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L’ESSENTIEL OTAN, la défense au rabais Les Etats membres baissent leurs budgets militaires FRANCE P.2 Polémique sur la visite parlementaire en Syrie n Les élus venus rencontrer Bachar al- Assad à Damas ont été ouvertement critiqués par le gouvernement et le PS qui envisage des sanctions. INTERNATIONAL P.4 François Hollande en visite d’Etat aux Philippines n Le président mise sur une coopération avec l’archipel en vue du sommet mondial sur l’Ecologie qui se tien- dra à Paris. ECO/CONSO P.6 Lidl rejette le hard-discount n Présent pour la pre- mière fois au Salon de l’agriculture, l’entre- prise veut changer son image de marque. Le plan énergétique de l’UE n Juncker a présenté sa stratégie pour l’éner- gie européenne. CULTURE P.8 La télé-réalité en couches-culottes n Channel 4 filme des enfants de quatre ans dans une garderie. EXPRESSO Malgré les bruits de bottes en Europe de l’Est , le continent européen est divisé sur la question de sa sécurité. Malme- nés par la crise de l’endettement qui les pousse à couper leurs dépenses, beau- coup de membres de l’OTAN sacri- fient leur défense. Seuls les pays limi- trophes de la Russie augmentent leur budget militaire, inquiets des menaces à leurs frontières. PAGE 5 Soldats lituaniens lors de l’exercice de l’OTAN «Noble Sword 14» à Oleszno en Pologne, le 10 septembre 2014. Michael Dalder/Reuters QUOTIDIEN DU MASTER DE JOURNALISME DE L’ INSTITUT FRANÇAIS DE PRESSE - PROMO 2016 # 08 26 02 2015

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Le quotidien-école des M1 de l'école de journalisme de l'Institut Français de Presse.

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L’ESSENTIEL

OTAN, la défenseau rabais

Les Etats membres baissent leurs budgets militairesFRANCE P.2Polémique sur la visite parlementaire en Syrien Les élus venus rencontrer Bachar al-Assad à Damas ont été ouvertement critiqués par le gouvernement et le PS qui envisage des sanctions.

INTERNATIONAL P.4François Hollande en visite d’Etat aux Philippines

n Le président mise sur une coopération avec l’archipel en vue du sommet mondial sur l’Ecologie qui se tien-dra à Paris.

ECO/CONSO P.6Lidl rejette le hard-discount n Présent pour la pre-mière fois au Salon de l’agriculture, l’entre-prise veut changer son image de marque.

Le plan énergétique de l’UE n Juncker a présenté sa stratégie pour l’éner-gie européenne.

CULTURE P.8La télé-réalité en couches-culottes

n Channel 4 filme des enfants de quatre ans dans une garderie.

EXPRESSO

Malgré les bruits de bottes en Europe de l’Est , le continent européen est divisé sur la question de sa sécurité. Malme-nés par la crise de l’endettement qui les pousse à couper leurs dépenses, beau-

coup de membres de l’OTAN sacri-fient leur défense. Seuls les pays limi-trophes de la Russie augmentent leur budget militaire, inquiets des menaces à leurs frontières. PAGE 5

Soldats lituaniens lors de l’exercice de l’OTAN «Noble Sword 14» à Oleszno en Pologne, le 10 septembre 2014. Michael Dalder/Reuters

QUOTIDIEN DU MASTER DE JOURNALISME DE L’ INSTITUT FRANÇAIS DE PRESSE - PROMO 2016# 08

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Au Salon de l’Agri-culture, la star c’est elle. « Mme la Pré-sidente ! Une pho-to, s’il vous plaît !

», crie une jeune, et les gardes du corps lui ouvrent aussitôt la voie. « Bien sûr ! », répond Marine le Pen, avec un sou-rire qu’elle ne quittera plus. À moins d’un mois des élections départementales, la présidente du Front National retrouve ses nombreux fans au salon, surtout parmi les visiteurs. L’accueil des agriculteurs, lui, n’est pas aussi chaleureux. Car si certains affichent très clairement leur joie, d’autres se montrent plus réservés. A chaque couloir, Marine Le Pen fait attention aux passants et es-saie d’arracher des sourires aux producteurs. A ses questions, certains ré-pondent avec d’une phrase à peine polie. Si le milieu rural se tourne de plus en plus vers son parti, de nombreux exposants réfutent ses critiques systéma-tiques de l’Union européenne : l’agriculture est en effet le premier poste européen des dé-penses et les aides de Bruxelles sont parfois cruciales.

En territoire conquis ?Accès refusé au stand des Bre-tons de Pie Noir : « La pêche aux voix, on n’aime pas ça », explique Luc Bernard. La nu-méro 1 du FN est en revanche la bienvenue chez les Suchaux, producteurs de comté. « Elle vient dans notre stand chaque année », explique Julien, 27 ans. « On blague, on parle, elle est très aimable ! », dit-il avant

de rajouter : « Cette fois-ci, je lui ai demandé si elle allait faire l’inauguration en 2018 en tant que Présidente ». Originaire du Doubs, il s’étonne : « Qui ne voit pas la percée de Le Pen ? Il faut être aveugle ! ». A quelques mètres de là, le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll passe, suivi de François Bayrou, le patron du Modem. Rares sont ceux à s’en apercevoir.

Mme Le Pen en territoire conquis ? Entre deux pavil-lons, quelques sifflets. Une productrice crie « à bas le FN ! », et quelqu’un s’exclame « Connasse ! ». Elle abaisse sa tête rapidement et maintient toujours son sourire, trans-mettant de l’autorité dans son costume noir. Son vrai sourire est vite rétabli lorsqu’un jeune entonne un « Vive Marine Le Pen ! ».

L’acceuil chaleureux des îlesDans le pavillon de l’Outre-Mer, l’accueil est moins critique. « Nos agriculteurs se tournent de plus en plus vers elle, puisque son principal projet pour l’île est basé sur la mer », explique Lynda Kichenassamy, vice-pré-sidente de la Chambre d’agri-culture de Guadeloupe. Selon elle, la présidente du FN a été une des personnalités les mieux accueillies par la foule.Entourée de sa cour et de ses fans, Marine Le Pen comptait rester jusqu’à 19 heures au sa-lon, soit dix heures d’affilées. François Hollande, lui n’avait tenu que 8 heures samedi, jour de l’inauguration du salon.

o Henrique Valadares

FRANCEFN Au Salon de l’Agriculture, la présidente compte sur le vote paysan

Le marathon pastoral de Marine Le Pen

Les chiens fous du Front Nationaln Lorsque l’on ratisse large, il ne faut pas s’étonner de ra-masser des mauvaises herbes. Marine Le Pen en fait les frais : ces derniers jours, les candidats aux élections départementales unis sous l’étiquette du Ras-semblement Bleu Marine ont collectionné les mauvais CV. Le plus récent? Celui de Jonathan Vivien, candidat dans le canton d’Arras-2, qui a notamment ex-hibé sur son Facebook une cari-cature représentant des musul-mans sodomisés par des porcs portant une cocarde tricolore.

