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BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2007, N° 294 (4) 51 PINUS HALEPENSIS / INFOS BOIS Abdelhakim Daoui 1 Jérôme Douzet 2 Rémy Marchal 2 Abdellatif Zerizer 1 1 Université M’Hamed Bougara Laboratoire des matériaux minéraux et composites (Lmmc) Boumerdès Algérie 2 Ensam Laboratoire bourguignon des matériaux et procédés (Labomap-EA3633) Rue Porte de Paris 71250 Cluny France Valorisation du bois de pin d’Alep par déroulage : optimisation de son étuvage Échantillon de pin d’Alep de Draa El Mizan (Algérie) Dans le cadre du programme d’action intégré franco-algérien Tassili, un des projets qui s’attachent à valoriser le bois de pin d’Alep (Pinus halepensis Mill.) prévoit de démarrer en Algérie la production de contreplaqués et de Lvl (laminated veneer lumber). L’un des objectifs étant d’optimiser le déroulage, il convient de mettre au point la phase préalable : l’étuvage. Après l’étude de l’influence de la température d’étuvage sur quatre indicateurs (fentes à cœur, pertes en extractibles, profils d’humidité et efforts de coupe), l’article propose une température de compromis.

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B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 7 , N ° 2 9 4 ( 4 ) 51PINUS HALEPENSIS / INFOS BOIS

Abdelhakim Daoui1

Jérôme Douzet2

Rémy Marchal2

Abdellatif Zerizer1

1 Université M’Hamed BougaraLaboratoire des matériaux minérauxet composites (Lmmc) BoumerdèsAlgérie

2 Ensam Laboratoire bourguignon des matériaux et procédés(Labomap-EA3633)Rue Porte de Paris71250 ClunyFrance

Valorisation du bois de pind’Alep par déroulage :

optimisation de son étuvage

Échantillon de pin d’Alep de Draa El Mizan (Algérie)

Dans le cadre du programme d’action intégré franco-algérienTassili, un des projets qui s’attachent à valoriser le bois de pin d’Alep (Pinushalepensis Mill.) prévoit de démarrer en Algérie la production decontreplaqués et de Lvl (laminated veneer lumber). L’un des objectifs étantd’optimiser le déroulage, il convient de mettre au point la phase préalable :l’étuvage. Après l’étude de l’influence de la température d’étuvage sur quatreindicateurs (fentes à cœur, pertes en extractibles, profils d’humidité et effortsde coupe), l’article propose une température de compromis.

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RÉSUMÉ

VALORISATION DU BOIS DE PIND’ALEP PAR DÉROULAGE :OPTIMISATION DE SON ÉTUVAGE

L’Algérie connaît un dynamismedémographique qui conduit à unplan de construction de logementstrès ambitieux. Le bois de construc-tion est majoritairement importéd’Europe, alors que, parmi les res-sources locales, les huit cent millehectares de pin d’Alep algérien peu-vent offrir une substitution partielledes matériaux bois importés. Desproduits d’ingénierie bois d’intérêtpour la filière construction algé-rienne, le contreplaqué et le Lvlseraient potentiellement en bonneplace. Ces deux produits sont issusdu déroulage et, dans le cadre d’unprojet Tassili qui vise la caractérisa-tion et la valorisation du bois de pind’Alep algérien, des essais explora-toires ont été menés pour déterminerles paramètres de déroulage ad hocpour cette essence. Ce premier articletraite de la préparation hygrother-mique préalable du bois avant dérou-lage en prenant en compte quatrefamilles d’indicateurs pour détermi-ner une température d’étuvage quisoit un bon compromis. Ces indica-teurs concernent : la propagation desfentes de recouvrance à cœur ; ledésenrésinement du bois lors del’étuvage ; la répartition d’eau dansle bois, facteur déterminant pour uneprédiction de la durée d’étuvage ;l’évolution des efforts de déroulageen fonction de la température dubois. Une température de traitementde 50 °C apparaît être un bon com-promis, à l’instar de celui utilisé dansle cas du pin maritime.

Mots-clés : pin d’Alep, déroulage,étuvage, fente de recouvrance, humi-dité, extractible, Algérie.

ABSTRACT

OPTIMISATION OF STEAMING PRIORTO ROTARY PEELING OF ALEPPOPINE

Algeria’s dynamic population growthhas led to a highly ambitious plan fornew housing. Construction timber ismainly imported from Europe,despite the fact that, amongst localresources, Algeria’s eight hundredthousand hectares of Aleppo Pinecould offer a partial alternative toimported timber. Amongst the engi-neered timber products of interest toAlgeria’s construction industry, ply-wood and LVL are potentially wellplaced in this respect. Both are pro-duced by rotary peeling and, in thecontext of a Tassili project aiming tocharacterise and make use of Alge-ria’s Aleppo pine resources,exploratory tests have been con-ducted to determine ad hoc rotarypeeling parameters for the species.This initial article describes thesteaming and drying required to pre-pare timber for rotary peeling, in thelight of four indicator families, inorder to determine the steaming tem-perature that will offer the best com-promise. These indicators concern:the propagation of shakes to theheartwood; deresination of the woodduring steaming; moisture distribu-tion in the timber, which is a deter-mining factor in predicting the dura-tion of steaming; and changes inrotary peeling effort according to thetemperature of the wood. A process-ing temperature of 50 °C, similar tothat used for maritime pine, appearsto offer a good compromise.

