2.20. Bassin d'Essaouira-Chichaoua et zone côtière Essaouira

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2.20. BASSIN D'ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE CÔTIÈRE D ' ESSAOUIRA

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2.20. BASSIN D'ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE CÔTIÈRE D'ESSAOUIRA

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Tables des matières

2.20. Bassin d'Essaouira-Chichaoua et zone côtière d'Essaouira (par A. Cochet & M. Combe) ..........................................................................

433

Présentation géographique ................................................................................... 433 Géologie .............................................................................................................. 433

Stratigraphie .................................................................................................. 433 Tectonique ...................................................................................................... 435

Climatologie ........................................................................................................ 436

Hydrologie ........................................................................................................... 436

Hydrogéologie ..................................................................................................... 437 Caractéristiques des différents aquifères ....................................................... 437

Alluvions quaternaires ............................................................................... 437 Recherches dans le Bas-Tennsift ................................................................ 437 Dunes récentes ............................................................................................ 438 Le Pliocène ................................................................................................. 438 Le Sénonien et l'Eocène ............................................................................. 442 Le Cénomanien et le Turonien ................................................................... 442 L'Aptien et le Barrémien ........................................................................... 442 Le Jurassique supérieur .............................................................................. 442

Chimie des eaux ............................................................................................ 442 Bassin d'Essaouira-Chichaoua ................................................................... 442 Zone côtière d'Essaouira ............................................................................. 443

Aménagement des eaux ....................................................................................... 444 Alimentation en eau d'Essaouira ................................................................... 444 Projet de barrage sur l'Oued Ksob ................................................................. 445

Conclusions ...................................................................................................... 446 Références ........................................................................................................... 446

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2.20

BASSIN D'ESSAOUIRA-CHICHAOUA

ET

ZONE COTIERE D'ESSAOUIRA

par

André COCHET & Michel COMBE

Présentation géographique

Géologie

Cet ensemble hydrogéologique est limité au N par le plateau des Mouissate et l'embouchure de l'oued Tennsift, au S par le Haut Atlas occidental, à l'E par les plaines d'Imi-n-Tanoute et de Chichaoua et à l'W par l'océan Atlantique. Sa superficie est d'environ 6000 km2 (fig. 172).

Il forme un immense plateau, légèrement relevé au S et au N, descendant vers l'W en pente douce puis s'abaissant brusquement pour donner naissance à la zone côtière à relief dunaire. L'arganier et le thuya dominent le paysage avec les terrains de parcours où s'intercalent parfois de minuscules champs d'orge.

La population (environ 350 000 habitants) est essentiellement rurale ; la seule ville, Essaouira (ex. Mogador) ne compte en 1970 que 30 000 citadins. Ancien port florissant au XIXe siècle (débouché du Souss et du Haouz et point d'aboutissement des ca-ravanes provenant du grand Sud), il est actuellement délaissé au profit d'Agadir et de Casablanca. Il n'endemeure pas moins le troisième port de pêche du

Maroc, débarquant une dizaine de milliers de tonnes de poisson par an. Les ressources sont essentiellement agricoles: cultures de céréales et de maïs, plantations d'oliviers et d'arganiers, troupeaux de moutons et de chèvres ; leur importance peut varier de façon assez considérable suivant que l'année est « sèche » ou « humide ». La superficie des terrains irrigués à partir de quelques sources ou de l'oued Ksob ne dépasse pas 500 hectares. Essaouira dispose en plus de la pêche, de quelques usines de conserves de poissons, de l'artisanat et du tourisme. Dans l'ensemble cette région est pauvre. Enfin, depuis quelques années (1957), des recherches pétrolières ont mis à jour des ressources encore assez limitées en hydrocarbures liquides et en gaz naturel et les prospections se poursuivent sur terre et sur la plate-forme continentale. Le bassin pétrolier d'Essaouira n'en est pas moins actuellement le premier producteur du Maroc.

Les études géologiques fondamentales de cette région sont anciennes et font partie de l'important travail réalisé par E. Roch (1930). Cependant ces travaux s'avèrent souvent sommaires pour des ap-plications hydrogéologiques.

STRATIGRAPHIE Le tableau suivant donne une vue d'ensemble des faciès et des puissances des divers étages rencontrés.

Le. Primaire, le Stéphano-Trias et le Jurassique n'ont que des affleurements très réduits et localisés au coeur d'anticlinaux. (Jbel Hadid et Kourati au NW, Jbel Amsittène au SW, Jbel Tamergat-oued Tidsi au S de l'oued Ksob, anticlinal d'El-Khemis—Si-bou-Zid). Sur presque tout l'arrière-pays affleurent les formations du Crétacé ; des formations du Tertiaire (couches phosphatées) et du Quaternaire (dépôts su-perficiels) s'y rencontrent localement dans des cuvettes synclinales.

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Calcaires coquiliers, grès dunaires et dune-QUATERNAIRE ET PLIOCENE

Calcaires lithologiques et marno-calcaires - CENOMANIEN, TURONIEN

Marnes et argiles vertes ou bleues avec bancs

gréseux à l'Aptien - CRETACE INFERIEUR

Calcaires gypseux - JURASSIQUE SUPERIEUR

Formations rouges, dolérites -

PERMO - TRIAS

Schistes - PRIMAIRE

0O

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Série phosphatée, marnes et marno-calcaires -EOCENE, MAESTRICHTIEN, SENONIEN

5 10 15 20 25 km

FIG.172 — Bassin d'Essaouira-Chichaoua, schéma géologique et plan de situation.

