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Mission Inter-agences sur l’axe Bambari–Kouango–Zangba–Mobaye-Alindao
(Préfectures de la Ouaka et de la Basse Kotto)
du 20 au 25 Juin 2016
Rapport conjoint de la mission
HCR, OMS, Espérance, COHEB, COOPI et OCHA
Mission IA Axe Bambari–Kouango–Zangba–Mobaye-Alindao-Bambari, du 20 au 25 Juin 2016
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I. Principales recommandations de la mission
Problématique Action/Recommandation Responsable Echéance
Protection des
civiles dans la
SP de Zangba
Plaidoyer auprès de la MINUSCA pour le renforcement de sa présence
(notamment par la multiplication des barrières au-delà de Zangba centre)
OCHA Urgent
Mise en place d’un mécanisme de monitoring de protection dans la Sous-
préfecture de Zangba
Cluster Protection Sitôt que
possible
Présence des
enfants dans
les groupes
armés
Mener une sensibilisation des groupes armés et de la communauté locales
sur la problématique d’EAFGAs
UNICEF et
partenaire PE
Sitôt que
possible
Faire un plaidoyer pour le retrait des enfants dans les groupes armés et
mener des activités préventives ;
UNICEF et
partenaire PE
Sitôt que
possible
Sensibiliser les groupes armés au respect de leur engagement de ne pas ré-
enrôler les enfants démobiliser.
UNICEF et
partenaire PE
Continu
Mouvement de
retour des
déplacés et des
réfugiés de la
RDC
Mettre en place un mécanisme de monitoring et d’enregistrement des
réfugiés qui reviennent de la RDC, et organiser une assistance en faveur de
ces derniers afin de réduire les mouvements de va-et-vient
HCR et partenaires Sitôt que
possible
Organiser une évaluation des besoins de la population retournée dans la zone
de Malebassa, et organiser une assistance en leur faveur
Acteurs
humanitaires de
Bambari
Sitôt que
possible
Santé-
Nutrition
Intégrer la commune de Yabongo (non concernée par la dernière enquête
SMART d’ACF) dans la réponse envisagée pour la prise en charge de la
malnutrition dans la SP de Zangba.
Cordaid et Cluster
Nutrition
A la mise
en œuvre
du projet
Encourager la multiplication des supervisions formatives du DS de Mobaye
dans les FOSA de la SP de Zangba, en vue de s’assurer de l’utilisation
rationnelle des intrants donnés par l’OMS en marge de la mission, mais aussi
à des fins de renforcement des capacités des prestataires locaux.
Cluster Santé-
Nutrition de
Bambari
Continu
Plaidoyer pour un appui permanent (par un partenaire spécialisé) aux FOSA
de la partie Est de la SP de Kouango (Sabegoudé et Ngoubanga) et aux
FOSA de la SP de Zangba.
Cluster Santé-
Nutrition de
Bambari
Continu
Sécurité
alimentaire
Organiser une assistance en vivres en faveur des retournés, rapatriés
volontaires et autres vulnérables dans la SP de Zangba
PAM et partenaires Sitôt que
possible
Appuyer la population de Zangba en semences et autres intrants pour la
relance des activités agricole.
FAO et partenaires Sitôt que
possible
Appuyer la mise en place une structure de règlement de conflits entre les
éleveurs et les agriculteurs dans la SP de Zangba.
GT Pastoralisme &
Transhumance de
Bambari
Sitôt que
possible
Education Appuyer les écoles de la SP de Zangba en kits et manuels scolaires UNICEF et
partenaires
Sitôt que
possible
Mettre en place des actions de renforcement des capacités des enseignants et
maîtres-parents des écoles de la SP de Zangba
Inspection
Académique (IA)
et partenaires
Sitôt que
possible
Appuyer la réhabilitation/construction des infrastructures scolaires dans la
SP de Zangba
IA et partenaires Sitôt que
possible
Mettre en place une campagne de sensibilisation contre les mariages
précoces et pour la scolarisation des jeunes filles
GTPE et Education
de Bambari +
autorités
Sitôt que
possible
Accès Mener des interventions sur les ponts endommagés sur l’axe Kouango-
Zangba et sur le bac entre Zangba et Mobaye en vue d’améliorer l’accès à la
zone de Zangba.