Keywords: Aleppo pine, rotary cut-ting, steaming, shakes, humidity,extractible, Algeria.

RESUMEN

VALORIZACIÓN DE LA MADERA DEPINO CARRASCO POR DESENROLLO:OPTIMIZACIÓN DEL ESTUFADO

Argelia experimenta un incrementodemográfico que ha conducido a unplan de construcción de viviendasmuy ambicioso. La madera de cons-trucción se importa mayoritaria-mente de Europa mientras que, den-tro de los recursos locales, lasochocientas mil hectáreas de pinocarrasco argelino pueden sustituirparcialmente a los materiales demadera importados. Dentro de losproductos de ingeniería de la maderainteresantes para el sector de laconstrucción argelino, el contracha-pado y la madera microlaminadaocuparían potencialmente un buenlugar. Estos dos productos procedendel desenrollo y, en el marco de unproyecto Tassili cuyo objetivo es lacaracterización y valorización de lamadera de pino carrasco argelino, seefectuaron algunos ensayos explora-torios para determinar los mejoresparámetros para desenrollar estaespecie. Este primer artículo trata dela preparación higrotérmica previa dela madera antes del desenrollo,tomando en cuenta cuatro familiasde indicadores para determinar unatemperatura de estufado quesuponga un buen compromiso. Estosindicadores conciernen: la propaga-ción de rasgaduras medulares; la eli-minación de la resina en el estufado;la distribución de agua en la madera,factor determinante para estimar laduración del estufado; la evoluciónde los esfuerzos de desenrollo enfunción de la temperatura de lamadera. Una temperatura de trata-miento de 50 °C, al igual que para elpino marítimo, parece constituir unbuen compromiso.

Palabras clave: pino carrasco, desen-rollo, estufado, rasgadura medular,humedad, extraíble, Argelia.

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WOOD DATA / PINUS HALEPENSIS

Abdelhakim Daoui, Jérôme Douzet,Rémy Marchal, Abdellatif Zerizer

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Introduction

Le bois de pin d’Alep ne jouitpas d’une excellente réputation surl’ensemble du pourtour du bassinméditerranéen, pour au moins troisraisons : ▪ L’arbre présente un port tourmenté,ce qui hypothèque un rendementmatière correct en première transfor-mation.▪ Son bois est riche en résine, ce quiprovoque l’encrassement des outilset détériore la mouillabilité des sur-faces produites par usinage.▪ Son bois présente de nombreuxnœuds, défauts qui diminuent lesrésistances mécaniques du matériauet compliquent l’usinage quel qu’ilsoit (endommagement des outils etdes surfaces obtenues).

Cependant, Thibaut et al.(1992) ont montré sur un largeéchantillonnage réalisé en Franceque, finalement, ces caractéristiquesne rendaient pas ce bois « pire » quecelui du pin maritime des Landes(Pinus pinaster) dont il est en toutpoint très proche. Un des débouchésde masse du bois de pin maritimeétant le contreplaqué pour diversesapplications en construction, ilsemble naturel d’envisager une tellevalorisation pour le bois de pind’Alep, pour l’heure pas ou peu uti-lisé en matériau. En effet, le pind’Alep est essentiellement dirigé versl’industrie papetière en France etn’est récolté qu’à la marge en Algériepour des emplois mineurs en ameu-blement ou en construction.

Si en France les surfaces cou-vertes par le pin d’Alep représententenviron 2 % des surfaces forestièresavec 300 000 ha, en revanche le pind’Alep est la première essenced’Algérie ; avec 800 000 ha, il couvreprès de 40 % des surfaces forestièresde ce pays. Parallèlement, du fait dela sortie progressive de la crise poli-tique des années 1990, de l’explo-sion démographique qui se poursuitet d’ambitieux programmes de

construction de logements, l’Algérieprocède à des recours massifs auximportations de matériaux deconstruction en général et de bois enparticulier (Scandinavie, France,Afrique tropicale humide).

La filière bois algérienne estriche d’une multitude d’entreprisespubliques et privées à 90 % orien-tées vers la transformation des boisd’importation. Cela est dû à la fois àl’outil industriel formaté pour cesbois, à une politique forestière« conservatrice », parfois par prin-cipe (non-prise en compte de la fonc-tion de production de la forêt par cer-taines directions forestières dewilaya) et d’autres fois par nécessité(forêts de protection incontestables,forêts non encore sécurisées).

