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1 Surveillance régulièrede l’enfant

� L

Gu�

a surveillance régulière est la base de la médecine préventive.

� À tout âge, il faut :� surveiller la croissance ;� surveiller les vaccinations ;� informer et éduquer les parents.

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� A

u premier âge, il faut surtout s’intéresser :� au développement psychomoteur ;� à l’alimentation ;� et dépister les handicaps.

� D

e 2 à 6 ans, à l’âge préscolaire, il faut s’assurer de la bonneintégration « sociale ».

� S

urtout après 6 ans, il faut surveiller la scolarité, la vie sociale,affective, culturelle, etc.

La pédiatrie est médecine de développement : développement physique,intellectuel, affectif. Son but suprême est certes de soigner les enfants, maisaussi et surtout de contribuer à en faire des adultes normaux et correctementinsérés dans la vie. . . Ambition démesurée peut-être, objectif à ne jamaisperdre de vue néanmoins. C’est sur cette dimension, parfois un peu oubliéede la pédiatrie, que ce chapitre veut mettre l’accent.Dans cette optique, la consultation régulière souvent effectuée à titre

systématique est un acte d’une très grande portée. D’aucuns le considèrentcomme de peu d’intérêt car de pure routine ; c’est dommage. Il est utile d’ensouligner l’intérêt.

Surveillance régulière à tout âgeNos études et la tradition nous ont enseigné qu’il fallait surveiller la croissance,prévenir le rachitisme et vacciner les enfants. Tels sont les actes essentiels qui ontlongtemps constitué le cadre un peu négligé de la pédiatrie préventive. Cestrois points sont très importants, il est vrai, encore faut-il qu’ils soient correc-tement compris.

Surveiller la croissance staturale et pondéraleSi la surveillance de la croissance (dont les points de repère sont abordés auchapitre 19) est généralement très bien effectuée dans les 2 premières années

pratique de la consultation pédiatrique12 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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2 Guide pratique de la consultation pédiatrique

de la vie (les carnets de santé l’attestent), elle ne l’est pas toujours aussi bienaprès. Lemédecin qui voit un enfant de petite taille à 8 ou 10 ans regrette biensouvent de ne pas posséder ces points de repère essentiels que sont la taille etle poids mesurés une à deux fois par an. Celui à qui est présenté un obèseà 12 ans regrette que cette surveillance régulière n’ait pas été réalisée avecsuffisamment de vigilance pour que cette obésité ait pu être enrayée aumoment où elle a démarré. Les petites tailles chez le garçon, les grandes tailleschez la fille, les surcharges pondérales auront d’autant plus de chances d’êtreprévenues, voire évitées, qu’elles auront été dépistées et surveillées précoce-ment. Il paraît donc nécessaire de programmer une visite médicale semes-trielle jusqu’à 4 ans, puis annuelle dans l’idéal jusqu’à la fin de la croissancependant lesquelles entre autres sont mesurés poids et taille, permettant enplus de calculer l’indice demasse corporelle (IMC), si utile dans le dépistage del’obésité et sa prévention précoce chez les sujets à risque (voir le chapitre 27) ;ces mesures doivent non seulement être notées dans le carnet de santé, maisaussi reportées sur les courbes qu’il contient, ainsi que dans le dossier médicaldu patient (de nombreux logiciels informatiques permettent même d’établirtoutes les courbes automatiquement). Les médecins en sont certes convain-cus ; qu’ils en convainquent les parents et leur enseignent que l’intérêt ducarnet de santé ne s’arrête pas à la petite enfance.

Surveiller et contrôler l’alimentation de l’enfantCela est nécessaire afin de prévenir les carences, mais aussi et surtout l’obésitéet les troubles du comportement alimentaire (voir le chapitre 4).

