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A ujourd’hui, partout dans le monde, les lecteurs ont soif d’histoires différentes. Des his- toires porteuses d’espoirs, de solutions concrètes, tant au niveau local que global. Ils recherchent les signes d’un changement auquel ils peuvent s’identifier. Un change- ment qui les fasse réfléchir… et agir. Ici les médias ont un rôle-clé : alerter et parta- ger ces idées. C’est ce que nous appelons l’impact journalism ou « journalisme de solutions ». Ces sujets sont souvent difficiles à trouver. Comme dit le proverbe, « un arbre qui tombe fait beaucoup de bruit, mais la forêt qui germe, on ne l’entend pas ». C’est pour cela que Sparknews vient en appui des médias, en dénichant pour eux des histoi- res qui peuvent changer notre monde. Nous avons donc proposé aux grands médias le défi de relayer davantage de solu- tions inspirantes. 22 journaux leaders (La Stam- pa, Politiken, The Times, etc.) ont répondu à notre appel. Et aujourd’hui, dans 20 pays, 50 millions de lecteurs peuvent découvrir des suppléments consacrés aux solutions. D’autres souhaitent nous rejoindre, et nous prévoyons 100 médias (journaux, télévisions, radio) pour l’édition prochaine. L’opération est collaborative : l’équipe de Sparknews a préparé une base d’articles origi- naux, et les journaux, à leur tour, ont trouvé et partagé des projets innovants dans leur pays. Chaque rédaction a fait une sélection pour ses lecteurs. Sparknews souhaite que les pages que vous découvrez aujourd’hui soient le début d’une lon- gue aventure ensemble. A l’issue de cette opéra- tion, nous réunirons les rédacteurs en chef parte- nairespour partagerles bonnespratiques et déve- lopper de nouvelles collaborations régulières. Les médias ont joué le jeu. Et nous ? Nous, citoyens, sommes-nous relais des solutions ? Un père de famille se plaignait de voir son fils décrocher et ne plus avoir confiance dans notre monde… jusqu’au jour où il réalisa qu’il lui par- lait toujours de ses problèmes de travail, de la crise ou des scandales politiques. A défaut d’être journalistes, nous sommes des médias. Nous avons la capacité de transmettre des informations qui élèvent et donnent espoir. Et si, tout à l’heure, vous montriez donc ces pages à un collègue ? A vos enfants ? Et si vous partagiez sur les réseaux une vidéo d’un projet inspirant découvert sur Sparknews ? Et si vous deveniez vous aussi acteur du changement en partageant les solutions ? Rejoignez-nous sur sparknews.com ou, si vous voulez contribuer : [email protected]. Merci, et bonne lecture ! p Christian de Boisredon fondateur de Sparknews [email protected] POURQUOI L’IMPACT JOURNALISM DAY ? C ’est bien connu : les journalistes ont du mal à don- ner des bonnes nouvelles ; du mal à raconter des histoires de réussite ou à par- ler d’initiatives optimistes. Ils ont été formés ainsi et, pour les plus vieux d’entre eux, ont été échaudés par la mode des « success stories » des années 1980-1990, emportées par la tourmente de la première bul- le Internet. Pourtant, tendez bien l’oreille, observez attentivement ce qui se passe. Les choses bougent. Dans les forums et les conféren- ces qui se multiplient, ces derniers temps, partout en France s’expri- ment des porteurs de projets d’un nouveau genre. Ils parlent, sans idéo- logie, sans théoriser et avec des mots de tous les jours, d’initiatives originales, pragmatiques ; ils cher- chent avant tout à être utiles, à don- ner du sens à leur action profession- nelle ou entrepreneuriale. Lors du récent forum Changer d’ère à la Cité des sciences à Paris, on les a rencontrés, ces rejetons de la génération Y, ces « Internet nati- ves », sans autre utopie que celle du partage et de l’éthique de la solidari- té. Ils ne veulent pas changer le mon- de avec des grandes idées, ils veu- lent changer la vie autour d’eux (ou loin d’eux, car c’est une génération « globale »), avec des idées nouvel- les, très concrètes, mélangeant le bri- colage et les réseaux, la générosité et les nouveaux médias. Ces gens-là sont difficiles à repé- rer. Ils communiquent peu et unique- ment quand leur projet fonctionne. Pour raconter leur histoire, il faut une autre approche journalistique, une curiosité différente – entre les lignes, loin des institutions –, fon- dée sur des enquêtes, parfois empa- thiques, certes, mais qui cherchent à mesurer vraiment ce qui est fait, et à le partager. A le faire savoir pour que ça serve… Partout dans le monde, des journaux, des blogs, des sites se lancent dans ce nouveau journa- lisme pour tenter de repérer des solutions pour demain qui fonction- nent déjà aujourd’hui, dans tous les domaines, de l’économie à la santé, de l’éducation au loisir, du dévelop- pement durable au développement tout court. Ce mouvement mondial, appelé, faute de mieux, « journalisme d’im- pact » (impact journalism), Le Monde a voulu en faire partie aux côtés de 21 journaux de cinq continents. Sa force vient en partie du réseau, mais aussi de l’approche différente mise en œuvre – certains parleront même d’éthique. Cette première édition présen- tant des acteurs du changement ori- ginaux se veut très diverse dans les sujets abordés. Il s’agit de faire pas- ser l’énergie mesurée dans toutes ces rencontres, à travers de nom- breux cas touchant des pays pau- vres ou riches, en guerre ou en paix, en crise ou en reprise économique. Les histoires racontées dans les pages qui suivent et sur notre site Lemonde.fr sont volontairement ciblées, limitées en apparence, mais jamais anecdotiques. Certains y trouveront de quoi se ragaillardir un peu, d’autres y repéreront des pis- tes d’engagement ou de business alternatif. Regardez autour de vous. Des his- toires comme ça, il y en a beaucoup, il suffit de les chercher. Nous sommes aussi là pour ça. p Didier Pourquery DES HISTOIRES AVEC DU SENS, DANS LE SENS DE L’HISTOIRE « Le Monde » s’est associé à Sparknews et à un réseau de 22 journaux pour le premier « Impact Journalism Day ». Objectif : faire connaître des porteurs de projets différents qui, à leur manière, œuvrent pour une vie meilleure. ACTEURS DU CHANGEMENT Cahier du « Monde » N˚ 21284 daté Mardi 25 juin 2013 - Ne peut être vendu séparément

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Aujourd’hui, partout dans lemonde, les lecteurs ont soifd’histoiresdifférentes.Deshis-toires porteuses d’espoirs, desolutions concrètes, tant auniveau local que global. Ils

recherchent les signes d’un changementauquel ils peuvent s’identifier. Un change-ment qui les fasse réfléchir… et agir.

Ici lesmédias ont un rôle-clé: alerter et parta-gercesidées.C’estcequenousappelonsl’impactjournalismou«journalismede solutions».

Ces sujets sont souvent difficiles à trouver.Comme dit le proverbe, «un arbre qui tombefaitbeaucoupdebruit,mais la forêtquigerme,on ne l’entend pas».

C’estpourcelaqueSparknewsvientenappuides médias, en dénichant pour eux des histoi-res qui peuvent changernotremonde.

Nous avons donc proposé aux grandsmédias le défi de relayer davantage de solu-tionsinspirantes.22 journauxleaders(LaStam-pa, Politiken, The Times, etc.) ont répondu ànotre appel. Et aujourd’hui, dans 20 pays,50millions de lecteurs peuvent découvrir dessuppléments consacrés aux solutions.D’autres souhaitent nous rejoindre, et nousprévoyons 100médias (journaux, télévisions,radio) pour l’éditionprochaine.

L’opération est collaborative : l’équipe deSparknews a préparé une base d’articles origi-naux,et les journaux,à leur tour,ont trouvéet

partagé des projets innovants dans leur pays.Chaque rédaction a fait une sélection pour seslecteurs.

Sparknews souhaite que les pages que vousdécouvrezaujourd’huisoientledébutd’unelon-gue aventure ensemble. A l’issue de cette opéra-tion,nousréunironslesrédacteursenchefparte-nairespourpartagerlesbonnespratiquesetdéve-lopperdenouvellescollaborationsrégulières.

Les médias ont joué le jeu. Et nous? Nous,citoyens, sommes-nous relais des solutions?Un père de famille se plaignait de voir son filsdécrocheretneplusavoir confiancedansnotremonde…jusqu’au jouroù il réalisaqu’il lui par-lait toujours de ses problèmes de travail, de lacriseoudes scandalespolitiques.

Adéfautd’êtrejournalistes,noussommesdesmédias. Nous avons la capacité de transmettredes informationsqui élèventetdonnentespoir.

Et si, tout à l’heure, vous montriez donc cespages à un collègue? A vos enfants? Et si vouspartagiez sur les réseauxune vidéo d’un projetinspirant découvert sur Sparknews? Et si vousdeveniez vous aussi acteur du changement enpartageant les solutions?

Rejoignez-nous sur sparknews.com ou, sivousvoulez contribuer:[email protected].

Merci, et bonne lecture! pChristiandeBoisredon

fondateurde [email protected]

POURQUOI L’IMPACT JOURNALISM DAY ?

C’est bien connu:les journalistesontdumalàdon-ner des bonnesnouvelles ; dumal à raconterdes histoires deréussiteouàpar-

ler d’initiatives optimistes. Ils ontété formés ainsi et, pour les plusvieux d’entre eux, ont été échaudéspar la mode des « success stories»des années 1980-1990, emportéespar la tourmentede la premièrebul-le Internet. Pourtant, tendez bienl’oreille, observez attentivement cequi se passe. Les choses bougent.

Dans les forums et les conféren-ces qui se multiplient, ces derniers

temps, partout en France s’expri-ment des porteurs de projets d’unnouveaugenre. Ilsparlent,sansidéo-logie, sans théoriser et avec desmots de tous les jours, d’initiativesoriginales, pragmatiques ; ils cher-chent avant tout à être utiles, à don-ner du sens à leur actionprofession-nelle ou entrepreneuriale.

Lors du récent forum Changerd’èreà la Cité des sciences à Paris, onles a rencontrés, ces rejetons de lagénération Y, ces « Internet nati-ves», sans autre utopie que celle dupartageet de l’éthiquede la solidari-té. Ilsneveulentpaschanger lemon-de avec des grandes idées, ils veu-lent changer la vie autour d’eux (ouloin d’eux, car c’est une génération

«globale»), avec des idées nouvel-les, trèsconcrètes,mélangeantlebri-colageet les réseaux, lagénérositéetles nouveauxmédias.

Ces gens-là sont difficiles à repé-rer.Ilscommuniquentpeuetunique-ment quand leur projet fonctionne.

Pour raconter leur histoire, il fautune autre approche journalistique,une curiosité différente – entre leslignes, loin des institutions –, fon-dée sur des enquêtes, parfois empa-thiques, certes,maisqui cherchentàmesurervraiment cequi est fait, et àlepartager.A le faire savoirpourqueça serve… Partout dans le monde,des journaux, des blogs, des sites selancent dans ce nouveau journa-lisme pour tenter de repérer des

solutionspourdemainqui fonction-nent déjà aujourd’hui, dans tous lesdomaines, de l’économie à la santé,de l’éducation au loisir, du dévelop-pement durable au développementtout court.

Ce mouvement mondial, appelé,faute demieux, « journalisme d’im-pact» (impact journalism),LeMondea voulu en faire partie aux côtés de21 journaux de cinqcontinents. Saforcevient enpartiedu réseau,maisaussi de l’approche différente miseenœuvre–certainsparlerontmêmed’éthique.

Cette première édition présen-tant des acteurs du changement ori-ginaux se veut très diverse dans lessujets abordés. Il s’agit de faire pas-

ser l’énergie mesurée dans toutesces rencontres, à travers de nom-breux cas touchant des pays pau-vres ou riches, en guerre ou en paix,en crise ou en reprise économique.Les histoires racontées dans lespages qui suivent et sur notre siteLemonde.fr sont volontairementciblées, limitées en apparence,maisjamais anecdotiques. Certains ytrouveront de quoi se ragaillardirunpeu,d’autresyrepérerontdespis-tes d’engagement ou de businessalternatif.

Regardez autour de vous. Des his-toires comme ça, il y en a beaucoup,il suffit de les chercher.