Certes, la forêt algérienne nepourra à elle seule pourvoir auximportants besoins en bois du paysmais elle peut contribuer significati-vement à l’effort et cela participerait,d’une part, au financement de sonexpansion propre, le gouvernementdemandant à la Direction généraledes forêts (Dgf) de mettre en œuvreune augmentation des surfacesforestières de plus de 3 millionsd’hectares en 30 ans… et, d’autrepart, à la structuration d’une filièrebois mieux intégrée à sa forêt.

Vu les besoins immenses del’Algérie en matière de logements etle fort potentiel forestier mis à malpar les guerres du XXe siècle, un pro-jet de recherche a été lancé en 2004dans le cadre du programme d’actionintégré franco-algérien Tassili, visantdes « développements de rechercheset de transferts d’innovations techno-logiques en vue de la valorisation dubois de pin d’Alep algérien en maté-riau ». Ce projet se décline en cinqactions dont une concerne l’« optimi-sation et maîtrise globale du dérou-lage du pin d’Alep ».

Le présent article propose lespremiers résultats de cette dernièreaction dont la finalité est de détermi-

ner les paramètres technologiques etindustriels pour produire en Algériedes contreplaqués et des Lvl (lamina-ted veneer lumber) à partir de pind’Alep, ces matériaux permettant unevalorisation particulièrement intéres-sante des bois de qualité secondaire(Marchal, 1995).

La première étape de la produc-tion de contreplaqué et de Lvl estl’opération de déroulage. Ce modede première transformation est parti-culièrement intéressant, notammentpar rapport au sciage, pour valoriserdes bois de faibles diamètres ou malconformés, car le copeau est le pro-duit fini et un billonnage court per-met de s’affranchir des défauts deforme de la grume.

Cette première étape est elle-même précédée par une opérationessentielle : l’étuvage. En effet, afind’être rendu apte à un déroulage dequalité (production d’un placage peufissuré, d’épaisseur constante, avecun bon état de surface, pas ou peutuilé), le bois rond en billons de 1 à5 m de long doit faire l’objet d’untraitement hygrothermique préalabledurant 12 à 72 h, à des températurescomprises entre 50 à 90 °C suivantles essences. Ce traitement, appeléétuvage, se fait le plus souvent parimmersion totale du bois vert dansde l’eau portée à température. Pourune essence donnée, cette tempéra-ture est souvent déterminée demanière empirique. L’étuvage permetde plastifier la lignine et donc deconférer au bois une déformabilitéqui améliore la qualité du copeau (leplacage) tout en réduisant les effortsde coupe. Ce traitement permet enoutre de plastifier les nœuds, de flui-difier la résine, d’atténuer les diffé-rences entre bois de printemps etbois d’été (Marchal et al., 1993).

L’optimisation de l’étuvageétant rarement faite de manièrerationnelle en entreprise, nous pro-posons ici une démarche fondée surl’analyse d’indicateurs objectifs.

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Matér iels et méthodes

Nous nous proposons de trou-ver une température de chauffe per-mettant une production de qualitétout en réduisant au maximum lesconsommations énergétiques et lesusures mécaniques de la machine etde l’outil. Cette optimisation se faiten se fondant sur l’analyse parallèledes évolutions avec la températurede différents indicateurs accessiblespar quatre séries d’essais menés surdu bois de pin d’Alep français etalgérien. Ces essais concernent :▪ La mesure de la propagation desfentes à cœur dues à la recouvrancehygrothermique. ▪ L’estimation des pertes en résinelors de l’étuvage.▪ L’établissement d’une cartographiede l’humidité dans le bois et l’évalua-tion de l’imprégnabilité à l’eauchaude du duramen. ▪ La mesure des efforts de coupe endéroulage.

Mesure de la propagationdes fentes à cœur

Quelle que soit l’essence, lagrume fraîchement abattue laisseapparaître des fentes, souvent aunombre de deux, partant de la moelleet qui sont l’expression de la libéra-tion d’un premier niveau decontraintes de croissance. Lorsque lebois vert subit un étuvage, ces fentesd’abattage tendent à se propagerdans le plan RT en direction del’écorce selon l’augmentation detempérature. Les variations dimen-sionnelles des cellules thermo-acti-vées (une faible dilatation tangen-tielle eT inférieure à 1 % et unecontraction radiale eR environ cinqfois plus faible) croissent avec la tem-pérature et correspondent au « débri-dage » des cellules une fois lalignine, voire la cellulose, activée. Cephénomène, appelé recouvrancehygrothermique (Rht), est décrit parGril et al. (1993). Ces variationss’opèrent également dans le sens

longitudinal du bois et toutes cespropagations s’effectuent de manièrenon linéaire avec la température. Enthéorie, on observerait deux accélé-rations de la propagation des fentes :l’une pour une température comprisedans la plage 40-60 °C (températurede transition vitreuse Tg de la lignine)et l’autre dans la plage 60-80 °C (Tgde la cellulose).

