Olivier Demazet Voisins du ciel

Post on 07-Mar-2016

226 views 2 download

description

Recueil consacré à l'Au-delà, à la mort, à la fin de vie mais exprimé de manière amusante et divertissante

Transcript of Olivier Demazet Voisins du ciel

Olivier DEMAZET

VOISINS DU CIEL

MONTAURIOL - Poésie

- 1 -

Olivier DEMAZET

VOISINS du CIEL

Hors Textes : Henry Clairvaux

Préface : Jean-Jacques Hetzel

Montauriol-Poésie-Montauban

- 2 -

DU MÊME AUTEUR :

- Pages Anthologiques dans diverses revues, (1963-1995).

- Foi d'Animal

Les Paragraphes littéraires de Paris - 1978.

- Histoire de Dire

Aquitaine-Expansion, Bordeaux 1982.

- Silhouettes

IMF Production 1984, (Préface de Gilbert Patout).

- Natures Vives

IMF Production 1985, (Préface de Jean Darwel).

- L'Enfance de l'Art

La nouvelle Pléiade, (Préface de Vital Heurtebize), 1987.

- La Vie de Poème

(Préface de Jacqueline Delpy)

IMF Production 1990.

- L'Amour de Vous

La Nouvelle Pléiade - Montauriol - Poésie 1990

(Préface de V. Heurtebize).

- Numéro Spécial 13

Montauriol - Poésie 1993

- L’Éclair de la Nuit

Frédéric Maire COREP Bordeaux.

Olivier DEMAZET 1995

- 3 -

A ma mère

AVANT-PROPOS

J'ai voulu honorer la vieillesse quotidienne en termes

quotidiens, accessibles à nous tous qui serons vieux. Période de la

vie trop souvent méconnue, oubliée, ignorée. Il est délicat d'évoquer

la détresse, le désespoir, la rancœur par l'amour triste, par l'humour

noir. Il est agréable d'évoquer les plaisirs simples, la sagesse, la

confiance par l'amour serein, par l'amour simple. Il est poignant

d'évoquer les dernières années avec leurs souffrances, leurs

interrogations. Mais il est peut-être illégitime de les craindre. Ce qui

est sûr, c'est que la pensée des aînés réagit souvent aux problèmes

de la vie avec intensité.

La poésie va se nicher jusqu'au tréfonds de la vieillesse,

séquelle de la jeunesse, permanence de la vie.

- 4 -

PRÉFACE

Olivier DEMAZET est un poète du quotidien et de l'humain,

observateur de la souffrance et des infimes joies de la vie. On

rencontre chez lui une communion avec les humbles.

Mais il est aussi artisan du langage, celui qui joue avec les

mots, les triturant ou en créant de nouveaux. Cela l'amène aussi à

chercher l'envers d'un concept, pratiquant ainsi ce qu'exprimait

Emmanuel Mounier lorsqu'il affirmait l'intérêt de "casser une idée

comme on casse une noix", pour voir ce qu'il y a dedans.

Avant lui, Ronsard, Joyce ou Boris Vian se sont livrés à ces

exercices révélateurs de sens.

Homme de culture, et un des derniers "honnêtes hommes", si

l'on s'en réfère à la conception de Montaigne ou de Molière, il observe

avec recul l'absurdité ou les incohérences de la "Comédie humaine",

jetant un œil lucide mais bienveillant sur la vie.

Sa poésie est inattendue où la forme colle au fond sans plan

préétabli, ni préjugé de pied ou de rime. Ne nous étonnons donc pas si

ce n'est pas une poésie qui marche au pas. Le rythme vient

naturellement quand le sens l'appelle.

- 5 -

Ce recueil fait suite à une série déjà fort respectable de sept

autres répandus à travers l'hexagone et ailleurs.

