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Mardi 19 août 2014 -  70 e année - N˚21642 -  2 ¤ -  Francemétropolitaine -  www.lemonde.fr  --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry S ur la crise irakienne comme sur les autres, l’Union euro- péenne avance en ordre dis- persé tout en recouvrant ses dissensions d’un voile pudique de consensus. Réunis en urgence, le 15août,à lademandedela Franceet de l’Italie, les ministres des affaires étrangères des Vingt-Huit se sont félicités…quechacunn’enfassequ’à sa tête. En clair, faute de parvenir à une position commune, chacun est libre d’envoyer, ou pas, des armes aux Kurdes d’Irak pour combattre lesdjihadistesdel’Etatislamique. Comme à sonhabitude, laFrance n’amêmepasattenducetteréunion pour annoncer qu’elle livrerait des «armes sophistiquées»  aux diri- geants du Kurdistan autonome d’Irak; ceux-ci se plaignent amère- ment d’être sous-équipés en arme- ments capables de faire face à des insurgésquiontsaisilesstocksamé- ricains de l’armée irakienne. Le Royaume-Uni, l’Italie et la Républi- que tchèque ont emboîté le pas à Paris. En revanche, la Suède préfère s’en tenir à son credo neutraliste et pacifiste. Enfin, l’Allemagne s’est retrouvée une fois de plus tiraillée entresondésirdepesersurlacondui- tedes affairesdu monde etson héri- tagedenon-interventionpost-secon- deguerre mondiale. Pourrésoudrecedilemme,Berlin a annoncé la livraison de matériel nonlétal.Mais,faceauxappelspres- sants du dirigeant kurde Massoud Barzani et à la menace immédiate d’extermination des minorités reli- gieuses du nord de l’Irak, Berlin a finalement décidé d’aller  «jus- qu’auxlimitesde cequiest politique- mentetlégalementfaisable»,aexpli- quélechefdeladiplomatiealleman- de,Frank-Walter Steinmeier. Cespréventionsn’ontpasunique- ment leur source dans la tradition- nelle répulsion allemande à partici- per, même indirectement, à une guerre. L’inquiétude, crûment résu- mée par M.Steinmeier, en visite en Irakce week-end, estla suivante: les armes livrées aux peshmergas (les soldatsdel’arméeduKurdistanauto- nome)nedoiventpasservir,unjour, à faire la guerre à l’Etat central ira- kien,baséà Bagdad. Depuis le début de l’offensive- éclair de l’Etat islamique, les diri- geants kurdes cachent à peine leur jubilation: l’Etat irakien n’a jamais été aussi près de se disloquer et le Kurdistan n’a jamais été aussi près del’indépendance. C’est une chance historique que Massoud Barzani n’entend pas lais- ser passer. Il a annoncé un référen- dum sur la question dans les pro- chains mois, s’attirant aussitôt la réprobation de Washington. De même,Berlinestfermementopposé àuneindépendancedes Kurdes,qui déstabiliserait un peu plus l’Irak et toutleMoyen-Orientetentraînerait uneguerredetous contretous. En livrant des armes sophisti- quées aux Kurdes, et en achetant directement leur pétrole, comme le font les Etats-Unis, les Occidentaux prennentle risquede réglerun pro- blème immédiat en en créant un autre,plusépineuxencore. p LIRENOS INFORMATIONSPAGE3 50av.d’Italie 75013 PARIS 148av.Malakoff 75016 PARIS 247rue deBelleville 75019 PARIS 262bdduHavre 95 PIERRELAYE MATELAS - SOMMIERS xesourelevables-toutesdimensions TRECA - TEMPUR - DUNLOPILLO - EPEDA - SIMMONS- STEINER -BULTEX... 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Ilétaitl’auteurde Quic’est celui-là ,immensesuccès del’année1973. CULTURE – PAGE11 ÉDITORIAL Hollande-Valls, les six dossiers d’une rentrée à hauts risques AUJOURD’HUI FERGUSON: LA COLÈRE DES NOIRS AMÉRICAINS tFaceaux nouvelles violences, legouverneurdu Missouri ordonne le déploiementde lagardenationale LIREPAGE2         U         K       p       r         i       c       e         £         1  ,         8         0 tLemauvais chiffrede lacroissance complique l’équation budgétaire etpolitique du gouvernement tChômage, impôts, réforme territoriale, rythmes scolaires…: décryptagedes dossiers brûlantsdela rentrée tLes tensions s’accentuentà gauche, la politiqueéconomique dugouvernement estde plusen plus critiquée t MM. Hollande et Valls ont, pour l’heure, choisi deresterinflexiblesface auxremises encause LIREPAGES6ET7 LE REGARD DE PLANTU ArmerlesKurdes, solutionàdouble tranchant Desmanifestants faceà lapolice, à Ferguson, danslanuit dudimanche17 aulundi18août. LUCASJACKSON/REUTERS Algérie 180DA, Allemagne 2,40¤, Andorre 2,20¤, Autriche 2,50¤, Belgique 2¤, Cameroun 1 800FCFA, Canada 4,50$, Côted’Ivoire 1 800FCFA, Croatie 19,50Kn,Danemark 30KRD, Espagne 2,30¤, Finlande 3,80¤, Gabon 1 800FCFA, Grande-Bretagne 1,80£, Grèce 2,40¤, Guadeloupe-Martinique 2,20¤, Guyane 2,50¤, Hongrie 950HUF, Irlande 2,40¤, Italie 2,40¤, Liban 6500LBP, Luxembourg2¤, Malte 2,50¤, Maroc 12DH, Norvège 28KRN, Pays-Bas 2,40¤, Portugal cont. 2,30¤, LaRéunion2,20¤, Sénégal 1 800FCFA, Slovénie 2,50¤, Saint-Martin 2,50¤, Suède 35KRS, Suisse 3,40CHF, TOMAvion450XPF, Tunisie 2,40DT, Turquie 9TL, USA4,50$, AfriqueCFA autres1800FCFA

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  • Mardi 19 aot 2014 - 70e anne - N 21642 - 2 - Francemtropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur :Hubert Beuve-Mry

    Sur la crise irakienne commesur les autres, lUnion euro-penne avance en ordre dis-pers tout en recouvrant ses

    dissensions dun voile pudique deconsensus. Runis en urgence, le15aot, la demande de la France etde lItalie, les ministres des affairestrangres des Vingt-Huit se sontflicitsque chacunnen fassequsa tte. En clair, faute de parvenir une position commune, chacun estlibre denvoyer, ou pas, des armesaux Kurdes dIrak pour combattreles djihadistes de lEtat islamique.

    Comme son habitude, la Francenammepas attendu cette runionpour annoncer quelle livrerait desarmes sophistiques aux diri-geants du Kurdistan autonomedIrak ; ceux-ci se plaignent amre-ment dtre sous-quips en arme-ments capables de faire face desinsurgsqui ont saisi les stocksam-ricains de larme irakienne. Le

    Royaume-Uni, lItalie et la Rpubli-que tchque ont embot le pas Paris. En revanche, la Sude prfresen tenir son credo neutraliste etpacifiste. Enfin, lAllemagne sestretrouve une fois de plus tirailleentresondsirdepesersurlacondui-te des affaires dumonde et sonhri-tagedenon-interventionpost-secon-de guerremondiale.

    Pour rsoudre ce dilemme, Berlina annonc la livraison de matrielnon ltal.Mais, face auxappelspres-sants du dirigeant kurde MassoudBarzani et la menace immdiatedextermination des minorits reli-gieuses du nord de lIrak, Berlin afinalement dcid daller jus-quaux limites de ce qui est politique-mentet lgalementfaisable, aexpli-qulechefde ladiplomatiealleman-de, Frank-Walter Steinmeier.

    Cesprventionsnontpasunique-ment leur source dans la tradition-nelle rpulsion allemande partici-per, mme indirectement, uneguerre. Linquitude, crment rsu-me par M.Steinmeier, en visite enIrak ceweek-end, est la suivante: lesarmes livres aux peshmergas (lessoldatsdelarmeduKurdistanauto-nome)nedoiventpasservir, unjour, faire la guerre lEtat central ira-kien, bas Bagdad.

    Depuis le dbut de loffensive-clair de lEtat islamique, les diri-geants kurdes cachent peine leurjubilation: lEtat irakien na jamaist aussi prs de se disloquer et leKurdistan na jamais t aussi prsde lindpendance.

    Cest une chance historique queMassoud Barzani nentend pas lais-ser passer. Il a annonc un rfren-dum sur la question dans les pro-chains mois, sattirant aussitt larprobation de Washington. Demme,Berlinest fermementoppos une indpendance des Kurdes, quidstabiliserait un peu plus lIrak ettout leMoyen-Orient et entraneraitune guerre de tous contre tous.

    En livrant des armes sophisti-ques aux Kurdes, et en achetantdirectement leur ptrole, comme lefont les Etats-Unis, les Occidentauxprennent le risque de rgler un pro-blme immdiat en en crant unautre, plus pineux encore. p

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    Etat dalerte enCtedIvoire face EbolaDepuisunmois, le gouverne-menta considrablementrenforc lesmesuresprventivesdans les rgionsquibordent le Liberia et laGuine,payso levirusa faitprsde800morts.PLANTE PAGE 5

    Mort dePierre VassiliuFactieuxetpicurien, fauxnafetvraimusicien, le chan-teur, auteuret compositeurestdcd le 17aotSte.Il tait lauteurdeQuicestcelui-l, immensesuccsde lanne 1973.CULTURE PAGE 11

    DITORIAL

    Hollande-Valls, les sixdossiersdunerentrehauts risques

    AUJOURDHUI

    FERGUSON : LA COLRE DES NOIRS AMRICAINStFaceauxnouvelles violences,le gouverneurduMissouriordonne ledploiementdelagardenationale LIREPAGE2

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    tLemauvais chiffredela croissance compliquelquationbudgtaireetpolitiquedugouvernement

    tChmage, impts,rforme territoriale,rythmesscolaires:dcryptagedesdossiersbrlantsde la rentre

    tLes tensionssaccentuentgauche,lapolitiqueconomiquedugouvernementestdeplus enplus critique

    t MM.HollandeetVallsont, pour lheure, choiside rester inflexibles faceauxremises en causeLIRE PAGES6 ET 7

    LE REGARD DE PLANTU

    ArmerlesKurdes,solutiondoubletranchant

    Desmanifestantsface la police,

    Ferguson,dans la nuit

    dudimanche 17au lundi 18 aot.LUCAS JACKSON/REUTERS

    Algrie 180 DA,Allemagne 2,40 , Andorre 2,20 ,Autriche 2,50 , Belgique 2 ,Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Cte dIvoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 , Finlande 3,80 , Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 ,Grce 2,40 , Guadeloupe-Martinique 2,20 , Guyane 2,50 ,Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ,Italie 2,40 , Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 ,Malte 2,50 ,Maroc 12 DH, Norvge 28 KRN, Pays-Bas 2,40 , Portugal cont. 2,30 , La Runion 2,20 , Sngal 1 800 F CFA, Slovnie 2,50 , Saint-Martin 2,50 , Sude 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA

  • Reportage

    Ferguson (Missouri)Envoy spcial

    D o sont-ils, ceux qui vien-nent dnoncer sur lairedunestation-servicedvas-te et lasphalte dune portiondavenuemonotone le traitementrserv par la police la popula-tion noire de Ferguson, une ban-lieue nord de Saint Louis, danslEtat du Missouri ? Les manifes-tants, rassembls pendant la jour-ne et jusque tard le soir, une foisles plaies de la nuit prcdenterefermes,apportentsouventaveceuxleurs causeset leursmotsdor-dre. Majoritairement afro-amri-cains, tous sont unis par le sloganHands up! Dont shoot !, scandinlassablement, les mains levesen signede reddition.

    Do taient-ils, ces deux hom-mes dont la rencontre sest tragi-quement termine par plusieurscoups de feu et un corps sans viegisant moins de 500 mtres del? Michael Brown, le jeune Noirtu le 9aot enmilieu de journepar un policier sous les yeux delun de ses amis (6 balles dontdeuxdans la tte, commelarvllautopsie), sjournait chez sagrand-mre, qui habite un quar-tier trs modeste de Ferguson. Lavilleestpeupleauxdeuxtierspardes Afro-Amricains alors que lapopulation blanche tait encoremajoritaire il y a vingt ans. Lejeunehommenavaitpas frquen-t lcole du district auquel la villeest rattache.

    Quant Darren Wilson, lepolicier qui patrouillait seul, il arejoint la police de Ferguson il y aquatre ans, mais rsidait jusquceque sonnomsoit rvl vendre-di 15 aot par ses suprieurs Crestwood. Dans cette banlieueplus favorise situe une bonnevingtainedekilomtresdel,lex-trmit sud du comt, les Noirsreprsentent moins de 2% de lapopulation.

    Cette question de loriginea-t-elledailleursuneimportance?AFerguson, le thtre de laprotes-tionest installesur lavenueWestFlorissant, la lisireadministrati-vedelaville,et jouxtecellesdeJen-nings, lest, et de Dellwood, aunord, ainsi quune zone non int-gre ces municipalits et rele-vant du comt. Pourmoi, ce coin-l, cenestpasFerguson, insiste latenancire dune boutique situesurChurchStreet, juste ctde lamairie, fermedepuisuneattaquecyberinformatique.

