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349 ETUDE EXPERIMENTALE DE LA PRISE EN SOUFFRE D'UN CALCAIRE ET D'UN GRES CALCAREUX DANS LA CHAMBRE DE SIMULATION ATMOSPHERIQUE DE LAUSANNE GIRARDET,F., FURLAN,V. Laboratoire de Conservation de la Pierre, Ecole polytechnique Federale de Lausanne AUSSET,E.P. Laboratoire lnteruniversitaire des Systhemes Atmospheriques, CNRS-Universite Paris XII , Val de Mame , creteil DEL MONTE,M. Dipartimento di Scienze de la Terra e Geologia-ambientali , Universita di Bologna JEANNETTE, 0 . Centre de Geochimie de la Surface, CNRS, Strasbourg LEFEVRE, RA Laboratoire lnteruniversitaire des Systhemes Atmospheriques, CNRS-Universite Paris XII , Val de Mame , creteil 1 . INTRODUCTION Dans le cadre d'un contrat europeen, nous nous sommes proposes d'etudier par simulation en laboratoire les roles des apports atmospheriques solides et gazeux et de la nature des substrats, dans la genese des alterations superficielles des monuments. La simulation, contrairement aux etudes in situ, permet a la fois de limiter et de controler le nombre de parametres susceptibles d'intervenir dans les echanges atmosphere/materiaux. Par le choix des materiaux et des conditions experimentales, ii etait attendu de mieux situer le role, souvent controverse , des gaz et des particules (cendres volantes et microsuies) dans le processus de sulfatation des pierres. Dans ce but , une chambre de simulation atmospherique, apte a reproduire des condit ions de pollution proche de la realite du terrain a ete conc;ue et construite. Le but de cette communication est de presenter les caracteristiques principales de cette chambre et de presenter les premiers resultats des experimentations realisees avec un calcaire, un gres calcareux, ainsi qu'un materiau inerte, nus et recouverts de cendres volantes ou de microsuies (Ausset, 1996; Ausset et al. , 1996) . 2. CARACTERISTIQUES PRINCIPALES DE LA CHAMBRE DE SIMULATION DE LAUSANNE (LAUSANNE ATMOSPHERIC SIMULATION CHAMBER : LASC) Le LASC totalise dix cellules independantes. La capacite importante des cellules rend possible des essais sur de nombreuses eprouvettes de dimensions suffisamment grandes pour pallier les heterogeneites naturelles de la pierre. Les 1 0 cellules independantes auto risent plusieurs investigations simultanees, reduisant ainsi proportionnellement le temps necessaire a l'obtention des resultats. La conception du mode de mesure permet a la fois le suivi des divers parametres fixes et la quantification des echanges atmosphere/ materiau dans chaque cellule en temps reel. Le LASC (figure 1) comprend une cuve thermiquement bien isolee contenant 1000 litres d'eau. Dans cette cuve sont immergees, aux 3/4 de leur hauteur, les 10 cellules de mesure, realisees a partir de dessiccateurs de 22 litres en verre borosilicate (figure 2) . Le corps principal comprend egalement le systeme d'humidification de l'air, les pompes de circulation d'eau et d'air, les echangeurs de chaleur et les agregats de refroidissement. L'ensemble des canalisations, vannes, debitmetres, filtres, sont maintenus a 35°C de maniere a empecher tout risque de condensation.

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ETUDE EXPERIMENTALE DE LA PRISE EN SOUFFRE D'UN CALCAIRE ET D'UN GRES CALCAREUX DANS LA CHAMBRE DE SIMULATION ATMOSPHERIQUE DE LAUSANNE

GIRARDET,F., FURLAN,V. Laboratoire de Conservation de la Pierre, Ecole polytechnique Federale de Lausanne

AUSSET,E.P. Laboratoire lnteruniversitaire des Systhemes Atmospheriques, CNRS-Universite Paris XII, Val de Mame , creteil

DEL MONTE, M. Dipartimento di Scienze de la Terra e Geologia-ambientali, Universita di Bologna