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BASSIN ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE COTIERE ESSAOUIRA

ETAGE F A C I E S PUISSANCE

Quaternaire Calcaires coquilliers, dunes, limons, alluvions 20 m

Pliocène Dunes consolidées, grès et calcaires coquilliers

80 m

Eocène et Sénonien Marno-calcaires, marnes sableuses, couches phosphatées 150 m

Turonien Calcaire lithographique fissuré dit « calcaire à Astartes » et marno-calcaires

40 m

Marnes et argiles vertes 100 m Cénomanien

Calcaires jaunes et marno-calcaires 100 m

Crétacé inférieur Marnes et argiles vertes ou bleues, avec bancs gréseux et un banc calcaire de l'Aptien (20 m)

1 000 m

Jurassique supérieur Calcaires dolomitiques, marnes, grès, lentilles de gypse 500 m

Jurassique moyen et inférieur

Marnes et grès rouges, bancs calcaires 300 m

Stéphano-Trias Argiles et grès rouges gypsifères et salifères, coulées de dolérites

500 m

Primaire Schistes Plusieurs milliers de m

La zone côtière est presque partout recouverte par les formations dunaires du Pliocène et du Quaternaire, sur une bande parallèle à l'Océan et large d'une vingtaine de kilomètres ; ces formations peuvent dépasser 100 mètres d'épaisseur sur le plateau d'Akermoud par exemple (fig. 177).

TECTONIQUE L'ensemble de cette région forme entre les deux

anticlinaux du Jbel Amsittène au S et du Jbel Hadid au N, une vaste zone synclinale ouverte sur l'Océan.

Cette zone synclinale est affectée d'ondulations et d'accidents qui permettent d'y distinguer les subdivisions suivantes : a. la cuvette synclinale de Bouabout, correspondant au

cours de l'oued Igrounzar, b. la crête anticlinale complexe des Ouled-Bou-Sba

séparant le synclinal de Bouabout au S du synclinal de Korimat au N,

c. la cuvette synclinale de Korimat-Bled Hart, où les couches demeurent subhorizontales et sont à peine affectées d'un très léger pendage vers le S,

d. la cuvette synclinale d'Essaouira qui, est traversée par

l'oued Ksob, e. l'accident diapirique de Permo-Trias salifère de l'oued

Tidsi qui sépare les cuvettes synclinales de Bouabout et d'Essaouira. Cet accident est orienté d'abord W-E sur 8 à 9 km, le long de l'oued Tidsi, puis SW-NE sur 20 km, jusqu'au N de l'oued Ksob.

Enfin au N de l'anticlinal du Jbel Hadid s'ouvre un

autre synclinal côtier sous la plaine d'Akermoud.

Ces plissements et ondulations n'affectent que les terrains anté-pliocènes que le Pliocène et le Quaternaire recouvrent en discordance.

435

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436 RESSOURCES EN EAU DU MAROC

Climatologie (fig. 173)

Le climat de la région côtière d'Essaouira est d'un type extrêmement original et particulier grâce à l'action du courant froid des Canaries qui tempère énormément les amplitudes thermiques et donne à la région même d'Essaouira un climat de type insulaire, semi-aride à hiver chaud, exceptionnel au Maroc.

Les pluies sont assez régulières en zone côtière grâce à l'action régulatrice de l'Océan et elles attei-gnent 300 mm à Essaouira, c'est-à-dire tout juste le besoin minimum des cultures de céréales sans irrigation. Vers l'intérieur, les hauteurs de pluies

diminuent et l'irrégularité annuelle devient plus sen-sible. Le nombre de jours de pluie est en moyenne de 42 par an à Essaouira mais de 31 seulement à l'intérieur (Chichaoua) et les quantités de pluie mo-yenne par jour pluvieux sont de l'ordre de 6 à 7 mm.

Les températures sont très tempérées sur la côte où l'écart thermique entre les moyennes des minima et maxima annuels n'est que de 6°2 C. Cet écart croît rapidement vers l'intérieur.

L'évaporation mesurée au Piche atteint 1 500 mm/an à Essaouira et 2 700 mm à Chichaoua.

FIG. 173

Hydrologie

L'oued Igrounzar reçoit l'oued Zeltène à 30 km de son embouchure. Il prend alors le nom d'oued Ksob et se jette dans l'Océan à 2 km au Sud d'Essaouira. Il draine les eaux de ruissellement de la cuvette synclinale de Bouabout et du versant nord du Haut Atlas occidental ; la superficie du bassin versant est de 1698 km2. Une station de jaugeage simplifiée a été installée en 1963 à la confluence des oueds Igrounzar et Zeltène puis déplacée ensuite vers l'aval (en amont

du pont de la route RP 8) ; les débits ont varié entre 0,180 m3/s (juillet 1967) et 3,350 m3/s (janvier 1964). Le débit moyen, calculé à partir de la pluviométrie par la formule d'Iskowski et par la méthode graphique (Kabbaj, 1968), est de 3,5 m3/s, soit un apport moyen annuel écoulé de 110.106 m3. A partir d'un abaque établi par Dj. Lazarevic sur la base de données concernant les superficies des bassins versants et la pluviométrie sur l'ensemble du Maroc, le débit de la

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BASSIN ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE COTIERE ESSAOUIRA 437

crue millénaire serait de 1 450 m3/s et celui de la crue centenaire de 840 m3/s.

D'autres oueds drainent les eaux de ruissellement des cuvettes synclinales de Korimat et d'Essaouira et de la plaine d'Akermoud. Ils sont courts et presque toujours à sec, sauf à la suite d'une pluie. Leurs bassins versants ont en effet des dimensions réduites et sont constitués de calcaires ou de grès dunaires dans lesquels les eaux s'infiltrent largement. Aucune

mesure n'a été effectuée sur ces oueds temporaires. Enfin le cours inférieur, assez souvent à sec, de

l'oued Tennsift longe la lisière nord de la plaine d'Akermoud. Une station hydrométrique a été mise en place en amont de l'estuaire (pont de la route principale Essaouira-Safi) en 1969 afin de recueillir des données chiffrées sur le débit évacué à l'Océan par ce fleuve qui n'est pas pérenne au niveau de son embouchure en raison des dérivations pour l'irrigation à l'amont.

