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Othman GAGA
Gaga.othman@gmail.com
La théorie financière : un survol
théorique
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Avertissement:
Le présent document est un passage du mémoire : « la Théorie
financière : entre cœur et périphérie – une approche par la
régression quantile » qui a été soutenu en vue de l’obtention du
Master de recherche en Finance Appliquée délivré par l’Université
Cadi Ayyad de Marrakech. En cela, la diffusion de ce document se fait
dans le respect du droit d’auteur. L’utilisation totale ou partielle dudocument à des fins pédagogiques et non commerciales est admise à
condition de citer l’auteur.
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Tables des matières :
Introduction : ........................................................................................................................................... 1
Chapitre 1 : Les agents économiques en théorie financière : l’homo-economicus face aux biais
psychologiques. ................................................................................................................................... 4
1. La théorie de la finance moderne : le paradigme ................................................................... 4
a) Les hypothèses de l’efficience des marchés : ...................................................................... 4
b) De l’analyse moyenne-variance au modèle d’équilibre des actifs financiers : ................... 7
(i) L’analyse moyenne-variance : ......................................................................................... 7
(ii) Le modèle d’équilibre des actifs financiers : ............................................................... 9
c) Le modèle d’évaluation par arbitrage : ............................................................................. 12
2. La finance comportementale : l’antithèse. ........................................................................... 14
a) la limite à l’arbitrage : ........................................................................................................ 14
b) Biais Psychologiques : ........................................................................................................ 17
(i) Formation des jugements : ............................................................................................ 18
(ii) Préférences et anticipations : .................................................................................... 20
Chapitre 2 : Implications de l’hétérogénéité des anticipations sur la formation des prix. ........... 24
1. Hétérogénéité des anticipations : ......................................................................................... 24
a) Asymétrie d’information et formation des comportements : .......................................... 24
(i) L’HEM : une redéfinition. .............................................................................................. 24
(ii) le Herding dans les marchés financiers : une approche rationaliste. ....................... 26
(1) Cascade informationnelle : .................................................................................... 26
(2) Le herding basé sur la compensation : .................................................................. 29
b) L’hétérogénéité des anticipations liée à l’irrationalité :.................................................... 30
(i) La théorie du feedback : ................................................................................................ 30
(ii) Le marché en situation de sous-réaction et de sur-réaction : .................................. 32
2. La riposte de l’HEM : entre modèle multifactoriel et suspicion méthodologique. ............... 35
a) Le modèle de Fama-French : ............................................................................................. 35
(i) Genèse et présentation du modèle : ............................................................................. 35
(ii) Interprétation des facteurs de risque et limites du modèle : ................................... 37
b) Suspicions méthodologiques : quand les anomalies deviennent artéfacts. ..................... 40
Bibliographie.......................................................................................................................................... 44
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Liste des figures :
Figure 1 Choix du portefeuille efficient qui maximise la fonction d'utilité ...................................... 7
Figure 2 Transformation de la frontière efficiente en présence de l'actif sans risque..................... 8
Figure 3 La droite CML et la droite SML ............................................................................................ 10
Figure 4 Schéma Méthodologique des tests empiriques de l'HEM .................................................. 12
Figure 5 Pondération des probabilités et la fonction de valeur....................................................... 21
Figure 6 Situation de sous-réaction suite à une nouvelle information ........................................... 33
Figure 7 Situation de sur-réaction de la part des marchés............................................................... 34
Figure 8 Schéma méthodologique des tests des anomalies ............................................................. 42
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1
Introduction :
Plus que toute autre discipline économique, l’économie financière est, probablement, celle
qui noue la relation la plus forte avec les agents économiques, dans la personne des
investisseurs, d’une part et les institutions, régissant les marchés financiers, d’autre part. En
effet, la théorie financière fournit, aux premiers, les directives en matières d’investissement
tandis qu’elle offre, aux secondes, les principales orientations en vue d’établir des politiques
ad hoc. L’implication majeure de cette relation r éside dans le rapprochement entre la théorie
et la réalité. En cela, l’analyse économico-financière, aussi normative soit-elle, n’a de valeur
que si elle est validée empiriquement par les données. La théorie financière la plus imposante
est celle de l’efficience des marchés (Fama, 1965 ; Samuelson, 1965). Celle-ci peut être
perçue comme étant une application de la pensée néoclassique aux marchés financiers. Sur
cette base repose les principaux modèles, dits rationnels, d’évaluation des actifs financiers tels
que le modèle d’équilibre des actifs financiers (Sharpe, 1965, Lintner, 1965) et le modèle
d’évaluation par arbitrage (Ross, 1976). L’ensemble de ces travaux constitue un corpus plus
connu sous le nom de la théorie de la finance moderne(ci-après TFM). Cette dernière
constitue la cœur de la théorie financière.
La TFM est une approche normative, s’inscrivant dans la tradition de l’école néoclassique, qui
consiste à privilégier l’analyse des marchés en situation d’équilibre. En cela, l’explication et
la modélisation des répercussions des interactions des différents agents économiques, opérant
dans des marchés complexes, se trouvent sacrifiées sous l’autel de l’homogénéisation des
anticipations. le but étant de faire prévaloir l’analyse du marché. Cette conception des
marchés financiers a permis plusieurs avancées aussi bien sur le plan théorique que sur le plan
pratique. En effet, le risque est devenu mesurable avec les travaux de Markowitz (1952,
1958). La valeur d’équilibre des actifs est devenu calculable1. Plus encore, la relation entre
rentabilité et risque est devenue tangible.
Cela étant dit, les récents développements qu’ont connus les marchés financiers, tels que le
renforcement de la liquidité, l’élargissement des produits financiers (produits dérivés, marché
de change…) et, surtout, la fréquence alarmante des crises financières, ont mis à mal la place
occupée par la TFM. En effet, entre crises boursières et rentabilités anormales, les
1Modèles cités ci-haut.
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prescriptions de la TFM ne semblent plus trouver un écho dans la réalité. Cet état de fait a
induit une tollé de critiques, principalement en dehors du cercle académique, concluant, à tort
ou à raison, la défaillance de la théorie financière.
D’un autre côté, maints travaux ont pris comme point de départ le relâchement de certaines
hypothèses de la TFM afin d’étudier le comportement des marchés. Ces travaux portent
notamment sur le manque de rationalité des investisseurs et l’asymétrie de l’information.
Citons à titre d’exemple la théorie de la finance comportementale qui est considérée comme
étant le principal rival de la TFM. Contrairement à cette dernière, ces travaux constituent la
périphérie de la théorie financière. L’objectif de la périphérie réside dans l’explication des
sous- problèmes. En d’autres termes, le but est d’expliquer certaines situations et événements
isolés en s’appuyant sur l’interaction des agents. En effet, la principale conclusion de ces
travaux est que l’absence d’une des hypothèses de la TFM conduit probablement à des
anticipations hétérogènes et par voie de conséquence à un déséquilibre quasi-structurel des
marchés.
Par ailleurs, la méthodologie adoptée par la périphérie est positive. Ce choix méthodologique
empêche toute extrapolation à une généralisation des prescriptions de la périphérie à
l’ensemble du marché. De surcroît, le lien entre la périphérie et la réalité est très dur à établir.
En effet, les théories périphériques expliquent les phénomènes financiers de façon isolée, et
ainsi les détecter à travers les données disponibles est une tâche ardue.
Alors, pourquoi parle-t-on encore de la périphérie ? l’une des principales raisons est que celle-
ci explique certains aspects qui ont été longtemps éludé par la TFM. D’une autre part, les
difficultés éprouvées par cette dernière constitue le fer de lance de la périphérie. Par
difficultés, nous entendons la présence notoire des anomalies (i.e. rentabilités anormales qui
ne sont pas justifiées par le risque) et certaines crises telles que les bulles spéculatives . En
effet, ces phénomènes ne trouvent pratiquement aucune justification tangible de la part du
cœur de la théorie financière. Certaines explications telles que le modèle multifactoriel de
Fama-French (Fama et French, 1993), partant d’une logique inductive, attribuent la présence
des anomalies comme étant des facteurs de risque. Cela dit, cette proposition a causé un débat
houleux aussi bien de la part du cœur que de la périphérie.
Cependant, il convient de noter que les explications de ces phénomènes, provenant de la
périphérie, demeurent purement hypothétiques en raison de l’absence de lien tangible entre les
volets théoriques et empiriques de la périphérie. C’est d’ailleurs pour cette raison que le
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présent document n’analysera que très brièvement les travaux liés aux anomalies, et ce
principalement pour deux raisons. La première est due à une large documentation concernant
ces phénomènes. La seconde est due au fait que ces phénomènes ne peuvent être liés ni au
renforcement de la périphérie ni à la défaillance du cœur de la théorie financière.
En fait, ce modeste travail se propose de privilégier un débat théorique mettant en relief les
principales conclusions du cœur et de la périphérie en mettant l’accent sur la dynamique
pouvant exister entre les agents. Le but étant de dresser, en premier lieu, un état des lieux des
principaux résultats de la périphérie. En second lieu, le présent mémoire présentera les
difficultés empiriques des théories périphériques ainsi que les critiques adressées à ces
théories de la part des tenants de la TFM.
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Chapitre 1 : Les agents économiques en théorie financière : l’homo-
economicus face aux biais psychologiques.
Ce premier chapitre a pour finalité la présentation du rôle de l’agent économique dans lathéorie financière. A cet effet, nous allons passer en revue les principales évolutions de cette
dernière en passant de la théorie de la finance moderne à la finance comportementale.
Toutefois, il est à souligner que certains concepts ne seront traités que brièvement en vue de
ne pas encombrer ledit chapitre. Cela dit, chaque concept traité sera lié à une référence pour
de plus amples explications. De surcroît, certaines notions importantes seront accompagnées
d’un encadré disponible dans les annexes.
La section 1 abordera les principaux développements de la finance moderne alors que la
section 2 s’attèlera sur les rouages de la finance comportementale.
1. La théorie de la finance moderne : le paradigme
a) Les hypothèses de l’efficience des marchés :
La théorie d’efficience (notée HEM ci-après) a façonné la théorie financière tant par ses
multiples implications que par ses vastes ramifications, au point de s’élever au rang de
dogme. En vue de mieux cerner cette notion, il convient d’énoncer les hypothèses sur
lesquelles elle repose :
H1 : les marchés sont sans frictions (absence des coûts de transaction) ;
H2 : l’information est gratuite et est connue par la totalité des agents ;
H3 : les agents sont tous d’accord sur l’implication de l’information actuelle () à la
fois sur les prix actuels () et sur la distributions des prix futurs ().
Force est de constater que ces hypothèses sont, pour le moins, restrictives. Toutefois, les
partisans de l’HEM avancent qu’elles sont, certes, suffisantes mais pas nécessaires. Ainsi
Fama (1970) écrivait-il : « …Mais un marché sans friction où l’information est disponible
gratuitement et où les investisseurs s’accordent sur son implication n’ est pas une description
réaliste des marchés. Heureusement, ces conditions sont suffisantes mais pas nécessaires… »
Sous la lumière de ces hypothèses, les marché reflètent totalement et correctement l’ensemble
des informations pertinentes à la détermination des prix des actifs (Fama, 1965). De façon
plus formelle, les prix suivent une martingale (Samuelson,1965). Bien que d’autres
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économistes tels que Fama (1965) aient proposé le modèle de marche aléatoire, la martingale
demeure le modèle qui se plie le plus à la définition présentée ci-haut. Formellement, elle
s’énonce comme suit :
(1.1)
L’équation (1.1) signifie que les prix futurs ( évoluent suivant un processus aléatoire.
Ces derniers peuvent prendre n’importe quelle forme hormis celle engendrée par
l’anticipation conditionnelle sur l’information actuellement disponible (). De façon plus
simple, en se basant sur l’information disponible à l’instant t, les agents sont incapables de
prévoir l’évolution des prix futurs. En effet :
Ainsi, la martingale suppose que l’investissement des agents s’apparente à un jeu équitable
« fair game » (les gains et pertes espérés sont nuls) . Il s’en suit que l’évolution des rentabilités
est aussi aléatoire et ne peut être prédite par l’information disponible. Cette notion de
l’efficience est qualifiée d’efficience informationnelle.