Nous sommesaussi là pour ça. pDidierPourquery

DES HISTOIRES AVEC DU SENS, DANS LE SENS DE L’HISTOIRE

«LeMonde»s’estassociéàSparknewsetàunréseaude22 journauxpour lepremier«Impact JournalismDay».Objectif: faireconnaîtredesporteursdeprojetsdifférentsqui, à leurmanière,œuvrentpouruneviemeilleure.

ACTEURS DU CHANGEMENT

Cahier du «Monde »N˚ 21284 datéMardi 25 juin2013 - Ne peut être vendu séparément

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acteurs du changement PARTAGER

Pour acheter deux moutons, MahaAmer,45ans,avaitbesoinde300euros.Carole Younèsa décidéde soutenir cet-te microentreprise du Proche-Orient.

Depuis des années, elle consacre 2,5% de sonbudget à la philanthropie. «Avant, je le don-nais,maisleconceptdeBabyloan.orgm’asédui-te.Onchoisitsonprojet,onadesretoursd’infor-mation sur l’utilisation des fonds et sur sonimpact social.»

Premier site européendemicrocrédits soli-daires,quiavocationàréduirelaprécarité,voi-re lapauvretédans lemonde,Babyloan.orgestune plate-forme de crowdfunding (finance-mentpar les particuliers)demicroentreprisesenFranceetà l’international.L’internauteprê-teauminimum20eurosàtauxzéro.Lesfondssont versés à un institut de microfinance(IMF), qui accompagne le projet et en assumeles risques financiers. Née en 2008, sur lemodèle de l’américainKiva, numérounmon-dial de microcrédits entre particuliers, Baby-loanest déjànumérodeux.

«Leprêtsolidairen’estpasdel’épargne,maisunenouvelle formedephilanthropie,explique

son fondateur, Arnaud Poissonnier. Son inté-rêt réside dans l’effet de levier qui permet,même avec une toute petite somme, d’investirdansdeux,troisouquatreprojetssuccessifs,voi-re davantage.»

Aujourd’hui, la «babyloanienne» CaroleYounès,aussidirectricefinancière,enestàson35e financementdeprojet dans l’agriculture etle commerce pour «développer de nouvellessources de revenus». Après Maha, il y a euSuhair, 39 ans, six enfants, qui cherchait270euros pour son exploitation d’agrumes,puisToffaha,61ans,quivoulait270eurospouragrandir sonépicerie.«Chaquemois, je choisisunprojet.L’échéanceduprêtestdequatreàdix-huitmois.Quandje suis remboursée, je réinves-tis», témoigne Carole Younès. Comme elle,70% des internautes réengagent les sommesrestituées.ABabyloan,unprêtestaccordétou-teslesdixminutes.Seuls9,5%desprêteurssor-tent leursfondsdusystème.«Pour le reste, l’ar-gentdort», préciseM.Poissonnier.

En cinq ans, Babyloana collecté 5,7millionsd’euros et parrainé 13750microentreprisesdans14pays,à85%dansleSudetà15%enFran-

ce.L’apportducrowdfundingpermetderédui-re les tauxd’intérêt des IMF, qui restent toute-fois de 9% à 28% par an. Le montant moyendesfinancementsestde450eurospourunpro-jetduSud,etde3000eurospouruneentrepri-se duNord. A Saint-Ouen, près de Paris, PierreBattelier, bénéficiaire, a ainsi pu acheter lematériel pour sa coopérative d’éducation àl’image, Les petits cinéastes, qui organise desateliers de découverte desmétiers du cinémaetde l’audiovisuel.

Mais«lerêvedelafinanceparticipativepeutvite se transformer en cauchemar pour l’inter-naute»,met en gardeArnaudPoissonnier. Cetancien banquier rappelle que, sur les 800pla-tes-formes créées dans le monde, il s’est déjàtrouvé des indélicats qui sont partis avec lacaisseouquin’ontpasplacél’argentsur lepro-jet retenu.Deplus,«si l’institutdemicrofinan-ce fait faillite, l’argent ne peut pas être récupé-ré». Un vrai risque, dont les internautes sontinforméssur le site.Depuis2008, ils sontmal-gré tout 25000 babyloaniens à avoir tentél’aventure. p

AnneRodier («LeMonde»)

Avez-vous déjà entendu parlerdela«consommationcollabo-rative»? Depuis la publica-tiondubest-sellerdelaBritan-nique Rachel Botsman, Wha-t’sMine Is Yours (Collins, 2011,

non traduit, «Ce qui est à moi est à toi»), quidécrypte la «croissance exponentielle des for-mesde revente,de location,departage,detroc,d’échange, permise par les nouvelles technolo-gies et notamment les technologies peer to

peer», le phénomène se diffuse très vite.Enavril, à SanFrancisco, s’est ainsi tenue la secon-deéditiondeTheMesh(«LeMaillage»),unévé-nement organisé par Lisa Gansky, autre pion-nière du secteur. Debut mai, le OuiShareFest,premier événement d’ampleur européenne àpromouvoir l’économiedupartage, a étéorga-nisé à Paris. L’événement a réuni trois joursdurant des entrepreneurs, des designers, deséconomistes, des investisseurs… Un moisaprès, la conférence Le Web, organisée les 5 et

6juin à Londres, promouvait l’économie dupartage.Bref,impossibled’ignorerlephénomè-ne. Et si vous ne voyez toujours pas de quoi ils’agit, les termes covoiturage, auto-partage,couchsurfing, Airbnb, jobbingou crowdfun-dingdevraientvousparlerdavantage.

Autotal, pasmoinsd’unmillierd’initiativessontréférencéessur l’annuairedusiteCollabo-rativeconsumption.com: «San Francisco, NewYork, Londres, Sydney, Berlin, Paris, Séoul et SaoPaulo sont les villes où s’observent le plus d’ini-

tiatives», commente Lauren Anderson, cofon-datricedu site avec Rachel Botsman.«Les paysles plus dynamiques sont ceux dont les écono-miesmatures,encrise,arriventdansuneimpas-se où austérité et relance économique ne fontpas bonménage. La France est dans le pelotonde tête avec un tissu entrepreneurial très denseet à la pointe des usages émergents», estimeEdwinMootoosamy,cofondateurdeOuiShare,une communauté internationale de promo-tionde l’économiecollaborativenée enFranceen janvier2012.

PourNealGorenflo, qui a co-créé lewebzineaméricain Shareable, l’économie du partageestpartout,maisavecunvisagedifférentàcha-que fois: «Paris est réputépour son systèmedevélos en libre-service, un succès qui a suscité unengouement mondial pour le partage de vélo.SanFrancisco est connupour l’usaged’applica-tionsWebetmobiles facilitant le partage.Mon-dragon, en Espagne, organisé en une corpora-tionde256entreprises,estunexempledemodè-le coopératif. Et dans les pays en développe-ment, lepartagefaitpartiedeshabitudesquoti-diennes!»

Solutions pour temps de criseCar, si le partage n’a rien de nouveau, le

numériqueenmodifielargementladonne:enprivilégiant l’accès plutôt que la propriété eten créant des modèles économiques fondéssur l’optimisation des usages et l’échangeentreparticuliers, laconsommationcollabora-tiveproposedessolutionsauxmodesdevieentemps de crise. Les premières start-up du sec-teur se développent depuis la crise financièrede2008.

Les plus grands succès s’observent notam-mentdans le secteurde la locationentreparti-culiers. En 2012, la plateformeAirbnb, qui per-met de louer l’appartement ou la chambred’unparticulierpouruntrèsbonrapportquali-té-prix, a ainsi rempli plus de chambres quetous les hôtels Hilton réunis. Le site propose300000annoncesactivesdans 192pays;plusde 4millions de voyageurs ont déjà séjournégrâce à ce biais. Le covoiturage est égalementtrès populaire. Blablacar, présent dans dixpays d’Europe, comptait 2,8millions demem-bres en janvier. Chaque mois, le site permetd’organiser400000trajets en commun.

Maintenant,«leplusgrospotentielconcernela financeentreparticuliers, le partagede com-pétences et la location d’objets», observe Lau-ren Anderson, qui précise que lesmodèles lesplusefficacesse rémunèrentpar les fraisd’uti-lisationouparlebiaisd’abonnements.«Laplu-part des start-up comptent sur les investisse-mentsde capital-risquepour lancer leurprojet,mais il y a quelques exemples qui se financentdemanièreparticipativeouensuivantdes logi-quesnoncommerciales», note la spécialiste.

En attendant, pour les nouveaux entrepre-neurs, l’enjeuestdouble:arriverrapidementàunemasse critique d’usagers et générer suffi-samment de confiance et de convivialité. Undéfidifficileà relever.En témoignela fermetu-re de Whipcar (acteur de l’auto-partage auRoyaume-Uni depuismars2010) enmars. Ouencore Neigh*Borrow, un service d’échangesdebiensentrevoisins,ouverten2006,quiadûfermersesportescetteannée, fautedemodèleéconomique adapté. Pour son cofondateurAdamBerk,«laplupartdesgensneveulentpaspartager. Ils veulent avant toutdes services quileur facilitent la vie». La révolutiondupartagedoitdonc encore trouver sesmarques.p

Anne-SophieNovel (Sparknews)

> Sur Lemonde.frhttp://alternatives.blog.lemonde.fr/

A umilieud’ungarage,unhom-me finit un clignotant à0,75dollar. Il sera intégré à la

SGT-01, voiture en cours de concep-tion chez Wikispeed, un construc-teur automobile au mode de fonc-tionnement unique, installé en ban-lieue de Seattle. La SGT-01 coûtera25000dollars, consommera 2,16 laux100km,etserapersonnalisableàsouhait. Ce véhicule écologique estassemblégrâceàunlogicielinforma-tique remplaçant la traditionnellechaînedemontage.

Wikispeedestuneentrepriseàbutnonlucratiffondéesurlevolontariat.Joe Justice, son fondateur, a présentésapremièrevoitureen2008.Longueetbasse, elle ressembleplusàunkartqu’à une voiture du futur. «Chaquevéhicule sera unique», explique-t-il.Cinq engins Wikispeed ont déjà étévendus,mais aucun n’a été livré. Lesacheteurs considèrent surtout leurachatcommeunplacement.

La SGT-01 est un exemple de ceque Joe Justice nomme « la gestion

agile», une organisation du travailqui intéresse autant le constructeurLockheedMartin que les universitésduMidwest.

A l’atelier, chacun choisit sa tâcheparmi celles affichées surun tableaublanc. Les différentes catégories dutableau («en production«», « encours», «en révision») sont parse-mées de Post-it décrivant les opéra-tions à effectuer. C’est le principe dela«gestionagile».SelonRobertBeres-ford, enseignantà la retraite et béné-vole, « le travail est mieux fait lors-qu’on a la possibilité de choisir soi-mêmeses tâches».

L’undesmembresduréseauWikis-peed (200personnes dans 20pays) acrééuntableauvirtuelsimilaire,utili-sé pour chaque projet. En Nouvelle-Zélande,parexemple,uneéquipetra-vaillesurunprototypedemicro-mai-son à 100 dollars pour les sans-abri,selon lesmêmes principes que pourle clignotantà75cents. p

JaneHarrisNellams(Sparknews)

Wikispeed,prototyped’organisationdu travail

MicrocréditenlignePremiersiteeuropéendemicrocréditssolidaires,Babyloan.orgmetunenouvelle

formedephilanthropieàlaportéedesinternautes

Lefuturdelaconsommationsera-t-ilcollaboratif?

Partage,revente,troc: lenumériqueetlacrisefinancièreontgénérédenouveauxmodesdeconsommationetd’échange.Undéficonstantpourlesstart-updel’économiecollaborative

II 0123Mardi 25 juin 2013

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François Barre n’a pas vu le tempspasser. Septmoisdéjàqu’il a rejointCeleste, cette PME spécialisée dansla fibre optique et le data center,basée à Champs-sur-Marne, enrégion parisienne. Plus que cinq, et

il faudra repartir. FrançoisBarre, 55 ans, est ici depassage: un salarié en «prêt». Car si sa carte devisite porte le logo de Celeste, sa feuille de paie,elle, est estampillée Alcatel-Lucent. Le grandgroupe a détaché son salarié dans cette PME de50salariés à la faveur du Pass’compétences.