Oserais-je révéler aussi qu'Olivier Demazet préside avec

maestria et autorité aux destinées d'une revue poétique, faisant office

de rédacteur en chef, d'éditorialiste, voire d'éditeur, drainant par là-

même une pépinière de jeunes poètes de 15 à 90 ans du Tarn-et-

Garonne à toutes les régions de France, et mettant au service de

créateurs moins chevronnés une expérience mûrement éprouvée, à la

fois de l'écriture et des milieux littéraires.

Je conclurai cette modeste présentation, à titre de

collaborateur et ami, en souhaitant bon vent et longue vie à ces

poèmes,

Jean-Jacques HETZEL

- 6 -

Deux hors-textes de Henry Clairvaux

« Ombres se rendant au bal par une nuit d’hiver »

- 7 -

MA MÉMOIRE Moi, vieille mère ...

Ma mémoire

est un trou noir.

Je n'entends plus

le temps.

Je n'amasse plus

l'espace.

Je ne sonne plus

personne.

Ma vie est un soir

fermoir.

Et pourtant,

chers enfants ...

Mes yeux de sentimence

foisonnent.

Les cieux de mes silences

raisonnent.

Et pourtant ...

Mon cœur vous aime tant !

Ô la solitude

de mon agitude !

Moi, vieille mère.

- 8 -

CE SERAIT

La naissance

ce serait comme

la prise du billet de départ

La jeunesse

ce serait comme

la durée du voyage

La vieillesse

ce serait comme

le voyage de retour

La mort

ce serait comme

le jet du billet dans la corbeille.

- 9 -

TOUT TOURNE

Notre Terre tourne autour du Soleil.

L'argent tourne autour de la terre

Le pays tourne autour de Paris

Le piéton tourne autour de l'agent

La ceinture tourne autour de la taille

Le grand vent tourne autour du clocher

Le coq fier tourne autour de la poule

Le gros loup tourne autour de l'agneau

Le corbeau tourne autour du cadavre

Le poivrot tourne autour de sa tête

Le valseur tourne autour de la valse

Le cadran tourne autour des aiguilles

Le pétale tourne autour de la rose

Et mon cœur tourne autour du bonheur

- 10 -

SOLITUDE

Je suis un sauvage aveugle

et sans quiétude

Ô solitude impitoyable

immensément triste

et rude.

Je suis un sauvage aveugle

et sans quiétude.

Ô solitude interminable

démente sinistre

et si rude.

POURQUOI ?

Pourquoi ai-je pour vous

fait tant de sacrifices ?

Un jour éteindrez-vous

votre feu d'artifice ?

J'ai donné tous mes doigts

Vous me tuez plusieurs fois.

J'ai donné mes deux yeux,

ma tête est votre jeu.

- 11 -

JOURNÉES

Journées trop longues

idées trop courtes

Journées trop courtes

idées trop longues

Aligner les journées

sur les idées

Aligner les idées

sur les journées

Des journées à idées ?

Des idées à journées ?

- 12 -

DESSERT

Jour d'anniversaire

dessert supplémentaire

de neiges éternelles

pour la vie fraternelle.

CUEILLEZ !

Cueillez !

Cueillez

les roses de la vie !

Où sont les roses ?

où est la vie ?

- 13 -

C'EST LE HIC

Hic multitechnique

prophète du fric.

C'est le fric

électronique informatique

télématique et bureautique.

C'est le hic

démagogique et illogique

politique étatique

Chomagique narcotique

inesthétique et frénétique.

c'est le hic spécifique

ou le hic crétinique.

C'est le hic érotique pour initiés.

C'est le hic cynique pour répudiés.

C'est le hic alchimique hermétique.

C'est le hic bien pratique mirifique

pour les citoyens-robots

pour les penseurs de robots.

Hic didactique

Hic dramatique

Hic apocalyptique.

- 14 -

PROGRAMME

Soyons bien sages

en héritage

et en devis.

C'est bon la vie !

Et construisons

cette maison

avec raison

pour les saisons

de frondaison

de floraison.

Et la retraite

sera bien faite.

Un tour de main

un peu de vin

un bon gâteau

quel beau tableau !