Le FN n’assume pasDes chiens fous que les cadres du FN ont du mal à dresser. Et surtout à assumer. Jeudi matin, lorsque Patrick Cohen a égrainé la dizaine de sorties haineuses des candidats sur France Inter,

Florian Philippot, le vice pré-sident du Front, s’est trouvé en difficulté. Il s’agit d’un « infime pourcentage de turpitude lié à la nature humaine », a-t-il minimisé, avant de généraliser : « c’est comme ça dans tous les partis politiques. »Une candidate dans l’Ariège qui confesse détester les « sales gouines » lundi dernier ? Marine Le Pen se contente de dénoncer des propos « extrê-mement imprudents, maladroits ». Pour les autres fautifs, une « convocation devant une com-mission de discipline avant une éventuelle exclusion », déclare Nicolas Bay, le secrétaire géné-ral du parti. Quelques remon-trances de façade, mais pas de réelle punition. Manger à tous les râteliers est une stratégie risquée pour le

Front National. Certes le parti peut se targuer d’avoir récupéré quelques transfuges, comme Sébastien Chenu, ex-UMP, ou encore Céline Maillard, an-cienne socialiste qui a annoncé mardi venir grossir les rangs du FN aux départementales. Des alliances qui permettent au Rassemblement Bleu Marine de présenter 7648 candidats au total.Problème pour atteindre ce nombre, le FN a tissé des liai-sons dangereuses et contes-tables. Avec des membres de groupuscules d’extrême-droite, comme le Siel (pour « Souve-raineté, indépendance et liber-tés »). Des jeunes hyper-radi-caux au discours débridé, qui se laissent souvent emporter der-rière l’écran de leur ordinateur.

o Louis-Valentin Lopez

Opération communication réussie pour Marine Le Pen, ce matin au Salon de l’Agriculture. Henrique Valadares

Chantal Clamer, candidate FN dans l’Ariège, a pesté contre « les sales gouines » DR

02 - EXpREsso - jEudi 26 FEvRiER

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n Faut-il renouer le dialogue avec Bachar al-Assad au nom de la lutte contre l’Etat Isla-mique ? La question divise au-delà des clivages partisans. En té-moignent les reactions suscitées par la visite à Damas des quatre parlementaires français. La délégation comprenait les deux presidents des groupes d’amitié France-Syrie de l’Assemblée Nationale et du Sénat, Gerard Bapt (PS) et Jean-Pierre Vial (UMP). Jeudi, Francois Hol-lande a condamné l’initiative des parlementaires « qui n’ont été mandatés que par eux-mêmes avec un dictateur qui est à l’origine d’une des plus graves guerres civiles de ces dernières années ». Un peu plus tôt, le patron du PS Jean-Chris-tophe Cambadélis avait indiqué que Gérard Bapt serait « déféré devant la Haute autorité du Parti Socialiste».

Business ?A droite, les réactions sont moins virulentes. François Fil-lon a approuvé l’initiative des élus : «C’est dans la grande tra-dition parlementaire que d’aller là où il se passe des choses, et d’entendre des gens», a justifié l’ancien Premier ministre. Une position qui va à l’encontre de celle d’Alain Juppé, qui a toujours plaidé pour une ligne dure face au président syrien. En outre, des zones d’ombre planent autour de ce voyage. Sur Facebook, la présidence syrienne mentionne d’autres participants à la rencontre. Notamment Stephane Ravion et Patrick Barraquand, person-nages évoluant dans les milieux économiques et de la sécurité. Leur présence dans une délé-gation « diplomatique » éveille des soupçons d’affairisme avec le régime syrien, ravivant un peu plus la polémique.

o Lucas de Villepin

DIPLOMATIE Ils rencontrent Bachar al-AssadLe voyage des élus Français en Syrie fait débat

POLITIQUE Les institutions profitent de « l’esprit Charlie »

La popularité du gouvernement bondit de dix pointsn Les événements de début janvier 2015 ont un peu changé la façon dont les Français voient les institutions. Le centre de recherches politiques Cevipof a publié ce 26 février un sondage comparatif, en complément de ses résultats annuels de janvier 2015. L’institution présidentielle gagne 11 points de popularité, avec 40% des sondés lui donnant crédit. 23% de Français sont désormais confiants dans leur gouvernement, contre 33% au début de l’année.Le Premier ministre Manuel Valls incarne cette embellie, gagnant 12 points de popularité, contre 10 pour François Hollande. La gestion post-attentats du Président a notamment été citée par 39% des sondés comme cause de leur regain de confiance.

Les efforts de la Police saluésLa grande gagnante de l’esprit du 11 janvier est la démocratie, dont 39% de Français pensent aujourd’hui qu’elle « fonctionne bien », contre 27% début janvier.

La police, dont les agents ont été largement salués lors de la marche républicaine, fait un bond de 11 points dans le cœur des Français, pour atteindre

80% de popularité.Conséquence directe de la marche du 11 janvier, les Français sont désormais 35%, au lieu de 30%, à citer « manifester dans la

rue » comme le moyen le plus efficace pour « exercer le plus d’influence sur les décisions prises en France ».

o Liv Audigane

Cevipof, en association avec OpinionWay, a publié le 26 février 2015 son septième « Baromètre de la confiance politique » faisant suite aux attentats de janvier. Cevipof/OpinionWay

FRANCE

jEudi 26 FEvRiER- EXpREsso - 03

Un journaliste d’Al-Jazeera convoqué au tribunal

n L’un des trois journa-listes de la chaîne qatari, accusé d’avoir fait voler des drones au-dessus de Paris, sera convoqué au tribunal la semaine prochaine pour entendre sa condamnation. Jusqu’ici en garde à vue, les trois reporters ont été relâ-chés jeudi matin. Aucunes poursuites n’ont été enga-gées contre ses comparses. Les hommes se trouvaient dans le bois de Boulogne, dans le but de réaliser un reportage. « Aucun lien n’existe entre ces arresta-tions au Bois de Boulogne et les survols des nuits pré-cédentes », a annoncé mer-credi une source proche du dossier.

Le verdict du procès Bettencourt le 28 mai

n La décision dans l’affaire de l’héritière du groupe l’Oréal a été programmée

au 28 mai prochain, après cinq semaines de procès, 170 heures d’audience et 12 millions d’euros d’honoraires distribués. François-Marie Banier, notamment, saura s’il est condamné aux trois ans de prison ferme et 375 000€ d’amende qui ont été requis contre lui.