Acteurs du Cluster
Logistique
Sitôt que
possible
Encourager une intervention des communautés locales sur les points
difficiles sur l’axe Kouango-Zangba-Mobaye, par une approche Cash for
Work ou Food For Work
Cluster Logistique Sitôt que
possible
Plaidoyer auprès des responsable des groupes armés pour la mettre fin aux
tracasseries à l’endroit des humanitaires au niveau des barrières tenues par
leurs hommes dans la SP de Kouango et à travers la Basse Kotto.
OCHA Continu
Wash Partager avec les acteurs du secteur Wash les résultats d’examen
bactériologique de l’échantillon du puits traditionnel de Zangba
OMS Sitôt que
possible
Organisation d’une évaluation spécifique dans la zone de Zangba Cluster Wash
Bambari
Sitôt que
possible
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II. Généralités sur la mission
II.1. Contexte et justification de la mission
La mission s’est focalisée particulièrement sur l’axe allant de Kouango à Mobaye, en passant par
Zangba. Il s’agit d’une zone enclavée qui a connu très peu de visite des acteurs humanitaires au cours
des dernières années. Plusieurs tentatives d’organisation de missions inter-agences dans la zone
avaient avorté en 2015 et 2016 suite à des contrainte d’ordre sécuritaire, principalement.
Pendant la crise (2013-2015) cette zone a été vidée de la majeure partie de sa population fuyant la
violence liée aux activités des groupes armés. Mais depuis 2015, diverses informations en provenance
de la zone signalaient un mouvement continu de retour de populations, et des défis énormes
qu’éprouveraient les populations retournées. Une enquête SMART réalisée récemment par ACF à
Ouambé (une des deux communes de la SP de Zangba) relève notamment une situation nutritionnelle
alarmante, avec un taux 16,7% pour la MAM et 5,9% pour la MAS (largement supérieurs au seuil
d'urgence qui est de 8% pour la MAM et de 2% pour la MAS). La situation dans les autres secteurs
(notamment en santé, Wash, Abris, …) serait également loin d’être reluisante.
C’est dans le souci d’améliorer la connaissance de la communauté humanitaire sur la situation
humanitaire dans cette zone que l’organisation de la présente mission avait été décidée.
II.2. Objectifs de la mission
Objectifs communs :
Suivre la dynamique de retour des déplacés internes et des réfugiés de la RDC ;
Faire une évaluation multisectorielle des besoins humanitaires dans la zone ;
Formuler des recommandations en vue d’une réponse appropriée aux besoins identifiés ;
Etablir les contacts avec les différents acteurs de la zone (autorités, acteurs humanitaires, société
civile, …) et convenir avec eux de mécanismes appropriés pour assurer une meilleure remontée
des informations sur la zone ;
Participer à la première réunion du Cadre de concertation entre les autorités préfectorales de la
Basse-Kotto et les humanitaires intervenants dans ladite Préfecture.
Objectifs spécifiques aux acteurs :
OMS :
o Suivi de la problématique relative à l’accès aux soins de santé dans la SP de Kouango au
regard de la fin prochaine du projet Santé-Nutrition (financé par le CHF) dans la zone ;
o Approvisionner les formations sanitaires de la sous-préfecture de Zangba en médicaments ;
o Collecter les indicateurs PASSR de Janvier-Mars 2016 dans les sous-préfectures de Zangba,
Mobaye et Alindao ;
o Sensibiliser les acteurs des FOSA retenues pour la formation sur la sécurité transfusionnelle et
la PEC holistique des cas de viols ;
o Collecter les données sur les cas de viols dans ces localités.
HCR :
o Suivre la dynamique de retour des rapatries spontanés et les déplacés internes ;
o Faire une évaluation des problématiques liées aux incidents de protection.
COOPI :
o Evaluer les besoins de protection dans la Basse Kotto ;
o Evaluer la faisabilité d’ouverture d’une antenne COOPI à Mobaye.
OCHA :
o Faire la collecte des informations de base en vue d’améliorer la visibilité de la situation
générale de la zone ;
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o Appuyer les autorités pour l’organisation de la première réunion du Cadre de concertation
avec les humanitaires intervenants dans la Basse Kotto.
