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Humain et Organisation Volume 3 N o 1 | Mai 2017 © Société québécoise de psychologie du travail et des organisations 69, rue Rochefort, Repentigny (Québec) J5Y 3C1 Humain et organisation Volume 3 Numéro 1 | Mai 2017 ISSN 23691522 La vertu au sein des organisations : une synthèse de la littérature et avenues d’intervention Karel Belleville, Philippe Dubreuil, François Courcy pp. 18 Une analyse des profils motivationnels afin de mieux comprendre l’effet des contraintes et ressources professionnelles en emploi. Lara Manganelli, Nicolas Gillet, Vincent Laurent, Jacques Forest pp. 920 La justice organisationnelle et l’épuisement professionnel : une nouvelle mesure selon les opportunités en milieu de travail Emmanuelle Brien‐Robidoux, Camille Labrèche, David‐Emmanuel Hatier, Anne‐Marie Paiement, Mickael Blais pp. 2128

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©Sociétéquébécoisedepsychologiedutravailetdesorganisations69,rueRochefort,Repentigny(Québec)J5Y3C1 

  

HumainetorganisationVolume3‐Numéro1|Mai2017ISSN2369‐1522La vertu au sein des organisations : une synthèse de la littérature etavenuesd’interventionKarelBelleville,PhilippeDubreuil,FrançoisCourcypp.1‐8Uneanalysedesprofilsmotivationnelsafindemieuxcomprendrel’effetdescontraintesetressourcesprofessionnellesenemploi.LaraManganelli,NicolasGillet,VincentLaurent,JacquesForestpp.9‐20Lajusticeorganisationnelleetl’épuisementprofessionnel:unenouvellemesureselonlesopportunitésenmilieudetravailEmmanuelle Brien‐Robidoux, Camille Labrèche, David‐Emmanuel Hatier,Anne‐MariePaiement,MickaelBlaispp.21‐28

   

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Comité de rédaction

Pascale L. Denis

Université du Québec à Montréal (ESG-UQÀM) Rédactrice en chef

Charles Baron Université Laval

Christophe Paris Société de Transport de Montréal (STM)

Roland Foucher

Université du Québec en Outaouais (UQO)

Normand Pettersen Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)

Sarah Girouard

Alia Conseil

Alina N. Stamate Université du Québec à Montréal (ESG-UQÀM)

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Lavertuauseindesorganisations:unesynthèsedelalittératureetavenuesd’intervention KarelBelleville1,PhilippeDubreuil2,FrançoisCourcy1

1UniversitédeSherbrooke. [email protected]éduQuébecàTrois‐RivièresMalgréleseffortsinvestispourcomprendrelesfacteurspouvantnuireàlaperformancedesorganisations,tels lescomportementsde fraudeoudeviolence, lessymptômesdestressoudedépression, ilsembleraitquecelles‐cisoientencorefragilesetlesnombreuxscandalesquiéclatentàtraverslemondeentierenfontpreuve.Selon lecourantdupositiveorganizationalscholarship, ledéveloppementde lavertuauseindesorganisationspourraits’avérerunealternativenovatricepouraiderlesorganisationsàatteindreunniveaudefonctionnementsupérieur.Leprésentarticleproposeunerecensiondelalittératurecontemporainedelavertuauseindesorganisations,enabordantsesconceptions,formesetprincipauxrésultats.Lesprincipalesretombéespositivesetapplicationspratiques sontdeplusdiscutéesenvuede stimuler l’intérêtpour cenouveauchampderecherche.

Motsclés:vertu,organisation,performance,effetd’amplification,effetdeprotection. Introduction

artout dans le monde, de nombreux scandalesmorauxetfinancierséclatentauseind’entreprises

variées. L’entreprise Enron aux États‐Unis, la firmed’ingénierie québécoise SNC‐Lavalin, la compagniepétrolière et gazière internationale Total, leconglomérat industrielallemand Siemens… et cettecourte liste s’allonge au fil des ans (Carson, 2003;Culpan et Trussel, 2005; De Vergès, 2007; Larouche,2015; Rabreau, 2010). Suite aux conséquencesengendrées par ces scandales, le monde des affairesredécouvre l'importance de la vertu au sein desorganisations comme déterminant possible del’amélioration individuelle et de la performanceorganisationnelle(WrightetGoodstein,2007;BrightetFry, 2013). L’objectif du présent article est dedémystifier le concept de vertu appliqué auxorganisations et d’offrir une première synthèsefrancophone sur le sujet. Il vise principalement àdécrire cette nouvelle orientation afin de stimulerl’intérêt des chercheurs et des praticiens. Les étudesrépertoriéesproviennentdudomainede lagestionetde la psychologie. Initialement, soixante articles ontétérecensésetévaluésparlachercheureprincipale,encollaboration avec les co‐auteurs. Seuls les articless’intéressant à la vertu appliquée au monde desaffaires et du travail, publiés entre 1990 et 2016,s’inscrivantdanslePositiveOrganizationalScholarship(POS) et évoquant l’idée que la vertu s’applique au

plan organisationnel, ont été retenus. Les articless’inscrivant davantage dans le domaine de laphilosophieounetraitantpasdirectementdelavertuau niveau organisationnel ont volontairement étéretirés car, bienque ceux‐ci constituentdes élémentsd’intérêt, il ne s’agit pas de l’objet du présent article.Celui‐cis’inscritdavantagedanslechampdisciplinairede la psychologie organisationnelle que dans uneapproche philosophique. Au total, 31 articlesthéoriques et 10 articles empiriques ont étésélectionnés et sont identifiés par un astérisquedansles références. Le concept de vertu appliqué auxorganisations sera d’abord brièvement présenté,ensuitelesprincipalesretombéesdocumentéesserontdécrites et, enfin, les principaux leviers pourdévelopper la vertu au sein des organisations serontexposés).

Vertusetorganisations

Traditionnellement, la vertu est décrite dansl’AntiquitéparAristotecommeunattributquiconduità l’eudémonisme, un état florissant dépassant lebonheur normal et l’excellence (Cameron et Caza,2002;Solomon,2004).Seloncetteécoledepensée,lesvertussontdes traits fondamentauxquipermettentàl’individudefonctionneroud’excellerdansunesociétédonnée et dont les êtres humains ont le potentiel dedévelopper(Caza,Barker,etCameron,2004;Solomon,1993).Àlalumièredecettethéorie,plusieursauteursprovenantautantdudomainede lapsychologieetde

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laphilosophieontcommencéàs’intéresserauconceptde vertu appliqué aux niveaux individuel etorganisationnel (Weaver, 2006). Bien que lesfondements de la vertu proviennent davantage dudomainedelaphilosophie, lesconclusionsprésentéesdans le présent article visent une approche plusempirique et sont principalement tirées du POS, uncourant issu de la psychologie positive s’intéressantspécifiquement à l’étude des processus et conditionsfavorisant le fonctionnement optimal des individusdans les organisations (Cameron, Dutton, & Quinn,2003;CameronetSpreitzer,2012).

Vertu organisationnelle

L’idée que la vertu puisse s’appliquer au niveauorganisationnelestrelativementnouvelleetplusieursdébats sont actuellement en cours au sujet de sesfondements (Chun, 2016). Velasquez (2003) défendl’idéequel’organisationneconstituepasunepersonnemorale distincte et que ses décisions et ses actionsappartiennentàsesmembres.Poursapart,Whetstone(2005) considère que, même si une organisation nereprésente pas une personne morale en soi, soncaractèrevertueuxpeuttoutdemêmeexistercomptetenu de l’interdépendance entre les individus et lessociétés.Ainsi,lesvertusreprésenteraientàlafoisdesattributs individuels et des critères d’excellencemorale exigés par une organisation sociale donnée(Weaver,2006).Bright,WinnetKanov(2014)sesontégalement demandé si la vertu subsistait au‐delà del’individu.Àceteffet,ilsontémistroishypothèses.Lapremière, l’hypothèse de contenant, stipule que lavertu au sein des organisations est la somme de lavertu des membres qui la composent. L'organisationjouesimplementunrôlede«contenant»desvertusdesesmembres. Ensuite, l’hypothèse synergique énonceque la vertu au sein des organisations résulte de ladynamiqueentrelavertucollectiveet individuelle.Lecollectifauneffetmultipliant,amplifiantetsynergiquedesortequelavertuglobaledel’organisationestplusgrande que la somme de la vertu de ses membres.Autrement dit, l’organisation elle‐même n’est pasvertueuse en soi. Cependant, tel un écosystème, elleinfluence la présence, le degré et l’impact de la vertuchezsesmembres.Finalement,latroisièmehypothèsestipule que l’organisation possède des vertusintrinsèquesquiluisontpropresetquis’étendentau‐delàdesesmembres.Seloncettehypothèse,ilpourraityavoirdesvertus,appeléesvertusorganisationnelles,qui diffèrent du niveau individuel et qui s’appliquentuniquement au niveau organisationnel (Bright et al.,2014). Bien que des études subséquentes soient

nécessairespourpermettredevaliderceshypothèses,les chercheurs du POS appuient l’approchecollectiviste selon laquelle les organisations ont desvertusquileursontpropres(Cameron,2003;GotsisetGrimani, 2015; Gowri, 2007; Moore, 2015; Park etPeterson,2003;WrightetGoodstein,2007).

Organisationvertueuseetvertusorganisationnelles

La vertu au sein des organisations peut êtrereprésentée à deux niveaux: la vertu dans lesorganisations, qui concerne le comportementtranscendant des individus, et la vertu par lesorganisations, qui concerne les mesures et lesprocessus organisationnels favorisant la vertu(Cameron et Winn, 2012). La vertu dans lesorganisations se concrétise par la vertu diteorganisationnelle (organizational virtuouness) quireprésenteunecapacité,unattributouuneressourceorganisationnelle conduisant à l’émergence decomportements positifs chez ses membres (Cameronet Caza, 2002). Au même titre que les vertusindividuelles, les vertus organisationnelles sont, enquelquesorte,destraitsdecaractèredel’organisationqui satisfont à la fois les parties prenantes internes,tels les employés et les actionnaires, qu’externes, telsles clients et les partenaires d’affaires (Chun, 2016;Moore, 2005). Plusieurs chercheurs ont proposédifférentes catégories de vertus organisationnellesdontcertainsexemplessontprésentésdansleTableau1.Bright,CameronetCaza(2006)ajoutentqu’ilexistedeuxtypesdevertusdanslesorganisations,soientlesvertustoniquesouphasiques.Lesvertustoniquessontgénéraliséesetutilisées,peuimportelecontexte.Ellespeuvent exister à tout moment et font partie de laculture de l’organisation. L’humilité, la justice, lagentillesse,l’espoiretl’intégritéensontdesexemples.Elles influencent les valeurs et font émerger descomportements spécifiques et attendus selon lesnormes de l’organisation (Schein, 1992). Les vertusphasiques, quant à elles, se manifestent par descomportementsvertueuxquiseproduisentenréponseà des évènements particuliers. Elles dépendent ducontexte. Parexemple, la tragédiedu11 septembreadonnénaissanceàdiversesformesdevertustellesquele courage et la compassion (Bright et al., 2006). Auniveau organisationnel, la réduction d’effectifs est unexemple de situation particulière dans laquelle lesvertusphasiquespeuventêtredéclenchées(Cameron,1998).