    Depuis une semaine, deux Fer-guson coexistent. Celui qui mani-festecontrelesviolencespolicireset rouvre un dbat national sur ladiscrimination. Et lautre, quiobserve le premier, distance.Samedimatin, sur lavenue Floris-sant, pendant que les premiersmanifestants apparaissent, desvolontaires sefforcent soigneuse-ment de gommer les traces despillages de la nuit prcdente. Aucours de celle-ci, plusieurs bouti-ques ont t vises, dont celle o

    MichaelBrownaurait,selonlapoli-ce, drob quelques cigares, pourun montant infrieur 50dollars(environ 37 euros) et intimid unvendeur, une version contestepar la famille de la victime. Linci-dent se serait droul une dizainedeminutes avant le drame.

    A environ 2km de ceux qui sesont appropri le hashtag#Fergusonsur lesrseauxsociaux,se tient,dans lecentre-ville, lemar-chhebdomadairedeproduits fer-miers locaux. Non loin du dpartdelapistecyclablequirejoint luni-versitduMissouri.AuxpancartesWewantjusticedel-basrpondiciun Freehugs, promisparunejeune femme dcontracte. Troisjeunes Noirs apparaissent, dansune assistance compose majori-tairementdeBlancs, lventunbrefinstant les bras en lair avantdtrepromptement invits les baisser.

    Lancien maire de la ville BrianFletcher compte lesbillets rcoltslorsdelaventedetee-shirtsconfec-tionns pour loccasion avec lins-cription I love Ferg (3dollars).Cet argent ira aux commerantsquionttpills,assure-t-il. Rfu-gi sous un grand parapluie bleu,son successeur, James Knowles,polo rentr dans la ceinture, nevoit aucun intrt se rendre West Florissant. Ces gens-l nesont pas dici , affirme-t-il,premptoire.

    Aulendemaindudrame, ilatinterrogparCNNdevantlesigedela police, un autre haut lieu de lamobilisation, raconte Nick Kasoff,unconsultanteninformatiquepas-sionn depolitique et qui vit Fer-gusondansunquartiertrangerautumulte. Il tournait le dos auxmanifestants, que le cameraman

    avait choisi comme arrire-plan.Je lui ai suggr daller leur parler,mais il a refus, poursuit-il.

    Tourner le dos, selon M.Kasoff,qui se revendique libertarien,cest aussi refuser cette vrit : lafrquentation des Afro-Amri-cains, pour laminorit blanche deFerguson, se limite bien souventau guichet de la vente emporterenautomobile dun fast-food.

    AFerguson, lemaireestunluresponsabilits limitespuisque lepouvoir excutif est exerc par uncity manager. Cest ce dernier quigre la ville et qui nomme le chef

    delapolice. Interrogsurlacompo-sitiondu conseilmunicipal, qui necomptequunseulAfro-Amricain(sursixlus,pluslui-mme), lemai-re rplique que la dmocratiereflte lengagementdes citoyens.

    Interrogsur la faibleparticipa-tion lectorale des Afro-Amri-cains de Ferguson,Wesley Bell, unNoir candidat malheureux laprimaire dmocrate organise le5aot dans la partie du comt quiinclutFerguson,soupire :Cenestpas propre Ferguson, cest unequestion qui se pose dans tout lepays.

    Aquisouligneletrsfaiblenom-bre de policiers afro-amricainsdans la ville (5 sur 53 selon ses pro-preschiffres), JamesKnowlesinsis-te sur le manque de candidaturesetsur laconcurrencedesvillesvoi-sinesplusfortunes,capablesdof-frir de meilleurs salaires. Au sigede la police du comt, RichardEckhard livre avec une prcisionmaniaque ses statistiques : lespoliciers appartenant aux mino-rits reprsentent 13,46% deseffectifs,dont9,44%pour lesAfro-Amricains, alors quils devraienttreledoublepourreflter lquili-bre dmographique.

    A lextrieur de son bureau,dans le hall, les photos des poli-ciers du comt, annes aprsannes,racontentunehistoirepro-fondment imprgnedesgrga-

    tion. Des Blancs en 1961. DesBlancs et quelquesNoirs en 2005.

    Je pressentais quun vne-ment comme celui-ci pourrait sur-venir dans le nord du comt, maisje ne pensais pas quil arriverait Ferguson, assure Todd Swans-trom,un spcialiste despolitiquespubliques de luniversit du Mis-souri qui a mis au point un indexcomparatif combinant revenumoyen, taux de pauvret et tauxdoccupation des logements. Onassiste un glissement de la pau-vret des quartiers nord de SaintLouis vers le nord du comt. LesAfro-Amricains qui le peuventsinstallentenpriphriepourtrou-ver de meilleures coles publiqueset plus de scurit, mais ils entra-nent avec eux une baisse des prixdelimmobilier, ledpartdeBlancs,et de moindres recettes fiscalespour lesmunicipalits.

    Face ce glissement, quina paspargn Ferguson, dont lindextabli par M. Swanstrom est enbaisse depuis 1980, lesmoyens detransportrigentunebarrireinvi-sible, profitantde la segmentationdu territoire en une myriade demunicipalits (93 pour le comt)jalouses de leur indpendance.Selon luniversitaire, les habitantsde Saint Charles, banlieue confor-table situebienplus louest, ontainsi refus deux reprises, parrfrendum, leur raccordement

    aux transports en commun delagglomration.

    Des villes voisines de Fergusoncomme Wellston ou Normandysont en plus mauvaise posture,ajoute Todd Swanstrom. Le dis-trict scolaire de Normandy, oMichael Brown avait suivi ses tu-des,aperduen2013 laccrditationdelEtatduMissouripourcausedersultats insuffisants, ce qui nestpas le cas du district scolaireauquel est rattach Ferguson. Unetelle perte est souvent un facteuracclrateurdedcrochage.Et lap-pauvrissement dune ville est aus-si lassurance dune police moinsbien forme, dont la mauvaiseimage stend bien au-del de laseule communaut noire.

    Des entreprises prestigieusessont pourtant installes Fergu-son ou proximit, commelavionneur Boeing et la grandecompagniedeservicespharmaceu-tiques Express Scripts, mais leuraccs est barrpar le diplme.

    Amoinsdunkilomtredelasta-tion-servicecoloniseparlesmani-festants, le vaste sige du gant duconseil en ingnierie, EmersonElectric,offreauxregardssespelou-ses impeccablement tondues, sesparkings arbors et ses btimentslgants installs flancdecolline.Isols par une clture discrte etinaccessibles ceux qui rclamentjusticeunpeuplus bas.p

    Gilles Paris

    international

    Depuisunesemaine,deuxFerguson

    coexistent.Celuiquimanifestecontrelesviolencespolicires.Et lautre,quiobservelepremier,distance

    Le gouverneur duMissouridploie laGarde nationale

    MISSOURI

    ILLINOIS

    Ferguson

    Ville deSaint-LouisVille deSaint-LouisVille deSaint-Louis

    Comt deSaint-Louis

    5 km

    INDICE DE PAUVRET, EN% PART DE LA POPULATION NOIRE, EN%

    moins de 10 de 10 20 de 20 40 de 60 68 moins de 20 de 20 40 de 40 60 de 60 100

    en 1999 estimation 2008-2012 en 2000 en 2010

    SOURCE : BUREAU DU RECENSEMENT AMERICAIN

    TATS-UNIS

    MissouriSaint-Louis

    Ferguson en dix ans : plus pauvre, moins blanche

    MISSOURI

    ILLINOIS

    Ferguson

    Ville deSaint-LouisVille deSaint-LouisVille deSaint-Louis

    Comt deSaint-Louis

    5 km

    MISSOURI

    ILLINOIS

    Ferguson

    Ville deSaint-LouisVille deSaint-LouisVille deSaint-Louis

    Comt deSaint-Louis

    5 km

    MISSOURI

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    Ferguson

    Ville deSaint-LouisVille deSaint-LouisVille deSaint-Louis

    Comt deSaint-Louis

    5 km

    Ferguson,oulemalaisedesNoirsamricainsLamortdeMichaelBrown, tuparunpolicier, illustre lapersistancede lasgrgationsocialeet racialeauxEtats-Unis

    Le gouverneur dmocrate duMissouri, JayNixon, a ordonn laGarde nationale de sedployer dans les rues de Fergu-son, lundi 18aot, aprs une nou-velle soire de heurts entre poli-ciers etmanifestants. La policeavait tir, dimanche soir, des gre-nades lacrymognes et des fumi-gnes pour disperser quelque400personnes, dont de jeunesenfants, plusieurs heures avantlentre en vigueur du couvre-feu, deminuit 5heures dumatin,impos depuis samedi parle gouverneur Nixon.

    La police antimeute tait dploye, dimanche 17aot au soir, dans les rues de Ferguson, o des centaines de jeunesmanifestants bravaient le couvre-feu. SCOTT OLSON/GETTY IMAGES/AFP

    2 0123Mardi 19 aot 2014

  • international

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    Reportage

    Al-Koch (Irak)Envoy spcial

    A u fond dun dfil pentu sedresse lemonastreRabbanHormizd, qui surplombe laville dAl-Koch, dans le nord delIrak. Cette forteresse spirituelle,insre dans un amphithtre depierre, a t fonde vers 640 parunermitequivivaitdansunegrot-te. Ce lieu a longtemps t un cen-tredtudes religieuses trs rputet fut le sige patriarcal de lEglisedOrient comme en tmoignent,au fonddunddale creusdans laroche, les tombeaux de neufpatriarches.

    De cette hauteur, samedi16aot, on pouvait voir monterune paisse fume noire dans laplaine deMossoul, qui commenceaupied de la colline dAl-Koch. Lessuites dune frappe dun desavions amricains qui tournoientdans le ciel et traquent les vhicu-les de lEtat islamique (EI), qui aarrt sa conqute sept kilom-tres de l. Depuis le 7aot, date delattaque clair des djihadistes surle nord de lIrak, Al-Koch est nonseulement devenue la ligne de

    front mais aussi la dernire villechrtienne du pays libre de touteemprise islamiste.

    Vide de 15000habitants enune nuit, cette ville fantme estdfendue par une milice de150civils et des militaires kurdes.Seule la couverture arienne desAmricains a pu figer sur place leshommes du Daech [lEtat islami-que, en arabe] depuis leur attaque,mais nous allons passer loffensi-ve, expliquait, samedi, Sabri, lof-ficier de lAssayish (forces de scu-ritkurdes) chargdeladfensedela ville dAl-Koch. Dimanche,dautresfumesslevaientdansleciel, prs dubarragedu lacdeMos-soul, tout proche, o les peshmer-gas (combattants kurdes) tentent,avec lappui arien amricain, dedloger les troupes islamistes.

    Tant que les autres villes chr-tiennesnesontpaslibresetscuri-ses, vers le sudendirectiondeMos-soul,lesfamillesdAl-Kochnerevien-dront pas, confie Talal, qui a dci-dderevenirvivreavecsa familleAl-Koch aprs plusieurs jours Dohouk. Aprs la panique de lanuitdu7aot, suscitepar la chuteencascadedeKarakoch,Telkief,Bar-tella et Karamlech, seules trois ouquatre personnes taient restes.

    Parmi elles, Zikra Djerjis, dont lesmurs de la maison, juste ct delglise, sont recouverts dune fres-que moderne montrant saintMichel terrassant le dragon. Vers23heures, tous les gens ont quittleurmaison,dans les cris, lespleurs :ctait lechaos.Mafamilleestpartieaussi,maismoi, je naipas boug.

    Il y a aussi le gardien, chrtien,de la synagogue en ruine dAl-Koch, qui hberge le tombeaudun prophte de lAncien Testa-ment, Nahum (VIIesicle av. J.-C.),connu pour avoir prdit la chute

    delempireassyrienetdesacapita-le Ninive (recouverte aujourdhuipar la banlieue de Mossoul). Lesjuifs ont vcu Al-Koch jusqu cequils sen fassent expulser en1948 lors de la cration de lEtatdIsral. Jai fait la promesse demen occuper, lance-t-il en sou-riant de sa terrasse voisine.

    Depuis quelques jours, unevingtaine de familles sont reve-nues, affirme Adris Djerjis, lundes habitants ayant pris son armepour dfendre la ville. Positionnsdevant un bar au carrefour desdeuxprincipalesruesdAl-Koch,lesmembres de cettemilice affirmentquils possdaient dj leurs armesavant de se mobiliser. Dautrescivils ont revtu luniforme, com-me Khalid, qui a t affect, auxcts des peshmergas, la protec-tion du nouveau monastreconstruit, en 1858, la gloire de laViergeMarie, protectrice desmois-sons: Nos relations sont bonnesaveclespeshmergas,cesontlesseulsnousavoirdonndesarmes.