- 15 -

L'ENFER

Êtres du dernier âge

assoupis, presque morts

sur vos lits de douleurs !

Chers parents résignés

à vos jours désignés !

Doux vieillards allongés,

où se trouve votre âme ?

Pauvres vieux décharnés,

où est donc votre esprit ?

Sur la terre ou au ciel ?

Nul ne sait le dilemme,

mais votre cœur est là

qui, péniblement bat

pour tous ceux qui vous aiment

pour tous ceux qui vous laissent.

Je vois vos yeux qui pensent

à tout ce temps qui passe

pour souffrir sans mourir.

Je vois vos yeux qui pleurent

l'atrocité des jours,

l'énormité des nuits.

La parcelle de vie

que l'on vous attribue

sert encore de couronne

à votre dignité

mais de grâce, vivez

sur Terre comme au Ciel !

Finissent les supplices

de l'hôpital cruel !

Vienne la liberté

de vivre enfin sa mort,

cadeau de la Nature,

qui la donne en douceur.

- 16 -

MES ENNUIS

Moi, ton ami,

qui aime

tes thèmes,

j'ai suivi

ta thèse

à l'aise

et mes ennuis

de punaises

se taisent.

- 17 -

QUAND VOUS SEREZ

Quand vous serez bien vieille,

le soir, à la veillée,

je vous dirai, ma vieille,

vous avez trop veillé.

Quand vous serez bien vieille,

le soir, à la chandelle,

je vous dirai, ma vieille,

tenez-moi la chandelle.

- 18 -

OUTRE-BIERE

Vite arrêtez ce vacarme

de vos larmes.

Vos êtes bien plus belles

plus loin d'elles.

Vous êtes bien plus beaux

sans cette eau.

Jetez ces muguets de buis

c'est la nuit.

Épargnez l'eau bénite

les redites.

Et ne desserrez pas

sur un triste apparat,

vos petits cœurs intrinsèques

à coups secs.

Plus de regret social

impartial

sur l'avis du journal

si banal.

Demain sachez que la vie

vaut le coup

d'être vécue gravie

à grands coups

que la mort est sommeil

en éveil.

- 19 -

Il est mort le doux aïeul

en aimant.

Il est mort votre aïeul

en souriant

de votre vie recluse

O méduses.

Sur de riches souvenirs

à venir

allez boire une bière

comme hier.

A ta santé l'aïeul

sur ton seuil.

- 20 -

LES ANNÉES

Oui c'est dommage

que les années

aient mis

tant de ravages

sur votre visage.

Mais quel bonheur

que les années

aient mis

tant de chaleur

dans tout votre coeur.

- 21 -

LE DERNIER QUART D'HEURE

Il suffisait de tenir

le tout dernier quart d'heure.

Il suffisait de gémir

les dernières torpeurs.

Il suffisait de tarir

les dernières douleurs.

Il suffisait de mourir

dans l'avant-dernier heurt.

Il suffisait de bien vivre

à chaque bon quart d'heure.

Il suffisait de bien rire

un ultime quart d'heure.

- 22 -

AUX GRANDS HOMMES

Il fut diplômé

de sciences politiques

et devint

grand Commis de l’État.

Aux Grands Hommes

la Nation reconnaissante.

Il fut Diplômé

de sciences poétiques

et devint

Grand Démis de l’État.

Aux Grands Hommes

la Nation méconnaissante

LES MONDES

Il existe

le beau monde

le demi-monde

le mauvais monde

le tiers monde

le quart monde

dans le monde entier

jusqu'au bout du monde

jusqu'à la fin du monde

il y avait beaucoup de mondes

- 23 -

LE RÊVE

Ah ! Le rêve ?

On en crève !

Le bonheur ?

On en meurt !

Et la mort ?

on en vit !

- 24 -

LES COUPS

- Donne-moi un coup de main

- Je n'ai plus les mains libres

- Jette-moi un coup d'œil

- Je n'ai plus d'œil

- Lance-moi un coup de pied

- Je n'ai plus de pied

- Alors un coup de tête

- J'ai perdu la tête

- A force de prendre des coups,

on ne tient plus le coup.