Les étudiants de Lyon 2 toujours en grève

n Depuis six mois, plusieurs dizaines d’étudiants et d’enseignants vacataires de l’université Lyon 2 se sont mis en arrêt de travail. Des salaires non versés et parfois l’inexistence d’un contrat de travail sont à l’origine de leur mécontentement. « Ca fait plusieurs années déjà qu’il y a des retards dans le paiement des salaires et l’établissement de contrat » déplore un étudiant vacataire. Les étudiants participeront à une journée d’action le 5 mars prochain.

EN bREF

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04- EXPRESSO - VENDREDI 26 FEVRIER

INTERNATIONALPLANETE Hollande en tournée en Asie avant le sommet mondial sur le climat

Opération éco-séduction à Manille

François Hollande est arrivé aujourd’hui aux Philippines pour une visite d’Etat de 48 heures destinée à

faire la preuve de ses convic-tions écologiques et à scel-ler une alliance avec un pays largement exposé aux catas-trophes naturelles. L’enjeu de ces deux jours dans l’archipel est crucial, dans la mesure où ce déplacement intervient à dix mois de la conférence mondiale sur le climat qui se déroulera à Paris. Avec 360 catastrophes naturelles essuyées depuis 1980, les Philippines consti-tuent un symbole en matière d’environnement. L’archipel de 100 millions d’habitants est régulièrement balayé par de violentes tempêtes, dont la fréquence continue d’augmen-ter. Le typhon Haiyan hante toujours les mémoires, avec un bilan de 7350 morts en novembre 2013.Ce n’est donc pas un hasard si François Hollande a choisi ce pays pour préparer le terrain avant la conférence mondiale sur le climat.

Défi écologiqueLe président français, qui fait de l’écologie une priorité de l’agenda politique 2015, est attendu au tournant. « Il doit prendre l’engagement d’en finir avec les énergies fossiles et nucléaire au profit de la transition vers les énergies renouvelables », a exhor-té Greenpeace jeudi. Pour cette première visite d’un

chef d’Etat français dans l’archipel depuis son indépen-dance en 1947, François Hol-lande sort l’attirail de séduction. A ses côtés, les deux actrices françaises Marion Cotillard et Mélanie Laurent, toutes deux engagées dans la protection de l’environnement. Ces deux ambassadrices du charme à la française ont lancé hier un « Appel de Manille » en

faveur d’un accord à Paris. François Hollande est hanté par le spectre de la Conférence de Copenhague de 2009 qui n’avait abouti à aucune avancée. Ce sommet, qui réunira 195 pays, représente un défi écologique à l’échelle mondiale. Le rele-ver nécessite de désamorcer les tensions Nord-Sud qui entravent les discussions. Dans cette perspective, les Philippines

représentent un interlocuteur privilégié aux yeux de Paris.

Menu économiqueMais le but de ce déplace-ment n’est pas uniquement de préparer le sommet sur le climat.François Hollande sou-haite également renforcer la politique asiatique de la France. Les relations économiques, avec la signature d’accords dans des domaines « verts », la lutte contre le terrorisme ou les différends maritimes en mer de Chine seront également au menu des échanges durant cette visite. Après les Philippines, le président se rendra au Vietnam, en Corée du Sud ou en Chine.

o Morane Aubert

n En opposant son véto à la construction de l’oléoduc Keystone XL, Barack Obama pourrait bien porter un coup d’arrêt définitif à un projet en-tamé il y a plus de six ans. Très impliqué dans la lutte contre le réchauffement climatique, le président américain confirme les doutes subsistants sur les conséquences écologiques d’un tel pipeline. L’oléoduc Keystone XL : un immense réseau de canalisations de près de 1 900 kilomètres reliant le Canada au Golfe du Mexique. A l’intérieur de ces conduits

circuleront chaque jour près de 830 000 barils de pétrole extraits des sables bitumeux de l’Alberta. La société Trans-Canada, qui porte le projet de construction depuis 2008, espère ainsi augmenter de 40% les capacités de transport de l’actuel oléoduc Keystone tout en réduisant son trajet de moitié.

Des conséquences inconnuesSi le projet doit favori-ser la création d’emplois et l’indépendance énergétique des Etats-Unis, ses conséquences sur l’environnement dérangent.

Les principaux contestataires pointent du doigt les risques de fuite du pipeline. Ils prennent pour exemple l’oléoduc déjà existant, qui a connu une douzaine de fuites dès sa première année d’exploitation. Le sujet est d’autant plus sen-sible que le tracé initial de Keystone XL devait traver-ser les réserves naturelles des Sand Hills dans le Nebraska. Cette zone abrite une faune et une flore protégées depuis plu-sieurs années. Peu après les première critiques, la société TransCanada a présenté un se-cond tracé, sensé être plus res-

pectueux de l’environnement, et évitant soigneusement la zone concernée.La polémique porte aussi sur l’origine du pétrole qui cir-culera dans l’oléoduc une fois construit. L’extraction de l’hydrocarbure des sables bitu-meux nécessite en effet un pro-cédé beaucoup plus énergivore et consommateur d’eau que celle d’hydrocarbures tradi-tionnels. Cette industrie génère 3 à 4,5 fois plus de gaz à effet de serre que la normal. De quoi freiner l’ambition des prochains entrepreneurs.

oPauline Forgue

Etats-Unis Le véto de Barack Obama relance les questions écologiques

L’impact incertain de l’oléoduc Keystone XL

L’arrivée de François Hollande à Manille, aux Philippines. AP

La reconquête des VertsFrançois de Rugy, co-pré-sident du groupe écologiste à l’Assemblée a salué jeudi le « verdissement » et « l’engagement de plus en plus fort » de François Hollande sur les thèmes écologiques. Se rapprocher des Verts, c’est l’autre grand enjeu de la conférence de Paris pour François Hollande. Le président, qui voudrait être le candidat de « toute la gauche » en 2017, soigne sa fibre écolo. Il entend faire du rendez-vous de Paris un succès en obte-nant de réelles avancées en matière d’engagements contre le dérèglement cli-matique.

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VENDREDI 26 FEVRIER EXPRESSO - 05

Un mort dans une attaque sur le palais présidentiel somalien

n Des tirs de mortier ont visé le palais présiden-tiel somalien de Mogadis-cio, faisant un mort dans la garde présidentielle. L’attaque n’a pas été re-vendiquée mais les soup-çons se tournent vers les insurgés islamistes shebab somaliens. Proches d’Al-Qaïda, ils ont récemment mené une série d’attaques contre les bâtiments offi-ciels dans le but de ren-verser le gouvernement. Depuis la mort du président autoritaire Siad Barre en 1991, le pays est plongé dans une guerre civile.

Début de désarmement dans l’Est ukrainien

n L’Ukraine a annoncé le début du retrait de ses armes lourdes dans l’Est séparatiste. Cela s’inscrit dans le cadre des accords de paix Minsk 2, signés le 12 février dernier en pré-sence de Vladimir Poutine et avec la médiation du pré-sident François Hollande et de la chancelière allemande Angela Merkel. Ce désar-mement aurait dû avoir lieu dimanche dernier mais Kiev a fait savoir qu’au-cun retrait d’arme n’inter-viendrait avant le respect total du cessez-le-feu.