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Tableau1Typologiesdesvertusorganisationnellesselonlesauteurs

La vertu par les organisations peut être caractériséepar le caractère vertueux attribué à l’organisation.Ainsi, une organisation est dite vertueuse lorsqu’elleengendre,permetetsoutientlesactionsdesindividus,les activités collectives, les attributs culturels ou lesprocédésquipermettentladiffusionetlaperpétuationde vertus (Cameron, Bright et Caza, 2004). Troisattributscléspermettentdecaractériserl’organisationvertueuse (Cameron, 2003). En premier lieu,l’organisation vertueuse a un impact sur l’humain,c’est‐à‐dire qu’elle est concernée par les champsd’intérêts collectifs et sociétaux en concordance avecses propres champs d’intérêts (Bright, 2006). Ainsi,uneorganisationnepeutêtreconsidéréevertueusesiellenevisepasàcréerunimpactpositifsursespartiesprenantesinternesetexternes(Brightetal.,2014).Parexemple, une organisation privilégiant une structuredans laquelle des équipes de travail ont laresponsabilitédeprendre certainesdécisions clés, oufontpartiedelagouvernancedel’entreprise,pourraitfavoriser des relations interpersonnelles florissantes,susciterlesensautravailetaméliorerl’apprentissageetledéveloppementdesesmembres(Cameron,2003;BernacchioetCouch,2015).

Ensuite, une organisation vertueuse vise la bontémorale, c’est‐à‐dire que les actions posées sontmotivées par de bonnes intentions, pour le proprebien, et nondans le but d’atteindredes avantagesoudes récompenses. Les bonnes actions sont posées defaçonintrinsèqueetsontbaséessurlaperspectivequele choixàprendresoit« labonnechoseà faire».Parexemple,uneorganisationseraitconsidéréevertueusesi elle se montrait honnête vis‐à‐vis ses partiesprenantesquantàsesétatsfinancierstoutsimplementparce qu’il s’agissait de la bonne chose à faire.Finalement, une organisation vertueuse vise

l’amélioration sociale, c’est‐à‐dire qu’elle vise à créerdes bénéfices qui vont au‐delà de ses champsd’intérêts personnels. Les décisions seraient prisessans tenir compte de réciprocité ou de récompense(Cameron, 2003). Par exemple, une organisationpourrait choisir d’entreprendre un virageécoresponsable par souci de conserver unenvironnement sain pour les générations futures.Ainsi, une organisation peut être qualifiée devertueuse dans la mesure où elle a un but lié àl’épanouissementdeshumainsetqu’elleatteintcebutpar l’entreprise d’actions bonnes et justes et par despratiquesdegestionquisontintrinsèquementbonnes(Collier,1995).

Retombéespositivesdesvertus

SelonFerreroetSison,(2014),seulement15%delalittérature actuelle portant sur la vertu au niveauorganisationnel serait de nature empirique.Néanmoins,certainesétudespermettentdedémontrerles effets positifs des vertus organisationnelles pourles travailleurs et les entreprises (Bright et al., 2006;Cameron et al., 2004; Cameron, Mora, Leutscher, etCalarco, 2011; Chun, 2016 McLeod, Moore, Payne,Sexton, et Evert, 2016; Nikandrou et Tsachouridi,2015; Rego, Ribeiro, et Cunha, 2010; Rego, Ribeiro,Cunha,etJesuino,2011).

Cameronetal.(2004)sontlespremiersàavoirtentéde mesurer les retombées des vertus pour lesorganisations. À la lumière des vertus répertoriéesdans la littérature, ils ont proposé une échellecomprenant 15 items et mesurant 5 types de vertusorganisationnelles, soient l’optimisme (α = .84), laconfiance(α=.83), lacompassion(α= .87), l’intégrité(α=.90)etlepardon(α=.90).Cetteéchellepermetdemesurer la perception que les travailleurs ont duniveau de présence de ces vertus au sein de leurorganisation. Ils ont par la suite interrogé destravailleurs provenant de différents champsd’activités, c’est‐à‐dire le commerce de détail, laconsultation, le secteur manufacturier, le secteur del’énergie, le transport, la santé et les services sociaux(n=804) et réalisé des analyses de régression avecplusieursindicateursdeperformance,telsl’innovation,lasatisfactiondelaclientèle,laqualitéetlarotationdela main‐d’œuvre. Leurs résultats démontrent qu’unegrandepartiedes vertusorganisationnellesmesuréessont positivement et significativement reliées auxdifférents indicateursdeperformance(ex:optimismeetinnovation:β=.46,p˂0,001;intégritéetqualité:β= .20, p ˂ 0,05; con iance et satisfaction de la

Auteurs Vertus

ParketPeterson(2003)

Mission morale, sécurité, justice,humanité,dignité

Cameron,Bright,etCaza(2004)

Optimisme, confiance, compassion,intégrité,pardon

Chun(2005) Ouverture, empathie, intégrité, courage,zèle,fiabilité

Moore(2005) Tempérance, courage, justice, prudence‐sagesse,intégrité,constance

Bright,Cameron,etCaza(2006)

Espoir, humilité, intégrité, compassion,réalisation vertueuse, pardon,responsabilité

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clientèle:β=.29, p ˂ 0,001). Des resultats similairesontégalementétéobtenusparCameronetal. (2011),oùlespratiquespositivesetvertueuses(p.ex.,prendresoin des autres, faire preuve de compassion, derespect, d’intégrité et de gratitude) sont associées àune amélioration de plusieurs indicateurs del’efficacité organisationnelle, tels la satisfaction desparties prenantes, un climat de travail positif et uneadéquation des ressources. Pour expliquer cesrésultats, Cameron et ses collaborateurs (2004)proposentl’implicationdedeuxeffetsdelavertu,soitl’effetdeprotectionetl’effetd’amplification.L’effetdeprotection limite les conséquencesnégativespour lesorganisationsenfavorisantlarésilience,lasolidaritéetle sentiment d’efficacité collective (Dutton, Frots,Worline,Lilius,etKanov,2002;MastenetReed,2002;Weick,Sutcliffe,etObstfeld,1999).Poursapart,l’effetd’amplification favorise l’émergence d’une spiralepositiveenfavorisantlesémotionspositives,lecapitalsocial et les comportements pro‐sociaux (Bolino,Turnley, et Bloodgood, 2002; Fineman, 1996;Fredrickson, 1998, 2001, 2003;McNeeley etMeglino,1994).

À ce titre, Bright et ses collaborateurs (2006) ontnotammentdémontré l’effetdeprotectionde lavertudansuneétuderegroupant820participantsprovenantde diverses organisations ayant vécu des réductionsd’effectifs dans les cinq années précédentes. Lesdonnéesontétérecueilliesentre2001et2006,soitsurune période de cinq ans. Ces chercheurs ont émisl’hypothèse que les organisations considéréesdavantage vertueuses seraient plus aptes àmaintenirleur fonctionnementmalgré les revers associés à uneréductiond’effectifs.Leursrésultats indiquentque lesvertusorganisationnellessontnégativementassociéesaux impactsnégatifsd’une réductiond’effectifs, c’est‐à‐dire à la diminution de la loyauté des employés, ladiminution du travail d’équipe, le départ d’employésclés,l’augmentationdeconflits,ladiminutiondubien‐être, la formation de clans, la diminution de lacréativité et de l’innovation, la résistance auchangement et la diminution de la communication etde l’échange d’information. D’autres études laissentsupposer de façon similaire l’existence de l’effet deprotectiondelavertu(Gittell,Cameron,Lim,etRivas,2006;NikandrouetTsachouridi,2015).

Figure1Propositiondemodèlerésumantlesprincipauxeffetsetretombéesdesvertusorganisationnelles.

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Les résultats de l’étude de Bright et al. (2006)soutiennent également l’effet d’amplification de lavertu. Dans leur étude, la vertu de responsabilitéamenait la vertu de pardon et ces deux vertusphasiques entraînaient plusieurs autres vertustoniques (espoir, humilité, intégrité, compassion etréalisation vertueuse). Ces résultats indiquent quel’émergence d’une vertu en entraîne une autre,présageant ainsi une sorte de cercle vertueux. LathéoriebroadenandbuilddeFredrickson(2001,2003)offre une piste intéressante pour expliquer cephénomène. Cette théorie suggère que lescomportements vertueux engendrent des émotionspositiveschezlesindividus,cequiélèveleursentimentde bien‐être et les amène à reproduire ce genre decomportements. L'observation et l'expérience de lavertuaideraientainsiàdéverrouillerlaprédispositionhumaine à se comporter de manière profitable auxautres(Brightetal.,2006).Parexemple,untravailleurqui observe un collègue faire preuve d’altruisme,d’aideoudegentillesseenversunautrecollèguepeutressentir une plus grande fierté envers l’organisationetuneplusgrandesatisfactionautravail.Àsontour,ilsera plus enclin à faire preuve d’entraide et debienveillance envers ses collègues. De plus, ilsemblerait qu’observer des comportements vertueuxcréeunsentimentd’attachementetd’attractionenversl’individu qui pose l’action et inspire les autresmembres de l’organisation à agir de même (Haidt,2000).Danslesorganisations,ceteffetd’amplificationse propage et s’élargit pourdevenir partie intégrantedelacultureorganisationnelle(Cameronetal.,2011).En somme, la Figure 1 résume les principalesretombées de la vertu organisationnelle à travers leseffetsdeprotectionetd’amplification.

Leviersorganisationnelsdesvertus

Les retombées positives de la vertu ont étéprésentées, mais il demeure que plusieurs questionssubsistent quant aux moyens permettant de ladévelopper. À ce titre, quatre principaux leviers sontidentifiés, soit lamission, la structure, la culture et leleadership. D’abord, la raison d’être de l’organisationinfluence fortement le développement de la vertu(Whetstone, 2005). Certaines organisations sont plusaptes à intégrer la vertu compte tenu de la relationétroite entre leur mission et ses retombées(Bernacchio et Couch, 2015). Par exemple, lamissiondu secteur de la santé est moralement valorisée. À

l’opposé, certaines entreprises du secteurmanufacturier ont besoin d’un effort supplémentairepour favoriser le développement de la vertu(Bernacchio et Couch, 2015). Ces organisations ontbesoin de faire preuve d’innovation afin de setransformeretdedonnerdu sensà leurs travailleursqui réalisent des tâches moins valorisées ou plusroutinières.

Lastructureorganisationnelleinfluenceégalementledéveloppement de la vertu (Vriens, Achterbergh, etGulpers,2016).Àceteffet,MacIntyre(2007)considèreque les silos et la compartimentation dans lesstructuressontdesobstaclesaudéveloppementde lavertu dans les organisations. Pour limiter cesobstacles, Bernacchio et Couch (2015) proposentd’impliquerlesemployésdanslagouvernanceetdansles mécanismes de consultation des entreprises. Ilssuggèrent que la délibération du collectif sur le biencommun favorise le développement de la vertu.Puisqu’elles ont d’autres préoccupations que lamaximisation des profits pour les actionnaires, lesparties prenantes internes sont plus susceptibles deprendre des décisions organisationnelles vertueuses.Ainsi,unestructurequiéquilibrelespouvoirsentrelesdépartements, distribue les pouvoirs décisionnels etles critères de décisions, et priorise le dialogue et lequestionnementcritique,favorisedavantagel’essordelavertu(BeadleetMoore,2006;Vriensetal.,2016).

Ensuite, la culture organisationnelle est un vecteuressentiel aux vertus (Whetstone, 2005). Lorsque lesvertusorganisationnellessontvéhiculéesetpartagéesàtraverslesanecdotes,lescroyances,lesnormesetlesvaleurs organisationnelles, elles deviennent partiesintégrantes de la culture. Alors que les valeurs et lesnormes organisationnelles permettent de créer desbalises comportementales, les vertus sont incarnéesdans la pratique et démontrées lors de situationsparticulières(Ciulla,2004;WangetHackett,2016).Aumême titre que les normes et les valeurs, il estpréférableque lesvertus soient adaptéesau contextedel’organisation(Whetstone,2005).