JEANNETTE, 0 . Centre de Geochimie de la Surface, CNRS, Strasbourg

LEFEVRE, RA Laboratoire lnteruniversitaire des Systhemes Atmospheriques, CNRS-Universite Paris XII, Val de Mame , creteil

1 . INTRODUCTION

Dans le cadre d'un contrat europeen, nous nous sommes proposes d'etudier par simulation en laboratoire les roles des apports atmospheriques solides et gazeux et de la nature des substrats, dans la genese des alterations superficielles des monuments. La simulation, contrairement aux etudes in situ, permet a la fois de limiter et de controler le nombre de parametres susceptibles d'intervenir dans les echanges atmosphere/materiaux. Par le choix des materiaux et des conditions experimentales, ii etait attendu de mieux situer le role, souvent controverse, des gaz et des particules (cendres volantes et microsuies) dans le processus de sulfatation des pierres. Dans ce but, une chambre de simulation atmospherique, apte a reproduire des conditions de pollution proche de la realite du terrain a ete conc;ue et construite. Le but de cette communication est de presenter les caracteristiques principales de cette chambre et de presenter les premiers resultats des experimentations realisees avec un calcaire, un gres calcareux, ainsi qu'un materiau inerte, nus et recouverts de cendres volantes ou de microsuies (Ausset, 1996; Ausset et al., 1996).

2. CARACTERISTIQUES PRINCIPALES DE LA CHAMBRE DE SIMULATION DE LAUSANNE (LAUSANNE ATMOSPHERIC SIMULATION CHAMBER : LASC)

Le LASC totalise dix cellules independantes. La capacite importante des cellules rend possible des essais sur de nombreuses eprouvettes de dimensions suffisamment grandes pour pallier les heterogeneites naturelles de la pierre. Les 1 0 cellules independantes autorisent plusieurs investigations simultanees, reduisant ainsi proportionnellement le temps necessaire a l'obtention des resultats. La conception du mode de mesure permet a la fois le suivi des divers parametres fixes et la quantification des echanges atmosphere/ materiau dans chaque cellule en temps reel. Le LASC (figure 1) comprend une cuve thermiquement bien isolee contenant 1000 litres d'eau. Dans cette cuve sont immergees, aux 3/4 de leur hauteur, les 10 cellules de mesure, realisees a partir de dessiccateurs de 22 litres en verre borosilicate (figure 2). Le corps principal comprend egalement le systeme d'humidification de l'air, les pompes de circulation d'eau et d'air, les echangeurs de chaleur et les agregats de refroidissement. L'ensemble des canalisations, vannes, debitmetres, filtres, sont maintenus a 35°C de maniere a empecher tout risque de condensation.

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Electronique de

regulation

Regulateu~ de pression

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Reglage des debits et electrovannes d'echantillonnage des gaz d'entree et de sortie

Cuve d'humidification

Debimetres volumiques de sortie

Cellules ( 10)

Bain thermostatique

Agregat de refroidissement:

echangeur de chaleur et pompe

Figure 1 Schema d'ensemble de la chambre de simulation atmospherique de Lausanne.

Mesure de l'bumi di t~ absolue

Regulation de la pressioo (2000 Pa)

Electrovannes

Mesure de la concentration en S02

Electrovannes

Injection du so2 et N02 au moyen O debimetres massiques _ ... _.cEf

Reglage de la pression pruuaue

Injection d'air sec

__.

Ftltre au cbarl>on actif

Reglage du debit primaire

Rtg)age de l'humidi.tt

Bain d"cau

Filtre 0.2 µm

Figure 2 : Schema d' une des 1 0 cellules et de son fonctionnement.

