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18 Convulsions, épilepsie. Spasme du sanglot. Malaise vagal Une convulsion hyperpyrétique typique ne nécessite pas le traitement préventif dune éventuelle récidive. Épilepsie : la surveillance du traitement est clinique et non électroencéphalographique. Spasme du sanglot, malaise vagal : pas de panique, pas dexamens complémentaires. Convulsions, épilepsie Il nest pas question ici denvisager tous les problèmes qui peuvent se poser à propos des convulsions de lenfant, mais de se situer dans le cadre de la consultation dun enfant qui a eu une ou plusieurs crises et qui est examiné en dehors de tout climat durgence. Il faut savoir que lincidence de lépilepsie dans la population générale est de 1 %, donc relativement fréquente. Diagnostic Le diagnostic est avant tout clinique, et cest linterrogatoire qui va ou non emporter la conviction. Cest dire tout le soin quon doit y attacher pour obtenir un récit précis, clair, sobre du déroulement de la crise. Celle-ci a eu lieu, en général, dans un contexte daffolement de lentourage, et il faut que le médecin fasse montre de la plus extrême patience pour en obtenir une description interprétable. Faute de quoi, que de « malaises », de lipothymies, de crises de nerfs ou de spasmes du sanglot risquent, à tort, de recevoir létiquette d« équivalent convulsif » ! De deux choses lune : ou bien, au terme de cet interrogatoire, la crise convulsive ne fait pas de doute et le diagnostic doit être authentifié, ou bien le médecin a simplement limpression quil sest passé quelque chose de bizarre dont la signification, pour linstant, lui échappe. Dans ce cas, mieux vaut, sans doute, sous couvert de quelques examens simples, réfuter tem- porairement ce diagnostic, quitte à se reposer la question si un élément nouveau survient, si les « crises » se répètent, si lélectroencéphalogramme (EEG) montre des altérations irréfutables. Guide pratique de la consultation pédiatrique Ó 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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18 Convulsions, épilepsie.Spasme du sanglot.Malaisevagal

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ne convulsion hyperpyrétique typique ne nécessite pas letraitement préventif d’une éventuelle récidive.

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pilepsie : la surveillance du traitement est clinique et nonélectroencéphalographique.

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pasme du sanglot, malaise vagal : pas de panique, pas d’examenscomplémentaires.

Convulsions, épilepsieIl n’est pas question ici d’envisager tous les problèmes qui peuvent se poserà propos des convulsions de l’enfant, mais de se situer dans le cadre de laconsultation d’un enfant qui a eu une ou plusieurs crises et qui est examiné endehors de tout climat d’urgence. Il faut savoir que l’incidence de l’épilepsiedans la population générale est de 1 %, donc relativement fréquente.

Diagnostic

Le diagnostic est avant tout clinique, et c’est l’interrogatoire qui vaou non emporter la conviction.

C’est dire tout le soin qu’ondoit y attacher pour obtenir un récit précis, clair,sobre du déroulement de la crise. Celle-ci a eu lieu, en général, dans uncontexte d’affolement de l’entourage, et il faut que le médecin fasse montrede la plus extrême patience pour en obtenir une description interprétable.Faute de quoi, que de « malaises », de lipothymies, de crises de nerfs ou despasmes du sanglot risquent, à tort, de recevoir l’étiquette d’« équivalentconvulsif » ! De deux choses l’une : ou bien, au terme de cet interrogatoire,la crise convulsive ne fait pas de doute et le diagnostic doit être authentifié, oubien le médecin a simplement l’impression qu’il s’est passé quelque chose debizarre dont la signification, pour l’instant, lui échappe. Dans ce cas, mieuxvaut, sans doute, sous couvert de quelques examens simples, réfuter tem-porairement ce diagnostic, quitte à se reposer la question si un élémentnouveau survient, si les « crises » se répètent, si l’électroencéphalogramme(EEG) montre des altérations irréfutables.

ide pratique de la consultation pédiatrique2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Examen cliniqueIl est indispensable, même si, dans lamajorité des cas, il est strictement normalIl doit être général et neurologique. L’examen neurologique peut être difficileà interpréter, et si l’on a un doute sur sa normalité, mieux vaut faire appelà plus compétent que soi.L’étude des circonstances de survenue (fièvre, maladie infectieuse), des

antécédents personnels (conditions de naissance, maladies infectieuses, trau-matisme, développement psychomoteur) et familiaux (des membres de lafamille ont-ils présenté des accidents analogues ?) vient compléter les exa-mens cliniques.