Imaginé en 2011 par Geris, filiale de Thales, etl’Agence régionale de développement de ParisIle-de-France (ARD), ce programme repose surune idée simple : un grand groupe «prête» unexpert senior à une PME pour l’aider à grandir.Une expérimentation rendue possible par la loide 2011 sur la sécurisation des parcours profes-sionnels, et pilotée par le pôle Systematic Paris-Région. Comme François Barre, cinq autres

cadres seniors sont actuellement en goguettedans une PME de la région parisienne.

«Les PME rencontrent de gros problèmes d’ac-cès aux compétences », explique ArmelleJamault, chef de projet chez Systematic. Elle asondélesbesoinsde430PMEcetteannée:«Envi-ron 900 postes ne sont pas pourvus, des postesd’ingénieurs, de développeursou encore de busi-ness developers.»

La carence n’est pas simplement technique.«Ces start-up, souvent créées par des ingénieurs,manquent de compétences en marketing ou engestion»,préciseAnneFahy, directriced’accom-pagnement des entreprises à l’ARD. Dans lesdeux cas, «elles souffrent de la concurrence desgrands groupes aumoment de recruter».

«Avec François, j’ai unœil extérieur et expéri-menté pendant un an, se réjouit Frédérique

Dofing, directrice générale de Celeste. Une «res-sourceponctuelle», en appuide sonactivitédatacenter. En étant une sorte de super-coach pourmes commerciaux, François fait monter l’équipeen compétences.» Pour autant, la PME n’auraitpaspus’offrir sesservices.Dans lecadreduPass’-compétences, elle paie 60% du salaire (part pla-fonnée à 56000euros annuels), et Systematiclui rembourse 20000 euros. « J’ai quelqu’und’expérimentépour le prix d’un junior en licencepro», résume Frédérique Dofing. Les 40% res-tants sont financés par Alcatel-Lucent.

«Le salaire est un véritable obstacle», concèdeLudovic Deblois, PDG de Sunpartner, PME inno-vante dans l’énergie d’origine lumineuse, quiaccueille depuis octobre Robert Monteillier,57ans, cadrede Schneider Electric.Mais pour cetingénieur de 35 ans, une chose est sûre, avecl’aide des seniors, «plus de start-up devien-draient des PME».

«Le réseaudeRobert et ses outils de gestion, destratégieetdemarketingnouspermettentd’allerplus vite. Il est chargé de la stratégie BuildingAsie», souligne Ludovic Deblois. Cela tombebien, Robert Monteillier a travaillé vingt ansavec la Chine en tant que directeur marketingd’unservice «Building» chez Schneider Electric.

Côté salariés, le détachement, basé sur levolontariat, est d’abord un moyen de s’aérer.«Cela permet de redonner du peps à mon par-cours, dit RobertMonteillier, 57 ans, dont trentechez Schneider. J’occupais un poste très loin del’opérationnel. » Son premier jour en PME?«Commeungaminqui entreaucollègeetdécou-vre tout : je n’avais jamais été dans une start-upni une petite entreprise auparavant.»

«Rapidité, prise de risque et autonomie» ledépaysent. «Ici, onmonte une stratégie à quatreoucinq, surune infofragile : c’està la fois insécuri-sant et très stimulant.»ChezSchneider,dit-il,«ilfaut un an de cuisine pour proposer une vision».Il y a aussi lespetitsdéfis : «pasd’assistante»,oulesmêmes rendez-vous «trois fois plus difficilesà décrocher», parce qu’on est une PME.

Et le blues du senior? «Dans ces entreprises,onestvieuxà45ans,plusexpatriableà55,onquit-te la liste des hommes-clés», témoigne RobertMonteiller. Alors « lamotivation s’étiole». «UnePME raisonne différemment», confirme Fran-çois Barre. « Ici, que je sois senior, ils s’enfichent ! » La directrice générale de Celeste ad’ailleurs découvert bien après son arrivée quele dispositif s’adressait aux seniors.

Air France, Thales ou Sanofi sont notammentengagés dans le programme. Ce n’est pas unmoyendeplacardisersesseniors,démentArmel-le Jamault, chez Systematic. Le détachementpeut néanmoins s’avérer utile dans «des pério-des d’activité plus calmes»,oupour «temporiser

un retour d’expatriation, le temps de trouver unpoint d’atterrissage au cadre». La «formation»aussi : pour diriger une filiale ou un service detaille modeste, il est intéressant d’aller piocherdans la «culture PME».

La subvention n’est valable que douze mois.Ensuite, le cadre retournedonc aubercail. «S’il ya histoire d’amour avec la PME, on n’empêcherapas lemariage,mais cen’estpas l’objectif», souli-gne Armelle Jamault. A l’issue du détachement,le salarié bénéficie d’un poste équivalent dansson entreprise; le retour est «hyper-sécurisé».

Prolonger l’immersion? François Barre ferabientôt le point. RobertMonteillier, lui, deman-derait bien une rallonge, car, dit-il, dans les pro-chains mois, « Sunpartner aura davantagebesoin demoi.» p

BenjaminLeclercq(LeMondeAcadémie)

Unebonneidée

La santé n’est pas unemarchandise!» Al’entrée de l’hôpital Jean-Jaurès, dansune petite rue du 19e arrondissementmardi 11 juin, des délégués CGT distri-

buaientdestractspourlamanifestationnatio-nale du 15 juin contre les réductionsbudgétai-res. Ce tract ne peut mieux exprimer l’espritdu lieu. Racheté fin 2008 par le Groupe SOS,l’hôpital Jean-Jaurès est un établissement pri-vé, certes,mais à but non lucratif.

Sa particularité réside dans son mode degestion. Son organisation en réseau vise àsécuriser leparcoursde soinsdesmaladeset àoffrir un niveau élevé d’accompagnement:grandes chambres seules quasiment pourtout le monde, mêmes standards de confortpour tous, à 40 euros la nuitée (il faut comp-ter à peu près 100 euros dans le privé et60euros dans le public).

Spécialisé en soins de suite et soins pallia-tifs, cet hôpital de 150 lits accueille des mala-des atteints de multiples pathologies, parfoistrès lourdes, en fin devie et pour beaucoupensituationdegrandeprécarité.C’estundescritè-

res d’admission. «30% des patients sont ensituationprécaire,dépendantsde laCMUoudel’aide médicale d’Etat», indique le directeur,Benjamin Bleton. « Jean-Jaurès» se veut aussi«ouvertsurlaville:43%denospatientssontdu

nord de Paris, 17% de Seine-Saint-Denis», ajou-te-t-il fièrement.

L’ambiancefeutrée,dignedetouthôpital,està la hauteur de la sobriété du lieu. Le tempss’écouleauralenti,de l’accueil jusqu’auxvasteschambres aux couleurs pastel. Le stress habi-tueldupersonneldesanté sembleapparteniràun autre monde. Deux cents salariés consti-tuent l’équipe, qui assure une trentaine de

métiers. Les aides soignants et les infirmièresreprésentent 50% de l’effectif. Les servicesadministratifs ne comptent qu’une dizaine depersonnes. Car le Groupe SOS a structuré ungroupement d’intérêt économique (GIE) quimutualiselesexpertises,quecesoitdanslessec-teursdelarestauration,dutransportdeperson-nesoude l’événementiel.

L’organisationenréseaurenforcelapriseencharge sociale: «Dans le Groupe SOS, il y a dessalariés qui savent organiser des appels à pro-jets qui permettentde faire venir dans l’hôpitaldes services d’accompagnement qui n’existe-raientpasautrement»,expliqueThomasL’Ya-vanc. Tous les vendredis, une socio-esthéti-cienne vient ainsi proposer ses services auxmalades. A l’étage VIH, une équipe d’anima-tion constituée de jeunes en service civiqueorganisedes événements culturels.

La motivation des équipes est la clé du bonfonctionnement de l’hôpital. Pourtant lesdébutsontétédifficiles.Lechangementdespé-cialisation(delachirurgieauxsoinspalliatifs)aété vécu par beaucoup comme un déclasse-

ment.«Laquasi-totalitédes infirmierssontpar-tis», se souvient Anne de Raphelis, cadre infir-mière de l’unité de soins palliatifs. Mais ceuxqui sont restés ne l’ont pas regretté. «De lachirurgieauxsoinspalliatifs, lestemporalitésnesontpas lesmêmes.Onne réveille pasunmala-dequiaenfintrouvé lesommeil.C’està l’organi-sation du travail de s’adapter au rythme dupatient et non l’inverse. Aide-soignant, infir-miersetmédecinsdoivent travaillerà la carte eten partenaires. Résultat: ils se sentent davanta-ge reconnus»,explique-t-elle.

Lesmédecins chefs de service sont eux aus-si plutôt contents. « Ici, je suis mieux payéequ’à l’AP-HP.Mais je n’y étais pas chef de servi-ce», témoigne Julia Revnik. Les perspectivesd’évolutiondecarrièreysontaussimeilleuresqu’à l’AP-HP, même si, comme dans tout leGroupeSOS, l’échelle des salaires est fixe: de 1à 10.Mise en réseau des initiatives personnel-les, des compétences professionnelles et dubénévolat : une gestion de la santé d’un nou-veaugenre.p

AnneRodier («LeMonde»)

Compétencesautistiques

E tes-vousunhumainouunemachi-ne?»Laquestionapparaît surl’écrandeTobiasUssingalorsqu’il

améliore le référencementdesmoteursde recherched’uneentreprisede fabrica-tionde conteneurs.«Oui, je suisunhumain», dit-il enentrantmachinale-ment le codedesécuritéqui apparaît àl’écran.Tobias se fichequ’on le considèrecommeunnerd.Cequi ledérange, c’estqu’on le réduiseà la catégorie«autiste»,bienqu’il ait étédiagnostiquécommetelà 14ans.«Il ya tropd’ignoranceetdepréju-gésàproposde l’autisme»», explique-t-il.1%de lapopulationmondiale serait tou-chéepar ce troubledudéveloppement,biologiqueoucongénital, qui semanifes-tedans le comportementsocial etdans lacommunication.

Desétudes internationalesmontrentqueprèsdehuitpersonnes surdixsouf-frantd’autismesont laisséeshorsdumar-chédutravail.Depuisdeuxans, Tobiasaussi était auchômage.Mais il a étécontactéparSpecialistPeopleFoundation,uneorganisationdanoiseàbutnon lucra-tifdont l’objectif estdechanger le regardporté sur l’autismegrâceà l’emploi. Lesautistesontbesoinde structuresparticu-lièresetdesécurité,mais ils disposentaus-side compétencesuniques.Pour l’associa-tion, il s’agit de transformer les inconvé-nientsdecehandicapenavantagespourl’individu, l’entrepriseet la société.

SensdudétailTobiasUssingest l’unedes 35person-

nesatteintesd’autismeet employéescom-meconsultants informatiquespar cettestructure.Vingtheurespar semaine, ildébloque lespagesd’accueil et améliore leréférencementd’entreprisesdanoisesdusecteurpublic.D’autres consultantsontoptimisé le serviceclient et lesprocéduresinternesdu fondsdepensiondanoisATP,grâceà leurpersévéranceet à leur sensuniquedudétail.«Ils ont commencépardes cas simplesdemanutention,maisontrapidementsuvoir cequipouvait êtreopti-misé. Il y a trèspeud’erreursdans leur tra-vail, ils sont capablesdegérerde longueslistesque les autresnepeuventpas com-prendre.Nousavonsun réelavantageà lesfaire travailler»,expliqueVibekeBrask,directeurdesectiondu fondsdepension.

«Dansn’importequel secteurd’activité,aumoins5%des tâches sontparfaitementadaptéesauxautistes», termineThorkilSonne, le fondateurdeSpecialistPeopleFoundation.Aujourd’hui, l’organisationestprésentedansneufpays. L’objectif ini-tialde trouver 1000emploispour lesper-sonnestouchéespar l’autismeapresqueété rempli.pJacob SorgenfriKjær («Politiken»)

SakenaYacoobi,fondatricede l’Afghan Institute

of Learning«Quand j’ai visité pour

la première fois les campsde réfugiésafghansà Peshawar, au Pakistan,j’ai vu deshommes, des femmeset des enfants totalementdésœu-vrés, à l’air désespéré. Jeme suis

demandé ceque je pouvaisbien fairepour les aider à changer leur vie.