Electrovannes

Ventilateur ~ vitesse reglable

Les eprouvettes sont placees dans la partie centrale cylindrique des cellules. Cette zone est delimitee, dans ses parties inferieure et superieure, par des grilles traversees en leur milieu par un canal contenant un ventilateur (figure 2). Le ventilateur aspire l'air au-dessous de la grille inferieure et le rejette par l'intermediaire du canal au-dessus de la grille superieure, provoquant ainsi un brassage important de !'atmosphere interieure de la cellule. Les eprouvettes sont posees

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debout sur la grille inferieure et disposees de maniere symetrique autour du canal central (figure 3).

------.. C entree C sortie

Figure 3 : Schema d'une cellule montrant la disposition de 4 paires d'eprouvettes ainsi que le cheminement de l'air pulse par le ventilateur insere a la base du canal central.

La concentration en S02 dans la cellule est maintenue par adjonction de S02 dilue dans de l'air injecte dans le canal central. L'ajustement de la temperature et de l'humidite relative est commun a toutes les cellules. Pour chaque cellule, la vitesse du ventilateur est reglable, ce qui permet, apres etalonnage, de moduler la resistance de transfert de l'air Rtrs. entre 1.2 et 4 s.cm-1 . Rtrs integre la resistance aerodynamique et la resistance de la couche limite. La vitesse de depot est donnee par la relation:

F vd =-c

ou Fest egal au flux de S02 fixe et C la concentration en S02. Dans une cellule, F peut aisement etre determine par la quantite de S02 consommee (difference de concentration entre l'entree Centree et la sortie Csortie), le debit de gaz, D, injecte dans la cellule et la surface, S, des eprouvettes exposees dans la cellule, selon la formule suivante :

F = ( c.nrrt - Csore )D

s

La concentration en S02 a la surface d'une eprouvette C depend de la resistance de transfert de l'air et de la resistance du materiau. Pour le calcul de Vd, nous avons pris en compte la concentration en S02 a la sortie Csortie. car elle integre la resistance de transfert de l'air. Par consequent :

Nota : En site reel la resistance de transfert de l'air constitue un facteur limitant la vitesse de depot. En si~ulation, V d est transposable aux cas reels si la resistance de transfert de I' air correspond egalement a des conditions reelles.

Les conditions realisables dans le LASC sont resumees dans le tableau 1 .

Temperature Humidite relative T eneur en S02 T eneur en N02 Resistance de transfert a l'air Rtrs

5 a 30 ± o.2°c 1oa95±1% 3 a 500 ppb ± 5 ppb 3 a 500 ppb ± 2 ppb 1,2 a 4 s cm-1

Tableau 1 : Parametres physiques et chimiques realisables dans le LASC.

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3. CONDITIONS EXPERIMENT ALES

Elles ont ete fixees en vue d'obtenir non seulement des produits de !'interaction gaz-materiaux susceptibles d'etre aisement detectes et quantifies tout au long de !'experience, mais aussi dans le souci d'operer dans des conditions proches de la realite du terrain. Compte tenu de ces imperatifs, nous avons opte pour des conditions de temperature, d' humidite relative et de concentration en SOz ayant reellement existees a Milan (tableau 2). La temperature et l'humidite relative correspondent a la moyenne de trente ans (de 1931 a 1960). La concentration en S02 et N02 a la moyenne mesuree en 1972, annee representative de la periode durant laquelle la pollution par le 502 etait particulierement elevee. La valeur de la resistance de transfert de l'air est representative des zones relativement bien abritees d'un batiment. L'experience s'est deroulee sur une annee avec prelevement d'eprouvettes a chaque trimestre.

Temperature Humidite relative T eneur en S02 T eneur en N02 Resistance de transfert a l'air Rtrs Temps d'exposition

13 ± 0.2°C 79 ± 1%

125 ± 5 ppb so a± 2 ppb 1.3 s cm-1

3, 6, 9 et 1 2 mois

Tableau 2 : Conditions experimentales a l'interieur de chaque cellule.