Hydrogéologie

CARACTERISTIQUES DES DIFFERENTS AQUIFERES

Le bassin d'Essaouira-Chichaoua et la zone côtière d'Essaouira constituent un ensemble de systèmes hydrogéologiques indépendants mais très semblables, qui correspondent aux cuvettes synclinales.

A l'intérieur de ces systèmes, des nappes phréa-tiques n'existent que dans des secteurs très localisés (nappe d'Ounara, underflows des oueds Tennsift et Ksob, dunes récentes). L'eau circule en général en profondeur, dans les divers niveaux calcaires ou gréseux du Secondaire ou du Tertiaire, par des che-minements karstiques ou privilégiés encore mal connus ; elle en sort sous forme de sources aux points bas, au contact d'un niveau argileux ou marneux imperméable.

Le nombre de points d'eau recensés dans ce bassin est de l'ordre de 200, dont une quinzaine de forages d'eau exécutés à titre d'étude par l'Etat. Autant dire que les recherches sont à un stade très préliminaire.

En suivant de haut en bas la chronologie stra-tigraphique, on rencontre des niveaux aquifères dans les étages suivants :

ALLUVIONS QUATERNAIRES Elles recouvrent des fonds de vallées, le long de

l'oued Ksob et de l'oued Tennsift, dans les régions de Korimat, Tleta des Hanchène, Ounara. Elles sont constituées surtout de limons et de graviers. La per-méabilité est faible en général.

Ces alluvions renferment de petites nappes phréa-tiques ou d'underflows alimentées par des oueds et parfois par des dégorgements de formations gréseuses ou calcaires du Pliocène ou du Crétacé. En d'autres endroits elles peuvent également alimenter ces mêmes formations. Elles sont exploitées par puits pour l'alimentation en eau et l'irrigation (vallées de l'Oum-er-Aïoun et du Chabet-el-Hamra).

RECHERCHES DANS LE BAS-TENNSIFT (fig. 174) La nappe alluviale du Bas-Tennsift est de très loin

la plus importante de toutes celles de cette région. Des travaux importants de recherche y ont été exécutés (1968-1969) afin de chiffrer les ressources que l'on envisageait d'exploiter au bénéfice de l'agglomération industrielle de Safi, distante de 35 km vers le N ou plus modestement pour l'extension locale de l'agriculture irriguée. Les études se sont étendues sur les 15 km du cours aval de la rivière. Entre son embouchure et le défilé calcaire de Jbel Raba-Taoujijt, la vallée est large de 3 km en moyenne et est bordée à l'E et à l'W par des formations dunaires et conglomératiques du Plio-Quaternaire reposant sur du Jurassique supérieur marno-calcaire qui affleure au SE. L'oued dont le cours à une pente faible (1,7 °/oo dans ce secteur) a creusé son lit en larges méandres dans le Pliocène et recouvert la vallée proprement dite d'al-luvions récentes. La vallée alluviale a une superficie de l'ordre de 30 km2 entre le niveau atteint par les hautes marées d'équinoxe et le défilé du Jbel Raba-Taoujijt.

Une petite campagne de géophysique électrique (148 SE en AB = 1 000 m et 36 SE en AB = 2 000 m) a été réalisée en novembre 1969, conjointement à un levé des points d'eau les buts recherchés étaient l'évaluation de l'épaisseur et de l'extension des alluvions de la rivière et si possible la délimitation de l'interface eau douce - eau salée dans l'estuaire. Une série de 9 forages d'essai a suivi cette campagne afin de caler les résultats de la géophysique et de tester les qualités hydrogéologiques des niveaux aquifères.

Le substratum marneux jurassique se situe à assez faible profondeur sous la vallée : 30 à 40 mètres à l'amont et 10 à 20 m à l'aval (soit vers la cote absolue - 15 à - 10 mètres au coeur de la vallée) ; il remonte très vite sur les bordures. Sur ce substratum repose un conglomérat quaternaire à liant argileux, puis des sables et graviers plus propres. En dehors de quelques

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438 RESSOURCES EN EAU DU MAROC

FIG. 174 — Vallée alluviale du Bas-Tennsift, plan de situation des principaux travaux réalisés.

zones particulières et finalement peu étendues, l'ensemble aquifère est assez perméable (5.10-3 m/s) et le coefficient d'emmagasinement assez bon (3 à 4.10-2). Par ailleurs, les eaux salées marines remontent dans l'estuaire jusqu'à 5 km de la mer, ce qui est un facteur

assez peu favorable pour envisager des exploitations immédiatement à l'amont.

La nappe alluviale draine sans doute les versants où

se tient une nappe phréatique dans les conglomérats pliocènes et les grès et sables de la dune ancienne, mais ceci est difficile à démontrer sur des profils en travers, faute d'une topographie de détail précise au large de la vallée. Par contre il est acquis que l'oued alimente fortement la nappe alluviale en hiver (profil de la figure 175).