La Corée du Sud abolitune loi punissant l’adultère

n La Cour constitution-nelle sud-coréenne a aboli jeudi une loi de 1953 rendant passible de prison l’infidélité entre époux. Par sept voix contre deux, les juges ont déclaré le texte anticonstitutionnel. Examiné par la Cour pour la cinquième fois, ce texte avait conduit 22 personnes en prison depuis 2008, selon le parquet coréen.

L’Etat islamique enlève 220 chrétiens en Syrie

n Selon l’Observatoire sy-rien des droits de l’homme (OSDH), au moins 220 chré-tiens assyriens ont été kid-nappés par l’Etat Islamique près d’Hassaka, dans le Nord-Est de la Syrie. Se-lon l’OSDH, qui tient ses informations de villageois rescapés, des femmes et des enfants se trouve-raient parmi les captifs.

EN BREFOTAN Malgré les menaces, l’Occident baisse ses dépenses

Budget militaire, l’alerten « La crise ukrainienne change la donne pour les Alliés », déclarait Anders Fogh Rasmussen, alors secrétaire général de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), en mars 2014. Cette inquiétude n’est pas partagée par tous les membres de l’organisation à en juger par une étude de l’European Lea-dership Network (ELN), un think-tank britannique. Selon leur travail qui porte sur 14 des membres de l’organisation, seule l’Estonie respecterait les engagements décidés au sommet de Newport, en septembre 2014. Lors de cette réunion, les Alliés avaient convenu de porter leur budget de défense à hauteur de 2% de leur richesse nationale. Or pour l’année 2015, loin de se plier aux décisions du som-

met de Newport, le Canada, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, la Hongrie et la Bul-garie vont diminuer leurs cré-dits. L’ELN s’inquiète plus particulièrement du budget des « trois gros », l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France, qui sont les plus gros contributeurs de l’OTAN.

Division entre Est et OuestSi la France a déclaré qu’elle sanctuariserait son budget de défense, l’ELN se montre sceptique sur sa capacité à maintenir ses efforts. Les situations britanniques et allemandes sont encore plus préoccupantes, l’Allemagne se trouve confrontée à des problèmes techniques et à un manque de personnel qualifié.A l’inverse, certains pays ont augmenté leur budget

militaire : la Norvège, la Let-tonie, la Pologne, les Pays-Bas et la Roumanie. Le mouvement est spectaculaire en Lituanie, qui a augmenté de 30% ses dépenses et rétabli son service militaire. Le décalage entre l’Ouest et l’Est de l’Europe semble très important, tous les bons élèves de l’OTAN se trouvant sur la frontière orientale. Les Pays-Bas, seule exception occidentale, ont di-rectement subi le contrecoup de la guerre en Ukraine, avec la mort de 193 ressortissants dans l’attaque du vol MH17. L’étude de l’ELN conclut que les per-ceptions très variables d’une menace militaire d’un bout à l’autre d’un continent en pleine crise de la dette rend difficile une coopération pourtant néces-saire à la sécurité de l’Europe.

o Olivier Bories

RUSSIE Le Kremlin accusé d’avoir organisé le conflit en Ukraine

Les plans secrets de Poutine n Et si Vladimir Poutine avait soigneusement prémédité les dramatiques événements qui secouent l’Ukraine depuis un an ? C’est ce que suppose le journal russe d’opposi-tion Novaïa Gazeta. Ce bihebdomadaire qui fut celui d’Anna Politkovskaia, oppo-sante au régime assassinée en 2006, s’est procuré un docu-ment qui tend à prouver que Moscou aurait écrit à l’avance le scénario de la crise ukrai-nienne.

Authentification du documentPoint par point, cette feuille de route évoque la chute du président Viktor Ianoukovitch, l’annexion de la Crimée mais aussi les soulèvements dans le Donbass.Ce document aurait été déli-vré au Kremlin le 12 février 2014, soit dix jours avant le renversement du président ukrainien, alors que le pays avait les yeux rivés sur la place Maidan, centre névralgique de la contestation en cours. Dmitry Muratov, rédacteur en chef de Novaïa Gazeta, soupçonne l’oligarque russe Konstan-tin Malofeïev, que l’Union européenne accuse de financer les séparatistes pro-russes, d’en être à l’origine.Simples coïncidences ou préméditation machiavélique ? On ne peut que constater

les similitudes entre ce scéna-rio et l’enchainement réel des événements. Alors que le Kremlin réfute ces informations, Nadeja Proussen-kova, journaliste de Novaïa Gazeta, explique: « ce n’est

pas un document officiel avec signature ou empreintes digi-tales des auteurs, mais il a été authentifié par des sources proches du pouvoir et très bienrenseignées ».

o Lila Haffaf

Vladimir Poutine, scénariste de la guerre en Ukraine. AFP

INTERNATIONAL

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06 - EXPRESSO - JEUDI 26 FEVRIER

ECO/CONSOEUROPE L’Europe n’a accordé que deux ans à la France pour revenir sous 3%

Sursis pour le déficit français

Revenir à un déficit inférieur à 3% du PIB en 2017, « tel est exactement l’objectif que le gouvernement

s’était fixé » a affirmé Michel Sapin, ministre des finances, quelques minutes après l’an-nonce de Bruxelles. La Com-mission Européenne vient d’accorder un nouveau sursis de deux ans à la France pour tenir ses promesses européennes.Pourtant, l’hexagone réclamait trois ans supplémentaires pour respecter le pacte de stabilité eu-ropéen. Le gouvernement cher-chait ainsi à éviter l’épée de Da-moclès bruxelloise, au moment clef de l’élection présidentielle. Il n’en sera rien.Depuis le début du quinquen-nat, François Hollande ne par-vient pas à satisfaire les exi-gences de la Commission. Un échec qui entame sa posture de chef de l’Etat. L’extrême droite en use pour alimenter l’euroscep-ticisme ambiant, alors qu’une partie de la gauche reproche au gouvernement d’être sous tutelle de l’Europe.