EN DÉCOUDRE

- Je ne peux me résoudre aux foudres

de ma femme

- Enfuis-toi et prends donc la poudre

de ses flammes.

Puis tu vas les dissoudre

dans son âme.

C'est fini d'en découdre,

Tu le clames.

- 25 -

TEXTE DU BON CANCRE

HISTORIQUE

Au village, c'est la fête de l'Armistice. Les gendarmes et

les pompiers, décorés d'ifs, étaient entourés de colonels. Nous

fîmes le tour de la Place, tandis que la cloche nous

accompagnait. La musique entama son morceau. Ayant fini

de jouer, Monsieur le Maire sortit une feuille de sa poche et

nous fit son récit. Je fus touché à la pensée que je ne connus

pas mon grand-père qui, par sa bonne volonté, se fit tuer pour

la France.

1962 (C.E.P.)

- 26 -

COMMERCES

Mouroirs

dernières chambres

des derniers âges.

Pompes funèbres

derniers voyages

des dernières années.

Commerces de la mort

derniers deniers

des dernières vies.

- 27 -

MOI

De moi tu ne veux plus

si fatiguée de moi !

J'ai trop donné de moi.

Oh ! mais je n'en peux plus !

JE VOUS

Oui je vous aime

car je vous aime

Oui je vous hais

car je vous hais

Oui je vous tue

car je me tue

Je ne sais plus

Je n'y suis plus

- 28 -

LA DOULEUR

La douleur seule est grande

le malheur seul est grand

Ces rendez-vous

font l'homme doux

prétendez-vous

par dessus tout.

Commencez donc par vous

Surtout oubliez-nous.

- 29 -

MON DIEU, MON VIEUX

Mon Dieu,

Mon Vieux

Sentinelle des Cieux

et Lunettes des Vieux.

Pour un rien

si tu veux bien

écoute nos prières

ne datant pas d'hier.

Arrête les forfaits.

Interdis les méfaits

des Seigneurs de la Guerre

des Marchands de Misère,

des Patrons de finances,

des Gérants de Souffrance.

Ils savent ce qu'ils font,

ce qu'ils défont à fond.

Pardonne-leur,

mais les malheurs,

ne permets pas.

Et n'oublie pas

ces moins que rien

si tu veux bien.

Mon Dieu,

Mon Vieux

Sentinelle des Cieux

et Lunette des Vieux.

- 30 -

LES FUMAILLONS

Dans le cabinet de toilette

de l'enfantine maisonnette

de leurs grands-parents innocents,

les deux impossibles garnements

se sont gâtés, se sont camés :

ils ont allumé

une brochette

de cigarettes.

Ils ont toussé, pauvres poucets.

Ils ont pleuré, sont défoncés.

Tous les deux enivrés

comme si c'était vrai.

Arrivent les parents

dans un calme apparent.

Ils sentent la fumée

et s'écrient : "ça promet !"

"Matamores déjà morts !

Quelle engeance vous absorba ?

C'est le tabac qui vous abat ?

Et le cancer, à quoi ça sert ?

Vous êtes à l'envers, tout verts !"

Les fumaillons fluets

baissent le nez, déjà muets.

Ils rougissent, ergotent.

Leurs deux genoux flottent.

La carence ne paie pas

pour franchir un grand pas ...

- 31 -

UN ROC

C'était un roc

au regard d'acier

au cœur de pierre

à la volonté de fer.

Ses mains d'or

faisaient de l'argent.

Il est mort des calculs

noyés dans sa tête

qui prenait l'eau.

- 32 -

CHANT D'APPARAT

Passent les temps qui courent !

On se fait dur, fat, sourd.

Essayez ce recours :

envisager un tour

Orné de poésie,

de féerie, courtoisie

pour apprécier ailleurs

un monde bien meilleur.