Les travaux de recherche ont permis d'approcher le débit souterrain s'écoulant à la mer par la nappe alluviale : 50 l/s fictifs continus, d'estimer les réserves permanentes de la nappe à 7,5 Mm3 (240 1/s fictifs continus), ainsi que de fixer à 0,17 le taux de renouvellement. Le faible débit d'écoulement naturel de la nappe ne conduit pas à une exploitation bien intéres-sante, aussi songe-t-on à utiliser les possibilités de régularisation du réservoir aquifère au-delà de la limite naturelle grâce à une fermeture de la vallée par barrage obtenu par injection des alluvions ou mise en place d'un noyau d'argile, transversalement à la vallée dans la zone aval, un peu en deçà de la partie de l'estuaire atteinte par les plus hautes marées ; ainsi dégagé des risques d'invasion marine, le réservoir amont pourrait être modulé sur la presque totalité du volume de ses réserves et fournirait quelque 200 l/s fictifs continus. Avant d'en arriver au projet d'exécution, des études complémen-taires restent à effectuer à propos de la géométrie et des qualités hydrauliques du réservoir, ainsi que des conditions naturelles de recharge de la nappe par l'oued (durée et volumes mis en jeu).

DUNES RÉCENTES

Elles se rencontrent en bordure immédiate de l'Océan ; elles sont formées de sables non consolidés.

Trois puits (77/51, 78/51 et 79/51) ont été creusés en 1955 à l'E d'Essaouira dans les dunes quaternaires pour l'alimentation en eau de la ville. La tranche aquifère était peu épaisse et l'on n'a obtenu qu'un faible débit. Le niveau piézométrique étant voisin du niveau de la mer, un pompage prolongé aurait donné lieu à un appel d'eau salée ; les puits ont par la suite été abandonnés.

LE PLIOCÈNE

Sous forme de calcaires coquilliers ou de grès calcaires perméables et correspondant à d'anciennes dunes consolidées, le Pliocène existe et affleure le plus souvent sur presque toute la zone côtière. La roche magasin, bien connue pour sa bonne qualité tout le long du littoral Atlantique et renfermant d'ailleurs ici-même une eau de qualité chimique toujours acceptable, a fait l'objet des principales investigations hydrogéologiques

158/43156/43 158/43 COUPETRANSVERSALE

154/43

EL HAD TAOUBAT

DEFILE DU JBELRABA TAOUJIJT

140/43150/43

152/43

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EL KHEMIS OULED HADJ

148/43

MAREESDES PLUS HAUTES LIMITE DE REMONTEE

VALLEE ALLUVIALELIMITE DE LA

SITUATION EVENTUELLED'UN BARRAGE DE

GARDE SOUTERRAIN

FORAGE D'ESSAIPUITS EQUIPED'EOLIENNE

PUITS

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155

150

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156/43 SE 52

SE 53

SE 51 SE 48

158/43FORAGE

SE 47 SE 46

FORAGE 160/43

SE 45SE 44

E

0

SUBSTRATUM MARNEUX(SECONDAIRE)

SE = sondage électrique ( suivi de son numéro )

20 m

0

20

SE 55

PUITS40 m

W

LIT MINEURDU TENSIFT

FORAGE

SE 54

SABLES

NIVEAU PIEZOMETRIQUE

GRAVIER

500 1000 m

FIG. 175 — Vallée alluviale du Bas-Tennsift, coupe en travers de la vallée d'après la géophysique électrique

(SE = emplacement d'un sondage électrique) et les forages.

systématiques exécutées dans ce bassin. Il ne fait pourtant aucun doute que ce Pliocène qui repose par endroits sur des formations jurassiques ou crétacées perméables est drainé verticalement vers elles et de ce fait peut s'avérer sec sur de larges zones. Ceci explique les nombreux échecs survenus dans ce secteur.

L'alimentation de ces nappes provient vraisembla-blement de la pluie et d'abouchements latéraux, mais rien ne permet de dissocier et de chiffrer séparément ces deux facteurs.

Les exutoires du Plio-Quaternaire dunaire sont constitués par : — des sources, à la faveur de certaines conditions

morphologiques (la plus importante est l'Aïn-el-Hajar : 54/43, fig. 176, débit 30 l/s) ;

— des exhaures par puits lorsque le niveau aquifère est peu profond ;

— des dégorgements à la mer, totalement inconnus actuellement ;

— des abouchements avec des calcaires perméables du Crétacé qui ensuite dégorgent en mer.

Deux régions distinctes ont fait l'objet de recherches qui, il faut bien le dire, n'ont pas été conduites au-delà d'une reconnaissance à grande échelle qui mérite de sérieux compléments.

L'arrière-pays d'Essaouira, compris entre l'Océan à l'W, le plateau crétacé à l'E, le Jbel Hadid au N et l'oued Tidsi au S, est un plateau couvert de forêts, au réseau hydrographique à peine marqué en dehors des vallées des oueds Tidsi, Ksob et El-Aïoun, comportant de

nombreuses cuvettes et même de véritables dolines qui laissent supposer l'existence d'infiltrations. Le substratum est constitué, pour autant que l'on puisse l'observer, par du Crétacé marneux ou du Crétacé calcaire. La couverture plio-quaternaire comprend des grès calcaires, surmontés de sables et limons argileux dunaires plus ou moins fortement consolidés, mais perméables. Entre ce plateau et la mer s'allonge une bande de dunes vives récentes qui s'élargit près d'Essaouira jusqu'à 5 km de la côte, et ne comporte aucune terre cultivable susceptible d'être exploitée car les sols sont sableux et mobiles. Par contre le plateau est davantage susceptible d'être mis en valeur et il porte des cultures ; en cas de découverte d'eau, le maraîchage constituerait une plus-value certaine. Sept forages y ont été exécutés : cinq à proximité d'Essaouira et deux au NE. Tous ont été des échecs, bien qu'ils aient été précédés d'une campagne de géophysique (sismique réfraction) qui avait localisé des vallées fossiles à la base du Plio-Quaternaire, vallées que l'on considérait comme susceptibles de constituer des drains pour la nappe. Le forage 63/51 (X = 93,3 ; Y = 116,9 ; Z = 125 m) montre que cet objectif n'est peut-être pas valable ; sa coupe simplifiée est la suivante :