    Un avis que ne partagent pastous lesmiliciens. Prsent vendre-

    di au presbytre, lors de la premi-redistributiondargentenvoyparla communaut chaldenne desEtats-Unis (100 dollars parfamille), Fadi, un jeune de 17ansqui rside au Canada et tait envacances chez son oncle Al-Koch,

    raconte la nuit du 7aot : Onntait plus que quatre civils armsaucheck-pointdelentredelaville,quand on a vu les peshmergas fuirdevant lavance du Daech. Ils nevoulaientpasnousdirecequisepas-sait, ils taient terroriss. Unecraintequiasaisitoutelaville,com-me en tmoignent, la nuit tom-be, les lumires allumesdans lesmaisons vides. Ils nont pas eu le

    tempsde les teindre,dit Fadi.Sami, milicien la voix toni-

    truante et laramen chantant,constate, lui,quelavenirdeschr-tiens, ici, cest fini. LesArabeset leDaech, dit-il, ne veulent plus denous. Une vision que ne partagepas Rami, loncle de Fadi, au volantde sa puissante Chrysler blanche.Notre problme, cest le Daech,pas les musulmans, estime-t-il.Chauffeur de taxi indpendant, ilconduisait lesgens jusquBagdad.

    Reste, pour tous, une nigme.Pourquoi lEtat islamique sest-ilarrt sept kilomtres dAl-Koch,lanuit du 7aot?Laviationam-ricaine a frapp les positions deDaech ds le lendemain et quasi-ment toutes les nuits depuis ,dtaille Ivan Goulan, un milicien.Mais dans la nuit o tout lemon-de sest enfui, aucun avion nestintervenu, prcise-t-il. Un myst-requaucunedespersonnesencoreprsentesdanslavilleneveutasso-cier un miracle li la prsencedumonastre de RabbanHormizdoudu tombeaudeNahum.p

    Jacques Follorou

    Seulelacouvertureariennedes

    AmricainsapufigersurplaceleshommesdelEtatislamique

    Sabriofficier kurde

    Al-Koch,dernirevillechrtiennedIrakquirsistelEtat islamiqueLesbombardementsamricainsontarrtles troupesdjihadistes7kmde lacitantique

    ViolentscombatsentrecombattantskurdesetdjihadistesautourdubarragedeMossoul

    Undesmiliciens chrtiens dAl-Koch, qui dfendent la ville aux cts de combattants kurdes. HAWRE KHALID/METROGRAPHY POUR LE MONDE

    Dohouk (Irak)Envoy spcial

    A lami-journe, dimanche 17aot,despanachesde fumenoire bar-raient lhorizonauxabordsdubar-ragede limmense lacdeMossoul.Les signesde la contre-offensivedes forces kurdes.Avec le soutiende laviationamricaine, elles ten-tentde reprendre aux troupesdelEtat islamique (EI) le contrledecette infrastructure, laplus grandedupays, qui fournit toute la rgioneneauet enlectricit. Lebarrageat conquis le 7aotpar lesdjiha-distes, lorsduneattaqueclair quileuragalementpermisde sempa-rerdungrandnombredevilles etdevillages aunorddeMossoul.

    Dimanche soir, les autoritskurdes onthtivement dclarque le barrage deMossoul avaitt compltement libr. Ellesajoutaient quedes combatsavaient dbut plus lest, autourdevilles chrtiennes commeTel-kief, passes, le 7aot, sous contr-le de lEI.Mais dans la ralit, lesdjihadistes nont pas t entire-ment dlogs de ce site stratgi-que. Selonun conseiller duminis-tre de la dfense duKurdistan ira-kien, ils en contrlent toujours larive ouest. Lavance des troupeskurdes est notamment ralentiepar lesmines plantes par les isla-mistes le long des voies daccs.Une explosionde la retenue deaupourrait avoir des consquencesdsastreuses pour les villes et lesvillages situs en aval.

    Durant leweek-end, les Etats-Unis ontmenune vingtainederaids contre les positions de lEIautourdu barrage.Daprs lesautorits dErbil (capitale de largion autonomekurde dIrak),des vhiculesmilitaires et uncheck-point auraient t dtruits.Selonunmembre des forces descurit kurdes, interrogparLeMonde samedi, des soldats am-ricains auraient t dploys ausol pour guider les frappes arien-nes.

    LEIdoit, par ailleurs, faire faceauxattaquesde tribus sunnitesdans louest irakien.Dans lapro-vincedAl-Anbar, les islamistesaffrontentdepuisvendrediunecoalitiondeplusdunevingtainede tribus sunnites, appuyepar lesforcesde scurit irakiennes. Citpar lAFP,un commandantde lapolice,AhmedSadag, affirmequeles combattantsdes tribuset lesforcesgouvernementales ontrepouss lesdjihadisteshorsdessecteursquils tenaient louest dela capitale provincialeRamadi, etquedes combats avaient lieudansdautres zones, dont la ville strat-giquedeHaditha, plusaunord.

    Rsolution de lONUPour bloquer lavance

    deshommesdAbouBakrAl-Baghdadi, le chef de lEI, quiaproclam fin juinun califatstendant de lIrak la Syrie, leConseil de scurit de lONUaadopt vendredi une rsolutionvisant empcher le recrutementet le financement de djihadistesdans ces deuxpays. LUnion euro-penne a, pour sa part, approuvles livraisons darmes aux combat-tants kurdes, dj lancespar lesEtats-Unis et la France.

    Cesmesures nen sont pourlinstant qu leur dbut. Seulesles frappes ariennes conduites, partir du 8aot, par les Etats-Unisont russi arrter les troupes isla-mistes trsmobiles, bien qui-pes et aguerries. Larme rguli-re irakienne comme les peshmer-gas kurdes avaient t auparavantmis en droute.

    La rsistance affiche par leskurdes ces derniers jours na pasmis fin aux exactions de lEI.Vendredi, sesmembres sontentrs dans le village deKochko,situprs de Sinjar, aunord ouestde lIrak. Les assaillants auraienttu environ 80personnes, enmajorit des yzidis, selon leKurdeHoshyar Zebari, ex-minis-tre desaffaires trangres irakien,qui dnonceun massacre.

    Mardi, Saji, la sortie deDohouk, des dplacs yzidisaffirmaient que les habitantsdeKochkonavaient pas eu letempsde fuir et staient retrou-vs pris au pige.p

    J.Fo.

    30123Mardi 19 aot 2014

  • GazaEnvoye spciale

    U ne large affiche jaune, frap-pe du logo des BrigadesdesmartyrsdAl-Aqsa,ataccroche dans le salon, aux ctsdautres la gloire des martyrs.Le modeste appartement de Gazaaainsittransformenlocaldelabrigade Nidal Al-Ammoudi, lunedes factions armes proche duFatah, lepartiduprsidentpalesti-nienMahmoudAbbas.

    AbouAyad, le visagemasqu etvtu dun uniforme noir, prend laposeducombattant, lefusilpointvers lhorizon. Le jeunehommede25ans, charg des transmissions, at dmobilis pendant la trve.Mardi 19aot, il doit nouveaurejoindre le front dans lventuali-t dune reprise des hostilits aveclarmeisraliennelafindelatr-ve, prvue minuit. AuCaire, oles ngociations sur un cessez-le-feu permanent entre Isral et lesfactions palestiniennes sontentres dans leur dernire lignedroite, un accord semble encoreloindtre acquis.

    Dbarrass de son uniforme,Abou Ayad rapparat en jean etchemise, propret et ras de prs.Rienne ledistinguedesautres jeu-nes hommes de son ge. Compta-bledeprofession, il incarne lanou-velle gnration de combattantsdes Brigades Al-Aqsa Gaza, for-

    me avec peu de moyens. La fac-tion, fer de lance de la deuximeIntifadaaumomentde sa crationen2001,nestplusquelombredel-le-mme. Aprs larrestation, parIsral, de centainesdemilitants, etnotamment de son chef, Maroua-ne Barghouti, en 2002, et la mortdu prsident palestinien YasserArafat en 2004, son principal sou-tien financier, elle a t sommede dposer les armes par le prsi-dent Mahmoud Abbas, partisandune solution ngocie. A Gaza,

    des factions nont pas renonc lalutte arme. Certains lmentsontdveloppdesliensaveclemou-vement chiite libanais Hezbollahet, par son intermdiaire, aveclIran, indique MoukhaimerAbouSaada,politologueluniver-sitAl-Azhar.

    Lors de la prise de pouvoir duHamas dans la bande de Gaza enjuin2007, les BrigadesAl-Aqsaontt traques par le mouvementislamiste. Prs de 120 membresdes forces de scurit de lAutoritpalestinienne, un vivier de com-battants pour le mouvement, ontt tus. Des militants politiques

    duFatahonttarrtsouforcslexil. Les autres placs sous rsi-dencesurveille.LeHamaspenseque nous sommes des espions, quenous transmettons des informa-tions aux forces de scurit duFatahRamallah,qui les transmet-tent Isral. Cest faux, proclameunmembre du Fatah Gaza.

    Malgr la signature dun accordde rconciliation entre le Hamaset le Fatah, le 23avril, la dfiancereste entire. Ds le dbut de lof-fensive isralienne Bordure pro-tectrice, des membres du Fatahont t de nouveau placs sousrsidence surveille. Lun deux,Sami Abou Lashin, a t attaquchez lui par des hommes arms,qui lui ont tir des balles dans lesjambes, le 28 juillet. Le Hamas aimput lincident des lmentsisols. Le Hamas les voit commeunemenaceintrieure. Ilpensequesils se dplacent, ils vont collecterdes informations sur la rsistance,les tirs de roquette, ditM.Saada.

    En dpit de ces obstacles, la bri-gadeNidalAl-Ammoudisestenga-ge dans la bataille ds le 8 juilletet tient le faire savoir. Elle reven-dique 3000 combattants uneestimation juge exagre par lesexperts et le tir de quelque500roquettes et obusdemortiers,duneportemaximalede 50kilo-mtres. Le Hamas ne nous a paslaiss dvelopper notre armement.Il a refus que lon utilise ses tun-

    nels.Onadsebattreausol, cachsdans des immeubles, se dfendAbou Ayad. Son compagnon dar-mes, Abou Mahmoud, linter-rompt:Onneveutpasbriser luni-tqui sest forgedanscetteguerre.On a des divergences de vue, maissur le terrain, nous sommes unisdans notre lutte contre Isral. Lafraternit quil dit avoir observeentre factions Beit Hanoun estloin davoir gagn tous les che-lons des deux factions ennemies.

    Les Brigades Al-Aqsa ne parta-gentpas les rservesduHamassurla proposition gyptienne de ces-sez-le-feu. Elle est satisfaisantepour lavenir des Palestiniens. Il nyest pas question de lavenir dunmouvement, indique leur porte-parole, qui assure avoir descontacts directs avec le chef de ladlgation palestinienne auCaire,Azzam Al-Ahmad. Mais, en cas derefusdIsral, la faction sedit prte retourner au combat et prometdessurprisesenIsraletdanslesterritoiresoccups.

    Pour appuyer ses menaces, sonporte-parole pointe les attaquesperptres ces dernires semainespar des membres des BrigadesAl-Aqsa en Cisjordanie contre dessoldats et des sionistes. Les com-battantsacquiescent.Jesuisprtme faire sauter. On est tous prts mourirenmartyrs.Gazaest laporteduparadis, assureAbouAyad.p

    Hlne Sallon

    international

    U nediscussiondifficile.Visi-blement fatigu et sou-cieux, leministreallemanddesaffairestrangres, Frank-Wal-terSteinmeier,napastenmesu-re dannoncer le moindre accord,peu aprs minuit, lundi 18aot,aprs cinq heures de rencontreavec ses homologues franais,russe et ukrainien pour viter uneescalade du conflit dans lest delUkraine. La rencontre avait tdcide alors que la tension entreles deux pays saccroissaitfortement.

    Mais je crois et jespre quenousavons fait desprogrs sur cer-tains points, a prcis M.Stein-meier dans une courte allocutionsur le perron de la villa Borsig,rsidence des invits du minist-re.Desourcediplomatiquefranai-se, on indique que les discussionsontportsurquatrepoints:cessez-le-feu, contrle aux frontires,aide humanitaire et poursuite duprocessus politique. Et lon fait lemme commentaire : Des pro-grs ont t enregistrs, malgr unclimat difficile. Au cours de larunion, Laurent Fabius a fait partde propositions pour faciliter uncessez-le-feu.

    Certains progrs ont t obte-nus (). Il at convenudepoursui-vre le dialogue , a expliqu leministre des affaires trangresrusse, lundi matin, dans un com-muniqu. Moscou estime que denouvelles discussions pourraientmener des propositions concr-tes. L o nous ne pouvons pasencore faire tat de rsultats posi-tifs, cest avant tout [sur] le cessez-le-feuet le rglement politique enUkraine, a soulign SergueLavrov,sexprimantdevantlapres-se, lundi, Berlin.

    Pour parvenir des progrs, ilfaut se rencontrer encore de nom-breuses fois durant cinq heures, atempr leministre ukrainien desaffaires trangres, Pavlo Klimki-ne, sur son compte Twitter. Il nya pas de place pour un compromissi lEtatdoit franchir sa lignerouge.LUkraine ne la pas franchie. Nousavons senti le soutien denos parte-naires, a-t-il poursuivi.