Enfin,lesleadersinfluencentfortementlaculturedel’organisation et les comportements des travailleurs(Whetstone, 2005). Plusieurs chercheurs se sontintéressésplusspécifiquementauleadershipvertueux(Caldwell, Hasan, et Smith, 2015; Cameron, 2006;2011).Celui‐ciestdéfinicomme«unerelationentreleleader et les membres de son équipe dans laquellel’expressionappropriéedevertusdelapartduleader

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entraîne,chezsesmembres,laperceptiondevertusetle désir d’émulation [traduction libre] » (Wang etHackett, 2016, p. 326). Dans leur étude, Wang etHackett (2016) ont démontré que le leadershipvertueux est positivement relié au bonheur, à lasatisfactiondevieetàlaperformancedestravailleurset du leader. Il semble donc être profitable pour lesorganisations d’aider les gestionnaires, les cadres etlesdirigeantsàdéveloppercetypedeleadership.Àceteffet, Morales‐Sánchez et Cabello‐Medina (2015)suggèrent d’intégrer les vertus à l’approche parcompétence en créant des profils dans lesquels sontincluses des compétences morales inspirées desvertus. Ces compétences peuvent ainsi devenir descibles de développement pour les gestionnaires demême que des critères de sélection pour les futuresrecrues. En développant les vertus au niveauindividuel, celles‐ci feront inévitablementpartiede laculture organisationnelle (Morales‐Sánchez, etCabello‐Medina, 2015). D’ailleurs, Beadle et Moore(2006) soulignent que la présence d’agents vertueuxau sein de l’organisation fait partie des conditionsessentielles à la création et au maintiend’organisations vertueuses. Par ailleurs, puisque lescompétences sont mesurées et évaluées par descomportements observables, l’approche parcompétence peut être un moyen permettant deconcrétiserunenotionplusconceptuelle.

Conclusion

Leprésentarticleapermisdedémystifierleconceptde vertu au sein des organisations, de présenter sesretombées positives de même que les levierspermettant de la développer. La vertu constitue uneavenue présentant un important potentiel pour lesorganisations. Plusieurs précisions sémantiques etconceptuelless’avèrenttoutefoisencorenécessaires.Àcet effet, plusieurs chercheurs suggèrent d’intégrer laperspectivephilosophiquede la vertu auPOS (Brightetal.,2014;Moore,2015;Sekerka,Comer,etGodwin,2014). Ces auteurs nomment ce nouveau courant lepositiveorganizationalethics.Qu’ilsoittirédudomainede la philosophie ou de la psychologie, le concept devertu au sein des organisations répond à un besoinémergent des organisations et de leurs gestionnaireset dirigeants. Dans un contexte économique encorefragile, où la résilience et l’innovation s’avèrent deséléments‐clés, la vertu organisationnelle pourraitconstituer un atout indispensable permettant auxorganisationsdeconserverunavantageconcurrentiel.

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Humainetorganisation Volume3No1|Mai2017 

©Sociétéquébécoisedepsychologiedutravailetdesorganisations69,rueRochefort,Repentigny(Québec)J5Y3C1 

Uneanalysedesprofilsmotivationnelsafindemieuxcomprendrel’effetdescontraintesetressourcesprofessionnellesenemploi. LaraManganelli1,NicolasGillet2,VincentLaurent3,JacquesForest41UniversitéduQuébecàMontréal(UQAM)2UniversitéFrançoisRabelaisdeTours3Simulusconseil(MontréaletParis)4Écoledescienceetgestion(ESG)|UniversitéduQuébecàMontréal(UQAM)[email protected] recherche basée sur la théorie de l'autodétermination met de l’avant l’importance de la présencesimultanéedequatre typesdemotivation(intrinsèque, identifiée, introjectée,etextrinsèque)auseindesindividus.Laprésenteétudeapourobjectifdedécouvrircommentlescontraintes(p.ex.,chargedetravail)etlesressources(p.ex.,soutiendusuperviseur)autravailsontliéesàdifférentsprofilsmotivationnels.Undeuxièmebutdel’étudeestd’identifierlesconséquencesdesdifférentsprofilsmotivationnelspourlebien‐êtredesemployés(stress).Desanalysesdeprofillatentréaliséessurunvasteéchantillondegestionnairesetd’employés(n=1914)ontrévéléslaprésencedequatreprofilsmotivationnels.Enoutre,desanalysesderégression logistiquesontdémontréque leprofilmotivationnelélevé(niveauélevédesquatre formesdemotivation) estplus fortement associé aux ressources, tandisque lesprofils très faible et faible (niveaufaibledesquatre typesdemotivation)sontplus fortementassociésà laprésencedeconditionsde travailconsidéréescommedescontraintes.Finalement, leprofilélevédémontreuneassociationnégativeavec leniveau de stress. Les résultats amènent des recommandations pratiques quant aux manières les plusefficacesdefavoriserunemotivationélevéechezlesemployés.

Motsclés:Motivation,Théoriedel’autodétermination,Contraintes,Ressources,Bien‐êtreautravail. Introduction

elon la théorie de l'autodétermination (TAD), lesemployés éprouvent différents types de

motivation à divers degrés d’intensité envers leurtravail (Deci et Ryan, 2000). Bien que la recherchedémontre que la motivation est un déterminantrobuste de la performance (Baard, Deci, et Ryan,2004) et du bien‐être au travail (Deci, Ryan, Gagné,Leone, Usunov et Kornazheva, 2001; Vansteenskiste,Neyrinck, Niemic, Soenens, De Witte et Van denBroeck, 2007), la plupart de ces études considèreuniquement leseffetsdifférentielsdechaquetypedemotivationsurdiversesvariablesdépendantes (VandenBroeck,Lens,DeWitte,etVanCollie,2013).Étantdonnéquelesdifférentstypesdemotivationpeuventêtre présents à divers degrés d’intensité chez unindividu,plusieursauteurscommencentàinsistersurl'importanced’uneapprochecentréesurlapersonne,qui prend en compte la présence simultanée desmultiples types demotivation au sein des individus.La présente étude s’ajoute à celles encore trop peunombreuses sur les antécédents des profilsmotivationnels en examinant comment les

contraintes et les ressources professionnelles sontliées aux profils et les conséquences quel’appartenanceà ceux‐cipeutavoirpour lebien‐êtredesemployés.

La théorie de l’autodétermination et lesmotivations

Selon la TAD, il existe quatre types demotivation:intrinsèque, identifiée, introjectée et extrinsèque(Gagné,Forest,Gilbert,Aubé,MorinetMalorni,2010;SheldonetElliot,1999).Lamotivationintrinsèquefaitréférence au fait d’accomplir une activité par plaisirouparsatisfactioninhérentetandisquelamotivationidentifiée a trait aux tâches qui sont réalisées parcequ’elles correspondent aux valeurs de l’individu(Gagné et Deci, 2005). La motivation intrinsèque etidentifiée forment ensemble lamotivationautonomecarellesreprésententdescomportementsauto‐initiéset authentiques. Lamotivation extrinsèque impliqued’agir par conformité ou en réponse à despressionsexternes (p.ex., pour obtenir des récompensesfinancières ou sociales), alors que la motivationintrojectée implique la poursuite d’activités en

S

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fonctiondepressions internes (p.ex.,pouréviterdessentiments de honte; Gagné et Deci, 2005). Lesmotivations extrinsèque et introjectée composentensemble la motivation contrôlée, car elles sontcaractérisées par un locus de causalité externe (i.e.,avoirtendanceàattribuerlesévènementssubisàdesraisonsextérieuresàsoi)etunsentimentdecontrôleexterne(DecietRyan,2000).Larechercherévèlequelamotivationautonomemènegénéralementàunplushaut niveau de bien‐être et de performance,comparée à la motivation contrôlée (Gagné, 2014;Gagné et Deci, 2005). Cependant, la majorité de cesétudes s’appuie sur une approche centrée sur lesvariables, car elles examinent les conséquences desdifférentes types de motivation de manière isolée(Graves, Cullen, Lester, Ruderman, et Gentry, 2015;Moran, Diefendorff, Kim, et Liu, 2012). Une telleapprochenepermetpasdecomprendrecommentlesdifférentes typesdemotivation interagissentau seindesindividuspourprédirelesrésultats(Moranetal.,2012; Van den Broeck et al., 2013). À cette fin, leschercheurs mettent l'accent sur l'importanced'utiliser une approche centrée sur la personne (etnon les variables), ce qui permet une identificationdes différents profils motivationnels des employés.Ces dernières années, certaines études ont réussi àidentifier différents profils motivationnels dans unevariété de domaines, tels que le sport (Gillet,Vallerand, et Rosnet, 2009), l'éducation physique(Haerens, Kirk, Cardon, Bourdeauduij, etVansteenkiste 2010) et la psychoéducation (Ratelle,Guay, Vallerand, Larose, et Senécal, 2007;Vansteenkiste, Sierens, Soenens, Luyckx, et Lens,2009).Àcejour,seulementquatreétudestraitentdesprofils motivationnels dans le contexte du travail(Graves et al., 2015; Howard, Gagné, Morin, et VandenBroeck,2016;Moranetal.,2012;VandenBroecket al., 2013). Les résultatsde ces étudesdémontrentque les employés ressentent non seulementdifférentes quantités de motivation, mais ontégalement tendance à expérimenter différents typesdemotivationsimultanément(Howardetal.,2016).

Antécédents et conséquences des profils motivationnels

Parmi les études sur les déterminants des profilsmotivationnels des employés, une étude réaliséeparMoran et al. (2012) a révélé que la satisfaction destrois besoins psychologiques, innés et universels, decompétence (i.e., se sentir efficace dans l’atteinte desesbuts),d’autonomie(i.e.,sesentirlibred’initiersesproprescomportementsetd’agirenconformitéavecses valeurs) et d’affiliation sociale (i.e., avoir des

contactssociauxenrichissants)prédit l'appartenanceàdesprofilsmotivationnelsdetypeautonome.Selonla TAD, pour qu’un employé ait un niveau élevé demotivationautonome,ildoitpercevoirquesesactionsmènent à des résultats, se sentir l’initiateur de sescomportements, et avoir des relations socialessatisfaisantes au travail (Gagné et Forest, 2009). CesrésultatssontcohérentsaveclarecherchesurlaTADrévélantque lescaractéristiquesdumilieude travailqui facilitent lasatisfactiondesbesoinssontassociésàdesniveauxplusélevésdemotivationautonome(DeCooman, Stynen, Van den Broeck, Sels, et De Witte,2013;Gillet,Gagné,Sauvagère,etFouquereau2012).Plusprécisément,uneétuderéaliséeparDeCoomanet ses collaborateurs (2013) a examiné l'effet descontraintesetdesressourcesprofessionnellessurlesprocessusmotivationnels.

Selonlathéoriesurlescontraintesetlesressources(Bakker et Demerouti, 2007), toutes lescaractéristiques d’un emploi peuvent être classéesselon deux catégories. La première, les contraintes,représentent les aspects défavorables du travail quirequièrent des efforts physiques ou psychologiques,comme la charge de travail (Bakker, Demerouti, etVerbeke, 2004). La deuxième catégorie, soit lesressources d’un emploi, représente les aspectspositifs du travail, tel que le soutiendu superviseur,qui permettent de réaliser les objectifs de travail,réduire les contraintes, et susciter ledéveloppementpersonnel. Les résultats de l’étude deDe Cooman etses collaborateurs (2013) démontrent que lescontraintes(p.ex.,lapressiondetravail)empêchentlasatisfaction des trois besoins psychologiques, alorsque les ressources (p.ex., l'utilisation descompétences) favorisent la satisfaction des besoins.La satisfaction des besoins est à son tourpositivement liée à la motivation autonome.Cependant, lesauteursdecetteétuden’ontpas tenucompte du fait que les contraintes et les ressourcespourraient simultanément influencerplusieurs typesdemotivationschezlesemployés.