La définition de l’HEM peut, de prime abord, paraitre audible et concise, cependant elle ne
laisse pas moins entretenir une certaine ambigüité. En effet, deux passages méritent de plus
amples explications à savoir : « reflètent totalement et correctement » et « l’ensemble des
informations pertinentes ».
Le premier passage renvoie à la vitesse (totalement ) et la manière (correctement ) avec
lesquelles les prix incorporent l’information. Plus concrètement, c’est aux agents qu’incombe
la mission de refléter totalement et correctement l’ensemble des informations. En effet, suite à
l’arrivée d’une nouvelle information, l’agent révise correctement ses connaissances en se
basant sur la loi de Bayes. Dans une telle optique, il est doté d’une capacité cognitive
illimitée à traiter une quantité infinie d’informations, lui permettant ainsi de résoudre les
problèmes les plus complexes. En cela, l’agent traite tous les états de la nature (totalement ) en
leur assignant des probabilités conformes à des préférences normatives. D’une manière plus
explicite, il utilise la fonction d’utilité espérée (ci-après UE) de Von Neumann-Morgenstern
(1944) si la distribution de probabilité est connue. Si elle ne l’est pas, il utilise la fonction
d’utilité espérée subjective (ci-après UES) de Savage (1954). Plus formellement, l’agent doit
maximiser, la fonction suivante :
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(1.2)
Effectivement, pour chaque état de la nature l’agent assigne un degré d’utilité
(préférences normatives) et une probabilité appartenant à une distribution. Cependant,
comment peut-on identifier cette dernière ? cette question nous mène au deuxième passage de
la définition.
En effet, connaître toute l’information n’est qu’un préalable. L’agent ne doit retenir que
l’ensemble des informations pertinentes en vue de former ses anticipations. la question qui se
pose concerne justement le contenu desdites informations. Une première réponse nous vient
de la théorie des anticipations rationnelles (Muth, 1961). Une anticipation rationnelle est celle
qui satisfait l’égalité suivante :
(1.3)
L’équation (1.3) signifie tout simplement que l’anticipation de l’agent ( ) doit être égale à
l’anticipation optimale ( ). Cette dernière est atteinte quand l’investisseur procède non
seulement à l’analyse de l’ensemble de l’information disponible mais aussi, et surtout, en
faisant le lien entre ces informations et le modèle régissant l’évolution de la variable
anticipée. La théorie des anticipations rationnelles suggère que l’agent doit connaître le
modèle de fonctionnement de l’économie2. Dans des termes plus précis, la fonction UES doit
égaliser celle de l’UE. Ainsi, l’agent assigne des probabilités provenant de la véritable
distribution qui régit la variable anticipée. l’HEM se base sur cette préposition en fournissant,
toutefois, une réponse aussi évasive que la précédente. En effet, les informations pertinentes
d’un actif sont les informations d’ordre économique et politique afférentes à l’entreprise , à
son secteur et/ou l’économie (voire les économies) où elle opère (Fama, 1965).
En regroupant les deux passages de la définition, un marché efficient est un marché atomique
qui contient un très grand nombre d’agents homogènes qui appliquent la loi de Bayes pour
formuler leurs connaissances et ayant des préférences compatibles avec la fonction d’utilité de
Von Neumann-Morgenstern. En ce faisant, les prix reflètent la valeur fondamentale des actifs.
Autrement dit, les prix sont à leur juste valeur.
Dans un plan théorique, l’HEM présente une certaine solidité. Cependant, l’estimation de
celle-ci, en pratique, est impossible. Cette impossibilité découle principalement de
2 Ibid.
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l’explication évasive de « l’ensemble des informations pertinentes ». Pour palier à ce
problème, plusieurs économistes ont essayé de délimiter le champ desdites informations en
proposant des modèles testables servant, par la même occasion, d’extensions à l’HEM.
b) De l’analyse moyenne-variance au modèle d’équilibre des actifs financiers :
(i) L’analyse moyenne-variance :
Markowitz (1952,1958)3 est l’un des premiers économistes à présenter formellement un
modèle de sélection de portefeuille. Ce dernier offre aux investisseurs deux critères de
décision. Lesquels sont la moyenne et la variance (ou l’écart-type). Le premier critère décrit la
rentabilité espérée tandis que le second décrit le risque. D’où le nom de l’analyse moyenne-
variance.
Dans une optique de moyenne-variance, l’agent fait face à un problème d’optimisation qui
peut être formulé par deux façons. La première consiste à minimiser le risque (variance) pour
un niveau de rentabilité espérée (moyenne) donné. la seconde, quant à elle, consiste, à
maximiser la rentabilité espérée pour un niveau de risque donné. Il est important ici de noter
que ces deux dernières mesures ne sont pas calculées à partir des données historiques mais
sont anticipées rationnellement de la part des agents. Ainsi, la frontière des portefeuilles
minimisant le risque se dessine au fur et à mesure que l’investisseur se déplace d’un niveau de
rentabilité à un autre. Celle-ci est appelée frontière efficiente.
3 Notons ici que le modèle de Markowitz précède l’HEM. Cependant, la présentation de ce modèle est une
étape incontournable à la présentation du MEDAF.
Frontière efficiente
Portefeuille optimal
Courbes d’indifférence
Figure 1 Choix du portefeuille efficient qui maximise la fonction d'utilité
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D’après la figure 1, l’investisseur n’aura pas intérêt à investir dans un portefeuille se situant
au-dessous de la frontière efficiente. Le portefeuille optimal à choisir est celui qui appartient à
ladite frontière et qui satisfait la condition de tangence avec la courbe d’indifférence de
l’investisseur. En somme, le modèle moyenne variance n’indique que l’ensemble de
portefeuilles rationnels. Le choix du portefeuille optimal revient à l’investisseur. De ce fait,
cette analyse revêt un aspect purement microéconomique.
Sharpe (1964, 1965) et Lintner (1965) ont travaillé indépendamment sur l’agrégation des
travaux de Markowitz pour aboutir à un modèle plus général. En effet, l’objectif était de
trouver une solution où les agents concordent à choisir le même portefeuille optimal (H3 de
l’HEM). Ainsi, en formulant des hypothèses additionnelles et en ajoutant au marché un actif
sans risque, le modèle d’équilibre des actifs financiers (MEDAF ci-après) est né.
Désormais, l’investisseur a le choix d’allouer son argent entre les actifs risqués et l’actif sans
risque (). Ce dernier est caractérisé par des flux futurs connus et une variance nulle. La
présence d’un tel actif permet à l’investisseur de le combiner linéairement (ligne
d’investissement) avec des portefeuilles risqués. En procédant à ce type de combinaisons, le
choix optimal consiste à choisir le portefeuille qui fournit la ligne d’investissement qui
satisfait la condition de tangence avec la frontière efficiente des actifs risqués (le portefeuille
M dans figure 2.a. Un tel portefeuille est appelé « portefeuille du marché ».
Cependant même si la rationalité dicte aux investisseurs le choix du portefeuille qui vérifie lacondition de tangence, Le positionnement de l’investissement sur la ligne sera guidé par leurs
Frontière efficiente
des actifs risqués
M
Zone de prêt
Zone d’emprunt
A
B
M
Frontière efficiente des actifs
risqués
Nouvelle frontière efficiente
Lignes
d’investissement
Figure 1.2.a Figure 1.2.b
P
E
Figure 2 Transformation de la frontière efficiente en présence de l'actif sans risque
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préférences (figure 2.b). Le théorème de séparation (Tobin, 1958) nous donne de plus amples
explications. En effet, en présence d’un actif sans risque, tout investisseur rationnel doit
impérativement faire deux décisions. La première, appelée décision d’investissement, lui dicte
de choisir la ligne d’investissement qui satisfait la condition de tangence. La seconde décision
consiste à positionner l’investissement sur la ligne optimale eu égard aux préférences
normatives de chaque investisseur. Elle est appelée décision financière.
(ii) Le modèle d’équilibre des actifs financiers :
En supposant la gratuité de l’information (H2 de l’HEM), l’absence de friction (H1 de
l’HEM) ainsi que l’atomicité des agents, le MEDAF devient une agrégation naturelle des
choix d’investissement des agents4. Bien évidemment, cette agrégation est conditionnée par
l’homogénéité des anticipations (H3 de l’HEM). De façon plus spécifique, tous les agentsanticipent les mêmes moyennes et variances inhérentes à chaque actif. De surcroît, ces
dernières doivent provenir des véritables distributions qui les régissent (UES=UE). Sans cette
condition, le MEDAF serait plus compliqué et presque inutilisable.
Dans sa forme théorique le MEDAF s’écrit comme suit : (1.4)
Où
L’équation (1.4) signifie que la rentabilité espérée d’un actif ou d’un portefeuille () est
égale à l’actif sans risque ( plus la prime de marché multipliée par un coefficient
(). Le risque est scindé en deux catégories. La première renvoie à un risque spécifique qui
est non rémunéré puisque l’investisseur peut l’éliminer en investissant dans le portefeuille M
(décision d’investissement). La deuxième renseigne sur le risque systématique qui est
rémunéré par beta . Ce dernier mesure la part de volatilité de la rentabilité de l’actif associée
avec la variabilité de la rentabilité .
4Etant donné que tous les agents choisiront le portefeuille M, les investissement rationnels appartiennent à la
droite qui lie ce dernier avec l’actif sans risque. Cette droite est appelée Capital Market Line CML (figure 1.3.a)
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En équilibre, les rentabilités des actifs doivent former une droite appelée Security Market
Line (SML), comme le montre la figure 3.b. En effet, si la rentabilité passe en dessus (sous-
évaluation) ou en dessous (surévaluation) de la SML, les agents achèteront les actifs sous-
évalués ( actif A, figure 3.b) et vendront les actifs surévalués (actif B, figure 3.b). L’action
collective des investisseurs aboutira à un nouvel équilibre.
Contrairement à l’HEM, le MEDAF peut être testé en pratique. Sa forme empirique est la
suivante: (1.5) est un terme d’erreur qui est supposé satisfaire les conditions suivantes :
= 0
= 0
, appelé alpha de Jensen, mesure la distance entre la rentabilité en équilibre est la
rentabilité observée (). Outre l’ajout d’alpha dans l’équation (1.5), Il est important de
souligner qu’il existe une très grande différence entre cette dernière et l’équation (1.4). En
effet, est la rentabilité espérée tandis que est la rentabilité historique. Ajoutons à cela le
fait que est souvent exprimé en termes d’indices boursiers qui sont loin de représenter la
rentabilité espérée du marché (). Tout cela ne fait de l’équation (1.5) qu’une simple
approximation de la formule théorique du MEDAF.
M
CML
Actifs sous-évalués
B
Actifs
surévalués
A
Figure 3.a Figure 3.b
Figure 3 La droite CML et la droite SML
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11
Quoi qu’il en soit, la forme empirique du MEDAF permettaient aux économistes de tester
l’équilibre sur les marchés financiers, et par déduction l’HEM. Les méthodes les plus utilisées
consistent à étudier la signification d’alpha (Jensen, 1968), la stabilité de beta (Roenfeldt,
Greipentorg et Palfman, 1978 ; Carpenter et Upton, 1981) et la linéarité entre la rentabilité et
le risque (Sharpe et Cooper, 1972 ; Black Jensen et Scholes, 1972 ; Fama et MacBeth, 1973).
Les premiers tests effectués étaient plutôt en faveur du MEDAF5. Cependant, vers la fin des
années soixante-dix, des articles fusait tout azimuts en fustigeant ce dernier de critiques. En
effet, d’autres variables prédisaient la rentabilité. De surcroît, la rentabilité présentaient
certaines irrégularités. Ces critiques forment ce que l’on appelle «anomalies». Dans une
optique financière, une anomalie est toute rentabilité anormale qui n’est pas justifiée par la
rentabilité ajustée par le risque et qui indique l’inefficience des marchés et/ou une
inadéquation du modèle d’évaluation d’actif (en l’occurrence le MEDAF). Toutefois, il est
nécessaire de s’arrêter sur la méthodologie empirique de ces travaux. Le schéma
méthodologique peut être résumé dans la figure 4.