Mais, attention : danger !

Rétention des projets ...

Démodés, interdits,

C'est un édit redit.

Poésie légitime

te voilà synonyme

d'hérésie, ineptie,

frénésie, inertie.

Poètes anonymes

qui pleurez dans l'abîme

de folies arguties

et fausses prophéties :

On vous veut hermétiques,

obscurs, ésotériques.

On vous veut plats, sans fièvre,

ni souffle, mais mièvres.

- 33 -

On vous veut tous conformes

aux modèles, aux normes.

Sinon, l'indifférence

vous noie dans la navrance.

- 34 -

Alors chers troubadours,

ignorez les vautours.

persistez dans vos œuvres,

évitez les couleuvres.

Gardez vos espérances,

vos sources et vos transes.

Fidèles à vous-mêmes,

les amoureux vous aiment.

Par votre transfigure

éclatera l'envergure.

Puis la vie s'ouvrira

sur un chant d'apparat.

Passent les temps qui courent

et qui aiment d'amour !

- 35 -

QUE RESTE-T-IL

Il est las,

elle est lasse.

Est-ce le glas ?

Est-ce la glace ?

Il est muet,

elle est muette.

Est-ce d'excès ?

Est-ce la diète ?

Il est inquiet,

elle est inquiète.

Est-ce un décès ?

Est-ce les miettes ?

La fin du jour ?

Que reste-t-il de leur amour ?

Et goutte

et croûte

- 36 -

CEUX QUI

Ceux qui

ne m'aiment pas

ne me respectent pas

sont encore de ce monde.

Mais ils n'existent plus

car ils ne vivent plus.

Ceux qui m'ont aimé

m'ont respecté

ne sont plus de ce monde.

Mais ils existent toujours

car ils vivent toujours.

- 37 -

NOCES DE DIAMANT

Mon mari, mon copain

prends ma main

Ton cœur d'or prend essor

Ô ma Femme chérie

Tu souris

toi ma perle

qui déferles.

Jour diamant

gentil vent

Nobles noces

sans caresse

Soir divin

Feu du vin

Pain d'écrin

Eau-satin

Dure vie

qui gravit

Joie, qui rit

de féerie

Fin de vie

mais ravie

d'amour fort

sans retors

- 38 -

DANS LE NOIR

- Que faites-vous ce soir dans le noir parmi vos idées

noires ?

Vous faites du marché noir ?

- Non, du travail noir à broyer du noir ...

- Mais c'est de l'humour noir ?

- Non, de la magie noire. Noire jusqu'à l'horizon noir du

monde noir.

Mais par ces termes noirs, il faut bien tout voir en noir :

c'était écrit au tableau noir.

- 39 -

LA SOUPE A L'AIL

- Pourquoi recules-tu quand je parle ?

- Il faut bien prendre parfois du recul.

- Pourquoi fais-tu la tête quand je parle ?

- Ce n'est pas un coup de tête.

- Pourquoi grimaces-tu dès que je parle ?

- Je n'en fais pas une soupe de grimaces.

- Alors tu ne peux pas me sentir ?

- Tu sens la soupe à l'ail !

- 40 -

A L'ENDROIT

Aurais-je fait un cauchemar

de canard de barbarie ?

Le lion donnait la viande au dompteur

le cheval montait sur le cavalier

le chien promenait son maître en laisse

le coq se déguisait en pendule à quartz

la souris dévorait le chat

la vache trayait la fermière

les soldats passaient les généraux en revue

les voleurs arrêtaient les gendarmes

les fautifs jugeaient les jurys

les élèves notaient leurs maîtres

l'orchestre dirigeait le chef

les ouvriers recevaient les patrons au bureau

les malades soignaient les médecins

les infirmières faisaient fortune

les morts ressuscitaient les vivants.

Je me sentais tout à l'envers

dans ce monde à l'endroit.

- 41 -

MÊME

Sur deux choses je louche

les gâteaux et ma couche.

