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MINISTERE DE LA DEFENSE

CENTRE DE DOCTRINE DEMPLOI DES FORCES ____________________DIVISION EMPLOI - ORGANISATION ____________________

MANUEL DE TACTIQUE GENERALE

Approuv le : sous le n:

XXX /DEF/CDEF/DEO/B.LOG

Edition 2006

Annule et remplace le TTA 901 Forces terrestres en opration Edition avril 1999

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SOMMAIRE

1 NATURE PERMANENTE DE LA GUERRE ET DES OPERATIONS............................................................................ 3 2 LES NOUVELLES CONDITIONS DE LA GUERRE ET DES OPERATIONS............................................................................ 3 3 PRINCIPES DE LA GUERRE PERENNESCOROLLAIRES NOUVEAUX............................................................................... 43.1 Des principes tablis.......................................................................................... 4 3.2 Des conditions de russite politique................................................................. 16 3.3 Des conditions oprationnelles......................................................................... 18

4 Les principes tactiques des oprations terrestres.......... 314.1 Des fondamentaux respecter........................................................................ 31 4.2 Des structures adopter.................................................................................. 46 4.3 Des notions matriser : les instruments heuristiques..................................... 58

5 OPERATIONS TERRESTRES DANS LA MANUVRE OPERATIVE INTERARMEE.................................................... 625.1 Contribution des forces terrestres aux engagements interarmes................... 62 5.2 Dfinition des oprations /campagnes interarmes......................................... 66 5.3 Oprations aroterrestres................................................................................. 69 5.4 Oprations amphibies / aroportes................................................................ 75 5.5 Les oprations multinationales (alliance, coalition, interoprabilit, culture ).......................................................................................................... 88

6 DROIT, ETHIQUE ET FACTEURS RELEVANT DES FORCES MORALES............................................................... 896.1 De la spcificit du mtier militaire................................................................... 89 6.2 Fondements et principes dthique et de dontologie : dfinitions................... 90 6.3 Cohsion morale et esprit de corps.................................................................. 90 6.4 Au cur de lefficacit oprationnelle collective : valeur individuelle, courage et rsistance............................................................................................................... 95 6.5 Lhomme au cur de lefficacit oprationnelle :. De limportance de la discipline et de lintelligence de situation dans la mise en uvre de la force matrise .............................................................................................................. 98 6.6 Lois de la guerre et cadre juridique (dont lgitime dfense, acte hostile , intention hostile et rgles dengagement)............................................................... 99

7 LE COMMANDEMENT DE FORCES TERRESTRES........ 1037.1 Nature et style de commandement................................................................. 103 7.2 Exercice du commandement.......................................................................... 111 7.3 Lenvironnement du commandement............................................................. 112 7.4 Commandement des forces terrestres en opration...................................... 115

8 LE SOUTIEN DES OPERATIONS TERRESTRES.............1218.1 Contexte du soutien en opration................................................................... 121 8.2 Principes et rgles.......................................................................................... 130 8.3 Composantes et organisation du soutien....................................................... 138 8.4 Perspectives logistiques................................................................................. 159

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1 NATURE PERMANENTE DE LA GUERRE ET DES OPERATIONS 2 LES NOUVELLES CONDITIONS DE LA GUERRE ET DES OPERATIONS

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3 PRINCIPES DE LA GUERRE PERENNES COROLLAIRES NOUVEAUX Nattaquez pas lennemi lorsquil respecte les rgles de la guerre, mais exploitez sans dlai la moindre erreur de sa part. Frdric le Grand

3.1 Des principes tablisLaction militaire repose sur trois principes fondamentaux, appels principes de la guerre, qui ont t noncs par le marchal Foch : la libert daction, la concentration des efforts et lconomie des forces. Ces principes se combinent sous deux types dapproches : lapproche directe et lapproche indirecte. Approche directe (TTA 106) : Concept stratgique envisageant de dtruire les forces combattantes de lennemi Approche indirecte (TTA 106) : L'approche indirecte recherche la victoire, quel qu'en soit le niveau, par l'effondrement plus que par la destruction de l'adversaire envisag comme un systme plus que comme une accumulation de forces. Lapproche directe et lapproche indirecte seront dtaills dans le chapitre 4. Ces principes sappliquent en phase de coercition comme en phase de stabilisation.

3.1.1 Libert dactionLibert daction (TTA 106) : Possibilit pour un chef de mettre en uvre tout moment ses moyens en vue d'atteindre, malgr l'ennemi, le but assign. Principe de libert daction (TTA 106) : Pouvoir agir malgr l'adversaire et les diverses contraintes imposes par le milieu et les circonstances. La libert d'action repose sur : a - la sret, qui permet de se mettre l'abri des surprises ; b - la prvision et l'anticipation des vnements et des actions adverses ; c - la capacit de prendre l'ascendant et d'imposer son rythme l'adversaire. La libert daction repose donc sur une capacit danalyse et de comprhension de la mission dans sa lettre et dans son esprit, sur une connaissance approfondie et surtout sur une comprhension de ladversaire et du milieu et, enfin, sur une organisation rigoureuse de la sauvegarde.

3.1.1.1 Souci de comprhension de la missionIl sagit de bien intgrer lesprit de la mission reue, cest--dire den bien comprendre lesprit avant dappliquer la lettre. Ainsi, lanalyse de la mission reu commence par le fameux De quoi sagit-il ? du marchal Foch. Une mauvaise comprhension de la mission peut avoir des consquences funestes sur la ralisation de leffet majeur voulu par lchelon suprieur. Ce souci de comprhension de la mission peut alors ncessiter des limites poses la libert daction du subordonn pour viter ce genre derreur.

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Exemple historique : Auerstedt 1806 (Davout)

Contre-exemple historique : Waterloo 18 juin 1815 (Mauvaise excution de la mission confie Grouchy) Grouchy, la tte de 33.000 hommes, reoit pour mission de poursuivre et dloigner les Prussiens du champ de bataille principal de Waterloo o Napolon, avec 74.000 hommes, affrontera les 68.000 anglais de Wellington. Le 18 juin 1815 ds midi, les franais ont attaqu sur laile droite anglaise puis au centre et ont subi de lourdes pertes et des contre-attaques srieuses. La situation est trs dlicate. En milieu daprs-midi, les Prussiens de Blcher abordent le dispositif franais sur son flanc droit Plancenoit. Mais Grouchy est introuvable, peut-tre faute davoir bien interprt les ordres de lEmpereur. Engag alors sur deux fronts distincts, Napolon envoie la Jeune Garde contenir les Prussiens. En fin de journe, les franais reculent sur lensemble du champ de bataille puis battent en retraite sur la route de Rossomme en perdant au total 29.000 hommes. Grouchy, averti sans doute trop tard de la tournure des vnements qui se sont drouls moins de 20 km de ses positions, se replie en France avec ses 33.000 soldats. Cet exemple illustre la ncessit du souci de comprhension de la mission car il semble certain que si Grouchy avait contenu les Prussiens lcart ou sil avait rejoint au moins Napolon avant le recul de la Vieille Garde, le sort de la bataille aurait t tout diffrent avec un rapport de force ainsi rtabli. Ainsi, labsence de Grouchy a fait perdre Napolon sa libert daction.

3.1.1.2 Capacit dorganisation rigoureuse de la sretLa sret conditionne la libert daction. Mais, dune part, la sret nest pas le but unique et dautre part, elle ne se construit que dans linstabilit car lennemi sy oppose en permanence. Il faut donc ne retenir quun seuil de sret suffisante. Plusieurs lments concourent la sret : le renseignement, les mesures de coordination et le dispositif des forces. La sret se conquiert, elle constitue une sorte de combat prliminaire dont les effets doivent tre ensuite entretenus en permanence quand la bataille principale est engage. La sret sera dtaille plus loin au paragraphe 3.3.3.

3.1.1.3 Facult de prvision et danticipationIl sagit de diminuer au maximum les alas du combat donc dtudier les conditions de confrontation avec ladversaire et les consquences possibles car il y aura toujours interaction entre les forces amies et ennemies. Ltude de la manuvre future est alors lobjet de la planification qui labore un plan de manuvre et un plan de renseignement. Exemple historique : Prparation dAusterlitz 1805 (Prvision et anticipation) Napolon prvoit et anticipe lchec de sa proposition darmistice par son missaire Savary auprs de lempereur russe Alexandre Ier : il fait simuler le repli denviron 50.000 hommes non loin du marchal Koutouzof pour pousser les coaliss la faute. Ainsi les coaliss, refusant larmistice, dcident dengager 90.000 hommes dans un combat quils pensent trs favorable. Napolon fait alors rejoindre le 1er corps de Bernadotte et le 3me corps de Davout pour porter ses effectifs 75.000 hommes, mais bien renseign sur les manuvres ennemies, laisse les coaliss semparer du plateau de Pratzen le 1 er dcembre au soir. Ainsi, ses facults de prvision et danticipation lui permettent de conserver sa libert daction pour mener au mieux la bataille du lendemain.

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3.1.1.4 Capacit de prendre l'ascendant et d'imposer son rythme l'adversaire.Il sagit de garder linitiative par rapport ladversaire. Ceci implique de manuvrer avec ractivit et de savoir saisir les opportunits. Il est possible que lennemi fasse une faute, on peut aussi la solliciter de sa part en le poussant la faute. Dans les deux cas, il faudra exploiter cette ouverture qui nous permet de prendre ou de maintenir lascendant sur ladversaire et de lui imposer notre propre rythme. Nos premires actions viseront donc le plus souvent lui ter sa propre libert daction. Exemple historique : Austerlitz 2 dcembre 1805 (ractivit et changement de plan) La bataille dAusterlitz est considre comme la plus clatante victoire de Napolon. Le 2 dcembre 8 heures, les coaliss attaquent laile droite des franais au Sud-Ouest du plateau en direction de Telnitz. Leur manuvre consiste prendre les franais en tenailles en commenant par vouloir les isoler de Vienne do arrive Davout. Napolon, sapercevant de leur effort principal au Sud, dcide de changer de plan. Pour dissocier lennemi, Il attaque au centre du plateau avec le 2me corps de Soult ds 8h30, tout en rsistant sur les ailes avec Lannes, soutenu par la cavalerie de Murat, au Nord et le renfort de Davout vers 9 heures au Sud. Vers 11 heures, les coaliss sont effectivement dissocis. Napolon a rentr un coin dans le dispositif ennemi. A partir de 14 heures, lartillerie franaise bombarde les tangs gels de Satschan au Sud du plateau faisant ainsi prir noys plusieurs milliers de russes en progression. La dbcle austro-russe est alors invitable. Lorsque se couche le fameux soleil dAusterlitz, Le bilan est de 15.000 tus ou blesss, 30.000 prisonniers, 180 canons et 45 drapeaux coaliss pour 1.300 tus, 7.000 blesss et quelques centaines de prisonniers franais. Napolon sest ainsi montr un excellent tacticien, qui analysant parfaitement le terrain et les manuvres adverses, modifie son plan avec ractivit et obtient le succs incontestable. LEmpereur a pu saisir au mieux lopportunit par rapport au plan de manuvre initial. Il a alors pris lascendant sur son adversaire et lui a impos son rythme, conservant ainsi sa libert daction.