Prévenir le rachitismeLa prévention du rachitisme est demieux enmieux effectuée en France, et sonincidence diminue.On oublie cependant trop souvent que les besoins en vitamine D sont liés

à la vitesse de croissance staturale, que donc les âges à risque de carencecorrespondent aux périodes de croissance importante, soit essentiellement lapetite enfance et la puberté.Certes, les laits infantiles (préparations pour nourrissons, laits de suite,

laits « Croissance », « Éveil », « Juniors » [de 1 à 3 ans]) sont enrichis envitamine D, ce qui facilite beaucoup cette prévention, mais les quantitésfixées par les normes européennes sont insuffisantes. Le lait de mère necontient pas de vitamine D.Il faut donc apporter de la vitamine D au nourrisson et ce d’autant qu’il

est nourri au sein (1200 U/J), complètement ou partiellement, au biberon(400 à 80 U/J) et/ou qu’il a la peau noire, jusqu’à 2 ans.Il est utile, surtout enmilieu urbain, que l’enfant reçoive chaque année de la

vitamine D, du moins jusqu’à 5 ans. Plutôt que de vains fortifiants réclaméspar les parents, mieux vaut prescrire une dose de 80 000 ou 100 000 U devitamine D, deux fois par an, séparées de 3 mois en période hivernale.L’adolescence est une période à risque en ce qui concerne la minéralisation

squelettique. On considère que le capital osseux est constitué à 16 ans chez la

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fille, et à 18 ans chez le garçon, soit en fin de puberté. Il faut donc que lemédecin s’assure à cet âge d’un bon apport calcique (souvent limité) et, sur-tout pour en faciliter l’absorption intestinale, d’un apport adapté en vitamine Dafin d’obtenir le meilleur capital osseux possible, facteur de prévention à longterme de l’ostéoporose. Une dose hivernale de 200 000 U serait idéale.Et pourquoi ne rien donner pendant cette phase de croissance régulière

mais plus lente de 5 ans à la puberté ? Serait-il néfaste de donner, l’hiver, unedose de 80 000 ou 100 000 U ?

Vacciner les enfantsLes vaccinations sont, elles aussi, correctement effectuées, du moins pendantla petite enfance. Un chapitre entier de ce livre leur est consacré (voir lechapitre 5). Le rôle dumédecin n’est pas seulement de vacciner pendant toutel’enfance, mais aussi d’expliquer le bien-fondé de ces vaccinations et de fairecomprendre que le programme de vaccinations doit se poursuivre pendanttoute la vie.

Prévenir la carie dentaire et les troubles de l’articulédentaireLa santé buccodentaire de l’enfant doit faire partie des préoccupations dumédecin au même titre que la croissance, le dépistage des troubles visuels ouauditifs, les difficultés scolaires, le développement psychomoteur, etc.

Prévention de la carie dentaireLa carie dentaire est une maladie bactérienne : les micro-organismes (notam-ment les streptocoques) métabolisent le saccharose déposé sur l’émail lors del’alimentation et participent à la fabrication de la plaque dentaire, elle-mêmedirectement responsable de la formation de la carie.Il existe trois moyens qu’il faut associer pour lutter contre la carie.

Diminution des glucidesLa diminution des glucides dans la ration alimentaire implique notamment ladiminution des bonbons et boissons sucrées, donc la suppression du grigno-tage et du biberon du soir chez le grand enfant.

Brossage régulier des dentsLe brossage régulier des dents après les repas – avec des brosses en soiessynthétiques et souples, avec des mouvements tournants, en prenant sontemps – serait certainement plus efficace s’il était pratiqué par les parentsjusqu’à l’âge de 3, voire 6 ans (ou alors sous leur contrôle) et en utilisantdes pâtes dentifrices fluorées (en petites quantités).L’Afssaps (2008) recommande (mais est-ce réalisable ?) :

n

de le débuter dès 6 mois (lors de l’apparition des premières dents) avec undentifrice fluoré très peu dosé (< 500 ppm), en très petite quantité, une foispar jour ;

n

puis, de 12 à 18 mois (molaires temporaires), d’utiliser une dose de denti-frice (< 500 ppm) de la taille d’un petit pois ;
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n

jusqu’à 3 ans, de les brosser deux fois par jour avec une pâte doséeà 500 ppm ;

n

enfin, jusqu’à 6 ans, de les brosser trois fois par jour (pâte à 1000/1500 ppmde fluor).