Des réformes à marche forcéeL’exécutif a essayé de réaffirmer sa souveraineté, en soutenant que le budget 2015 permettrait une réduction du déficit struc-turel de 0,5 point pour cette année. Mais le compte n’y est pas pour la Commission. La baisse du déficit ne sera que de 0,3 point.Insuffisant. La France est donc sommée de trouver la bagatelle de 4 milliards d’euros en trois mois.Il faut « intensifier les réformes de

la France en matière budgétaire et (…) structurelle » a insisté le vice-président de la commission européenne. C’est là tout l’enjeu pour la majorité affaiblie. Si le gouvernement a réitéré sa pro-messe de ne pas augmenter les impôts, il devra rogner ailleurs. « Dans tous les secteurs » à l’ex-ception de la défense a annoncé aujourd’hui Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement. La tâche reste périlleuse à l’ap-

proche des départementales, avec un FN en tête des inten-tions de vote. Alors que 21 mil-liards de baisse des dépenses publiques sont prévues cette année, l’exécutif est confronté à de nouvelles charges. Un milliard doit être déboursé pour renforcer la lutte contre le terrorisme et le service civique. S’y greffe le dérapage des opé-rations militaires extérieures, qui devraient coûter un milliard

d’euros au lieu des 450 millions prévus.Dernier déboire, la faible infla-tion (proche de 0% au lieu de 0,9% anticipé) réduit les recettes de la TVA. Parallèlement, le gouvernement doit jongler avec une croissance atone et un chômage toujours élevé, mal-gré la baisse surprise de janvier (-0,5%).Quoi qu’il arrive, la Commis-sion attend d’ici avril un plan détaillé des réformes que le gouvernement promet d’entre-prendre. Elle menace Paris d’une procédure de sanctions pour déséquilibre macroéco-nomique si l’objectif n’est pas atteint d’ici là. Manuel Valls a assuré au-jourd’hui qu‘il « n’y aura pas de difficulté majeure » à réduire le déficit dans les proportions demandées par la Commission.

o Solène Gripon

Le PS veut exclure les dépenses militairesdu déficit public Le 11 août 2014, le porte-parole du Parti socialiste Olivier Faure a estimé que l’Union Européenne était coupable d’un « double manquement ». D’une part, elle n’accompagne pas les engagements miltaires de la France à l’étranger, mais sur-tout, elle ne tient pas compte du poids des dépenses mili-taires faites par la France au nom de l’Europe. Le PS souhaite que ces dépenses soient sorties du calcul du déficit.

n « L’UE dépense chaque jour un milliard d’euros pour ses achats de combustibles fossiles (pétrole et gaz) » a affirmé à Bruxelles mercredi le commis-saire à l’Energie et au Climat, Miguel Arias Canete. C’est sous cette pression financière que la commission européenne a pré-senté une feuille de route pour réduire la facture énergétique du Vieux Continent et assurer le succès de la conférence mon-diale sur le climat qui se tiendra à la fin de l’année à Paris. Le plan bruxellois s’articule autour de trois points : la création d’une

Union de l’Energie, une commu-nication sur les échanges élec-triques et un point sur les négo-ciations climatiques.L’objectif de l’Union de l’Ener-gie est d’aboutir à l’indépen-dance énergétique de l’Union européenne. Chaque année, l’UE dépense environ 400 mil-liards d’euros en importation d’énergie, ce qui en fait le pre-mier importateur au monde (53% de sa consommation) et la met en situation de dépendance, accentuée par la situation géopo-litique en Europe de l’Est. Parmi les 300 milliards de m3 de gaz

importé annuellement par l’UE, plus d’un tiers est fourni par le géant gazier russe, Gazprom.

Réserve de stabilité de marchéLe plan Juncker de 315 milliards d’euros s’étale sur trois ans, une partie de cette manne sera déversée sur les infrastructures électriques, afin de favoriser les liaisons transfrontalières. Au risque de réveiller la grogne de certains pays, Bruxelles demande aux Etats membres d’exporter au moins 10% de leur production électrique à l’horizon 2020 et prône une accentuation

de la régulation européenne dans le secteur. Enfin, les députés de la commission ont trouvé un compromis sur la réforme du marché du carbone : la création d’une « réserve de stabilité de marché » pour décembre 2018. Ce nouveau mécanisme per-mettrait de réguler le marché en retirant des quotas d’émission de CO2 en période de récession, et à l’inverse en redistribuant en période de croissance. Une première discussion est prévue avec les ministres européens de l’Environnement le 6 mars.

o Marine Henriot

François Hollande et Manuel Valls, le 18 février. AFP

CLIMAT Jean-Claude Juncker a défini la stratégie énergétique européenne Un plan bruxellois pour réduire la facture d’énergie

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JEUDI 26 FEVRIER- EXPRESSO - 07

ECO/CONSO

Subventions faramineuses des compagnies du Golfe

n American Airlines, Delta et United accusent leurs ri-vales Etihad, Qatar Airways et Emirates de concurrence déloyale. Ces compagnies na-tionales publiques des pays du Golfe auraient reçu plus de 42 milliards de dollars en 10 ans de façon abusive. Selon l’enquête menée par les com-pagnies américaines, ces sub-ventions prennent la forme deprêts sans intérêts, d’avances des actionnaires ou de fourni-tures non facturées. Les Big Three qui craignent pour leur survie réclament la vérité sur ces financements.

Paris, première destination mondiale d’Airbnb

n Avec plus de 40 000 loge-ments la capitale est deve-nue le premier marché de la plateforme d’hébergement chez l’habitant Airbnb, née à San Francisco en 2008. Pour saluer l’attractivité de la ville, le premier adjoint à la Mairie de Paris Bruno Julliard, reçoitaujourd’hui Brian Chesky, co-fondateur d’Airbnb.

Davantage de services publics à La Poste ?

n La Poste a annoncé mercre-di 25 février étudier la possi-bilité de transformer certains bureaux de poste en « mai-sons de services au public » et de les ouvrir à des opérateurs et à des collectivités (EDF, Pôle Emploi…), à la suite d’un rapport remis en janvier par le député socialiste du Lot Jean Launay. L’objectif est avant tout de renforcer le rôle de LaPoste dans les zones rurales.

Facebook City

n Le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg prévoit de construire une ville baptisée « Zee Town » destinée à ac-cueillir ses 10 000 employés à deux pas du siège situé dans la baie de San Francisco. Un projet à 200 milliards de dol-lars qui serait piloté par l’ar-chitecte de la fondation Louis Vuitton, Frank Gehry.

EN BREFFRANCE Le hard-discount mise sur ses produits régionaux

Lidl veut redorer son imagen Quand Lidl, hard-discounter alimentaire, s’affiche au Salon de l’agriculture, l’enseigne ne fait pas les choses à moitié. Un stand de 250 mètres carrés, surmonté d’un panneau géant « Lidl, am-bassadeur du made in France », où différents étals mettent en valeur les produits régionaux. L’ambition est à la hauteur de l’enjeu pour la chaîne. Michel Biero, gérant de Lidl France, l’explique : « Pour nous, le Salon de l’agriculture, c’est la plus grande vitrine de France. Quand on dit « Lidl », on pense tout de suite à une entreprise de hard discount, à une entre-prise allemande. Mais on est une entreprise française, et on vend 70% de produits français » argue-t-il, omettant malgré tout de préciser que le groupe est dé-tenu par un unique actionnaire, la famille Schwarz, d’origine germanique.S’il cherche désespérément à changer l’image de marque de l’entreprise, Michel Biero ne compte pas augmenter les prix. Quelles pressions sur les producteurs ? S’approchant de Philippe Humbert, représentant d’un fabricant de saucisson sec (la PME Salaisons du Mâcon-nais), il affirme « je ne lui mets pas le pistolet sur la tempe. Ça fait six ans que je travaille avec lui, s’il n’était pas content, il serait parti. Nos contrats sont négociés chaque année. De plus, nous imposons que l’on ne représente pas plus de 25% des ventes du producteur. »