3.1.1.5 Volont de dcentralisation des responsabilits tactiquesLe chef doit respecter le principe de subsidiarit et savoir dlguer judicieusement. Il permet ainsi ses subordonns dutiliser leurs forces et leurs moyens avec la meilleure efficacit et selon lemploi le plus appropri. Il vite de perdre du recul, du temps et de lnergie soccuper de trop de dtails. Il gagne impliquer ses subordonns dans la ralisation de la mission, leur laisser toute la libert daction ncessaire pour se mettre dans les conditions optimales et, parfois, leur inculquer le sens de la prise de risque raisonne ou celui de linitiative heureuse. Cette volont de dcentralisation des responsabilits tactiques est souvent le prlude la capacit de prendre l'ascendant et d'imposer son rythme l'adversaire. Sa limite en restant, bien sr, le souci de la comprhension de la mission par ses subordonns.

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Exemple historique : Auerstedt 14 octobre 1806 (initiative de DAVOUT) Le succs final de la bataille dIna est du en grande partie la russite de la bataille dAuerstedt. Napolon dispose de 97.000 hommes face aux 130.000 prussiens. Il fait marcher lennemi plusieurs colonnes autonomes dont deux corps, commands par Davout et Bernadotte, chargs de couper les lignes de communications prussiennes au Nord. Davout, avec 27.000 hommes rpartis en 3 divisions, attaque le corps prussien fort de 70.000 hommes avant mme le dbut de la bataille dIna 20 km de l. Davout ne peut compter sur Bernadotte qui na pas rpondu favorablement son appel. Davout, rivalisant de finesse et daudace, se bat avec un rapport de force dfavorable mais rsiste, en formation en carrs, aux charges de cavalerie de Blcher. Gagnant ainsi du temps, Davout renforce ses ailes et utilise intelligemment son artillerie en se concentrant sur des points prcis de lennemi. Devant cette rsistance franaise dtermine, les prussiens se replient en bon ordre en fin de matine du 14 octobre en attendant les renforts dIna. Vers 12 heures, ce ne sont pas des renforts qui arrivent dIna mais les troupes de Hohenlohe qui battent en retraite devant Napolon. Le moral ennemi en est atteint et le double repli prussien se transforme en vritable droute. LEmpereur exploite alors la victoire en poursuivant lennemi dans la nuit. Le bilan est de 27.000 tus ou blesss et 25.000 prisonniers prussiens pour 12.000 tus ou blesss chez les franais. 10.000 autres rescaps prussiens dIna et dAuerstedt seront crass par la cavalerie de Murat Erfurt le 16 octobre et 30.000 autres soldats prussiens se rendront dans les semaines suivantes. Larme prussienne est anantie. Ainsi, lenvoi de deux corps de troupe pour couper les arrires de lennemi vers lElbe en prvision de sa retraite et le choix judicieux de dcentraliser une partie des responsabilits tactiques au marchal Davout, excellent tacticien, a permis doffrir Napolon une crasante victoire dfinitive et sans appel.

3.1.1.6 Connaissance relle du milieuLes guerres comme les crises possdent toutes un cadre gographique physique et humain particulier quil est ncessaire danalyser et dintgrer dans sa rflexion sur la manuvre choisir. Une vritable culture gographique, historique, philosophique, sociale et politique est ncessaire. La Gopolitique est une science qui peut apporter un nombre consquent de rponses lanalyse des facteurs et au donc permettre le choix dun mode daction pertinent. Le renseignement terrain mtorologie population doit tre actualis et exploit au mieux. Exemple historique : Traverse des Alpes par Csar. Csar, entrant dans les Gaules, eut les Alpes traverser. On lui apprit que les troupes des Barbares montagnards gardaient les passages. Il tudia la nature et le climat, et vit que du haut des montagnes il descendait en bas beaucoup de rivires, qui formaient des lacs dune grande profondeur, desquels, la pointe du jour, il slevait des brouillards fort pais. Csar prit ce temps pour faire faire le tour des montagnes la moiti de ses troupes. Le brouillard en droba la vue aux Barbares, qui ne firent aucun mouvement. Mais quand Csar se trouva sur la tte des ennemis, ses troupes jetrent de grands cris. Lautre moiti de son arme, qui tait en bas, rpondit ces cris par dautres, et toutes les montagnes des environs en retentirent. Les Barbares furent pouvants et prirent la fuite. Ce fut ainsi que csar traversa les Alpes sans combat. Polyen (Stratagmes).

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3.1.1.7 Aptitude crer la surpriseIl sagit de maintenir ladversaire dans lincertitude. En effet, le champ de bataille nest pas devenu totalement transparent avec la mise en place de capteurs de plus en plus performants. Il existe toujours un brouillard de la guerre qui, sil nous gne, doit aussi gner lennemi. La surprise peut galement avoir un effet moral dcisif sur ladversaire. La surprise sera dtaille plus loin au paragraphe 3.3.2.

3.1.2 Concentration des effortsPrincipe de concentration des efforts (TTA 106) : Orientation dans l'espace et le temps des diffrentes actions et des effets des systmes d'armes autour d'un but unique. Cest la combinaison, dans lespace et dans le temps, des actions et des effets des systmes de forces et darmes disponibles en vue datteindre un objectif prcis. Dans la plupart des cas, cet objectif sera un effet atteindre sur ladversaire, et non sur le terrain, pour que se concrtise le succs dune opration. La concentration des efforts ne signifie pas concentration des forces. Les systmes darmes modernes associent la dispersion des vecteurs la concentration et la prcision des effets. Penseurs militaires : Le principe fondamental de Jomini en 1837 Jomini dmontre quil existe un PRINCIPE FONDAMENTAL de toutes les oprations de la guerre qui consiste : 1/ A porter, par des combinaisons stratgiques, le gros des forces dune arme, successivement sur les points dcisifs dun thtre de guerre, et autant que possible sur les communications de lennemi sans compromettre les siennes. 2/ A manuvrer de manire engager ce gros des forces contre des fractions seulement de larme ennemie. 3/ Au jour de la bataille, diriger galement, par des manuvres tactiques, le gros de ses forces sur le point dcisif du champ de bataille, ou sur la partie de la ligne ennemie quil importerait daccabler. 4/ A faire en sorte que ces masses ne soient pas seulement prsentes sur le point dcisif, mais quelles y soient mises en action avec nergie et ensemble, de manire produire un effort simultan. Prcis de lart de la guerre, Gnral Jomini.

3.1.2.1 Lorganisation du commandementLe commandement est lexpression de la volont du chef qui est lorigine de la cohrence de laction. Le commandement est donc le premier facteur de concentration des efforts et il doit tre unique. Lunicit du commandement en est sa qualit premire. Mais le commandement doit aussi avoir les qualits suivantes : continuit, permanence, cohrence et subsidiarit. Le commandement sera abord plus en dtail au chapitre 7.

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Contre-exemple historique : Somme 1916 (Commandement alli) Le commandement des oprations en 1916 sur la Somme ntait pas unique mais partag entre franais et britanniques. En raison dune mauvaise concentration des efforts, les forces commandes sparment nont pas atteint le but recherch. En effet, les deux interventions taient juxtaposes dans lespace, sans interaction, et les alas ont dcal dans le temps ces deux interventions. Lunicit du commandement est donc une rgle imprative.

3.1.2.2 La recherche de la suprioritLa recherche de la supriorit passe par la concentration de puissance, rsultat de la coordination des effets. Le fondement de la puissance dun groupement de force rpond lquation suivante : Puissance = Nombre x Capacits x Volont. Nombre : ce qui est en tat de combattre. Capacits : o capacit des matriels : combinaison de leurs performances et de leur approvisionnement immdiat ou diffr o Capacit humaine : combinaison de la force de conception des chefs et de leur tat-major, de linstruction tactique et du niveau dentranement des forces, de lesprit dinitiative dvelopp chaque chelon... Volont : domaine du moral quil faut crer et entretenir. La recherche de la supriorit est donc la matrise et loptimisation de ces facteurs : nombre, capacits, volont.

3.1.2.3 Le choix du point dapplicationLa concentration des efforts se ralise sur un point dapplication quil faut savoir choisir judicieusement. Ce point dapplication pourra tre le centre de gravit de lennemi ou un des points dcisifs reprsentant une de ses vulnrabilits critiques. En effet, le centre de gravit des forces ennemies, quil soit du niveau stratgique, opratif ou tactique, repose sur des capacits fondamentales. Ces capacits fondamentales ont elles mme des besoins fondamentaux qui se traduisent par des vulnrabilits critiques protger par lennemi. Ces vulnrabilits critiques seront pour nous des points dcisifs dtruire, neutraliser, fixer, saisir, tenir, interdire, isoler, influer, modeler selon une approche directe ou indirecte. Les diffrents termes seront vus plus en dtail au chapitre 4. Escargot ennemi (tactique, opratif ou stratgique): Centre de gravit ennemi Vulnrabilits critiques Capacits fondamentales Besoins fondamentaux

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Plusieurs types dobjectifs peuvent devenir des points dcisifs : Une partie de ladversaire principal ; Une partie de ladversaire immdiat ; Une vulnrabilit principale ; Un objectif terrain ; Un objectif immatriel (population, mdias, berceau historique). Pour atteindre le centre de gravit ennemi, il faudra atteindre successivement ou simultanment ses points dcisifs selon diffrentes lignes doprations. Un des points dcisifs ou le centre de gravit lui-mme pourra tre le point dapplication o leffort principal se portera. Le choix du point dapplication sera exprim dans leffet majeur de lordre dopration ou de la conception de la manuvre (plan simplifi). Le meilleur point dapplication est celui qui fait basculer la volont de ladversaire.