FluorLe fluor est un excellent agent carioprophylactique ; en effet, en s’incorporantaux molécules constituant l’émail, il le rend plus résistant aux agressionsbactériennes.Certains pays ont choisi la fluorisation de l’eau de distribution. Ce n’est pas

le cas de la France ; il faut donc administrer le fluor par voie générale. Ceci est sibien entré dans les habitudes qu’on commence à parler de fluorose (liée à unexcès de fluor), ce qui provoque des controverses assez virulentes aux États-Unis et crée un malaise chez les prescripteurs ainsi que, parfois, des réticencesdans les familles.Le médecin doit donc personnaliser et adapter la prescription de fluor en

tenant compte :

n de l’apport spontané par les sources naturelles que sont l’eau que l’enfantboit, que ce soit de l’eau de distribution ou de l’eauminérale, dont certainessont très fluorées, surtout l’eau gazeuse ;

n

du sel ingéré (contient-il du fluor ?) ; n du dentifrice que l’enfant utilise, en particulier s’il en avale beaucoup (cer-tains sont très riches en fluor) ;

n

mais aussi du risque carieux.Un enfant est à risque carieux élevé s’il présente un des facteurs de risque

suivants :

n non-respect des règles d’hygiène alimentaire : notamment grignotage saléou sucré, consommation de boissons type sodas en dehors des repas, prised’aliments après le dîner ou au cours de la nuit ;

n

endormissement avec un biberon contenant autre chose que de l’eau pure ; n non-respect des règles d’hygiène buccodentaire : notamment brossagedes dents absent, insuffisant ou inefficace, présence de tartre ;

n

présence ou antécédents de caries chez l’enfant, les parents ou dans lafratrie.Il existe également des facteurs de risque environnementaux dont il est

indispensable de tenir compte pour apprécier le risque carieux d’un enfant :

n un niveau socioéconomique ou d’éducation faible de la famille ; une mala-die ou un handicap de l’enfant entraînant des difficultés de brossage ;

n

le port d’appareils d’orthodontie ; n la prise au long cours de médicaments sucrés ou générant une hyposialie(exemple : médicaments anticholinergiques).Le risque carieux varie en fonction de l’âge et de l’époque : les facteurs de

risque carieux évoluent au cours de la vie. Le nombre et la forme clinique deslésions carieuses actives signent le risque carieux. Il doit donc être réévaluérégulièrement par un praticien (au moins une fois par an chez les enfantsà faible risque carieux, et au moins deux fois par an chez les enfants à risquecarieux élevé).

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Chez l’enfant à risque carieux élevé, des thérapeutiques fluorées systé-miques et/ou topiques peuvent être prescrites et/ou appliquées en complé-ment des mesures hygiénodiététiques.

Fluor en gouttes ou comprimésToute prescription de supplémentation fluorée doit être précédée d’un bilandes apports fluorés mesurables (eau de boisson consommée, consommationde sel fluoré), car une seule source de fluorures par voie systémique doit êtreadministrée.Lorsque l’eau consommée a une teneur en fluor supérieure à 0,3 mg/l, les

comprimés ou gouttes fluorés ne doivent pas être prescrits. Dans ce cas, il fautproscrire l’utilisation de cette eau pour la préparation des biberons des nour-rissons, faire consommer de l’eau embouteillée ayant une teneur en fluorinférieure ou égale à 0,3 mg/l et supplémenter l’enfant. Quatre-vingt-cinqpour cent de la population française vit dans des communes où la teneur enfluor de l’eau de distribution est inférieure ou égale à 0,3 mg/l. Seulement3 % des Français disposent d’une eau de distribution dont la teneur en fluorest supérieure ou égale à 0,7 mg/l (répartis dans quelques communes de huitdépartements : 02, 33, 37, 41, 47, 59, 77, 86).Lorsque la famille utilise du sel de table fluoré, les comprimés ou gouttes

fluorés ne doivent pas être prescrits.La supplémentation en fluor peut commencer dès l’apparition des premières

dents (environ 6 mois). La posologie recommandée est de 0,05 mg de fluorpar kilo de poids corporel et par jour, sans dépasser 1 mg par jour tous apportsfluorés confondus, afin d’éviter la survenue d’une fluorose.