Examens complémentairesLa liste des examens qui peuvent éventuellement être effectués chez un enfantayant convulsé est considérable.Mais à dire vrai, c’est en fonction du contexteclinique, des données de l’examen neurologique, de la répétition ou non descrises que des explorations approfondies vont être entreprises. Devant unepremière crise, sans fièvre, chez un enfant sans antécédents neurologiquesnotables, et dont l’examen et le développement psychomoteur sont nor-maux, on peut se contenter d’un seul examen : l’EEG. Certes des anomaliesdu fond d’œil, des anomalies radiologiques (calcifications intracrâniennes),lorsqu’elles sont découvertes, sont une indication à pousser les explorations,mais dans le contexte d’un examen clinique et d’un développement psycho-moteur normal, ces anomalies sont réellement exceptionnelles. Dans cemême contexte, la tomodensitométrie et/ou l’imagerie par résonancemagnétique (IRM) n’ont aucune indication de première intention.L’EEG est certes un examen mystérieux dont les parents attendent beau-

coup, mais il est souvent bien décevant pour le médecin. En effet, s’il montreparfois des anomalies importantes, irréfutables, impressionnantes, qui vien-nent éclairer un diagnostic clinique hésitant, dans bien des cas il est normal, oules anomalies découvertes sont si minimes qu’elles ne peuvent et ne doiventpas être prises en considération. Qu’on soit très prudent, en tout cas, sur ceque l’on dit aux parents au vu de ce résultat tant attendu.Un tracé normal chez un enfant qui a présenté une crise convulsive authen-

tique et bien décrite ne permet en aucun cas de réfuter le diagnostic.Un tracé discrètement perturbé chez un enfant dont la crise est clinique-

ment douteuse ne doit pas conduire à affirmer le diagnostic.La convulsion est un phénomène clinique ; l’EEG peut aider dans certains

cas à l’authentifier ; il ne permet jamais à lui seul de l’affirmer.Parfois, le tracé électroencéphalographique a un aspect spécifique qui per-

met non seulement d’affirmer l’épilepsie, mais aussi de la classer. Mais ces cascorrespondent à des crises dont la symptomatologie très évocatrice sort ducadre de ce chapitre de la crise convulsive généralisée classique.

À retenir

Convulsions : le diagnostic n’est que clinique, il repose sur l’interrogatoire.

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Attitude pratiqueDeux circonstances différentes se présentent : l’enfant était ou n’était pasfébrile au moment de la crise.

Crise en climat fébrileC’est, et de loin, la situation la plus fréquente chez l’enfant demoins de 5 ans.Encore faut-il, pour parler de crise convulsive « hyperpyrétique », s’êtreassuré :

n de la réalité de la fièvre au moment de la crise (> 38–38,5 �C), qui peutparfois avoir régressé quand le médecin voit l’enfant ;

n

de l’absence d’anomalies métaboliques ou hydroélectrolytiques, en parti-culier de l’absence de déshydratation ;

n

de l’absence de pathologie neurologique aiguë (méningite, méningo-encéphalite) ou ancienne, connue, de type encéphalopathie convulsivante.Ainsi définie, la crise convulsive « hyperpyrétique » est une affection

fréquente (2 à 5 % de la population infantile de moins de 5 ans) dont lepronostic est généralement excellent quand la crise est brève et la phasepostcritique dénuée d’anomalies neurologiques, si ce n’est l’hypotonie.Dans la très grande majorité des cas, la pyrexie est liée à une infection viraledes voies aériennes supérieures, ou bronchique, ou bien à une fièvre éruptive,les virus les plus invoqués étant les VRS (virus respiratoire syncytial), HHV6,HHV7, Influenza 4, Herpes 6. La crise convulsive survient alors précocement,en général au cours des 24 premières heures de la maladie (elle est mêmesouvent inaugurale et c’est elle qui permet de découvrir que l’enfant estfébrile : montée brutale de la température). Des antécédents familiaux deconvulsions hyperpyrétiques sont souvent retrouvés ; une hérédité domi-nante polygénique est de plus en plus évoquée.Quand le médecin voit l’enfant, le plus souvent dans un climat d’angoisse