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Exemple historique : Marathon 490 avant Jsus-Christ (Application sur les ailes) Lempereur perse achmnide Darius, probablement la tte de 100.000 fantassins et de 10.000 cavaliers embarqus sur 600 navires, dcide de punir Athnes et les cits voisines pour leur soutien la rbellion des colonies grecques sur la cte de lAsie Mineure. Les Athniens ne pourront aligner que 11.000 hommes face aux perses. Les Perses dbarquent dans une large baie dbouchant sur la plaine de Marathon environ 40 km dAthnes. Renseign sur les mouvements maritimes ennemis, Miltiade dispose ses troupes grecques sur les hauteurs de la plaine. Les deux armes sobservent ainsi plusieurs jours. Puis les Perses, craignant des renforts lacdmoniens, font embarquer une partie des troupes dont leur redoutable cavalerie pour attaquer simultanment Athnes tout en fixant Miltiade Marathon. Le rapport de force devient alors moins dfavorable entre les lourdes phalanges dhoplites et les fantassins lgers mdes et perses dpourvus maintenant du soutien de leur cavalerie. Miltiade prend alors linitiative de renforcer ses ailes au dtriment de son centre et attaque au pas de charge en enfonant les ailes ennemies. Les Perses sont alors menacs dencerclement et se dbandent pour rejoindre leur flotte avant que leur retraite ne soit coupe. Miltiade ne perd que 192 hommes en crasant plusieurs milliers de perses sur le terrain. Renforc par les lacdmoniens, il rejoindra Athnes marche force pour devancer lassaut des Perses. Devant la forte dfense ainsi reconstitue de la cit, les Perses sen retournent en Asie.

Le choix de porter leffort sur les ailes ennemies a permis aux Grecs de placer les perses en position de vulnrabilit en les menaant de ne pouvoir rejoindre leur flotte, une des capacits fondamentales pour les oprations de Darius contre Athnes. Miltiade, en trs bon tacticien, a ainsi bien dtermin le point dapplication le plus efficace de ses efforts, celui qui a fait basculer la volont de ladversaire.

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3.1.2.4 La coordination des effetsLa concentration des efforts passe par loptimisation des capacits des systmes darmes, facteur de puissance. Il sagit alors de coordonner leurs effets pour multiplier lefficacit sur lobjectif choisi. La coordination entre les systmes darmes est multiplie par celle entre le renseignement, le mouvement et le feu. Plus gnralement, la coordination des effets sera obtenue par la coordination entre les diffrentes fonctions opratives, ce qui souligne la ncessaire et systmatique complmentarit interarmes, et selon le niveau, la complmentarit interarmes. Le ciblage est ainsi souvent complt par la destruction dobjectifs dopportunit. Le facteur qui lie toutes ces activits est le temps car il est indispensable que les actions soient simultanes ou enchanes avec prcision, sans prcipitation ni retard. De plus, le temps est un facteur important pour savoir coordonner nos propres squences de combat par rapport au rythme de la manuvre ennemie en sachant au maximum lui imposer notre rythme (notre tempo), le bousculer, le faire culminer avant nous, lui casser son plan et mieux, sa volont. La coordination des effets doit donc prendre en compte le facteur temps et lutiliser au mieux pour le succs de la manuvre.

3.1.2.5 La gestion de la vulnrabilit globaleLa guerre implique une prise de risque qui est accentue, lors de la concentration des efforts, dans les zones laisses plus vulnrables. Il faut donc savoir valuer ce risque pour le minimiser. Cest le rle, entre autre, de la planification de manuvre qui permet danticiper les volutions de la situation, quelles soient favorables ou dfavorables. Cest le fameux Et si ? des planificateurs qui prvoient les diffrents branch plan possibles et anticipent au maximum par la production dbauches dordres de conduite quils intgrent dans le plan de manuvre et que la cellule raction de ltat-major pourra utiliser en temps opportun. La vulnrabilit globale fait lobjet dune analyse qui commence par la dtermination de notre centre de gravit ami (notre source de puissance), de nos capacits fondamentales qui lui donnent sa puissance, de nos besoins fondamentaux qui le font vivre et de nos vulnrabilits critiques protger imprativement. Escargot Ami (tactique, opratif ou stratgique): Centre de gravit ami Vulnrabilits critiques Capacits fondamentales Besoins fondamentaux

Ainsi, la concentration des efforts ne peut plus se traduire de nos jours par une concentration des forces. En effet, du fait des moyens directs ou indirects de frappe par ladversaire, nos forces doivent garder une certaine dispersion ou dilution sur le terrain. Les mmes dispositions sont galement adopter face au renseignement ennemi qui pourrait alors dduire notre intention dun dispositif trop marqu. La constitution dune rserve est galement lune des rponses la gestion de la vulnrabilit globale. La rserve permet en effet de pouvoir ragir. La notion de rserve sera dtaille au paragraphe 3.3.1.

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Contre-exemple historique : Waterloo 1815 (3 vulnrabilits critiques) A Waterloo, Napolon a peut-tre commis une triple erreur concernant la gestion de la vulnrabilit globale, offrant ainsi principalement trois vulnrabilits critiques franaises aux coaliss. La premire, dordre stratgique, est la sous-estimation de la dtermination des coaliss en finir militairement avec lui. Ainsi, Napolon mne la guerre en tant dpourvu dune quelconque alliance avec un autre pays alors quil en disposait encore en 1812, lapoge de sa puissance. La seconde, dordre opratif, est de mener la campagne avec des subordonns de moindre qualit. Napolon a radi des marchaux dexpriences (Augereau, Berthier, Marmont et Victor) et sest entour de gnraux moins expriments voire mdiocres tacticiens. Il a laiss Davout au ministre de la Guerre, a perdu Bernadotte pass lennemi et Murat dans son royaume napolitain. Dj, Grouchy et Vandamme avaient chou craser les Prussiens et les Britanniques prs de Charleroi puis Ligny avant la bataille de Waterloo. La troisime, dordre tactique, est lattaque trop tmraire en terrain dtremp avec des troupes trop exposes au tir nourri des Britanniques de Wellington solidement retranchs sur le plateau du Mont-St-Jean, avec un renfort trop tardif de la Vieille Garde et une incertitude sur les Prussiens de Blcher (qui ont finalement, avec lchec de Grouchy, bouscul laile droite de Napolon et ont fait basculer la volont des forces franaises).

3.1.3 Economie des forcesPrincipe dconomie des forces (TTA 106) : Rpartition et application judicieuses des moyens en vue d'obtenir le meilleur rapport cot-efficacit pour atteindre le but assign. Cest la rpartition et lapplication judicieuse des moyens en vue dobtenir le rendement optimal pour atteindre lobjectif assign. Ceci implique une expression claire et prcise du choix du chef pour atteindre un objectif et laffectation raisonne des forces aux diffrents ensembles tactiques rsultant de ce choix.

3.1.3.1 Lexpression claire du choix de lobjectif majeurNous retrouvons ici encore le souci de bien intgrer lesprit de la mission reue mais cette fois dclin dans sa lettre en exprimant clairement le choix de lobjectif majeur et les tches accomplir pour latteindre. Ce choix de lobjectif majeur permettra alors laffectation raisonne des forces aux diffrents ensembles tactiques pour raliser ces tches. Il faut en effet dfinir ce que lon veut, cest--dire un Etat final recherch (EFR). Pour atteindre cet EFR, le chef dfinira des lignes doprations amenant au centre de gravit ennemi sur lequel agir. Ces lignes doprations seront ponctues dune srie de Points dcisifs atteindre. Les diffrentes notions seront tudies en dtail dans le chapitre 4.

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Point dcisif

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Point dcisif

Ligne dopration A 1Point dcisif

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Point dcisif

Ligne dopration BPoint dcisif Point dcisif

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Centre de gravit ennemi

Etat Final recherch

Ligne dopration C

L'expression claire du choix de l'objectif majeur permettra de manuvrer selon un mode daction dfini pour raliser son effet majeur sur le centre de gravit ennemi. En effet, manuvrer, c'est combiner dans l'espace et dans le temps les actions des units subordonnes pour parvenir l'objectif que l'on s'est fix, dans le but de remplir la mission. Pour manuvrer, il faut donc se fixer un objectif. Cest une tape vitale pour raliser une vritable conomie des forces. Il est noter cependant que lEFR peut voluer ou changer au cours dune opration mais cette volution ou ce changement doit tre justifi et raisonn (cas du Kosovo depuis 1999). Contre-exemple historique : Vers Sedan 2 septembre 1870 (le manque dexpression claire du choix de lobjectif majeur) Le 19 juillet 1870, Napolon III dclare la guerre la Prusse. Il n'a pas de garanties diplomatiques de Londres et de Rome et l'arme n'a pas encore acheve de se mobiliser. Pour surprendre les Prussiens et impressionner leurs rcents allis bavarois et saxons, la stratgie de Louis-Napolon Bonaparte se rsume une vaste offensive gnrale, mais en ordre dispers. Face lui, le marchal von Moltke concentrera ses attaques sur des points prcis du dispositif franais et cherchera s'emparer de Paris par un vaste mouvement tournant. Sans objectif majeur clairement dfini ou exprim, laffectation des forces aux diffrents ensembles tactiques ne se rvlera pas pertinente. Au contraire, le dispositif puis le commandement franais se montreront incohrent. Mi-aot, l'arme du marchal Bazaine rfugie dans Metz est assige et l'arme du marchal de Mac-Mahon le sera dans le rduit de Sedan le 1er septembre 1870, aprs avoir tent dans une certaine confusion des ordres suprieurs de secourir Metz. A Sedan, Mac-Mahon bless, le gnral Ducrot donne l'ordre de repli vers le plateau d'Illy. Arriv de Paris, le gnral de Wimpffen donnera aussitt le contrordre de passage en force Bazeilles. L'chec franais sera cuisant et l'Empereur capitule le 2 septembre 11 heures, avec 83.000 hommes qui s'ajoutent aux 17.000 tus ou blesss et 21.000 prisonniers pour la bataille de Sedan. Le 27 octobre, l'arme de Bazaine capitule Metz. L'expression claire du choix de l'objectif majeur semble avoir rellement manqu pendant toute cette phase de la guerre depuis la dclaration de guerre jusqu' la capitulation de Sedan, que ce soit au niveau stratgique ou opratif. Au niveau tactique Sedan, la discontinuit des ordres a desservi la poursuite d'un objectif assign et a ajout en confusion. Ce que les Prussiens ont exploit.

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3.1.3.2 Laffectation raisonne des forces des ensembles tactiquesLa modularit est un instrument de lconomie des forces et le choix actuel de lArme de Terre de mener une vraie manuvre interarmes travers la constitution de Groupement tactique InterArmes (GTIA) et de brigades InterArmes (BIA) selon la mission accomplir est lillustration de cette gnration de forces. Les Combat command de la seconde guerre mondiale en sont un exemple. Trois grandes masses peuvent tre ainsi constitues en ensembles tactiques : forces destines la garantie de la libert daction ; forces destines laction principale ; lment rserv. Larticulation des forces est la deuxime tape raliser dans le cadre de lapplication du principe dconomie des forces. La gestion des espaces occupes par les forces amies est le troisime aspect prendre en compte pour viter une paralysie rciproque.

3.1.3.3 Lapplication optimale et coordonne des forcesCinq rgles peuvent tre retenues pour engager les forces dans des conditions optimales : Eviter les redondances ; Rechercher en permanence le rapport de force favorable ; Assurer le suivi du potentiel ; Eviter lusure prmature ; Avoir une certaine rversibilit de laction.