Ces fentes de recouvrancecontribuent à fragiliser fortement lebillon (risque d’explosion du billonpendant la coupe, générant desarrêts de machines, des pertes dematière et des endommagementsd’outils). Si l’on travaille sur billonscourts, comme l’exige ici la formetourmentée des grumes de pind’Alep, le phénomène est aggravé. Leratio surface générée par la fissura-tion/volume du billon prend alorsdes proportions importantes.

Il s’agit donc ici de trouver unetempérature de compromis, rédui-sant au maximum le risque de fragili-sation du billon soumis à l’action ducouple d’entraînement des bois lorsdu déroulage tout en diminuant demanière déjà significative les effortsde coupe. Cette température se situejuste avant celle générant la plusimportante transition.

Ces essais d’identification de latempérature de compromis ont étéeffectués sur six disques de 3 cmd’épaisseur issus de cinq arbres dif-férents (trois arbres prélevés enFrance et deux arbres prélevés enAlgérie ; tableau I). Avant les essais,ces disques ont été conservés à l’étatvert, immergés dans de l’eau à unetempérature ambiante de 20 °C.

Avant de démarrer les testsd’étuvage, on a relevé sur chaquedisque les longueurs des fentes ini-tiales d’abattage. Chaque disque aensuite été immergé totalement dansun bain d’eau thermostaté à ± 1 °C ensuivant les séquences d’étuvage etde mesure suivantes :

▪ Mise en chauffe à 30 °C. ▪ Maintien de cette température pen-dant 30 min. ▪ Mesure des nouvelles longueursdes fentes à cœur (figure 1).▪ Mise en chauffe à 40 °C puis nou-velle immersion des disques.▪ Maintien de cette température pen-dant 30 min. ▪ Mesure des nouvelles longueursdes fentes à cœur, et ce jusqu’à unetempérature finale de 100 °C.

À la faveur des essais de dérou-lage en 1 et 3 mm effectués sur lesbillons issus d’un arbre prélevé àJuvignac dans l’Hérault (voir ci-après« Mesure des efforts de coupe endéroulage »), nous avons répété cesmesures sur 14 billons, cette fois de60 cm de long, prélevés sur la grumefraîchement abattue. Deux billonstémoins n’ont pas été étuvés et ontété déroulés chacun dans l’une desdeux épaisseurs. Six autres paires debillons ont été étuvées respective-ment à 40, 50, 60, 70, 80 et 90 °Cpendant 24 h avant d’être déroulées.Au préalable, les fentes à cœuravaient été mesurées avant étuvagepuis après étuvage, dans le plantransversal RT, sur chacune des deuxfaces de chaque billon. Ainsi, on a pucalculer pour chaque billon l’évolu-tion de la longueur des fentes entrela température initiale (20 °C) et uneseule température d’étuvage, ce quidiffère alors de la démarche sur lesdisques.

Parallèlement, on a cherché àévaluer la propagation de ces mêmesfentes dans le sens longitudinal, afind’estimer la surface interne de déco-hésion et donc le risque de fragilisa-tion du billon suivant la températured’étuvage. Pour ce faire, du bleu deméthylène a été injecté avec uneseringue dans les fentes de recou-vrance puis la mesure de propaga-tion a été effectuée sur le noyau rési-duel après le déroulage (figure 1b).

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Figure 1. Mesure de la longueur des fentes de recouvrance :▪ a, sur disque, dans le plan transversal (cas de deux provenances algériennesà 20 °C, puis après étuvage à 100 °C) ;▪ b, sur billon dans le sens longitudinal, après marquage au bleu de méthylène.

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Mesure de la perte en extractibles

L’étuvage entraîne l’éliminationd’une certaine quantité d’extractiblesà l’eau. Parmi ces extractibles figurela résine dont la présence en grandequantité dans le bois de pin d’Alepest assez défavorable à la qualité duprocessus et du produit final, du faitde l’encrassement des outils et de ladiminution de la mouillabilité dessurfaces obtenues (diminution del’aptitude au collage).

Lors des essais de mesure de pro-pagation des fentes à cœur menés surles deux provenances algériennes, DraaEl Mizan et Buinan, nous avons peséchaque disque pour chaque palier detempérature entre 20 et 100 °C et avonsconstaté une perte de masse que nousavons imputée pour partie à une extrac-tion de la résine (figure 2).

Dans ces premiers essais, latempérature ayant été maintenueconstante durant 30 minutes seule-ment pour chaque palier, nous avonscomplété le dispositif par une nou-velle série d’essais menés tous les10 °C entre 40 et 90 °C sur un boisd’une nouvelle provenance algé-rienne (Zemmouri, tableau I) afind’apprécier, d’une part, l’influencede la durée du traitement et, d’autrepart, l’importance du phénomène deperte en masse suivant la positiondans le plan transversal du bois.

Un essai préliminaire conduit sur48 h avait révélé que plus de 80 % duphénomène de perte de masse pendantl’étuvage intervenait au cours des deuxpremières heures. Cependant, nousavons fait le choix de mener tous nosessais sur 8 h, en opérant des relevésde masse de manière plus fréquentedurant les deux premières heures.

