3 arts visuels // la peinture > fiche n°18....
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Rome début du XVIIe siècle L‘apothéose de l’art baroque italien Caravage, artiste de génie, ca- pable de réaliser une œuvre de grand format en moins de trois mois en peignant directement sur la toile sans même esquisser ses personnages, fut à l’origine de la fin du maniérisme. S’opposant à la façon de peindre de ses aînés, il imposa un nouveau langage réaliste, théâtral, choisissant dans chaque sujet l’instant le plus dramatique. Refusant les codes de la peinture d’histoire (mythologique ou religieuse), il pratiqua la copie d’atelier (Imitatio) avec une impertinence notoire. Il utilisait, pour représenter ses personna- ges, des modèles choisis dans la rue qu’il peignait avec la plus grande exactitude. Caravage proclama la primauté de la nature et de la vérité, a contrario des codes définis par la Renaissance, . Ce manque de « dignité » et cette recherche passionnée du réalisme poétique, notamment dans ses tableaux religieux, fi- rent scandale. Ses scènes de nuit, traversées par une lumière latérale, révolutionnaire pour l’époque, mode- lant les corps au moyen des contrastes de lumières et d’ombres, furent souvent refusées par des commandi- taires peu ouverts à ces transformations radicales de la tradition picturale. Caravage, considéré comme le véritable fondateur du genre de la nature morte et de la peinture de genre en Europe du Sud, modifia profondément le rapport existant entre l’artiste et l’objet de son regard. Il s’agit pour lui de peindre ce qu’il voit. Le Caravage (Michelangelo Merisi dit) (1571-1610) Tête de Méduse v.1598 - 1599 Huile sur toile marouflée sur un bouclier en bois de peuplier 60 x 55 cm Galerie des Offices, Florence "Méduse et l’artiste ont en commun le pouvoir de figer les personnes, de les immobiliser dans la roche ou sur la toile en une image intemporelle : le portraitiste méduse son modèle pour l’éternité. Tête de Méduse du Ca- ravage met en avant cette analogie, qui se représente en effet sous les traits de la Gorgone et, qui, récipro- quement, prête à la Gorgone son visage. Le Caravage se fige sur la toile telle Méduse se médusant elle- même. Méduse meurt ici deux fois : une fois d’être figée par le peintre, une seconde de sa mort mythologique. Le Caravage, en effet, capte l’instant où Persée décapite la Gorgone, car le héros a pu échapper au terrible regard de Méduse en ne regardant que le reflet de celle-ci sur son bouclier (l’« envisager » directement eût été fatal). Le tableau fait donc corps avec ce bouclier - l’artiste utilisa d’ailleurs comme support un véritable bouclier de bois. Dans cette mise en scène, il nous reste à savoir qui tient le rôle de Persée. Persée qui voit ce que montre la toile ne peut être que le regardeur. Or, ce regardeur est précisément le premier regardeur : l’artiste. Par où il apparaît que l’acte de peindre coïncide ici avec le meurtre. L’artiste s’apprête à peindre Méduse ; en regardant la surface de son tableau, il est dans la position de Persée qui regarde la surface de son bouclier. La surface de toile, valant un miroir, ne peut que renvoyer à qui se trouve face à elle : Le Cara- vage est aussi Méduse. Cette toile mythologique est nécessairement un autoportrait de l’artiste se décapitant lui-même… Ces deux individus ne font qu’un, mais l’Italie d’alors cherchait à les distinguer : d’un côté l’artiste, de l’autre l’homme. La vie de ce dernier mit de nombreuses fois en péril celle de l’artiste. Ce dernier, dans ses œuvres, revendiquait l’identité entre lui et lui-même, identité qui lui était refusée à travers le rejet de nombreuses toiles jugées vulgaires, autrement dit, trop proches de l’homme qu’il était…" Extrait de Miroir, mon beau miroir de Bruno Trentini. Mots clefs, points d’ancrage pour l’étude de l’oeuvre Peinture mythologique Autoportrait Réalisme Ombre et lumière 3 Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIX ème siècle XX ème siècle et notre époque arts visuels // la peinture > fiche n°18.1 3 Rapport au cadre Symbolique Représentation de sentiment H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010 "Au lendemain de la Renaissance, ce qui commence avec Caravage, c’est tout simplement la peinture moderne" André Berne-Joffroy, Le Dossier Caravage, Éditions de Minuit