3.1.3.4 Lorganisation dun soutien dynamiqueLe soutien doit tre conu en mme temps que la manuvre pour participer une bonne conomie des forces selon une judicieuse dpense. Le soutien doit tre bien dimensionn et avoir lhomme pour premier objet. Ce soutien doit aussi permettre de disposer du meilleur potentiel pour le moment crucial de laction, savoir le moment o nos forces vont culminer aprs avoir fait culminer lennemi, le moment o nos forces vont raliser notre effet majeur. CL des 3 principes de la guerre : Ces trois principes sont interdpendants. Cest de leur judicieuse combinaison, adapte aux circonstances particulires de chaque opration, que dpendra le succs. Appliqus sparment et sans discernement, ils peuvent devenir source dchec. Une concentration des efforts traduite abusivement en concentration des forces, restreint de facto la libert daction dune force et accrot, au contraire, celle de la force adverse. Un souci excessif dconomie des forces au dtriment de la concentration des efforts peut interdire toute obtention de la dcision sur ladversaire. Utiliss avec discernement, ils sont complmentaires. Lconomie des forces facilite la concentration des efforts ; la libert daction autorise lconomie des forces et la concentration des efforts. Seule la concentration des efforts permet une relle conomie des forces.

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3.1.4 Comparaison des principes de la guerreFr(3) / US (9) / GB (10)Principes britanniques Maintien du but Scurit Souplesse Action offensive Conservation du moral Concentration des forces Coopration Choix du but Economie des efforts Administration Principes amricains Sret Surprise Supriorit de loffensive Unit de commandement Masse Manuvre But atteindre Economie des forces Simplicit Principes franais Libert daction Principes Amiral Labouerie Incertitude

Concentration des efforts Economie des forces

Foudroyance

3.2 Des conditions de russite politiqueLa politique de la guerre se compose des combinaisons par lesquelles un homme dEtat doit juger lorsquune guerre est convenable, opportune, ou mme indispensable, et dterminer les diverses oprations quelle ncessitera pour atteindre son but. Ainsi un Etat peut tre amen la guerre suivant des raisons bien diffrentes : pour revendiquer des droits ou les dfendre, satisfaire de grands intrts, soutenir des voisins, remplir les stipulations dalliance, propager des doctrines, tendre son influence, sauver lindpendance nationale, venger lhonneur ou par manie des conqutes. La nature des oprations peut notablement en diverger. La guerre pourra se prsenter sous diffrentes combinaisons : la guerre pourra tre offensive ou dfensive, mene seul ou plusieurs contre un ou plusieurs, comme partie principale ou auxiliaire, ds le dbut ou au milieu de la lutte, chez soi ou prs ou loin, sage ou extravagante, nationale, civile ou religieuse. Penseurs militaires : La politique militaire selon Jomini (Prcis de lart de la guerre) Jomini dfinit la politique militaire comme les combinaisons morales qui se rattachent aux oprations des armes. Un gnral et un gouvernement doivent ne rien ngliger de la connaissance de ces combinaisons et doivent les prendre en considration dans leurs plans doprations. Ainsi, il faudra avoir une relle connaissance de la statistique et de la gographie militaires, savoir modrer les passions adverses et lectriser ses troupes en gardant lordre et la discipline. A ce titre, Jomini dfinit douze conditions essentielles qui concourent la perfection dune arme : recrutement, formation, rserves nationales, troupes et officiers instruits aux manuvres, discipline, rcompenses et mulation, armes spciales (gnie et artillerie), armement suprieur en gardant linitiative, tat-major gnral, soutien et administration, commandement des armes et haute direction des oprations et, enfin, excitation de lesprit militaire. Toutes ces conditions sont ncessaires et leur conservation est veiller ds le temps de paix ; un gouvernement ngligeant son arme serait ainsi un gouvernement coupable. Jomini sintresse ensuite au bon prince qui doit avoir une formation militaire puis au bon gnral et son choix judicieux avant de terminer sur le ncessaire esprit militaire dune nation et du haut moral que doit avoir son arme.

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3.2.1 Principe dquilibreUn certain nombre de rgles peuvent tre dgages parmi les combinaisons imposes ou rechercher. Parmi ces rgles, un principe pouvant snoncer principe dquilibre semble se dgager dans la continuit des relations extrieures franaises mais aussi pour un certain nombre dEtats souverains dans la mise en application de leur gopolitique. Pour Jomini, le maintien de lquilibre politique doit tre la base de la politique, notamment lquilibre maritime dans la balance politique europenne. Jomini cite les engagements de Maurice de Saxe contre Charles Quint en 1552 et du duc de Savoie contre Louis XIV en 1706 pour illustrer le double avantage dcisif mener une guerre dintervention au bon moment dans une lutte dj commence et intervenir de toute sa puissance et proximit de ses frontires pour permettre le plus grand dveloppement possible de ses forces. Il faudra veiller, par exemple, dans une guerre offensive, ne pas veiller la jalousie dun tiers qui viendrait alors au secours de lennemi. De mme il conviendra si possible davoir des allis surtout si ladversaire est consquent, en se rappelant quil ny a pas de petits allis ni de petits ennemis. Le plus sr tant de mener une guerre dintervention dans une lutte dj engage, mais avec un contingent respectable pour ne pas tre quun accessoire. De plus, les interventions lointaines sont trs dlicates, surtout sans allis. Selon toujours le principe dquilibre, il y aurait un grand danger dentreprendre deux guerres la fois, ce quil faut carter ou modrer par des alliances et le jeu diplomatique. Bainville dans lanalyse des consquences politiques de la paix de laprs premire guerre mondiale a montr le rle important de lAutriche qui avait t malheureusement dpece et qui ne pouvait ainsi plus tenir son rle de nation dquilibre en Europe. Ce qui a eu des consquences invitables sur la paix en Europe et pourra en avoir peut-tre encore dans les dcennies venir. Liddell Hart dans sa grande stratgie voque galement ce principe.

3.2.2 Lgitimit de lactionLa lgitimit de laction est une des cls des oprations futures. Libert daction en conscience et lgitimit de laction ont toujours t troitement lies. Ce qui est nouveau aujourdhui cest que cette lgitimit conditionne plus que jamais lissue de laction conduire. Le chef militaire nen dtient pas toutes les cls comme il ne dtient pas toutes celles dlimitant son champ daction. En effet son chiquier ne se rduit plus son seul cadre espace temps. Un contexte politique national et international toujours plus complexe tout autant que des rgles dengagement alternant parfois dun thtre lautre, flou artistique et pointillisme bloquant, viennent srieusement border son espace de manuvre. Ce nest pas forcment un mal lorsque lon mesure les consquences dune incursion malheureuse ou les dgts provoqus par les drives comportementales qui dchanent la haine l o, par exemple, il aurait fallu gagner les curs. En avoir une claire perception au dbut de laction est aujourdhui indispensable pour faire avancer ses pions sur lchiquier, sinon coup sr du moins plus sereinement. Lutilisation de conseillers politiques (POLAD : political advisor) et de conseillers juridiques (LEGAD : legal advisor) militaires est devenu une habitude dans les oprations actuelles et permet dviter des impairs voire des erreurs dans le cadre de la lgitimit de laction.

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3.2.3 Gradation des effetsLe principe de gradation des effets permet dune part dinfluer sur la volont de ladversaire et de le forcer accepter la ntre en le dissuadant par des effets de plus en plus coercitifs et, dautre part, de maintenir une certaine rversibilit de laction dans le cadre du Three block war . Le principe de gradation des effets permet aussi et surtout, demain plus encore quaujourdhui, de crer les conditions politiques de sortie de conflit et de rtablissement de la paix. Ce principe permet en outre de laisser une certaine porte de sortie lennemi comme le montre lexemple des gates la frontire nord du Kosovo en 1999 (avec comptage).

3.2.4 Minimisation des dommages ou principe de modrationLa conduite de la guerre doit tre commande par la raison comme le dveloppe Liddell Hart dans Stratgie . La minimisation des dommages peut ainsi snoncer en principe de modration qui tient compte de lthique dans la guerre et, de nos jours, des dimensions mdiatiques et juridiques trs prsentes dans les oprations extrieures.

3.3 Des conditions oprationnelles 3.3.1 RserveRserves tactiques (TTA 106) : Elment de manuvre tenu la disposition du commandement lui permettant d'influer sur le droulement du combat. Plus la situation est complexe et plus le besoin dune rserve, polyvalente et toujours disponible, est fondamental. Cette rserve tactique est constitue dlments interarmes prlevs dans les GTIA ou fourni en renforcement par lchelon suprieur. Elle est adapte la situation, lennemi, au thtre et la mission. Distincte des units en soutien de l'action principale, la rserve permet de saisir et d'exploiter une occasion particulire pour frapper un des centres de gravit ennemis ou faire face un brusque changement de situation remettant en cause la cohrence du dispositif de la force. Cette rserve est modulable en cours daction en fonction du rle qui lui est dvolu. Des transferts sont alors ventuellement ncessaires entre ce module et les autres units. En tout tat de cause, la permanence dune rserve est garantie. Son engagement donne lieu la reconstitution immdiate dune nouvelle rserve, destine jouer le mme rle que la rserve initiale, sans remettre en cause la cohrence et lefficacit du dispositif de la force1. La rserve, qui dispose de lensemble des moyens de commandement ncessaires son action (personnel et quipement), agit aux ordres dun chef dsign ds sa mise sur pied. Elle constitue un lment organique de la force (EOF). A ce titre, elle est directement employe par le PC de la force qui coordonne son action au travers dune cellule ddie. Si1

Si elle est appele intervenir au profit du maintien de la cohrence du dispositif de la force, la rserve soulage dautant les units dj engages, notamment celles en second chelon, qui peuvent alors fournir les lments ncessaires sa reconstitution. En revanche, si elle intervient dans le cadre dune mission sans lien direct avec la ralisation immdiate de leffet majeur en cours, cela implique que la force matrise la situation et quelle est en mesure en consquence, sans risque, de la recrer ou de bnficier de renforts.

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son intervention seffectue, en tout ou partie, dans la zone daction dun groupement, elle peut tre place sous TACON du commandant de ce dernier. La rserve est constitue au niveau N-2. Par exemple une compagnie au niveau Brigade, une section au niveau Rgiment. La russite de la contre-offensive russe de Moscou en dcembre 1941 ou lchec de loffensive allemande du 18 juillet 1918 contre laquelle Foch avait cr une rserve dans la fort de Compigne en sont des illustrations historiques.