    LadceptiontaittangibleBer-lin. M.Steinmeier avait pourtantjou la prudence en amont de larencontre une prcdente entre-vue des mmes quatre ministresdesaffairestrangres, le 2 juilletBerlin, stait dj acheve sansrsultat probant.

    Et entre-temps, la situation enUkrainea empir. Leministre alle-mand avait donc vit de placer labarre trop haut : Nous sommesloin de la fin des tensions et loindune solution politique, avait-ildit avant la runion.

    Les rcents vnements mon-trent que la situation pourrait treencorepire. Si nousny portons pastoute notre attention, nous pour-rions arriver une confrontationdirecte entre les forces russes etukrainiennes, et cela doit tre vit tout prix , avait prvenuM.Steinmeier. Des propos pluttpessimistes, que les rsultatsquasi inexistants de la rencontrenont pas dmenti.

    Intensification des combatsLapriorit doit aller au respect

    de lintgrit territoriale de lUkrai-ne,lafindesviolencesetlarelan-ce du processus politique, expli-quait dans un tweet LaurentFabius, avant le dbut de la ru-nion quadripartite. On pourraitdonc parler dchec Berlin. Maisauvude la situationenUkraine, lesimple fait davoir pu runir lesministres russe et ukrainien desaffaires trangres durantcinqheuresestdjconsidrcom-meunpasdans labonnedirection.

    Lesquatreministresdoivent enrfrer leurprsidentetlachan-celire allemande. Ils dciderontdici mardi de la suite donner leurs discussions.

    La runion des ministres avaitt annonce le 15aot, alors quela tension entre Moscou et Kievtait son comble. Plusieurs jour-nalistes et le gouvernementukrai-nien ont fait tat demouvementsde vhicules militaires russes,dont une partie aurait franchi lafrontire. M. Lavrov a expliqulundique la runionquadripartiteavaitpermisdeleverlesdifficultsau passage du convoi daidehumanitaire.

    Le gouvernement ukrainien aannonc, vendredi, avoir dtruitune partie des armes russes, alorsqueMoscouadmenti laprsencede ces armes. Dimanche, Kievconfirmait lentre de nouvellesarmes, notamment des lance-roquettes, ce queMoscoudment.

    Les combats se sont poursuivistout le week-end dans lest delUkraine, en mme temps que laguerre de propagande que selivrent Kiev et Moscou. Les forcesukrainiennes ont annonc avoirrepris un poste de police dans lavilledeLouhansk, lunedesprinci-pales places fortes des sparatis-tes. Lasituationdans lacapitaleduDonbass, Donetsk, se dtriore.Les combats auraient fait dixmorts dimanche, selon la mairie,quiagalementprvenuquelavil-le serait prive deau courante partirdedimanchesoir.Lesspara-tistes russes, de leur ct, ontabat-tu un avionde chasse ukrainien.p

    BlandineMilcent ( Berlin)etAlain Salles

    AbouAyad,membre des Brigades Al-Aqsa g de 25 ans, dimanche 17 aot, Gaza. ALESSIO ROMENZI POUR LE MONDE

    TimidesprogrsdanslesrelationsentrelaRussieet lUkraineMoscouannonceunaccordsur lepassagedesonconvoihumanitaireenUkraine

    Onneveutpasbriserlunitquisestforgedanscetteguerre

    AbouMahmoudmembre des Brigades Al-Aqsa

    DanslabandedeGaza, lescombattantsduFatahenbuttelhostilitduHamasSouponnesdespionnage, lesBrigadesAl-Aqsaonttmarginalises lorsde laguerreavec Isral

    SoulEnvoy spcial

    L a visite en Core du Sud dupape Franois sest termine,lundi18aot,surfonddenou-velles tensions dans la pninsule.Audernierdesescinq joursdans lepays, le souverain pontife avaitchoisi de prier pour la paix et larconciliation intercorenne lorsdune messe organise dans lacathdrale de Myeong-dong, Soul,enprsencede1000person-nes,dontlaprsidentesud-coren-ne, ParkGeun-hye.

    Lamesse de ce jour est dabordet avant tout une prire pour larconciliation de la famille coren-ne, a-t-il dclar dans son hom-lie, avant de plaider pour denouvellesoccasionsdedialogue,de

    rencontre et de rsolution desdiffrences.

    Dans lassemble, il y avait desrfugisnord-corens,desprochesde personnes enleves par Pyong-yangetdescatholiquesoriginairesde Core duNord ayant fui le rgi-mecommunistependant laguerrede Core (1950-1953). Il y a l tousceux qui ont besoin de paix et derconciliation, et qui travaillentpour cela, a prcis Hur Mat-thiasYoung-yup,porte-paroleducomit dorganisation de la visitepapale. Un argument qui expliquegalement la prsence de femmessud-corennes dites de rcon-fort,victimesde larmeimpria-le japonaise pendant la secondeguerre mondiale et que le pape alonguement salues son entredans la cathdrale.

    Le message en faveur du dialo-gue intercoren a pourtant tformulunmoment tenduentreles deux Cores. Le 18aot com-mencent de nouvelles manu-vres conjointes amricano-sud-corennes. Intituls Ulchi Free-dom Guardian , ces exercicesannuels doivent durer douzejours. Ils mobilisent 50000 sol-dats sud-corenset 30000Amri-cains afin damliorer la dfensecontre une ventuelle attaque dela Core du Nord. La nouveaut,cette anne, rside dans le testdun plan de dissuasion contre lamenace nuclaire et des armes dedestruction massive de Pyong-yang, selon le ministre sud-corende la dfense.

    Commechaqueexercicemenau Sud, la Core du Nord a vive-

    ment ragi. Pour elle, ces manu-vresnesontquedesrptitionspr-parant linvasion de son territoire.Le 17aot, larmenord-corenneamenacde lancer la plus puissan-te, la plus impitoyable des attaquesprventivesde [leur] style.

    Aide aux plus pauvresLe mme jour, le Rodong Sin-

    mun, quotidien nord-coren duParti du travail, avait critiqu lesoffres de dialogue et dchangesformulesle15aotparParkGeun-hye loccasion de lanniversairede la libration de la pninsule deloccupationjaponaise,en1945.Ilny a aucune sincrit dans lesoffres damlioration des liens,estimait le journal.

    Dans ce contexte, il est difficilede mesurer la porte du message

    papal pour le dialogue inter-coren.Le jourde larrivedupapeFranois, le 14aot, Pyongyangavait tir plusieurs missiles, touten niant un quelconque lien avecla venue du pape. Aucun catholi-que du Nord na assist la visitede Franois,malgr les invitationsde lEglise du Sud.

    Sur les autres sujets, la visite dupape, la premire en Core du Suddun souverain pontife depuis1989, semble positive. Lemomentle plusmarquant fut sans doute lamesse de batification de124 saints de Core, qui a runiplus de 800000 personnes, le16aot, Soul.

    Alors que le catholicisme pro-gresse en Core du Sud, le pape ainsist, lors de sa visite, sur laideaux plus pauvres. Il a port beau-

    coup dattention au naufrage duferry Sewol, qui a fait plus de300morts enavril. Il anotammentbaptis le pre dun enfant mortdanscettetragdiequelegouverne-mentsud-corenaimerait oublier.

    Le pape a galement lanc plu-sieursmessages lAsie engnral.Il a pour cela profit des 6es Jour-nes asiatiques de la jeunesse, quiont runi Daejong (centre dupays)4000jeunesde23pays,dontune centaine de Chinois. Il sestexprim en anglais, une premiredepuis ledbutde sonpontificat. Ilserendraenjanvier2015auxPhilip-pines et au Sri Lanka, preuve delimportance pour lEglise de cecontinent o le catholicisme sedveloppe, mme sil ne comptepourlinstantque3,2%defidles.p

    PhilippeMesmer

    ASoul, lepapeappellelarconciliationdelafamillecorenneAlorsqueFranoisaplaidpour ledialogueentre lesdeuxCores,desmanuvresmilitairesamricano-sud-corennesdbutent lundi

    4 0123Mardi 19 aot 2014

  • international& plante

    Reportage

    Tiobli, Kandopleu(Cte dIvoire)Envoye spciale

    L e 44 de Kouassi Koffi, sous-prfet de Tiobli chef-lieudunezonedelouest ivoirienqui longe la frontire librienne ,senfonce difficilement dans lafort, mercredi 13 aot. La pluiearavin les chemins accidentsquimnent des villages presquecoups du monde depuis que leLiberia a ferm ses frontires, finjuillet, en raison de lpidmie defivre Ebola, qui a dj fait plus de400morts dans cepays.

    Dsormais, le seul contactdesvillageois avec lextrieur, cestla fourgonnette qui passe quandelle le peut chercher leurs rcoltespour les vendre en ville, expliqueKouassi Koffi. En juillet, les autori-ts ont interdit les marchsforains dans la rgion, craignantunepropagationdelamaladie lorsde ces rassemblements quiattiraient des populations venuesdu Liberia.

    Quand le sous-prfet arrive Pekan-Houebly, ladizainedenota-bles de ce village denviron500habitants lattendent souslimmense manguier qui marquela place centrale. Le griot sonne le

    rassemblementdesavoixpuissan-te. Contrairement la tradition,personne ne se serre lamain ni nesembrasse : depuis quelquesjourslegouvernementavivementdconseill ces accolades, pour-tantchresauxIvoiriens,pourvi-ter dventuelles contaminations.

    Rompre avec ses coutumesnestpas facile, smeutSergeTian,un cadre du village. La premirefois que le sous-prfet est venunousparlerdelinterdictiondeven-dre et de manger de la viande debrousse, et nous dire darrter derecevoir nos frres libriens, nousavonsdoutde lutilitdecesmesu-res. Certains voulaient voir desmalades dEbola de leurs propresyeux pour y croire. Mais avec lesmdias,nousavonspris consciencedu danger et compris quil nousdisait la vrit.

    Dans ce village sans lectricit,les habitants nont que la radiopour sinformer, et la tlvisionquelquesminutes par jour, quandil y a assez dessence pour alimen-ter le groupe lectrogne.

    Les populations de cettergion, acquises lancien rgime[celui de Laurent Gbagbo,2000-2011], se mfient de ce quonleur dit, confirme le sous-prfet.Dbut aot, sept Libriens ont treconduits la frontire aprsavoir t accueillis dans un villagetout proche. Les habitantsauraientdsuivre les consignesdugouvernement et leur demanderde rentrer chez eux. Mais les genssont de la mme ethnie de part etdautrede la frontire, et parfois dela mme famille, dcrit KouassiKoffi. Il y a de nombreuses voiesclandestinesquipermettentde tra-verser la fort et donc la frontire.

    Jusqu prsent, aucun casdEbola na t dclar en CtedIvoire. Les autorits sanitairesassurent pouvoir acheminer etanalyser les prlvements sus-

    pects en 72heures linstitut Pas-teur dAbidjan : une quarantainede rumeurs ont t vrifies,toutes ngatives. Nanmoins, enjuillet, legouvernementaconsid-rablement renforc les mesuresprventives dans les rgions quibordent le Liberia et la Guine.

    Des postes avancs ont t ins-talls aux passages officiels entrelespays: ony contrle la tempra-ture de ceux qui dsirent pntrersur le territoire ivoirien, on lesinterroge sur leurs antcdents.Des dizaines de migrants ont trefouls, notamment vers le Libe-ria.Si lepaysnapasofficiellementferm ses frontires, certains pr-fets lont fait dans leur zone, com-me Tiobli. Depuis le mois demars, les autorits administrati-ves et sanitaires locales ont aussireu une formation de lInstitutnational dhyginepublique.

    Dans le petit centre de sant deTiobli, o les mdicaments sontrares, Drissa Soro, linfirmier, amis sous cl le kit durgence quonlui adistribuds ledbutde lpi-dmie. Cest trs prcieux, prci-se-t-il. Onadesmasques,duPerfal-gan, du coton, de lalcool pour net-toyer les thermomtres, des tubessecs pour les prlvements, desgants, deux combinaisons qui cou-vrent tout le corps, comme on voit la tl. On a de quoi assurer enurgence si un cas est dclar, maisce sera vite insuffisant.

    Le jeune homme nest paulqueparunesage-femme,danscet-te zone rurale qui compte5000habitants : le mdecin et lesautres personnels de sant qui yonttaffectsnont jamaisvouluvenir ici. Pour se tenir inform dela situation, linfirmier sappuiesur des agents de sant commu-nautaireprsentsdans chaquevil-lage : un rseau indispensabledans cette rgion o certainshameaux sont inaccessibles,mme moto, cause des routesdlabres.Cesagentsfonttouspar-tie des comits de veillemis enplace par les prfets : des groupes

    composs des cadres du village,chargs de relayer les consignesdes autorits.

    Chaquejour, ils fontde lasensi-bilisation, notamment sur la vian-de de brousse. Ils disent aux villa-geois de manger du poisson, et acommencevenir, assureKouas-siKoffi.Lemessageapourtantsou-ventdumalpasser.Certainshabi-tants continueraient chasser dugibier, la seule viande accessible.