Des temps difficiles Un peu à l’écart, le représentant, Philippe Humbert, nuance ce discours. « Vous savez, ça fait quatre ans que la période est vrai-

ment difficile. Depuis septembre, ça l’est encore plus. Avant il y avait huit distributeurs, mainte-nant quatre qui contrôlent 90% du marché. Quand je travaille avec Leclerc par exemple, les contrats sont renouvelés tacite-ment chaque année. Avec Lidl, on renégocie à chaque fois. » Michel Biero s’en défend : se-lon lui, c’est le consommateur qui veut des bas prix. Il refuse néanmoins de communiquer les chiffres de rentabilité de la firme. Il annonce 3 000 recru-tements dans les prochaines années, mais pas d’augmenta-tions salariales, ce dont s’agace la CGT. Interrogée sur le succès de l’opération de communication,

une passante raconte : « Vous savez, moi j’y vais souvent chez Lidl. Ce qu’ils nous font goûter ici, c’est vrai que c’est bon. Mais jusqu’à présent, ce que j’achète dans les magasins, c’est moins bon qu’ici. » Alors qu’un employé arrive pour distribuer des sacs aux couleurs d’une des régions fran-çaises et estampillés « Lidl », provoquant une belle bouscu-lade parmi les badauds, Michel Biero voit à long terme : « C’est vrai que pour l’instant, nous ne sommes pas leader. Mais qui sait, peut-être dans six ou dix ans ! » Mais, pour l’instant, pas de quoi bouleverser les grands groupes distributeurs.

o Marc Taubert

Lidl a un stand de 250 m2 au Salon de l’agriculture. Marc Taubert

FISCALITE Le groupe aurait échappé à 1 milliard d’euros d’impôts

McDonald’s accusé d’optimisation fiscalen Nouveau coup dur pour McDonald’s. Alors que les scan-dales liés à la malbouffe pul-lulent, le géant de la restauration rapide est accusé d’avoir fait perdre plus d’un milliard d’eu-ros de recettes fiscales aux Etats européens entre 2009 et 2013 grâce à un schéma d’optimisa-tion fiscale. Dans un communi-qué commun intitulé « Unhappy meal » et publié mercredi, trois fédérations syndicales euro-péennes et américaines accusent McDonald’s d’avoir « délibéré-

ment diminué son exposition fis-cale en Europe pour un montant total de plus d’un milliard d’euros sur une période de cinq ans. »

Le fisc français voit rougeLes trois organisations syndicales ont calculé que la plus grande so-ciété de fast food en Europe a fait remonter plus de 3,7 milliards d’euros de ses restaurants euro-péens vers sa holding luxem-bourgeoise McD Europe Fran-chising. McDonald’s a alors versé 16 millions d’euros d’impôts

au Grand duché entre 2009 et 2013, alors que le groupe au-rait dû acquitter 1,05 milliard d’euros supplémentaires si ces revenus avaient été imposés dans leurs pays d’origine. C’est la France qui a le plus souf-fert de cette optimisation. Les syndicats évaluent la perte de recettes du fisc français entre 386,2 et 713,6 millions d’euros, auxquels pourraient s’ajouter entre 308,9 et 570,9 millions d’euros de pénalités.

o Amandine Réaux

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06 - EXPRESSO - JEUDI 26 FEVRIER

CULTURE

n Des tonnes de gravas. C’est tout ce qu’il reste de la collec-tion archéologique du musée irakien de Ninive situé à Mos-soul. Cet après-midi, des sta-tues âgées de plus de 3000 ans ont été saccagées par des com-battants de l’Etat Islamique. Une vidéo de propagande pu-bliée sur Twitter montre une dizaine d’hommes fracassant à la main ou au marteau ces ves-tiges de l’empire assyrien. L’un d’entre eux explique avoir été « ordonné par le prophète de détruire les marques de l’idô-latrie ». Ces événements sur-viennent quelques jours après l’autodafé géant de Mossoul.

Terreur sur les artsDimanche dernier, la biblio-thèque municipale et ses 8000 livres rares sont partis en fumée. Le lieu abritait des manuscrits du XVIIIe siècle et des journaux irakiens du début du XXe. La ville est contrô-

lée par les hommes de Daech depuis le mois de juin dernier. Les djihadistes y font régner la « loi islamique ». La culture est alors considérée comme une déviance de l’islam.A des milliers de kilomètres de l’Irak,

l’Etat Islamique en Libye sème aussi la terreur sur les arts. Le 18 février dernier, saxophones, tambours et batteries ont été saisis auprès de villageois et brûlés par des djihadistes. o Pauline Renoir

MEDIAS Un programme de téléréalité filme des enfants de quatre ans

Vedettes en couches-culottesn « Tu n’es pas le père ! Je ne t’aime plus ! Je te déteste maintenant ! A plus tard ! ». Elle raccroche le combiné et retourne vaquer à ses activités : dînette, poupée et perles. Car cette phrase, digne d’un film à l’eau de rose, ne provient pas d’une actrice clichée quittant son petit-ami, mais de la bouche d’une enfant de quatre ans, dans le dernier programme de télé-réalité de Channel 4. Diffusé au mois de février, The Secret Life of Four Year Olds montre aux téléspectateurs la matinée de dix enfants de quatre ans, qui ne se connaissent pas, dans une garderie. Surveillés par deux éducateurs, les faits et gestes des bambins sont rapportés par des caméras automatiques, trois caméras, un cameraman et les micros dont on les a équipés. « Tu n’es qu’une petite souris avec un toilette violet ! », ou « je vais dire à mon chat de te griffer ! » Le téléspectateur assiste amu-sé à une conversation sur le nombre de toilettes de Jessica et Skyla chez elles, ou à la quête du petit Lucas cherchant un meilleur ami. Comme pour Chaim et Christian qui s’af-frontent pour devenir le leader, les interactions entre les enfants

ne sont pas aussi éloignées des préoccupations des adultes.