familiale majeure bien compréhensible, il se doit :

n d’éviter la récidive immédiate de la crise, et c’est là que l’administrationd’un anticonvulsivant à action rapide a toute sa valeur, que l’enfantconvulse ou non. Lemieux est d’utiliser le Valium� par voie rectale à la dosede 0,5 mg/kg. Sur le plan technique, c’est plus facile à réaliser que la voieintraveineuse, cela a le mérite d’agir beaucoup plus vite que la voie intra-musculaire, et cela peut être répété au besoin, sans risque respiratoire chezun enfant auparavant sain ;

n

de rassurer les parents et surtout de répondre à leurs deux légitimesquestions : cela peut-il se reproduire et comment l’éviter ? Leur enfantsera-t-il épileptique ?Il faut que les parents sachent que la crise convulsive peut se reproduire

à l’occasion d’une nouvelle hyperthermie. Obligatoirement ? Sûrement pas,mais rien – même les examens complémentaires les plus compliqués – nepermet de donner une réponse à cette question. Une chose est néanmoinssûre : plus l’enfant est jeune lors de la première crise, plus le risque de récidiveest important. Ce risque est estimé à 1 % après une convulsion simple, 10 %après une convulsion fébrile complexe.

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Que faut-il donc faire ?Plusieurs attitudes ont été proposées. Aucune n’est parfaitement satisfaisante.Le traitement au coup par coup de chaque épisode de fièvre par les

antipyrétiques usuels à bonne dose, le rafraîchissement et l’aération del’atmosphère, des boissons abondantes s’impose. L’administration à ces enfantsde diazépam (Valium�) per os, à la dose de 0,5 à 1 mg/kg par 24 heures sousformedegouttes (3 gouttes = 1 mg), a certes été préconiséemais en réalité, ni letraitement de la fièvre, ni le diazépam n’ont fait la preuve de leur efficacité.La prévention au long cours par le valproate de sodium (Dépakine�, 30 mg/kg en

deux prises) a longtemps prévalu. Cette prévention systématique poursuiviejusqu’à l’âge de 5 ans après une seule crise n’a plus de partisans, au moinsaprès la première crise. D’une part, cette solution est assez mal acceptée parles parents qui redoutent les effets secondaires sur le développement de leurenfant ; d’autre part, l’expérience prouve que très souvent, le traitement estrapidement abandonnémême s’il a été prescrit avec conviction. Enfin, la sécuritéqu’apporte le traitement lorsqu’il est correctement suivi n’est pas absolue.

Il ne faut en tout cas pas négliger le traitement au coup par coup, il esttoujours indispensable.

L’attitude proposée aujourd’hui, plus nuancée, consiste à ne traiter que lesenfants dits « à risque » (première crise avant l’âge de 1 an, crise prolongéede plus d’un quart d’heure, antécédents familiaux d’épilepsie) et de ne traiterles autres qu’à la deuxième, voire à la troisième crise.Où est la vérité ? Où est la solution ? Les schémas précédemment exposés

ne sont qu’indicatifs. Il faut, de l’avis des auteurs, dans ces situations,récuser tout dogmatisme : la décision dépend tout autant de la famille, dela confiance qu’elle a dans le médecin, que de l’expérience de celui-ci ; ils’agit pour lui de prendre en charge une famille, ses angoisses et sesproblèmes, beaucoup plus que de l’enfermer dans un schéma rigide.

À retenir

Une convulsion « fébrile » nécessite un virus, une fièvre et un terrain.� Dans tous les cas, traiter la fièvre :

– par les antithermiques usuels ;– par les moyens physiques.

� Pas de traitement de fond par la Dépakine�, sauf circonstances cliniques ouanamnestiques particulières.