    Les autorits mnent aussi desactions de prvention prs de lafrontire avec la Guine, o le der-nier bilan de lpidmie est de380morts. Jeudi14aot,unesimu-lation est organise dans le petitvillage de Kandopleu, pour testersa ractionaucaso lamaladie sydclarerait.Lepersonnelmdicalarpt pendant trois jours chaquetape du dispositif avant larrivedes officiels, sans pour autant vi-ter plusieurs erreurs.

    Jai relev quelques faiblesses,notamment dans la manire den-lever les combinaisons, note Ray-mondeGoudouCoffie, laministreivoiriennede la sant et de la luttecontre le sida, qui a fait le dplace-ment. Les personnels de sant sontles premiers en contact avec lespatients, donc ils doivent respecterle processus sils ne veulent pasmourir.

    Cette simulation sert prou-ver les quipes sur le terrain et voircomment amliorer la prise encharge des patients, explique laministre.Nousdevons restervigi-lants, ajoute-t-elle. Les frontiresde laCte dIvoirepeuvent treuneporte dentre pour le virus Ebola,donc nous voulons tre prts si uncas se prsentait.

    Dans ces rgions o habituelle-ment tout manque, ce dploie-ment de moyens impressionne lapopulation venue assister cetexercice grandeurnature. Linfir-mieraposbeaucoupdequestionsau malade prsum, constateGaleedinieVehe, unehabitante deKandopleu. Quand il a dit quilvenait de Guine, le mdecin lamis lcart et sest occup de luiavec une tenue vraiment appro-prie pour ne pas tre contamin.Jai espoir que si un cas dEboladevait survenir en Cte dIvoire, aneprendraitpas lesmmespropor-tionsquenGuine,parcequenous,nous sommes prpars. Le filmde cette simulation sera distribudans les prfectures et les centresde sant de la rgion.p

    MaureenGrisot

    BogotaCorrespondante

    C est la frontire de tous lestrafics. Drogues, armes,essence, ciment, farine,ufs et papier hyginique : lacontrebande entre le Venezuela etla Colombie couvre large. Depuisle 12aot, la frontire de 2219kilo-mtres qui spare les deux paysest officiellement ferme la nuit,de 22heures 5heures du matin.Caracas affirme avoir dploy17000soldatspour faire respecterla mesure et lutter contre le traficillgal de combustible et dali-ments.Selonlegouvernementcha-vistedeNicolasMaduro, la contre-bande grande chelle est respon-sable des pnuries qui, depuis desmois, vident les talages du pays.Dans les rangs de loppositionvnzulienneet Bogota, le scep-ticismeest demise.

    Encinqjours, levolumedessai-sies effectues a dpass celui delanne 2013, sest rjoui le vice-prsidentvnzulienJorgeArrea-za, samedi 16aot la tlvision.Le gnral Vladimir Padrino, chefdu Commandement stratgiqueoprationnel de larme, a pour sapart indiqu que 96 tonnes dali-ments et 300000 litres de carbu-rants et lubrifiants avaient trcuprspar la forcepublique.

    Fermer la frontire ne mettrapasfin lacontrebande, jugelana-lyste colombien Ariel Avila. Maisalors que la situation conomiquevnzuliennetournelacatastro-phe, Nicolas Maduro se doit demontrer quil agit.

    Les horaires douverture despostes frontires importent peuaux petits trafiquants, ironiseAlberto, commerant Cucuta, lagrande ville frontire ct colom-bien.Unepartie de la contrebandese faitpar les centainesdepistes etde sentiers qui traversent la fron-tire. Le gnral Padrino affirmeen avoir dores et dj coup quel-ques douzaines. Les gros trafi-quants comptent, eux, sur la com-plicitdes douaniers et de lapolice.Tout le monde le sait , poursuitAlberto. Il est convaincuque la for-ce publique est corrompue dunct commede lautre.

    A Cucuta, les bidons et bou-teilles en plastique remplis des-sence sempilent sur les trottoirs,au curmme de la ville. Lessen-ce,gratuiteoupresqueauVenezue-la, vaut 90 centimes deuro le litreenColombie.Cestdiresi lespimpi-neros, les trafiquants dessence,ont la vie facile. Selon les estima-tions du ministre vnzulien de

    lnergie, Rafael Ramirez, lquiva-lent de 100000barils de carbu-rant soit prsde 5%de laproduc-tionvnzuliennepasse la fron-tire tous les jours.

    Le business nest pas nouveau.Mais, depuis larrive au pouvoirdHugo Chavez, en 1998, il a aug-ment au rythme de la corrup-tion, affirme Walter Marquez,dputdoppositiondelEtatvn-zulien du Tachira, la frontirecolombienne.

    La situation en Colombie, lacroissance du narcotrafic et celledes acteurs arms qui en viventmilices, paramilitaires et gu-rillas ont galement contribu lexplosiondelacontrebande, affir-me pour sa part Ariel Avila. Desdeux cts de la frontire, lEtat etla socit sont dsormais dominspar des logiquesmafieuses.

    Etatisation brouillonneDanslessupermarchsdeCucu-

    ta, les talages regorgent des pro-duitsquimanquent auVenezuela.ACenabastos, lemarchdegrosdela ville, les normes sacs de riz, defarine de mas et de sucre sentas-sent, marqus du label en formede cur rouge : Produit au paysde la rvolution.

    Malgrlespromessesdelarvo-lution bolivarienne, le Venezuelacontinue dimporter plus de 80%desesbesoinsalimentaires.Legou-vernement chaviste, soucieux deredistribuer la rente ptrolireauxsecteurs lesplusdfavoriss, amis en place un systme de sub-vention des prix des produits debase. Selon le prsident NicolasMaduro, plus de 40% de ces pro-duits finissent enColombie.

    A qui la faute?, sinterroge ledput Marquez. Selon les co-nomistes, ce sont le contrle deschanges et des prix, la corruptionet les distorsions introduites parltatisation brouillonne de lco-nomie vnzulienne qui stimu-lent le march noir du dollar et lacontrebande.

    Le Venezuela a prsent la fer-meturede la frontirecommeunemesureconjointe,dcidelocca-sionde la runionentreM.NicolasMaduro et son homologue colom-bienJuanManuelSantosle 1eraot.A Bogota, la ministre des affairestrangres,Maria AngelaHolguin,sest dmarque de la dcision,qualifie dunilatrale. Mais laColombie na pas protest plusquecela: leVenezuelaestunparte-naire commercial important. Etunalli indispensable pour parve-nir la paix avec la gurilla.p

    MarieDelcas

    LeVenezuelafermesafrontireaveclaColombiepourluttercontrelestraficsCaracasattribuesesproblmesconomiqueslacontrebandedesesproduitssubventionns

    Uncentre disolement demalades attaqu Monrovia

    LIBYE

    DesavionsdeguerrenonidentifissurvolentTripoliTRIPOLI.Des avionsde guerrenon identifis ont survol la capita-le libyenne, Tripoli, lundi 18aot laube, alors que retentissaientdes explosions, ont indiqu deshabitants. Les combats entre lesmilices deMisrata et celles de Zentenavaient repris dimanche Tripoli, aprs trois jours de calme. LaMission de lONUenLibye adclarprofondment regretter quil ny ait eu aucune rponseauxappels internationaux et ses efforts en faveurdun cessez-le-feu. Le nouvel envoy spcial de lONU, Bernardino Leon, quiprendraofficiellement ses fonctions le 1erseptembre, a annoncquil pourrait se rendre Tripoli ds cette semaine. (Reuters.)p

    PakistanDeplus en plus demanifestants contrele gouvernement se rassemblent IslamabadISLAMABAD. Plusieurs dizaines demilliers demanifestantsdemandant la dmissiondugouvernement deNawaz Sharifsont arrivs Islamabaddepuis le vendredi 15aot, lappel desopposants pakistanais ImranKhan et Tahir ul-Qadri. Ceux-ciespraient un tsunamidunmillion demanifestants pourdnoncer des fraudes au scrutin lgislatif demai2013. (AFP.)

    HongkongDfil des pro-PkinHONGKONG.Des dizaines demilliers demanifestants pro-Pkinont dfil, dimanche 17aot, Hongkong, pour soutenir le gou-vernement local contreunmouvement de dsobissance civilequimenace deparalyser lamgapole financire si des rformesdmocratiquesne sont pas engages. (AFP.)

    Onadequoiassurerenurgencesiuncasestdclar,maisceseraviteinsuffisantDrissaSoro

    infirmier Tiobli

    Deshommes armsde gourdinsont attaqu, dans la nuit dusamedi16 au dimanche 17aot,un centre disolement demala-desdEbola, Monrovia, la capi-tale du Liberia, provoquant lafuite de 17 patients et celle desinfirmiers.Ils ont cass les por-tes et pill les lieux. Lesmaladesont tous fui, relate une tmoindudrame. Les assaillants, jeunespour la plupart, auraient profrdesparoles hostiles la prsi-

    dente librienne, Ellen Johnson-Sirleaf, et affirmquil ny a pasdEboladans le pays. Le centredisolement avait t rcem-ment amnag dans un lycedunquartier considr commelundes picentres de lpidmieMonrovia. Des habitantsstaient opposs cette im-plantation. Le dernier bilandelpidmie est de 1145mortsauLiberia, enGuine, enSierraLeoneet auNigeria.

    BURKINAFASO

    LIBERIA

    GUINE

    MALI

    Abidjan

    KandopleuYamoussoukro

    Golfe de Guine

    CTEDIVOIRE

    150 km

    Tiobli

    Jeudi 14aot, dans le village ivoirien deKandopleu, prs de la frontire librienne. ISSOUF SANOGO/AFP

    LaCtedIvoireentatdalertefacelamenacedelpidmiedEbolaDepuisunmois, legouvernementaconsidrablement renforc lesmesuresprventivesdans les rgionsquibordent leLiberiaet laGuine,payso levirusa faitprsde800morts

    50123Mardi 19 aot 2014

  • france

    Lexcutifcourtdegrandesrformes

    Lessixdossiersbrlantsqui

    C est lune de ses expressionsfavorites. Rien ne se passejamais commeprvu, aimerpterFranoisHollande.Levoilservi au-del de ses esprances.Dans son esprit, la rentre 2014devait en effet correspondre autournant heureux du quinquen-nat. Cemoment o, passe la pha-sedu redressement, viendrait letemps du dpassement . Cemoment o, une fois faites lesrformes difficiles, les Franaispourraient commencer vivremieux. Ce moment o, pour ledire simplement, leffort cderaitenfin la place au rconfort.

    A lheure de lchance, leconstat est sans appel : non seule-ment les jours radieux se fontattendre,mais tout laisse penserque lhorizon continuera de sas-sombrir dans les prochains mois.Quel contraste avec la rentre2013 ! A lpoque, certes, la situa-tiondupaysntaitgureflorissan-te, et les Franais nourrissaientdj de srieux doutes sur la capa-citde leurprsident les sortirdelacrise.Maisaumoinscelui-ci sef-forait-il de les dissiper, assurantque la reprise tait enfin l, etque la courbe du chmage taitsur le point de sinverser.

    Un an plus tard, le dsaveu estcinglant. Non seulement les rsul-tats font dfaut la croissance estnulle, la France compte 130000chmeurs supplmentaires mais lexcutif ne cherche mmeplus faire accroire que lembellie

    est imminente. Pour M.Hollande,cest un double chec: chec de sapolitiquedunepart,puisquecelle-cinapasproduit leseffetsescomp-ts ; checde sa rhtoriquedautrepart,puisque loptimismesi carac-tristique du verbe prsidentieldepuis le dbut du quinquennatnesembledsormaisplusdemise.

    Dans un tel contexte, la rentreest forcment hauts risques,mme si nul ne peut honnte-ment prvoir do viendra lven-tuelorage. Lencore, il faut se sou-venir de lan pass. A lt 2013, legouvernement avait identifi unerforme sensible, celle des retrai-tes, et avait tout fait pour quellene mette pas les Franais dans larue. Il y tait parvenu mais, lesyeux rivs sur ce dossier, il navaitpas vu venir le ras-le-bol fiscaldnoncpar leministre des finan-ces de lpoque, Pierre Moscovici.Une fois de plus, rien ne se passacomme prvu : si la rforme desretraites fut adopte sans heurts,lautomne fut scand par unfeuilleton ayant pour objet lesimpts et pour incarnation lesbonnets rouges bretons.

    Soucieux de ne pas raviver ceras-le-bol , le gouvernement apris soin, cette anne, de dminerle terrain fiscal. Les Franais nereoivent que ces jours-ci leursfeuilles dimpts, il est donc enco-retropttpoursavoirsi lesbaissesannonces au printemps apaise-ront ceux qui, en 2013, avaientexprim leur colre. En ralit, surce sujet incandescent, qui expli-queenpartielesdconvenueslec-torales subies par la majorit auprintemps, la prudence simpose.