Cette méthodologie n’est pas exempte de toute critique. En effet, tester l’HEM, suppose faire
le test de deux hypothèses indissociables. la première concerne le modèle d’évaluation tandis
que la seconde concerne l’HEM, entrant ainsi dans un cercle vic ieux. Les résultats issus de
cette méthodologie ne peuvent être imputés à l’HEM puisqu’elle est testée conjointement
avec un modèle d’évaluation. Cet état de fait est communément appelé le problème des
hypothèses jointes (Fama, 1970).
Ces anomalies ont scindé les partisans de l’HEM en deux clans. Ceux qui rejettent totalement
la validité empirique des anomalies (MacKinlay, 1995 ; Shwertz, 2003) et ceux qui imputent
l’existence de celles-ci au MEDAF et non à l’HEM (Fama et French, 1992, 1993 ; Ross,
1976a, 1976b). Ces derniers ont préféré de jeter le discrédit sur le MEDAF et ont essayé
d’apporter de nouveaux modèles en vue de mieux expliquer la rentabilité.
5Ibid.
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12
c) Le modèle d’évaluation par arbitrage :
L’arbitrage peut être dépeint comme étant une application de la loi du prix unique aux
marchés financiers. Cela suppose qu’un actif dispose d’un substitut parfait. Ce dernier, peut
être un autre actif ou un portefeuille présentant les mêmes rentabilités futures pour tous les
états de la nature.
Si cet actif diverge de son substitut (rentabilité anormale), les investisseurs rationnels auront
une opportunité de gain immédiate et illimitée sans engendrer le moindre coût et sans prendre
le moindre risque. Cette opportunité est appelée opportunité d’arbitrage, laquelle consiste à
vendre le plus cher et à acheter le moins cher. Etant donnée l’atomicité des agents, l’action
collective de ces derniers ramènera les prix à leur niveau fondamental. Dans un tel contexte,
l’absence d’arbitrage est un signe d’équilibre et d’efficience des marchés.
Ainsi, pour que l’absence d’arbitrage ait lieu, le marché doit être sans friction et contenir un
certain nombre d’agents qui préfèrent plus de richesse à moins de richesse (préférences
normatives) et pour lesquels un portefeuille optimal peut être construit.
Plus formellement, l’arbitrage peut être schématisé de la façon suivante :
MEDAF Ensemble des informations
Critères de l’efficience
H othèses
Résultats
Tests
Rejeter l’hypothèse nulle: inefficience
Ne pas rejeter l’hypothèse nulle : efficience
Figure 4 Schéma Méthodologique des tests empiriques de l'HEM
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Investissement initial nul : où est la valeur monétaire
détenue pour chaque actif.
L’arbitrage est sans risque : pour chaque état de la nature.
Il s’en suit, que l’absence d’arbitrage se traduit par : pour chaque état dela nature. C’est sur cette base que Ross (1976a,1976b) a établit le modèle d’évaluation par
arbitrage (APT, ci-après).
L’APT est formulé comme suit :
(1.6)
Où F représente le nombre de facteurs expliquant la rentabilité, est le terme d’erreur. A
l’instar du MEDAF, l’ATP suppose deux types de risques :
Risque systématique : associé avec la variation des facteurs
Risque spécifique : associé avec le terme d’erreur.
Les conditions de l’APT sont similaires à celles de l’arbitrage :
Investissement initial nul.
L’absence de risque suppose l’annulation des risques systématique et spécifique :o Elimination du risque systématique :
o Elimination du risque spécifique : , cette condition
nécessite que
En équilibre (absence d’arbitrage), les conditions ci-haut transforment l’équation (1.6)
en6
:
Si ces conditions sont respectées, l’APT devient :
(1.7)
Où et sont des primes de risque disposant de la même valeur pour chaque actif.
Remarquons que l’APT n’ a pas hérité de la simplicité du MEDAF. En effet, l’application en
pratique de ce modèle est très complexe. Si c’est une tâche faisable pour les académiciens,
6 Selon l’APT, la rentabilité en équilibre doit-être nulle.
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c’est une autre paire de manche pour les praticiens qui n’ont ni l’expertise ni le temps pour le
faire.
Par ailleurs, la condition de l’élimination du risque spécifique constitue le talon d’Achille de
l’APT. En effet, force est de constater qu’il est très rare de trouver une série financière
disposant d’un terme d’erreur ayant une moyenne nulle. En cela, l’équation (1.7) ne tient qu’à
une approximation.
Les problèmes de complexité et d’exactitude ne doivent pas faire oublier un tout autre
problème qui fait défaut à l’APT. En effet, si la rentabilité est représentée par un nombre de
facteurs K, l’APT reste muet sur ce que ces facteurs peuvent représenter. Rappelons que l’une
des fonctions principales des modèles d’évaluation rationnels est de délimiter le champ des
informations pertinentes. Malheureusement, l’APT a émis plus de zones d’ombre qu’il en a
dissipé, et par voie de conséquence, il n’a pas été en mesure de détrôner le MEDAF.
2. La finance comportementale : l’antithèse.
La finance comportementale est une discipline qui prône l’analyse de l’agent économique
sous un nouvel ongle. Désormais, ce dernier est soumis à des biais psychologiques lui
empêchant d’appliquer correctement la loi de Bayes et/ou de dresser des préférences
normatives. Telle est la définition que l’on donnera au terme « irrationnel » qui sera utilisé de
façon récurrente lors de cette section. Cette discipline est constituée de deux pans : la limite à
l’arbitrage ainsi que les biais psychologiques.
a) la limite à l’arbitrage :
La présence d’agents irrationnels n’a pas été totalement occultée par l’HEM. Cependant,
selon cette dernière, leur influence sur la formation des prix est insignifiante. Cette
proposition revient à Friedman (1953) qui considérait que si les agents irrationnels arrivent à
faire dévier le prix d’un actif de ses fondamentaux, le prix dudit actif divergerait de son
substitut. Ainsi, une opportunité d’arbitrage est créée. Cette dernière serait immédiatement
saisie par les agents rationnels. Etant donné que ces derniers ne peuvent influencer les prix en
raison de leur atomicité, leur action collective ramènerait le prix de l’actif à sa valeur
fondamentale. De ce fait, l’absence d’opportunité d’arbitrage, appelée aussi « no free lunch »,
est considéré comme étant une situation d’équilibre et d’efficience des marchés.
Toutefois, la finance comportementale ne voit pas les choses du même œil. Si l’efficience des
marchés implique l’absence d’opportunité d’arbitrage, l’inverse n’est pas vrai. Pour mettre au
claire cette idée, nous nous baserons sur la proposition de Friedman : « les agents qui
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investissent sur la base du bruit perdront leur argent au profit des arbitragistes, menant ainsi
à une diminution aussi bien de leur richesse que de leur effet sur la demande »7
écrivait-il.
Supposons qu’il existe deux types d’investisseurs. Les premiers forment des anticipations
rationnelles et sont appelés arbitragistes. Les seconds, quant à eux, manquent de rationalité.
Par conséquent, leur demande est affectée par des décisions qui ne sont pas justifiées par les
informations pertinentes . Ils sont appelés « noise traders ».
Il s’en suit qu’avec l’existence de ces deux catégories, le prix ne pourra plus être identique à
la valeur fondamentale. Désormais, le processus de formation des prix est constitué non
seulement par cette dernière mais aussi par du bruit « noise » (Kyle, 1985 ; Black, 1986). La
première composante est injectée par les agents rationnels alors que la seconde est injectée par
les agents irrationnels (d’où le nom noise traders).
Pour qu’un arbitrage ait lieu, les arbitragistes doivent être neutre vis-à-vis du risque et
disposer d’une demande parfaitement élastique pour l’actif mal-évalué au niveau du prix de
son substitut. Ces deux conditions supposent la présence d’un substitut parfait. En présence
d’un tel substitut, l’opportunité d’arbitrage n’engendre ni coût ni risque.
Les partisans de la finance comportementale estiment qu’en réalité cet arbitrage est à la fois
couteux et risqué. Effectivement, certains actifs tels que les actions et les obligations ne
disposent pas d’un substitut parfait. Cet état de fait ôte les arbitragistes de leur couverture. A
titre d’illustration, si l’actif est inférieur à sa valeur fondamentale, la logique d’arbitrage
voudrait que les agents achètent ledit actif et vendent à découvert son substitut. Ainsi, même
si le prix de l’actif baisse encore plus à court terme, l’agent sera immunisé. Seulement, s’il
n’existe pas de substitut parfait, les agents ne seront plus immunisés et devront suppor ter un
risque lié à l’imperfection du substitut. Un tel risque est dit risque fondamental (Shleifer et
Summers ,1990). En cela, les arbitragistes seront averses au risque et leur demande ne sera
plus parfaitement élastique8.
En insérant les coûts de transactions dans notre analyse, le processus d’arbitrage devient
couteux et plus risqué même si un substitut parfait existe. Effectivement, la vente à découvert
engendre un coût. Si les prix divergent de leur substitut pour une longue période, les coûts de
la vente à découvert pourraient être plus élevés que le profit de l’arbitrage lui-même. Par
7Ibid.
8Pour que la demande ne soit plus élastique, le nombre des arbitragistes doit être fini.
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conséquent, les arbitragistes seront dans l’obligation de solder leur positions avant même que
les prix reviennent à leur fondamentaux. Ce risque porte le nom de « Horizon risk » (Abreu et
Breunnermeier, 2002).
Implicitement, les deux types de risque précités s’appuient principalement sur
l’imprévisibilité de la demande des noise traders. En effet, même si l’influence de ces derniers
sur les prix est grande, leur demande demeure imprévisible et difficilement détectable
(Shiller, 1984 ; Summers, 1986). Ainsi, l’arbitrage comporte un risque supplémentaire lié aux
noise traders (Delong et al, 1990).
En effet, même si les arbitragistes arrivent à détecter une opportunité d’arbitrage, il se peut
que ces derniers ne la saisissent pas. Ne pouvant pas prévoir la demande des noise traders, les
arbitragistes seront moins enclins à les contrattaquer vu que leurs positions pourraient
engendrer un coût et des pertes à court et à moyen terme. En effet, cette constatation est
renforcée davantage quand les investisseurs institutionnels jouent le rôle d’arbitragistes.
Shliefer et Vishny (1997) avancent que l’arbitrage défini par Friedman n’est vrai qu’en état de
virtualité, pour reprendre leurs mots c’est un arbitrage de « manuel » : « …les millions de
petits traders [référence à l’atomicité des agents] ne sont pas ceux qui disposent des
connaissances et des informations nécessaires pour effectuer un arbitrage »
9
Plus explicitement, l’arbitrage est un apanage réservé à un cercle réduit d’investisseurs
hautement spécialisés. Ces derniers sont, pour la plupart, des gestionnaires de portefeuilles.
Autrement dit, ils utilisent l’argent de leurs clients pour effectuer un arbitrage10
. De là nait un
conflit agent/principal que Shliefer et Vishny appellent la séparation entre le cerveau et le
capital.
Les clients des arbitragistes jugent ces derniers à partir de leurs performances passées. C’est
un acte tout à fait rationnel puisqu’ils ne peuvent inférer l’habilité des arbitragistes qu’à partir
de cette information. Supposons que les prix entament une chute par rapport à leurs
fondamentaux, les arbitragistes disposeront, à priori, d’une opportunité d’arbitrage menant à
un profit certain quand les prix reviendront à leur fondamentaux. Entre-temps, leurs
portefeuilles accuseront une perte (en raison de la baisse des prix), la seule chose que leurs
clients déduiront est que les arbitragistes perdent de l’argent. De ce fait, ils retireront leurs
9Ibid.
10 L’analyse qui suit suppose que les arbitragistes sont tous des gestionnaires de portefeuilles.
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argents de ce fonds. Afin d’éviter un retrait massif, les arbitragistes seront forcés
d’abandonner leurs positions, laissant ainsi l’opportunité d’arbitrage inexploitée. Notons ici
que l’hypothèse de base est que les arbitragistes utilisent l’argent de leu rs clients en vue
d’effectuer un arbitrage. Cette hypothèse est très raisonnable puisque la majorité des bourses
interdisent aux gestionnaires de fonds de vendre à découvert (Barberis et Thaler, 2003).