Un programme d’étude comme de divertissementCar ce programme n’est pas uniquement de la télé-réalité. Selon la chaîne britannique, il permettrait au contraire de mieux comprendre les enfants, leurs besoins et leur évolution au sein d’un groupe d’indivi-

dus du même âge. Le docteur Paul Howard-Jones, un des spé-cialistes du développement de l’enfant qui a supervisé le projet explique : « Mon rôle avec Sam (Sam Wass, psychologue) était d’observer les enfants et d’ap-porter un regard scientifique sur leurs interactions et les conséquences qui en découlent ». La chaîne britannique Chan-nel 4 est connue pour ses pro-

grammes de télé-réalité assez particuliers. En janvier, son programme Benefits Street (“La rue des allocations familiales en fran-çais) a filmé la vie d’un quartier où de nombreux habitants sans emploi sont aidés par l’Etat providence. En avril dernier, le programme Gogglebox filmait, lui, des gens devant leur poste de télévision. o Natacha Delmotte

The Secret Life of Four Years Old, la télé-réalité investit la garderie. Channel 4

Le précurseur Kid NationEn 2008, le programme de télé-réalité américain Kid Nation diffusé sur la chaîne CBS avait fait polémique. Le concept était autrement pire : quarante enfants âgés de 8 à 15 ans étaient livrés à eux-mêmes. L’objectif était de créer une société fonc-tionnelle, avec un gouverne-ment dans une ville fantôme du Nouveau-Mexique. Et cela, avec le minimum d’aide des adultes. Le pro-gramme avait été critiqué notamment à cause des accidents mais aussi des heures de travail de chaque enfant.

PATRIMOINE Daech met en pièce l’art oriental

L’Etat Islamique en guerre contre la culture

À l’est de la Libye, des djihadistes brulent des instruments de musique France Musique

n La dernière chanson des « Enfoirés », diffusée le 25 février, a été plutôt mal reçue par le public, et particulière-ment par la jeunesse. Intitulée Toute la vie, la chanson s’orga-nise comme un dialogue entre les “vieux”, les enfoirés, et les “jeunes”. « Vous aviez tout, paix, libertés, plein emploi. Nous c’est chômage, violence, sida» leur disent les jeunes.Ré-ponse :« on s’est battu, on n’a rien volé». Entre les reproches inter-générationelle, la chanson se ponctue par le refrain où on rappelle que les jeunes ont « toute la vie » et donc, pas be-soin de se plaindre. La chanson, mal accueillie, repose sur des clichés, pointés du doigt sur les réseaux sociaux. Les « Enfoirés », plutôt que de faire passer un message de solidarité, montrent au contraire une méconnais-sance de la jeunesse. o N.D

Les «Enfoirés», ces biens nommés

MUSIQUE

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SPORTFOOTBALL En Ukraine, le championnat survit malgrès les combats

Balles perduesLe trou est impres-

sionnant et l’en-ceinte quelque peu défigurée. Octobre 2014, la façade est

de la Donbass Arena, en plein cœur du fief pro-russe de Do-netsk, est touchée par un tir d’obus. Le magnifique stade à l’allure de soucoupe volante est sérieusement endommagé, une partie de sa paroi vitrée gît en mille moceaux au sol. Inau-guré en 2009 après des travaux de plus de 350 millions d’eu-ros, la Donbass Arena (52 000 spectateurs) est l’antre du Cha-khtar Donetsk, l’un des plus grands clubs du pays. Quelques mois plus tôt, en août, c’est le centre d’entraînement dernier cri de l’équipe qui a été touché par un tir d’obus. L’image est parlante. Elle reflète l’état du football ukrainien après un an de conflit : sévèrement touché mais toujours debout. Alors que la guerre se poursuit à l’est du pays, le championnat pro-fessionnel continue comme si de rien était. Ou presque.

Les délocalisations Ce soir, en Ligue Europa, Guin-gamp se déplace à Kiev – à 600 kilomètres de la ligne de front - pour y affronter le Dynamo,

légendaire club ukrainien et leader actuel du championnat. Un exercice 2014/2015 bou-leversé. Deux clubs de Cri-mée ont été éliminés après le rattachement de la péninsule à la Russie au printemps der-nier. Cinq autres se sont délo-calisés : le Zorya Louhansk, le Illichivets Marioupol et les trois clubs de Donetsk, dont le Chakhtar, neuf fois champion d’Ukraine. Désormais le club des mineurs doit partager son temps entreKiev, où il s’entraine, et Lviv, à 1 200 kilomètres de ses terres, où il joue ses matchs de gala « à domicile ».

...Avant les tentatives de défec-tions« Parfois, on joue après avoir vu aux infos qu’un bus a pris feu et que des personnes ont été tuées. Ça nous influence même si on tente de le cacher. On essaye de rester profes-sionnel mais c’est impossible de ne pas y penser », confie au Guardian Andrei Pyatov, gar-dien de but du Chakhtar et de l’équipe nationale d’Ukraine. Aujourd’hui, le club se réjouit d’être au complet. En juillet dernier, alors que le vol MH17 de la Malaysia Airlines est

abattu en plein vol au dessus de l’est du pays, six joueurs sud-américains de l’équipe, dont la star brésilienne Douglas Costa, profitent d’un match amical à Annecy face à Lyon pour se faire la malle, « apeurés » et menaçant de ne pas rentrer à Donetsk. Finalement, le club

choisit l’exil et les joueurs rejoignent leurs coéquipiers à temps pour le coup d’envoi de la saison. Une saison pour l’heure dominée par le Dy-namo Kiev, après cinq ans de règne sans partage du Chak-thar. o Thomas Porlon

A cause des combats dans l’est, le club du Chakhtar Donetsk joue à Lviv, à 1200 kilométres de ses terres. AFP

DOCUMENTAIRE L’histoire de la Red Army, l’équipe de hockey soviétique

Quand la guerre froide s’invitait dans les patinoiresn « Le hockey, c’était plus qu’un sport, c’était de la poli-tique, de la propagande ». Cette affirmation de Viaches-lav Fetisov, ancien capitaine de l’Armée rouge, résume à elle seule l’importance que revêtait la discipline dans l’ancien bloc de l’est. L’ex-hockeyeur est au centre du documentaire Red Army, qui retrace les gloires et déboires de l’Armée rouge , l’équipe soviétique de hockey sur glace, terreur des patinoires dans les années 1980. Le mon-tage du film n’a cependant pas été une sinécure pour Gabe Polsky, qui a dû composer avec le caractère peu loquace de l’an-cien joueur, reconverti depuis en ministre des Sports de Vla-dimir Poutine avant de siéger à la Douma. La guerre froide semble en effet avoir condition-né « Slava » Fetisov, qui ignore copieusement le cinéaste lors de la séquence d’ouverture. Le dialogue parvient tout de même

à s’installer peu à peu entre les deux hommes, et vient étayer le récit des exploits de l’équipe soviétique, à grand renfort d’images d’archives, pas tou-jours d’excellente facture mais souvent inédites. Le documentaire, primé aux Emmy Awards, est habile-ment soutenu par une narra-tion chronologique certes peu originale mais efficace, le tout enrobé de musiques tradition-

nelles et d’inserts empruntés au constructivisme russe.