4. MATERIAUX EXPOSES

Deux types de pierres ont ete selectionnes en raison de leur forte reactivite au S02 determinee en site reel (Furlan et Girardet, 1992) : le calcaire de Jaumont et la molasse de Berne. Les cendres volantes et les microsuies ont ete prises en compte dans cette etude car elles sont toujours presentes dans les croutes gypseuses et leur role catalytique dans le processus de sulfatation est souvent evoque (, Novakov et al., 197 4, Chang et al., 1981 ; Camuffo et al., 1983; Del Monte et Sabbioni, 1 984; Ausset et al., 1994 ).

4. 1 . Les roches

Les calcaires de Jaumont (calcite 94%, quartz 2,5%) sont des bioclastites oolithiques a rares grains de quartz et a ciment microsparitique. La porosite de ces calcaires est formee par la juxtaposition d'une macroporosite et d'une microporosite communiquant peu. La macroporosite consiste en grands pores de l'ordre de 200 µm resultant de la dissolution de la bordure des oolithes. Les etudes petrophysiques montrent qu'il s'agit d'une porosite piegee. La microporosite resulte de plages situees soit au centre des oolithes, soit dans le ciment microsparitiques; ii s'agit d'une porosite libre. Les gres de Berne (calcite 23%, quartz 40%) sont constitues de grains de quartz, de feldspaths potassiques et d'elements lithiques (quartzites et micaschistes) souvent anguleux, dont les grands diametres sont de l'ordre de 60 µm. Ces grains, associes a des glauconies, a des lamelles de biotites chloritisees a des muscovites, sont soudes par une matrice calcaire et argileuse. Comme pour les calcaires de Jaurnont, deux porosite affectent les gres de Berne. La microporosite est formee d'une part par les retrecissements aux contacts des grains et d'autre part surtout par celle des feldspaths alteres et des argiles. II s'agit d'une porosite libre. La macroporosite est constituee par les espaces intergranulaires non occupes par la matrice calcaire et argileuse; ils sont rarement plus grands que 50 µm. II s'agit d'une porosite piegee.

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4.2. Le support inerte

Comme support inerte, nous avons utilise un filtre Whatman ® QM-A, constitue de microfibres de quartz, considere totalement inerte dans les conditions experimentales retenues.

4. 3. Les cendres volantes et les microsuies

Les cendres volantes proviennent de la centrale de Porcheville (France) qui fonctionne au fuel lourd. Elles ont ete prelevees sur les depoussiereurs electrostatiques. Pour !'experimentation, on a utilise les particules de diametres inferieurs a 100 µm, separees par tamisage. Les 97% de ces particules, de taille comprise entre 50 et 1 00 µm, correspondent aux particules carbonacees; le reste est constitue de spheres solides et de cenospheres (selon la nomenclature de Fischer et al., 1978). Les microsuies ont ete prelevees sur les parois d'un pot d'echappement d'un moteur installe sur les banes d'essais de l'lnstitut Fran<;ais du Petrole (Rueil-Malmaison, France). Le prelevemeht realise correspond en fait aux produits de combustion de plusieurs fuels de qualites variees comme c'est le cas dans les rejets des moteurs diesel dans !'atmosphere urbaine polluee. Les microsuies obtenues sont noires et ont un diametre de l'ordre de 0,2 µm.

4 . 4 . Preparation des eprouvettes

Les eprouvettes de pierres de 0.1 x0.1 x0.02 m ont ete prelevees au coeur de memes blocs de Carriere. Elle ont ete debitees, dressees, lavees a l'eau demineralisee et sechees a 60°C jusqu'a poids constant. Chacun des supports, le calcaire de Jaumont, la molasse de Berne, ainsi que le support inerte, ont done ete exposes dans les cellules soit nus soit recouverts de cendres volantes ou de microsuies, chaque cellule ne renfermant qu'un seul type de preparation. Un total de 72 eprouvettes ont ete exposees afin que tous les trois mois un lot complet puisse etre sorti pour etre etudie. L'application des cendres volantes (7.5 g m-2) et des microsuies (5 g m-2) a ete faite par epandage a sec, suivi d'un leger frottage afin d'assurer l'accrochage des particules. Les eprouvettes ont ete assemblees par couple (dos-a-dos) au moyen d'un ruban de PTFE applique sur le pourtour. De ce fait, seule une face de chaque eprouvette est exposee a !'atmosphere de la chambre de simulation.