    Sil russit cette anne prve-nir lagrogne fiscale, il nestpas srenrevanchequelexcutifparvien-ne endiguer lemcontentementde sa majorit politique, aumoment o la dfiance atteint un

    recorddanslepaysplusde8Fran-aissur10necroientpaslegouver-nement capable de retourner lasituation conomique, selon unsondage IFOP/JDD paru le 17aot.Cettemajorit, enunan, sest effri-te. Les cologistes sont sortis dugouvernement, les radicaux degauche menacent de le quitter, etchez les socialistes, les quelquesdizaines de dputs qualifisdepuis le printemps de fron-deurs nont aucunement linten-tiondedsarmer la rentre.

    Pour linstant, ceux-ci nont pasfranchi le Rubicon, et leurmouve-ment na pas empch ladoption,en juillet,ducollectifbudgtaireetdubudgetrectificatifde laScuritsociale.Mais lacensurepartielledece dernier texte par le Conseilconstitutionnel, le 6aot, a toutesles chances dattiser un peu plusleurcolre.Djdifficileaccepterensoi, lepactederesponsabilitproposparM.Hollandelestenco-re plus, leurs yeux, sil se trouveamputdes allgements de cotisa-tions salariales, censs redonnerdu pouvoir dachat aux plusmodestes. De ce point de vue, lessemainesquiviennentserontdci-sives :au-deldudispositifderem-placement quil proposera concer-nant le volet social du pacte, legouvernementdevraprsenterunprojetdebudgetpour2015suscep-tibledtreacceptparunemajori-t deplus enplus remuante.

    Acestade, lexcutifafficheunecertaine srnit. Les frondeurs,estime-t-on lElyse comme Matignon, noseront voter contrelebudget, aurisquede faire implo-ser la majorit et donc de provo-quer une dissolution. Lexcutifpointeenoutrevolontiers labsen-ce, la tte de ce groupe, dunvri-table leadership. Les semaines quiviennent pourraient en partiechangerladonne.Troispersonnali-ts de poids sont en effet suscepti-bles de mener une forme de gu-rillainternelagauche.Lapremi-re est Ccile Duflot qui, aprs lacure de silence de quelques moisqui a suivi sa sortie du gouverne-ment, publie le 25aot Voyage au

    pays de la dsillusion (Fayard). Ledeuxime est Arnaud Monte-bourg dont le tandem Hollande-Valls peut craindre la capacit denuisance sil dcide de quitter leministredelconomie.Latroisi-me est Martine Aubry. Mutiquedepuis 2012, la maire de Lille sestautorise cet t quelques saillieslapidairesquiendisent longsur cequelle pense du couple excutif.Souhaitera-t-elle agrger autourdelle les dusdegaucheduhol-landisme?Nul ne le sait, et peut-trepaselle-mmedailleurs.Maissi tel est le cas, le chefde lEtatpeutse faire du souci.

    Face aux colres qui grondent,le couple excutif joue la carte delinflexibilit. Hors de questionde changer de politique, a rptManuel Valls, le 17 aot, dans leJournal du dimanche. Pas srquune telle attitude ne crispe pasdavantage quelle napaise. Ilfaut savoir rajuster une politiqueconomique quand elle ne fonc-tionne pas, a ragi, sur Europe1,Jean-Claude Mailly, le secrtairegnraldeForceouvrire,mettanten garde contre un climat socialtendu quune tincelle pour-rait embraser. Si rien ne change,nous allons devoir monter le tondun cran, car le pays est sous ten-sion et nen peut plus de cettemthode Cou, prvient quant lui Emmanuel Maurel, leader delaile gauche duPS.

    Un ancien ministre de Jean-Marc Ayrault, sous couvert dano-nymat, livre un diagnostic plussombre : Dans le pays, en cemoment, cest le feu sous la cendre.Il suffirait dun rien pour que toutpte. Et Manuel Valls ferait bien dese souvenir que la dernire foisquun premier ministre sest ditdroitdans sesbottes, ctaitAlainJupp, avant le grandmouvementsocial de 1995.p

    ThomasWieder

    Aprs avoir obtenu 40milliardsdeuros daidespour les entrepri-ses, le prsident duMedef, Pier-reGattaz, hsite sur la position tenir face au gouvernement. Le21juillet, il avait promis, dans LeFigaro, de faire dix nouvelles pro-positions lors de luniversitdt de lorganisation patrona-le, les 27 et 28aot. Il devraitfinalement semontrer nette-ment plus positif. Selon undocu-ment de travail que sest procurLeMonde, il avait pourtant prvudedemander la libralisation du

    travail le soir et le dimanche, lasuppression de la taxe sur lestransactions financires, delis-ser les seuils sociaux oudabaisser, voire de supprimer,toutes les fiscalits pesant surles outils de productionde lin-dustrie. Lentourage deM.Gat-taz fait dsormais savoir que cespropositions ne seront prsen-tes quen septembre, aprsavoir t retravailles. De quoisatisfaire le gouvernement,alorsque plusieursministres par-ticiperont luniversit dt.

    LarentrehautsrisquesdeFranoisHollandeMalgr labsencedersultatset lescritiquessuscitesparsapolitique, lexcutifnentendpaschangerdecap

    LARENTREDE LEXCUTIF san-noncedautant plus compliquepour le gouvernement que plu-sieurs dossiers chauds sont ins-crits lagenda. Il ny a pas forc-ment de quoi alimenter unmou-vement social dampleur,maisassezpour renforcer une dfiancedes Franais, dj auplus haut.

    LebouletduchmageDepuis son lection la prsi-

    dence de la Rpublique, enmai2012, FranoisHollandenaconnuquun seulmois de baissedunombre de demandeurs dem-ploi. En cette rentre 2014, le ch-mage atteint le niveau record de3,6millions de personnes. Linver-sionde la courbe, qui devait inter-venir avant fin 2013, estmainte-nant bien loin.

    Mais le plus grave problmepour le prsident est que sa luttese trouve dsormais dans uneimpasse. A lElyse, lon considreen effet que toutes les rformesquil fallait faire ont tmises enuvre. Les contrats aids tour-nent plein, laccord sur lemploidu 11 janvier 2013 est appliqu etle pacte de responsabilit entreprogressivement en application.

    Malgr cela, faute de croissan-ce, lconomie franaise ne pro-duit toujours pas assez demplois.LInsee, plus optimiste quePleemploi, prvoit aumieuxune sta-gnationdici la fin de lanne.Pour tenter dinverser la tendan-ce, lexcutif table sur deuxleviers qui doivent tre abordscet automne: lapprentissage etles seuils sociaux.

    Mais ces deuxdossiersannexesne suffiront probable-

    ment pas pour relancer lamachi-ne. Dans ces conditions, le gouver-nementne peut quemettre lapression sur le patronat pourquele pacte de responsabilit et ses40milliards daides aux entrepri-ses produisent enfin des effets. Ily a une responsabilit vidente desentreprises franaises. Nous leurdonnons desmoyens pour inves-tir, embaucher, innover. Elles doi-vent saisir cette chance, a dfen-dudans Libration, lundi 18aot,Michel Sapin, leministre desfinances.

    Eviterunenouvellefrondefiscale

    Le gouvernement veut viterde se trouver confront unenou-velle surenchre sur le thmeduras-le-bol fiscal, commelautomne2013. Problme: lim-pt sur le revenu acquitt en 2014par environ 19millions de foyersfiscaux, assis sur les revenusde2013, inclut plusieurs dispositionsde la loi de finances vote fin 2013qui, potentiellement, concernentplusieursmillions de contribua-bles: baisse duquotient familial,intgrationde lamajorationde10%des pensions pour les retrai-ts ayant eu aumoins troisenfants, fiscalisation des heuressupplmentaires sur une annepleine, suppressionpleinpot dela demi-part pour les personnesseules, fiscalisation des cotisa-tionsde complmentaire santprises en charge par lemployeur.

    Malgr la rindexation dubar-mede limpt sur le revenu, cesmesures cumules ne sont passans effet. Cest pourquoi le gou-vernement a dcid, dans la loi de

    Legouvernementnecherchemmeplusfaireaccroire

    quelembellieest imminente

    Troispersonnalitssontsusceptibles

    demenerunegurillainterne:CcileDuflot,ArnaudMontebourgetMartineAubry

    LeMedef hsite mettre la pression sur le gouvernement

    FranoisHollandeetManuel Valls,au fort deBrganon(Var), le 15aot.BERTRAND LANGLOIS/REUTERS

    POURSUIVRE les rformes, assurele premierministre,Manuel Valls.Mais lesquelles, quand le gros dudispositif destin relancer lco-nomie franaise a dores et djtmis sur les rails travers,notamment, le pacte de responsa-bilit? Pour le gouvernement, ilsagit donc, avant tout, de desser-rer les freins qui empchent lesmoteurs conomiques de tourner plein rgime.

    Premier souci pour lexcutif :trouver une voie fine pourcontourner la censure par leConseil constitutionnel de larductiondgressive des cotisa-tions salariales jusqu 1,3smicdontdevaient bnficier lesmna-gesmodestes partir du 1er jan-vier2015. Lamesurenest pasencore cale : plusieursministresdevaient tre runismardi parFranoisHollande, la veille duconseil desministres de rentrequi aura lieumercredi 20aot.

    Les dputs, quant eux,reprendront leurs travaux partir

    du9septembre, la rentre dessnateurs tant remise au 1erocto-bre, aprs le renouvellement, le28septembre, de lamoiti deleurs effectifs, qui devrait, selontoute probabilit, permettre ladroite de regagner lamajorit auPalais du Luxembourg.

    Relancer lapprentissageLe recul de lactivit dans le

    btiment est unprofond sujetdinquitudepour le gouverne-ment. La chute dunombre demises en chantier sest acclreaudeuxime trimestre (19%). Lepremierministre a donn rendez-vous en octobre aux profession-nels du secteur pour unnouveautraindemesures.

    Deux autres rendez-vous sontprvus en septembre. Toutdabord, des assises de linvestisse-ment, annonces par le chef delEtat lors de la confrence socialededbut juillet. Le gouvernementveutmobiliser lpargnedes Fran-ais vers le financement de lco-

    nomie. Problme: ctait dj undes objectifsmajeurs pour 2014avec, notamment, la crationduPEA-PME, sans grand rsultat jus-qu prsent.

    Le gouvernement veut gale-ment relancer lapprentissage.Mi-septembre, patronat et syndi-cats seront runis sous la prsi-dencedeM.Hollandepour concr-tiser les annonces de la confren-ce sociale en faveur de lembau-che dapprentis.

    Particulirement attendu, leprojet de loi sur la croissance et lepouvoir dachatport par leminis-tre de lconomie, ArnaudMonte-bourg, qui entendnotamment fai-re sauter les verrousdes profes-sions rglementes.

    Enfin, le gouvernement entendfaire bouger les rgles sur lesseuils sociaux. Il nest pas excluqueM.Valls prcise ses intentionslors de la prochaine universitdt duMedef, des 27 et 28aot, laquelle il a prvude se rendre.p

    PatrickRoger

    6 0123Mardi 19 aot 2014

  • france

    menacentdempoisonnerlElyselautomneFAITSDIVERS

    LeconvoidunprincesaoudienbraquParisLe convoi dun prince saoudien a t attaqu, dimanche 17aotau soir, porte de la Chapelle, dans le 18earrondissement de Paris,par un commando armqui a drob 250000 euros ainsi quedes documents. Ce convoi de plusieurs vhicules, parti de lam-bassadedArabie saoudite, se dirigeait vers laroport du Bourget(Seine-Saint-Denis). Lesmalfaiteurs, arms de fusils dassaut,selon Le Parisien, se sont empars dunmonospaceMercedesavec trois occupants bord, quils ont ensuite relchs, avant debrler le vhicule.p

    CinqpersonnestrouventlamortdanslesAlpesDeuxalpinistes et leur guide ont t retrouvsmorts, diman-che17aot, dans lemassif duMont-Blanc, indique la prfecturedeHaute-Savoie. Les circonstances dudcs de ces trois person-nes, dans le secteur de laiguille duMidi, demeuraient inconnueslundimatin. Le 13aot, les corps de six alpinistes avaient gale-ment t retrouvs prs de Chamonix. Par ailleurs, deuxprati-quants de base-jump sport extrme consistant se jeter dans levidedepuis une falaise avant douvrir sonparachute ont trou-v lamort dimanche 17aot dans les Alpes, unAustraliende33ans enHaute-Savoie et un Franais de 55 ans en Isre.p

    DUCATION

    AugmentationducotdelavietudianteLesdpensesdestudiantsdpasseront, encette rentre, de2%cellesde la rentre2013, souligne lUNEFdansun rapportdvoille 17aotpar Le Journaldudimanche. Ce chiffre, quatre fois sup-rieur linflation, sexplique, selon le syndicat tudiant, parlaug-mentationdes loyers et des frais obligatoires (inscriptions, ticketsrestaurant, scurit sociale).Globalement, indique le rapport,untudiantdoit dbourser 799eurosparmoispour subvenir sesbesoins.Quelque 30%destudiants salaris travaillent tempsplein, contre 18,5%en2006, salarme lUNEF, qui rappelle auprsi-dent sonengagementdemettre enplaceuneallocationdautono-mie. BenotHamonaannonc la revalorisationde lensembledesbourses sur critres sociauxde0,7%enseptembre.p

    Les Estables (Haute-Loire)Envoy spcial

    L aurent Wauquiez hume lair pleins poumons et pousseun rle de contentement lavuedesmontagnes duMassif cen-tral, qui crvent lhorizon. Cespaysages sont apaisants. Danslagitation du milieu politique, onfinitparneplussavoirpourquoionfait les choses. Une troupe dunecinquantainedepersonnessemas-se derrire lui. Comme chaque tdepuis trois ans, le dput (UMP)de la Haute-Loire est venu gravir,dimanche 17 aot, le montMzenc, plushaut point dudpar-tement, entour des partisans deson courant, la Droite sociale.