Ma réponse a été: “C’est l’éducationqui a changémavie.”

A cemoment-là, j’ai décidéde consa-crermavie à apporterun enseigne-

mentde qualité à des femmeset à des enfants: une éducation

qui changerait leurmodedepenséeet les aiderait à transformer

leurvie.»www.afghaninstituteoflearning.org

«C’est à l’organisationdu travailde s’adapter aupatient, et non l’inverse»

Annede Rapheliscadre infirmière en soins palliatifs

«Le réseau et les outilsde gestion, de stratégie

et demarketing d’un seniornouspermettentd’aller plus vite»

LudovicDebloisPDGde la PMESunpartner

Prête-moiunseniorDepuis2011, ledispositifPass’compétencespermetàdesPMEdebénéficier,pendantuneannée,d’unprofessionneld’expériencevenud’unegrandeentreprise.Unpartenariatgagnant-gagnant

Hôpital Jean-Jaurès :unegestionàvisagehumainDepuis2008,cethôpitaldunorddeParismutualisesesservicespouroffrirauxpatientsdessoinsdequalité,aumeilleurprix

III0123Mardi 25 juin 2013

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Et siunsavonsuffisaitpour lutter contre lepalu-disme,qui infecte 100à300millionsdenouvellespersonneschaqueannée?C’est ledéfi relevépardeuxétudiantsduBurki-naFaso,GérardNiyondikonaFaso,GérardNiyondikoetMoctarDembelé. Ils ontmisaupoint le FasoSoapouFasoap,à basedeplan-tes locales repoussantnaturellement lesmousti-ques: la citronnelle, le kari-té etd’autresherbesgar-déessecrètes.Le FasoSoapaété testé surunepartiedeshabitantsdeOuagadougou.Sonactionestdouble: l’odeur

qu’il laisse sur lapeauéloi-gne lesmoustiqueset l’undeses composants tue leslarves.Celaempêchedoncl’insectede semultiplier.«EnAfrique, tout lemondeutilisedusavon,même lespluspauvres»,pluspauvres»,affirmeGérardNiyondiko.Facile àfabriquer, le FasoSoapnecoûtepas cher (300francsCFA, soit0,46centimesd’euros lepainde savon).Il seravenduaumêmeprixqu’unsavonnormal,pourêtreaccessibleà tous.Pourcette invention, lesdeuxétudiantsafricainsontété récompensés lorsde laGlobalSocialVentureCompetition(GSVC),concoursorganiséparl’universitédeBerkeleyenCalifornie. Ils espèrentdésormaisvendre leursavonauxONG,dont l’ob-jectif estderéduiredemoi-tié les casdepaludismesur laplanèteen2015.p

Laurence Larour(«Monquotidien»)

Comment se fait-il que duCoca-Colapuisse être acheminé jus-Comment se fait-il que duCoca-Colapuisse être acheminé jus-quedans les villages les plus reculés de la Zambie, et pas desquedans les villages les plus reculés de la Zambie, et pas desmédicamentsde base, comme les solutésde réhydratationoralemédicamentsde base, comme les solutésde réhydratationorale(SRO), pourtant indispensablespour sauver des nourrissonssouffrantde diarrhée aiguë? Il y a plus de vingt ans, SimonBerry, travailleurhumanitairebritannique, se posait cetteques-tion. Jane, sa femme, trouva la solution: remplir l’espace libredans les caisses de soda. C’est ainsi quenaissait l’idée deColaLife,la «capsuled’assistance».Rentrésvivre auRoyaume-Uni, le couple continued’être hantépar le fait que la diarrhée est la deuxièmecausedemortalitéchez les enfants demoins de 5ans. Selon l’Organisationmondia-le de la santé (OMS), 760000enfantsmeurent chaqueannéedecettemaladie. Enmai2008, Simonpublie son idée sur Facebook.Troismois plus tard, le groupeColaLife compte 5000membres.Enoctobre, SimonBerry est invité dans la plus grandeville deTanzanie,Dar es-Salaam, pour étudier le réseaudedistributionlocal deCoca-Cola.Lorsque l’expérimentation est lancée dans quatre districtsruraux de Zambie en décembre2011, les femmes indiquent queles sachets qui permettent de préparer un litre de SROne sontpas adaptés. Avec l’aide de l’entreprise pharmaceutique Phar-manova, l’équipe de ColaLife crée de nouveaux sachets unido-ses, permettant d’obtenir exactement 250ml de solution.Aujourd’hui, la demandeest si grandeque les commerçantslocauxne se contentent pas deglisser dix capsulesd’assistance

dans leurs caisses deCoca-Cola,mais en achètent 70 capsules à lafois. Comme le dit SimonBerry,« l’importantn’a finalementpasété de réussir à le glisser dans les caisses deCoca-Cola».Eneffet, le projet ColaLife fonctionneaujourd’hui sans Coca-Cola. Car, si tout lemonde, duproducteur aupetit commerçant,peut faire unpetit bénéfice, et que les kits restent abordables etbien adaptés, alors, ditM.Berry,«le produit arrivera jusqu’auclient!»p

CatherineGalloway(Sparknews)

En flânant auMuséed’artmoderne (MoMA)deNewYork, les visiteurspeuvent tomber sur ce quiressembleàune fleur venue toutdroit de l’espa-ce. LeMineKafonest undétonateurdeminesinnovant, alimenté à l’énergie éolienneet crééparMassoudHassani, designer afghan tout justeâgéde 30 ans. Il est aujourd’huiprésenté lors deâgéde 30 ans. Il est aujourd’huiprésenté lors del’expositiondedesignappliquéduMoMA.l’expositiondedesignappliquéduMoMA.PourMassoudHassani, le problèmedesminesPourMassoudHassani, le problèmedesminesactivesest largement ignoré,mêmesi on estimeàactivesest largement ignoré,mêmesi on estimeà110millions leurnombredans lemonde. L’Afgha-110millions leurnombredans lemonde. L’Afgha-nistan figureparmi les pays les plus touchés.nistan figureparmi les pays les plus touchés.LeMineKafon (dont le nomsignifie «faire explo-LeMineKafon (dont le nomsignifie «faire explo-ser lesmines») pèse 70 kilos, présenteundiamè-ser lesmines») pèse 70 kilos, présenteundiamè-tre de 190 centimètres et est assemblémanuelle-tre de 190 centimètres et est assemblémanuelle-mentà l’aidede bambouet deplastiquebiodégra-mentà l’aidede bambouet deplastiquebiodégra-dable. Alors que l’engin culbute à travers lesdable. Alors que l’engin culbute à travers leschampsdemines, la pressionde sespieds enplas-champsdemines, la pressionde sespieds enplas-tique situés à l’extrémitédes bâtons debamboutique situés à l’extrémitédes bâtons debamboudéclenche les explosifs. Il peut résister à entredéclenche les explosifs. Il peut résister à entredeuxet quatre explosions avantd’être détruit.deuxet quatre explosions avantd’être détruit.Après avoir fui l’Afghanistanà l’âge de 14ans,Après avoir fui l’Afghanistanà l’âge de 14ans,MassoudHassani a pris la directionduPakistanMassoudHassani a pris la directionduPakistanpuisde la Russie avantde s’installer aux Pays-puis de la Russie avantde s’installer aux Pays-

Bas. C’est là qu’il s’inscrivit dans l’académiededesignnéerlandaiseoù leMineKafona vu lejour. Le jeunedesigner a travaillé en collabora-tionavec l’arméede sonpays d’adoptionpour tes-ter ses premiersprototypes.«Lapremière fois, cefut difficile de voir exploser le prototype, car saconstructionm’avait demandébeaucoupdetemps et puis…boom!»,déclare-t-il. L’arméenéer-landaise s’est finalement retiréeduprojet aprèsune courtepérioded’essaisdans le désert duMaroc en 2012, affirmantque la précisionduMineKafonne répondait pasencore à ses normesd’exigence.Les techniques cou-rantesdedémi-nagepeu-ventcoûterjusqu’à

1000dollars parmine.Une fois le prototype fina-lisé et la production industrielle lancée, leMineKafonpourrait coûter 40dollars parunité seule-ment.MassoudHassani estimeque leMineKafon, qui peut être directementassemblé sursitepar l’utilisateur, serait idéal pouruneutilisa-tionpardes organisationshumanitaires.p

Jake Cigainero (Sparknews)

Cetteballe a l’apparenced’unballon.Onjoueaveccommeon joueau football.Mais le Soccket estdifférent.Connectezcetteballeàune lampeaprès trenteminutesde jeuet vousobtenez troisheu-minutesde jeuet vousobtenez troisheu-resde lumière. LeSoccketest l’inventiondedeux jeunesdiplôméesd’Harvard, Jes-dedeux jeunesdiplôméesd’Harvard, Jes-sicaMatthewset JuliaSilverman,convaincuesque ledesignpeutà la foisêtreamusantet apporterdes réponsesàdesquestionsgraves.LeSoccket ressembleen toutpointauxballonsde football que l’onconnaît etneballonsde football que l’onconnaît etnepèseque50grammesdeplus.Maisunpèseque50grammesdeplus.Maisunmécanismebiencaché fait decelui-mécanismebiencaché fait decelui-ciunobjetunique.Uneminutedeciunobjetunique.Uneminutedejeupermetqu’unependule inter-jeupermetqu’unependule inter-necommenceàpivoteretpréser-necommenceàpivoteretpréser-ve l’énergieproduiteparve l’énergieproduiteparlemouvementdubal-lemouvementdubal-lon. Lemécanisme

convertit ensuite l’énergieenélectricité.Encinqans, ce ballonaétéprésentédansplusieurspayset aattiré l’attentiondepersonnalités telles queBillGates etBillClinton.Aprèsplusieursprogrammespilotesà l’étranger, le Soccketestdésor-mais sur lepointd’êtrecommercialisé.La start-upUnchartedPlay, fondée il yadeuxanspar les créatricesduballon,espèreainsi fournirde l’électricité au1,2milliarddepersonnesencoreprivéesdecourantdans lemonde (prèsde 20%

de lapopulationmondiale).«C’estunconceptsimplequipeutavoirunvéritableimpactdans la vie

desgens», expli-que JessicaMatthews.Leballon

pesaitprèsde800grammesàsesdébuts, soit 300à400grammesdeplusqu’uneballede football habituelle.Aprèsquatre refontes, sonpoidsvariedésor-maisentre480et 500grammes.Chacundevrait coûter autourde90dol-lars. L’entrepriseen a jusqu’ici vendu750et a reçuentre 700et 800précom-mandes.L’équiped’UnchartedPlay travailleégale-mentsurdeuxnouveauxprototypespro-chesduSoccket,unecordeà sauteretunballonde football américain.p

ValentinePassequone(Sparknews)

acteurs du changement INVENTER

ZambieAvecColaLife, la caissedesodadevientunepharmacieAvecColaLife, la caissedesodadevientunepharmacie

AfghanistanMineKafon,undémineuraudesignutile

BurkinaFasoUnsavoncontrelepaludisme

Etats-UnisSoccket, leballondefootballquiéclaireSoccket, leballondefootballquiéclaire

DR

PHOTO : DR

«THE COLA

ROAD»/DR

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HuitidéesquichangentlavieUnpeupartoutdans lemonde,desprojets fleurissent.Envoiciquelquesexemples

IV 0123Mardi 25 juin 2013

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acteurs du changement INVENTER