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Rome début du XVIIe siècle L‘apothéose de l’art baroque italien
Caravage, artiste de génie, ca-pable de réaliser une œuvre de grand format en moins de trois mois en peignant directement sur la toile sans même esquisser ses personnages, fut à l’origine de la fin du maniérisme. S’opposant à
la façon de peindre de ses aînés, il imposa un nouveau langage réaliste, théâtral, choisissant dans chaque sujet l’instant le plus dramatique. Refusant les codes de la peinture d’histoire (mythologique ou religieuse), il pratiqua la copie d’atelier (Imitatio) avec une impertinence notoire. Il utilisait, pour représenter ses personna-ges, des modèles choisis dans la rue qu’il peignait avec la plus grande exactitude. Caravage proclama la primauté de la nature et de la vérité, a contrario des codes définis par la Renaissance, . Ce manque de « dignité » et cette recherche passionnée du réalisme poétique, notamment dans ses tableaux religieux, fi-rent scandale. Ses scènes de nuit, traversées par une lumière latérale, révolutionnaire pour l’époque, mode-lant les corps au moyen des contrastes de lumières et d’ombres, furent souvent refusées par des commandi-taires peu ouverts à ces transformations radicales de la tradition picturale. Caravage, considéré comme le véritable fondateur du genre de la nature morte et de la peinture de genre en Europe du Sud, modifia profondément le rapport existant entre l’artiste et l’objet de son regard. Il s’agit pour lui de peindre ce qu’il voit.
Le Caravage (Michelangelo Merisi dit) (1571-1610) Tête de Méduse v.1598 - 1599 Huile sur toile marouflée sur un bouclier en bois de peuplier 60 x 55 cm Galerie des Offices, Florence
"Méduse et l’artiste ont en commun le pouvoir de figer les personnes, de les immobiliser dans la roche ou sur la toile en une image intemporelle : le portraitiste méduse son modèle pour l’éternité. Tête de Méduse du Ca-ravage met en avant cette analogie, qui se représente en effet sous les traits de la Gorgone et, qui, récipro-quement, prête à la Gorgone son visage. Le Caravage se fige sur la toile telle Méduse se médusant elle-même. Méduse meurt ici deux fois : une fois d’être figée par le peintre, une seconde de sa mort mythologique. Le Caravage, en effet, capte l’instant où Persée décapite la Gorgone, car le héros a pu échapper au terrible regard de Méduse en ne regardant que le reflet de celle-ci sur son bouclier (l’« envisager » directement eût été fatal). Le tableau fait donc corps avec ce bouclier - l’artiste utilisa d’ailleurs comme support un véritable bouclier de bois. Dans cette mise en scène, il nous reste à savoir qui tient le rôle de Persée. Persée qui voit ce que montre la toile ne peut être que le regardeur. Or, ce regardeur est précisément le premier regardeur : l’artiste. Par où il apparaît que l’acte de peindre coïncide ici avec le meurtre. L’artiste s’apprête à peindre Méduse ; en regardant la surface de son tableau, il est dans la position de Persée qui regarde la surface de son bouclier. La surface de toile, valant un miroir, ne peut que renvoyer à qui se trouve face à elle : Le Cara-vage est aussi Méduse. Cette toile mythologique est nécessairement un autoportrait de l’artiste se décapitant lui-même… Ces deux individus ne font qu’un, mais l’Italie d’alors cherchait à les distinguer : d’un côté l’artiste, de l’autre l’homme. La vie de ce dernier mit de nombreuses fois en péril celle de l’artiste. Ce dernier, dans ses œuvres, revendiquait l’identité entre lui et lui-même, identité qui lui était refusée à travers le rejet de nombreuses toiles jugées vulgaires, autrement dit, trop proches de l’homme qu’il était…" Extrait de Miroir, mon beau miroir de Bruno Trentini.