— 0 à 20 m : grès calcaires — 20 à 59 m : sables et grès calcaires — 59 à 75 m : marnes, sables et grès — 75 à 77 m : conglomérats et grès coquilliers — 77 à 120 m : calcaires et marnes (Crétacé). Le niveau d'eau se situait à 77 m de profondeur et le

débit était pratiquement nul : comme on le voit, le Pliocène est sec à cet endroit, comme probablement en

BASSIN ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE COTIERE ESSAOUIRA 439

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440 RESSOURCES EN EAU DU MAROC

104/43

148/43

152/43

162/43

158/43

92/43

103/43

54/43

78/43 53/43

120/43

63/51

45/51

OUED TENSIFT

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Site de Barrage

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Forages

Trias

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Crétacé moyen etinférieur

Crétacé supérieur

Série phosphatée

naire marin et dunaireP - Pliovillafranchien. Quater-

a2 Vives a1 AnciennesQd - Quaternaire dunaire

Qa - Alluvions récentes

80

130

Sources Puits

2 4 6 8 10 km

OUED

EL F

AIDA

CHABET EL HAMRA 130

130

FIG. 176 — Géologie et principaux points d'eau du plateau d'Akermoud.

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beaucoup d'autres. Les puits productifs de cette région exploitent très certainement une nappe perchée dans la partie supérieure du Pliocène, au-dessus d'un niveau plus marneux qui ne doit pas être homogène car les nappes perchées sont manifestement discontinues ; l'argument qui milite en faveur de cette ' hypothèse est que le niveau piézométrique mesuré dans ces puits se situe vers 30 m de profondeur et que les débits unitaires des ouvrages sont minimes. En fin de compte le Pliocène inférieur, très perméable, ne semble être aquifère que lorsqu'il est peu profond ou bien repose sur une formation elle-même aquifère (vallée du Ksob et région d'Essaouira) ; ailleurs il est probablement sec le plus souvent. Ainsi, toutes les recherches anciennes sont-elles sans doute à reconsidérer au moins du point de vue de leur objectif ; on s'est dans cette affaire laissé influencer par une étude géophysique, de qualité d'ailleurs plus que douteuse, aux dépens d'un examen hydrogéologique approfondi. Il n'en demeure pas moins que les chances de découvrir d'importants débits d'eaux souterraines dans cette région apparaissent plutôt minces.

Le plateau côtier d'Akermoud s'allonge entre la mer et les Jbel Hadid et Ali-Kourati qui constituent une limite très marquée au SE et à l'E. La limite N est large d'une dizaine de kilomètres. Le substratum secondaire est constitué de Crétacé affleurant vers la cote 70 m en bordure de mer au SW, et à l'E par les massifs jurassiques des Jbels Hadid et Ali-Kourati ; ce substratum secondaire est assez peu perméable dans l'ensemble et dessine un synclinal très plat entre la mer et les jbels, synclinal recouvert en discordance par les grès pliocènes marins puis la dune quaternaire.

La base du Moghrébien gréseux s'abaisse de la cote + 70 m au S à + 40 m au N (vallée de l'oued Tennsift) et l'on est ainsi tenté de prévoir une vidange de la cuvette gréseuse vers le N, c'est-à-dire vers la vallée du Tennsift ; malheureusement il est probable que le substratum du Pliocène est perméable au N du plateau (série calcaréo-dolomitique du Jurassique). Deux objectifs s'offraient alors aux recherches : atteindre la nappe plio-quaternaire au cœur du synclinal ou bien explorer la série jurassique au NE, là où elle n'est pas trop profonde (sa base se situerait vers 400 m de profondeur à proximité de l'oued Tennsift). Etant donné l'intérêt de trouver de l'eau au centre du plateau, on choisit d'explorer le Pliocène ; deux sondages auprès d'Akermoud (92 et 103/43) exécutés en 1953 peuvent être considérés comme positifs bien que l'eau soit profonde (103 et 46 m respectivement) et les débits modestes (1 et 8 litres/seconde). Il ne fait pas de doute qu'il serait possible de créer un réseau assez dense de points d'eau au bénéfice des troupeaux et peut-être même de permettre la promotion individuelle de quelques petits périmètres maraîchers irrigués ; l'eau se situe vers la cote absolue + 30 m dans les deux cas, et la partie aquifère du réservoir Pliocène comprend les 10 à 20 mètres inférieurs ce qui est assez peu.

La moitié nord du plateau d'Akermoud a été prospectée (Boudon, 1972), mais les points d'eau y sont très rares : une dizaine seulement ont été in-ventoriés. Comme le laissait prévoir un précédent rapport (Thuille, 1957), l'eau est profonde car le substratum secondaire (Jurassique supérieur), est

650 environ

0 2 4 6 km

Marabout de Si Yacoub à la coted'un lambeau de pliocène près dupothèse est fondée sur l'existance

été portées sur la coupe . Cette hy-NB : Les failles hypothétiques ontCrétacé inférieur. Calcaire. Marno-calcaire

Jurassique supérieur. Calcaire (CallovienLusitanien. Kimméridgien

Jurassique lagunaire. Calcaires gréseuxet marnes rouges

Trias. Marnes rouges et gypse

Si MOULAY ER RASFA Za AKERMOUD

PLAINE D'AKERMOUD AIN ASSOUAFIRJBEL RADID

500

0

500

400

300

200

100

0

Terre végétale rouge

Grès dunair

Grès marin

Méso-crétacé et crétacé supé-rieur. Marnes-calcaires

Pliocène

FIG. 177 — Coupe géologique schématique de la plaine d'Akermoud d'après L. Monition, 1953.

BASSIN ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE COTIERE ESSAOUIRA 441.