En termes de conséquences, les recherchesprécédentes révèlent que les profils caractérisés pardesniveauxélevésdemotivationautonomesemblentfournir de meilleurs résultats en ce qui concerne laperformance (Howard et al., 2016). Cependant, dansledomainedutravail,leschercheurssuggèrentquelaprésence de certains niveaux de motivationintrojectéeetextrinsèquenesontpasnécessairementnuisibles en termes de performance et de bien‐être(Boiché,Sarrazin,Grouzet,Pelletier, etChanal,2008;

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Moranetal.,2012;VandenBroecketal.,2013).UneétuderéaliséeparHowardetcollaborateurs(2016)aidentifié quatre profils motivationnels (amotivé,modérémentautonome, trèsmotivé, et balancé). Lesprofilstrèsélevé(niveauxélevésdesquatretypesdemotivation) et modérément autonome (niveauxfaiblesdemotivationextrinsèqueet introjectéeainsique niveaux modérés de motivation identifiée etintrinsèque) démontrent les plus fortes associationsavec la performance et le bien‐être. Par contre, leprofil balancé (niveauxmoyens des quatre types demotivation)étaitassociéàdesniveauxplusfaiblesdebien‐être et de performance. Ces résultats semblentcohérents avec ceux d’autres études qui identifientdesprofilsmotivationnelssimilairesàceux‐ci(Gravesetal.,2015;Moranetal.,2012).

La présente étude

Basée sur un vaste échantillon de gestionnaires etd’employés, cette étude a pour objectif de découvrircomment les contraintes et les ressources perçuessont liées aux différents profils motivationnels.L’objectifsecondaireestdecomprendrecommentlesprofils motivationnels trouvés se comparent avecceux identifiés dans les recherches précédentes etd’examiner les conséquences que ceux‐ci peuventavoirpourlebien‐êtredesemployés.Lesrésultatsdecette étude sont importants car ils amènent desretombées pratiques en ce qui concerne lacompréhensiondesgestionnairesàl’égarddesprofilsmotivationnels de leurs employés ainsi quel’identification de leviers organisationnels quipourraientsusciterlebien‐êtreautravail.

MéthodeParticipants

L’échantillon est composé de 1914 employés (761femmeset1153hommes)œuvrantenFrance,etdontles organisations étaient clientes de la firme conseilqui a collecté les données. Parmi ceux‐ci, 620participant(e)s sont des gestionnaires et 1294 sontdesemployéssansresponsabilitésd’encadrement.

Procédure

Lesparticipantsontétéinvitésparcourriel,danslecadre de leur travail, à participer à l’étude. Tous lesparticipant(e)sayantdécidédeparticiperontrempliun formulaire de consentement, approuvé par laCommission Nationale de l’Informatique et desLibertés, basée à Paris, leur indiquant que leurparticipation à ces sondages était non obligatoire etqu’ils pouvaient se retirer en tout temps, sans

préjudice. Ensuite, les participants ont complété unquestionnaire électronique via une plateformeinformatiquegéréeparlecabinetdeconsultation.

Mesures

Motivationautravail.Les participants ont complété l’Échelle de

Motivation au Travail (Gagné et al., 2010). Cequestionnaireest composédedouze itemsmesurantles quatre sous‐types de motivation. Le Tableau 1présente des exemples d’items ainsi que lescoefficients alpha pour chaque type. Les réponsesétaientdonnéessuruneéchelledetypeLikertenseptpointsallantde0(Pasdutout)à6(Exactement).Uneanalyse factorielle confirmatoire a été menée sur labasedesdonnéesrecueillies.Lemodèletesté(àl’aidedu logiciel Mplus Version 7.4; Muthén et Muthén,1998‐2015) sur l’ensemble de l’échantillon (N =1914) intégrait quatre variables latentescorrespondant aux quatre sous‐dimensionsmesurées1.

Tableau1Typesdemotivationsselonl’ÉchelledeMotivationauTravailTypedemotivation Exempled’items AlphadeCronbach

Motivationintrinsèque

Parcequej'aibeaucoupdeplaisirdanscetravail

troisitems,α=.91

Motivationidentifiée

J'aichoisicetravailparcequ'ilmepermetd'atteindremesobjectifsdevie

troisitems,α=.83

Motivationintrojectée

Parcequemontravailc'estmavieetjeneveuxpaséchouer

troisitems,α=.79

Motivationextrinsèque

Parcequecetravailmeprocureuncertainniveaudevie

troisitems,α=.67

Stress.Lestressaétémesuréàl’aidedelaversionenneuf

items (α= .88; p.ex., «Jene saisplusoù j’en suis, jen’ai pas les idées claires, jemanque d’attention et deconcentration»)de laMesureduStressPsychologique(MSP‐9; Lemyre et Tessier, 2003). Les participantsdevaient répondre à chaque énoncé en utilisant uneéchelle de Likert en huit points allant de 1 (Pas dutout)à8(Énormément).Unmodèleunidimensionnela été testé (à l’aide du logiciel Mplus Version 7.4;Muthén et Muthén, 1998‐2015) sur l’ensemble de

                                                       1 Lesindicesd’ajustementétaientsatisfaisants,χ2(48)=713.52,p<.001,GFI=.94,NFI=.94,IFI=.94,CFI=.94,etRMSEA=.09,IC[.08,.091].Enoutre,lespoidsfactorielsétaientcomprisentre.41et.88(p<.001).

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l’échantillon(1914)enintégrantlesneufitemsdecequestionnaire. Les indices d’ajustement étaientsatisfaisants,χ2(27)=482.95,p<.001,GFI=.95,NFI= .94, IFI= .94,CFI= .94,etRMSEA= .09, IC [.087à.10]. En outre, les poids factoriels étaient comprisentre.49et.87(p<.001).

Contraintesetressourcesprofessionnelles.Vingt‐neuf caractéristiques de l’environnement

professionnel ont été mesurées à l’aide d’unquestionnairede58 itemsdéveloppéspar le cabinetdeconsultation(Hocine,AïtBouziad,Légeron,Dab,etSaporta,2016).LesréponsesétaientdonnéessuruneéchelledeLikerten6pointsallantde1(Pasdutoutd’accord) et 6 (Tout à fait d’accord). Chacune desdimensionsestmesuréeàpartirdedeux items.Plusprécisément, cet outil permet de mesurer huitcontraintes professionnelles et 21 ressourcesprofessionnelles. Le Tableau 2 présentel’ensembledes contraintes et ressources ainsi que lescorrélations entre les deux items composant chaquedimension.

Tableau2ContraintesetressourcesprofessionnellesContraintesprofessionnelles Corrélations

entreitemsIncertitudevis‐à‐visdel'avenir r=.30Chargementale r=.19Contraintesd'adaptation r=.32Demandescontradictoires r=.52Harcèlementetintimidation r=.55Pénibilitéphysiqueetenvironnementale r=.22Pressiontemporelleetchargequantitative r=.47Comportementsirrespectueux r=.34Ressourcesprofessionnelles Soucidubien‐être r=.61Clartédesrôles r=.40Communicationinterne r=.38Contrôleetprévisibilitédelacharge r=.31Développementdecompétences r=.39Gestionduchangement r=.37Intérêtintrinsèquedelatâche r=.49Justiceorganisationnelle r=.41Latitudedécisionnelle r=‐.30Efficacitédumanagement r=.47Adéquationobjectifs‐ressources r=.23Participationauxdécisions r=.43Perspectivesd'évolution r=.58Reconnaissancedesefforts r=.63Reconnaissancedesrésultatsatteints r=.31Relationsaveclescollègues r=.44Relationsaveclessupérieurs r=.61Sensetutilitédutravail r=.27Soutiendescollègues r=.71Soutiendessupérieurs r=.63Conciliationtravail/famille r=.52

Traitementdesdonnées

Premièrement, nous avons procédé à des analysesdecorrélationentre lesdifférentesvariablesdecetterecherche. Deuxièmement, nous avons mené desanalyses de profils latents, (Vermunt et Magidson,2002)à l’aidedu logicielMplusVersion7.4 (MuthénetMuthén, 1998‐2015), afin de classer les employésengroupesd’individusqui se ressemblentauniveaudesquatreformesdemotivation.L’analysedeprofilslatents est uneméthode utilisée afin d’identifier desgroupes ou des sous‐types de profils dans desdonnées multivariées. En effet, cette méthode estaujourd’hui reconnuecommemenantàdes résultatsplus fiables et robustes que les analyses deregroupement (Pastor,Barron,MilleretDavis,2007;Vermunt et Magidson, 2002). Contrairement auxanalyses de profils latents, les analyses deregroupement ne fournissent pas d’indications trèsclaires sur le nombre de profils à retenir. Demême,elles catégorisent les individus dans un seul profil,alors qu’avec les analyses de profils latents, chaqueemployé a une probabilité plus ou moins élevéed’appartenir à un groupe donné. En outre, lesanalyses de profils latents s’appuient sur différentsindices permettant de choisir le nombre optimal deprofils(voirVermuntetMagidson,2002).

Deuxièmement, afin d’identifier les profilsmotivationnels, quatre modèles ont été testés avecrespectivement une solution à deux, trois, quatre, etcinqprofils,surlabasedesscoresdemotivation2.

                                                       2 Enaccordavec les recommandationsdeNylund,AsparouhovetMuthén (2007), chaque modèle a été évalué à partir des indicessuivants: Log Likelihood (LL), Akaike Information Criterion (AIC),Bayesian Information Criterion (BIC), et Sample‐Size‐Adjusted BIC(SSA‐BIC). Une valeur faible sur ces indices suggère un meilleurmodèle.Enfait,l’approximationdeBayessuggèrequ’unedifférencededixpointsindiquequ’ilya150foisplusdechancequelemodèlesoit bien ajusté aux données que le modèle de comparaison(Raftery, 1995). Les indices Lo‐Mendell‐Rubin likelihood ratio test(LMR;Lo,Mendell,etRubin,2001)etBootstrappedLikelihoodRatioTest(BLRT)ontégalementétéutilisésafind’analyserlenombredepersonnes pouvant être caractérisées par un profil ainsi que lesprobabilités d’appartenir à cemême profil. Le LMR et BLRT sontdes tests du rapport des vraisemblances qui permettent decomparer l’amélioration de l’ajustement entre modèles (encomparant une solution k‐1 à une solution à k profils) etfournissentunevaleurpquipeutêtreutiliséepourdéterminers’ilexiste une amélioration statistiquement significative dansl’ajustement du modèle avec l’inclusion d’un profil additionnel.Ainsi,pourévaluerl’ajustementdesmodèles,nousavonsprivilégiéunesolutionàkprofilsdèslorsquelesvaleursLL,AIC,BICetSSA–BIC étaient inférieure à celles obtenues avec une solution àk – 1profils. En outre, des valeurs significatives (p < .05) auniveauduLMRetduBLRTpourunesolutionàkfacteursindiquentquecelle‐

Note.Touteslescorrélationssontsignificativesàp<.001

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Troisièmement, chacun des 29 facteursenvironnementauxontététouràtourintégrésdanslemodèleetlesliensaveclesprofilsmotivationnelsontété étudiés à l’aide de régressions logistiquesmultinomiales. Cette méthode est particulièrementappropriée lorsque les chercheurs s’intéressent auxdéterminants des profils latents (Bolck, Croon, etHagenaars, 2004). Finalement, nous avons utilisé lafonction AUXILIAIRE(e)3 pour identifier lesdifférences entre les profils au niveau du stress ens’appuyant sur un test de khi‐carré (voir Morin,Morizot,Boudrias,etMadore,2011).

RésultatsAnalyses préliminaires

                                                                                       cidoitêtreprivilégiéeparrapportàunesolutionàk–1profils.Lasolution retenue doit également ne pas inclure de profils avec unpetit nombre de personnes, permettre d’identifier des profilsinterprétablesd’unpointdevuethéorique,ettémoignerd’uneforteprobabilité d’appartenir au profil auquel l’individu est assigné demême qu’une faible probabilité d’être caractérisé par les autresprofils(voirNylundetal.,2007). 3AUXILIAIRE(e)estunefonctionrécemmentoffertedanslelogicielMPLUS qui permet de comparer des profils basés sur desprobabilitésentermesdeco‐variablessansqu’ilssoientinclusdanslemodèle.Cette fonction repose surun testduChi‐carrédeWalddont le seuil de signification est basé sur des tirages de pseudo‐classesetquitestel’égalitédesrésultatsentrelesdifférentsprofils(Morin,Morizot,BoudriasetMadore,2011).