«Pourquoi n’est-il pas possible de faire unbon café chez soi?» Si l’expresso dumatinest un élément essentiel de la vie en Italie,pour le SicilienNino Santoro, cette tasse decafé brûlant a toujours représenté bienplus que ça: c’est une véritable obsession.Nino Santoro a décidé de fabriquer unesolutionmaison, à partir de vieilles cafetiè-res en acier. Son premier prototypedemachine à expresso remonte à 1998, et ilmet quelquesmois à peine pour obtenir lebrevet. «Quand j’y repense, c’était complè-tement fou. Ce secteur technique était entrelesmains de géants industriels qui avaientleurs experts, techniciens, chimistes, labora-toires et d’énormes quantités de capital àleur disposition.» Pourtant il comprendqu’il y a un créneauà prendre et investittout ce qu’il a dans Kamira, sa «cafetière»idéale. Le premier défi – relevé avec succès– fut contre la bureaucratie. Il fallut atten-dre 2003 pour que son invention trouve saplace dans les vitrines desmagasins. L’arti-san sicilien consolida son succès essentiel-lement sur leWeb. Le site Internet deKami-ra, Espressokamira.com, accueillit ungrandnombre de visiteurs et le conte defées du café à 4centimes (il coûte 1eurodans les bars en Italie, tandis que les filtresà usage domestique coûtent aumoins20centimes) fit le tour des blogs et desréseaux sociaux. Son expériencede ven-deur fit le reste. D’après Santoro, lemélan-ge de la tradition et des nouvelles technolo-gies fait toute la force de Kamira. «En plusde respecter l’environnement, le point fortde Kamira est le goût. Sa température n’at-teint jamais les 100˚C,mais s’arrête auxalentours de 93˚C: la gravité fait descendrele café et les huiles dumélange ne brûlentpas, ce qui préserve l’arôme.»Santoro a embrassé la philosophie du SlowFood, et depuis sa terrasse surplombant lamer, il conclut en souriant: «Ça vaut lecoupd’attendre quelques secondes supplé-mentaires pour apprécier l’arômedu vraicafé, vous ne pensez pas?» p

GiuseppeBottero («La Stampa»)

Voilàplusdedix ansmaintenant, le jeuneFrede-rikVanAsbeck remarquaitqu’aucunde ses amistanzaniensneportaitde lunettes, contrairementàbonnombrede seshomologuesétudiantsde l’uni-versitéde technologiedeDelft, auxPays-Bas. Ildécouvrit alors que le problèmene concernaitpaslamauvaisevisionde ses collèguesdeDelft,maisplutôt ladifficulté àobtenirune correctionvisuel-ledans la banlieuedeDar es-Salaam.Il y avait à cela une solutionassez simple: inven-terdes lunettesde correctionbonmarchécapa-blesde corriger jusqu’à60%desproblèmesdevuedans lemonde.Après cinq années consacrées à la recherche et àla conception, Focus on Vision démarra sa pro-duction en 2009. Aujourd’hui, l’association àbut non lucratif, composée entièrement de béné-voles, déclare avoir distribué 250000paires delunettes dans 37pays, deve-nant ainsi un acteurmajeurdans la luttemondiale contreles problèmes de vue.Reposantsur le travail réalisédans lesannées 1960par le PrixNobel dephysi-

queLuisAlvarez, ces lunettesajustablesse compo-sentdedeux lentillesqui coulissent l’unesurl’autre. Les lentillespeuventêtre régléespourcréerunecorrectionde lavisionallantde – 1.0 à– 5.0oude+0.5 à+4.5.Dotéesd’undesignagréable (primédansplusieurs concours), ces lunettes sontpropo-séesensept coloris.Le secretnevientpassimplementde leurproduc-tionenmasse. Il estdirectement liéà leurmodedelivraison,à faible coût, auprèsdespersonnesquienontbesoin. JanIn’tVeld, beau-pèreet collabora-teurdeFrederikVanAsbeck,y voitun«exempleclassiqued’innovation relativementsimple, capa-blede résoudreunproblèmesystémiqueet comple-xe». Il insiste sur les conséquencesd’unemauvaisevisionsur laqualitédeviedes individus.Unevuemédiocren’estpeut-êtrepas aussidramatiquequela faim, lamalnutritionou lamaladie. Pourtant, leproblèmeadoncdesconséquencessociales et éco-nomiquesde taille. Lespersonnesdotéesd’une

bonnevision–ouquiontaccèsàunecorrection–jouissentd’unequalitédevie supérieureetgagnentplusd’argentà long terme.Uneétudedel’Organisationmondialede la santé (OMS)estimequeplusde400milliardsdedollarsdeproductivi-té sontperdusà travers lemondeenraisonde lamauvaisevuedes individus. Entre250millionset1milliarddepersonnessouffriraientd’unevisionmédiocreetnoncorrigée. p

ChristopherSchuetze(Sparknews)

Utiliser la technologie mobile pour amélio-rerlasanté,notammentdanslespayslespluspauvres, c’est l’ambition de la télémédecine.Cetteidéecommenceàdevenirtangible.L’an-née 2013 a ainsi vu le lancement du premiertéléphone mobile dévolu à la santé, leLifeWatchV, équipé de capteurs qui peuventmesurerlestauxdeglucosedanslesang,rele-mesurerlestauxdeglucosedanslesang,rele-ver la température corporelle, la pressionartérielle et même faire des électrocardio-grammes !Grâceàdetellesinnovations, latélémédecineuniverselle a de beaux jours devant elle. Caspratiques.

mPedigreedécèle lesmédicamentsfacti-cesSelon l’Organisationmondialede la san-té (OMS), jusqu’à un quart desmédica-ments vendus sur ordonnance enAfriquesont des faux. AvecmPedigree, les consom-mateurs grattent une étiquette spéciale,jointe aumédicament, faisant apparaîtreun code unique. Ils envoient ensuite cecodepar SMS. Un système sécurisé leur indi-que instantanément si lemédicament estauthentique.Développé etmis en circula-tion auGhana en 2007, en partenariat avecle géant de la technologieHewlett Packard,mPedigree est opérationnel aujourd’hui auNigeria, au Kenya, en Ouganda et en Tanza-nie, et vient d’être lancé en Inde.

iDARTdélivrelesmédicamentsàlabonnepersonne et au bonmoment iDART est unacronymesignifiant IntelligentDispensingforAnti-RetroviralTreatment («délivranceintelligentedu traitementd’antirétroviraux).Il utilisedes étiquettesà codes-barresasso-ciéesàdes téléphonesmobileset àd’impor-tantesbasesdedonnéespouraccélérer lafournitured’antirétrovirauxdestinés auxpatientsséropositifsd’AfriqueduSud. Les éti-quettesà codes-barresmultilinguessont join-tesauxcolis demédicamentsdechaquepatient, ce quipermetde raccourcir les filesd’attenteà lapharmacieetdegarantirque labonnepersonnereçoit les bonsmédicamentsaubonmoment.

Motech envoiedes informationssur le portabledurant la grossesseMotech,ouMobileTech-nologyforCommunityHealth («techno-logiemobilepourmédecine locale»), pro-poseuncertainnombred’applications.Parposeuncertainnombred’applications.Parexemple,auGhana,uneaidede la FondationBill etMelindaGatesaété employéepourcréerunserviceMobileMidwife («sage-fem-meparunportable») : les femmesenceintesreçoiventdans la languede leurchoixdesmessagesconcernant leurgrossesse (exa-mensà faire, ou, après lanaissance,datespour les vaccinsdubébé).Motechpermetaus-si aux infirmièresd’êtreen contactavec lesfemmesconfiéesà leurs soins.

Mwana accélère la délivrance de résul-tats pour les bébés séropositifsLeprojetMwanapermetauxZambiensetauxMalawiensdes régionspauvresourura-lesdebénéficierde tests capablesdedétectertrès tôt, en touteconfidentialitéet sans ris-qued’erreur, la séropositivitédesbébés. Lesrésultatssont rapidementenvoyésparSMSauxmèreset aux travailleurs sociaux.Destextosde rappel sontprogrammablesencasdenouvellemédicationoupourunbilan. p

HarryDugmore (Sparknews)

Il y a plus de vingt ans, un ingé-Il y a plus de vingt ans, un ingé-nieuretundesigneront imagi-nieuretundesigneront imagi-néunesolutionpouraider lesnéunesolutionpouraider leshabitantsdeszones ruraleshabitantsdeszones ruralesdans la tâcheessentiellequidans la tâcheessentiellequiconsisteà transporter l’eauconsisteà transporter l’eaunécessaireà leur foyerdepuisnécessaireà leur foyerdepuisles rivièresou lespointsd’eaucommunautaires.Onestimeque le transportdel’eau,qui incombegénérale-mentaux femmesetaux jeunesfilles, représente200millionsd’heuresde travailpar jourauniveaumondial.Pour concevoirleurbidond’eauamélioré,Pet-tiePetzeret JohanJonker, deuxSud-Africains,ont commencéparutiliser la techniquedu roto-moulagequipermetdeprodui-redes citernesenplastiquesanssoudureni collage.Mais la plusgrande avancée vient de leuridée de transformer la citerned’eau en roue, pour en faireune sorte de brouette.C’est ainsi qu’est né l’HippoWater Roller, nommé ainsi car,de l’avis général, il avait l’air«gros» et «fort commeun hip-

popotame». Facileà pousserouà tirer, la citerne enplastiqueaunecontenancede90 litres,soit environ cinq fois cequ’unefemmepeutporter sur la tête.Conçudansdesmatériauxdehautequalité, l’HippoWaterRollera uneduréedeviedecinqà sept ans. PettiePetzerraconte: «Leprojet avaitunpotentiel énormepour faciliterl’accèsà l’eauenAfrique.»Maisleproduitn’apaspercé sur lemarché.En 1994,GrantGibbs, un autreSud-Africainqui le commercia-lisait à petite échelle, décidedereprendre le flambeau.Malgrédesdébutsdifficiles, il défendl’invention, encouragépar lamanièredontdifférentes com-munautés se l’étaient appro-priée. Pari réussi: aujourd’hui,l’HippoRoller estutilisédans21paysd’Afrique. Selon le siteInternetduprojet, 44000citer-nesont été distribuées, contri-buantà approvisionner300000personnesen eau.Pourtant, à 129dollars pièce,l’HippoWaterRoller n’est pasbonmarché. Fabriqué enAfri-quedu Sud, son transport versles autres régionsdu continentest particulièrement coûteux.Pour cette raison, il est financéà95%pardes entreprisespri-vées.Malgré ces problèmes, l’HippoWater Roller est utilisé par denombreusespersonnespourleménage, la cuisine ou enco-re l’irrigationdes jardins per-sonnels.p

MarcelleBalt(Sparknews)

ItalieMachineàcaféécoloetbonmarché

AfriqueduSudL’HippoWaterRoller,citerneà roulettesciterneà roulettes

Pays-BasFocusonVision, leslunettes(quasi)universelles

AfriqueUnmédecindanslemobile

BAREFOOT DOCUMENTARY/DR

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V0123Mardi 25 juin 2013

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Iraniens,nousnebombarderons jamais votrepays. Nous vous aimons.» Le 14mars 2012,alorsquelatensionmontedenouveauentrel’Iran et Israël, Ronny Edry, un graphiste de

Tel-Aviv,écritcesmotssurunephotoquilerepré-sente avec sa fille, et publie l’image sur Facebook.L’idéeestsimple:donnerunvisageàl’«ennemi»,montrer aux Iraniens que, commeeux, les Israé-liens sont des pères, des mères, des maris et desépouses.Et qu’ilsaiment leurs enfants.

L’effet est immédiat. Des Iraniens et des Israé-liens se mettent à publier leurs propres photos,avecdesmessagesexprimanttous lamêmeidée:le refus de la guerre. Ronny Edry décide alors decréerunepageFacebook,«Israel Loves Iran». Elleest vite adoptée par des Iraniens qui exprimentleurs condoléances à la famille d’un soldat israé-lien tué, par des Israéliens souhaitantune bonneannée aux Iraniens. Très vite, la page dépasse les100000«likes» surFacebook.

Du jour au lendemain, le désir de paix étaitdevenu viral. «J’avais publié la photo comme onlance une bouteille à lamer, sans trop d’espoir. Jene m’attendais pas à ce qu’elle produise autantd’effet, raconte Ronny Edry. En Israël, nousn’avonsaucuneinformationsur cequi sepasseenIran, hormis ce que disent nos dirigeants. J’ai ététrèssurprisdedécouvrirquelesIraniensutilisaientFacebooketqu’il y avaitdes graphistesen Iran.»

Peu de temps après, Majid Nowrouzi, un Ira-nienvivantenMalaisie, lance lapage«IranLovesIsrael».Hantépar la guerre Iran-Irak (1980-1988),qui a emporté son oncle et un ami proche,MajidNowrouzi voit là unmoyen de donner de la voixcontreunnouveauconflit.«Parmitoutes lesnou-velles inquiétantes qui circulaient à propos del’Iran et d’Israël, j’ai vu surgir sur Facebook unelueurd’espoir:untypeenIsraëldisaitqu’ilsnevou-laient pas bombarder l’Iran, qu’ils nousaimaient», raconte-t-il.