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4 4 2 RESSOURCES EN EAU DU MAROC

perméable et draine vers le bas le Pliocène sus-jacent ; en outre, l'eau est plus ou moins saumâtre à cause de la présence de lentilles de gypse dans le réservoir calcaréo-dolomitique du Jurassique. Tout ceci demande à être vérifié par une prospection systématique par forages et géophysique qui permettra de mettre sur pied un programme de recherche. Jusqu'à présent, les difficultés d'accès de la région et l'éloignement au Centre Régional de rattachement ont été les deux principales raisons du délaissement de ce secteur.

LE SÉNONIEN ET L'EOCÈNE

Ces étages ne sont représentés que localement dans la partie orientale du synclinal de Korimat et dans la cuvette de l'oued Igrounzar. Ils renferment quelques niveaux de marno-calcaires à silex qui alimentent de petites sources au débit très constant.

LE CÉNOMANIEN ET LE TURONIEN

Dans le bassin d'Essaouira-Chichaoua les calcaires compacts du Turonien et les calcaires et marno-calcaires jaunes du Cénomanien forment deux barres qui tantôt dominent en surplomb les marnes albiennes, tantôt apparaissent sous les marnes de la série phosphatée, découpées par les oueds en gorges aux parois abruptes.

Aux affleurements ces dalles reçoivent et laissent largement s'infiltrer les eaux météoriques et les eaux transportées par les oueds. En profondeur elles peuvent également recevoir des eaux du Pliocène ou du Quaternaire.

L'écoulement souterrain s'opère suivant un réseau karstique encore mal connu. L'eau ainsi acheminée jaillit en sources dans les cuvettes synclinales aux points bas et au contact de niveaux marneux ; le débit de ces sources s'échelonne de quelques litres à quelques dizaines de litres par seconde et s'avère assez régulier (vallée de l'oued Mrameur par exemple).

Tout au long de l'oued Igrounzar-Ksob ces deux niveaux calcaires jouent un rôle important dans la suralimentation et dans les pertes de l'oued ; on en reparlera ci-dessous à propos de l'alimentation en eau de la ville d'Essaouira.

Dans la cuvette synclinale de Korimat, l'eau des sources s'accumule parfois dans des élargissements de vallées à sous-sol marneux et mal drainés à l'aval. Il en résulte des remontées et parfois des affleurements de nappes nuisibles à l'agriculture et à la salubrité. Des problèmes de drainage se posent ainsi localement tandis que sur les plateaux calcaires du pourtour les habitants ne peuvent disposer que de réserves d'eau accumulées dans des citernes.

L'APTIEN ET LE BARRÉMIEN Ces étages comprennent un niveau calcaire ou

gréseux assez constant interstratifié dans des marnes épaisses. Les zones d'alimentation sont peu étendues, aussi les débits aux exutoires naturels sont-ils toujours inférieurs au litre par seconde. On peut citer comme appartenant à ce groupe quelques sources sur le flanc du synclinal de Bouabout.

LE JURASSIQUE SUPÉRIEUR Les marno-calcaires gypsifères et les calcaires du

Jurassique supérieur affleurent sur les Jbels Hadid et Amsittène et dans les Mouissate, sur la bordure nord du bassin d'Essaouira-Chichaoua. Ils sont d'autre part présents en profondeur sous les marnes et argiles du Crétacé inférieur.

Ces formations sont faiblement perméables et l'eau qui y circule est presque toujours séléniteuse. De potabilité médiocre pour les hommes, il est cependant utile de la rechercher pour l'abreuvement des troupeaux lorsqu'il n'y a pas d'autre ressource et lorsqu'elle est accessible. C'est le cas dans la partie nord du synclinal de Korimat-Bled Hart.

CHIMIE DES EAUX

BASSIN D'ESSAOUIRA-CHICHAOUA Les eaux du Sénonien et de l'Eocène sont de

qualités diverses et de concentration généralement comprise entre 1 et 2 gr/l ; le faciès est chloruré sodique ou sulfaté calcique.

Les eaux sont assez douces dans le Turonien (0,5 à 1,5 gr par litre, faciès bicarbonaté calcique au-dessous de 0,8 gr/l, chloruré sodique au-dessus, plus rarement).

Les eaux du Cénomanien sont presque toujours plus concentrées (0,3 à 3 gr/l, généralement plus de 1 gr/l). Leur faciès est variable, mais toujours assez riche en sulfate : bicarbonaté calcique, chloruré sodique ou calcique.

Les eaux de l'Aptien et du Barrémien ont une concentration comprise entre 0,7 et 1,5 gr par litre ; le faciès est bicarbonaté calcique ou chloruré sodique, riche en sulfates.

Les eaux du Jurassique supérieur sont généralement séléniteuses.

Il faut noter enfin la présence d'eaux connées très concentrées, associées à des gisements d'hydrocarbures au centre du bassin dans le Jurassique supérieur (sondage KE 2 de la S.C.P. : 60 gr par litre, faciès chloruré sodique) ou dans le Lias (sondage KE 1, 434 gr par litre, faciès chloruré calcique très aberrant).

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BASSIN ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE COTIERE ESSAOUIRA

FIG. 178 — Composition des eaux du bassin d'Essaouira en représentation logarithmique :

54/43 = Aïn el Hajar, 62/5,1 = Sources palmier (Turonien d'Essaouira), 401/52 = Oued Zeltène à la station de jaugeage.

ZONE CÔTIÈRE D'ESSAOUIRA

Les eaux du Quaternaire et du Pliocène sont de qualités variables, médiocres en majorité et souvent saumâtres (0,2 à 8 gr par litre, plus de 1 gr par litre sur la plus grande étendue). Les eaux très douces bicarbonatées calciques sont rares (dunes d'Essaouira:

0,2 à 0,3 gr par litre) et le faciès chloruré sodique prédomine largement.