5. RESULT ATS PRELIMINAIRES

S. 1 . Vitesse de depot du S02

Les vitesses de depot du S02 pour les 3 materiaux, nus, recouverts de cendres volantes ou de microsuies, ont ete determinees durant les 12 mois d'experimentation. On constate que :

- pour les filtres en fibres de quartz, dans tous les cas, la vitesse de fixation de SO 2 est t res

faible, comprise entre 0 .005 et 0 .01 cm s-1 (figure 4.); - la molasse de Berne a des vitesses de depot de SOz comprises entre 0.40 et 0 .20 cm s- 1

(figure 5) , alors que dans le cas du calcaire de Jaumont ces vitesses varient avec une amplitude

plus grande, comprise entre 0.45 et 0. 1 5 cm s-1 ; - dans le cas du calcaire de Jaumont (figure 6) , on observe une plus grande difference entre les

trois vitesses de depot (nu, avec cendres volantes ou avec microsuies) que dans le cas de la molasse de Berne ces differences tendant a s'attenuer avec le temps;

- dans les deux ca~, mais plus particulierement pour le calcaire de Jaumont, la vitesse de depot diminue avec le temps;

- la vitesse de depot pour ta molasse de Berne est proche de la vitesse moyenne observee a Milan (Furlan et Girardet, 1992). En revanche, celle du calcaire de Jaumont en est sensiblement eloignee durant les 6 premiers mois (figure 6) ;

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les cendres volantes, jusqu'a environ 4 mois d'exposition, semblent jouer un role d'ecran protecteur, mais au-dela, et notamment lorsqu'elles sont associees au calcaire de Jaumont, elles semblent jouer plutot un role activateur;

- dans le cas des pierres recouvertes de microsuies, les vitesses de depot sont inferieures a celles observees pour les pierres nues ou recouvertes de cendres volantes au moins pendant les 9 premiers mois. Au-dela du 9eme mois, les differences entre les vitesses s'attenuent.

--I E (,) -'Cl >

0.05

-- - -- Microsuies -- Cendres volantes 0.04 --Nu

0.03 B B

;,

0.02 '

-...-..i.;,....-~~-f~- . . ...,-·~~ 0.01-+----+----+----+---....... _._....__-'t----+-~.._-t----t---~

0 2000

0 3

4000 6000

6 9

Duree d'exposition

8000 [h]

1 2 [md s]

Figure 4 : Vitesse de depot de S02 sur les supports de quartz, nu, recouvert de cendres volantes et de microsuies durant les 12 mois d'experimentation. A = augmentation accidentelle de l'humidite relative; B = interruption accidentelle de !'injection de S02 dans les cellules Noter que l'echelle des vitesses est dilatee 10 fois par rapport a celle des figures 5 et 6.

- 0.5 -I E u -'Cl

>

M

0.2

0.1 0 2000

0 3

A B

--- -- Microsuies --·- Cendres volantes -- Nu

4000 6000 8000 [h]

6 9

Duree d'expcsitbn 1 2

[moi s]

Figure 5 : Vitesse de fixation de SO 2 sur la molasse de Berne, nue, recouverte de cendres volantes et de microsuies durant les 12 mois d'experimentation. A = augmentation accidentelle de l'humidite relative; B = interruption accidentelle de f'injection de S02 dans les cellules; M = vitesse moyenne annuelle observee a Milan (Furlan et Girardet, 1992)

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-I

E ()

'C >

M

355

---- Microsuies ·- Cendres volantes -- Nu

0.1 +---+---+------f---+---+----+---......._ ____ --' 8000 [h] 0 2000

0 3

4000 6000

6 9

Duree d 'exposit ion 1 2

[md s]