Pour mener ces essais, nousavons fractionné un disque de prove-nance Zemmouri suivant le plan dedécoupe présenté à la figure 3, per-mettant un repérage spatial du boispar rapport à l’excentration du cœurainsi que dans le sens radial (troispositions : aubier, intermédiaire,vieux duramen). Nous avons obtenu36 cubes de 3 cm d’arête. Chaquecube a fait l’objet d’un traitement àune température d’étuvage constantepuis de pesées régulières sur les huitheures de l’essai.

L’enceinte thermorégulée a éténettoyée avant chaque nouvel essaipuis remplie de la même quantitéd’eau adoucie (7 l) pour chaqueessai, afin de pouvoir mener une ana-lyse des différentes eaux d’étuvage,toutes choses égales par ailleurs.

À chaque fin de cycle et pourune température donnée, de l’eau

Tableau I.Matériel utilisé pour les différents essais.

Station Échantillons analysés Âge de Diamètre à 1,30 m l’arbre (ans) de hauteur (mm)

Algérie Draa El Mizan, 1 disque pour les fentes de Rht* 17 180wilaya de Bouira

Buinan, 1 disque pour les fentes de Rht 28 235wilaya de Blida et la mesure des pertes de masse

Zemmouri, 1 disque pour les essais de pertes de masse 50 280wilaya de Boumerdès sur des cubes de 3 cm d’arête

Ain El G’sab, Carottes de sondage issues de 5 arbres - 400 à wilaya de Saïda pour établir un profil radial d’humidité 450

Mimouna 1, Carottes de sondage issues de 5 arbres - 370 à wilaya de Saïda pour établir un profil radial d’humidité 500

Mimouna 2, Carottes de sondage issues de 5 arbres - 170 à wilaya de Saïda pour établir un profil radial d’humidité 500

France Montferrier (Hérault) Arbre A 30 2501 disque pour les fentes de Rht

Arbre B 50 3501 disque dans le billon de pied pour les fentes de Rht1 disque dans la première surbille pour les fentes de Rht

Juvignac (Hérault) 14 billons de 60 cm issus du même arbre pour les fentes 95 330de Rht et le déroulageDisque pour établir des profils d’humidité

Rht : recouvrance hygrothermique.

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d’étuvage a été prélevée afin demesurer la conductivité électrique duliquide puis de la corréler aux tauxd’extractibles éliminés.

Afin de préciser la cause despertes de masse observées, nousavons procédé au dosage d’extrac-tibles résiduels dans le bois sur les6 x 4 éprouvettes étuvées (40, 60, 70et 80 °C) et sur six éprouvettestémoins (une série diamétraleentière) issues d’un disque deZemmouri non étuvé (figure 4). Nousavons extrait la quasi-totalité desextractibles des échantillons à l’aided’un solvant organique, afin de quan-tifier les pertes réelles d’extractiblesaux différentes températures(Douzet, 2006). Pour ce faire, nousavons conduit sur environ 1 g de boisde chaque échantillon, à l’aide d’unSoxhlet, trois essais d’extraction enutilisant une solution d’acétone.

Profils d’humidité

Le bois étant un très bon isolantthermique, l’eau libre dans le bois vertconstitue le vecteur principal de cha-leur permettant la chauffe volumiquedu bois immergé dans l’eau chaude.Pour une estimation de la cinétiquede chauffe, il importe donc deconnaître la répartition de l’eau dansle billon à l’état vert initial, et l’impré-gnabilité de ce bois à l’eau chaudesous pression atmosphérique.

Une première campagne aconsisté à carotter 15 arbres dans troisstations forestières de la wilaya deSaïda (Ain El G’sab, Mimouna 1,Mimouna 2) à raison de cinq arbres parstation (tableau II). Les carottes ont undiamètre de 15 mm et ont été prélevéesradialement, suivant la direction sud-ouest/nord-est, à 1,30 m de hauteur etsur une longueur de 150 mm environ.Juste après extraction, chaque carotte aété fractionnée en 7 à 10 portions d’en-viron 20 mm de long (figure 5a), immé-diatement pesées avant d’être séchéesà l’étuve sèche à 102 °C pendant 24 hafin d’obtenir leur masse anhydre.

Un second essai a été conduitsur un disque extrait du milieu d’unbillon de l’arbre fraîchement abattu à

Juvignac, Hérault. De ce disque ontété extraites deux barrettes suivant legrand et le petit diamètre du disque(figure 5b) et chaque barrette a étédébitée en parallélépipèdes qui,comme pour les carottes, ont faitl’objet d’une double pesée. On tracealors les courbes des taux d’humiditéle long des deux diamètres.

Enfin, lors des essais d’étuvagedes billons de Juvignac (voir ci-avant« Mesure de la propagation desfentes à cœur »), chaque billon a étépesé avant et après étuvage pourestimer la reprise en eau globale dueà l’étuvage et donc l’imprégnabilité àl’eau pour différentes températures.