Des projets de collaboration entre les deuxmouvements naissent, dont «Peace : it’s twofriendshaving coffee» («Lapaix, c’est deux amisprenant le café ensemble») : une série de photossurlesquellesdesgensordinairesdepaysconsidé-rés comme ennemis posent ensemble. Parmi lesprojets les plus ambitieux figure la campagned’affichage « Iraniens à Tel-Aviv», en octobre2012:pendanttroissemaines,les70busdelacapi-tale israélienne ont porté des posters représen-tant, côteà côte,des Iranienset des Israéliens.

Ronny Edry a fait des émules dans le monde:en témoignent les pages Facebook «AfghanistanLoves Israel», «PalestineLoves Israel», «AmericaLoves Iran», ou encore «Australia Loves Iraq andAfghanistan». Il veut maintenant monter unestart-up, The Creative Lab. Le projet, qui vientd’être lancé, a pour objectif d’attirer des artistestalentueuxpourréfléchiràdesprojets innovantspourpromouvoir lapaixpar lapublicité

Des ponts entre les gensMalgréleformidableaccueilqu’areçul’initiati-

ve de Ronny Edry, certains observateurs rappel-lent qu’une page Facebook ne résoudra pas lesdivergencesprofondesentrel’Iranet Israël.Faceàla dure réalité géopolitique, des images joyeuseset de courtsmessages sur les réseaux sociauxnepeuventrien.MajidNowrouziauneréponseàcescritiques: «J’ai tellement entendudire que ce pro-jet est naïf que j’ai fini par le penser moi-même.Mais j’ai pris conscience que c’est à ces choses“naïves”, l’amour et l’amitié, que j’aspire.» RonnyEdry revendique lui aussi une part de naïveté,mais il reste convaincu que bâtir des ponts entreles gens constitue une première étape sur le che-min de la paix : « Il est facile de faire la guerrecontrequelqu’unque l’onne connaîtpas.»

Quoi que l’avenir réserve, Ronny Edry estconvaincu que la simple existence de cette com-

munauté virtuelle compliquera la tâche de ceuxqui voudraient engager les deuxpays sur la voiedu conflit ouvert. Certes, les relations officiellesentre l’Iran et Israël ne se sont pas amélioréesdepuis que Ronny Edry a lancé sa bouteille à lamer.Mais la campagne «Israël Loves Iran» a faitnaître de l’espoir chez ses partisans, qui éprou-vent la satisfactionde«fairequelquechose». p

JackPaige (Sparknews)

Cela ressemble à une blague. C’estl’histoire d’un chrétien, d’unmusulman, d’un juif, d’un athéeet d’un agnostique qui s’apprê-

tent à effectuer tous ensemble un tour dumonded’unnouveaugenre.

Alors qu’ils se préparent à s’envoler, le1er juillet, pour Israël et les territoirespales-tiniens,SamuelGrzybowski,SoufianeTork-mani, Rafaella Scheer, Victor Grezes et Jos-selin Rieth sont réunis autour d’un motd’ordrecommun:«Ilnes’agitpasdeparve-nir à unaccord sur ce enquoi nous croyons,explique Samuel,mais plutôt de partagerunemême foi en la paix.»

Ces cinq aventuriers sont membres del’association française Coexister, crééepar Samuel en janvier2009, qui regroupequelque300membresdans toute la Fran-ce. Son slogan: «Diversité dans la foi, uni-té dans l’action». Ce tour dumonde inter-religieux est son projet le plus ambitieuxà ce jour.

Pèlerins globe-trottersLes cinq jeunes gens visiteront 48pays

au total, faisant étape pendant plusieursmois dans cinq lieux hautement symboli-ques. Jérusalemd’abord,puiscapsurlaTur-quie, l’Inde, Singapour et la Malaisie. Levoyage s’achèvera aux Etats-Unis, nationpionnièreenmatièrededialogue interreli-gieux. Puis retour en France, où ces pèle-rins globe-trotters organiseront leur«Tour de France» en mai et juin2014. Ilsprévoient de monter une exposition surleur voyage à bord de l’« Interfaith bus» etd’organiserdenombreuxdébats.

Une fille, quatre garçons, trois religions,cinq personnalités. Ce pourrait être le cas-tingd’unemissionimpossible,maisRafael-la, 18ans, est convaincueque lesvoyageursseront tous «commedes frères et sœurs» àleur retour, en juin2014.

Rafaella, le bébé de cette «famille», saitde quoi elle parle. Les quatre garçons ontdéjàuni leurs forcespour l’aideràconvain-cresesparentsde la laisserpartir. Pourelle,juivepratiquante,«untourdumondeétaitun véritable rêve d’enfant, auquel nousavonsajouté cette dimension interreligieu-se tout à fait unique».

Soufiane,27ans,est le«grandfrère».Cal-meetdiscret, très engagéauseinde l’Orga-nisationdesmusulmansdeFrance,ilrecon-naît également écouter la station de radiocatholique Radio Notre-Dame dans lesembouteillages.Ilditvouloirobservercom-ment chacun «réagira en étant enminori-té» en termes de croyances, et commentcette expérience fera évoluer la «vision dumonde»desuns et des autres.

Chrétien engagé et attaché à l’idée que«le seulmoyen d’apprendre à vivre ensem-ble est de respecter nos différences »,Samuel, 21 ans seulement, a convaincutous lesautresde se lancerdanscetteaven-ture unique. Il dirige l’organisationdepuisseptembre2012.

Victor, 21 ans lui aussi, partage avecSamuel la convictionprofondeque ledialo-gue interreligieux peut créer un mondemeilleur.D’après lui, comprendrela foiper-metd’appréhender(etdoncderésoudre)lesconflits. Mais, après des mois de débats, ilestplusconvaincuque jamaisd’êtreathée.

Quant à Josselin, agnostique autopro-clamé, il pense, commeVoltaire, qu’il exis-te un Dieu, mais un Dieu de raison plutôtqu’un Dieu de foi. Du haut de ses 21 ans,c’est le diplomate du groupe, un hommede consensus. Ce qui ne l’empêche pas depratiquer le karaté.

Les cinq aventuriers sont bienconscients de partir vers l’inconnu. Maisaprès tout, pour citer Martin Luther King,«nousdevonstousapprendreàvivreensem-ble comme des frères, sinon nous allonsmourirtousensemblecommedesidiots». p

Clairede Roux (Sparknews)

acteurs du changement SE RENCONTRER

Unebonneidée

Le matin du 1er janvier 2010, les lec-teurs ont découvert en «une» duTimes of India une colombe et unappel à la paix entre l’Inde et lePakistan. A leur réveil, les lecteursdes journaux pakistanais Jang et

The News pouvaient lire un message identique.Cetévénementmarquait lanaissanced’AmankiAsha(«espoirdepaix»,enhindi),unecampagnelancée conjointement par le Times of India (ToI)et le groupe de presse Jang. Elle a été accueillieavecunmélanged’enthousiasmeetdescepticis-me. Certains ont trouvé très naïf d’appeler à lapaix si peu de temps après l’attentat terroristecommis à Bombay le 26novembre 2008 par ungroupe djihadiste basé au Pakistan, dans lequel172 personnes ont trouvé la mort. D’autres ontqualifié cette initiative de romantique.

Pourtant, la campagne Aman ki Asha sortindemnedeces critiques.Certes, lapaixn’estpasétablie, et aucun pacte n’a été signé pour résou-dre les conflitsauCachemireouauglacierdeSia-chen. Lespourparlersdepaixontvacilléet le ton

estmontéàdenombreusesreprises.Toutefois, lacommunautéde ceux qui aspirent à la paix s’estrenforcée, donnant naissance à un groupe depression très soudé avec desmembres à Lahore,Karachi,NewDelhi, Bombay, Londres etDubaï.

Depuis 2010, des musiciens ont fait vibrerleurs instrumentsetdeschanteursontdonnédela voix pour faire tomber les barrières entre lesdeux pays, submergeant le ToI et Jang de réac-tions. Des lettres et desmessages sont parvenusen masse aux deux groupes de presse, qui ontégalement été contactés par desONG, des diplo-mates et des militants pour la paix désireux departiciper à la campagneAmanki Asha.

Abida Parveen et Rahat Fateh Ali Khan, chan-teurs soufis d’origine pakistanaise, ont enflam-mé leur public à New Delhi et à Bombay. Desintellectuels et des journalistes ont franchi lafrontière, cherchant comment contourner lemur d’hostilité, pousser les gouvernements àrelancerlesnégociationsdepaix,ainsiqu’àfacili-ter les déplacements et les échanges commer-ciauxentre les deuxpays.

LacampagneAmankiAshan’estpasparvenueà briser le carcan dans lequel sont prises les rela-tions indo-pakistanaises. Elle n’a pas non plusmisfinauxstéréotypesindienssur lePakistanetlasociétépakistanaise.Unautreélémentdéfavo-rable a été l’échec de la série de rencontres entreles ministres des affaires étrangères des deuxpays, grippant de nouveau les rouages des pour-parlersdepaix.AmankiAshaatoutefois réussiàpréserverl’existencedugroupedepressionpourlapaix, enmontrantque lePakistanpouvait êtreenvisagé sous un autre angle que celui du terro-rismeetque lepeuplepakistanais,qui adenom-breux liens culturels et familiaux avec les habi-tants du nord de l’Inde, paie un lourd tribut dufait des errementsde songouvernement.

Vent de changement«Trade for Peace» («Le commerce porteur de

paix») est le nouveau slogan qui qualifie à pré-sentlarelationémergenteentrel’Indeet lePakis-tan. Cette relation a connude telles tensionsparle passé que, lorsque les deuxpays n’étaient pasvéritablement en guerre, ils continuaient d’en-tretenir une guerre froide virtuelle. Heureuse-ment, le vent de changement qui souffle désor-mais ouvre unepériode plus positive dans cetterelationbilatérale.

D’après les sondages effectués avant et aprèslelancementdelacampagne,AmankiAshaaper-misd’améliorer la façondont Indiens et Pakista-nais se perçoiventmutuellement. La campagnerenforce l’action des organisations non gouver-nementales qui préparent le terrain depuis desannées, tout en s’appuyant elle-mêmesur le tra-vail des ONG. Le fait d’œuvrer pour la paix estégalement très stimulant pour les militants depart et d’autre de la frontière. D’autres médiasrelaient ces efforts, mais Aman ki Asha a biendavantage interpellé le public que les campa-gnes précédentes. Grâce à cela, les gouverne-ments des deux pays ont pris suffisammentconfiance en eux pour tenter d’améliorer leurrelation.Enoutre, lemilieudesaffairesyagagnéla placed’échangequi luimanquait.

De plus en plus de personnes prennentconscience du fait qu’une guerre entre ces paysvoisins, tous deux dotés de l’arme nucléaire,n’estpas envisageable.DeuxEtatsquinégocientensemble et investissent l’un dans l’autre ne sedéclarent pas la guerre. Le Times of India et legroupeJangentendentpersisterdansleur initia-tive, en espérant des ralliements toujours plusnombreuxà leurprojet de paix. p

Réseaud’informationdu «Times»

Untourdumondeavecousansfoi

RebeccaRothney,fondatricedePack for aPurpose

(«Chargeutile») :«Aprèsnotrepremier voyage enAfrique,monmari Scottetmoi-mêmenous sommes renducompteque la quantitédebagagesquenous étions autorisésà emporter sur notresafari était infime comparée aupoidsde bagages autorisé

par la compagnieaérienne.Nous avons commencéàapporter régulièrementdes fourniturespourdes écoles etorphelinatsde communautés lors denos séjours sur le

continent, et nous avons demandéànotre agencede voya-ges pourquoi il n’y avait pasplus de gensqui faisaientdemême. L’employéde l’agencenous a répondu: "Parce queles gensn’y pensentpas. " J’ai décidédeprocurer à d’autresgens lemoyend’ypenser. Trois ans et demiplus tard, Packfor a Purposea aidédes voyageurs à livrerplus de 9400kilosde fournituresdemandées etnécessaires à des com-

munautésdansplus de 45pays.»www.packforapurpose.org

Depuis 2010,desmusiciensparticipent à la

campagneAmanki Asha,

qui viseà pacifier les

relations entrel’Inde et lePakistan.