Il est évident qu’un très petit nombre de convulsions hyperthermiqueslaissent des séquelles, parfois d’hémiplégie, voire de retard mental, le plussouvent d’épilepsie, sans que l’on sache dans ce cas si la fièvre en est la causeou le révélateur. Cependant, ces séquelles se voient essentiellement chezdes enfants dont la crise est survenue tôt (avant 1 an), a été longue

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(> 15 minutes, unique ou répétée), latéralisée, et chez lesquels il existe unehistoire familiale d’épilepsie. Ce sont des données a posteriori et qui ne consti-tuent en fait que des facteurs de risque qu’aucun examen complémentaire nepermet d’étayer. Tout est affaire de cas particuliers et, en dehors des situationsénoncées ci-dessus, où un risque existe qui pousse à traiter préventivement,on ne peut rien prévoir. Que l’on garde à l’esprit cependant que c’est uneaffection fréquente qui, dans sa forme habituelle, est très certainementbénigne, que des craintes abusives ne doivent pas conduire à perturberl’enfant et sa famille par une prise en charge médicamenteuse et/ou tech-nique (EEG, par exemple) inconsidérée.L’hospitalisation d’un enfant ayant présenté une crise convulsive

« classique » au cours d’une pyrexie ne doit pas être systématique. Mais s’ilexiste lemoindre doute sur l’interrogatoire, la cause de la fièvre, des désordresassociés, si la famille est très anxieuse ou paraît peu apte à exercer une sur-veillance, mieux vaut s’y résoudre.Cette hospitalisation ne se discute pas en revanche quand cette crise

convulsive fébrile révèle une infection intracrânienne (méningite,encéphalite aiguë primitive ou postéruptive, postvaccinale. . .) où la ponctionlombaire est indispensable.

Crise sans fièvreL’attitude à adopter n’est pas facile. En effet, à quoi est due cette crise ?Est-elle occasionnelle, révélant un épanchement sous-dural, une anomalie

métabolique (hypoglycémie, dont l’hypoglycémiedudiabétique insulinodépen-dant surdosé en insuline ; hypocalcémie ; voire exceptionnelle maladiehéréditaire du métabolisme), une intoxication médicamenteuse, une pousséehypertensive quelle qu’en soit la cause ?Est-elle la première manifestation d’une épilepsie ? C’est dans ce cas

en fonction du type de crise, de l’âge de l’enfant, de ses antécédents, deson examen neurologique que des explorations approfondies peuventêtre proposées, au premier rang desquelles figurent actuellement latomodensitométrie et/ou l’IRM. Il faudrait un livre entier pour décrire toutesles situations possibles. Plus encore que pour la convulsion hyperpyrétique, lacrise sans fièvre mérite réflexion, discussion, avis spécialisé. La crise convulsiven’est qu’un symptôme. De là à la qualifier d’« épilepsie », il y a un très grandpas à franchir.

Enfant épileptiqueL’épilepsie, mot magique et terrifiant qui évoque tour à tour des images duMoyen Âge, Dostoïevski, des émissions spectaculaires de la télévision. . . Pourbeaucoup encore, c’est une tare indélébile, un handicap pour la vie. Qu’enest-il exactement ?Une définition ? Celle-ci serait longue, pleine de réserves, de parenthèses,

d’incertitudes. En effet, l’épilepsie n’est pas une maladie mais un grand cadrede la neurologie dans lequel on retrouve plusieurs syndromes, plusieurs mala-dies. Ainsi, il n’y a pas « une », mais « des » épilepsies.

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Au moins peut-on dire ce qu’elle n’est pas :

n l’épilepsie n’est pas synonyme de convulsions : il est des épilepsies sansconvulsions (par exemple le petit mal) ; il est surtout des convulsions quine doivent pas être qualifiées d’« épilepsie ». Les crises convulsiveshyperpyrétiques, les crises par hypoglycémie, les crises à la suite de la prised’un toxique sont occasionnelles et ne méritent pas le terme d’épilepsie ;

n

l’épilepsie n’est pas synonyme d’anomalie du tracé électrique. Il n’y a pasd’épilepsie sans crise clinique, il n’y a pas d’épilepsie purementélectrique. Le corollaire est évident : des anomalies constatées à l’EEG endehors de manifestations cliniques n’appellent pas de traitement.Il est des épilepsies complexes, difficiles à traiter oumême à étiqueter, et le but

de ce chapitre n’est pas de donner une classification, ni même une méthoded’approche de la question. Le praticien, cependant, est souvent confronté auproblème de l’enfant épileptique, et deux questions lui sont soumises :comment suivre son traitement ? Quelle vie a-t-il le droit de mener ?

Surveillance du traitementUn enfant a été étiqueté « épileptique », un traitement a été entrepris. Lemédecin de famille va devoir en assurer la surveillance régulière. Quels sont leséléments de cette surveillance ?La surveillance est avant tout clinique. Un épileptique bien équilibré ne fait

pas de crises. Cela est une évidence : encore faut-il qu’elle soit clairementexprimée et comprise. Si les crises persistent, même larvées, même espacées,deux possibilités doivent être envisagées : le traitement est inadéquat ou letraitement n’est pas suivi – cette deuxième éventualité est aussi fréquente quela première.

