante,commeilsedoit.Carjevaisbientôt toutposséder, vous comme tout lemonde,Lucie, très trèsbientôt...Car l’empireLordchangerabientôtdemain...Touttiendraentremesdoigts!

Ilritdenouveau,etreprend:

– Je pense que ce faux-jeton de Christopher a dû déverser son pauvre petit cœur malheureuxdevantvous,Lucie.Etbienoui,j’auraicetempirecarilestàmoi!Chrisapuenjouirseulpendantsuffisammentlongtemps.C’estmontourmaintenant.C’estmondemi-frère,etcethéritagem’estdû!

Sontonsecalmeetjesensunetensionmenaçantedanssavoix.

–Sachezbien,mapetitechérie,quesijenemesuispasencoreoccupéedevous,c’estuniquementparrespectpourmamère.

Ilmefixeavecsonregardmalade.

–Comment,parrespectpourvotremère?Jenecomprendspas.–Mamère!Maisnesoyezpasbête,Lucie.Vouslavoyeztouslesjours,voustravaillezavec...Ah

siellenevousaimaitpas tant...Àcroirequevousêtessa fille !Etmoi, jesuisqui,hein?Unsalebâtarddonttoutlemondeveutsedébarrasser?

Et c’est soudain la révélation ! La mère d’Alan, la maîtresse illégitime de Daniel Lord... c’estRachel!RachelKraft!Matutrice!

Soudain,millepiècesdepuzzlesemblent trouverleurplacepourcréerungranddessindansmatête.MonDieu!Commentn’ai-jepasdevinétoutcelaplustôt?Jememetsàtrembler.

–Alan?OùestChris?–C’estbon,c‘estréglémaintenant!Cetilluminénereviendraplus!Bondébarras!

Etiléclatederiredeplusbelleens’éloignantentitubantdanslescouloirsdupalace.Ilmelaisseseule.

Non, je ne peux y croire. Je ne peux rien croire venant d’un dingue pareil... Je laisse encorefiévreusementplusieursmessagessurlerépondeurdeChris.Toujoursaucuneréponse...

Leserveursécurisé!Pourquoin’yai-jepaspenséplustôt?Jem’yconnecteenvitesseetj’entrelescodesàl’écran.Çasonne...L’attenteestinterminable.Rien.

Ildoitforcémentyavoiruneexplication.Sûrement!Toutvabien,j’ensuissûre.Ildoitêtreprisdansuntourbillondetravail,commecelaluiarrive.Allez,calmons-nous.

Tout.Va.Bien.

Jerentredansmachambre.J’essaiedenepenseràrien.Jemevidelatête.Impossible.Jem’endorsfinalement,épuiséed’inquiétudeetdecolère.C’estunenuitfroideetsansrêve.

Bip!Bip!

Jesuisréveilléeparuntexto.Ouf,desnouvellesetc’estChris.

Jelis:

[Aide-moiLucie.Urgent.SanFransisco.CL]

Àsuivre,nemanquezpasleprochainépisode.