En somme, si l’influence des noises traders persistent, il y’aurait une forte chance que les prix
divergent de leurs fondamentaux pour une longue période. En effet, en cas d’atomicité des
agents, l’arbitrage est couteux et risqué. Il le devient encore plus quand le groupe
d’arbitragistes ne contient plus que les gestionnaires de fonds. Cet état de fait porte le nom de
la limite à l’arbitrage.
Même si la limite à l’arbitrage semble réaliste, elle demeure conditionnée par une hypothèse
qui a trait aux comportements des noise traders. Si ces derniers agissent d ’une manière
aléatoire, leurs actions s’annuleront mutuellement. Pour que leurs influences persistent, il faut
que leur actions soient corrélées. Autrement dit, les noise traders devront faire pratiquement
les mêmes erreurs. C’est justement sur ce point que s’attèle le deuxième pan de la finance
comportementale à savoir les biais psychologiques.
b)
Biais Psychologiques :La majorité des décisions financières est prise dans un climat où règne un grand degré
d’incertitude. Dans un cadre rationnel, l’agent doit envisager, exhaustivement, toutes les
alternatives possibles et choisir, parmi elles, celle qui maximise ses intérêts. Toutefois, l’être
humain ne dispose pas d’une capacité cognitive capable de résoudre un tel problème.
Miller (1954) a trouvé que la capacité humaine à traiter les informations ne dépasse guère le
chiffre sept plus ou moins deux. Autrement dit, le cerveau humain ne peut traiter qu’un
nombre réduit d’informations allant de 5 à 9 seulement. De surcroît, la capacité humaine àeffectuer des tâches de façon simultanée est très réduite (Kahneman, 1973). En somme, la
capacité cognitive, requise pour résoudre des problèmes de prise de décision complexes,
excèdent largement la capacité cognitive humaine. Pour remédier à cela, les agents utilisent
des méthodes heuristiques (Tversky et Kahneman, 1974) qui sont loin de satisfaire la loi de
Bayes.
L’un des exemples marquants est la construction de portefeuille. Construire un portefeuille
exige de traiter non seulement l’ensemble des actifs de façon isolée mais d’examiner aussi
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l’interaction qui peut exister entre eux (coefficient de corrélations). Baltussen et Post (2007)
ont trouvé que les investisseurs utilisent des méthodes heuristiques qui ne tiennent compte que
des distributions marginales des actifs. De surcroît, les investisseurs se focalisent sur la
fluctuation individuelle des actifs qu’ils détiennent tout en négligeant la fluctuation globale de
leurs portefeuilles. Une telle action mène souvent à des portefeuilles sous-optimaux qui se
situent en dessous de la frontière efficiente (Baltussen et Post, 2007 ; Barberis et Huang,
2003).
Ainsi, l’étude de ces méthodes heuristiques revêt une importance capitale en vue de voir
comment les erreurs individuels des agents tendent à converger.
(i) Formation des jugements :
L’une des étapes préalables à la formation des anticipations est la formation des jugements.
Celle-ci implique, dans un contexte de rationalité, l’usage de la loi de Bayes. Plusieurs
expériences, relevant du domaine de la psychologie et de l’économie expérimentale, ont
montré que les gens n’arrivent pas à appliquer correctement ladite loi.
L’une des principales raisons est causée par l’image que les gens ont d’eux -mêmes. En effet,
ils ont souvent tendance à surestimer leurs jugements menant ainsi à plusieurs biais altérant
leurs décisions. En effet, parmi ces biais il y a tout d’abord le biais d’ « optimisme ».
Weinstein (1980) a trouvé que plus de 90% des enquêtés estiment qu’ils sont au-dessus de la
moyenne dans des domaines tels que les talents de conducteur, la capacité de s’entendre avec
des inconnus et le sens d’humour. De surcroît, Buehler Griffin et Ross (1994) ont montré que
la plupart des gens sous-estiment le temps d’accomplissement d’une tâche.
Un autre biais qui va de pair avec l’ «optimisme» est la « surconfiance ».effectivement, quand
il s’agit d’estimer des quantités (p. ex. le taux de croissance des dividendes), les gens
élaborent des intervalles de confiance trop étroits. Selon une étude conduite par Alpert etRaiffa (1982), l’intervalle de confiance de 98% dressé par les enquêtés ne contenaient que
60% des valeurs justes.
De surcroît, la manière, dont les alternatives sont présentées, jouent un rôle prépondérant dans
la prise de décision. Les gens traitent les informations telles qu’elles sont présentées. De façon
plus précise, ils n’utilisent que l’information qui est explicitement offerte à eux. Ce
phénomène est appelé inertie cognitive (Slovic, 1972). A cela s’ajoute le concept de
comptabilité mentale (Kahneman et Tversky, 1981 ; Kahneman et Lovallo, 1993 ; Thaler,
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2000). Cette dernière se manifeste par le biais de la séparation des décisions. En effet, les gens
ont tendance à élaborer des tranches de décisions. A titre illustratif, le budget familial est
subdivisé en sous-catégories : « budget du ménage », « budget des loisirs », « budget
d’investissements » etc.. Cette manière d’allocation tend à éluder l’interaction mutuelle des
alternatives de décision. En cela, les décisions prises, dans ce cadre, se situent en-deçà de la
décision optimale (Thaler, 1999).
En somme, la façon avec laquelle les gens traitent les alternatives qui s’offrent à eux se prête
très mal aux prescriptions rationnelles de la théorie de la finance moderne. Dans une telle
optique, la loi de Bayes se trouve bafouer. Kahneman et Tversky (1974) ont montré que
quand les gens essaient de déterminer la probabilité qu’un événement A est généré par un
modèle B, ou qu’un objet A appartient un à une classe B, ils ont recours à une méthode
heuristique appelée « représentativité ». cette dernière consiste à évaluer la probabilité en se
basant sur le degré avec lequel A reflète les caractéristiques de B, menant ainsi à un biais
appelé « négligence du taux de base ».
Un autre biais, et non des moindres, surgit quand on utilise la méthode de représentativité. Ce
dernier concerne la taille de l’échantillon. En effet, Le jet d’une pièce de monnaie six fois
donnant trois piles et trois faces est moins représentatif que le jet de la même pièce 1000 fois
donnant 500 piles et 500 faces. Toutefois, la plupart des gens vont trouver que ces deux
dernières expériences sont aussi informatives l’une que l’autre.
Ce biais est très important dans un contexte financier. Effectivement, des investisseurs soumis
à un tel biais auront tendance à considérer un analyste, qui a fait quatre bonnes
recommandations successives, comme un analyste compétent (Barberis et Thaler, 2003). Ce
biais est souvent appelé « la loi des petits nombres » (Rabin, 2002).
Contrairement à la méthode de représentativité, la méthode de conservatisme (Edwards, 1968)
consiste à surpondérer le taux de base. Même si ces méthodes paraissent aux antipodes, elles
peuvent très bien cohabiter chez la même personne. En effet, si les données à inférer sont
représentatives du modèle qui les génèrent, les agents opteront pour la méthode de
représentativité. Si par contre, les données sont peu représentatives, les agents se fieront
davantage à leur connaissances antérieures en optant pour la méthode de conservatisme.
La question intéressante est de savoir si les agents éluderont ces biais avec l’expérience. De
surcroît, on pourrait croire que certains agents dotés d’une grande expertise tels que les traders
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sont loin de subir de tels biais. Camerer et Hogarth (1999) se sont attelés sur cette question.
Leur travail montre que même en connaissant ces biais psychologiques, les agents retombent
souvent dans la même erreur. Plus encore, les traders expérimentés sont les agents qui
exhibent le plus le biais de surconfiance. En somme, avec le temps, les agents peuvent réduire
l’effet des biais psychologiques, par contre ils ne peuvent guère l’éradiquer totalement. Ainsi,
la persistance des erreurs de jugement exerce un effet non négligeable sur la formation des
anticipations.
(ii) Préférences et anticipations :
La théorie de la finance moderne se base essentiellement sur la fonction d’utilité espérée de
Von Neumann-Morgenstern. Pour que les agents appliquent correctement la fonction UE, ces
derniers doivent impérativement dresser des préférences satisfaisant des axiomes normatifs(i.e. la complétude, transitivité, continuité et l’indépendance). Cependant, maints travaux
expérimentaux ont montré que les agents transgressent ces axiomes de plein fouet.
Il est à signaler que l’UE demeure une bonne approximation de la façon avec laquelle les
agents évaluent les alternatives de décision. Toutefois, les partisans de la finance
comportementale argumentent que la violation de l’UE prend une place prépondérante dans
l’explication de certains phénomènes financiers (Barber is et Thaler, 2003). En cela, à une
fonction UE normative répond une théorie prospective positive (Kahneman et Tversky, 1979,
1992).
La théorie prospective a connu un essor considérable ces dernières années. En effet, elle est
considérée comme la meilleure théorie descriptive des décisions dans un climat de risque.
D’ailleurs, Tversky et Kahneman (1986) argumentent que l’approche normative est vouée à
l’échec parce que les gens font fréquemment des choix qui sont impossibles à justifier dans
une optique normative.
Cette théorie est formulée pour des loteries avec au moins un résultat non-nul sous la forme
suivante :
Ce couple est lit de la façon suivante : « obtenir le résultat x avec une probabilité p ou bien le
résultat y avec une probabilité q » avec ou . Face à ces alternatives, les
agents font appel à la fonction suivante pour effectuer leur choix :
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(1.8) est une fonction de pondération de la probabilité tandis que est une fonction de
valeur assignée pour chaque résultat.
La théorie prospective présente l’utilité sous forme de gains et pertes au lieu de la richesse
finale. Cette idée n’est pas très récente puisque Markowitz (1952) l’a utilisé dans le modèle de
moyenne-variance. Cela dit, en relaxant les axiomes normatifs, Kahneman et Tversky ont
trouvé des remarques fort intéressantes, ce que montre la figure 5.
La figure 5.a présente l’allure de la fonction de valeur . D’une part, Cette dernière est
concave dans le domaine des gains, cela signifie que les agents sont averses au risque
concernant les gains. D’autre part, elle est convexe dans le domaine des pertes montrant ainsi
un penchant pour le risque s’agissant des pertes. Il est à noter aussi que cette courbe présente
un nœud (kink ) à l’origine. Cet état de fait met en relief une plus grande sensibilité en cas de
pertes qu’en cas de gains, ceci est plus connu sous le nom d’ « aversion aux pertes ».
La figure 5.b, quant à elle, présente l’allure de la fonction de pondération des probabilités . En effet, cette fonction n’est pas linéaire. Ainsi, les petites probabilités sont
surpondérées ( ). Cela signifie qu’une augmentation absolue de 0,01 à 0,02 est
perçue comme étant supérieure à une augmentation absolue de 0,3 à 0,1, ceci est appelé
« l’effet possibilité ». De surcroît, le passage de 1 à 0,99 reçoit plus d’importance qu’un
passage au sein des probabilités modérées (p. ex. de 0,31 à 0,3), ceci porte le nom de « l’effet
certitude ».
Valeurs
GainsPertes
D é c i s i o n d e P o n d é r a t i o n :
0.5
0.5
0
1
1
Probabilité déclarée : p
Figure 5 Pondération des probabilités et la fonction de valeur
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En regroupant les deux caractéristique de et de , la concavité de la première
fonctionne dans le domaine des gains engendre une aversion au risque ; cependant au niveau
des probabilités faibles la surpondération de la deuxième fonction l’emporte conduisant ainsi
à un penchant considérable pour le risque. Ainsi, les agents ont tendance à être averses au
risque dans le domaine des gains à l’exception des gains affichant des faibles probabilités.
Similairement, les agents disposent d’un penchant pour le risque au niveau du domaine de
pertes en raison de la convexité de tout en étant averse au risque pour les pertes ayant
une faible probabilité de se produire en raison de la surpondération de .
Kahneman et Tversky (1992) ont développé une généralisation de cette théorie qui porte le
nom de la théorie prospective cumulative (ci-après TPC). Elle s’énonce comme suit :
(1.9)
Avec :
Et :
et sont respectivement les fonctions de pondérations des probabilités dans les
domaines des pertes et des gains. est le paramètre d’aversion au pertes, d’après les
estimations de Kahneman et Tversky (1992) ce paramètre se situe aux alentours de 2.