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Figure 2. Pertes de masse observées pendant l’étuvage, par paliers de 30 min, pour deuxprovenances algériennes, Draa El Mizan et Buinan.

Figure 3. Découpe d’un disque en 36 éprouvettes (12 secteurs x 3 positions radiales) pourl’analyse de la perte de masse en cours d’étuvage.

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Station

Ain El G’sab▪ Espacement entre les arbres : 6 m▪ Pente moyenne▪ Pin d’Alep seulement

Mimouna 1▪ Espacement entre les arbres : 6 à 7 m▪ Pente accentuée▪ Mélange

Mimouna 2▪ Espacement entre les arbres : 2 à 3 m▪ Pente moyenne▪ Mélange

Tableau II.Caractéristiques des 15 arbres carottés en wilaya de Saïda

(toutes les carottes ont été prélevées suivant l’orientation sud-ouest / nord-est)

Arbre

1

2

3

4

5

1

2

3

4

5

1

2

3

4

5

Diamètreà 1,30 m

de hauteur(cm)

42

45

40

45

40

40

50

50

47

37

50

38

35

25

17

Hauteurtotale

(m)

14

15

10

11

9

10

13

12

11,5

7

12

9

10

6

6

Inclinaison (cm)(écart du tronc /

verticale à 2,10 m)et orientation

0

10 / sud

15 / sud

20 / sud-ouest

0

20 / nord

0

0

90 / nord

0

40 / nord-est

0

50 / nord

0

10 / sud

Hauteurpremièrebrancheverte (m)

6

7

7

4

2,5

2,5

5

4

6

2,5

7

3

5

2,5

1

Position dans le

peuplement

Au milieu,dominant

Au bord,dominant

Au milieu,dominant

Au milieu,dominé

Figure 4. Taux d’extractibles après étuvage à quatre températures différentes, pendant 8 h(provenance algérienne : Zemmouri).

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Mesure des effor ts de coupe en déroulage

Un des intérêts majeurs de l’étu-vage étant de diminuer les efforts decoupe et donc l’usure de l’outil et dela machine, nous avons conduit unesérie d’essais de déroulage en 1 et3 mm sur la dérouleuse Sem del’Ensam, machine industrielle instru-mentée (mesure des composantesorthogonales des efforts de coupeexercés sur l’outil et des efforts decompression exercés par la barre depression sur le billon ; figure 6).

Ainsi, les 14 billons de 60 cmprovenant de l’arbre abattu à Juvignac(voir « Mesure de la propagation desfentes à cœur ») ont été déroulésaprès un étuvage de 24 h dans unebouilloteuse, respectivement à 40,50, 60, 70, 80 et 90 °C, ainsi qu’àtempérature ambiante pour deuxbillons témoins. Pour chaque tempé-rature de traitement, nous avonsdéroulé deux billons adjacents dansla grume : l’un en 1 mm et l’autre en3 mm. Les paramètres de coupe ontété les suivants :

▪ Vitesse de coupe, 1 m/s.▪ Angle de dépouille, 0,5° en 1 mm,0° en 3 mm.▪ Cote verticale de la barre de pres-sion, 0,6 mm.▪ Cote horizontale de la barre de pres-sion, respectivement 0,8 mm et2,4 mm pour les épaisseurs 1 et 3 mm(taux de compression de 20 %).

Les efforts de coupe ont étémesurés une fois seulement lerégime établi de coupe atteint.

Entre deux essais, le couteau n’apas été réaffûté car l’usure n’est passignificative sur 14 déroulages. Eneffet, en industrie, un affûtage est réa-lisé dans le pire des cas toutes lesdeux heures de production et aumieux toutes les huit heures, soitaprès le déroulage de plusieurs cen-taines de billons. Cependant, lors denos essais, l’outil a été légèrementpierré entre chaque essai pour atté-nuer de légers retournements d’arêtelocalisés. La série d’essais a été termi-née par les deux déroulages à 20 °C,la température ambiante, car il s’agis-sait de la modalité la plus susceptibled’endommager l’arête de l’outil.

Figure 5. Préparation des éprouvettes soumises à une double pesée pour établir des profils d’humidité :▪ a, découpe de la carotte en secteurs ;▪ b, découpe d’un disque en deux séries diamétrales de parallélépipèdes.

Figure 6. Repères orthogonaux (H et V) utilisés pourdécomposer l’effort de la coupe (Hc et Vc) et celui exercé par la barre de pression (Hb et Vb).

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Résultats et discussion

Mesure de la propagationde la fente de recouvrance

hygrothermique

Les courbes de propagation desfentes transversales provoquées surdisques (figure 7a) ne font apparaîtrequ’une seule zone de transition com-prise entre 40 et 70 °C, à l’exception tou-tefois de la provenance Draa El Mizan.