Vivent les achats, vive la fuite

se dit toujours Mémé-Dynamite

qui pense au réveillon

à la bûche au rillons.

C'est tous les jours Noël.

Ma vie est une fête éternelle.

- 42 -

A MA MÈRE

Si tu savais, ma mère ...

Que tu peux être fière !

Tu m'as donné le souffle

de la vie

Tu m'as donné le souffle

poésie.

Je me suis fait poète

pour tes fêtes.

M'as-tu lu ?

Suis-je lu ?

Qu'importe

si fermées sont les portes.

Tes souffrances

m'ont donné l'espérance.

Même mort en ta tête un poète

est toujours en ton cœur un poète.

- 43 -

PIÈCES MONTÉES

- Ça y est !

Il est encore remonté

J'en suis tout démonté !

- C'est elle qui l'a remonté

Elle aime bien

les pièces montées.

GARAGE

- Alors, chéri,

la mécanique est usée ?

- Tu sais, chérie,

je suis sur la voie de garage.

- 44 -

VOS SILENCES

Vous qui écoulez vos vacances dans un petit coin de

France, que vous ai-je donc fait pour mériter tant de silence ? Que

vous ai-je donc fait pour être digne de votre indifférence ? Pourquoi

parcourir des pays inconnus au lieu de ressentir les souvenirs

communs ? Oublierez-vous le berceau du pays ?

Au bord, seriez-vous, d'un précipice tout noir, creuset de

l'infamie où morts sont les amis ? Un bandeau aveuglerait-il l'espace

de l'avenir jusqu'à ne plus sourire, d'un cœur ouvert, sans travers et

sans fardeau, à celui qui vous fît sans défi moins de mal que de bien

à celui qui vous aime pour un rien ?

- 45 -

LA BOULE

Mon vieux copain fait le fou ...

C’est le plus grand manitou

de la Pétéaénque dès qu’il joue.

Partoput, il fait des jaloux

en gagnant toutes les coupes,

désespérant ceux qui loupent.

A Toulouse et puis Marseille,

il s’éclate ou s’émerveille.

Il court, il crie, saute et rit :

la victoire est à ce prix.

Champion de boules bien né,

il doit toujours s’entraîner.

Sa vie ? C’est le boulailler :

boulailler, c’est travailler.

Admirable est son mérite,

car, par la boule, il médite.

Les travailleurs vont en foule,

loin des trésors de la boule :

Labeur ? Art de la férule

réservé aux pauvres mules !

Il vaut mieux coincer la bulle

hors de l’ennui qui pullule.

18/03/88

- 46 -

MALADIE D'AMOUR

Maladie d'amour

se guérit toujours

et partout

dans un petit trou

tranquille

fertile.

- 47 -

MA MÈRE, ELLE ...

Ma mère

elle naquit

dans les flonflons

la nuit

d’un quatorze juillet.

Ma ère

elle jaillit

à pleins poumons

au bruit

de la joie vanillée.

Ma mère

elle vécut

dans les saisons

de suie

d’une vie étrillée.

Ma mère

elle mourut

dans les ronrons

qui fuient, ...

un jour de juin mouillé.

- 48 -

L'ASPIC

L'aspic nous mord

l'aspic nous pique

l'aspic envenime

l'aspic assassine.

L'esprit si fort

l'esprit viatique

l'esprit nous ranime

l'esprit nous vaccine.

- 49 -

VIVRE !

Église silence

Hôpital silence

École silence

Avenue vacarme

HLM vacarme

Vidéo vacarme

Que choisir

Partir

dormir ?

Non vivre

Hors du silence

Hors du vacarme

- 50 -

BLINDE

Tu connais certes

le tank blindé

la voiture blindée

la porte blindée

le blockhaus blindé

le cœur blindé

le monde blindé

la vie blindée.

Eh bien sais-tu

que je suis aussi blindé

qu'un blindé

bien blindé ?

- 51 -

COEUR ET VENTRE

Certains ont

le ventre plein

et le cœur sec.