    Ce rendez-vous, cest sa rochedeSolutr lui, celui cens linscri-re, comme Franois Mitterrand,dans une destine prsidentielle.Lhomme prfre nanmoins serfrer Georges Pompidou, unnormalien qui revendiquait sesattaches rurales. Comme lui.

    Pour linstant, lchance laplus proche de lancien ministrede Nicolas Sarkozy est le congrsdelUMP, le29novembre.Aveccet-te rentre politique en Haute-Loi-re, il inaugure une squence char-gepour le parti de droite.

    Contacts rguliersM.Wauquiez simaginerait bien

    formerunticketaveclancienprsi-dent de la Rpublique, dont lavolont de retour est transparente dfaut dtre rvle. Jai garduncontact rgulier avec lui. NicolasSarkozy a dvidentes qualits, dudynamisme,unecapacitsecouerlestabousetunleadershipquiapeudquivalents dans la classe politi-que, dit-il plein dadmiration.Dans lhypothse dun accord, lemaire du Puy-en-Velay pourraitgrer le parti au quotidien, quandlex-chefdelEtatseprparerait, lui,pour laprsidentiellede 2017.

    Mais Laurent Wauquiez assurene pas vouloir faire de la course

    la tte de lUMPune affaire deper-sonnes. Cela donne lieu toutesles ambitions. Il faut dabord poserla question des valeurs. Celles delafamille,misesmalselonluiparla loi sur lemariage pour tous, parexemple.BrunoLeMairesestabs-tenu sur ce texte, rappelle-t-il propos du dput de lEure, candi-datdclar la tteduparti etpos-sible adversaire lors du congrs.

    Bien qunarque et ancienministre,LaurentWauquiezneces-se de critiquer les dcisionsmacrotechniquesprises par desconseillersenchambre, enappe-lant au retour du bon sens et aurespect du peuple. Son soutien M.Sarkozy, dit-il, dpendra deladhsion ou non de lancien chefde lEtat ces valeurs. Si tel nestpas le cas, il ne sinterdit rien.

    Lattentenedevraitplustrelon-gue.Nicolas Sarkozypourrait leverle suspense sur ses intentions dici la mi-septembre. De nombreuxcampusdejeunesdelUMP,auTou-quet (Pas-de-Calais), Nice ou LaBaule(Loire-Atlantique), sontprts laccueillir pour ce retour. Entre-temps, Franois Fillon aura effec-tusarentrepolitiquedans laSar-the, le 27 aot. Un vnementauqueldoitserendreBrunoLeMai-re, qui aura prsent sonprogram-mepourleparti trois joursplustt,le 24aot, Carnac (Morbihan).

    Parmi ces figures de lUMP,M.Wauquiez est le seul assumeraujourdhui sa proximit avecPatrickBuisson,undesartisansduvirage droite de Nicolas Sarkozylors de la prsidentielle de 2012.Lancien conseiller est honnidepuis la rvlationdesesenregis-trements clandestins effectuslors de runions stratgiques. Ilmarrive de lui parler, japprcie sacapacit faire bouger les ides,reconnat M.Wauquiez.Mais je nesuispasdaccordsurtout. Jenedl-gue pas mon cerveau. Il pourraittre en revanche prt dlguerses forces dautres.p

    Olivier Faye

    AumontMzenc,LaurentWauquiezrunitsestroupessansdvoilersesambitionsLedputde laHaute-Loirecaresse lidedunticketentreM.Sarkozyet lui la ttede lUMP

    finances rectificative adopte enjuillet, une rductiondimpt de350euros (700euros pourun cou-ple) au bnfice des contribuablesdont le revenu fiscal est infrieur 1,1smic. Devraient en bnficier3,7millions demnagesmodes-tes, pour unmontant total de1,16milliard deuros.

    Dans le prochainprojet de loide finances, cette enveloppedevrait tre porte 2milliardsdeuros voire au-del, afin de fairebnficier desmnages des clas-sesmoyennes infrieures dunebaisse de limpt sur le revenu.

    Ledlicatsujetdesprofessionsrglementes

    Cest probablement le projet deloi le plus sensible de lautomne.ArnaudMontebourg, leministrede lconomie, a promis, le10juillet, de prsenter la rentreunprojet de loi de remise enmouvement de lconomie. Ildoit notamment sattaquer auxdiffrentes professions rglemen-tes, pour redistribuer 6milliardsdeuros de pouvoir dachat auFranais, selon leministre.

    Mais depuis cette date, cest leblack-out total Bercy. Impossi-ble de savoir quand sera exacte-ment prsent le projet de loi niquel sera son contenu. Seul un rap-port de lInspection gnrale desfinances a fuit dans la presse cett. Les pistes ultra-sensibles quilcontenait sur les pharmaciens oules notaires ont suffi dclencherune vague deprotestationdesreprsentants de ces diffrentesprofessions.

    Larformeterritorialeenchantier

    Lenouveau redcoupage desrgions sest arrt cet t aprsunepremire lecture auSnat et lAssemblenationale. Lexamendu texte reprendra en octobredansun Snat o la droite auraprobablement regagn lamajori-t etmettra tout enuvrepourfreiner son adoption. Il seraitrducteur, toutefois, de nevoirdans cette bataille quunbarouddhonneurorchestr par les repr-sentants des baronnies locales.

    La nouvelle carte territoriale,qui doit tre suivie dun secondtexte sur la clarificationdes com-ptencesdes collectivits, soulvedemultiples inquitudes alorsque, paralllement, ces derniressubissentune baisse de leurs dota-tions. La crainte est forte quellesne soient amenes revoir labaisse leurs projets dinvestisse-ment, ce qui psera fortement surlconomie alors que les collectivi-ts contribuent pour 70%de lin-vestissement public.

    Lesrythmesscolaires,saison2

    Depuis sa nomination auministre de lducationnationa-le, le 2avril, BenotHamon seffor-ce de jouer la carte de lapaise-ment. Il nempche. La rentre sco-laire risque dtre chahute.Quel-que 20000communes doiventen effetmettre enuvre la dlica-te rformedes rythmes scolaires seules 4000 lont faiten 2013.

    En assouplissant le cadre origi-nel de la rforme,M.Hamon a ten-

    t de dminer le terrain. Undcret dat du 7mai offre ainsiplus de latitude dans lorganisa-tion des activits priscolaires, enpermettant notamment de lesregrouper sur unedemi-journe.14,9%des communes se sont sai-sies de cette opportunit.

    Unautre pande la rformepourrait nanmoins susciter defortes oppositions. De fait, lescinqmatines de classe resterontobligatoires, contre quatre prc-demment.M.Hamona refus decder sur ce point. Comme lan-ne prcdente, une partie desparents se plaindra probable-ment de la fatiguedes enfants,dboussols par le retour en clas-se lemercredi ou le samedimatin.

    Selonun sondageBVApublidbut juillet, 63%des Franaiscontinuent dailleurs depenserque les nouveaux rythmes ontunimpact plutt ngatif sur le bien-tre des lves. Une opinionplusquemitige sur laquelle pourrontsappuyer les lus qui rejettent larformeenbloc, dnonant sur-tout une insuffisantedotationde lEtat 50 euros par enfant pour samise enuvre. Lesmai-res rfractaires la loi sexposenttoutefois de lourdes sanctions,comme la soulignM.Hamon. Ilspourront tre suspendus pourunedure dunmois, voire rvo-qus en conseil desministres.

    LeretourdelaGPAA la rentre, FranoisHollande

    devra grer deuxmcontente-ments, idologiquement opposs,sur le dlicat dossier de la gesta-tionpar autrui (GPA).

    Cet t, laffaireduncoupleaus-

    tralienaccusdavoir abandonnunbb trisomiquesamrepor-teuse thalandaise adonnunargumentdeplusauxmilitantsdelaManif pour tous. Le 26juin, ladcisionde laCour europennedesdroitsde lhomme (CEDH)quia condamn la Francepour sonrefusde transcrire les actesde filia-tiondenfantsnsparGPA leuravaitdj apportunnouveaumotif demobilisation.Unappel manifester Paris et Bordeaux le5octobre adores etdj t lancpar laManifpour tous. Sur le frontpolitique, lapressionmonteaussi.Ledput (UMP,Alpes-Maritimes)JeanLeonetti devraitdposer lautomneunepropositionde loidurcissant les sanctions contre lesrecours laGPA ltranger.

    Dans cedbat qui transcendeles clivagespolitiques, la secrtai-re dEtat la famille, LaurenceRos-signol, devra aussi apporter desrponsesun frontuni deperson-nalitsdegauche, elles aussi oppo-ses laGPA.Dansune tribunepublie le 14juillet, une soixantai-nedepersonnalits, comme Jac-quesDelors, Lionel Jospinouenco-re laphilosophe SylvianeAgacins-ki, enjoignaient FranoisHollandesopposer publiquement lad-missionpar le droit des contrats demresporteuses, et donc ladci-sionde la CEDH,pournepas voirmergerunmarchdes bbs.

    La secrtaire dEtat la famillesest engage recevoir aprs le15aot ces signataires.Mais la por-te est troite. Le gouvernement aassur quil ne ferait pas appelaux arrts de la CEDH, tout enraffirmant sonopposition tou-te lgalisationde la GPA.p

    Service France

    70123Mardi 19 aot 2014

  • conomie & entreprise

    Entretien

    SanDiegoEnvoye spciale

    N ous sommes la Jolla, lecur scientifique de SanDiego. Ici, le gant des tl-coms Qualcomm ctoie de presti-gieuxcentresderecherchecommele Salk Institute, et les start-up sebousculentpour louerdeprcieuxmtres carrs sous les pins et desembruns du Pacifique. Cest lquestne, il y aquinze ans, Illumi-na.Inconnuedugrandpublic,cettefirme est le leader mondial dusquenage et de lanalyse delADN.Sesmachinesultra-puissan-tesquipentleslaboratoiresdetou-te la plante, dcodant une vites-se vertigineuse les 3milliards depaires de bases (les clbres lettresA,T,C,Gcombinesdeuxpardeux)quicomposentnotregnome.Uneminedorpour les scientifiques!

    Et ce nest quun dbut : en jan-vier, ceGoogle de lADNa lanc unsystme capable de dcrypter ungnome enmoins de vingt-quatreheures pour un cot unitaire inf-rieur 1000dollars. Presque de lascience-fiction quand on songequilafalluunedcennieet2,7mil-liards de dollars pour achever en2003lepremiersquenage.Bapti-sHiSeqXTen, le robot dIlluminapourrapasseraucribledespopula-tions entires. Objectif : dtecterles composantes gntiques dunnombre croissant de maladiespourmieux les dpister et les trai-ter.Lesquenagelowcostsignifieaussi que les mdecins et lespatients auront leur dispositiondes tests gntiques de plus enplus sophistiqus et abordables.

    Derrire les lgants murs debriqueetdeverredusigedIllumi-na, des centaines de scientifiquesde haut vol esquissent ainsi lescontours de lamdecine du futur.Leur chef dorchestre? Jay Flatley,qui dirige Illumina presquedepuis sa cration. En une dcen-nie, cepatroncourtispar les labo-ratoires pharmaceutiques a btiun petit empire dont les ventesslvent dj 1,4milliard de dol-lars etquipseprsde25milliardsen Bourse. Pour lui, le XXIesicleest lge dor de lADN. Il expliquepourquoienexclusivitauMonde.A 1000dollars lunit, le nombrede gnomes squencs va explo-ser. Quallons-nous apprendrede cesmilliards de donnes?

    Enlescomparantetenlesrecou-pant avec les donnes cliniques,nous pourrons tablir des corres-pondances entre les gnes et lesmaladies. Lobjectif est de mieuxles dpister, les diagnostiquer et,bien sr, de les traiter. Il fautsquencer entre 20 000 et

    25000gnomes pour pouvoir entirer la moindre conclusion, maisdans cinq ans, nous aurons beau-coup progress. Le gouvernementbritannique a ainsi lanc le projetGenomics England pour squen-cer dici 2017 le gnome de100000 de ses citoyens. Et il y aaussi des initiatives prives com-mecelledeCraigVenter,qui ambi-tionne aussi de squencer100000gnomes pour dcouvrirles composantes gntiques de lasant et de la longvit. La cl dusuccs rside dans le partage desdonnes.Dici l, que peut-on attendre decette rvolution de lADN enmdecine?