Sur les billons longs de Juvignac(figure 7b), la même remarque pré-vaut, y compris dans la direction longi-tudinale. Toutefois, les mesures effec-tuées sur les billons chauffés à 90 °Cfont apparaître des longueurs defentes plus faibles que pour les essaisà 80 °C. Cela met en évidence l’impor-tante variabilité de la réponse du boisaux fentes de recouvrance. Le taux dedécohésion (rapport surface diamé-trale du billon/surface de bois fendu)atteint un maximum de 10 % à 80 °C.

Mesure de la perte en extractibles

La figure 2 indique sur les deuxdisques provenant de Draa El Mizanet de Buinan (essais de 30 min pourchaque palier de température entre20 et 100 °C) des pertes de masseévoluant de manière quasi linéaireavec la température et atteignant 4 %de la masse initiale à la fin du cycled’essais à 100 °C.

Les essais conduits sur unelongue durée font apparaître que :▪ Les pertes tendent à augmenter del’extérieur du bois vers l’intérieur(figure 8a pour les essais à 70 °C).Cela est conforme aux observationsd’un gradient de résines augmentantde la périphérie au cœur de l’arbre(Thibaut et al., 1992). ▪ Toujours sur disque, la perte demasse se stabilise au bout d’environ2 h de traitement quelles que soientla position radiale (figure 8a) et latempérature (figure 8b).▪ La perte de masse s’accentue forte-ment au-delà de 60 °C (figure 8b).

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Figure 7. Évolution de la longueur des fentes de recouvrance hygrothermique :▪ a, dans le plan transversal au départ de la moelle, sur six disques issus de cinqarbres (trois d’origine française, Montferrier, et deux d’origine algérienne, Draa ElMizan et Buinan) ;▪ b, dans le plan transversal au départ de la moelle (b1) et dans la directionlongitudinale (b2), sur les 14 billons issus de l’arbre récolté à Juvignac (France).

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Bien que l’imprégnabilité dubois de pin d’Alep soit globalementfaible (voir ci-après « Profils d’humi-dité »), à l’instar de la plupart desrésineux, un essai exploratoire sur undisque a mis en évidence, à la tem-pérature de 20 °C, une aptitude dubois de pin d’Alep à reprendre del’eau par simple trempage. Ainsi, les

pertes de masse mesurées précé-demment sont en fait le bilan dedeux phénomènes qui vont en sensinverse : une perte de matière réelledue à l’extraction de résines et unereprise d’eau d’importance moindre.Les essais de dosage des extractiblesdemeurant dans les échantillons deZemmouri après différents traite-

ments et pour différentes positionsradiales font apparaître un certainnivellement des valeurs (figure 4),mais les faibles taux mesurés sur letémoin non étuvé posent questionsur le choix judicieux de ce témoin.

Nous pouvons toutefoisconclure de ces essais, d’une part,que la plupart des extractibles sontconcentrés dans la partie centrale(proche du cœur) de l’arbre (jusqu’àprès de 27 % avant étuvage, ce quiest conforme aux résultats deThibaut et al., 1992) et, d’autre part,que l’étuvage a bel et bien un rôled’extraction des parties très chargéesen extractibles : plus la températured’étuvage est élevée, plus la quantitéextraite est importante.

Il serait nécessaire d’aller plusloin dans la détermination de la com-position chimique et de la natureréelle des extractibles, qui ne sontsans doute pas limités aux seulesrésines.

Toutefois, il est important denoter que, quelle que soit la tempéra-ture d’étuvage, les billons longs deJuvignac ont tous repris entre 2,5 et4 % de masse lors de l’étuvage. Celaconfirme que le fait de travailler surdisque introduit un biais important,la surface de contact bois/eau étantbien supérieure sur disque à cequ’elle serait dans le cas de billonsen grandeur d’emploi.

Enfin, l’analyse des eaux d’étu-vage indique une tendance intéres-sante : la conductivité électrique deseaux tend à augmenter avec la pertede masse du bois et donc avec letaux d’extractibles dans l’eau (figure9). Cette observation, à confirmer surun plus grand nombre d’essais, sug-gère qu’il serait possible de suivre enligne le taux de « désenrésinement »du bois lors de l’étuvage.

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Figure 8. Pertes de masse du bois (provenance algérienne : Zemmouri) :▪ a, suivant la position de l’échantillon dans le plan transversal, lors de l’étuvageà 70 °C. Côté du disque à croissance rapide : C, vieux duramen ; M, jeuneduramen ; E, aubier. Côté à croissance lente : C’, M’ et E’.▪ b, valeurs moyennes par température (chaque point est la moyenne des valeursdes six positions).

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Profils d’humidité

Les carottes prélevées enAlgérie étant courtes par rapport audiamètre des arbres, nous ne dispo-sons que de peu de points de mesuredans le duramen. Toutefois, les pro-fils radiaux d’humidité obtenus(figure 10) indiquent un aubier trèshumide (entre 60 et 100 %) et unduramen proche du point de satura-tion des fibres (entre 30 et 40 %). Cesrésultats et ordres de grandeur sontconfirmés par ceux obtenus surl’arbre échantillonné à Juvignac(figure 11).