DINESHMEENA/«ToI »

Lapresseapaisel’IndeetlePakistanAl’initiativeconjointedu«TimesofIndia»etdugroupedepressepakistanaisJang,

lacampagne«AmankiAsha»arenforcélacommunautédeceuxquiaspirentàlapaix

Deg. à d., Rafaella Scheer, VictorGrezes, Samuel Grzybowski, Josselin

Rieth et Soufiane Torkmani.CORINNE SIMON/CIRIC

SurFacebook, Israëlaimel’IranLancéeparungraphistedeTel-Aviv, lacampagne«IsraelLovesIran»ad’abordétérepriseparunIranienvivantenMalaisie.Puisafaitdesémulesunpeupartoutdanslemonde

VI 0123Mardi 25 juin 2013

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acteurs du changementSE RENCONTRER

Ils prennent le train, leurs pieds, l’avion,oumêmeleurtrottinette–maisquelsquesoient le moyen de déplacement et l’iti-néraire choisi, ces aventuriersduXXIesiè-

clepartagentunmêmedésir : fairedecettepla-nèteunmondeplusheureux.Certainssouhai-tent mettre leur portefeuille à contribution.D’autres, leurs mains. D’autres encore, leursidées. Chaque projet est différent et se déclineà l’infini.

ChristiandeBoisredon,l’undespionniersdumouvement des globe-trotteurs socialementengagés,fondateurdel’agenceSparknews,s’estlancé avec trois de ses amis en 1998. Partant deFrance, ils cherchaientdespersonnesqui, com-me eux, voulaient rendre le monde meilleur.Même avant la crise économique, le coût deleur voyage sur les quatre continents, d’unedurée d’un an, était estimé à environ11000euros chacun. «A Paris, difficile de s’entirerpourmoinsde1000eurosparmois»,expli-queM.deBoisredon.Maispour finir, lesquatreamisn’ont rienpayédu tout: ils sontparvenusàtrouverdessponsorspourleurpériple, intitu-lé «LeTourdumondede l’espérance».

Gros travail de préparationQuinze ans plus tard, Internet est devenu la

pierre angulaire de telles aventures. La familleColas, par exemple, a décidé en 2010 d’entre-prendre un tour du monde et d’associer cetteaventure à un objectif bien précis. «Nous vou-lions construire une école au Burkina Faso»,confie Frédéric Colas, homme d’affaires pari-siende45 ans.

Pourréaliser ceprojet, lesColasontcréé leursite, We Like theWorld, et commencé à sollici-ter leurs contacts en ligne. «Le résultat, ce futun réseau de 1000 personnes, pour la plupartdes amis d’amis sur Facebook, qui nous ontaidés», explique M.Colas. La famille a étéhébergéepar52famillesdans17pays.Pourcha-que nuit passée chez l’habitant, les Colas ontpromis de reverser 100dollars pour l’école, etleurs fans Facebook, 1 dollar chacun.

A l’issue des douzemois passés à voyager, lacagnotteavaitatteint23000dollarset l’équiva-lent en cadeaux de sponsors. Au total, lafamille a récolté 65000dollars ; l’école a puêtre construite, et 200 élèves la fréquententdésormais. Dans la plupart de ces aventures,l’avant et l’après sont presque aussi impor-tants que le périple.

EnFrance,où la traditiondel’annéesabbati-que existepeu, des étudiantsont comprisquela préparation d’un voyage et sa mise enœuvre sont une expérience en soi. D’aprèsleurs témoignages, le travail en amont peutprendre jusqu’à deux ans, et demande descapacités d’organisation, de la déterminationet de la conviction – autant de compétencesvalorisées sur lemarché du travail.

A leur retour, certainsvoyageursprennentdes congés pour communiquer sur leurs réa-lisations. Ils interviennentdansdes conféren-ces, rédigent des ouvrages et mettent leursvidéosen ligne.D’autres choisissentdeparta-ger leur expérience avec la génération sui-vante, dispensant conseils et tuyaux sur laToile. p

Marie-SaloméPeyronnet(Sparknews)

Lorsque,enmai2012,untremblementdeterre détruit les centres historiques desvilles d’Emilie-Romagne, de Mirandolaà Finale-Emilia, de Cavezzo à Novi-di-

Modena et de San-Felice-sul-Panaro à Concor-dia-sulla-Secchia,c’estundésastrepourlespeti-tesentreprisesde larégion.Parmilesmagasins,barsetateliersquiontétédétruitsouquiontdûfermer en raison de locaux devenus dange-reux, 90%étaient tenuspar des femmes.

Sousl’égidedeClaudiaMiglia,uneconsultan-teetexperteenformationprofessionnelleâgéede 39 ans, les propriétaires italiennes ont déci-dé de ne rien lâcher. « Le lendemain du deuxiè-me choc, le 29 mai, raconte Claudia Miglia, ons’est appelées les unes et les autres et ona forméunpetit groupe,magasins de vêtements, salonsde beauté, salons de coiffure, tabac, toutes lesfemmes qui géraient les magasins des centres-villes avant le tremblementde terre. »

C’est ainsi qu’elles ont créé un réseau qui aredonnéunrôleetunespoirà500femmesd’af-faires. Baptisé«EmiliAmo» (L’Emilie, j’aime), iltémoigne de l’envie de ces femmes de repren-

drelecontrôledeleurdestin.Lapremièreinitia-tivea étéde travailler sur lesmarchésdans tou-tes les municipalités touchées par le séisme:Modène,Reggio-d’Emilie et Bologne.

Organiser des événements«Nousavonspassétout l’été2012àvoyager,à

vendrenos produits, expliqueClaudiaMiglia.Ala fin de la saison, nous avions amassé200000euros, de quoi relancer nos entreprises.Après quelque chose d’aussi grave qu’un trem-blement de terre, il faut beaucoup d’imagina-tion et une grande endurance.» Elle ajoute :«On réussit parce qu’on est un groupe. Une per-sonne seule ne peut rien faire du tout.» ClaudiaMiglia est la coordinatrice de ce réseau de pro-fessionnelles.Danschacunedesvilles touchéespar la catastrophe, elle a unpoint de contact.

Au-delàde la stratégie commerciale, il y a unaspect psychologique et émotif fondamental.«EmiliAmonousapermisdepenseràautrecho-se, d’arrêter de pleurer sur le sort de nos maga-sins détruits», confie-t-elle.

Pour entretenir leurmotivation, les femmes

mettentenplacedesévénements.Ellesontain-si monté la loterie de Cavezzo : pour 10eurosdépensés,lesclientssevoyaientremettreuntic-ket leur donnant droit à des réductions dansd’autresmagasinsde la ville.

Le réseau s’appuie aussi sur la publicité, lescomptes Facebook et Twitter, les tee-shirts, lesbadges, les tasses de café, les autocollants, tousavec le logo EmiliAmo. «Cet été, nous allonsorganiser des fêtes. La première sera à Cavezzo,le 15 juin,et s’appellera“Dal terremotoal tortelli-

no” [“Dutremblementdeterreauxtortellinis”].On y distribuera des pâtes faites maison, il yaurades standsdedécorationdegâteauxet descours de cuisine pour les propriétaires et lesgérantsd’entreprise stressés», expliqueClaudiaMiglia.

Elle conclut : « J’invite quiconque à trouvermieux. Quand les maisons s’effondrent tel unjeu de cartes, notre expérience à nous peut êtrereproduite.»p

FrancoGuibilei («La Stampa»)

Philanthropesensacàdos

Radhika,unejeunefemmeindien-ne,abiendesobstaclesàsurmon-ter : trouver des médicamentspour ses enfants, couvrir leursfrais de scolarité, compléter lesrevenusde sa famille envendant

des mangues sur le marché. Son histoire estcelle de milliers de femmes. C’est aussi l’intri-guedeHalftheSky,unjeuenlignesurFacebookquicommencedansunvillageindienpourfinirauxEtats-Unis.

Au cours de ce parcours, les joueurs peuventfaire des dons ou débloquer, en progressantdans le jeu, des promesses de dons de diversesorganisationspourvenir enaideà ceux touchéspar la pauvreté. Plus les contributions desjoueurs sont élevées, plus ils terminent le jeurapidement et aident Radhika à atteindre sonbut.Half theSky, lancémondialementle4mars,est la dernière initiative d’un mouvement enfaveurdesdroitsdesfemmesmenéparNickKris-tofetSherylWuDunn,deuxjournalistesduNewYorkTimes.

Ceprojet avu le jouren2009,quandces jour-nalistesontpubliéHalf theSky. TurningOppres-sion into Opportunity for Women Worldwide(«Lamoitiéduciel: transformerl’oppressionenopportunité pour les femmes du mondeentier», Ed. Vintage, non traduit). Le livre a étérelayé par un documentaire de quatre heures,diffusé sur la chaîne américaine PBS, ainsi quepar une exposition au Skirball Cultural CenterdeLosAngeles.

Afin de mettre en pratique leurs idées, NickKristof et Sheryl WuDunn ont contacté Gamesfor Change, une entreprise à but non lucratifbaséeàNewYorkquiaideà lacréationetà ladis-tributiondejeuxvidéoàviséesocialeethumani-taire. «Il est impossible de ne pas remarquer lenombred’individusquiseruentsurlesjeux,expli-queNickKristof. Jeme suisdit que jepouvaismeservir de ces jeux pour attirer l’attention sur lesproblèmesquinous tiennentà cœur.»

Dès le début de cette initiative, le jeuHalf theSky a rallié dans le monde entier de nombreuxadeptes, curieux et engagés. «Ce jeu illustre àmerveille l’idéede l’apprentissagedumonderéel,déclare Nandita Vij Tandan, responsable nou-veauxmédiasauseinduWorldInnovationSum-mit for Education.Vousdécouvrezdesdéfis aux-quels sont confrontésdes habitantsde payspau-vres, comme l’accès à l’éducation ou au micro-financement.»

Pour Nick Kristof, l’objectif consistait à«convertir» les personnes qui «se fichent pasmal»de l’éducationdes filles etdu trafic sexuel.Asi Burak, cofondateur de Games for Change,considère Nick Kristof et Sheryl WuDunn com-medevéritablespionniers.«Ilsontprisconscien-ce que s’ils ne prenaient pas de risques, et conti-nuaient à prêcher à des convertis, leur actionn’auraitque trèspeud’impact», explique-t-il.

Asi Burak, lui aussi, a été un pionnier lors-qu’auxcôtésdeMichelleByrd, en2004,a il fon-dé Games for Change. Les jeux qu’a inventésleur entreprise sont tous fondés sur des enjeuxmondiaux réels : le conflit israélo-palestinien,la guerre en Syrie, la prévention du sida, maisaussi l’énergie renouvelable. Autres exemple:en novembre2012, Water.org, une associationtechnologique également à but non lucratif,

dirigée par Gary White et Matt Damon, a crééFarmVille2. Le second volet de ce jeu, déjà trèspopulaire sur Facebook, aborde le thème dupillage des ressources en eau potable dans lemonde.

Disponible en 3D, FarmVille 2 plonge 8mil-lionsd’utilisateursquotidiensdanslavieagrico-le et rurale. Les joueurs peuvent «acheter» desjerricans,despompesetdessystèmesd’arrosage

pour étendre leurs cultures virtuelles. Les gainssont ensuite offerts à Water.org par Zynga, unéditeur de jeuxWeb 2.0, et par Facebook. SelonKenWeber,directeurexécutifde labranchephi-lanthropique de Zynga, grâce aux efforts desjoueurs,plusde16000personnesbénéficierontd’unaccèsà l’eaupotablependanttoute leurvie.

L’équipedeGames for Change est conscientequ’elle devra essuyer des critiques. Car pourtransposer dans l’univers numérique les défisliés au développement dumonde réel, il a fallulessimplifier.«Bienentendu,dans le jeu, toutestplus facile que dans lemonde réel.Mais l’objectifestdemettreenavantdes solutionsetdesoppor-

tunités, expliqueAsiBurak.C’est tout l’intérêtdela campagneHalf theSky.»