La TPC capture certaines anomalies cités dans la section précédente. Premièrement, elle
capture comment la façon avec laquelle les alternatives sont présentées affecte le choix des
agents (méthodes de conservatisme et de représentativité). En effet, 30 à 40% changent leur
avis en fonction de la présentation du problème auquel ils font face (Barberis et Thaler, 2003).
Deuxièmement, elle capture aussi la manière avec laquelle les agents réagissent à ces
problèmes (comptabilité mentale). Si les agents utilisent la comptabilité mentale, ils
considéreront les alternatives de façon isolée.
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Par ailleurs, la TP et la TPC évoluent dans un cadre où les probabilités sont connues. Si ces
probabilités sont inconnues, la logique rationnelle préconise l’usage de la UES de Savage
(1954). Ellsberg (1961) a démontré que les agents sont mal à l’aise dans les situations où les
probabilités sont inconnues. En effet, ce phénomène est connu sous le nom d’ « aversion à
l’ambiguïté ». Heath et Tversky (1991) affirment qu’en pratique, l’aversion à l’ambiguïté est
conditionnée par la compétence dont l’agent croit disposer. Si l’agent pense être incompétent
concernant l’évaluation d’une distribution de probabilité, il décidera soit d’éviter l’alternative
afférente à cette distribution, soit de suivre d’autres agents qu’il croit compétents (Tversky et
Fox, 1995). En revanche, si l’agent estime qu’il est compétent, un effet opposé à l’aversion au
risque aura lieu. Il est appelé « préférence pour le familier » (Barberis et Thaler, 2003). La
notion de compétence aura une importance majeure dans le développement du chapitre
suivant.
Synthèse :
A travers ce chapitre, nous avons présenté comment le rôle de l’agent économique a évolué au
sein de la théorie financière. En effet, la théorie de la finance moderne et à sa tête l’HEM ne
donne à l’agent qu’un rôle minime. En revanche, la finance comportementale place le
comportement de celui-ci ainsi que ses singularités au cœur de ses intérêts. Ainsi, l’homo-
economicus semble céder le pas à l’homo-sapiens.
Toutefois, il est important de souligner que la finance comportementale puise sa force
essentiellement des anomalies présentes sur le marché. Or, celles-ci ne peuvent guère être
utilisées comme arguments en vue de réfuter l’HEM. Effectivement, le champ des
informations pertinentes constitue un rempart insurmontable protégeant l’HEM de toute
critique sur le plan empirique.
Même si l’HEM demeure irréfutable, il est permis de douter de ses implications théoriques et
plus particulièrement l’homogénéité des anticipations. En effet, le prochain chapitre sera
dédié aux travaux qui ont traité de l’hétérogénéité des anticipations ainsi que de ses
implications sur les marchés boursiers.
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Chapitre 2 : Implications de l’hétérogénéité des anticipations sur la
formation des prix.
Lors du dernier chapitre, nous avons présenté la place occupée par les agents dans les deux
courants majeurs en théorie financière. Le présent chapitre pousse le débat encore plus loin en
exposant les principaux travaux qui ont mis en exergue l’interaction entre des agents émettant
des anticipations différentes.
Pour ce faire, une redéfinition de l’HEM s’impose avec acuité. Une fois la redéfinition faite,
nous allons présenter l’hétérogénéité des anticipations liée, dans un premier temps, à
l’asymétrie de l’information puis celle liée à l’irrationalité d’une partie des agents. Afin de
maintenir l’objectivité du présent chapitre, nous allons aussi présenter la riposte des partisans
de l’HEM. Celle-ci peut être scindée, elle-aussi, en deux catégories. La première prône une
rationalisation des anomalies via des modèles multifactoriels tandis que la seconde réfute, sur
un plan plutôt méthodologique, l’existence des anomalies. Rappelons que ces dernières
constituent le fer de lance de la finance comportementale. Porter atteinte aux anomalies
revient donc à limiter cruellement les arguments de la finance comportementale.
Ainsi, la première section présentera l’hétérogénéité des anticipations sous ses deux formes.
La seconde section, quant à elle, abordera plutôt les tentatives de rationalisation et les
critiques envers les anomalies.
1. Hétérogénéité des anticipations :
a) Asymétrie d’information et formation des comportements :
(i) L’HEM : une redéfinition.
Lors du chapitre précédent, la répartition de l’information parmi les investisseurs étaient
considérée comme étant équitable, exogène et surtout indépendante du processus de formation
des prix. C’est justement sur cette base que les modèles rationnels s’appuient. Cela dit, une
répartition équitable de l’information suppose que cette dernière soit gratuite.
En effet, si l’information est onéreuse, tout agent rationnel ne va l’acquérir que si son coût
marginal équivaut au bénéfice marginal de son acquisition. De surcroît, si les actions des
agents informés sont parfaitement reflétées par les prix, l’inférence de l’information à travers
les prix est possible. Ainsi, les agents non informés bénéficieront de l’information sans
l’acquérir. En ce faisant, aucun investisseur n’est incité à acquérir l’information et au final le
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prix ne reflétera que du bruit. Cet état de fait porte le nom du paradoxe de Grossman-Stiglitz
(Grossman et Stiglitz, 1980).
Ainsi, si les prix reflètent l’information, aucun agent n’est incité à l’acquérir. En revanche, si
les prix ne la reflètent pas, son acquisition devient bénéfique. L’implication majeure du
paradoxe de Grossman-Stiglitz est de mettre en relief la prépondérance de l’asymétrie
d’information au sein des marchés financiers. En vue de contrecarrer ce paradoxe, Fama
(1991) a proposé diverses formes d’efficience en définissant trois ensembles d’informations, à
savoir :
La forme faible consiste à tester l’efficience des actifs en considérant les
informations historiques (cours antérieurs et présents) comme étant l’unique
composante de l’ensemble d’information disponible aux agents.
La forme semi-forte, quant à elle, suggère de tester l’efficience à partir de l’ensemble
de l’information publique. L’inconvénient avec cette forme réside dans la difficulté,
voire l’impossibilité, à rassembler la totalité de l’information publique.
La forme forte englobe toute l’information disponible y compris les informations
privilégiées des insiders (actionnaires majoritaires, PDG et délits d’initié …)
Le test d’efficience sous ces formes consiste à examiner si l’ensemble des informations
associé pour chaque forme permet de réaliser des profits anormaux. Si ces derniers ne sont
pas vérifiés, l’hypothèse d’efficience sous la forme considérée n’est pas rejetée. Toutefois,
cette méthodologie est limité sur deux plans. Le premier est d’ordre théorique, comme on l’a
vu lors de la section dédiée à la limite à l’arbitrage, l’absence des profits anormaux
n’implique pas l’efficience des marchés. Le deuxième, quant à lui, est plutôt d’ordre
empirique car même en spécifiant l’ensemble d’information, la conduction de ces tests
suppose l’association d’un modèle aux ensembles de l’information. D’où le problème des
hypothèses jointes proposé par Fama lui-même.
Quand l’information n’est pas gratuite, l’asymétrie d’information sévit inexorablement dans
les marchés financiers. Cela va sans dire que les comportements des agents se trouvent
influencés en cas d’asymétrie. D’ailleurs, Van Nieuwerburgh et Veldkamp (2010) ont
démontré sur un plan microéconomique que l’acquisition de l’information mène souvent à
une sous-diversification. Plus précisément, quand les agents choisissent quelle information
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acquérir avant d’investir, leurs portefeuilles est souvent sous-diversifié. Il est donc
indispensable d’étudier le comportement des agents dans un tel cadre.
(ii) le Herding dans les marchés financiers : une approche rationaliste.
Le herding vient du mot « herd » qui signifie troupeau en anglais. Au-delà de son appellation
péjorative, un tel comportement suppose que la décision d’un agent est influencée par les
décisions des autres agents qui l’ont précédé. Le mot herding a été proposé pour la première
fois par Banerjee (1992) ; Bikhchandani , Hirshleifer et Welsh (1992).
Un agent entre dans une situation de herding quand sa décision lui dicte d’investir sans
connaître les décisions des autres agents ; mais ne suit pas sa propre décision quand il
découvre que les agents qui l’ont précédé ont décidé de ne pas investir, et vice-versa. Ainsi,
quand un agent imite les autres, il décide de ne pas utiliser l’information dont il dispose.
Comme nous allons le voir cette décision peut être rationnelle, le herding rationnel peut se
manifester dans les marchés financiers sous deux formes à savoir : la cascade
informationnelle, et le herding basé sur la compensation.
(1) Cascade informationnelle :
Les travaux des auteurs précités portent sur des opportunités d’investissement qui supposent
la constance des prix. Or, dans un contexte financier, le prix est la seule courroie de
transmission de l’information. En cela, leurs résultats ne peuvent guère être transposés aux
marchés financiers. La première application du herding aux marchés financiers revient à
Avery et Zemsky (1998).
Bien évidemment, une cascade informationnelle ne peut jamais se produire dans un marché
efficient aux sens fort. En effet, quand les prix reflètent l’ensemble des informations (y
compris les actions des agents précédents), les agents seront indifférents à acheter ou vendre
un actif.
Avery et Zemsky (1998) ont ajouté une autre dimension à l’incertitude concernant la
pertinence de l’information détenue par les agents. Supposons que le marché est scindé en
deux groupes. Le premier «H» contient des agents détenant des informations privées
pertinentes (pH proche de 1) tandis que le second «L» contient des agents détenant des
informations privées contenant du bruit (pL proche de 0.5). A cela s’ajoute le fait qu’aucun
des agents ne sait vers où penche la majorité. Autrement dit, la proportion de chaque groupe
est inconnue. Dans un tel cadre, même si le marché est efficient au sens semi-fort, dans la
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mesure où les prix incorporent la totalité de l’ensemble de l’information publique, une
cascade informationnelle peut se déclencher à tout moment.
A titre illustratif supposons un jeu à information incomplète11
. Ce jeu concerne un groupe
hétérogène de joueurs qui font face à la même situation à savoir la décision d’investir ou non
dans un actif. Plus formellement, les joueurs ont le choix entre deux décisions :
Si cela signifie que le signal observé par le joueur i est un bon signal et donc celui-ci va
investir : . Et inversement, quand le signal inféré est mauvais ( ), le joueur i ne
va pas investir :
.
Supposons aussi que les joueurs peuvent appartenir aux groupes H et L. De surcroît, les
joueurs appartenant au premier groupe forment la majorité, cependant cette information est
inconnue. Ajoutons aussi que la bonne décision à faire consiste à ne pas investir. Cela dit, le
joueur i ne peut inférer l’information détenue par les autres qu’à travers le prix de l’actif. Le
premier joueur à investir se base uniquement sur l’information qu’il détient alors que les
autres qui le succèdent se baseront tant sur l’information dont ils disposent que sur les
décisions des joueurs antérieurs. De surcroît, tous les investisseurs sont rationnels dans lamesure où ils appliquent correctement la loi de Bayes. Pour le premier joueur, la loi de Bayes
s’énonce comme suit :
(2.1)
Pour les joueurs ultérieurs, elle devient :
(2.2)
Avec
Supposons que les deux premiers joueurs à investir appartiennent au groupe L et les troisième
et quatrième joueurs appartiennent au groupe H. Selon l’équation (2.1), le premier joueur va
11Cet exemple est inspiré de l’article de Bikhchandani et Sharma (2001)
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suivre son signal et investir. Ensuite, le deuxième joueur va investir à son tour puisque son
signal, bien qu’il soit incorrect, est renforcé par l’équation (2.2). En appliquant la loi de
Bayes (équation (2.2)), le troisième joueur va faire fi de son signal et investira. En effet, le
signal de ce dernier est annulé par le signal d’un des premiers joueurs. En consultant le prix
de l’actif, le quatrième joueur appartenant aussi au groupe H conclut que les premiers joueurs
(y compris le troisième) ont un signal positif à l’égard dudit actif, et investira à son tour.
Ainsi, une cascade informationnelle se déclenche. En présence de cette dernière, l’information
détenue par les joueurs n’est plus incorporée dans les prix.