Surveillance biologiqueComment faire la distinction entre ces deux cas ? Le dosage plasmatique desantiépileptiques a introduit plus de rigueur et de simplicité dans lasurveillance.Si un enfant, apparemment correctement traité par un médicament

antiépileptique, continue à avoir des crises, il faut avant toute modificationthérapeutique doser le médicament dans le sang :

n si le taux est très bas, c’est tout simplement que le médicament n’est pasdonné. Les parents doivent l’admettre ;

n

si le taux est à la limite inférieure du taux thérapeutique, la dose est proba-blement insuffisante. Il faut augmenter la posologie ;

n

si le taux est dans la zone dite « thérapeutique » (tableau 18.1), il fautchanger de médicament.Ainsi se sont développées des méthodes très fiables de surveillance des

traitements antiépileptiques. Point n’est besoin de les utiliser chez des enfantsqui vont bien et n’ont pas de crises. En revanche, ce type de dosage est utile :

n en cas d’échec thérapeutique ; n en cas d’association médicamenteuse.
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Tableau 18.1Zones thérapeutiques des antiépileptiques usuels

4 mg/l (15 mmol/l) < carbamazépine (Tégrétol�) < 12 mg/l (50 mmol/l)

15 mg/l (15 mmol/l) < phénobarbital (Gardénal�) < 30 mg/l (130 mmol/l)

40 mg/l (280 mmol/l) < valproate de sodium (Dépakine�) < 80 mg/l (560 mmol/l)

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Les nouveaux antiépileptiques ont des indications particulières, de secondeintention dans des épilepsies rebelles ou des formes spécifiques.Ces examens sont maintenant de pratique courante, mais ils ne doivent pas

être des examens de routine puisque leur utilité se limite aux cas cités plushaut. Que le praticien sache qu’ils existent et qu’il peut et doit y avoir recours,s’il le juge nécessaire.

Surveillance électroencéphalographiqueElle est décevante, au point que la question pourrait presque être posée desavoir si elle est réellement utile. Sans aller jusque-là, on peut affirmer :

n qu’un épileptique traité qui ne fait pas de crises ne doit pas avoir de modi-fications thérapeutiques, même si les anomalies EEG persistent ou s’aggra-vent ;

n

qu’un épileptique correctement traité qui fait des crises est justiciable d’unajustement thérapeutique, même si son EEG est rigoureusement normal. Letraitement est celui des crises et non pas de l’EEG.Alors, à quoi sert l’EEG dans la surveillance thérapeutique ?Il est à coup sûr utile dans des épilepsies complexes, difficiles à équilibrer, où

certains types de tracé appellent l’utilisation de thérapeutiques spécifiques.Il reste, pour l’instant du moins, un examen que les parents attendent.

Paradoxalement, ils sont plus rassurés par un tracé normal que par un enfantqui va bien (fascination de la technique).Il est important que le médecin sache utiliser ces instruments à bon escient

pour rassurer des parents trop inquiets ou au contraire « tenir en main » desparents trop insouciants. Chez un enfant qui ne fait pas de crises et suitcorrectement son traitement, il n’est pas indispensable de faire des EEG decontrôle, sauf si cet examen a réellement la vertu de rassurer la famille. Enrevanche, une surveillance clinique régulière avec un bon interrogatoire estlégitime deux fois par an environ.

La vie de l’enfant épileptiqueC’est dans ce domaine que le praticien aura le plus à lutter contre des préjugésaussi dommageables pour l’enfant que dénués de tout fondement : l’enfantépileptique qui ne fait pas de crises doit être considéré comme normal.

ÉcoleCet enfant doit aller à l’école comme les autres, y avoir lesmêmes activités queles autres. S’il existe des difficultés scolaires, elles seront appréhendées comme

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chez tout autre enfant. Doit-on informer l’école de l’épilepsie ?Théoriquement oui, avec établissement d’un projet d’accueil individualisé(PAI), mais cette maladie est encore si redoutée et frappée de mystérieuxdangers que l’on peut se poser la question.