3.3.2 Surprise 3.3.2.1 Ce quest la surpriseExemple historique : Xnophon et la retraite des 10.000 (la surprise par la distraction et la ruse) Xnophon, grand tacticien et meneur dhommes, se retrouve la tte dune arme dmoralise qui doit battre en retraite de Babylone vers la Grce sur plus de 2.500 km en territoire hostile travers la Msopotamie et lAnatolie sous la pression permanente de larme armnienne pendant huit mois en 401 avant Jsus-Christ. Xnophon privilgia la surprise en se drobant souvent en terrain montagneux, prfrant des efforts physiques extrmes aux batailles ranges. Il russit sauver lexpdition force de ruses, de patience et dendurance jouant sur la psychologie de ladversaire du moment. Frontin, dans ses Stratagmes, nous donne lexemple de la traverse dun fleuve en cherchant deux points de passage face aux troupes armniennes. Xnophon, repouss de celui du bas, gagna celui du haut ; galement chass sur ce point par larrive de lennemi, il revint au gu infrieur, en ordonnant toutefois une partie de ses hommes de rester en arrire et de traverser par le gu du haut ds que les Armniens seraient revenus protger le gu du bas. Les Armniens, croyant que lintgralit des soldats de Xnophon reviendrait au gu infrieur, se laissrent abuser et ne prirent pas garde ceux qui restaient en arrire ; ces derniers traversrent le gu sans rencontrer la moindre opposition et vinrent ensuite protger le passage de leurs camarades. Alexandre Le Grand usa des mmes ruses pour surprendre les troupes du roi indien Porus lors des franchissements de lIndus et de lHydaspe. La surprise vise agir sur la partie vive de lennemi, cest--dire sur son intelligence et sur sa capacit raisonner. Liddell Hart voque la distraction, Ardant du Picq la peur dans Etudes sur le combat et Sun Tsu la ruse. Il ny a donc pas une surprise mais des surprises qui, successives ou coordonnes, concourent lacquisition ou au maintien de notre libert daction. La 1re campagne dItalie en novembre 1796 est un exemple historique de la surprise. La surprise vise crer ou recrer un diffrentiel, une certaine forme dasymtrie pour lemporter. Ces asymtries peuvent tre gnres ou cres.

3.3.2.2 Les quatre types de surpriseLa surprise peut tre lintroduction dune innovation particulier :mthode, structure, matriel, culture (kamikazes), etc. dans un domaine

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3.3.2.2.1 Surprise techniqueSurprise ralise par lemploi dengins de combat, darmes nouvelles, soit ds le dbut de la guerre, soit au cours des oprations. Exemple historique : Ypres 1915 (gaz).

3.3.2.2.2 Surprise organiqueSurprise ralise par la constitution tenue secrte de formations rserves ou par une structure nouvelle par rapport lorganisation ou larticulation habituelle. Exemple historique : Trinme allemand Chars - avion radio en 1940.

3.3.2.2.3 Surprise tactiqueSurprise ralise par lapplication de procds tactiques que ladversaire nimagine pas. Exemples historiques : Carrhes, juin 53 avant Jsus-Christ - Garigliano 1943 (Juin et ses Goumiers).

3.3.2.2.4 Surprise stratgiqueSurprise ralise par la mauvaise apprciation de ladversaire (surprise en ngatif) qui a fait de faux prsupposs. Exemples historiques : Belgique 1914 - Ardennes 1940.

3.3.2.3 Manuvre de dceptionDception (TTA 106) : Mesures visant induire l'ennemi en erreur, grce des truquages, des dformations de la ralit, ou des falsifications, en vue de l'inciter ragir d'une manire prjudiciable ses propres intrts. La dception comprend la simulation, la dissimulation et lintoxication. La dception, traditionnellement intgre la manuvre d'ensemble, est rendue plus concevable du fait de la technologie et de la dispersion gographique. Elle repose dune part sur une parfaite connaissance de ladversaire et, dautre part, sur lintelligence de sa mise en uvre. Les modes daction en sont les suivants : La simulation ; La dissimulation ; Lintoxication. Sun Tsu a donn une place importante la dception. La bataille de Wagram en 1809 ou la dception par une fausse manuvre de dbarquement amricain par les marines sur les plages de lIrak lors de la guerre du golfe en 1991 en sont des exemples.

3.3.2.3.1 SimulationSimulation (TTA 106) : Composante de la dception (mesures actives) ayant pour effet de tromper l'adversaire sur les intentions et les possibilits amies en lui faisant acqurir de fausses informations. La simulation consiste donner lennemi une fausse image de notre ralit.

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Exemple historique : Opration Fortitude 2me Guerre Mondiale 1944. Dans le cadre de la prparation du dbarquement en Normandie, les allis ont men une opration de dception en simulant la monte en puissance dun groupe darme fictif (le 1st US Army Group de Patton) dans le Sud-Est de lAngleterre. Ainsi, depuis lanimation des rseaux radio jusqu la mise en place de chars, davions ou de canons gonflables dans le Sud-Est de lAngleterre, tout a t fait pour que les Allemands soient convaincus que lopration principale de dbarquement ait lieu dans le pas de Calais. Lopration Fortitude a permis de fixer au moins 2 panzer divisions et 5 field divisions face au Pas de calais. Le rapport de force pour lopration Overlord fut alors favorable aux allis en Normandie : - J : 10 Div allies / 4 Div All ; - J+3 : 13 Div allies / 10 Div All ; - J+10 : 18 Div allies / 18 Div All ;SHAPE

La perception de lordre de bataille alli par le FHW (PC allemand du Haut-commandement Ouest du Gnral Von Rundstedt) le 6 juin soir tait : - 10 12 divisions allies participant aux oprations ; - 20 prtes y prendre part ; - 30 37 inemployes (Groupe darme fictif de Patton). aucune des units composant le 1er groupe darmes amricain [] na encore t utilise [] Il faut en conclure que les plans de lennemi comportent une nouvelle opration de grande envergure dans le secteur de la Manche, opration qui pourrait bien tre dirige vers le secteur ctier situ dans la rgion centrale du Pas de Calais . La prparation arienne allie a particip la simulation : les bombardements stratgiques ont t effectus majoritairement au N-E de la Seine.

XXXXX 21e GA (Montgomery)XXXX 1.USXXX

XXXXX FUSAG (Patton)XXXX XXXX

XXXX 2. BritXXX

4 Div 4 Div

3 Div 8 Div

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3.3.2.3.2 DissimulationDissimulation (TTA 106) : Composante de la dception (mesures passives) ayant pour effet de soustraire les forces amies et leurs mouvements aux investigations de l'adversaire. La dissimulation vise masquer nos intentions. Exemple historique : Gettysburg 03 juillet 1863 (3me jour : dissimulation des troupes nordistes au centre du dispositif)

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Aprs deux jours de combat Le 3 juillet, le gnral sudiste Robert Lee dcide de percer le centre nordiste Cemetery Ridge par un assaut dcisif. En effet, le gnral nordiste George Meade avait dgarni son centre afin de repousser les prcdentes attaques sudistes sur ses flancs. Il avait cependant encore de redoutables troupes prsentes mais dissimules au centre de son dispositif. Pendant le pilonnage dartillerie de plusieurs heures par 150 canons, Lee masse son infanterie dans les bois. Les nordistes espacent leurs tirs dartillerie de rplique puis les cessent compltement. A ce moment, Lee, croyant les nordistes neutraliss, lance plusieurs milliers de fantassins lassaut de la colline. Mais bien dissimuls dans les bls, pouvant appliquer des feux partir dune position favorable, les nordistes attendent larrive des sudistes porte de tir pour dclencher un feu dvastateur o presque tous les confdrs seront tus ou blesss. La dfaite sudiste est consomme et Lee fait battre en retraite pour lensemble des troupes. Epuiss par trois jours de combat, les nordistes ne pourront cependant les poursuivre. Le gnral Meade a ainsi, par une dissimulation de son infanterie au centre de son dispositif, tromp le gnral Lee. Il a appuy sa dissimulation par le jeu estomp de ses pices dartillerie. Cette victoire, cumule celle de Vicksburg, aura pour effet denlever tout espoir aux sudistes denvahir le Nord. Les sudistes rsisteront cependant deux annes encore.

3.3.2.3.3 IntoxicationIntoxication (TTA 106) : Action de rpandre de fausses informations pour tromper ladversaire. Lintoxication est un procd qui relve de la dception. Lintoxication a pour but de rpandre de fausses informations. Le dispositif serbe au Kosovo en 1999 pendant les frappes ariennes de lOTAN est un exemple historique dintoxication .

3.3.3 Sret 3.3.3.1 Sret et sret tactiqueSret (TTA 106) : 1- Ensemble cohrent de mesures dfensives mises sur pied et appliques tous les chelons du commandement dans le but d'obtenir et de maintenir la scurit. 2- En oprations, mesures visant priver l'ennemi de renseignements et assurer la libert d'action d'une force, la prvenir d'une rencontre inopine et la protger d'une attaque (sret tactique). L'action de la force ne peut se drouler qu'en s'adossant un systme de sret et de sauvegarde d'autant plus important que le dispositif de la force est lacunaire. Les intervalles doivent tre au moins surveills et si possible contrls.

3.3.3.2 SauvegardeLes mesures de sauvegarde sont permanentes, depuis la prparation de la mission (qu'elle soit offensive, dfensive ou en phase de stabilisation) jusqu' son achvement. Le systme de sauvegarde doit possder les capacits suivantes : dtection, identification, intervention. L'homme est au cur de la sauvegarde. Son action est complte par des capteurs de toute nature.

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Lopration Licorne en Cte dIvoire illustre bien la ncessaire prise en compte de la sauvegarde dans un pays immense o apparat la notion despace lacunaire. En effet, des forces comptes restent trs loignes les unes des autres. Depuis la protection des postes jusquaux convois logistiques, la sauvegarde doit tre en permanence prsente lesprit. Lopration en Afghanistan rencontre les mmes exigences en matire de sauvegarde.

3.3.3.3 Sret sur les arrires ou dans les intervallesLa sret sur les arrires est ncessaire pour la logistique. En effet, un gnral avis cherchera couper les lignes de communications de ladversaire si celle-ci sont vulnrables. Les avantages sont certains comme Napolon la montr lors de sa campagne de France de 1814). Jomini et Liddel Hart ont galement insist sur la vulnrabilit dune force qui ne protge pas ses lignes de communications. Les combats entre la VIII Arme et lAfricakorps ou la Guerre clair en 1940 illustrent la problmatique des lignes de communications et la ncessit de raliser la sret sur ses arrires ou dans ses intervalles. Les oprations en Cte dIvoire ou en Afghanistan montrent que la protection des convois logistiques est une ncessit vitale en zone dinscurit. Exemple historique : Campagne de France 1814 (la manuvre en position centrale coupant les lignes de communication ennemies). La campagne de France de 1814 illustre la manuvre de Napolon en position centrale lui permettant de gagner un certain nombre de victoires par des batailles remportes grce la rapidit de mouvement de ses corps darme interceptant les lignes de communication ennemie et les poussant se replier. La carte ci-dessous montre les mouvements de Napolon (en bleu) interceptant successivement les mouvements des coaliss (en rouge) sur les diffrents champs de bataille.