Figure 6 : Vitesse de depot de S02 sur le calcaire de Jaumont, nu, recouvert de cendres volantes et de microsuies durant les 12 mois d'experimentation. A = augmentation accidentelle de l'humidite relative; B = interruption accidentelle de !'injection de S02 dans les cellules; M = vitesse moyenne annuelle observee a Milan (Furlan et Girardet, 1992)

Bien que !'ensemble des parametres de base tels que temperature, humidite relative, concentration et debit gazeux soient maintenus dans les limites etroites fixees, la mesure de vitesse de depot du S02 presente quelques variations brusque de grandes amplitudes visibles sur les courbes (figures 4, 5 et 6, A et B). Ces pies correspondent a des variations anormales et momentanees de l'humidite ou de la concentration en S02. Ces accidents de breve duree ne semblent pas avoir une incidence durable sur la vitesse de depot pour la molasse de Berne. En revanche, ils ont un effet tres marque dans le cas du calcaire de Jaumont : une chute de la concentration en S02 de quelques heures provoque une activation de la vitesse de depot durant plusieurs centaines d'heures. Au contraire, lors d'une augmentation d'humidite, la vitesse de depot reprend aisement son allure precedente. Ceci montre que les deux materiaux presentent une sensible difference de comportement des que l'on s'eloigne d'un regime stationnaire, difference probablement liee a celles de leurs proprietes petrophysiques et aux produits de reaction.

5. 2. Determination de la prise en soufre

Trirnestriellement, un lot de 2 eprouvettes a ete retire de chaque cellule. Les prelevements (3 par eprouvette) destines aux analyses ont ete realises par fraisage des eprouvettes par pas successifs de 0.1 mm sur une profondeur de 2.5 mm. Les concentrations en soufre ont ete determinees par pyrolyse et infrarouge (analyseur elementaire de C et S : CSA 2003 Leybold-Heraus) directement sur les poudres recoltees. Les resultats obtenus a 3, 6, 9 et 12 mois pour chacune des pierres, nues, recouvertes de cendres volantes ou de microsuies sont representes sur la figure 7. Les valeurs repartees sur ces courbes de distribution correspondent au soufre reellement fixe, c'est-a-dire apres deduction du soufre contenu originellement dans les pierres, les cendres volantes ou les microsuies. On y observe une decroissance reguliere de la teneur en soufre de la surface vers la profondeur, sauf dans le cas du calcaire de Jaumont, dans lequel la plus faible teneur en soufre dans le premier pas, par rapport au deuxieme, peut s'expliquer par la difference des microreliefs a la surface des eprouvettes; l'abondance de grands pores ouverts sur l'exterieur a la surface des eprouvettes de Jaumont reduit !'importance de la surface minerale et done les possibilites de fixation du S02 dans les parties les

plus externes.

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On donne dans le tableau 3 les flux totaux de soufre calcules a partir des donnees precedentes par integration des differentes courbes de distribution de la figure 7. On observe que :

- le flux augmente de fai;on non lineaire en fonction du temps : ii ralentit, qu'elle que soit la nature de la pierre et qu'elle soit ou non recouverte;

- le calcaire de Jaumont est, dans tous les cas, plus reactif que la molasse de Berne; - a partir du 6eme mois, les cendres volantes qui jouaient un role d'ecran jouent un role

activateur, specialement sur Jaumont; - au contraire, les microsuies jouent, durant toute la duree de !'experience, un role d'ecran

protecteur; - les resultats concernant la prise en soufre en fonction de la profondeur dans les echantillons

(figure 7) et les calculs du flux de soufre fixe (tableau 3) sont en accord avec la mesure de la vitesse de depot de SOz (figures 5 et 6) ;

- par ailleurs, l'allure des courbes de la figure 7 correspondent bien a celle determinee sur des eprouvettes des memes pierres exposees en site reel a Milan en 1986 et 1987 (Furlan et Girardet, 1992); a titre d'exemple, la figure 8 montre la repartition du soufre determinee sur une eprouvette de molasse de Berne apres une annee d'exposition a Milan;

- les valeurs de flux a 9 et 1 2 mois confirment egalement que le calcaire de Jaumont, recouvert de cendres volantes, est plus reactif que le meme materiau nu.