SportDoit-il être interdit ? Certainement pas. Dans les premiers mois du traitement,une contre-indication temporaire est raisonnable, non pas en raison des ris-ques encourus, mais parce qu’une crise survenue à cette occasion aurait forcede loi pour que l’enfant se voie définitivement interdire la pratique du sport.Une fois le traitement bien entrepris et contrôlé chez un enfant qui n’a pas faitde nouvelles crises, le sport peut être autorisé. Un point particulier est toujourssoulevé, c’est celui de la piscine. Théoriquement, il n’y a pas à la contre-indiquer, à la condition que la surveillance y soit très bien exercée (maisest-on certain de la qualité de la surveillance ?). Bien sûr, cela dépend ausside l’âge de l’enfant, de ses compétences en natation, du contrôle des crisessous traitement et de la date à laquelle ce contrôle a été débuté. Quoi qu’il ensoit, les baignades en mer ou en lac en l’absence d’une personne qualifiéedoivent être déconseillées. L’équitation ou la plongée libre peuventêtre pratiquées sous surveillance. Sont formellement contre-indiqués : l’alpi-nisme (mais pas l’escalade sur un mur dévolu, car cette pratique est toujourssécurisée), la boxe, la voile en solitaire, le motocyclisme, le planeur, la plongéesous-marine. En pratique, il convient que le praticien soit d’une très grandeprudence. Si par hasard un accident survenait – même totalementindépendant de l’épilepsie – celui-ci risquerait d’être imputé à l’imprudencedu médecin qui en a donné l’autorisation. En réalité, une consultation enneurologie pédiatrique devrait clarifier les activités autorisées ou non en fonc-tion de l’histoire personnelle de l’enfant.

L’enfant et la familleIl faut convaincre inlassablement les parents que leur enfant doit mener lamême vie que les autres, qu’il est et restera normal. Une seule mesure à leurconseiller : qu’on ne le laisse pas s’enfermer à clé seul (pour prendre sonbain. . .). Mais n’oublions jamais que les perturbations psychologiques sontdes facteurs aggravants de l’épilepsie et qu’elles ont d’autant plus de chancesde se produire que l’enfant ne mène pas la vie des autres enfants de son âge.Lemédecin qui, de plus en plus, a lesmoyens de contrôler et demaîtriser cettemaladie a un rôle essentiel à jouer. Il lui faut à tout prix démythifier l’épilepsie.Mieux que quiconque, le médecin de famille est pour ce faire l’homme de lasituation.

Télévision et jeux vidéoLes crises photo-induites (induites par une stimulation visuelle) sont en réalitéplutôt rares et d’affirmation difficile : un EEG avec stimulation lumineuseintermittente (SLI) normal n’exclut pas cette éventualité, et inversement, la

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présence d’une modification de l’EEG lors de la SLI n’est pas forcément lapreuve d’une épilepsie avec crises photo-induites. En cas de doute sur la réalitéde crises provoquées uniquement devant la télévision ou les jeux vidéo, mieuxvaut demander avis à un neuropédiatre. Il faut savoir que les écrans plasma ouLCD sont les moins concernés. Sinon, en l’absence de certitude de crisesphoto-induites, il ne faut pas modifier les habitudes de télévision, jeux vidéoou ordinateur autorisées par les parents.

Épilepsie et vaccinationAucune étude statistique correctement effectuée n’est venue apporter unepreuve d’un lien de cause à effet entre vaccin et épilepsie. Il n’existe aucunepreuve d’un quelconque rapport entre vaccination et épilepsie en dehors de lacoïncidence entre l’âge de vaccination (avant 1 an) et l’âge de début, chez lenourrisson avant 1 an, des épilepsies les plus graves (comme le syndrome deDravet).En effet, les vaccins peuvent entraîner des réactions fébriles qui révèlent

parfois les premières crises. Le risque de survenue d’une crise est majoréentre 2 et 4 jours après un vaccin DTCaP et entre 10 et 14 jours après unvaccin rougeole-oreillons-rubéole. Ces crises, avec fièvre ou non, doiventêtre considérées comme des crises fébriles. Ces dernières, en l’absence devaccin, seraient sans doute survenues aux premières fièvres d’autre ori-gine, virale par exemple. Une corrélation dans le temps n’est jamais unepreuve de relation de causalité entre deux phénomènes. Les vaccins nedoivent pas servir de bouc émissaire, et cela ne doit pas remettre en causele bien-fondé de la vaccination.Cette augmentation de risque explique cependant sûrement que les

enfants épileptiques sont moins bien vaccinés, ou avec beaucoup de retard.En principe, les recommandations vaccinales chez un enfant épileptique

bien équilibré sous traitement sont donc les mêmes que pour les enfants nonépileptiques : seuls de très rares cas particuliers nécessitent un avis spécialisé.