Dans les calcaires du Cénomanien-Turonien l'eau est plus ou moins salée (1 à 2 gr par litre, faciès chloruré sodique) et plus concentrée dans le Cénomanien que dans le Turonien. Il en est de même dans le Crétacé inférieur (1.5 à 2 gr par litre, faciès chloruré sodique pauvre en sulfates).

443

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444 RESSOURCES EN EAU DU MAROC

Aménagement des eaux

ALIMENTATION EN EAU D'ESSAOUIRA (fig. 179)

La population d'Essaouira était de 26 400 habitants au recensement de 1960, et dépasse en 1970 les 30 000 habitants. La vie économique est axée sur la pêche et les industries dérivées (conserveries) mais il existe une tannerie et une huilerie ainsi qu'une activité artisanale importante spécialisée dans le travail du bois (tables et coffres).

L'alimentation de la citadelle portugaise fut d'abord assurée par des puits foncés dans les grés dunaires puis par une séguia dérivant les eaux pérennes de l'oued Ksob à 3 km au SSE de la ville. Le débit de cette séguia, progressivement aménagée en buses, fut porté jusqu'à 30 et 40 l/s ; puis l'ouvrage fut désaffecté pour l'alimentation de la ville et consacré à l'irrigation d'une vingtaine d'hectares de jardins dans la ville même. L'ouvrage de prise ne fut jamais réalisé et les usagers reconstituèrent sommairement une levée de terre sur le

Ksob après chaque crue importante, de façon à dériver l'eau vers la séguia. Enfin, vers 1952, une crue importante détruisit la séguia qui ne fut jamais reconstruite ; la zone de jardins qu'elle irriguait fut livrée à l'urbanisation. Simultanément, on captait 2 km en amont de la dérivation ci-dessus mentionnée une série de sources dans la vallée du Ksob, sources émergeant du Pliocène, mais manifestement soutenues par des dégorgements du Turonien sous-jacent ; des pompes refoulent l'eau au sommet de la berge rive droite et une adduction gravitaire la conduit à Essaouira. De l'ordre de 30 1/s, le débit capté était insuffisant dès 1940 et de nombreux travaux furent effectués depuis cette époque pour tenter d'accroître les exploitations locales d'eau souterraine. L'exploitation de deux sources et d'un puits permirent de porter les ressources à 42 l/s, puis le captage d'une nouvelle source (source du Palmier) en 1968, à 600 m en amont des installations existantes, porta le potentiel disponible à 58 l/s, encore insuffisant en raison de l’accroissement

45

75

65

Source et son n° I.R.E.

Puits

Forage

Indice I.R.E. 51115

0 1 2 3 km

78

79

63

60

9053

63

65

8586

6443 68

84

85 90

R.P. 8

KSOB

OU

ED

105

45

110

R.P. 1077

R.P. 8

ESSAOUIRA

A T

L A

N T

I Q

U E

O C

E A

N

" "

""

Fia. 179 — Plan de position des différents travaux de recherche effectués pour l'alimentation en eau

potable de la ville d'Essaouira.

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des besoins. De nombreux travaux de recherche, tous négatifs, avaient été effectués entre-temps d'abord auprès des captages productifs, puis en s'en éloignant. Ce sont : • Le sondage 64/51 (1953) effectué dans la basse

terrasse de l'oued Ksob à 150 m en amont des captages principaux avait pour objet de recon-naître la perméabilité des alluvions et les qualités du calcaire turonien. L'ouvrage traversa 10 m d'alluvions colmatées puis 20 m de calcaires turoniens compacts avant de s'achever dans le Cénomanien marno-calcaire. Le débit était faible (2,5 1/s) et le sondage fut abandonné.

• Le sondage 68/51 (1953) avait uniquement le calcaire turonien pour objectif. Implanté en rive gauche du Ksob au droit du captage, il recoupa la série calcaire compacte (0,5 l/s) et fut aban-donné.

• Le puits 65/51 (1953) situé en rive droite du Ksob, en aval des sources, recoupa une diaclase dans des bancs calcaires du Cénomanien qui produit 8 l/s. Ce puits fut équipé au bénéfice de la ville. (Ce puits est mal implanté sur la fig. 179, il se situe en fait en rive droite au même niveau que le forage 84/51).

• En 1955, trois puits (77,78 et 79/51) furent exécutés à l'E d'Essaouira, dans les dunes quaternaires. Les deux premiers ont traversé le Quaternaire et le Pliocène et atteint le Crétacé, alors que le troisième était arrêté dans le Pliocène. La tranche aquifère était très peu épaisse dans tous les cas, les débits étaient faibles et le niveau de l'eau très proche du niveau de la mer ce qui faisait craindre une invasion marine de, la nappe en cas d'exploitation d'ouvrages de ce genre, si l'on en constituait de plus productifs et conduisait à éliminer cette voie de recherche. En 1968, à l'occasion du fonçage d'un avant-puits pour un sondage pétrolier, un débit de 15 l/s d'eau douce fut extrait à proximité des anciens puits d'étude, dans le Plio-Quaternaire, reposant le problème de l'étude de cet objectif.

• En 1956 puis en 1959 furent exécutés les deux sondages 63/51 et 120/43 sur le plateau côtier au NE d'Essaouira, recherchant des vallées fossiles du Pliocène déterminées par géophysique. La validité de ces objectifs a été discutée précédem-ment et les deux ouvrages furent des échecs.

• Un puits à galerie fut effectué (1959) pour capter la source du Palmier (62/51) située à 600 m en amont des captages de la ville et émergeant des calcaires turoniens. Le débit obtenu était de 6 l/s, mais les ouvrages furent détruits par une crue en 1962 ; la reprise du captage de cette source en 1968 permit d'obtenir 16 l/s injectés immédiatement dans le réseau urbain.