Application de thérapeutiques topiquesLe chirurgien-dentiste jugerade la pertinencedeproposer ce typede traitement.Ce sont les vernis fluorés (dès que nécessaire, en denture temporaire comme en

denturepermanente) et les gels fluorés (pouvant être utilisés après l’âgede6 ans).Ils peuvent être appliqués tous les 3 à 6 mois. L’utilisation de bains de bouchefluorés est possible pour les enfants capables de recracher (âgés de plus de 6 ans).

Prévention des troubles de l’articulé dentaireC’est un réel problème quand on voit le nombre d’enfants ou d’adolescentsporteurs d’appareils de correction. Les médecins devraient être sensibilisésà tous les facteurs qui peuvent perturber le développement normal des arca-des dentaires et de la dentition.Il faut insister auprès des parents sur l’importance de la mastication et réap-

prendre aux enfants à manger des aliments durs et croquants. La succion dupouce, des doigts ou de la tétine reste controversée. Doigts ou tétine ? Jusqu’àquel âge est-ce tolérable ? Il est évident que la succion n’améliore pas le développement de la mâchoire, mais peut-on toujours empêcher l’enfant de le faire ?L’obstruction nasale et la respiration buccale qu’elle engendre peuvent

entraîner des troubles de développement du massif facial. Il faut donc savoirdemander un avis ORL.Enfin, les problèmes de position de la langue dans la bouche, le type de

déglutition primaire ou secondaire peuvent aussi jouer un rôle. L’orthophonie

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peut alors apporter un début de solution. Voici différents éléments qu’il fautenvisager dans la prévention des troubles de l’articulé dentaire.Quoi qu’il en soit, il paraît cependant raisonnable de conduire un enfant

régulièrement chez le dentiste à partir de l’âge de 3 ans ; celui-ci saura aumieux préciser les attitudes à adopter, et la fréquence des consultations.

Mesurer la pression artérielle, dépister l’hypertensionartérielleLa mesure de la pression artérielle est difficileElle est recommandée au moins une fois par an après 3 ans.L’état de relaxation de l’enfant d’un examen à l’autre est si variable que les

chiffresmesurés sont parfois très différents. Il faut donc beaucoup de patience.Les normes auxquelles on se réfère imposent une mesure chez un enfant

allongé depuis au moins 5 minutes, avec un brassard adapté couvrant lesdeux tiers du bras (un brassard trop étroit augmente les valeurs mesurées),et par l’auscultation, afin d’obtenir les pressions systolique et diastolique (à ladisparition des bruits).Chez l’enfant de moins de 2 ans, les appareils type Dynmap� sont indis-

pensables, mais on peut se contenter de la technique du « flush ».

En pratique

� Chez le nouveau-né (1 mois) :– la pression artérielle systolique est de 80 mmHg (en moyenne) ;– la pression artérielle diastolique est de 50 mmHg (en moyenne).

� Les valeurs normales sont bien établies après 4 ans :– superposables dans les deux sexes jusqu’à la puberté ;– la pression artérielle augmente avec la taille plus qu’avec l’âge.

� Est excessive :– une pression artérielle supérieure à 95/65 mmHg chez un nouveau-né ;– une pression artérielle supérieure à 120/80 mmHg à tout âge.

Définition de l’hypertension artérielleLes normes ont été fixées par le Club français de néphrologie pédiatrique en seréférant aux courbes établies par André et al. en 1980 (figure 1.1) pour lesenfants de 4 à 18 ans. La pression artérielle étantmieux corrélée à la taille qu’àl’âge, on se réfère donc aux valeurs normales en fonction du sexe et de la taille.Une pression artérielle est dite « normale » quand les chiffres de pressionsystolique et diastolique sont inférieurs au 90e percentile pour la taille. Au-delà, on parle d’hypertension artérielle (HTA) :

n limite : quand les chiffres de PA systolique et/ou diastolique sont comprisentre le 97,5e percentile et le 97e percentile + 10 mmHg ;
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[(Figure_1)TD$FIG]