Nu Cendr .. volantes Mlcrosui•s Nu c •. ndres volantes Mlcrosuies .. .. :IE .. :IIJ .. :El g l <: E

!.: ~ ' ~ · ~· ~ "'o.s "'0.5 "'o.s

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Prctcncler(mm)

.-. Molasse de Berne o-o Calcaire de Jaumont

Figure 7 Repartition du soufre dans les eprouvettes apres 12 mois d'exposition.

- -

0.8 0.8

1 ~

\\>.::! ~-

~ 06 ., ~ 8 0.4

0.2

.i:d;i_

\ 9

0000 Poo<b \l<D---1

0.2

0 05 15 05 15

A Profondc ur (mm)

B Profondcur (mm)

Figure 8 : Courbe de repartition du soufre en fonction de la profondeur dans une eprouvette de molasse de Bern, A et dans une eprouvette de calcaire de Jaumont, B exposees nues a Milan pendant une annee, 1986-1987.

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avec avec Pierres temQs nu cendres volantes suies

3 mo is 3 .0 2 .7 2 .2 6 mois 7 .1 6.7 4.5

calcaire de Jaumont 9 mo is 8 .3 9.6 5.6 12 mois 10.0 10.3 7 .2

3 mois 2.6 2.6 1.9 6 mois 4.9 4.7 3.5

molasse de Berne 9 mo is 6.7 6.2 5.0 12 mois 8.3 8.5 6 .3

Tableau 3 : Flux de soufre fixe par les pierres (g m-2an- 1) au cours des 12 mois d'exposition selon la nature de leur recouvrement.

6. CONCLUSIONS

L'analyse des premiers resultats concernant le comportement des materiaux exposes pendant un an dans la chambre de simulation atmospherique de Lausanne nous permet de montrer qu'une simulation dans des conditions proches de la realite entraine des modifications quantifiables dans ces materiaux, modifications effectivement comparables a celles qui se produisent en site urbain pollue. Nous avons ainsi constate une prise en soufre sur les materiaux pierreux etudies, localisee essentiellement entre la surface et le premier 1 /2 millimetre. Le calcaire de Jaumont et la molasse de Berne ont des vitesses de depot de S02 ainsi que des prises en soufre differentes lorsqu'elles sont exposes nus, ce qui peut s'expliquer par leur composition chimico-mineralogique et leurs proprietes petrophysiques differentes. Le recouvrement du calcaire de Jaumont par les cendres volantes ne modifie pas son comportement durant les 3 ou 4 premiers mois, alors qu'il entraine une augmentation de cette vitesse a partir de cette periode. Sur la molasse de Berne, les cendres volantes semblent entrainer moins de modifications de comportement. En revanche, les microsuies semblent, dans les deux cas, passiver de fai;on importante les pierres pendant les 6 premiers mois et de fa<;on moins importante ensuite. On constate d'autre part une diminution generale de la vitesse de depot de S02 et de la prise en soufre au cours du temps, quel que soit le materiau, recouvert ou non, mettant ainsi en evidence un phenomene de passivation des differents materiaux nus ou recouverts. La correlation entre les vitesses de depot du S02 dans le LASC et celles en site reel est abordee dans la communication "Reactivite des pierre au S02 atmospherique, etude en chambre de simulation et correlation avec les rnesure in situ" presentee a ce meme congres.

REMERCIEMENTS

Ce travail a ete finance par la Commission Europeenne, contrat n° EV5V-CT92-0 116DGXll) et le Fonds National Suisse pour la Recherche Scientifique).

Page 10: VOLUME1iscs.icomos.org/pdf-files/Berlin1996/giraetal.pdf · 2015. 7. 13. · 353 4.2. Le support inerte Comme support inerte, nous avons utilise un filtre Whatman ® QM-A, constitue

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