II.3. Participants à la mission
OMS : Dr Victoire Hadassa, Médecin épidémiologiste et Chef de Sous-bureau ai de l’OMS
Bambari ;
HCR : Jean-Baptiste Kassara, Assistant à la Protection ;
Espérance : Mahamat Zen Bahar (Coordonnateur de programmes), Yacoub FOTOR (Superviseur
des activités agricoles), Ken ANGAO (Facilitateur chargé de Protection de l’Enfance) ;
COOPI : Bernard Hacourt (Chef de Base Bambari) et Cyrile Kangandé (Superviseur du
Programme, Kouango) ;
COHEB Kouango : Eddy Rufin (Chef de Base) et Dr Karl Tampon (Responsable Projet Santé-
Nutrition) ;
OCHA Bambari: Claude Mululu (HAO/Chef de Sous-bureau) et Kévin Ganga (Assistant gestion
de l’Information) ;
OCHA Kouango : Ghislain Djima Djaradé, National HAO/Chef d’antenne Kouango.
II.4. Itinéraires et déroulement de la mission
Partie de Bambari le 20 Juin, la mission s’est arrêtée successivement à Kouango, Zangba, Mobaye,
Alindao ; avant de revenir à Bambari le 25 Juin.
Déroulement de la mission/ principales activités réalisées:
Jour 1 : 20 Juin :
Voyage Bambari-Kouango avec des arrêts à :
o Grimari : pour briefing à la MINUSCA sur la sécurité sur l’axe allant vers Kouango ;
o Goussiéma, Bangao et Ngadza pour activités spécifiques de l’OMS dans les centres de santé
Réunion entre les participants venus de Bambari et ceux ayant rejoint la mission à partir de
Kouango : accord sur la méthodologie de travail et les activités de la mission
J2 : 21 Juin :
Rencontre avec la MINUSCA Kouango : Briefing sur le contexte de la zone
Réunion du cadre de concertation entre les autorités de la Sous-préfecture et les acteurs
humanitaires ;
Contacts (bilatéral) avec les partenaires humanitaires basés à Kouango et autres acteurs locaux;
Activités spécifiques des membres de la mission
J3 : 22 Juin :
Mouvement Kouango – Zangba – Mobaye ;
A l’arrivée à Mobaye : Rencontre (prise de contact) avec la MINUSCA/Maurbat et le Préfet de la
Basse Kotto
J4 : 23 Juin :
Mouvement Mobaye-Zangba :
Travail à Zangba :
o Réunion avec les autorités (le Sous-préfet de Zangba entouré des différents responsables des
services sous-préfectoraux) ;
o Rencontres spécifiques avec les responsables de certains services de l’Etat et autres acteurs
locaux: Secteur scolaire, Chef du CS de Zangba Kodjé, Maire de Ouambé, la Gendarmerie, …
Activité spécifique des partenaires :
o OMS : remise de médicaments au CS de Zangba et collecte des données ;
o HCR : Visite dans certains quartiers de retour des réfugiés
J5 : 24 Juin
Avant-midi, jusqu’à 15h00 : Activités à Mobaye centre
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15h00-17h00 : Réunion du Cadre de concertation entre les autorités préfectorales et les
humanitaires (membres de la mission + les acteurs basés dans la Préfecture : Cordaid Alindao,
COHEB, Vitalité Plus et REMOD).
J6 : 25 Juin
Mouvement retour Mobaye – Bambari, via Alindao ;
La mission avait marqué un arrêt de 2 heures à Alindao : Rencontre avec Cordaid + contacts
divers.
Carte de la zone visitée par la mission
III. Résultat de la mission : Constats et information recueillies par la mission
III.1. Contexte général et situation sécuritaire :
a. Présence et activités des groupes armés et impact sur la population civile :
La zone visitée par la mission est globalement sous influence de l’UPC. Dans la SP de Kouango,
toutefois, il existe de nombreuses poches d’activisme d’ABs où des tensions sont fréquemment
signalées entre ces derniers et les hommes de l’UPC. Cette situation est particulièrement observée
sur l’axe Kouango-Bianga (Secteur Fleuve, au Sud-Est de Kouango), sur l’axe Ngadza-Ndoro-
avec prolongement sur l’axe BoyKotta-Goya-Ngakobo (Nord-Est), ainsi que dans les zones de
Goussiéma-Zouhougou et Pende (Nord).