Mots clefs, points d’ancrage pour l’étude de l’oeuvre
Peinture mythologique Autoportrait Réalisme Ombre et lumière
3 Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIXème siècle XXème siècle et notre époque
arts visuels // la peinture > fiche n°18.1 3
Rapport au cadre Symbolique Représentation de sentiment
H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010
"Au lendemain de la Renaissance, ce qui commence avec Caravage, c’est tout simplement la peinture moderne" André Berne-Joffroy, Le Dossier Caravage, Éditions de Minuit
Analyse comparative
A voir dans l’Oise et en Picardie
Des repères , s’interroger sur
. Les moyens en œuvre pour exprimer plastiquement un état d’âme . La place et le rôle de la lumière . Les gammes de couleur . Le cadrage : effet et symbolique . L’autoportrait
Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIXème siècle XXème siècle et notre époque
arts visuels // la peinture > fiche n°18.2 3
Le Caravage Tête de Méduse
v.1598 - 1599 Huile sur toile
60 x 55 cm Galerie des Offices, Florence
Jean-Auguste-Dominique Ingres, Autoportrait, 1804 , Musée Condé, Chantilly Maurice Quentin de La Tour, Autoportrait, vers 1740; Simon Vouet, Autoportrait, vers 1620, Musée de Picar-die, Amiens
Liens avec les domaines artistiques
Photographie : Pierre et Gilles, Méduse - Zuleika, 1990. Différents aspects de l’Autoportrait : Pablo Picasso, Arnulf Rainer, Vincent van Gogh, Cindy Sherman... Arts Premiers : Les boucliers africains et océaniens (cuir, bois…). Littérature jeunesse : Persée et Méduse, Christine Palluy et Aurélia Fronty Éditions Milan Sculpture : Les bustes de caractères de Franz Xaver Messerschmidt, après 1770
Filiations et repères historiques
Titien Michel-Ange
c.1490-1576 1475 - 1564
1563 Début de la
Contre-Réforme
Manièrisme
H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010
Gustave Courbet Portrait de l'artiste dit Le Désespéré 1843 1845 Huile sur toile 45x54 cm Collection particulière
1637 Descartes écrit le
Discours de la méthode : "Je pense donc je suis"
Les caravagistes d’Utrecht
XVIIe siècle
1607 Monteverdi crée son
opéra Orfeo à Mantoue
Georges de La Tour
1593 - 1652
Baroque
Théodore Géricault
1791 - 1824
arts visuels // la peinture > fiche n°18.3 3 Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIXème siècle XXème siècle et notre époque
Vers la pratique plastique
Quelques pistes autour de l’autoportrait
Bibliographie, sites, DVD
La série Chaque élève choisit (devant miroir) divers sentiments qu’il essaye de traduire par des expressions de visage. Il décide d’un cadrage de prise de vue et, avec l’aide d’un camarade, règle l’appareil photo posé sur pied. Les photographies seront réalisées à l’aide de la fonction « retardateur » de l’appareil photo. Autoportrait en héros Chaque élève se fait photographier dans une posture caractérisant le héros qu’il veut incarner (s’appuyer éventuellement sur des images de BD, films ou œuvres d’art) et exprimant un sentiment ou un trait de ca-ractère caractéristique du personnage. Il réalise ensuite une mise en scène en réunissant par collage : un fond approprié (image de maga-zine par exemple), la découpe du contour de la posture choisie sur la photographie imprimée ainsi que les accessoires (découpés ou dessi-nés) nécessaires. Objets Les élèves choisissent un objet avec lequel ils ont établi une relation af-fective forte. Devant un miroir, ils décident d’une posture révélant ce rapport privilégié. La photographie permettra de conserver une trace de ces productions éphémères.
Caravage, Gilles Lambert, Éditions Tashen http://www.bergerfoundation.ch/Caravage/F/index.html: découvrir l’artiste Le Caravage, Maîtres de l’Art italien, Eberhard König, Éditions Könemann http://mythologiesetlegendes.ifrance.com/lesmythes.htm
H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010
Exprimer un sentiment L’autoportrait La série Le cadrage La mise en scène
Masque d’horreur Jean Carriès
1891 Grès émaillé
David et la tête de Goliath Le Caravage 1606
Huile sur toile
La naissance de Christian (détail) Christan Boltanski
1974 Photographie
Sur le chemin du retour vers Sériphos, il délivra Andromède qui deviendra sa femme. Arrivé devant Poly-dectès et ses partisans, il sortit la tête de la Gorgone qui les pétrifia instantanément. Le héros, qui passa le reste de sa vie dans la paix et la prospérité, remit la tête de Méduse à Athéna qui la porta désormais sur un bouclier pour pétrifier ses ennemis.