Surveillance de l’enfant épileptiqueUn épileptique bien équilibré ne fait pas de crises.Surveillance biologique :� le taux de Dépakine� plasmatique efficace va de 40 à 80 mg/l (280

à 560 mmol/l) ;� Demander le dosage en cas de :

– échec thérapeutique ;– associations médicamenteuses.

Surveillance électroencéphalographique :� le traitement de l’épilepsie est celui des crises et non de l’EEG, qui peut être

normal alors que le sujet continue à faire des crises et inversement ;� rassurant les parents dans certains cas, les inquiétant dans d’autres, l’EEG

est une arme à double tranchant.

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Spasme du sanglotUn enfant de 2 à 3 ans tombe, a peur ou est contrarié. Il pousse un cri, est enexpiration forcée. Va-t-il reprendre sa respiration ? En général, oui ; parfois,non. Il devient bleu, ou très pâle, « se pâme » dit sa mère, c’est-à-dire perdconnaissance, devient hypotonique. Parfois même, il a une révulsion oculaire,voire quelques mouvements cloniques. Il reprend très vite consciencespontanément ou alors même qu’on pratiquait des gestes aussidésordonnés qu’inopérants. Cette scène a-t-elle duré longtemps ? Très long-temps, aux dires de la mère ; très peu en fait. Parfois, le cri initial a été absent,mais le déroulement du phénomène a été identique. Tel est le spasme dusanglot.Son diagnostic est clinique et uniquement clinique : c’est l’interrogatoire.

L’incident est tellement clair, stéréotypé, qu’il ne souffre aucune discussion.

Le diagnostic doit être donné à la mère, tout de suite, sans hésitation,sans réserve.Pas d’examens complémentaires, pas de dosages de calcémie,de magnésémie, pas d’EEG, et surtout, ne pas prononcer le terme de« convulsion » ou le réfuter, l’écarter tout de suite, si par hasard la mèrele prononce.

Bien entendu, pas d’hospitalisation. On voit encore souvent de ces enfantsamenés en urgence à l’hôpital et hospitalisés, disons-le très fort, à tort. Danscette aventure, il faut rassurer très vite. L’avis péremptoire du médecin en quil’on a confiance a plus de poids que tous les examens complémentaires parmilesquels il s’en trouvera bien un qui, pour peu qu’on les multiplie, jettera ledoute dans les esprits. Si le médecin – et cela peut lui être permis – a un doute,s’il n’ose pas affirmer, s’il a le sentiment de n’être pas cru, qu’il demande unavis, à condition que ce soit un avis clinique.L’enfant qui a eu un spasme du sanglot en aura d’autres, à l’occasion d’une

autre chute, d’une autre frayeur, d’une autre contrariété. Les parents doiventen être informés. Le problème devient – si ces incidents sont fréquents – plusd’ordre éducatif que d’ordre médical. Pour que cela ne se reproduise pas, onn’osera plus le contrarier. Et il est à l’âge de l’opposition, à l’âge où il estimportant de le contrarier à bon escient. C’est dire combien il faut pouvoirconvaincre ses parents de l’innocuité de l’incident, même si celui-ci se répètefacilement. Dans tous les cas, ces phénomènes paroxystiques disparaissentavec l’âge. Mais l’âge des rudiments de l’éducation sera aussi passé.Que peut-on conseiller, outre le calme et l’indifférence ? Des sédatifs ? Sont-

ils efficaces ? Pas toujours. Ils ont parfois l’intérêt de convaincre la mère queson enfant est simplement un peu nerveux et qu’il vautmieux le calmer que luicéder. Le spasme du sanglot est aussi impressionnant que bénin. Il seraitgrave, aux yeux de la mère, de l’ériger en « convulsions » par une prescriptionchargée d’ambiguïté. Il serait tout aussi grave que lamère se sente culpabiliséepar quelques paroles maladroites.