Il est à souligner que les cascades informationnelles sont de nature idiosyncratique et se
détruisent très vite. Elles sont idiosyncratiques dans le sens où des événements aléatoires
combinés avec les décisions des premiers agents déterminent le comportement des agents qui
vont suivre. D’ailleurs à travers l’exemple, nous avons vu comment une minorité, ayant tort, a
pu dévier la décision de la majorité ayant raison. Cela dit, les cascades informationnelles se
détruisent vite car, avec l’avènement d’une nouvelle information publique, les agents vont se
rendre compte de leur erreur. Dans l’exemple précédent, la cascade informationnelle entraine
dans un premier temps une hausse des prix due à la forte demande des agents. Cela dit, quand
elle se détruit, les agents vont vendre massivement l’actif, conduisant ainsi à une baisse des
prix. D’où un excès de volatilité qui n’est pas lié aux fondamentaux de l’actif.
En somme, quand le marché est efficient au sens fort (l’incertitude est liée uniquement à
l’investissement) une cascade informationnelle ne peut pas se produire. Cependant, quand le
marché souffre d’une asymétrie d’information (efficience aux sens semi-fort et faible), ces
dernières peuvent sévir à n’importe quel moment même si tous les investisseurs sont
rationnels.
Il est à signaler que les agents jouent un rôle non négligeable concernant cette asymétrie. En
effet, les actions des agents tendent vers un équilibre de Nash dans le sens où le herding peut
être inefficient comme le cas de l’exemple. Si les joueurs étaient altruistes alors l’équilibre
serait Pareto-optimal. Formellement, si les agents doivent maximiser non seulement leur
utilité mais aussi celles des autres agents, alors les prix reflèteront toute l’information.
Revenons au troisième joueur, si ce dernier est altruiste il devra faire part de l’information
dont il dispose aux autres. La seule façon de le faire est de ne pas investir, en cela le
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quatrième investisseur en appliquant la loi de Bayes serait indifférent à investir ou non12
. Et
s’il est altruiste à son tour, il décidera de ne pas investir. Ainsi, l’asymétrie d’information est
due en grande partie à l’ « égoïsme » des agents.
Toutefois, la détection d’un tel herding au niveau empirique est très dure. En effet, le premier
problème qui se pose est la détection entre un véritable herding et un herding fallacieux. Ce
dernier est caractérisé par un groupement des anticipations mais suite à une information
partagée par tous les agents. Dans un tel cadre, ces derniers ne s’imitent pas entre eux, mais
effectuent le choix le plus rationnel à faire.
(2) Le herding basé sur la compensation :
Ce deuxième type de herding rationnel est dû aussi à l’asymétrie d’information, mais cette
fois-ci d’une autre nature. En effet, le herding basé sur la compensation (Maug et Naik, 1996 ;
Admati et Pfleider, 1997) est lié à un problème d’agence confrontant un gestionnaire de fonds
(agent) à son employeur (principal). Etant donné que le dernier n’est pas sûr de la compétence
du premier, le principal embauche l’agent sous les termes d’un contrat. Ce dernier stipule que
la performance de l’agent doit être au moins égale à un b enchmark. Lequel peut être la
performance d’autres gestionnaires de fonds ou d’un indexe. Ainsi, l’agent est incité à imité le
benchmark menant ainsi au herding.
Plus formellement, la fonction d’utilité de l’agent peut être formulée comme suit :
(2.3)
Où et sont respectivement la rentabilité et le risque du portefeuille tandis que mesure
le degré d’aversion au risque. est la rentabilité du benchmark. La fonction est une
fonction hybride qui peut être une fonction de profit si l’agent surperforme le benchmark
comme elle peut être une fonction de coût si l’agent fait moins que le benchmark. La
concavité de cette fonction implique une asymétrie imposant à l’agent de fournir plus d’effort
en vue de rester le plus près possible du benchmark. Dans une telle optique, ce régime de
compensation éloigne l’agent du principe de diversification, menant ainsi à des portefeuilles
souvent inefficients (Brennan, 1993 ; Roll, 1992).
Maug et Naik (1996) ont focalisé leur analyse à un seul actif risqué, leur résultat ont aboutit à
conclure que ce type de compensation mène à un herding efficient éludant, de surcroît, les
12Les actions favorables des deux premiers joueurs seront annulées par les actions du troisième et quatrième
joueurs.
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problèmes afférents à la sélection adverse et au hasard moral. Toutefois Admati et Pfleider
(1997) ont élargit l’analyse à plusieurs actifs risqués et ont trouvé que le herding basé sur la
compensation est inefficient et ne permet pas de surmonter les problèmes d’hasard moral et de
sélection adverse.
D’un point de vue empirique, Lakonishok, Shleifer et Vishny (1992) ont établit une mesure de
herding (ci-après LSV). Celle-ci consiste à étudier la tendance moyenne d’un groupe
homogène de gestionnaires de fonds à acheter ou à vendre certains actifs par rapport à ce
qu’ils pouvaient décider s’ils agissaient indépendamment. Cependant, la mesure LSV présente
un certain nombre de limites. La première est liée à la distinction entre herding
intentionnel/fallacieux. En effet, LSV mesure réellement la corrélation des décisions des
gestionnaires de fonds. Si le herding entraine une corrélation, l’inverse n’est pas vrai. De plus,
les gestionnaires peuvent appartenir à des fonds dont les objectifs sont divergents. Ainsi,
construire un groupe de gestionnaires homogène devient une tâche ardue.
En somme, même si le marché est efficient aux sens semi-fort et faible, l’hétérogénéité des
anticipations peut avoir lieu. En effet, quand les informations privées ne sont pas incorporées
dans le processus de formation des prix, l’asymétrie d’information sévit inexorablement. Cette
asymétrie conduit les agents (investisseurs individuels et institutionnels) à faire des décisions
qui ne sont pas optimales aux yeux de l’HEM. Bien évidemment, les agents, en pratiquant le
herding, alimentent davantage l’asymétrie d’information. Cela dit, avec l’avènement d’une
nouvelle information publique, les groupements d’anticipations liés au herding peuvent se
détruire assez vite. D’où le caractère éphémère du herding rationnel.
b) L’hétérogénéité des anticipations liée à l’irrationalité :
Si le herding rationnel est éphémère, celui proposé par la thèse comportementale est plus
structurel. En effet, en s’appuyant sur la limite à l’arbitrage, la finance comportementale
suggère que le herding peut être de longue durée. Nous allons présenter les théories
comportementales les plus abouties concernant ce sujet à savoir : la théorie du feedback
positive et les situations de sur-réaction et de sous-réaction des marchés.
(i) La théorie du feedback :
La théorie du feedback a été longtemps en dehors des discussions académiques. Ce n’est
qu’avec la réapparition des bulles spéculatives notamment celles qu’ont connu les Etats-Unis
(bulle internet) et le Japon que cette théorie est revenue à l’ordre du jour. Cela dit, cette
théorie reste mitigée en raison du manque de cohésion de ses arguments.
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Selon la théorie du feedback, les bulles se déclenchent quand les prix de certains actifs
augmentent faisant le succès de certains investisseurs (Shiller, 2003). Ce succès suscite une
attraction de ces actifs qui est amplifiée aussi bien par le bouche-à-oreille que par les médias.
Ainsi, bon nombre d’investisseurs, mus par des biais psychologiques tels que la surconfiance
et les biais afférents à la représentativité, investissent dans ces actifs sur la seule base que les
prix vont augmenter encore plus. Et donc, un premier feedback est crée. Quand le feedback
entame plusieurs boucles, une bulle spéculative se déclenche. En ce faisant, l’évolution des
prix est régie uniquement par le fait que les investisseurs anticipent que ces derniers vont
augmenter encore plus. Ainsi, plus aucune information n’est incorporée par les prix. Bien
évidemment, cette situation n’est pas soutenable et la bulle implosera menant ainsi à un krach
boursier qui peut être totalement indépendant des fondamentaux des actifs.
Greenwood et Nagel (2009) ont étudié la composition des portefeuilles des gestionnaires de
fonds durant la période de la bulle internet en segmentant les gestionnaires en deux catégories.
La première contenant des gestionnaires seniors expérimentés alors que la seconde renferme
des jeunes gestionnaires inexpérimentés. Leurs résultats ont montré que la deuxième catégorie
est celle qui a investit le plus dans les actifs technologiques et ce lors de l’apogée de la bulle.
Les gestionnaires expérimentés, quant à eux, ont très peu investi. Ainsi, l’inexpérience peut
être aussi un facteur conduisant à la constitution des bulles.
Il est à souligner que les agents rationnels peuvent contribuer aussi à la formation des bulles
(Barberis et Thaler, 2003). Sachant pertinemment que cette évolution est insoutenable, les
agents rationnels au lieu de contrattaquer en effectuant des arbitrages, achètent eux-aussi ces
actifs, au tout début de la formation de la bulle, et les revendent ensuite aux agents
irrationnels. Ainsi, une autre dimension s’ajoute à la limite à l’arbitrage. Cependant, il
convient de noter que cette assertion demeure subjective et ne peut être vérifiée
empiriquement.
Une autre explication du rôle des agents rationnels concernant les bulles spéculatives est
fournie par Cheng, Hong et Stein (2002). Ces derniers associent l’inertie des agents rationnels
aux restrictions légales sur la vente à découvert. En effet, quand une bulle spéculative se
déclenche, l’hétérogénéité des anticipations se scindent principalement en deux groupes. Les
premiers (agents irrationnels) y sont favorables et font preuve d’optimisme tandis que les
seconds (agents rationnels) s’y opposent et portent un jugement plutôt pessimiste.
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Cela dit, quand la vente à découvert est interdite, les agents rationnels ne sont plus en mesure
de contrattaquer la formation des bulles puisqu’un tel arbitrage devient risqué et coûteux.
Ainsi, le marché n’incorpore que le jugement optimiste des agents irrationnels. De surcroît,
plus les anticipations sont hétérogènes et plus le marché évaluera les actifs sur la base des
jugements des agents irrationnels. En se basant sur un questionnaire, Barsky (2009) a étudié
de plus près cette question, en l’appliquant à la bulle japonaise. Ses conclusions étaien t en
faveur de cette théorie.
A l’instar du herding rationnel, la détermination des bulles spéculatives est une tâche ardue
sur le plan empirique. Déterminer le motif des investissements des agents est presque
impossible. Ajoutons à cela le manque de données dû à la confidentialité, les économistes se
sont tournés vers d’autres méthodes telles que les questionnaires et l’économie expérimentale.
Cela dit, une théorie comportementaliste s’est penchée sur l’explication de l’hétérogénéité des
anticipations en se basant sur des résultats empiriques plus ou moins tangibles à savoir les
anomalies. Cette théorie fera l’objet de la section suivante.
(ii) Le marché en situation de sous-réaction et de sur-réaction :
Les anomalies observées en finance, concernant la taille (Banz, 1981), l’effet de levier
(Bhandari, 1988), la valeur comptable (Stattman, 1980 ; Rosenberg, Reid et Lanstein, 1985) et
le ratio bénéfice/prix (Basu, 1983), présentent des irrégularités qui rendent les rentabilités
prévisibles. Comme nous avons vu lors du dernier chapitre, ces irrégularités peuvent
renseigner soit sur l’inefficience des marchés soit sur l’inadéquation du MEDAF. Lors de
cette partie nous nous focaliserons sur la première proposition.
Dans une approche comportementaliste, les anomalies ont principalement deux implications
sur les marchés financiers. La première observée à court terme, concerne la présence d’une
auto-corrélation positive des rentabilités (Culter, Poterba et Summers, 1991). En d’autres
termes, les rentabilités passées expliquent les rentabilités futures dans le court-terme,
renseignant ainsi sur une sous-réaction du marché. Jegadeesh et Titman (1993) ont trouvé que
les stratégies momentum, consistant à acheter les actions ayant une bonne performance et à
vendre celles ayant affiché une mauvaise performance durant les trois derniers mois,
permettent aux investisseurs de réaliser des profits anormaux dans les 3 à 12 mois qui suivent.
Selon Barberis, Shleifer et Vishny (1998) la sous-réaction des marchés est attribuée au biais
de conservatisme. Si les agents sont affectés par ce biais alors les prix s’ajusteront aux
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nouvelles informations de façon graduelle. Entretemps, les stratégies momentum seront
bénéfiques.