Figure 1.1Courbes de tension artérielle en fonction de la taille et du sexe.Tension artérielle en fonction de la taille – fillesTension artérielle en fonction de la taille – garçonsCourbesutilisables chez les enfantsdeplusde4 ans, tenant comptede la taille etnonde l’âge.D’après André JL, Deschamps JP, Gueguen R. Tension artérielle chez l’enfant et l’adolescent. Arch FrPédiatrie 1980 ; 37 : 477-82.

1. Surveillance régulière de l’enfant 7

n

confirmée ou sévère : si ces chiffres sont supérieurs au 97,5e percentile+ 10 mmHg, à au moins trois mesures espacées de 1 à 4 semaines ;

n

menaçante (urgence) : si les chiffres sont supérieurs au 97,5e percentile+ 30 mmHg.

Surveillance en fonction de l’âge

La période néonatale mérite une surveillance touteparticulièrePendant le séjour en maternité, le médecin de famille a souvent le sentimentdésagréable et frustrant que l’enfant et sa mère lui échappent, puisqu’ils sontgénéralement pris en charge par un confrère attaché à la maternité. Qu’il nes’en formalise pas. Cette médicalisation de plus en plus poussée de la périodenéonatale, cette discipline nouvelle qu’est la néonatalogie ont leur raisond’être, tant cette période est semée de problèmes et d’embûches : c’est ainsique peuvent être dépistés et traités très tôt certains handicaps (comme lescardiopathies congénitales à révélation néonatale, la luxation de la hanche, lesanomalies desmembres, les uropathiesmalformatives (souvent déjà dépistées

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en période anténatale par l’échographie) ; c’est ainsi que peuvent être prises encharge certaines détresses vitales (respiratoires, hypoglycémiques) autrefoispourvoyeuses de tant de handicaps majeurs et définitifs. Pendant ce temps,l’enfant est très surveillé, la mère très entourée.Mais dès le retour à la maison, le rôle du médecin de famille redevient essentiel

(d’autant que ce retour est de plus en plus précoce). C’est la période desdifficultés, des angoisses : c’est le moment où la mère a besoin d’avoir aveccelui qui, désormais, va suivre son enfant une longue conversation où sontabordés de multiples problèmes qu’elle se pose. . . ou qu’elle ne soupçonnepas. C’est à ce stade que son rôle éducatif commence.

Le premier âgeLe premier âge, c’est-à-dire environ les 2 premières années de la vie, constitueune étape importante qui n’échappe pas au médecin, maintenant trèsfamiliarisé avec les examens réguliers obligatoires des 2 premières années.Les certificats de santé du 9e et du 24e mois constituent d’ailleurs des pointsde repère utiles pour cette surveillance. C’est la période de surveillance nutri-tionnelle et du développement psychomoteur, celle aussi du dépistage decertains handicaps.

Périmètre crânienLa mesure du périmètre crânien (PC) doit être particulièrement surveillée etmesurée à chaque visite. Le PC est en moyenne de 35 cm à la naissance. Sacroissance est ensuite très rapide, puis qu’il augmente de 15 cm en 2–3 ans(47–50 cm), puis plus lente (+5–6 cm) jusqu’à 18 ans, pour atteindre enmoyenne 55 cm chez les femmes et 57 cm chez les hommes adultes. Lasurveillance de sa croissance doit inquiéter devant :

n une accélération trop rapide (macrocéphalie) qui évoque le développementd’un processus expansif intracrânien, une hydrocéphalie, toute hyperten-sion intracrânienne ;

n

un développement trop lent (microcéphalie) qui évoque une insuffisancedu développement cérébral dont les causes sont variées : génétiques, syn-dromiques et chromosomiques, congénitales infectieuses ou toxiquesnéonatales, etc.Attention ! C’est la vitesse de croissance qui compte, car il existe d’authen-

tiques macro- ou microcrânies, souvent familiales, où la mesure du PC estinférieure ou supérieure aux normes familialesmais évolue régulièrement dansle même couloir de croissance.