D’une manière générale la Préfecture de la Basse Kotto ne connait pas de phénomène AB tel que
ce dernier se manifeste dans la Ouaka. Toutefois, compte tenu apparemment de sa proximité avec
la SP de Kouango, la SP de Zangba (particulièrement dans sa partie Est/Commune de Yabongo)
connait de temps en temps des incursions des ABs. Il est fait également de plusieurs tentatives, de
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la part des ABs des zones de la Ouaka de venir initier les jeunes de la zone de Zangba aux
pratiques des ABs.
Les derniers incidents majeurs entre groupes armés dans la zone remontent à 2015. En au début du
mois d’Août 2015, suite à une attaque d’un groupe sur un campement d’éleveurs peuls (4 morts au
moins parmi les éleveurs, selon une source officielle de Zangba), il y aurait eu des représailles du
groupe adverse dans le village Malegbassa (environ 45 km de Km au Nord de Zangba, sur l’axe
Zangba-Alindao). Les mêmes sources parlent de plusieurs dizaines de personnes tuées et
d’incendies du village susmentionné. Ensuite, vers fin Septembre, suite à une autre attaque contre
une position du deuxième groupe au niveau du village Manœuvre (25-30 Km à l’Est de Zangba),
des représailles auraient également été menées dans le village Lokou (situé à environ 2 Km de
Manœuvre) d’où étaient supposés provenir les assaillants. Il y aurait eu 2 morts parmi les habitants
du village, et la fuite des habitants de ce dernier vers la RDC et en brousses.
Problèmes posés par la présence des hommes en armes dans la zone, selon les différents acteurs
locaux rencontrés par la mission :
o La multiplicité des barrières qui empêche la libre-circulation de la population: Les autorités de
la Sous-préfecture de Zangba parlent de 10 barrières permanentes inventoriées sur les
différents axes partant de Zangba centre. Il y en aurait encore 2 à 3 fois plus les jours de
marché, avec les barrières ponctuelles qui sont érigées sur les voies menant aux marchés. A
chacune de ces barrières, les passants seraient obligés de payer 1000 Francs CFA pour les
motos, 500 pour les vélos et 250 pour les piétons.
o Immiscions dans les affaires civiles : Malgré la présence de la Gendarmerie dans les grands
centres (Zangba, Mobaye, Alindao, …), les hommes du groupe armé basé dans la zone
continueraient à administrer une justice parallèle, où les affaires sont généralement réglées par
des détentions et l’imposition de fortes amendes aux personnes jugées coupables.
o Des cas de tortures sur les civils, voire d’exécutions sommaires ont également été mentionnés.
Pour les exécutions sommaires, les derniers cas enregistrés dans la zone de Zangba
remonteraient à mars (2 jeunes hommes tués) et fin mai dernier (1 vieillard tué). Dans la
plupart des cas, les victimes seraient des personnes soupçonnées d’appartenir au groupe armés
adverse ou d’être de connivence avec celui-ci, ou encore des personnes ayant refusé
d’obtempérer aux mesures imposées par le groupe armé dominant (paiement de taxes, …) ;
o La pression et les menaces récurrents à l’endroit des autorités locales : Les responsables du
groupe armés dominant dans la région exigeraient des contributions en argent ou en bétails
aux différentes autorités locales en guise de contribution à l’entretien de leurs hommes. Dans
la zone de Zangba, cette exigence serait depuis quelques semaines à la base d’un malaise entre
les responsables locaux de ce groupe armés et certaines autorités locales, dont le Sous-préfet.
Action des forces internationales : Les forces de la MINUSCA/Maurbat ont une présence à
Kouango centre et à Mobaye. D’une manière générale, leur présence est très appréciée par les
différents interlocuteurs locaux de la mission, qui estiment qu’elle a un effet dissuasif sur les
hommes en armés présents dans ces grands centres. De manière quasi unanime les mêmes
interlocuteurs ont toutefois souhaité voir la MINUSCA renforcer sa présence (notamment à travers
la multiplication des patrouilles) dans les axes, et particulièrement dans les zones isolées (comme
Zangba ou encore le secteur Fleuve de Kouango).