D'autres ont

le ventre creux

et le cœur gros.

Tout est question

de cœur

au ventre.

- 52 -

LE FAUX POETE

Le faux poète

que rien n’arrête

comptait les pieds

de son poème.

Il se méfiait

d’écrire même

des vers moulus

tout dissolus.

- 53 -

HAUT LES MAINS !

- Haut les mains, bonhomme !

Vieux, sois de ton somme !

- Je vous préviens :

je n’ai rien,

je ne suis rien.

Juste un homme !

Mais je suis bien !

- 54 -

BILLEVESÉES

Mais pourquoi tant de sang versé ?

Pourquoi tant de bile versée ?

Pourquoi ces larmes déversées ?

Pour tout ces billevesées

faites pour diviser,

désintégrer, bouleversa

et ainsi visser

un monde renversé.

- 55 -

EN CE MONDE

En ce monde qui berne,

il ne faudrait pas prendre

nombreuses gens de cœur

pour des enfants de cœur,

à qui l’on pourrait vendre

toutes les balivernes.

- 56 -

ABSENCE ...

Qu'est-ce que l'éternité ?

l'absence de temps

Qu'est-ce que l'immensité ?

l'absence d'espace

Qu'est-ce que l'universalité ?

l'absence de monde

- 57 -

BIOGRAPHIE

Olivier DEMAZET

Instituteur honoraire né à Tours en 1930, qui a enseigné à Paris et

Montauban jusqu'en 1989 dans l'Enfance Handicapée.

Auteur de 9 recueils.

Président-Fondateur et Rédacteur de la Revue Association Montauriol-

Poésie (1990)

Membre de la Société des Gens de Lettres de France (1986).

Membre de la Compagnie des Écrivains de Tarn-et-Garonne (1993).

Membre Associé de l'Académie de Montauban (1993).

Participant à plusieurs autres Associations et Sociétés de Poésie.

La poésie d'Olivier Demazet a été présentée et dite dans plusieurs

émissions et récitals.

***

Dépôt légal à parution.

- 58 -

S O M M A I R E

- AVANT-PROPOS 3

- PRÉFACE 4 et 5

MA MÉMOIRE 8

- CE SERAIT 9

- TOUT TOURNE 10

- SOLITUDE 11

- POURQUOI ? 11

- JOURNÉES 12

- DESSERT 13

- CUEILLEZ 13

- C’EST LE HIC 14

- PROGRAMME 15

- L’ENFER 16

- MES ENNUIS 17

- QUAND VOUS SEREZ 18

- OUTRE-BIERE 19

- 59 -

- LES ANNÉES 21

- LE DERNIER QUART D'HEURE 22

- AUX GRANDS HOMMES 23

- LES MONDES 23

- LE RÊVE 24

- LES COUPS 25

- EN DÉCOUDRE 25

- TEXTE DU BON CANCRE

HISTORIQUE 26

- COMMERCES 27

- MOI 28

- JE VOUS 28

- LA DOULEUR 29

- MON DIEU, MON VIEUX 30

- LES FUMAILLONS 31

- UN ROC 32

- CHANT D’APPARAT 33

- 60 -

- QUE RESTE-T-IL 35

- CEUX QUI 36

- NOCES DE DIAMANT 37

- DANS LE NOIR 38

- LA SOUPE A L’AIL 39

- A L’ENDROIT 40

- MÊME 41

- A MA MÈRE 42

- PIÈCES MONTÉES 43

- GARAGE 43

- VOS SILENCES 44

- LA BOULE 45

- MALADIE D’AMOUR 46

- MA MÈRE, ELLE ... 47

- L’ASPIC 48

- VIVRE ! 49

- BLINDE 50

- COEUR ET VENTRE 51

- 61 -

- LE FAUX POÈTE 52

- HAUT LES MAINS ! 53

- BILLEVESÉES 18

- EN CE MONDE 55

- ABSENCE ... 56

- BIOGRAPHIE 57