«La preuve que notre mode de vie est le bon»L’histoire d’hommes triés sur le volet puis montés en épingle au sein de la sélection soviétique, véritable porte-étendard de l’idéologie socialiste.« Ce titre, c’est la preuve que notre mode de vie est le bon », s’enthousiasme ainsi l’un des protagonistes après la vic-toire de son équipe aux JO de Sarajevo 1984. Un exemple de réussite du parangon sovié-tique à l’heure du crépuscule de la guerre froide, où les valeurs prônées par le régime commu-niste tel le travail collectif et l’ascétisme stakhanoviste sont exaltées. Des valeurs certes mises au service d’une poli-tique, mais qui prennent aussi le contrepied des dérives du sport business. o William Zinck

Franck Ribéry futur allemand ?

n Le milieu français du Bayern Munich, Franck Ribé-ry, qui vit en Bavière depuis près de huit ans, affirme qu’il songe à prendre la nationalité allemande dans un entre-tien au quotidien Bild jeudi. « Pourquoi pas ? Je peux m’imaginer rester à Munich après la fin de ma carrière » a t-il confié au journal. Première victoire afghane en cricket

n Des centaines d’Afghans sont descendus dans la rue dans plusieurs villes du pays pour fêter la victoire de leur équipe nationale en Coupe du monde de cricket jeudi face à l’Ecosse. Un premier succès dans cette compétition à la-quelle elle n’avait jamais par-ticipé. Les joueurs afghans ont aussi eu le droit aux féli-citations du président Ashraf Ghani via communiqué.

EN BREF

Les hockeyeurs de la Red Army. DR

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EXPRESSO26 02 2015 # 08

Le rabbin de la rue CopernicPORTRAIT Jonas Jacquelin contribue chaque jour au dialogue inter-culturel

24 rue Copernic, 16e arron-d i s s e m e n t de Paris. La massive porte

d’entrée couleur bleu nuit, rap-pelle qu’ici, en 1984, a eu lieu un attentat antisémite faisant quatre morts et vingt blessés. Désormais, pour entrer dans le bâtiment gardé par des mili-taires, il faut montrer patte blanche, décliner son identité et la raison de sa venue devant l’interphone et la caméra de sécurité. Aujourd’hui, deux rabbins sont à la tête de la syna-gogue de l’Ulif-Copernic, dont le jeune Jonas Jacquelin. Une barbe de quelques jours habille son visage, une kippa est posée sur le dessus de sa tête. Il n’a pas la mémoire de Copernic, et pour cause, 1984 est l’année de sa naissance.

Une atmosphère dégradéeCependant, il a suffisamment de vécu pour comprendre que l’attaque de l’Hyper Casher de janvier dernier n’est pas un acte isolé. Il se souvient avoir ressen-ti un changement d’atmosphère, il y a environ quinze ans, alors qu’il était encore adolescent. « Depuis tout s’est aggravé : le meurtre d’Ilan Halimi, ceux de Mohamed Merah à Toulouse, l’attentat au musée juif de Bruxelles, etc. Il y a un climat d’attaques et d’actes antisé-mites », déplore t-il. La place de Jonas Jacquelin, au plus près des fidèles, lui per-

met de ressentir les attentes, les peurs de la communauté juive de l’Ulif. « Il y a ce sentiment que nous ne sommes pas com-pris, pas entendus, que nous sommes isolés par nos conci-toyens mais également que les événements sont minimisés par

les médias. » Fallait-il pour autant, comme le président du Crif, Roger Cukierman, mettre en cause les musulmans dans la montée des violences ? Le rab-bin marque sa désapprobation mais sans en rajouter. Pour lui, la question du dialogue

interreligieux est redevenue centrale. Mais il insiste : « Nous menons un travail de communi-cation continue même si celui-ci ne se fait pas toujours publique-ment. » Selon Jonas Jacquelin, les rencontres publiques sont plus stériles et figent de manière artificielle les positions des uns et des autres.

« Les religions font partie du patrimoine de l’humanité » Pour réduire les tensions entre les différentes communautés re-ligieuses, la place de l’école lui paraît cruciale. « Enseigner les différentes religions à l’école est un premier pas pour amélio-rer le dialogue inter-conffesion-nel. Les religions font partie de l’Histoire, du patrimoine de l’humanité. C’est simplement une question d’éducation ci-vique. » Pragmatique, le responsable re-ligieux reste tout de même pru-dent et insiste sur l’importance du travail sur le long terme. « Ce n’est pas non plus une solu-tion magique contre les vio-lences. C’est un premier pas, un premier échelon d’une réponse plus globale. » Dans la foulée des attentats de l’Hyper Casher, le Premier ministre Manuel Valls a rappelé que la place des Français juifs, c’est la France. « Ses paroles sont fortes », reconnaît-il. Mais comme le reste de la commu-nauté, il attend maintenant des actes.

o Maureen Suignard

Jonas Jacquelin, rabbin à la synagogue de l’Ulif-Copernic, première synagogue libérale française. Tobias Barniske

EXPRESSO INSOLITEMadonna chute sur scènen Les Brit Awards 2015 auront fait le buzz. Madonna a été la star de la soirée, non pas par sa prestation mais par sa chute spectaculaire durant la cérémonie. Alors qu’elle interprétait son nouveau tube, Li-ving for Love, la chanteuse a voulu ôter sa longue traine alors qu’elle était juchée sur un petit escalier disposé sur la scène. Mais celle-ci ne s’est pas détachée et a fait tomber Madonna en arrière. Après quelques secondes de silence, la star s’est relevée pour terminer son show. « Je vais bien », a-t-elle affirmé plus tard sur Instagram. La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux et les internautes n’ont pas hésité à rappeler que l’âge de Madon-na, 56 ans, pouvait être un obstacle à sa carrière.

Un style capillaire très swagn Kim Jong-Un s’est livré à une coquet-terie insoupçonnée lors d’une récente conférence de presse. Le dirigeant de la Corée du Nord est en effet apparu avec une toute n o u v e l l e coupe de cheveux du plus bel effet. Ti-rés en arrière et rasés sur les côtés, ses cheveux très bombés et tout en hauteur ne sont pas sans rappeler ceux d’Action Man. La nouvelle coupe du dictateur n’a pas tardé à déclencher le buzz sur le net, avec de nombreux photomontages.

Le cannabis n’a pas de religionn Du cannabis casher, c’est possible. C’est en substance ce qu’a indiqué le rab-bin Moshe Elefant, président de l’Agence de certification casher de l’Union ortho-doxe. Le rabbin vient d’engager des « discussions préliminaires » avec des organismes désireux d’obtenir le label casher pour l’usage médical du canna-bis. La consommation de cannabis à vi-sées médicinales est déjà autorisée dans la moitié des Etats américains. « L’Union orthodoxe n’aurait aucun problème à cer-tifier le caractère casher de la marijuana médicale », a expliqué le rabbin. L’entité orthodoxe aurait en effet reconnu les bienfaits du cannabis médical. Une subs-tance déjà certifiée casher en Israël, qui recense des milliers de consommateurs.

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