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Au centre du thtre doprations, larme de Silsie, forte de 130.000 hommes sous Blcher, progresse par la valle de la Marne et plus au Sud deux journes de marche, larme de Bohme, forte de 180.000 hommes sous Schwarzenberg, progresse par les valles de lAube et de la Seine. Infrieur en force ses adversaires qui disposent en outre de 45.000 hommes plus au Nord, li Paris quil lui faut couvrir tout prix, cest des manuvres sur positions centrales que Napolon recourt comme en 1796 lorsquil tait Mantoue. Napolon dispose de 90.000 hommes pour ce thtre mais nen runira que 60.000 hommes au maximum sur un des champs de bataille (Brienne). Napolon aura sa ligne de communication en zone centrale entre Paris et son centre doprations quil dplacera suivant ses manuvres de Chlons Arcis, Szanne, Nogent et provins. Cest par cette zone centrale quil sefforcera de sparer larme de Silsie de larme de Bohme. Ce point obtenu, tandis quun de ses lieutenants, se servant de lun de ces cours deau comme ligne de dfense, contiendra avec de faibles effectifs une des armes adverses, Napolon portera son gros contre lautre arme. Il emploiera alors contre larme quil tient sous sa griffe sa manuvre favorite : sans livrer de bataille range, accabler cette arme dans le flagrant dlit dun passage de cours deau ou dune marche en retraite.

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Ainsi, du 23 janvier au 28 mars 1814, les manuvres sur position centrale, dans lesquelles Napolon a dploy tout son gnie, lui ont permis de tenir tte pendant trois mois aux assauts rpts dennemis dun effectif infiniment suprieur. La guerre napolonienne Les systmes doprations, thorie et technique. Hubert Camon

3.3.4 Volont et forces moralesLhistoire des guerres offre toutes les preuves du rle des facteurs moraux dans les victoires et les dfaites : les forces morales jouent un rle aux niveaux les plus levs de la hirarchie ; du 15 aot au 5 septembre 1914, quand toutes les offensives franaises chouent, quand le pays est envahi de la Somme aux Vosges , le gnral Joffre conserve une parfaite matrise de lui-mme, rassemble les volonts, oblige ses subordonns et les tats-majors travailler avec mthode et rorganise son dispositif en faisant comprendre tous lenjeu de la bataille ; ces forces sont galement indispensables aux plus petits niveaux ; rien ne se serait fait, en septembre 1914 si les soldats franais ntaient pas retourns au combat, avec un moral de vainqueurs, derrire leurs lieutenants et leurs adjudants. Exemple historique : Bataille de la Marne 1914 (commentaire de Von Klck) Que des hommes ayant recul depuis des jours, que des hommes couchs par terre demi morts de fatigue puissent reprendre le fusil et attaquer au son du clairon, cest une chose avec laquelle nous navons jamais appris compter, cest une impossibilit dont il na jamais t question dans nos coles de guerre. Marchal Von Klck aprs la dfaite allemande de la bataille de la Marne en 1914.

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3.3.4.1 But atteindre V=V : Victoire = Volont et Foch ajoutait : sachez ce que vous voulez et faites-le . Tout commence en effet par la connaissance du BUT ATTEINDRE et par ladhsion de tous cet objectif qui, dans les ordres, doit tre exprim clairement pour que tous agissent et fassent agir en fonction de ce but (Etat final recherch, Effet majeur). Exemple historique : Cristiada, Guerre du Mexique 1926-1929 Pour le combat rappelez-vous que son objet est de briser la volont de lennemi pour imposer la ntre, chose qui ne sobtient que par des victoires compltes acheves par la poursuite ; on ne combattra donc que lorsque la supriorit numrique, celle des positions ou celle que donne la surprise sera manifeste, permettant logiquement dattendre la victoire. En dautres termes, vous ne combattrez que l o cela vous conviendra et quand cela ne conviendra point lennemi. Vous ne vous fatiguerez pas de manuvrer jusqu fatiguer lennemi et lobliger prsenter combat en situation dfavorable pour lui. Enrique Gorostieta Velarde, Gnral en chef de larme des Cristeros. Cest aussi cette adhsion un but commun, cet idal partag qui crent la confiance et la solidarit entre tous les niveaux de la hirarchie et conduit accepter de risquer sa vie.

3.3.4.2 Solidit des armesLes forces morales entrent bien pour une part importante dans la solidit dune arme et le ralisme commande de reconnatre limportance de ces facteurs mme sils sont essentiellement variables et difficilement quantifiables. Une arme solide est un facteur moral essentiel de russite des combats sur le champ de bataille. Exemple historique : Gaugamles octobre 331 avant Jsus-Christ. Alexandre le Grand poursuit sa progression en Orient la tte de son arme macdonienne invaincue en Asie. Son objectif est de remporter une victoire dcisive pour provoquer leffondrement du vaste Empire achmnide. Son arme est forte de 40.000 fantassins et de 7.000 cavaliers. Alexandre traverse lEuphrate, puis la Msopotamie, franchit le Tigre et rencontre le gros de larme perse de Darius III, peut-tre 250.000 hommes dont 200 chars, une forte cavalerie de Scythes et de Parthes et une quinzaine dlphants de combat, proximit dArbels en octobre 331 avant Notre Seigneur Jsus-Christ. Darius, bnficiant dj dune crasante supriorit numrique, a prpar habilement les lieux de la bataille, la vaste plaine de Gaugamles, en aplanissant le terrain pour ses chars et en parsemant par endroit le sol de tiges de fer pour entraver la mobilit des redoutables phalanges macdoniennes. Alexandre va utiliser latout principal de son arme, le dispositif tactique macdonien : une charge en oblique de formations compactes de 256 fantassins lourds disposs sur 16 rangs et arms de sarisses, une lance de 4 7 mtres de long. Une telle masse en mouvement, hrisse de lances et protge de boucliers, a une force de pntration qui na pas encore trouv de parade. Alexandre, se fiant la valeur de ses troupes, prend linitiative du combat et charge avec sa cavalerie sur laile gauche de Darius. Il dclenche peu de temps aprs la charge oblique de ses phalanges sur le mme ct gauche de lennemi dj branl. Le centre de larme dAlexandre neutralise alors la charge impressionnante des chars de Darius (lames acres sur les essieux) par un sang froid qui permet dappliquer une vole de flches et de javelots sur lassaillant. Malgr la menace des cavaliers scythes sur la gauche macdonienne, larme dAlexandre fait preuve dune telle solidit en gnral que

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Darius dcide de senfuir du champs de bataille entranant la dbcle du gros de larme perse. Devant secourir son aile gauche menaant de seffondrer, Alexandre ne pourra poursuivre son ennemi immdiatement et ne pourra rejoindre Darius III. Ce dernier sera assassin Bactriane. Le bilan de la bataille est de quelques centaines de pertes macdoniennes pour plusieurs dizaines de milliers du ct perse. La victoire dAlexandre tient essentiellement la solidit de son arme, solidit tactique de sa phalange et solidit morale de ses troupes disciplines face larme disparate de Darius.

3.3.4.3 Moral des arriresLe principe des forces morales rappelle galement que, de tout temps, il a exist un moral des arrires aussi important que celui des troupes. Le soutien de la nation est un facteur important dappui moral aux troupes engages. Les guerres dIndochine et du Vietnam lont illustr tout comme lengagement amricain en Irak.

3.3.4.4 Les objectifs psychologiquesLe principe des forces morales inclut galement lexistence dobjectifs dont limportance psychologique est indpendante de leur nature tactique ou conomique : capitales, villes symboles, lieux saints, etc. Ces objectifs psychologiques peuvent constituer le centre de gravit de lennemi ou des points dcisifs. Une approche indirecte peut amener dtruire ces centres de gravit ou ces points dcisifs. Les oprations militaires dinfluence (OMI, ex-PSY OPS) peuvent avoir un effet sur ceux-ci, effets quil faudra planifier et mesurer autant que faire se peut.

3.3.4.5 LaudaceLaudace participe entretenir lascendant moral sur lennemi. Il permet de maintenir ou de rtablir la supriorit morale sur ladversaire. Laudace se caractrise par une prise de risques calcule, ou mieux, raisonne, qui permet dimposer sa volont ladversaire. Penseurs militaires : Commentaire dErwin Rommel sur laudace. Lexprience prouve que les dcisions les plus audacieuses assurent les plus belles promesses de victoire. Mais il y a lieu de bien distinguer laudace stratgique ou tactique et le coup de ds. Lopration audacieuse est une opration o le succs nest pas garanti, mais dans laquelle, en cas dchec, le chef reste la tte de forces suffisantes pour faire face nimporte quelle situation. Le coup de ds, en revanche, peut vous donner la victoire ou mener la destruction totale de votre arme. Dans certaines situations, mme ce coup de ds se justifie. Par exemple lorsque la marche normale des vnements doit avoir pour rsultat la dfaite, que celle-ci nest plus quune question de jours. Aucune raison, ds lors, de temporiser, et la seule chose qui reste faire est de lancer une opration grands risques. Erwin Rommel Carnets, la guerre sans haine. 1952. La Guerre des 6 jours, du 5 au 11 juin 1967, montre que laudace, en particulier dans le Sina et sur le Golan, a constitu, combine avec le couple avions-blinds et leffet de surprise, le principal outils de la victoire isralienne avec moins de 700 pertes contre 27.000 du ct arabe. Le rle des forces morales ne diminuera pas dans lexcution des missions des engagements futurs :

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dabord parce que le succs reviendra ceux qui sauront faire preuve dinitiative, daudace, de sens des responsabilits, desprit de sacrifice , mais surtout parce que tous connatront des troubles psychiques conscutifs la violence des combats. Le code du soldat, qui a pris exemple sur le code du lgionnaire, est un guide moral pour laccomplissement de la mission (voir paragraphe 6.2). Un moyen efficace de lutte contre ce stress du combat est damliorer la capacit psychosociologique des units (ou CAPSU). Cette capacit est principalement la rsultante de : La confiance accorde lencadrement, La confiance en soi et en ses moyens de combat, La perception de la lgitimit de laction, La cohsion des units. Le colonel Ardant du Picq a fait ressortir la prpondrance de ces facteurs dans son Etude sur le combat .