• En 1962 une nouvelle campagne de sondage (84,

85 et 86/51) s'adressait à nouveau aux calcaires turoniens autour des sources. Ces derniers, épais de 35 m, étaient traversés sous 4 m de Pliocène et s'avéraient à nouveau compacts (0,5 à 0,7 l/s). Le caractère karstique de ces formations est l'élément essentiel comme en témoignent les griffons des sources ; hors du karst, l'ensemble est compact et improductif, ce qui rend particulièrement aléatoire une recherche par puits ou sondage,

• Enfin, en 1971 des essais de puits négatifs (puits 53 et 90/51) ont été effectués au débouché d'une petite plaine alluviale en amont de la route RP N° 8 où des émergences dans l'oued Ksob avaient été reconnues, indices du drainage d'un réservoir aquifère.

Comme on peut en juger, l'alimentation en eau d'Essaouira à partir de ressources souterraines locales pose des problèmes difficiles dans l'état actuel des connaissances, il est vraie assez fragmentaires, sur l'hydrogéologie de cette région. En multipliant les tra-vaux de recherche, on peut peut-être espérer découvrir quelques bons captages dans le Plio-Quaternaire (du type de l'avant-puits pour sondage pétrolier mentionné ci-dessus), mais leur exploitation sera toujours difficile et coûteuse. On pourrait peut-être aussi s'intéresser à une source connue, (45/51) sortant du Plio-Quaternaire en bord de mer au S d'Essaouira, source submergée à marée haute, réputée pour un débit de 20 l/s et qu'il faudrait pouvoir capter en amont. Ces solutions n'en demeurent pas moins assez problématiques actuellem-ent, alors que la ville dispose de 60 l/s (contre 65 l/s demandés) et aura besoin de 80 l/s en 1975 de 105 1/s en 1985 et de plus de 160 l/s en 2 000. Pour l'immédiat (1975-85), on pense capter par drain le sous-écoulement pérenne de l'oued Ksob aval, soit 30 à 40l/s à l'étiage, écoulement jadis réservé à l'ancienne séguia de la ville.

PROJET DE BARRAGE SUR L'OUED KSOB

L'alimentation en eau d'Essaouira pourrait être assurée pour une plus longue échéance par la cons-truction d'un barrage sur l'oued Ksob, à la confluence des oueds Zeltène et Igrounzar. L'oued Ksob recoupe en cet endroit des formations de calcaires, de marno-calcaires et de marnes du Turonien et du Cénomanien ; le site est assez resserré et le pendage des couches orienté vers l'amont. L'oued Ksob pourrait être ainsi entièrement régularisé, ce qui permettrait de disposer d'un débit fictif continu de l'ordre de 3,0 m3/s. actuellement presque entièrement perdu à l'Océan. Sur ce débit il faudrait effectuer le prélèvement nécessaire à l'alimentation actuelle et future d'Essaouira et utiliser le reliquat soit à l'irrigation de plus de, 1 000 hectares de terres cultivables situées en aval dans la vallée, là où s'effectuaient jadis des cultures de canne à sucre soit aux besoins industriels d'un nouveau centre d'extraction

BASSIN ESSAOUIRA-CHICHAOUA ET ZONE COTIERE ESSAOUIRA 445

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446 RESSOURCES EN EAU DU MAROC

phosphatier (Bni des Meskala dont l'étude est en cours). Si cette suggestion d'un emploi mixte d'une réserve importante et coûteuse à mettre en place ne pouvait être combinée, l'édification d'un grand barrage serait trop coûteuse pour les seuls besoins d'Essaouira et il faudrait avoir recours à une autre solution, par exemple la création d'une petite retenue parallèle au Ksob, à proximité d'Essaouira, alimentée par des dérivations de débits d'hiver de l'oued Ksob.

CONCLUSIONS Cette région comporte de nombreux niveaux aqui-

fères dans les formations calcaires, gréseuses et allu-viales ; leur alimentation en eau ne peut provenir que des infiltrations dues aux précipitations directes ; pour une pluviométrie de 250 mm par an et en supposant que le coefficient d'infiltration est de 10 %, on peut estimer que la quantité d'eau infiltrée sur ce plateau est de 150 millions de m3 par an, ce qui représente environ 0,7 l/s par km2.

La circulation des eaux souterraines est dans l'ensemble du type karstique. Alors que les citernes sont le seul moyen de conserver l'eau sur la plus grande

partie de cette région, les eaux de sources s'accumulent parfois en des points bas et posent des problèmes de drainage.

L'ensemble des prélèvements par sources, puits ou sondages est de l'ordre de 1 m3/s, soit environ le 1 /5 de l'alimentation. La majeure partie des eaux infiltrées s'enfonce profondément par des cheminements kars-tiques difficilement décelables, gagne le Jurassique supérieur qui s'abouche à l'Océan.

Un barrage sur l'oued Ksob et le captage des sources existantes permettraient de résoudre les pro-blèmes d'alimentation en eau potable d'Essaouira, de nombreux douars environnants et de petits centres ainsi que de créer ou d'étendre des petits périmètres d'irrigation qui valoriseraient l'agriculture de cette région et permettraient peut-être une relance de son activité économique.

Des recherches par puits et par sondages profonds dans les divers niveaux aquifères, à l'emplacement des structures favorables à l'accumulation souterraine des eaux, permettraient également de créer des points d'eau dans d'autres secteurs jusqu'alors bien délaissés dans le domaine de la prospection des ressources en eau.

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Manuscrit reçu le 8 mai 1973.

Mise à jour partielle en décembre 1974