La deuxième implication des anomalies est observée à long-terme. En effet, les rentabilités
passées et futures deviennent corrélées négativement (voire la figure 7). En cela, les actions
qui ont réalisé les rentabilités les plus faibles (élevées) durant les cinq dernières années ont
tendance à réaliser des rentabilités élevées (faibles) durant les cinq prochaines années
(DeBondt et Thaler, 1985). La sur-réaction des marchés est due aux biais liés à la méthode
heuristique de représentativité. En effet, certains investisseurs, utilisant cette méthode, ont
tendance à extrapoler trop loin les données historiques. Leur stratégie d’investissement est
qualifiée de naïve (Lakonishok, Shleifer et Vishny, 1994). Dans un tel contexte, certaines
stratégies deviennent profitables. Celles-ci consistent à vendre les actions ayant réalisé des
rentabilités historiques élevées et à acheter celles qui ont réalisé de faibles rentabilités dans le
passé. Cette stratégie est qualifiée, quant à elle, de contrariante13
.
13Ibid.
Période de sous-
réaction
Nouvel
équilibre
Ancien
équilibre
Arrivée d’une nouvelle information
Entre t 0 et t 3 , les rentabilités deviennent
auto-corrélées positivement. Dans cet
intervalle, une augmentation du prix en
t 1 engendre une augmentation du prix en
t 2
Figure 6 Situation de sous-réaction suite à une nouvelleinformation
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Hong et Stein (1999) ont élaboré un modèle traitant un marché sur lequel il existe deux typesd’investisseurs. Ces derniers ne peuvent traiter qu’un sous-ensemble de l’information
publique disponible. Les investisseurs, appartenant au premier groupe, se fondent uniquement
sur l’information dont ils disposent sans tenir compte des prix présents et passés. Il sont
appelés « newswatchers » (ci-après NW). Les NW peuvent s’apparenter aux investisseurs qui
se basent sur l’analyse fondamentale. En effet, ce type d’analyse se focalise d’avantage sur
l’anticipation des cours futurs en se basant sur des informations n’ayant pas trait aux
séquences historiques des cours. En revanche, les investisseurs du second groupe utilisent les
prix historiques comme unique source d’information. En effet, les informations liées aux
fondamentaux ne sont pas prises en compte. Ces investisseurs sont appelés « momentum
traders » (ci-après MT). Là aussi, les MT peuvent être apparentés aux analystes chartistes. Ces
derniers ne font confiance qu’aux séquences historiques des cours sans se baser sur les
informations pouvant toucher les fondamentaux où les informations spécifiques des actifs. Par
ailleurs, Il est à souligner que les NW et les MT sont dotés d’une rationalité limitée.
Quand les NW sont les seuls investisseurs sur le marché, le prix s’ajuste graduellement aux
nouvelles informations (sous-réaction du marché). Ainsi, les stratégies momentum sont
profitables. Les MT ont alors tout intérêt à entrer dans le marché. Une conclusion hâtive
pourrait suggérer que les MT, en effectuant les stratégies momentum, feront revenir les prix à
leur juste valeur. Toutefois, selon Hong et Stein cette conclusion est peu probable.
En effet, la demande des premiers MT fera augmenter les prix, exerçant ainsi une externalité
négative sur les MT qui vont suivre. Il est à rappeler que la seule information à la disposition
des MT est la séquence des prix historiques. Ainsi, une augmentation des prix est inférée
Ancien
équilibre
Période de sur-
réaction
Nouvel
é uilibre
Les rentabilités passées (de t -1 à t 0) sont
corrélées négativement avec les rentabilités
allant de t 0 à t +1
Figure 7 Situation de sur-réaction de la part desmarchés
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comme étant synonyme de l’arrivée d’une bonne nouvelle. Cependant, l’augmentation des
prix peut être due aussi à la demande des premiers MT à investir. Ajoutons à cela le fait que
les MT ultérieurs ne savent pas s’ils figurent parmi les premiers où les derniers de leur
groupe, ils investiront à leur tour sur la base de l’ex ternalité des premiers MT. Cela a pour
effet une augmentation excessive des prix. Ne pouvant augmenter indéfiniment, les prix
baisseront menant ainsi à une sur-réaction du marché. En somme, l’hétérogénéité des agents
peut vraisemblablement mener au passage d’une situation de sous-réaction à une situation de
sur-réaction de la part des marchés.
Même si la théorie avancée par Hong et Stein semble convaincante, les suspicions planent
autour de la validité des anomalies qui forment le socle de leur théorie. En effet, deux
questions sont à poser. La première question est intimement liée au problème des hypothèses
jointes. En effet, si les anomalies sont dues uniquement à l’insuffisance du MEDAF, il se
pourrait bien qu’elles soient des facteurs de risques non compris par le MEDAF. La deuxième
question, plus radicale, soupçonne la validité empirique et méthodologique des travaux
portant sur les anomalies. En d’autres termes, ces dernières peuvent être inexistantes en
réalité.
En vue de répondre à ces questions, nous allons présenter lors de la deuxième partie de ce
chapitre les réponses fournies par les partisans de l’HEM.
2. La riposte de l’HEM : entre modèle multifactoriel et suspicion
méthodologique.
a) Le modèle de Fama-French :
(i) Genèse et présentation du modèle :
Le modèle Fama-French (ci-après MFF) est un modèle multifactoriel qui préconise
l’explication de la rentabilité par le biais de trois facteurs. La singularité de ce modèle est
qu’il donne aux anomalies un aspect rationnel. De façon plus spécifique, les anoma lies,
engendrant des profits anormaux, existent bel et bien. Cela dit, leur existence ne peut être en
aucun cas considérée comme une limite de l’HEM. Bien au contraire, elles sont considérées
comme étant fondamentalement risquées.
Ainsi, MFF se veut une relève du MEDAF. A ce titre, Fama et French (1992) ont procédé à
des tests empiriques afin de mettre le lien entre la rentabilité et quatre variables capturant les
anomalies les plus notables : la taille mesurée par la capitalisation flottante, le ratio
bénéfice/cours, le levier d’endettement, le ratio de la valeur comptable/valeur de marché (ci-
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après BE/ME) ainsi que le beta du MEDAF. Leur étude a porté sur les actions de la New York
Stock Exchange (NYSE), de l’American Stock Exchange (AMEX) et du NASDAQ pour une
période allant de 1963 à 1990.
Dans un premier temps, les auteurs ont conduit des tests uni-variés. Autrement dit, ils ont
effectué des régressions linéaires simples en vue d’expliquer la rentabilité par chaque
variable. Les résultats de ces tests ont montré que toutes les variables étaient statistiquement
significatives hormis le bêta.
Dans un deuxième temps, ils ont réalisé un test multi-varié en régressant la rentabilité par
rapport aux cinq variables. Les variables inhérentes à la taille et à la BE/ME ont vu leur effet
se fortifier avec l’inclusion des autres variables. Plus encore, ces deux variables semblent
absorber l’effet de levier ainsi que le ratio bénéfice/cours. Ces résultats ont poussé Fama et
French (1993) de proposer le FFM sous la forme suivante:
(2.4)
Où est l’excès de rentabilité de l’actif i à l’instant t. est la prime de
marché. Notons ici que l’on ne parle plus du portefeuille du marché mais uniquement d’un
indexe représentatif de l’échantillon. est le terme d’erreur qui mesure le risque
spécifique de l’actif i.
La variable SMB « SMALL MINUS BIG14
» est une prime de taille tandis que la variable
HML « High Minus Low15
» est une prime de valeur. En effet, Fama et French ont préféré
exprimer ces primes sous forme de portefeuilles mimétiques. Ainsi, les facteurs taille et valeur
sont exprimés tacitement dans le modèle. SMB est un portefeuille mesurant la différence entre
la rentabilité des actions à petite capitalisation (SMALL) et celles à grande capitalisation(BIG). Cette différence est supposée être positive vu que les petites capitalisations sont plus
risquées que celle disposant d’une grande taille. De façon similaire, HML est un portefeuille
mesurant la différence entre la rentabilité des actions à ratio BE/ME élevé (High), appelées
aussi actions de valeur, et celle des actions à ratio BE/ME faible appelées actions de
14Petit moins grand
15Elevé moins faible
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croissance (Low). Là aussi, cette différence doit être positive car les actions de valeur sont
plus risquées que celles de croissance16
.
La prime de marché, quant à elle, n’a qu’un rôle secondaire dans l’explication de la
rentabilité. Effectivement, le rôle du marché se cantonne à faire le lien entre l’actif sans risque
et HML et SMB. D’après les résultats de Fama et French (1993), l’inclusion des deux
portefeuilles stabilisent le coefficient de la prime de marché autour de 1. Ainsi, les principales
explications de la rentabilité proviennent de HML et SMB.
Par ailleurs, le MFF se base sur une supposition selon laquelle tous les agents sont rationnels
(au sens de l’HEM). Dans une telle optique, les variables taille et BE/ME devraient être
interprétées comme étant des proxys capturant la sensibilité de la variation de la rentabilité à
l’égard d’un ensemble de facteurs de risques communs. De façon plus simple, ces variables
expriment une prime de rentabilité liée à des risques systématiques et donc non diversifiables.
L’argument avancé par Fama et French est de nature exclusivement empirique. En effet,
concernant les actions américaines de 1963 à 1990, les coefficients ainsi que les R² montrent
un lien solide entre la rentabilité et SMB et HML. De surcroît, l’alpha, non -significatif et très
proche de zéro, traduit une bonne spécification du MFF par rapport au MEDAF.
D’un point de vue empirique, FFM présente une certaine solidité. En effet, FFM explique
mieux que le MEDAF la variabilité de la rentabilité aux Etats-Unis (Fama et French, 1993),
au Japon (Fama et French, 1998) en Allemagne, Grande Bretagne et en France (Malin et
Veeraraghavan, 2004).
(ii) Interprétation des facteurs de risque et limites du modèle :
La robustesse empirique du MFF ne doit pas faire oublier un problème majeur concernant ce
modèle. En effet, ce dernier suppose que les primes de taille et de valeur sont des facteurs de
risque sous toile de fond d’efficience et de rationalité. Si tel est le cas, quelle signification
économique doit-on attribuer à ces deux facteurs ?
Une explication intuitive consiste à considérer les actions à petite capitalisation et celle de
valeur comme étant fondamentalement risquées. Cela signifie que les agents, étant rationnels,
vont détenir ces actions en contrepartie d’une rentabilité supérieure étant donné la relation
positive entre le risque et la rentabilité. Ainsi, les profits liés à la taille et à la valeur ne sont
pas anormaux mais plutôt fondamentaux.
16Voir la page ??; pour plus d’explication concernant le calcul des deux portefeuilles.
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Toutefois, pour que cette explication soit confirmée, un lien doit être établit entre ces
variables et l’économie. Sans cela, le MFF n’a plus aucun sens. Une première tentative
d’explication concerne le lien entre les facteurs expliquant les bénéfices (dividendes, chiffre
d’affaires…) et les facteurs expliquant la rentabilité. En se basant sur le fait que les seconds
facteurs reflètent les premiers, Fama et French (1995) ont essayé de définir la taille et le ratio
BE/ME comme étant des indicateurs de bénéfices. A travers des tests empiriques, ils ont pu
faire le lien entre la part expliquée du bénéfice et celle de la rentabilité par le marché et la
taille. Toutefois, ce lien n’a pas pu être démontré pour le ratio BE/ME. La raison en est
l’incorporation du bruit dans la mesure des chocs des prévisions des bénéfices17.
Malheureusement, même si le lien bénéfice/rentabilité a été démontré concernant le marché et
la taille, la raison économique qui motive ce lien reste toujours inexpliquée.
D’autres auteurs ont tenté de revêtir le MFF d’un aspect théorique. Ces tentatives sont, pour le
moins, atypiques en théorie financière, vu que l’on pose tout d’abord la conclusion et l’on
cherche ensuite son explication. En effet, le point de départ consiste à identifier les actions de
valeur (ratio BE/ME élevé) comme étant souffrantes d’une détresse financière et les actions
de croissance (ratio BE/ME faible) comme étant des firmes affichant une bonne santé
financière (Chan et Chen, 1991). D’une autre part, les actions à petite capitalisation sont
considérées comme étant économiquement fragiles tandis que les grandes capitalisation sontperçues comme étant des firmes solides sur le plan économique (Fama et French, 1995). En
bref, la taille (capitalisation boursière) renseigne sur une détresse économique tandis que la
valeur (ratio BE/ME) renvoi à une détresse financière.