CONCLUSION du chapitre : Les principes de la guerre sont interdpendants. Ils ne peuvent tre appliqus isolment. Ils sont associs des conditions de russite politique et des conditions oprationnelles. Il y a donc des principes, mais peu. Il faut surtout savoir les interprter, les comprendre et les dcliner. Le gnral Poirier a ainsi dvelopp la notion de bote outils. Mais ces principes de la guerre chappent aux influences de la technique et des doctrines spcifiques. Cest en ce sens quils sont prennes. Cest en ce sens aussi quils sont encore plus mditer qu connatre. Penseurs militaires : Axiomes stratgiques et tactiques de Liddel Hart Points cls : Dislocation et exploitation (pour rendre le coup dcisif). Susciter loccasion favorable et ncessit dinciter lennemi commettre des fautes. 1 - Ajuster votre fin vos moyens 2 - Conservez toujours votre objet prsent lesprit 3 - Choisissez la ligne (ou le dveloppement) de moindre attente 4 - Exploitez la ligne de moindre rsistance 5 - Adoptez une ligne dopration procurant des objectifs alternatifs 6 - Assurez-vous de la souplesse, la fois, du plan et du dispositif qui doivent pouvoir sadapter aux circonstances 7 - Ne jetez pas tout le poids de vos moyens dans une affaire quand votre adversaire est en garde 8 - Ne renouvelez pas une attaque sur la mme ligne (ou dans la mme forme). Exemple historique : Bataille de Cannes (216 avant Jsus-Christ). Dislocation : cavalerie lourde - Exploitation : cavalerie numide

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Autre exemple historique : Ina 1806.

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4 Les principes tactiques des oprations terrestres4.1 Des fondamentaux respecter 4.1.1 GnralitsPrambule :La finalit des oprations demeure limposition de sa volont ladversaire en vitant de se faire imposer ou subir la volont adverse. Mme si aujourdhui encore le succs ne signifie pas la victoire de lun et la dfaite de lautre, on peut distinguer deux approches majeures : lapproche directe et lapproche indirecte. De plus, dans les conflits ces deux approches peuvent se mler lune lautre.

4.1.1.1 Lapproche directeTTA 106 Approche directe Concept stratgique envisageant de dtruire les forces combattantes de lennemi Dans cette approche il y a affrontement de puissances, un choc direct ou frontal de forces combattantes. La rflexion sur ladversaire est quantitative. Ladversaire est considr comme une addition de forces que lon va sefforcer duser pour le dtruire. Le succs sera obtenu par leffet cumulatif de la force de destruction. Le centre de gravit adverse est ce que lon cherche atteindre directement. Le coup est port sur le centre de gravit pour lannihiler.

4.1.1.2 Lapproche indirecteTTA 106 Approche indirecte L'approche indirecte recherche la victoire, quel qu'en soit le niveau, par l'effondrement plus que par la destruction de l'adversaire envisag comme un systme plus que comme une accumulation de forces. Lapproche indirecte relve dune approche systmique plus que quantitative. Ladversaire est considr comme un systme complexe dont la manuvre va chercher briser la cohrence. Ce sont alors les vulnrabilits critiques de ladversaire qui deviennent lobjet de toutes les actions conduites. La dislocation ou le dmembrement du systme adverse doivent permettre de briser sa volont. Le centre de gravit est donc vis de manire indirecte : cest lattaque des diffrents tais de soutnement qui fera scrouler lensemble. La ncessit dexploiter rapidement des faiblesses dceles laisse une large part linitiative.

4.1.1.3 imbrication et tlescopage des deux approchesApproches directes et indirectes peuvent se retrouver combines dans les mmes oprations. Il faut alors considrer le niveau des oprations.

4.1.2 Les savoir-faire de base possderAssurer sa sauvegarde (conserver son potentiel de combat pour remplir la mission), maintenir la liaison (afin de pouvoir recevoir et donner linformation, agir et faire agir), utiliser le temps lespace (pour dmultiplier ses capacits et amoindrir celles de lennemi) et les dimensions immatrielles sont les 6 composantes qui sont au fondement de toute manuvre.

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4.1.2.1 La sauvegardeTTA 106 1- Ensemble des mesures de sret, de scurit et de dfense. 2- Notion conue comme la capacit de la force prserver son intgrit, c'est dire son potentiel militaire et humain, ses installations, le soutien de la population et de l'opinion publique locale. La prservation de lintgrit de la force est une action permanente qui doit sefforcer dtre la plus transparente possible pour lunit concerne de faon ne pas obrer son conomie des moyens. Seul un entranement pouss sur le long terme ainsi quune organisation adapte et souple peut parvenir ce rsultat.

4.1.2.1.1 SretEnsemble cohrent de mesures dfensives mises sur pied et appliques tous les chelons du commandement dans le but d'obtenir et de maintenir la scurit ; En oprations, mesures visant priver l'ennemi de renseignements et assurer la libert d'action d'une force, la prvenir d'une rencontre inopine et la protger d'une attaque. La sret vise principalement protger sa propre action de la surprise en procurant les dlais ncessaires la raction. Elle a une part majeure dans la matrise ou lacquisition de la libert daction du chef. La sret se conduit simultanment sur trois niveaux dengagements diffrents et dans trois domaines daction particuliers. Trois niveaux de sret sont ncessaires pour garantir la libert daction du chef. Lointaine : de niveau opratif ou stratgique, elle laisse au dcideur la possibilit dlaborer une raction approprie de faon prendre lascendant sur ladversaire ; Rapproche : donne aux chefs la possibilit de ragir par une manuvre coordonne ; Immdiate : donne aux personnels la possibilit de riposter. En dautres termes et sur le plan tactique En manuvre classique, En mouvement, tout dispositif devra systmatiquement avoir les composantes suivantes : - Avant-garde, arrire-garde, Flancs-gardes : ces composantes seront matrialiss par des units ddies ou non (missions secondaires), des systmes suivant la menace estime ennemie rapporte au terrain. - A larrt, tout dispositif comprendra des lments (units ou systmes), de sret rapproche et immdiate. En manuvre immatrielle : la sret sera assure par le renseignement dambiance cr par limmersion dans la population. La sauvegarde sera assure galement par la rputation de lunit. Par les niveaux de posture et la ractivit (sret immdiate), Pour raliser une sret optimale, le dispositif ami devra adopter trois postures actives et passives suivantes : Discrtion ou dception : (c'est--dire la conservation du secret) dans les dplacements, les stationnements, lchange de donnes ou dinformations. Dtection : par la recherche constante du renseignement et tous les niveaux, travers, les consignes de surveillance, les mesures de dtection (en particulier NBC et mouvement de foule ou proccupation des populations critiques), le dispositif dalerte tabli. Lunit de sret est particulirement bien plac pour lacquisition du renseignement dopportunit destin fournir les informations adquates en vue de la ralisation de leffet majeur.

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Disposition spatiale : par les mesures dautodfense simples et efficaces travers soit un dispositif cohrent, un chelonnement des units adquat, soit la dtermination de limpossibilit chez lennemi de crer la surprise car tant lui-mme surpris. (cas dun raid ou de la rapidit).

En dfinitive, la sret est donc la fois une manuvre dacquisition du renseignement et de dissimulation des intentions de ses propres forces. Elle est aussi un effet produit chez lennemi : son incapacit nous dominer par la surprise.

4.1.2.1.2 ScuritSi la sret est la protection face la surprise ennemie, la scurit est lautre aspect de la sauvegarde. En effet, dans son acception la plus large, la scurit est la protection contre les effets des armes de toutes natures et de toutes origines (amies-ennemies)2. Une bonne scurit est obtenue travers la : Dissimulation des formations, personnels, des matriels et des liaisons Dispersion des units sur le terrain par un chelonnement judicieux Protection par : lorganisation et lutilisation du terrain lutilisation de moyens techniques appropris (individuels (casque, gilet), collectif (blindage, dfense active etc) les rgles de scurit (ligne de coordination, mesures de scurit, rgles douverture du feu, etc) Rputation (aspect psychologique) : par des mesures de communication visant assurer ladversaire la certitude dune raction la fois approprie et dvastatrice (pouvant se fonder sur la dception). En manuvre asymtrique, la scurit tant mise en cause trs rapidement, elle constitue une composante prendre en compte systmatiquement dans llaboration de toute manuvre.

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Alors que la sret vise protger de la surprise ennemie, c'est--dire donner les dlais ncessaires la raction.

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Principe de sauvegarde non respect: Isandlwana 1878, Afrique du sud : arme RU/Arme Zulus Arme Zoulou progressant en ambiance vitesse et sans marquer de temps darrt.

Crte militaire : dispositif de sret latrale anglais trop faible pour gagner les dlais ncessaires la transmission du renseignement et la raction anglaise(flanc-garde).

Corps anglais en progression : aucune raction : anantissement.

4.1.2.2 La liaison : le lien tactiqueDans des engagements o et leur cohsion fragilise par la modularit des units est forte ainsi que par l clatement de la manuvre rendue possible grce aux progrs technologiques, la solidit du lien tactique unissant les units et les hommes na jamais t aussi ncessaire. En effet la performance, la puissance et la cohrence de laction seront dautant plus grandes que la cohsion gnrale du systme sera ralise. Ce lien est ralis largement en amont lors de la formation travers une doctrine unitaire dengagement, lors de lentranement effectu en commun selon des procds normaliss et rigoureux. Ce lien est affermi travers la conception des ordres et llaboration de leffet majeur qui donne toute la consistance lunicit de la manuvre. Si le subordonn connat et comprend lide de manuvre et son aspect essentiel leffet majeur, son action sordonnera en vue de sa ralisation mme si la liaison est momentanment rompue ou les correctifs ou explication difficiles. La discipline, la rptition des manuvres effectuer, lappropriation des procds tactiques par les chefs et les excutants entrent dans une part essentiel de la solidit de ce lien tactique. La confiance rciproque entre chefs et subordonns envers les matriels, le lien affectif avec la nation, le lien rationnel dans la comprhension pleine et entire de la lettre et de lesprit de la mission reue, ladhsion dans des valeurs explicits de linstitution son galement fondamentales a fortiori dans le cadre si particulier des

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nouveaux engagements o des chefs de petites cellules se retrouvent isols et doivent faire preuve dinitiative adquate. Enfin le partage de linformation plus que sa possession sera demain un lment essentiel la prservation de ce lien tactique.