Cette « sécheresse » du dura-men est défavorable dans le cas dudéroulage car le temps d’étuvagedevra, par conséquent, être aug-menté (peu d’eau libre pour servir devecteur de chaleur) et la coupe pardéroulage est toujours de moindrequalité sur bois sec que sur boissaturé (déformabilité moins impor-tante du bois générant des fissura-tions et arrachements). Toutefois,cela est assez classique chez la plu-part des résineux à aubiers différen-ciés (Mothe et al., 2000).

Mesure des effor ts de coupe

La figure 12 visualise les évolu-tions des efforts de coupe et de com-pression avec la température du boispour le cas de déroulages en 1 et3 mm d’épaisseur.

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Figure 9. Évolution de la conductivitéélectrique à 20 °C des eauxd’étuvage, avec la perte de massedu bois pour des étuvages àdifférentes températures, dans 7 ld’eau et pendant 8 h.

Figure 10. Évolution du taux d’humidité du bois vert mesuré sur des carottes radialesprélevées sur 15 arbres (Ain : Ain El G’sab ; Mim 1 ou 2 : Mimouna 1 ou 2).

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Les évolutions des efforts pour lacoupe en 1 mm laissent apparaîtredes valeurs atypiques pour les tempé-ratures de 50 et 60 °C. Cela peut venir,d’une part, du fait que plus la coupeest mince, plus les efforts mis en jeusont faibles et plus une perturbationmême minime de la coupe (présencede singularités, réglage non optimisé)peut entraîner une dérive importante,et, d’autre part, pour ces deux tempé-ratures, du fait que l’angle dedépouille a été laissé à 0° commepour les essais en 1 mm, d’où unesituation allant même jusqu’à unelégère plongée d’outil (Hc > 0) pourl’essai à 60 °C. Pour tous les autresessais en 1 mm, l’angle de dépouille abien été correctement réglé à 0,5°.

En faisant abstraction de ce der-nier problème, la tendance généraleest globalement à la décroissancedes efforts, toutes les caractéris-tiques mécaniques du bois dimi-nuant quand sa température aug-mente. Les écarts-types de cesvaleurs diminuent également, témoi-gnant d’une stabilité accrue de lacoupe.

La diminution des efforts la plusimportante s’observe en 3 mm entre20 et 40 °C. Au-delà, la diminutionrelative est plus modeste, alors queparallèlement la consommation éner-gétique nécessaire pour la chauffe dubois s’accentue fortement.

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Figure 12. Évolution des efforts de coupe et de compression (moyennes et écarts-types)avec la température d’étuvage lors du déroulage de billons (60 cm de long) en deux épaisseurs : 1 mm (a) ou 3 mm (b).

Figure 11. Évolution du taux d’humidité dans le pin d’Alep vert récolté à Juvignac (France),suivant deux diamètres.

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Conclusion et perspectives

L’objectif était, à la lumière desquatre familles d’indicateurs ci-des-sus, de proposer une températured’étuvage du pin d’Alep qui constitueun bon compromis.

Ainsi, au vu de nos essais explo-ratoires, la bonne température seraitde :▪ 40 à 50 °C si l’on considère lesfentes de recouvrance.▪ 80 à 90 °C si l’on considère lespertes de résines.▪ 80 à 90 °C si l’on cherche à chaufferau plus vite le duramen pauvre eneau libre et peu imprégnable.▪ 50 à 60 °C si l’on cherche une dimi-nution significative des efforts decoupe.

Cependant, ces indicateurs nepèsent pas tous du même poids dansla décision finale. La perte en résinedevant être assez marginale àl’échelle d’un billon en dimensiond’emploi, ce critère ne sera pas pré-pondérant. En revanche, nous favori-serons le critère « fentes de recou-vrance » car, du fait du billonnagecourt à préconiser sur des grumes àport tortueux, ce défaut doit êtreréduit autant que faire se peut pourne pas mettre en péril l’intégrité desbillons lors de la chauffe et, surtout,lors de la coupe.

Par conséquent, nous retien-drons 50 °C comme la plus hautetempérature jugée acceptable pource qui est de la propagation desfentes, tout en permettant une dimi-nution des efforts de coupe de l’ordrede 50 % par rapport au déroulage àtempérature ambiante.

Cette recommandation, déjàappliquée dans l’industrie du dérou-lage de pin maritime, sera validée lorsde nouveaux essais en cours, en labo-ratoire en France et en industrie enAlgérie, en vue de l’optimisation desparamètres de coupe en déroulage.

RemerciementsLes auteurs remercient le Programmed’action intégré franco-algérienTassili pour le financement de cetteétude, les Conservations des forêtsdes wilayas de Tiaret, Saida et Tizi-Ouzou et la Chambre d’agriculture del’Hérault pour leur aide à la fournituredes bois nécessaires à ces essais.

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