Toutes les ressources professionnelles sontnégativementcorréléesaustress(entrer=‐.24etr=‐.48; p < .001) et positivement corrélées à lamotivation intrinsèque (entre r = .12 et r = .50;p <.001). Toutes les ressources professionnelles sontsignificativement et positivement corrélées à lamotivationidentifiée(entrer=.15etr=.45;p<.001)àl’exceptiondelaconciliationtravail/famille(r=.03;p = .13). Les corrélations entre les ressourcesprofessionnelles d’une part, et les motivationsintrojectée et extrinsèque d’autre part, sont nonsignificatives ou significatives et positives (voirTableau3).

Tableau3Corrélationsentrelesressourcesprofessionnellesetlestypesdemotivation

RessourcesIntrinsèque

Identifiée

Introjectée

Extrinsèque

Stress

Justiceorganisationnelle .32** .35** .13** .18** ‐.38**Sensetutilitédutravail .41** .35** .25** .09** ‐.24**Intérêtintrinsèquedelatâche .50** .45** .26** .11** ‐.27**Développementdecompétences .47** .44** .23** .12** ‐.39**Adéquationobjectifsressources .24** .21** .01 .07* ‐.48**Perspectivesd’évolution .35** .42** .22** .16** ‐.31**Clartédesrôles .30** .25** .14** .09** ‐.42**Conciliationtravail/famille .12** .03 ‐.10** ‐.00 ‐.48**Gestionduchangement .33** .31** .16** .11** ‐.39**Contrôleetprévisibilitédelacharge .18** .15** .04 .06* ‐.47**Soutiendessupérieurs .32** .31** .13** .09** ‐.45**Soutiendescollègues .25** .17** .00 .05* ‐.34**Relationsaveclessupérieurs .31** .29** .10** .03 ‐.45**Relationsaveclescollègues .24** .19** .04 .01 ‐.36**Participationauxdécisions .33** .32** .13** .08** ‐.45**Efficacitédumanagement .36** .36** .21** .11** ‐.43**Reconnaissancedesefforts .34** .35** .15** .12** ‐.42**Latitudedécisionnelle .20** .20** .07* .01 ‐.30**Communicationinterne .33** .34** .16** .16** ‐.40**Soucidubien‐être .36** .39** .19** .15** ‐.46**Reconnaissancedesrésultatsatteints .26** .34** .11** .28** ‐.32**Note:*p<0,05;**p<0,001

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Uneseulecorrélationestsignificativeetnégative,àsavoir celle entre la conciliation travail/famille et lamotivationintrojectée(r=‐.10;p<.001).

Toutes les contraintes professionnelles sontpositivementcorréléesaustress(entrer= .09etr=.54; p < .001) ainsi que négativement corrélées à lamotivation intrinsèque(entrer= ‐.16etr= ‐.28;p<.001), à l’exception de la relation entre la chargementale et la motivation intrinsèque qui est nonsignificative (r = ‐.02; p = .43) et celle entre lescontraintesd’adaptationet lamotivation intrinsèquequi est significative et positive (r = .23; p < .001).Toutes les contraintes professionnelles sontnégativement corrélées à la motivation identifiée(entrer=‐.11etr=‐.25;p<.001),àl’exceptiondelarelation entre la charge mentale et la motivationidentifiéequiestnonsignificative(r=.03;p=.20)etcelle entre les contraintes d’adaptation et lamotivationidentifiéequiestsignificativeetpositive(r=.27;p<.001).

En outre, les contraintes professionnelles sont nonsignificativement corrélées (positivement ounégativement) aux motivations introjectée etextrinsèque.Finalement, lamotivation intrinsèque (r=‐.36;p<.001),lamotivationidentifiée(r=‐.28;p<.001) et lamotivation extrinsèque (r= ‐.08;p < .01)sont négativement corrélées au stress, alors que larelationentrelamotivationintrojectéeetlestressestnon significative (r = .01; p = .73). Le tableau 4présente les corrélations entre les contraintesprofessionnellesetlesquatretypesdemotivation.

Tableau4Corrélationsentrecontraintesprofessionnellesettypesdemotivation

Contraintes

Intrinsèque

Identifiée

Introjectée

Extrinsèque

Stress

Comportementsirrespectueux ‐.27** ‐.24** ‐.06* ‐.04 .43**

Demandescontradictoires ‐.24** ‐.18** ‐.01 ‐.02 .50**

Incertitudevis‐à‐visdel'avenir ‐.28** ‐.25** ‐.09** ‐.12** .43**

Harcèlementetintimidation ‐.26** ‐.25** ‐.06* ‐.02 .42**

Contraintesd’adaptation

.23** .27** .23** .11** .09**

Pressiontemporelleetchargequantitative ‐.16** ‐.11** .05* ‐.05* .54**

Chargementale ‐.02 .03 .11** .03 .31**Pénibilitéphysiqueetenvironnementale ‐.19** ‐.22** ‐.10** ‐.04 .31**

Note:*p<.05;**p<.001

Analyses principales

LeTableau5présentelesindicesd’ajustementpourdessolutionsàdeux,trois,quatreetcinqprofils.Plusle nombre de profils augmente, plus les indices LL,AIC,BICetSSA‐BICsont faibles.Le testLMRestnonsignificatif pour une solution à cinq facteurs,suggérant qu’une solutionà quatre facteurspourraitêtre appropriée. Au niveau de ce modèle à quatrefacteurs, la probabilité d’appartenir au profil quicaractérisechacundesindividusestélevée(M=.86),alorsquelaprobabilitéd’êtrecaractériséparunautreprofilestfaible(M= .05).Enoutre, lesquatreprofilsmotivationnels sont aisément interprétables d’unpointdevuethéoriqueetregroupententre163et768personnes. Sur la base de ces résultats, nous avonsretenu cette solution à quatre profils qui estmis enévidencesurlaFigure1.

Tableau5Indicesd’ajustement

Nombredeprofils LL AIC BIC SSA–BIC BLRT(p) LMR(p)

2 ‐13580.27 25802.13 25874.37 25833.07 .0000 .0000

3 ‐12888.07 25441.30 25541.33 25484.14.0000 

.0003

4 ‐12702.65 25290.06 25417.87 25344.79 .0000  .0006

5 ‐12622.03 25224.26 25379.85 25290.90 .0000  .1818

Note:LL=Log‐Likelihood;AIC=AkaikeInformationCriteria;BIC=BayesianInformationCriteria;SSA–BIC=Sample‐Size‐AdjustedBIC;BLRT=BootstrappedLikelihoodRatioTest;LMR=Lo‐Mendell‐RubinlikelihoodtestL’ajustementdesmodèlesévaluéenprivilégiantunesolutionàkprofilsdès lorsque lesvaleursLL,AIC,BIC,etSSA‐BICsont inférieursàcellesobtenuesavecunesolutionàk‐1profils.Desvaleurssignificatives(p<.05)auniveauduLMRetduBLRTpourunesolutionàkfacteursindiquentquecelle‐cidoitêtreprivilégiéeparrapportàunesolutionàk‐1profils. 

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Figure1Profilsmotivationnels

Le premier profil (18.3% de l’échantillon) estcaractérisé par des niveaux très faibles des quatretypes de motivation (profil très faible) alors que ledeuxième profil (33% de l’échantillon) présente desscores faibles au niveau des quatre formes demotivation (profil faible). Le troisièmeprofil (40.1%de l’échantillon) regroupe des employés avec desscoresmodéréssurlesdifférentstypesdemotivation(profil modéré). Finalement, les employéscaractérisés par le quatrième profil (8.5% del’échantillon) affichent des scores élevés sur lesquatre formesdemotivation(profilélevé).Commeiln’existepasdenormespourdéterminerlesvaleursdecoupures(entredesscores«faibles»,«trèsfaibles»,etc.), la découpure des différents niveaux de

motivationestfaitedemanièredescriptivesurlabasedesrésultatsobtenus.

Les relations entre chacun des 29 facteursenvironnementaux et les quatre profils latents ontensuiteétéanalysés,enprenantleprofilélevécommeprofil de référence4. Les résultats ont montré quetoutes les ressources professionnelles, à l’exceptionde l’adéquationobjectifs‐ressources, sontassociéesàune plus faible probabilité d’appartenir aux profilstrès faible, faible et modéré (voir Tableau 6). En

                                                       4 Dans la réalisation de régressions logistiques, MPLUS choisiautomatiquement un groupe de référence. Les coefficients pourtout autre groupe indiquent lamesure dans laquelle les variablesindépendantessont liéesà laprobabilitéd’apparteniràcederniergroupecomparativementaugroupederéférence.

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d’autres termes, les employés avec le profil élevénesedifférencientpasdeceuxcaractérisésparlestroisautres profils motivationnels au niveau del’adéquation objectifs‐ressources. En revanche, pourles 20 autres ressources professionnelles, lesemployés avec le profil élevé présentent des scoresplus élevés que ceux avec les trois autres profilsmotivationnels.Ànoterégalementquelelienentrelalatitude décisionnelle et le profil modéré n’est passignificatif, suggérantque lesprofilsélevéetmodéréne se différencient pas au niveau de cette ressourceprofessionnelle.

Tableau6Ressourcesprofessionnellesetprofilsmotivationnels

RessourcesProfiltrèsfaible

Profilfaible

Profilmodéré

Justiceorganisationnelle ‐1.34** ‐0.98** ‐0.64**Sensetutilitédutravail ‐2.99** ‐2.25** ‐1.76**Intérêtintrinsèquedelatâche ‐2.70** ‐1.98** ‐1.33**

Développementdecompétences ‐2.59** ‐1.95** ‐1.36**

Adéquationobjectifsressources

‐0.94** ‐0.65** ‐0.48**

Perspectivesd’évolution ‐1.50** ‐1.00** ‐0.59**Clartédesrôles ‐1.54** ‐1.24** ‐0.99**Conciliationtravail/famille ‐0.06 ‐0.02 0.03Gestionduchangement ‐1.76** ‐1.32** ‐1.04**Contrôleetprévisibilitédelacharge ‐0.61** ‐0.44** ‐0.33*

Soutiendessupérieurs ‐1.76** ‐1.37** ‐1.16*Soutiendescollègues ‐0.78** ‐0.52** ‐0.45*Relationsaveclessupérieurs ‐1.25** ‐0.91** ‐0.66*Relationsaveclescollègues ‐0.77** ‐0.47** ‐0.34*Participationauxdécisions ‐1.48** ‐0.97** ‐0.77**Efficacitédumanagement ‐1.74** ‐1.30** ‐0.96**Reconnaissancedesefforts ‐1.66** ‐1.24** ‐0.94**Latitudedécisionnelle ‐0.63** ‐0.47** ‐0.14Communicationinterne ‐1.82** ‐1.35** ‐1.07**Soucidubien‐être ‐1.68** ‐1.22** ‐0.91**Reconnaissancedesrésultatsatteints ‐1.32** ‐0.86** ‐0.55**

Note: Les valeurs présentées représentent les coefficients de régressions logistiquesmultinomialespermettantd’analyserlesrelationsentrechacunedesressourcesetlesquatreprofilslatentsenprenantleprofilélevécommeprofilderéférence.*p<.01;**p<.001

Les résultats ont également montré que lesdemandescontradictoireset l’incertitudevis‐à‐visdel'avenir sont associées à une plus forte probabilitéd’appartenir aux profils très faible, faible etmodéré(voir Tableau 7). En outre, les comportementsirrespectueux, le harcèlement et l’intimidation, lapression temporelle et la charge quantitative, ainsique la pénibilité physique et environnementale sontassociésàuneplusforteprobabilitéd’appartenirauxprofils très faible et faible. En d’autres termes, pources quatre contraintes, les employés avec les profils

très faibleet faibleprésententdesscoresplusélevésqueceuxavec lesdeuxautresprofilsmotivationnels.En revanche, les profils modéré et élevé ne sedifférencientpasauniveaudecesquatrecontraintesprofessionnelles. Par ailleurs, il n’y a aucunedifférence entre les quatre profilsmotivationnels auniveau de la charge mentale. Finalement, lescontraintes d’adaptation sont associées à une plusfaible probabilité d’appartenir auxprofils très faible,faibleetmodéré.