Lorsqu’ils jouent à Half the Sky, les joueursversent des dons financiers ou offrent desmar-chandises à des groupes participant au projet.Lesjoueurspeuvent,parexemple,soutenirlaFis-tula Foundation en finançant les interventionschirurgicalesdepersonnessouffrantde fistules,un problème auquel sont souvent confrontéesles femmesdans lespaysendéveloppement,ouencore verser des dons à Heifer International,qui travaille avec des communautés à faiblesrevenusdans lesdomainesde l’agricultureetdel’élevage de bétail. Ils peuvent également offrirdeslivresàRoom-to-Read,uneassociationbaséeàSanFrancisco.

Amesurequel’aventureHalf theSkyprogres-se, le joueur passe de l’Inde au Kenya, puis duVietnam à l’Afghanistan pour finir aux Etats-Unis. Selon le niveau qu’il atteint au cours de lapartie, il peut débloquer les fonds de sponsors,dontcertains s’élèventà 500000dollars.

«Les gens donnent souvent de l’argent pourune bonne cause, mais savent rarement com-ment cet argent est dépensé, explique NanditaVij Tandan.Dans ce jeu, vous savez quelle causevous servez, qu’il s’agisse d’un achat de livrespour Room-to-Read ou d’une participation aufinancementdevaccinspourdes enfants.»

AsiBurakespèrequeleprojetHalftheSkyfini-ra par boucler la boucle. Après des débuts enanglais et en français, il souhaite promouvoir lejeudanslespaysendéveloppement,oùleshabi-tants pourraient jouer dans leur propre langue.Il se réjouit en particulier à l’idée d’une versiondestinéeà l’Inde, où les questions liées aux fem-meset auxpetites filles sont si épineuses.

Puisque le jeu ne connaît pas de frontières etqu’il est gratuit, ce rêve pourrait tout simple-mentdevenir réalité. p

EshaChhabra (Sparknews)

«Bien sûr, dans le jeu,tout est plus facile

quedans lemonde réel.Mais l’objectif estdemettre enavantdes solutions»

Asi BurakcofondateurdeGames for Change

Avec le jeuHalf the Sky,les joueurs

peuvent verserdes donsfinanciers

pour soutenirdes projets de

développement.FLICKR

Les femmesdu réseauEmiliAmo,actives etsolidaires.SPARKNEWS/DR

D’untremblementdeterreestnéunréseaudefemmesAprès leséismequiaravagé lenordde l’Italieen2012,descommerçantesontcrééuneassociationd’entraide

Lejeuenlignes’attaqueàdessujetssérieuxCommentsensibiliserauxenjeuxsociauxmondiauxetrécolterdesfondsenjouantsur les réseaux

VII0123Mardi 25 juin 2013

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Il y a cinq ans, le quotidiensinistredesdétenusde lapri-soncentraleet surpeupléedeRoumieh,à l’estdeBeyrouth,s’estembelligrâceauthéâtre.L’idée,proposéeparl’associa-

tionàbutnon lucratifCatharsis, étaitd’utiliser la dramathérapie, autre-ment dit la thérapie par le théâtre,pour les réhabiliter.Pari tenu:grâceàZeina Daccache, actrice, dramathéra-peute et directrice exécutive deCatharsis, il a permis à ses bénéficiai-resdeseréconcilieraveceux-mêmes.

«Zeinanousa restituénotrehuma-nité», affirme ainsi Atef, qui déplore«la négligence, la marginalisation etla routine dont nous souffrons ici».«Pour les gens, nous sommes des cri-minels et avons reçu le châtiment quenousméritons,poursuit-il.Ladrama-thérapie nous a permis de prendreconscience de notre situation en tantqu’êtreshumains.Même les invités deZeina finissent par porter sur nous unregard différent, bienveillant.» «Lasociété, note Ali,met tous les prison-niersdansunmêmesacet sepressedeporter des jugements, sans prendre lapeinedesedemandersi,parmices“cri-minels”,nesetrouventpasdesperson-nesarrêtéesinjustementoumêmedescriminelsquin’attendentqu’unechan-cepour changer.»

Pour Khalil, condamné à cinq ansde prison, le changement est venupar lebiaisdecesateliers.«Ladrama-thérapie m’a permis de renouer avecmoi-même, puis avecma famille, queje refusais de voir depuis des années,confie-t-il. Au début, c’était juste un

passe-temps, mais j’ai rapidementréalisé le sérieuxdecesatelierset,aufil des sessions, j’ai commencé àmesentir mieux. J’ai appris à dire“nous” et à penser en tant que com-munauté,nonentantqu’individu.»La première année de dramathéra-pie à Roumieh a été couronnée parla représentation, dans l’enceintemêmede la prison, de la pièceDou-ze Libanais en colère, qui amis l’ac-cent sur les problèmes et les reven-dicationsdesprisonniers.

Cette expérience «positive» apoussé la dramathérapeute à latransposerà laprisondesfemmesàBaabda, à l’est de Beyrouth, à lademandedesprisonnières, impres-sionnées par le travail des détenushommes. Ainsi, 40femmes ont puprofiter dès 2011 de ces ateliers, quiontété clôturéspar laprésentation,l’an dernier, de Schéhérazade, unspectacle inspiré des mille et unenuits passées dans le «Royaume»

desdétenuesàBaabda,etquireflète«l’ambiancedes 1001détentions».

Al’instarde leurs«confrères»deRoumieh, ces femmes évoquentune «renaissance», une «volontédechanger»etune«liberté».«Pourla première fois de ma vie, je sensl’humanitédans lesyeuxdesautres,constateFatma.Ilsontpeut-êtreréa-lisé que je ne suis pas qu’une “mé-chantecriminelle”,maisunefemmevictimed’injustice.»

Même son de cloche chezMariam,accuséed’avoir passé soussilence leparricide commispar sonfils. «La dramathérapie m’a apprisl’importance de faire entendre mavoix, d’autant que j’avais l’habitudede me taire, n’osant même pasdénoncer monmari qui me violen-tait et qui abusait sexuellement demon fils et de ma fille, admet-elle.C’est entrecesmursque j’aiappris lesensde la liberté.»

Engagée depuis son adolescence

dans l’œuvre sociale, Zeina Dacca-chene cachepas sa fiertéde consta-ter l’ampleur de son action au seindes prisons. «La dramathérapiefiguredésormaisaunombredesacti-vités mentionnées dans la loi 463pourlaréductiondespeines,annon-ce-t-elle.C’est l’undesnombreuxcri-tèresquelesjugesprennentenconsi-dération pour étudier le dossier desprisonniersquisollicitentuneréduc-tionde leurpeine.»

«Je suis convaincue qu’il ne fautpasmettre de barrières à l’art et à laculture, poursuit-elle, après unmoment de silence. Toutes les cou-ches de la société doivent y avoiraccès,même les plusmarginalisées.Qui a dit que le théâtre ne peut êtrejoué que sur les scènes convention-nelles, et que les prisonniers doiventêtre privés de théâtre et de thérapie,alors qu’ils en ont le plus besoin?Quoi demieux que d’allier ces deuxdisciplinespour leurvenirenaide?»

L’implication de Zeina Daccachedans lesprisonsnese limitepasà ladramathérapie. La jeune femme aorganiséunesessiondemaquillageartistiquepour les prisonnières, autermede laquelle ces dernières ontreçuundiplômecertifié d’Etat. SonONGtientégalementunclubdelec-tureà laprisondeBaabda.

A Roumieh, 70 détenus bénéfi-cient de l’atelier de bougies.«Catharsis assure la vente des bou-gies et les revenus sont entièrementversésauxprisonniers»,affirmeZei-na Daccache. Et de conclure: «Monplusgrandsouhait, c’estd’assurer ladurabilité du projet. J’aimerais quela dramathérapie fasse partie inté-grante d’un projet national pour laréhabilitationdesprisonniersetqueces ateliers soient organisés dansl’ensemble des institutions carcéra-lesdupays.»p

NadaMerhi(«L’Orient-Le Jour»)

Aquelques fauteuilsd’écart, dans le décormajestueuxdelapremiè-re chambre de la cour

d’appel de Paris, unhommeet unefemmeseparlent. Sa voix à elle estdouce, sereine. Ses mots à lui sonthésitants, pudiques, émus. Elle nelequittepasdesyeux, il puisedanssonregard la forcedepoursuivre.

Marie-José est la mère d’unefillette de 10 ans qui, en 1988, a étékidnappée, violée et tuée. Gaetanestundétenuaujourd’huiensemi-liberté qui, lorsqu’il était âgé de22ans, a tué un homme et a étécondamné à vingt-cinq ans d’em-prisonnement. L’un et l’autre sontvenus témoigner, ce 28novembre2012,auPalaisdejusticedeParis,deleurparticipationàuneexpériencede justice restaurative menée à laprisoncentraledePoissy.

Pendant plusieurs semaines, enprésencededeuxmédiateurs,Marie-José et deux autres femmesdont lesenfants ont été victimes d’actes cri-minels ont dialogué avec trois déte-nus,dontGaetan, touscondamnésàde longues peines pourmeurtre. Deces six séances de trois heures, elle ad’abordretenulaviolencedumilieucarcéral «où on joue un rôle de dur,où l’on ne peut avouer ses faiblesses,alors que dans nos rencontres, il yavait beaucoup d’émotion, chacunsemettait à nu. Les détenus avaientbesoin d’évacuer ce qu’ils n’avaientpu confier à personne». « J’avaisenviedeparler,derépondreauxques-tions qu’elles posaient. Je le leurdevais», a ditGaetan.

Née au Canada, la justice restau-rative – ou réparatrice – s’est déve-loppéedanslescommunautéspro-testantes dès les années 1970.

«Pour les protestants, la souffrancen’est pas rédemptrice, elle ne suffitdonc pas à envisager l’après-pro-cès», expliquelepasteurBriceDey-mié, président des aumôniers deprison européens, qui a lui aussiparticipéà l’expériencedePoissy.

C’est dans ce «temps d’après»,celui de la reconstruction pour lesvictimes commepour les condam-nés,ques’inscrit la justicerestaura-tive. «Nous ne sommes pas dansune démarche de pardon, puisquenousnerencontronspas lesauteursdes crimes dont nous avons souf-fert. Chacunbrise sa carapace indé-pendamment de l’autre», souligneenéchoMarie-José.Si elle aacceptéde participer à cette expérience,c’estd’abord,dit-elle,dans lebutde«luttercontrelarécidive».«Sinous,victimes, nous sommes capables dedébattre avec des condamnés et decroire qu’ils peuvent s’en sortir,nous les aidons à ne pas douterd’eux-mêmes et à envisager autre-ment l’avenir», ajoute-t-elle.

SoutenueparlaFédérationnatio-nale d’aide aux victimes et demédiation et par plusieurs magis-trats, dont le premier avocat géné-ralàlaCourdecassation,YvesChar-penel, l’idée de justice restaurativea également suscité l’intérêt de lagardedessceaux,ChristianeTaubi-ra, qui apromisdepoursuivre l’ex-périencetentéeen2010àPoissy.Ledirecteur de cette prison, FrançoisGoetz, compted’ores et déjà parmilesplusferventspartisansdela jus-tice restaurative. «Ces six réunionsont produit beaucoup plus d’effetsque six ans de thérapie en prison»,assure-t-il. p

PascaleRobert-Diard(LeMonde)

acteurs du changement SE RECONSTRUIRE

L’économie change,changeons l’économie.

Brésil France Inde

INSCRIPTIONS OUVERTES SUR LH-FORUM.COM

MOUVEMENT POUR UNE ÉCONOMIE POSITIVELE HAVRE, DU 25 AU 27 SEPTEMBRE 2013

PARTENAIRES OFFICIELS MEDIASUNE INITIATIVE DE

Le Groupe

PARTENAIRES INSTITUTIONNELS

CCI LEHAVRE

«Au fildes sessions,j’ai appris

àdire “nous”et àpenseren tant que

communauté,nonen tantqu’individu»

Khalilcondamnéà cinqans

deprison

Desvictimesetdesbourreaux

separlentLacentraledePoissyamenéavecsuccèsuneexpériencede justice restaurative

Danslesprisonslibanaises,lesdétenusrenouentaveclavie

Organiséspar l’ONGCatharsis, lesateliersdedramathérapieproposentuneréhabilitationpar le théâtre

VIII 0123Mardi 25 juin 2013