Persée et Méduse
arts visuels // la peinture > fiche n°18.4
Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIXème siècle XXème siècle et notre époque
Persée est le fils de Zeus, métamorphosé en pluie d’or, et de Danaé. Il grandit à Sériphos, une île de la mer Égée où régnait Polydectès. Polydectès s'éprit de Danaé mais elle refusa ses avances. Il invita alors tous les nobles de l’île à un banquet et exigea que chacun lui offrît un cheval. Le pauvre Persée dé-clara en plaisantant qu'il pouvait se procurer la tête de l'une des trois Gorgones - monstres redoutables à la chevelure de serpents - aussi facilement qu'un cheval. Polydectès le prit au mot, content d'éloigner le protecteur de Danaé en lui confiant une mission apparemment impossible.
Hermès et Athéna vinrent au secours de Persée. Le héros fut d'abord envoyé aux Grées, trois vieilles femmes, qui seules pouvaient le diriger vers les Gorgones. Comme elles n'avaient qu'un oeil et une dent pour elles trois, il leur déroba afin d'obte-nir les renseignements nécessaires. Elles lui suggérèrent de se rendre chez des nymphes qui lui donneraient un casque pour se rendre invisible, des sandales ailées et un sac de cuir. Her-mès lui offrit en outre une épée recourbée et Athéna, un bou-clier poli comme un miroir. Persée put s'envoler vers les Gorgo-nes. L'une d'elles, Méduse, était mortelle mais ceux qui ren-contraient son regard étaient pétrifiés sur le champ.
Persée vola au-dessus des Gorgones endormies et tendit de-vant elles le bouclier lui permettant d’observer Méduse sans jamais la regarder en face. Le bras guidé par Athéna, il la dé-capita et mis sa tête dans son sac.
H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010
Persée délivrant Andromède Piero di Cosimo 1513
Persée tenant la tête de Méduse Benvenuto Cellini, 1545
Danaë, Gustav Klimt, 1908
Anonyme Tête de Méduse XVIe siècle Huile sur bois 49 x 74 cm Galleria degli Uffizi Florence
Peter Paul Rubens et Frans Snyders La tête de Méduse
vers 1617 Huile sur bois 68 x 118 cm
Kunsthistorisches Museum, Vienne
Arnold Bocklin Bouclier avec visage de Méduse après 1887 Papier mâché d.61 cm Musée d’Orsay
3 arts visuels // > fiche n°18.5 3 Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIXème siècle XXème siècle et notre époque
H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010
Œuvre à rapprocher de
Le Bernin Buste de Méduse
1630 Marbre, h.68 cm
Musée du Capitole, Rome
la peinture > fiche n°18.6 3 Préhistoire et Antiquité Moyen Âge Temps Modernes XIXème siècle XXème siècle et notre époque
arts visuels //
Henri Cueco, Autoportraits, 2002, Fragments peints sur toile
écrue, 73X60 cm
Albrecht Durer Tête de Christ mort (Autoportrait)
1503, Fusain, 25 x 13 cm
Arnulf Rainer Face Farce (2)
1970 Photographie retravaillée
60X48 cm
Pablo Picasso Autoportrait
Mougins, 30 juin 1972 Crayons sur papier
65.7 x 50.5 cm
Franz Xaver Messerschmidt Tête de caractère (détail)
1770 - 1783 Marbre
Hauteur 40 cm Christian Boltanski
Saynètes comiques - Maman chante joyeux anniversaire,
1974 Photographie colorée
42 x 60 cm
Rembrandt Harmenszoon van Rijn Autoportrait aux yeux hagards,
1630, Eau forte et burin 50 x 43 mm
Petite collection d’autoportraits
H.Hemme-F.Jouin-D.Pelletier— apm1— Inspection académique de l’Oise-2010