État nutritionnel, équilibre du régime alimentaireIls posent, bien entendu, beaucoup moins de problèmes dans un payscomme le nôtre que dans bon nombre de pays du tiers-monde où la malnu-trition est une dominante de la pathologie du premier âge. Néanmoins,l’établissement du régime, les explications indispensables que cettediététique bien comprise implique sont des éléments importants pendantles premiers mois.

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Développement psychomoteurIl intéresse tout particulièrement – et à juste titre – les parents. À chaqueexamen, les nouvelles acquisitions doivent être notées et, avec quelquespoints de repère simples (exposés au chapitre 3), il est aisé bien avant l’âgede 2 ans de savoir si l’enfant est normal ou non dans ce domaine.

Dépistage d’un handicapLesmalpositions des pieds ont en général été dépistées et prises en charge dèsla naissance, les hanches luxables parfois aussi, mais pas toujours : il faut savoirles reconnaître entre 3 et 4 mois par une radiographie systématique du bassinde face, ou une échographie de hanche (entre 6 et 8 semaines), mais quinécessite un opérateur très entraîné.De nombreuses cardiopathies congénitales n’ont aucune expression néo-

natale et sont reconnues au cours des premiers mois.Les handicaps moteurs, et notamment les hémiplégies, passent inaperçus

dans les tout premiers mois ; les handicaps sensoriels notables (surdité, amblyo-pie, strabisme) doivent être montrés au spécialiste sitôt reconnus ou mêmesimplement suspectés, en tout cas avant l’âge de 1 an.

Entre 2 et 6 ansÀ cet âge préscolaire, parmi les problèmes importants à régler, il faut insistersur :

n les problèmes orthopédiques de la petite enfance qui, pour beaucoup d’entreeux, sont davantage des inquiétudes familiales que de réels problèmes ;

n

l’étude du développement du langage, dont le retard risque de constituer unhandicap majeur lors de la scolarisation en cours préparatoire, et qui peutsouvent être comblé avant cette date ;

n

l’ectopie testiculaire chez le garçon (qui doit être réglée avant 6–7 ans, entout cas bien avant le début de la puberté) ;

n

certains déficits sensoriels qui n’auraient pas été dépistés jusque-là (troublesde la réfraction, hypoacousie) ;

n

l’étude du comportement, l’adaptation à l’école maternelle, la vie socialefamiliale et extrafamiliale ; beaucoup de petits troubles du comportementpeuvent être résolus à cette période, et ne viendront pas grever plus tard laréussite scolaire ;

n

le dépistage de l’hypertension artérielle, qui ne doit pas être oublié ; n la prévention des accidents domestiques, l’information sur la sécurité à cetâge particulièrement exposé.

À partir de 6 ans, un des éléments essentielsde la surveillance doit porter sur le développementharmonieux de la scolarité et de la vie socialeSimultanément, l’organisation de la vie de l’enfant, sa scolarité, son inté-gration sociale, ses capacités de communication, ses loisirs, ses besoins de

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sport et de dépenses physiques, son sommeil doivent être pris en consi-dération. D’autres phénomènes sont également à surveiller : à titre d’exem-ple, la période de croissance rapide qui précède la puberté est celle où sedémasquent les redoutables scolioses essentielles.

La puberté et l’adolescence constituent une étapedifficile pour l’enfant et ses parentsLa surveillance de l’enfant ne s’arrête pas à 14 ou 15 ans : l’importance decette période justifie un chapitre à part (voir le chapitre 2).