Tableau7Contraintesprofessionnellesetprofilsmotivationnels

ContraintesProfiltrèsfaible

Profilfaible

Profilmodéré

Comportementsirrespectueux 1.01** 0.65* 0.34

Demandescontradictoires 0.72** 0.48** 0.35*Incertitudevis‐à‐visdel'avenir 0.90** 0.59** 0.36*

Harcèlementetintimidation 0.82** 0.59** 0.34Contraintesd’adaptation ‐1.48** ‐1.00** ‐0.81**Pressiontemporelleetchargequantitative 0.37* 0.24* 0.13

Chargementale ‐0.19 ‐0.11 ‐0.14Pénibilitéphysiqueetenvironnementale 0.59** 0.31* 0.07

Note: Les valeurs présentées représentent les coefficients de régressions logistiquesmultinomiales permettant d’analyser les relations entre chacune des contraintes et lesquatreprofilslatentsenprenantleprofilélevécommeprofilderéférence.*p<.01;**p<.001

Pour conclure, nous avons examiné les différencesentre les profilsmotivationnels au niveau du stress.Les employés avec le profil élevé présentent lesscoresdestresslesplusfaibles(χ2=39.89;p<.001)suivisparceuxavec leprofilmodéré, leprofil faible,etfinalementleprofiltrèsfaible.

Discussionetconclusion

La présente étude avait pour objectif d’identifierplusieurs profils motivationnels au travail, obtenuspar analysesdeprofils latents à traversune cohortede1914employés,puisd’analyserleursliensaveclescontraintes et ressources de l’environnementprofessionnel ainsi que sur le stress. Nos résultatscontribuentàlafaibledocumentationscientifiquesurlesprofilsmotivationnelsenen identifiantquatre: leprofil très faible, le profil faible, le profil modéré etenfin leprofilélevé.Cerésultatestcohérentavec lesquelquesrecherchesprécédentes(Gravesetal.,2015;Howardetal.,2016;Moranetal.,2012)révélantdesprofilsmotivationnelssimilaires.

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Antécédents des profils motivationnels

Nousobservonsainsiqueleprofilélevé(caractériséparunniveauélevédesquatretypesdemotivation),est plus fortement associé à des caractéristiques del’environnement professionnel considérées commedes ressources, alors que les profils faible et trèsfaible (i.e., caractérisé par un niveau très faible etfaibledesquatre typesdemotivation)semblentplusfortement associés à des conditions de travailconsidérées comme des contraintes. En outre, lesanalyses corrélationnelles ont révélées que, demanière générale, les ressources professionnellessont positivement associées aux motivationsintrinsèque et identifiée, tandis que les contraintessontnégativementassociéesàcelles‐ci.Ensemble,cesrésultats vont dans le même sens que les résultatsobtenusauparavantquimontrentquelaprésencedecaractéristiquesdel’environnementprofessionnelquiencourage lasatisfactiondesbesoinspsychologiquesest associéeà laplus forteprésencedesmotivationsintrinsèque et identifiée (De Cooman et al., 2013).Concrètement, cela suggère que les employés ayantaccès à des ressources, telles que le soutien dusuperviseur,ontplustendanceàsesentirlibred’agiren conformité avec leurs valeurs (autonomie), de sesentir efficace dans l’atteinte de leurs buts(compétence) ainsi qu’avoir des contacts sociauxenrichissantau travail (affiliation).Lasatisfactiondeces besoins augmente à son tour la motivationautonome. À l’inverse, les employés travaillant dansun milieu avec une prépondérance de contraintes,tellequedescomportementsirrespectueuxdelapartdusuperviseur,ontmoinstendanceàsatisfaireleursbesoins psychologiques et démontrent parconséquentunemotivationcontrôléeplusprésente.

Enfin, les liens positifs entre la dimension«contraintes d’adaptation» et les motivationsintrinsèque et identifiée nous laissent croire quecertaines contraintes sont de types défis(i.e.,contraintes qui sont associées à des bénéficespotentielspourl’individumalgrélefaitqu’ellessoientpotentiellement stressantes) alors que d’autres sontdetypeobstacles(contraintesquitendentàinterféreravec l’accomplissement du travail sans apporter debénéfices; e.g., Crevier‐Braud, 2016) ce qui est unevoie de recherche novatrice qui mérite d’êtreexploréedavantage.

Conséquences des profils motivationnels

Les employés avec le profil élevé présentent lesscoresdestresslesplusfaibles,suivisparceuxavecleprofilmodéré,faibleetfinalementleprofiltrèsfaible.Enoutre,lesrésultatsdémontrentquelesmotivationsintrinsèque, identifiée et extrinsèque sontnégativementassociéesaustress.Aupremierregard,ces résultats semblentallerà l’encontrede lanotionselon laquelle la motivation extrinsèque auraittendanceànuireà laperformanceetaubien‐êtreautravail (Gagné, 2014; Gagné et Deci, 2005).Néanmoins,cesrésultatsvontdanslemêmesensqueles résultats de trois études (Graves et al., 2015;Howardetal.,2016;Moranetal.,2012)révélantquedes profils caractérisés par des niveaux élevés desquatre types de motivation démontrent de fortesassociations avec la performance et le bien‐être desemployés. Les résultats des études précédentespeuventnuancerceuxde laprésenteétude, carellesdémontrent que des profils caractérisés par desniveaux élevés des motivations identifiée etintrinsèque,accompagnéspardesniveauxfaiblesdesmotivations extrinsèque et introjectée, démontrentégalementde fortes associations avec le bien‐être etla performance (Graves et al., 2012; Howard et al.,2016). De plus, les profils marqués par de faiblesniveaux de motivation autonome accompagnés pardes hauts niveaux de motivation contrôléedémontrentlesplusfaiblesassociationsaveclebien‐être et la performance (Howard et al., 2016). Celasuggère que les employésmotivés à accomplir leurstâches de travail principalement par plaisir(intrinsèque)ouparcequ’ellescorrespondentàleursvaleurs personnels (identifiée) sont moinssusceptiblesd’avoirdustress,mêmesi ces individusprésentent des niveaux élevés de motivationextrinsèque. Ainsi, il est possible qu’aussi longtempsqu’un employé soitmotivé demanière autonome, lamotivationcontrôléenesoitpasnuisibleaubien‐être.Parcontre, lesemployésprincipalementmotivésparle fait d’obtenir des récompenses financières(extrinsèque)oupouréviterdessentimentsdehonte(introjectée) et qui sont faiblement motivés demanière autonomeontplus tendance à être stressésautravail.

Retombées pratiques

Bien qu'il soit prématuré d'offrir desrecommandations fermes pour la pratique, lesrésultats suggèrent tout de même plusieursimplications pour les gestionnaires. Premièrement,les organisations pourraient trouver certainsavantages à connaître le fait que leurs employés

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peuvent démontrer différents profils motivationnelsen lien avec leur travail, pour personnaliser lesinterventions par exemple. Dans l’optiqued’augmenter la motivation au travail, lesinterventionsdevraientêtreenmesuredemaintenirlesmotivations intrinsèque et identifiée à un niveauplus élevé que les motivations extrinsèque etintrojectée. Un accent mis uniquement sur lesrécompenses financières et sociales peut avoir uneffet néfaste sur le bien‐être si elle n’est pasaccompagnée par une présence plus importante desens,deplaisiretd’intérêtautravail.Deuxièmement,cette recherche renforce l’idée selon laquelle touteintervention visant à réduire les effets néfastes dustress au travail devrait viser l’augmentation desmotivations intrinsèqueet identifiéede l’employéenmisantsurlesressourcesetlescontraintesdumilieudetravail.Parexemple,lesemployéscaractériséspardes profils motivationnels très faibles sont plus àrisque de ressentir du stress au travail etbénéficieraientd’interventionsvisantàaugmenter laprésencede ressources, telles que le développementde compétences et de l’autonomie, et à diminuer lescontraintes, telle qu’une lourde charge de travail.Notre étude présente aux employeurs une largedescription des ressources à développer et descontraintes à minimiser afin d’améliorer lesconditions de travail, ceci afin d’accroitre lamotivationautonomeet,parconséquent, lebien‐êtreautravail.

Limites

Premièrement, comme pour toute étudetransversale, il est impossible de parvenir à desconclusions claires concernant la directionalité desassociations entre les profils motivationnels et lesvariables de l’étude. Les recherches futurespourraient examiner les liens de causalité entre cesvariables,àsavoirsicesont lesconditionsdetravailsainesquifavorisentlamotivation,ousilamotivationdel’employéluipermetd’évoluerdansdesconditionsprofessionnelles qu’il considère comme desressources;ladocumentationsurl’engagementayantdémontréceteffetréciproqueentrelesressourcesetl’engagement (Xanthopoulou, Bakker, Demerouti, etSchaufeli, 2009). En outre, les conditions de travailsont évaluées par des réponses auto‐rapportées parles employés. Bien que la perception des individussoit une perspective appropriée pour évaluer cesvariables, cette approche pourrait augmenter laprobabilité d’avoir des estimations biaiséesconcernant les associations en question. Finalement,

cette étude utilise, pour la première fois, lequestionnaire développé par Stimulus pour évaluerspécifiquement les contraintes et les ressources. Ilimporte de mettre en lumière que certainesdimensions présentent des corrélations parfoisfaibles,cequipourraitremettreencauselavaliditéetlafiabilitédel’outil.

Conclusion

Enconclusion,cetteétudecontribueàl’avancementdes connaissances sur les motivations au travail enutilisant une approche centrée sur la personne enidentifiant quatre profils motivationnels différentesainsiqu’enidentifiantdesantécédents(contraintesetressources) et des conséquences (stress) associés àcesprofils.

Références

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Lajusticeorganisationnelleetl’épuisementprofessionnel:unenouvellemesureselonlesopportunitésenmilieudetravail EmmanuelleBrien‐Robidoux,CamilleLabrèche,David‐EmmanuelHatier,Anne‐MariePaiement,MickaelBlais

UniversitédeMontré[email protected] Laperceptionde justiceorganisationnelleasouventété identifiéecommeunantécédentde l’épuisementprofessionnel.Traditionnellement, la justiceestétudiéequantà l’attributiondes récompenses/punitions,mais la présente étude se penche précisément sur l’accès aux opportunités au travail telles que despromotions,desprivilègesoudesmandatsstimulants.Unquestionnaireaétéremplipar153travailleursetencoresixmoisplus tard,par100d’entreeux.Unerégressionmultiplea testé l’effetduchangementdesdifférents typesde justice sur le changement d’épuisement professionnel. Les résultats indiquentque lechangementdejusticeperçueentrelesdeuxtempsdemesureexpliquedemanièresignificativel’épuisementprofessionnelau temps2.La théoriede l’échangesocialapporteunéclairagesurcesrésultats.Despistesd’interventionfavorisantlaperceptiondejusticedanslesorganisationssontdiscutées.