    Deplusenplusde testspermet-tentdeconnatre laprdisposition

    des individus diverses maladiescomme les cancers, de caractriserles mutations dune tumeur, ouencore de prdire la raction dunpatient tel ou tel mdicament.Bientt, lorsque vous irez voirvotre oncologue, la gntiquelaidera choisir le cocktail demolculesleplusefficacepourtrai-tervotretumeuret leplusadaptvotre profil gntique, car leffetpeut-tre trs diffrent dune per-sonne lautre. Mais, attention: aucunmoment nous ne disons aumdecin ce quil doit prescrire ouconseiller un patient. Cest sadcision.Quenous rvle aussi la gnti-que sur lesmdicaments quenous consommons?

    Dansenvironuncassurdeux, la

    molcule qui nous a t prescritena aucun effet, ou bien des effetsindsirables tels quils outrepas-sent lebnficeescompt.Laphar-macogntique, qui explore lin-fluence des gnes sur lefficacitdun traitement, permettra aumdecindcarterlespatientsris-que et de limiter les prescriptionsinutiles,voiredangereuses.Aupas-sage, cela gnrera aussi dimpor-tantes conomies ! Il existe djdes testsde ce typepourunedizai-nedemdicamentscourants,maisilssontencoretrspeuutiliss.Res-te une question: que propose-t-onauxmaladesquine rpondentpasaux traitements existants? Lepro-blme est que nous navons pasassez demdicaments.Les tests de dpistage soul-vent des questions thiques, sur-tout lorsquils sont pratiqussur des embryons. Jusquopeut-on aller dans la prdiction?

    Ondpistemaintenant la triso-mie21 grce un test gntiqueaussi fiable et moins risququune amniocentse. De nom-breuses maladies pourraient trediagnostiques de lamme faon,et, lavenir, il seratoutfaitpossi-ble de squencer intgralement legnomedes embryons et des nou-veau-ns. Cela permettrait dedtecter de faon trs prcoce cer-taines maladies afin de les traiterds la naissance, voire in utero.Dans le cas de maladies commelautisme, cela permettrait de

    gagnerdeprcieusesannes.Nousdevons dmontrer que lutilitpotentielle de ce type de testsoutrepasse les risques de drapa-ge. Car le squenage na pas pourbut de slectionner un enfantselon ses traits. Voil la frontirethique. Or, aujourdhui, la loi nedit pas ce qui peut ou ne peut pastre fait avec les donnesrecueillies. Cela doit changer.

    Avez-vous fait squencer votregnome?

    Jai fait squencermongnomeen 2010. Il a t analys une pre-mire fois en utilisant les bases dedonnes existantes. Jai ainsiappris que je souffrais dunedizai-ne de pathologies et que jauraisd mourir des annes aupara-vant!Depuis,nosbasessesontaffi-nes, et chaque anne, mon gno-me est rinterprt en fonctiondes nouvelles donnes. Cetteanne, jai ainsi appris que je ris-quais demourir sur la table dop-ration si je subissais une anesth-sie gnrale. Cest prcieux desavoir cela!

    Quepenser des tests destinsaugrand public?

    Cemarch va exploser dans lesdeux prochaines annes. Lespatients ont le droit de savoir ceque reclent leurs gnes, mais cemarch doit tre trs encadr.Nous travaillons avec la plupartdes socits qui commercialisentdestestsdestinationdesconsom-mateurs, mais nous avons refuscertains contrats.Quel rle joueront les nouvellestechnologies?

    Les objets connects vont jouerun rle de plus en plus important.Il sera un jour possible de relier entemps rel les donnes ADN dautres paramtres de sant, gr-ce des objets comme la futureiWatch dApple. Plus il y aura din-formations disponibles, plus lademande grandira et plus les gensaurontenviedepartagerleursdon-nes.Nousencourageonsles initia-tives de Google dans le domainede la gntique et nous travaillonssurdiffrentsprojetsavant-gardis-tes avec eux.Vous estimez 20milliards dedollars en 2014 lemarchdusquenage et des tests ADN.Quelsmarchs esprez-vousconqurir en plus de la sant?

    Le champ des applications estimmense. En agriculture, on peutacclrer la slection des varitsen examinant leur gnome. Onpeut slectionner celles qui sontrsistantes la scheresse, cer-tainspesticides, sansavoirrecoursunemanipulationgntique. Iro-nie du sort, notre technologie estle meilleur moyen de dtecter lesOGM! Le squenage permet defairedesprogrsconsidrablessurlesscnesdecrimesetpour identi-fier les victimes de catastrophesnaturelles. De plus en plus, onpourra relier les informations dugnomedestraitsphysiquessp-cifiques et reconstituer ainsi desportraits-robots. Dj, les nouvel-les techniques de squenage per-mettent danalyser les chan-tillons o se mlent diffrentsADN, ce qui ntait pas possibleavant.Toutes lessemaines,onvoitdes cas anciens rsolus grce cesprogrs de la gntique.p

    Propos recueillis parChloHecketsweiler

    Deplusenplusdetestspermettent

    deconnatrelaprdispositiondiversesmaladies,commelescancers

    Lesquenagenapaspourbutdeslectionner

    unenfantselonsestraits.Voillafrontirethique

    Trois centsmillions de livres. Voi-l ce que le Royaume-Uni estprt dbourser pour soffrir laplus grandebase gntique aumonde. Linvestissement a tannonc vendredi 1eraot par lepremierministre britannique,DavidCameron. Il sajoute unepremire enveloppe de 100mil-lions de livres dbloque en2012(soit environ 500millions deu-ros au total). Ces recherchesvont placer en quelques annesle Royaume-Uni en pointe desrecherches gntiques dans lemonde, selonM.Cameron.

    BaptisGenomics England, leprojet a pour objectif de squen-cer dici 2017 le gnome de100000 citoyens. Environ20000 personnes souffrantdunemaladie hrditaire et20000 patients atteints duncancer seront inclus danslchantillon. Les chercheursesprent que la comparaison ducode gntique dune personnesaine et dunmalade permettrademieux comprendre les patho-logies et de dvelopper des trai-tements plus cibls, personnali-ss et efficaces.

    IlluminadfendlesquenagelowcostdelADNLegroupeamricainamissur lemarchunrobotcapablededcrypter legnomehumainpour1000dollars

    EnFrance, lestestsgntiquessontautorissaucasparcas

    AuRoyaume-Uni, Cameron lanceGenomics England

    Jay Flatley, directeur de lentreprise amricaine Illumina, dans ses locaux de SanDiego. BRYAN SHEFFIELD

    LESRSULTATSqui saffichent surInternet la requtetestADNsontloquents: desdizainesdelaboratoiresoffrent aujourdhuiauxpatients franais lapossibilitde raliserdes tests gntiques.Pour savoir si lonest porteurdungnequiprdispose lamaladiedAlzheimer, audiabteoudivers cancers, il suffit denvoyerunpeudesalivepar laPoste. Pour-tant, la loi debiothiquede2011interditde solliciter soi-mme,sans laprescriptiondunmdecin,lexamendeses caractristiquesgntiques.Ces tests sontuneescroquerie, car en ltatactuel des

    connaissances, onnepeut tireraucune conclusiondu fait dtreporteurdungne dfectueux,sagace leprofesseurMarcDel-pech, chef duservicedegntiquede lhpital Cochin Paris.Lamajoritdesmaladiesmettent enjeuplusieursgnes, et les tudes ra-lises sur les vrais jumeauxnousdmontrent que linfluencede len-vironnement estaussi dterminan-te,ajoute-t-il.

    EnFrance, les tests gntiquesdeprdisposition sont donc exclu-sivement rservs auxpatientsdont lhistoire familiale est alar-mante, avec par exemple plu-

    sieurs gnrationsde femmesatteintes dun cancer du seinoude lovaire.

    Solides lments cliniquesPlus courants, les tests gnti-

    quesdediagnostic sont aussi trsencadrspar la loi. Lemdecinnelesprescrit que sur la basede soli-des lments cliniques et laconditionque lepatient en retireunbnfice (soit parce quil existeun traitement, soit parce que lefait de savoir apporteun soulage-ment). Lepatient peut refuserlexamenoudemander tre tenudans lignorance dudiagnostic.

    La loi debiothiquemet lac-cent sur laccompagnement,essentiel, selonArnoldMun-nich, directeurdudpartementdegntiquede lhpital universitai-reNecker-Enfantsmalades.Onnepeut pas rduire lagntiquesa seuledimension technique, etdlivrerdes rsultats aussi comple-xes sans explications, sansundialo-gue singulier, insiste-t-il.Dautantque les connaissancessont encore trsparcellaires. Surles 50000gnesqui composent legnome, 250ont t reconnus, parexemple, responsablesde retardsintellectuels, et 40ont t lis lpi-

    lepsie.Mais il y enapeut-tredescentaines dautres,prcise-t-il.

    En2014, 1500maladiespeu-vent trediagnostiques grce un test gntique. EnFrance, envi-ron350000patientsontpuenbnficier en2013, selon lAgencedebiomdecine. Les analysesADNsontdeplus enplusutilises pourvaluer lventuelle toxicit et leniveaudefficacit dunmdica-mentpourunpatientdonn.Unecentainede tests depharmaco-gntique sontdj disponibles etplusde 25000examensont traliss en 2013.p

    C.Hr

    8 0123Mardi 19 aot 2014

  • conomie&entreprise

    Sur la chane de peinture, lusine Toyota de Takaoka, au Japon, le 16juillet. JRMIE SOUTEYRAT POUR LE MONDE

    HTELLERIE

    Desaprison,SubrataRoyngocielaventedetroishtelsdeluxeLe sultan deBrunei, qui possdeDorchester Collection (LeMeuri-ce et le PlazaAthne, Paris) a propos Subrata Roy, prsidentdu conglomrat indien Sahara, de lui racheter pour 1,49milliarddeuros le PlazaHotel et leDreamHotel NewYork et leGrosve-norHouse Londres, rapportait dimanche 17aot le site InternetduWall Street Journal.M.Royngocie cette vente depuis la pri-sondeNewDelhi o il est incarcr depuis cinqmois aprs avoirrefus de comparatre devant la justice pour sexpliquer sur lerefusde son groupede rembourser plusieursmilliards de dollars des investisseurs ayant souscrit des missions obligataires. Ilna plus quequelques jours pour sacquitter de sa caution, fixe 1,22milliard deuros. De son ct, Dorchester Collection est visdepuis plusieursmois par des appels au boycott aprs linstaura-tion de la loi islamique auBrunei. (Reuters.)p

    DistributionLe repreneur deKarstadt envisagede fermer 15 20magasinsRenBenko, lAutrichienpropritaire de lenseigneallemandeKarstadt, quil a racheteaumilliardaireNicolasBerggruen, envisa-gede fermer 15 20grandsmagasinsdecette chane centenaire,selon le SddeutscheZeitungdesamedi 16aot. (AFP.)

    Reportage

    Takaoka (Japon)Envoy spcial

    C est un espace isol de lusi-ne Toyota de Takaoka, dansle centre du Japon. Au curde ce site de production de520000m dont sont sortis25millions de vhicules depuisson inauguration en 1966 et quiproduit aujourdhui des Rav4 oudes Auris , Hisao Harada, vingt-septansdemaison, peintaupisto-let la calandre dune iQ, un petitmodle du constructeur. Le gesteest rapide, fluide, juste.

    M.Harada est un takumi deToyota, un des 400 500expertsmaison, dont une femme spciali-sedanslasouduresurcircuitlec-tronique, matrisant la perfec-tionunetechniqueetdont lesmis-sions sont prcises. On peut lesenvoyernimporteodans lemon-depour former, amliorer, corrigerdes problmes, explique Toshita-mi Nagase, directeur adjoint delatelier peinture de Takaoka, o leconstructeur teste de nouvellestechniques, conformment samthode axe sur le kaizen,lamliorationcontinue.Laspcia-lisation extrme des takumis per-metdamliorerenpermanence lefonctionnementet lesperforman-ces des robots.

    Ils sont donc un lment essen-tiel de la russite de Toyota, pre-mier constructeur mondialdepuis trois ans. Entre janvier etjuin 2014, lentreprise a vendu5,1millions de vhicules dans lemonde. Sur le plan financier, legroupe de Nagoya (centre duJapon) a enregistr sur la priodeallant davril juin une hausse desesventesde2%, 6 390milliardsde yens (47milliards deuros), parrapport lammepriodede2013.

    Le groupe navait jamais venduautant de vhicules en un seul tri-mestre, malgr des performancesen recul de 4% sur le march nip-pon, consquence de la hausse dela TVA le 1eravril.

    Toyota ambitionne de vendreplus de 10millions de vhicules en2014. Ce serait une grande premi-re pour un constructeur. Pouratteindre cet objectif, le groupepeut compter sur ses takumis. Unerichesse qui, pourtant, spuise.La plupart des takumis appro-chent de la retraite, regretteMitsu-ru Kawai, directeur des questionstechniques. Nous avons prisconsciencedelimportancedetrans-mettre ce savoir.

    Concrtement,lesmeilleurs