4.1.2.3 Lutilisation du temps Le chef est celui qui russit ses calculs de temps . Napolon calculait prcisment avec rgles et compas avant chaque campagne, etc Comment utiliser le temps ? Considr bien souvent plus comme une donne que comme un oputil de manoeuvre, le temps est au cur du problme de leffet majeur et de la recherche du moment critique, de lopportunit dcisive. La recherche de linstantanit : maintenant ou jamais

4.1.2.3.1 Gagner du temps, et pouvoir en jouer4.1.2.3.1.1 Les matriels Les NTIC et le temps rel et le problme de la surinformation. La bataille NTIC : limplosion des dlais de transmission et dexploitation de linformation : la technologie doit permettre dacqurir et de traiter plus vite que ladversaire linformation pour en faire du renseignement, lexploiter et le transmettre en ordre aux excutants. Le problme rside dans labondance de linformation, la facilit crer du traitement pour luimme, la soumission la technologie. La bataille des feux : temps de parcours rduit, efficacit quelque soit le temps et la vitesse de progression du lanceur (absence dangles morts, inversement sa prsence chez lennemi prsente une faiblesse). La bataille de la mobilit : ltendue des thtres, la discontinuit des dispositifs, la recherche de la surprise, la ncessit dactions rapides dans la profondeur entrane une capacit de mobilit tactique et oprative voire stratgique si lon veut acqurir la supriorit ou exploiter la vulnrabilit de ladversaire. La bataille de la protection : la mobilit du vhicule participe sa protection et permet la rapidit des actions (tempo) et la cration dun rapport de force localement favorable. 4.1.2.3.1.2 La modularit actuelle des structures permet de gagner mais aussi de perdre des dlais Le succs de la plupart des choses difficiles dpend de savoir combien il faut de temps pour russir . Montaigne. Le nombre de niveaux hirarchiques (ncessaires et suffisants), le nombre de subordonns chaque niveau, le degr dautonomie des sous ensembles participent au gain de temps sur ladversaire. Il dpend des performances des diffrents matriels, des hommes qui composent ces organisations, du type dopration que lon entend conduire. Ici un compromis est trouver entre rapidit, niveau de dcision et qualit. La rpartition des forces au sein des units permet la saisie dopportunit: La concentration de son lment dcisif (en fonction du moment) permet de lutiliser au moment opportun puis/ou dexploiter immdiatement laction dcisive sans relche avec les forces suffisantes pour empcher ladversaire de se rorganiser ou ressaisir. Les dlais sont galement tudis en fonction des moyens de contact, des appuis que lon possde et en considrant ceux que lennemi possdent . les dlais permettent de tirer des conclusions logistiques et de mesurer certaines vulnrabilits exploiter ou protger. GUIBERT la fin du XVIII sicle, invente le principe divisionnaire qui deviendra en 1803 le corps darme, il permettra des gains de temps considrable pour

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En 1977 le gnral LAGARDE supprime le niveau Brigade pour avoir des corps darme plus rapidement manoeuvrant. En 14 octobre 1806, la bataille dAuesrstaedt montre un diffrentiel important entre les deux armes : - organisation diffrente dans chaque arme. - concentration des troupes au moment opportun. - capacit dexploitation pour achever la victoire. - diffrentiel important entre les deux armes. Lorganisation du commandement permet loptimisation des dlais : Les subordonns doivent avoir compris et intgrer lintention du chef de faon avoir le maximum de cohrence dans laction globale, il sagit donc bien davoir saisi lesprit de la mission. Anticipation de la volont du chef : La prparation de laction sans avoir les ordres complets (seul un WINGO ou une connaissance (importance de lesprit de corps et de la cohsion de la communication). La matrise de la dure - Capacit durer La logistique : un facteur essentiel de la capacit durer Lacheminement (projection) des capacits essentielles la ralisation de lintention du chef ou de la mission prend des dlais. Ceux-ci doivent tre calcul finement ainsi que les dlias pour entretenir son effet dans la dure (ravitaillement) et la recherche de vulnrabilits pouvant bloquer lacheminement. Tenir : Le moral est une autre composante de la capacit durer Au del de labsence ou de la faiblesse des volonts qui ne fait pas tenir les dlais impartis, Les attritions non prvues gnrent un retard gnral car il faut rparer les brches, La prsence de personnels ex combattant est un facteur supplmentaire de retard. Il sagira dtudier quels troupes peut-tre mise en premier chelon, quelles autres doit-on viter dexposer ce moment. Le chef doit anticiper ces pertes par la connaissance de ses hommes et par les conclusions quil en tire dans llaboration de la mission (effectif supplmentaire ou tactique diffrente) Exemple : DIEN BIEN PHU pas assez de temps dans linstallation manque de temps dans le ravitaillement etc La recherche de lopportunit : quel moment opportun placer son effort ? La recherche du contre-pied : lacclration ou la dclration du rythme Capacit alterner des squences de diffrentes natures (repos, action, vitesse, lenteur). Par l ladversaire se verra impos un rythme qui nest pas le sien. Les actions peuvent tre simultanes ou successives, viser un seul point ou plusieurs, leffet obtenir peut-tre de viser la permanence des coups, leur alternance. Elles peuvent tre cibles sur la troupe, le commandement, la logistique ou les systmes de communication de faon dmoraliser, dsorganiser ou faire de la dception. Lirrgularit Face un adversaire utilisant une progression linaire (aller de plus en plus vite ou la mme vitesse, cas le plus frquent), un moyen est de rechercher un rythme qui sera peru comme alatoire auprs de ladversaire, cest dire en ayant un rythme irrgulier.

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Il sagit de concevoir un plan dont les phases sont de dures variables3. Le phasage de la manuvre dcoulant de leffet majeur rpond particulirement bien cette conception. la seule mcanique du temps accord aux trois phases : de prparation (assez longue), dexcution de leffet majeur (correspondant une action-type de lunit, donc brve par nature), puis de rentabilisation (quon essaiera de prolonger autant que possible, puisque cest cette phase qui assure le transfert de linitiative lchelon suprieur). La recherche de linstant : le point culminant Le moment opportun est llment cl de la ralisation de leffet majeur. Il sagira de frapper en se fondant sur une analyse prcise du rapport de forces rapporter au temps : Avant que ladversaire ait culmin, cest dire quil est atteint son potentiel maximum. Aprs que ladversaire ait culmin. En dautres termes, il sagira d viter de frapper au moment o ladversaire est son potentiel maximum. Ceci ncessite des renseignements surs et actuels sur les intentions et la situation de ladversaire ainsi que sur le terrain. Il sagira surtout de savoir anticiper laction de ladversaire. Campagne de 1674 par TURENNE prparation minutieuse de la mission anticipation de la mission prvisible dclenchement de laction contre temps pour leni rapidit du mouvement exploitation matrise violence matrise pour le temps ultrieur (anticipation nouveau) Par la matrise du temps (instant et dure) nous sommes galement prs des principes dincertitude, de foudroyance, de la part de risque prendre et de celle du renseignement obtenir.

4.1.2.4 Lutilisation du feule feu des armes est larme la plus vidente et celle qui fait obtenir le plus de rsultat sur ladversaire. Utilisant des armes tir tendu ou tir courbe, le chef et le soldat doit avant tout tirer tout le parti des caractristiques de ces armes tout autant que de se protger de leur faiblesse.

4.1.2.4.1 Gnralits : la direction principale dactionUne formation arme dote darmes tir direct privilgiera invitablement une direction gnrale daction o elle portera son effort, c'est--dire leffet maximal de ses armes. Cest cette direction qui lui fera dailleurs (un dispositif vraiment omnidirectionnel restant rare) prendre toute sa cohrence. Cette vectorisation ncessaire induite la fois par les armes et le mouvement, en fait de par sa structure est au fondement de la manuvre. En effet, il sagira pour les deux adversaires de rduire cette puissance axiale ou dutiliser la faiblesse existant sur les flancs ou les arrires ennemis. En consquence, il sagira daborder ladversaire et le combat dans cette perspective : dans quelle direction prends son sens la formation ennemie puisque cette direction est la source de la puissance ennemie et celle ou le danger quelle reprsente sera le plus grand ? Considrant une unit en dfensive sur un espace plan. Les secteurs de tir seront fonction de lallonge des armes et de leurs densits. Globalement un axe majeur se dgagera dans la direction principale correspondant la puissance de feux optimale : Face celle-ci, une3

Col YAKOVLEV

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unit adverse effectuera , du plus simple au plus complexe, du moins efficace au plus efficace (toutes choses tant gales par ailleurs) : Une action ou un tir de front ou frontal (1) Une action ou un tir en charpe (2) Une action ou un tir de flanc (3) : Une action ou un tir revers : Dans les trois derniers cas, lapproche de cette unit sera facilite par une dure infrieure et une moindre densit des feux adverses. Par ailleurs et prenant en compte leffet des armes sur le terrain, lefficacit de celles-ci sera diffrentes selon que : Le tir sera rasant : lorsque les trajectoires ne slveront pas au dessus de lobjectif, leffet sera maximal sur toute la trajectoire des projectiles et le maximum de surface sera battue par les feux. Lorsque celui-ci est maximal, on dsignera lespace considr glacis . Lexemple des plages dOmaha Beach le 6 et 7 juin 1944. Le tir sera fichant : seule probabilit datteinte au voisinage immdiat du point dimpact, peu de surfaces battues par les feux mais effet physique et psychologique maximale dans la zone dimpact. (effet dvastateur sur les assaillants (Monte Cassino). Il permet en outre de limiter les effets collatraux (tir partir dhlicoptre Puma Abidjan en nov. 2004). Prenant la mme unit en dfensive, et faisant apparatre les secteurs de tir de ses armes, secteurs qui se recouvrent plus ou moins, et qui portent plus ou moins loin, on fait apparatre des lobes (terminologie emprunte la diffusion des ondes). Les effets des projectiles tant diffrents selon leur natures, il sagira de les combiner de les optimiser, de manuvrer ses feux de faon dmultiplier ses effets et doffrir ladversaire un espace maximum battu pas les feux. La notion de flanquement ou daction de flanc : Pour interdire lennemi ou pour agir sur lui sur un front AB, le premier rflexe qui vient lesprit est de lui opposer perpendiculairement un barrage sans aucune lacune en croisant ses tirs. (cf. croquis ci-dessous) ou dans le cadre dune action offensive de lattaquer dans le mme axe. Un rsultat quivalent peu tre obtenu beaucoup plus conomiquement au moyen dune seule arme ou unit tirant ou agissant dans une direction peu prs parallle au front, dans le flanc de lassaillant ou du dfenseur. Les armes en flanquement doivent tre protgs des tirs de face ennemis ou dune action adverse par un dispositif de couverture. Lorsque le champ de tir est de faible tendue, (cas de la contre-pente), le flanquement ou lattaque de flanc permet de dfendre ou dattaquer avec succs une telle position. Cet emploi sera dailleurs le seul moyen de profiter de la grande longueur de la rasance des trajectoires des armes conjugu la protection offerte par la contre-pente. Le terrain peut galement faciliter les tirs de flanquements (notamment en combat urbain Beyrouth, Stalingrad) extrmement difficiles neutraliser et qui empchent lassaillant daborder la position ennemie. Ils apportent un complment important au tir de face.

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Limite du champ de tir visible

L espace de manuvre : capacit de manuvre

Espace occup Espace battu (placement initial) Espace contrl (aprs manuvre)

Espace surveill (demble)

4.