Motsclés:Justiceorganisationnelle,justicedistributive,justiceprocédurale,opportunités,épuisementprofessionnel. Introduction

épuisementprofessionnelestunphénomènequinuitàlasantéetàlaperformancedesindividus

etdesorganisations(Campbell,Perry,Maertz,AllenetGriffeth, 2013 ; Hakanen et Schaufeli, 2012). Il estassocié à l’absentéisme, à un roulement accru depersonnelainsiqu’àunediminutiondelaperformanceau travail (Petitta et Vecchione, 2011 ; Swider etZimmerman,2010).Denombreuxchercheurssesontintéressés à la problématique de l’épuisementprofessionnel en étudiant ses antécédentsorganisationnels, parmi lesquels figure la justiceorganisationnelle.Lesétudesrapportentlaplupartdutemps des liens négatifs faibles à modérés entre lajusticeorganisationnelleetl’épuisementprofessionnel(Campana etHammoud, 2015 ; Liljegren et Erkberg,2009 ; Moliner, Martinez‐Tur, Peiró, Ramos etCropanzano,2005).

Lajusticeorganisationnelleestgénéralementétudiéeen termes de justice distributive et de justiceprocédurale dans l’attribution de récompenses et depunitionsparl’organisation(AmbroseetArnaud,2005;Lambertetal.,2010).Toutefois,peud’étudessesontintéressées aux perceptions de justice par rapport àdes types précis de récompenses ou de punitionsautresquelesalaire(Olafsen,Halvari,ForestetDeci,2015).Laprésenteétudeintroduitleconceptdejusticeorganisationnelleencequiatraitauxopportunitésenmilieu de travail, en plus de s’intéresser au rôle

potentiellement déterminant qu’ont les justicesdistributive et procédurale dans l’explication del’épuisementprofessionneldestravailleurs.

ContextethéoriqueLa justice organisationnelle

La justice organisationnelle correspond à laperceptiond’équitédeséchangesquiontlieuauseind’une organisation (Beugré, 1998). La théorie del’échange social (Blau, 1964) conceptualise la justiceorganisationnelle comme le respect de ce qui estattendu.Dansladocumentation,elleestgénéralementopérationnalisée comme un construitmultidimensionnel, formédequatresous‐construits :lajusticedistributive(JD),lajusticeprocédurale(JP),lajusticeinteractionnelleetlajusticeinformationnelle(Colquitt,2001;Colquitt,GreenbergetZapata‐Phelan,2005). La présente étude s’intéresse plusparticulièrement à la JD et à la JP, car elles sont destypesdejusticeformellementmisesenplacedanslesorganisations, contrairement aux justicesinformationnelle et interactionnelle (Blader et Tyler,2003).

La JD est issue de la théorie de l’équité d’Adams(1965)etcorrespondàlaperceptiond’équitédansladistributiondesressourcesentre les individus.Seloncette théorie, un individu perçoit une équité lorsquesonévaluationduratioentreleseffortsqu’ilainvestiset les récompenses qu’il a obtenues équivaut à son

L’

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évaluation du ratio entre les efforts investis et lesrécompensesobtenuespard’autresindividusdestatutsimilaire. Ainsi, une telle situation d’équilibre estsusceptible d’engendrer une perception de JD. Unesituationdedéséquilibreestsusceptibled’engendrerl’inverse, soit une perception d’injustice distributive(Adams, 1965). Par exemple, un employé risque depercevoiruneinjusticedistributives’ilconsidèrequesonsalaireestinsuffisantparrapportauxeffortsqu’ilfournitautravailetsisonsalaireestinférieuràceluidecollèguesayantunposteéquivalent.

La JP fait référence à la justice perçue lors desprocessusdécisionnels.Elleestélaboréeparlathéoriede la procédure de Thibaut et Walker (1975) quipostuledeuxniveauxdeJP:lecontrôleduprocessus,soitl’évaluationduprocessusdécisionnelensoi,etlecontrôledeladécision,référantaufaitdedonnersonopinion ou de pouvoir influencer le résultat duprocessus décisionnel. Dans un contexteorganisationnel, la perception de JP est satisfaitelorsque les démarches menant à une décision, parexemple l’allocation d’une promotion, sont perçuescomme étant justes (Leventhal, 1980 ; Nabatchi,BinghametGood,2007).

Justice organisationnelle et opportunités

Alors que la plupart des études s’intéressenttraditionnellementàlaperceptiondejusticequantauxrécompenses et punitions, l’étude de la justiceorganisationnelle gagnerait à être élargie auxopportunités en milieu de travail, car elles sontsusceptibles d’influencer le vécu des employés. Lesopportunitésenmilieude travail ontprécédemmentétédéfiniescommeétantlapossibilitéd’avanceretdegrimper les échelons au sein d’une organisation(LambertetHaley‐Lock,2004).Danslaprésenteétude,lesopportunitésreprésententuntypederécompensequiatraitàl’attributiondepromotions,deprivilègeset de tâches ou mandats stimulants. Elles peuventégalementsedéfinirpardesélémentsplusprécis,telsque les opportunités d’apprentissage ou dedéveloppement des compétences, celles‐ci favorisantla motivation ainsi que la santé et le bien‐être desemployés(Proost,VanRuysseveldtetvanDijke,2012;VanRuysseveldt,VerboonetSmulders,2011).Bienque la documentation portant sur la justiceorganisationnelle comporte peu de travaux sur lesopportunités offertes aux travailleurs, une étudeindique que les opportunités sont associées à lasatisfactionetl’engagementautravail(Iles,ForsteretTinline,1996).Deplus,LambertetHaley‐Lock(2004)

ontétudié lesopportunitésd’équilibretravail‐familleoffertesdansuneentrepriseetrapportentquecelles‐ci semblent favoriser l’engagement quotidien desemployés au travail. Ainsi, élargir le spectre de lacompréhension de la justice organisationnelle enévaluant la perception de JD et de JP relatives auxopportunités enmilieu de travail apparaît pertinentdans l’étude de son lien avec l’épuisementprofessionnel.

L’épuisement professionnel

L'épuisement professionnel est un processuscontinu,aucoursduquel lesressourcesénergétiquesde l'individu ne parviennent plus à compenser lesdemandes auxquelles il fait face (Shirom, Toker,Melamed, Berliner et Shapira, 2013). Shirom etMelamed (2006) définissent l’épuisementprofessionnel par trois dimensions : l’épuisementphysique, émotionnel et cognitif. L’épuisementphysiquesecaractériseparunmanqued’énergieetungrand sentiment de fatigue qui empêchent l’individude vaquer à ses tâches quotidiennes au travail.L’épuisement émotionnel se définit par une baissed’énergiequientraveledéveloppementetlemaintiende ses relations interpersonnelles. L’épuisementcognitif,quantàlui,touchelescapacitésmentalesd’unindividuetsedéfinitparuneréductiondelavitessedelapenséeetdel’agilitémentale.

Liens entre la justice organisationnelle et l’épuisement professionnel

La documentation scientifique soutient l’hypothèseque la justice organisationnelle relative auxopportunités est un facteur permettant d’expliquerl’épuisementprofessionneldestravailleurs.Plusieurspostulats théoriques suggèrentune relationnégativeentre la justice organisationnelle relative auxopportunitésetl’épuisementprofessionnel.Lathéoriede la conservation des ressources (Hobfoll, 1989),selon laquelle les individus cherchent à conserver,obteniretprotéger leursressources,stipulequetoutstress peut être expliqué par une perte réelle ouanticipée de ressources, ce qui est susceptibled’engendrer un épuisement physique, cognitif etémotionnel (Hobfoll et Freedy, 1993 ; Shirom etMelamed, 2006). Ce modèle est cohérent avec lesprincipaux modèles théoriques des JP et JD. À titred’exemple, l’iniquité que perçoivent les employésquantàl’accèsauxopportunités(Adams,1965)etauxprocédures décisionnelles gérant leur distribution(ThibaultetWalker,1975),pourraitreprésenterunemenaceenversleursressourcesoul’obtentionfuture

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deleursressourcessiellecomprometlespossibilitésd’avancement ou d’obtention de rétributionssalariales.Ainsi,unsentimentdeprécaritéquantauxopportunités pourrait être un facteur d’épuisementprofessionnel.Plusieursétudesempiriquesrapportentunliennégatifentrelajusticeorganisationnelleperçueetlasantédestravailleurs.Parexemple,laperceptionde justice en milieu organisationnel mène à uneréductiondesymptômesdépressifschezlesemployésainsiquedel’absentéismeoccasionnépardesplaintespsychosomatiquesoupardesproblèmesdesanté(DeBoer,Bakker,SyroitetSchaufeli,2002;YbemaetVanden Bos, 2010). Plus précisément, des liens négatifsentrelaperceptionglobaledejusticeorganisationnelleet l’épuisement professionnel ont été établis parMolineretal.(2005).

En ce qui concerne les types de justiceorganisationnelle, des études suggèrent que la JPaurait un effet plus important que la JD surl’épuisement professionnel. Entre autres, Lambert etal.(2010)ontdémontréquelesperceptionsdeJD(β=‐.18, p ≤ .05) et de JP (β = ‐.43, p ≤ .01) d’employéstravaillantenmilieucarcéralétaienttoutesdeuxliéesnégativementà l’épuisementprofessionnel.Enoutre,leursrésultatsindiquentquelaJPestdavantageliéeàlamanifestationdel’épuisementquelaJD.Brotheridge(2003)aégalementrelevélaprédominancedelaJPsurla JD quant à l’épuisement émotionnel vécu par lestravailleurs en situation de changementorganisationnel. L’effet plus important de la JP surl’épuisementprofessionnels’expliqueraitparsonlienavec la perception de transparence de la structureopérationnelle dans une organisation (Greenberg,1990).Cettetransparencefavoriseraitunsentimentdeconfiance de la part des employés envers celle‐ci. Àl’inverse,enpercevantuneplusfaibletransparencedela part de l’organisation, l’employé ne fait plusconfianceenlesdécisionsprisesparl’organisationetvivra davantage de stress. Ce stress pourrait menerensuiteàl’épuisementprofessionnel.

Objectifdel’étudeethypothèse

Cette recherche a pour objectif d’étudier lacontributiondesperceptionsde JD etde JP relativesauxopportunitésenmilieudetravailàlaprédictiondel’épuisementprofessionnel.À la lumièrede l’examendeladocumentation,nousposonsl’hypothèsequelaJPrelative aux opportunités prédira davantagel’épuisement professionnel que la JD relative auxopportunités.

MéthodologieProcédure et participants

Danslecadred’unlaboratoirederechercheàl’hiver2016,dixétudiantsaubaccalauréatenpsychologiedel’UniversitédeMontréalont invité253 travailleursàparticiperàuneétude sur la santépsychologiqueautravail.Autotal,153travailleurscanadiens(dont129ont grandi au Québec) ont répondu en ligne à unquestionnaire en français. Six mois plus tard, lesparticipantsontétéinvitésàremplirlequestionnairede nouveau ; 100 participants y ont alors répondu.Pourêtreéligibles,lesparticipantsdevaienttravaillerauseindelamêmeorganisationdepuisaumoinssixmois,etce,enmoyenne25heuresetplusparsemaine.Les travailleurs autonomes n’ont pas été considérésdanslaprésenteétude,carilssontmoinssusceptiblesd’être affectés par le phénomène de la justiceorganisationnelle. Les caractéristiquessociodémographiques des participants sontprésentéesauTableau1.