Ainsi, HML et SMB renseignent sur une détresse relative. En effet, les firmes, réalisant des
bénéfices faibles, disposent d’un ratio BE/ME élevé ainsi que d’un coefficient positif
concernant HML (
). Et inversement, les actions, affichant des bénéfices élevé disposent,
d’un ratio BE/ME faible. Par conséquent, le coefficient pour ces firmes est négatif.
Similairement, les firmes de petite taille, caractérisées par une petite capitalisation, disposent
d’un coefficient relatif à SMB () positif alors que les grandes capitalisations ont un
coefficient négatif.
Xing et Vassalou (2004) ont fait lien entre le facteur SMB au risque de défaut en utilisant le
modèle de Merton. D’une autre part, Li, Xing et Vassalou (2000) ont investigué le lien entre
les informations inhérentes à l’évolution du PIB et les facteurs HML et SMB pour dix pays.
17Ibid.
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Kelly (2003), en se basant sur 18 pays, suggère que les facteurs du MFF contiennent une
information à propos de l’inflation et de la croissance. En effet, SMB est corrélé négativement
avec l’inflation et positivement avec la croissance du PIB. D’une autre part, HML est corrélé
positivement avec la croissance mais n’a aucun lien avec l’inflation. De plus, Campbell,
Hilsher et Szilagyi (2008) se sont basés sur la détresse financière des entreprises. Selon ces
auteurs, leurs conclusions suggèrent que les entreprises en détresse financière délivrent une
rentabilité anormale qui peut de surcroît être la locomotive du pouvoir explicatif du MFF.
Cela dit, il convient de noter que ces travaux affrontent deux limites. L’un d’ordre
méthodologique : la nature des tests conduits sont questionnables, alors que l’autre concernent
une ambiguïté de finalité. En effet, si un lien entre une quelconque variable macroéconomique
et les facteurs est établit, l’effet de cette variable sur les facteurs restent imprécis dans le sens
où son effet ne peut être départagé entre les deux facteurs. De surcroît, la pérennité de ce lien
n’a pas pu être vérifiée.
Le fait que le FFM est dénué de tout aspect théorique, le rend une proie facile aux critiques.
Effectivement, le succès empirique du modèle n’a pas pu rassembler l’unanimité des partisans
de l’HEM et encore moins des comportementalistes. Daniel et Titman (1997) ont avancé que
les facteurs HML et SMB peuvent être liés aussi bien aux fondamentaux des entreprises qu’à
l’irrationalité des agents.
Plus encore, Arnott, Markowitz et al. (2007) ont montré que les effets valeur et taille ne
capturent que le bruit incorporé dans le processus de formation des prix. En effet, quand le
bruit sévit sur le prix d’un actif, sa rentabilité anticipée conditionnée par le prix ou par le ratio
prix/dividende baisse avec ces deux indicateurs. Cela dit, les rentabilités élevées des ces actifs
ne sont nullement dues à un risque systématique mais plutôt au bruit qui révise les prix et/ou
les ratios prix/dividendes des actifs à la baisse. Autrement dit, les rentabilités des actifs,
particulièrement ceux à petite capitalisation et à ratio BE/ME élevé, engendrent des
rentabilités élevées parce qu’ils sont sous-évalués. Selon Arnott, Markowitz et al.18
l’hypothèse rationnelle préconisée par Fama et French est à proscrire.
Une autre implication importante concerne le fonctionnement du marché en présence d’un
bruit négatif. En effet, dans une telle situation la rentabilité espérée inconditionnelle n’est
plus tributaire uniquement du bêta mais aussi de la volatilité idiosyncratique ainsi que de la
18Ibid.
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volatilité du bruit. En d’autres termes, le risque spécifique, ou une partie du moins, peut être
non diversifiable.
D’autres travaux ont tenté de peaufiner ou de rivaliser avec le MFF, en offrant, toutefois, des
modèles qui s’inscrivent dans la même veine que ce dernier. A titre d’exemple, Carhart
(1997) a ajouté une variable au MFF à savoir la variable « Winners Minus Loosers » WML en
vue de tenir compte du momentum. D’un autre côté, Chen, Novy-Marx et Zhang (2010) ont
établit un modèle multifactoriel, assez similaire au MFF, qui comporte la prime du marché et
deux autres variables. La première, appelée « Low Minus High » LMH, tenant compte d’un
facteur d’investissement. La seconde, appelée « High Minus Low » HML, renseigne, quant à
elle, sur la rentabilité sur les actifs. Selon eux, leur modèle est nettement supérieur au MFF.
Toutefois, il est important de signaler que même si ces modèles surpassent le MFF sur le plan
empirique, ils n’ont pas pu combler le déficit théorique. En effet, tant qu’une interprétation
économique n’est pas attribuée aux différents facteurs, l’usage du MFF, ainsi que de ses
extensions, demeure pernicieux.
En cela, force est de constater que le MFF reste, pour l’instant, un modèle purement
heuristique. A cet égard, les critiques se sont abattues sur le MFF sur tous les fronts allant des
partisans de l’HEM jusqu’aux financiers comportementalistes. Les principaux critiques
provenant des partisans de l’HEM sont présentées dans la sous-section suivante.
b) Suspicions méthodologiques : quand les anomalies deviennent artéfacts.
Les auteurs, qui doutent de l’honnêteté empirique des travaux sur les anomalies, constituent
l’aile dure de l’HEM. En effet, ces auteurs se sont farouchement opposés tant envers les
comportementalistes qu’envers le MFF. Selon les opposants aux anomalies, celles-ci
disparaissent, se renversent ou s’atténuent dès que la littérature qui les documente soit
publiée. Cet état de fait mène à faire deux conclusions. La première questionne directement la
validité statistique des anomalies. En effet, ces dernières peuvent être le fruit d’une simple
aberration statistique. En revanche, la deuxième suggère qu’il se peut que ces anomalies
existent ; mais dès qu’elles deviennent connues, les investisseurs s’emparent de ces
opportunités menant ainsi à leur disparition.
Les fervents défenseurs de l’HEM suggèrent que certains auteurs ont été tellement emportés
par la frénésie de la « quête des anomalies », qu’ils se sont focalisés exclusivement sur la
recherche de résultats surprenants. De surcroît, les tests ultérieurs de ces anomalies
concernent des échantillons qui présentent les mêmes caractéristiques que celles des premiers
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articles qui les ont trouvés. Ainsi, ce processus peut mener vraisemblablement à des résultats
erronés.
En effet, Lo et MacKinlay (1990) ont avancé le phénomène du data-snooping selon lequel les
tests effectués de telle manière ne peuvent guère être généralisés. Plus particulièrement, les
tests des anomalies, souffrant du biais du data-snooping, sont ceux qui répliquent les mêmes
conditions de l’article de référence traitant de l’anomalie. En effet, en reprenant les mêmes
conditions de l’article de référence, le test ne peut être qu’en faveur de l’anomalie. La figure 8
montre le schéma méthodologique général de ces tests. Ces derniers sont influencés
particulièrement par la période, le marché ou le segment (un secteur ou une catégorie
d’actions) étudiés et l’horizon (quotidien, mensuel, trimestriel…). Bref, le data-snooping met
l’accent sur le fait d’apprivoiser les données de telle sorte à ce que le test aboutisse au résultat
escompté par l’auteur.
Une solution à ce problème consiste à tester l’anomalie en question sur une base neutre et
indépendante. Pour ce faire, l’auteur doit effectuer son test sur d’autres marchés ou bien sur
des dates et/ou des horizons différents que ceux utilisées par l’article de référence. Cela dit, il
est important de souligner que le data-snooping est une arme à double tranchant. En effet,
tester les anomalies dans le seul but de les réfuter peut mener à choisir des données ayant des
caractéristiques totalement opposées à celles trouvées par l’article de référence. Ainsi, les
données sont domptées de la même façon que les partisans des anomalies. La conséquence de
ces travaux, d’un côté comme de l’autre, est très dangereuse dans le sens où l’avancée de la
science économique est sacrifiée sous l’autel des jugements d’opinions.
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Par ailleurs, si l’existence des anomalies est permise, alors les investisseurs individuels et
institutionnels saisiront l’opportunité de les corriger par le biais de l’arbitrage (Mackinlay,
1995). A titre d’exemple, Schwert (2003) a étudié l’évolution des anomalies après que la
littérature les documentant soit apparue. Ses résultats étayaient la thèse de la disparition post-
publication. Ses travaux ont porté sur les anomalies les plus connues à savoir les effets taille,
valeur, week-end et janvier. Ainsi, l’existence des anomalies ne peut être qu’éphémère, et
donc l’HEM prévaut à long-terme sur les marchés financiers. Toutefois, outre la limite à
l’arbitrage, cette conclusion avoue à demi-mot que les agents ne sont pas totalement
rationnels. En effet, si les investisseurs sont rationnels au sens de l’HEM, ils doivent, dès le
départ, connaître ces anomalies et les neutraliser. De surcroît, si les investisseurs n’agissent
sur les anomalies qu’après leur découverte par le cercle académique, celles-ci peuvent
disparaître. Cependant, rien n’empêche, dans ce cas, d’autres anomalies de se former. Par
conséquent, celles-ci ne vont être neutralisées qu’après leur découverte par les économistes.
Et donc, le déséquilibre peut être structurel.
Définition de la période Définition de l’horizon
Critères de l’anomalie
Hypothèses
Résultats
Tests
Rejeter l’hypothèse de
l’anomalie
Ne pas rejeter l’hypothèse de
l’anomalie
Choix du marché ou d’un segment
Figure 8 Schéma méthodologique des tests des anomalies
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En somme, les arguments des opposants aux anomalies comportent un certain degré de
subjectivité. Cela dit, leurs travaux renseignent sur une implication clef qui fera sans doute
avancer la science économique. Laquelle consiste à porter l’analyse des anomalies à un
niveau ex-ante. En effet, la quasi-totalité des travaux portant sur les anomalies ont été réalisés
à un niveau ex-post. Comme nous avons pu le voir cette analyse est limitée et suscite bon
nombre de critiques. D’ailleurs, l’une des principales limites du MFF est que tous les efforts,
qui ont été déployés, se sont cantonnés à un niveau ex-post contrairement au MEDAF. En
effet, les tentatives de certains auteurs qui ont pu mettre le lien entre les facteurs du MFF et
certaines variables macroéconomiques ont été vaines. La raison est simple, en effet, tant que
les canaux de transmissions entre ces variables et les facteurs n’a pas été établit ex-ante, le
MFF demeurera une méthode heuristique.
Post et van Vliet (2007) ont testé le MFF et le modèle à quatre facteurs de Carhart durant la
période pré-1963 en vue de tester le biais du data-snooping. Leurs résultats suggèrent que les
bonnes performances de ces modèles multifactoriels dépendent largement de la période post-
1963. Plus précisément, la taille perd son habilité en matière d’explication de la rentabilité
durant la période précédant l’année 1963. Ces résultats ont mené les auteurs à conclure que
ces modèles peuvent être liés soit au biais du data-snooping soit à des raisons autres que le
risque. Ces dernières ont trait particulièrement à la liquidité et aux coûts de transactions. Eneffet, plus la taille d’une entreprise est petite et plus les coûts de transactions qu’elles
engendrent sont élevés.
Synthèse :
A travers ce chapitre, nous avons pu voir, lors de la première section, les principales
implications de l’hétérogénéité des anticipations sur un plan théorique. La deuxième section,
quant à elle, nous a permis de voir la limite des études empiriques.
Concernant le herding rationnel, sa validation empirique demeure une tâche ardue vu le
manque de données et la difficulté de séparer entre le herding réel et fallacieux. D’une autre
part, l’hétérogénéité des anticipations liées à l’irrationalité d’une partie des agents se base
essentiellement sur les anomalies présentes sur le marché. Comme on l’avait vu, le test des
anomalies peut laisser à désirer. Ainsi, au problème des hypothèses jointes s’ajoute le biais du
data-snooping.
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