Carnet de santéC’est un document irremplaçable que nous envient nombre de pays (bienqu’il soit toujours perfectible). Il remplit quatre fonctions essentielles :

n de surveillance, de suivi régulier de l’enfant : poids, taille, périmètre crânien,courbes de croissance et d’IMC, examens conseillés ou obligatoires, vacci-nations, incidents, maladies émaillant la vie de l’enfant, hospitalisations,interventions chirurgicales, maladies chroniques, etc. ;

n

de dépistage, de repérage des troubles sensoriels (audition, vision) mais aussides anomalies du développement psychomoteur, des troubles du langage,du comportement de la personnalité, etc., ainsi que des troubles de lacroissance, de la puberté, des difficultés scolaires ;

n

d’information, d’éducation, par les multiples petits conseils qui y figurentselon l’âge ;

n

de communication entre les différents médecins ou spécialistes impliquésdans le développement de l’enfant.Il devrait être systématiquement demandé, consulté et rempli par le méde-

cin, quel que soit le motif de la consultation, sans pour autant le surcharger.Il reste cependant la propriété de l’enfant dont les parents sont théorique-

ment, pour l’instant, les seuls habilités à décider de son usage afin d’en res-pecter la confidentialité.

Médecin et information sanitaire des parentsTout au long de cette surveillance régulière, le médecin ne doit pas oublierqu’il est et doit être de plus en plus un éducateur en santé publique.Au cours de ses consultations régulières, de ses entretiens avec une mère

détendue, disponible, assurée que son enfant est normal et en bonne santé, ilfaut que soient abordés les problèmes d’avenir. Les parents doivent ainsiconnaître la conduite à tenir devant un problème aussi banal que la fièvreou la diarrhée. Il faut leur décrire les situations qui ne manqueront pas de seproduire, leur préciser les gestes simples qu’ils devront faire avant la venue dumédecin (parfois après un conseil téléphonique), leur indiquer de quels médi-caments ils doivent disposer dans la pharmacie familiale, la manière de lesutiliser, leur danger. Il faut aussi leur dire que le plus grand danger qui guetteleur enfant n’est pas la maladie, mais l’accident. Il faut leur apprendre à éviter

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les plus évitables d’entre eux. Il faut enfin ne pas hésiter à leur révéler tel ou telde leurs comportements qui semble préjudiciable à l’équilibre psychologiquede l’enfant ; à conseiller tel séjour au loin qui détendra l’atmosphère ; bref, ilfaut leur dire tout ce que l’on estime utile au plein épanouissement. Dans cerôle d’éducation, le médecin outrepasse-t-il ses droits ? Assurément non.N’est-il pas le seul individu dans la société qui ait le privilège d’aller au domicilesans y être considéré comme un inquisiteur, de recevoir les confidences,d’orienter, alors qu’il a été librement choisi ?De toute évidence, la consultation est parfois motivée par un symptôme

précis, réel ou simplement ressenti. Dans ce cas, le premier rôle dumédecin estd’essayer de régler ce problème ponctuel. Mais chaque consultation est etdoit toujours être l’occasion de voir cet enfant dans sa globalité. C’est au coursde chaque consultation (quelles qu’en soient les raisons) que l’enfant doit êtreapprécié dans son devenir, que le médecin doit se préoccuper de sondéveloppement, dumilieu social et culturel dans lequel il s’insère, des relationsavec les autres membres de la famille, de sa scolarité et, plus tard, de sonorientation professionnelle en fonction de ses aptitudes physiques, intellec-tuelles, psychologiques.Il s’agit d’une médecine patiente, d’une médecine où la relation est trian-

gulaire (l’enfant, la famille, les parents), d’une médecine lente. C’est à ce prixqu’elle est de qualité.

Qu’est-ce que la pédiatrie ?� La pédiatrie est médecine de développement, développement physique,

intellectuel, affectif.� Le but de la pédiatrie est de soigner des enfants mais surtout de contribuer

à en faire des adultes sains, bien dans leur peau et insérés le mieux possibledans la vie.

� Chaque consultation doit toujours être l’occasion de voir l’enfant dans satotalité : celui-ci doit toujours être envisagé dans son devenir.

� Le médecin dans la consultation d’enfant est aussi un éducateur en santépublique.

Pour en savoir plus

Bourrillon A. Pédiatrie pour le praticien. 6e éd. Paris: Elsevier-Masson; 2011.Collectif. Dépistage et diagnostics précoces chez l’enfant de la naissance à 3 ans.Médecine et

enfance 2005;25. Hors-série, septembre.