Tableau1CaractéristiquesdémographiquesauxdeuxtempsdemesureVariables Temps1 Temps2Âge(enannée) M=41

ÉT=8M=42ÉT=9

Genre Homme 36% 35%Femme 64% 65%

Niveaudescolarité Moinsd’unsecondaire5 1% 1%Diplômed’étudessecondaires 9% 6%Diplômed’étudesprofessionnelles

12% 11%

Diplômed’étudescollégiales 16% 15%Diplômedepremiercycleuniversitaire

44% 44%

Diplômed’étudessupérieures 18% 23%Typed’organisation

Organisationpubliqueouparapublique

48% 52%

Petiteoumoyenneentrepriseprivée

25% 25%

Grandeentrepriseprivée 21% 21%Autres 5% 2%

Instruments

Justiceorganisationnelle.Uneversionadaptéedela version française (Jouglard‐Tritschler et Steiner,2005) de l’instrument de Colquitt (2001) a étéemployée afin d’évaluer la justice relative auxopportunités perçues dans le milieu de travail.L’instrumentamesurélaJDenquatreitems(ex.Dansquelle mesure la quantité/qualité des opportunitésreflètel’effortquevousavezinvestidansvotretravail

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?) et la JPen sept items (ex.Dansquellemesure cesprocéduresvousont‐ellespermisd’avoirdel’influencesurl’attributiondesopportunités?).LesitemsfigurentauTableau2.UneéchelledeLikertallantde1(dansune très faible mesure) à 5 (dans une très grandemesure)aétéemployée.

Tableau2Coefficientsdesaturationdesitemsdel’instrumentdejustice

Items

Facteurs

JD JP‐A JP‐P

Laquantité/qualitédesopportunitésestappropriéecomptetenudutravailquevousavezeffectué.

.94

Laquantité/qualitédesopportunitésreflètel’effortquevousavezinvestidansvotretravail.

.91

Laquantité/qualitédesopportunitésreflètevotrecontributionàl’organisation.

.89

Laquantité/qualitédesopportunitésestjustifiéeauregarddevotreperformance.

.88

Cesprocéduresontétéappliquéesentouteimpartialité.

1.00

Cesprocéduresontétéappliquéesdefaçoncohérente.

.75

Cesprocéduresontrespectélesrèglesdemoraleetd’éthique.

.75

Cesprocéduresreposaientsurdesinformationsexactes.

.73

Cesprocéduresvousontpermisd'exprimervosopinionsetsentiments.

.90

Cesprocéduresvousontpermisd’avoirdel’influencesurl’attributiondesopportunités.

.79

Cesprocéduresvousontpermisdedemanderderéexaminerlesopportunitésdéjàattribuées.

.49

Épuisement professionnel. L’épuisementprofessionnel a étémesuré avec la version française(SassietNeveu,2010)delaShirom‐MelamedBurnoutMeasure (Shirom et Melamed, 2006). L’instrumentcomporte14 items telsque : «Jen’aiaucuneénergiepourallerautravaillematin»,«Jesensquejenepeuxpas m’investir émotionnellement avec les collègueset/oulesclients»et«J’aidumalàmeconcentrer».UneéchelledeLikertallantde1(jamais)à7(toujours)aétéemployée.

Résultats

D’abord, des analyses factorielles exploratoires(rotationGeomin)ontétéréaliséesavecMplusafindevérifier la structure factorielle de l’instrument

mesurant les perceptions de justice relative auxopportunités.Desanalysesfactoriellesconfirmatoiresont indiquéque l’ajustementstatistiquedumodèleàdeuxfacteursestinsatisfaisant(χ2=163,26;df=43;CFI=0,921 ;TLI=0,900 ;RMSEA=0,133 ;SRMR=0,064). Un modèle à trois facteurs a montré unmeilleurajustementstatistique(χ2=75;df=41;CFI=0,978;TLI=0,970;RMSEA=0,072;SRMR=0,035).CestroisfacteurscorrespondentàlaJDainsiqu’àdeuxdimensions de la JP, soit la justice procédurale ‐application (JP‐A) et à la justice procédurale ‐participation (JP‐P). Plus précisément, la JP‐Aregroupe les items concernant la manière dont lesprocédures ont été mises en place, soit de manièreimpartialeetcohérenteparexemple.Enrevanche, laJP‐Pregroupelesitemstouchantàl’influencequelestravailleurspourraientavoirsurlesprocéduresquantà l’attribution des opportunités. Les coefficients desaturation de chacun des items sont présentés auTableau2.

Les statistiques descriptives, les corrélations et lesindices de cohérence interne entre les variables àl’étudeau temps1etau temps2sontprésentéesauTableau 3. Afin de répondre à l’hypothèse derecherche, une analyse de régression multiplehiérarchiqueaétéeffectuée(Tableau4)etadémontréque le modèle explique 7.8% de la variance duchangement de l’épuisement professionnel entre lesdeux temps de mesure. Dans un premier bloc, troisvariables corrélées avec l’épuisement professionnel(genre, niveau de scolarité, nombre d’heurestravaillées) ont été introduites afin qu’elles soientmaintenues constantes lors de l’ajout des variablesd’intérêt dans le modèle. Dans un second bloc, lesscores résiduels de changements de JD, JP‐A et JP‐Pentrelestemps1et2ontétéentrésprogressivementselon la méthode pas à pas. De par sa plus fortecorrélationavecl’épuisementprofessionnel, laJP‐Aad’abordétéconsidéréeetsonpoidss’avèresignificatif(β = ‐.26, p < 0.05). La JD et la JP‐P ont ensuite étéconsidérées,maisnesontpas inclusesaumodèleenraisonde leurspoidsuniquesnonsignificatifs.Ainsi,l’hypothèse selon laquelle la JP serait plusdéterminante que la JD dans la prédiction del’épuisementprofessionnelestsoutenue.Lesrésultatssuggèrent toutefois que c’est l’application desprocédures d’attribution – et moins la possibilitéd’intervenircommeteldansl’attribution–quipréditl’épuisementprofessionnel.

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Tableau3

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

1. Genrea

2. Éducation ‐.09

3. Heuresb .14 .23

Temps1

4. ÉPc ‐.13 .06 ‐.04 (.94)

5. JDd .13 ‐.09 .16 ‐.23 (.96)

6. JP‐Ae .12 ‐.01 .10 ‐.40 .59 (.84)

7. JP‐Pf .16 ‐.14 .17 ‐.25 .62 .68 (.94)

Temps2

8. ÉP ‐.02 .11 .05 .69 ‐.19 ‐.42 ‐.24 (.95)

9. JD .20 ‐.11 ‐.05 ‐.18 .50 .31 .32 ‐.19 (.86)

10. JP‐A .19 ‐.12 ‐.03 ‐.32 .29 .46 .28 ‐.42 .53 (.91)

11. JP‐P .24 ‐.15 .10 ‐.32 .38 .40 .41 ‐.38 .68 .76 (.94)

M 41.1 2.83 3.23 3.32 2.94 2.81 3.20 3.26 2.94

ÉT 8.4 .99 1.02 .95 .93 .94 .98 .93 .92

Note.Temps:n=153;lescorrélations>|,16|sontsignificativesàp<0,05.Temps2:n=100;lescorrélations>|,19|sontsignificativesàp<0,05.LesalphadeCronbachsontsurladiagonale.Femme=1,Homme=2.bNombred’heuresdetravailparsemaine.cÉpuisementprofessionnel.dJusticedistributive.eJusticeprocédurale–application.fJusticeprocédurale–participation.

Statistiquesdescriptives,corrélationsdePearsonetalphadeCronbach

Tableau4Régressionsmultiplespourvérifierl’apportexplicatifduchangementdejusticeorganisationnelleauchangementd’épuisementprofessionnel

Variables Épuisementprofessionnel

Bloc1(β) Bloc2(β)

Genre ‐.04 .07

Niveaudescolarité .02 .00

Nombred’heuresdetravail .09 .07

Justiceorganisationnelle(méthodepasàpas)

JP‐AJDetJP‐P

‐.26*ns

Varianceexpliquée(R2) 1.2% 7.8%

R2 5.6%

Note.n=100,* :p<.05

 

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Discussion

La présente étude visait à introduire, puis àdéterminersilaperceptiondejusticeprocédurale(JP)relative aux opportunités en milieu de travail estdavantage déterminante dans la prédiction del’épuisement professionnel que la perception dejusticedistributive(JD).Nosrésultatssuggèrentqueleprocessusparlequellesopportunitéssontattribuées(JP) aurait une influence plus importante surl’épuisement professionnel que le résultat del’attributionmêmedesopportunités(JD).Cesrésultatssoutiennentl’hypothèseposéeetsontcohérentsavecceuxdeLambertetal.(2010).

Plus précisément, les résultats montrent que lestravailleurs qui perçoivent les procéduresd’attributiondesopportunitéscommeétant justesetéquitables (JP‐A) sont moins à risque de vivre del’épuisementprofessionnel,etce,indépendammentdeleurimplicationdansleprocessusdécisionnel(JP‐P).Cetteprécisionadécouléd’uneanalysefactoriellequisuggère que la JP se développe en deux sous‐construits.Cesrésultatsdiffèrentdeladocumentationoù ilyagénéralementconsensusàconceptualiseretopérationnaliserlaJPenunconstruitunidimensionnel(Colquitt,2001).

Parailleurs,cetteétudemontrequeleniveaudeJP‐Aest prédictif de l’épuisement professionnel. Cecipourrait être expliqué par le fait que l’impartialitéprésentedanslamiseenplacedesprocédures(JP‐A)puisseavoirunimpactsurlesentimentdecontrôledestravailleurs.Àceteffet, la théoriede l’échangesocial(Blau,1964)stipulequ’unefaibleperceptiondejusticerésideraitdansl’écartentrelesattentesdel’individuetlasituationréelle,considéréeinjuste.Ennerépondantpasauxattentesdesindividus,unefaibleperceptiondejusticepourraitmeneràunediminutiondusentimentdecontrôlequi,dansuncontexteorganisationnel,estune variable associée à l’épuisement émotionnel(Karasek,1979;Karasek,1990).

Surleplanpratique,lesrésultatssuggèrentquedesinterventionsauniveauorganisationnelpuissentêtreefficaces pour diminuer les risques d’épuisementprofessionnel. Les gestionnaires pourraient trouverdes bénéfices à se pencher sur la manière dont lesprocédures sont mises en place dans l’organisation.Pour ce faire, l’organisation doit faire preuve detransparencedanssespolitiquesenmatièredegestiondesprocéduresd’attributiond’opportunités.Decefait,lesdémarchesd’implantationdeprocéduresainsiquela raison sous‐tendant celles‐ci devraient être

communiquées aux travailleurs afin que ceux‐cipuissentjuger,entreautres,deleurimpartialitéetleurcohérence. Par exemple, le partage d’informationconcernant toute nouvelle politique sur lesopportunités offertes aux employés serait unepratiquebénéfiqueàimplanter.

Enfin, certaines limites méthodologiques méritentd’être discutées. La première tient à l’échantillon deconvenance qui peut limiter la généralisation desrésultats. En effet, l’échantillon n’est pasnécessairement représentatif de la populationgénérale étant donné qu’il représente l’entouraged’étudiants de niveau universitaire. Une deuxièmelimite a trait au caractère auto‐rapporté desquestionnaires, ce qui augmente le risque dedésirabilité socialeetdebiaisdevariancecommune.Une dernière limite concerne l’adaptation del’instrument de la justice organisationnelle. Quoiquesonadaptationapparaisseappropriéepourlamesuredu construit de justice relative aux opportunités,aucuneétuden’aformellementtraitédesespropriétéspsychométriques.

Conclusion

Cetteétudeest,ànotreconnaissance,lapremièreàproposer une adaptation de l’instrument de Colquitt(2001) pour mesurer la perception de justice parrapportauxopportunitésenmilieudetravail,c’est‐à‐dire un type de récompense stimulante telle quel’obtentiond’unepromotion.Deplus,contrairementàd’autresétudesadressant la justiceorganisationnelleetl’épuisementprofessionnel,lemodèled’épuisementprofessionneldeShirometMelamed(2006)aétémisenlienspécifiquementaveclesopportunitésenmilieude travail, ce qui permet une compréhension pluspousséeetunchampd’actionplusdiversifiéequantàlajusticeorganisationnelle. Deplus,ladistinctiondelaJP‐AetdelaJP‐Pdanslaprédictiondel’épuisementprofessionnel est susceptible d’offrir une orientationplus précise en vue d’interventions en milieuorganisationnel

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