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18. Convulsions, épilepsie. Spasme du sanglot. Malaise vagal 317

À retenir

Le spasme du sanglot est aussi impressionnant que bénin, il faut donc êtreprudent dans la prescription médicamenteuse afin de ne pas en faire auprèsdes parents une maladie grave. Mieux vaut convaincre de la bénignité quetraiter.

Malaise vagalS’il est un diagnostic souvent porté, c’est bien celui de « malaise vagal ». Il estcommode à retenir en l’absence d’explications claires devant un malaise del’enfant, et ce quel que soit son âge. Les circonstances rapportées sontvariables.

CliniqueChez le nourrisson avant 6 moisCertes, devant unmalaise fait demodification brusque et inattendue du tonuset de la collocation avec ou sans perte de connaissance ou apnée, on évoque(en milieu hospitalier) des apnées obstructives, un reflux gastro-œsophagien,une douleur aiguë (invagination intestinale aiguë), une hémorragie intra- oupéricérébrale, un équivalent convulsif, une infection respiratoire avec compo-sante encéphalitique, une intoxication au monoxyde de carbone, un chocanaphylactique (allergie aux protéines du lait de vache). Cependant, l’hyper-tonie vagale peut être impliquée dans certaines de ces causes, authentifiée pardes pauses sinusales supérieures à 1200 ms lors du déclenchement du réflexeoculocardiaque (ROC) et des décélérations brutales au ROC-Holter, qui resteindiqué en cas de malaises récidivants ou de malaise d’étiologie incertaine,bien qu’il n’y ait plus de traitement préventif puisque le diphémanilméthylsulfate (Prantal�) n’est plus disponible.

Chez le nourrisson, après 6 moisOn décrit un tableau proche du spasme du sanglot, lorsque coexistent unepâleur intense, une perte de connaissance avec reprise rapide de la consci-ence, et que ces épisodes se répètent entre l’âge de 6 mois et l’âge de 4 ans.

Chez l’enfant plus grandLe « malaise vagal » est le plus souvent décrit comme une sensationde faiblesse généralisée, annoncée par des céphalées, une sensation de têtevide ou qui tourne et des douleurs à type de crampes abdominales. La perte deconnaissance (ou évanouissement) est le signe principal ; le réveil estrapide mais le jeune enfant ou l’adolescent reste souvent fatigué pendantles heures qui suivent. Certains facteurs déclenchants sont souventretrouvés : exposition à la chaleur, présence dans une foule, vomissement,position debout prolongée, peur, émotion vive, stress quelle qu’en soit lacause. Les symptômes rapportés sont remarquables par leur subjectivité mais

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318 Guide pratique de la consultation pédiatrique

peuvent tout aussi bien être les signes révélateurs d’une hypoglycémie, inci-tant ainsi à une extrême prudence dans la retenue du diagnostic de malaisevagal. En cas de doute, faire un dosage de la glycémie,mais cela est difficile caril faudrait le faire au cours ou au décours immédiat du malaise. Le recours à labandelette (Dextrostix�) pourrait alors être très utile.

Quand faut-il explorer ces enfants ?Dans la plupart des cas, un bon interrogatoire, un examen clinique rigoureux etparfois un électrocardiogramme éliminent les autres causes de malaises del’enfant et de l’adolescent.Certaines circonstances peuvent amener à proposer un enregistrement

Holter de la fréquence cardiaque :

n la survenue de ces malaises lors d’épreuves sportives, ou à l’effort, quiévoquent une origine cardiaque et qui risquent de mettre en jeu la vie del’enfant ;

n

la répétition de ceux-ci et leur mauvaise tolérance physique ou psycholo-gique ;

n

l’existence d’un terrain familial d’hypertonie vagale symptomatique ; n la persistance d’un doute quant au mécanisme de ces accidents aigus.Chez le nourrisson, les indications du Holter sont, outre les malaises sévères

des premiers mois de vie, les épisodes étiquetés « spasme du sanglot »,lorsqu’ils sont sévères et répétés.

Pour en savoir plus

Arthuis M, Pinsard N, Ponsot G. Neurologie pédiatrique. Paris: FlammarionMédecine-Sciences;1990. p. 163-227.

Roger J, Bureau M, Dravet C, Genton P, Tassinari CA, Wolf P. Les syndromes épileptiques del’enfant et de l’adolescent. 3e éd. Paris: John Libbey; 2002.