III.2. Situation humanitaire (résumé des problématiques majeures relevées dans les différents
secteurs) :
Protection :
Une forte entrave à la libre-circulation de la population, suite à la multiplicité de barrières où les
passants sont systématiquement rackettés par des hommes en armés. Tout le long de son parcours
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la mission a inventorié un total de 22 barrières réparties comme suit1 : Axe Grimari-Kouango : 3
barrières, Axe Kouango-Zangba : 8 barrières ; Axe Zangba-Mobaye : 1 barrière ; Axe Mobaye-
Alindao : 6 barrières ; Axe Alindao-Mobaye : 4 barrières.
Ces barrières affectent négativement tous les secteurs de la vie de la population : la fréquentation
des structures sanitaires et des écoles, l’accès aux champs, les activités commerciales, etc. Dans le
secteur de la Santé, par exemple, les barrières sont citées parmi les principaux facteurs à la base de
la faible fréquentation dans les formations sanitaires de la SP de Zangba: Alors que les frais de
consultation au CS de Zangba s’élèvent à 50 Francs CFA, le patient doit parfois traverser plusieurs
barrières où il doit payer 250 Francs (soit 5 fois plus) par barrière. Les barrières affectent aussi
considérablement l’approvisionnement des marchés locaux, occasionnant ainsi l’augmentation des
prix des différents produits sur les marchés locaux.
Les arrestations arbitraires, les cas de torture et exécutions sommaires (voir plus haut) ;
L’enrôlement et/ou le re-enrolement des enfants dans les groupes armés : des enfants en armes
sont même visibles sur certaines barrières ;
Des cas de mariages forcés (y compris des filles mineures) impliquant les hommes en armée Des cas de mutilations génitales féminines ont été mentionnés, même si le phénomène n’est
documenté ;
Cohésion sociale : Dans la SP de Zangba, il est fait état de multiples tensions entre les éleveurs
(essentiellement peuls) et les agriculteurs, liés à la destruction des champs par les animaux. En
l’absence de mécanismes appropriés pour le règlement de ce genre de conflits, les cas seraient
souvent gérés par les éléments du groupe armé présent dans la zone, dont l’impartialité est mise en
doute par divers acteurs rencontrés par la mission.
Mouvements de populations :
La SP de Zangba connait un retour progressif et continu de déplacés internes et de réfugiés de la
RDC. Cette tendance, observée particulièrement depuis Décembre 2015, serait favorisée par
l’accalmie relative qui règne actuellement dans la zone, mais aussi par les conditions difficiles
dans les milieux de refuge.
Le retour de déplacés internes concerne principalement la zone de Malegbassa qui s’était vidée
d’une bonne partie de sa population suite aux événements d’Août 2015 (voir plus haut). Parmi les
défis auxquels seraient confrontés les retournés, les autorités sous-préfectorales parlent de la
problématique des abris (suite aux incendies de maisons lors des événements suscités) et du
difficile accès aux soins de santé suite au non-fonctionnement du poste de Santé du village. Le
chef de cette formation sanitaire aurait été tué lors des événements d’août 2015. Une évaluation de
la situation dans cette zone s’avère indispensable pour apprécier l’ampleur des mouvements de
retour en question et les besoins de la population.
Concernant le retour des réfugiés de la RDC :
o Les villages riverains du Fleuve Oubangui sont les plus concernés. Si le phénomène de retour
est clairement perceptible, l’absence d’un mécanisme d’enregistrement fait que la mission n’a
pu avoir que des chiffres ou estimations très partielles sur les populations concernées. Pour
Zanbga centre, il est fait état d’environ 400 personnes enregistrées, tandis que dans le
Groupement Somba (situé à 2 Km de la ville Mobaye), certaines estimations parlent de 2000 à
2500 personnes.
1 Les positions exactes de ces barrières sont disponibles.
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o La plupart des rapatriés spontanés
rencontrés possèdent des attestations
dûment délivrées par le HCR et le
Ministère de l’intérieur, de
décentralisation, sécurité et affaires
coutumières de la RDC.
o Il est toutefois fait état de nombreux
mouvements pendulaires entre les deux
rives de l’Oubangui (RCA et RDC),
particulièrement dans la zone de Zangba.
Cela s’expliquerait par deux raisons
principales : 1) les conditions difficiles
dans les villages de retour, et le besoin de
continuer à profiter de l’assistance dans
les camps des réfugiés ; 2) l’incertitude par rapport à la situation sécuritaire, qui ne permet pas
aux rapatriés spontanés de se fixer définitivement dans les villages.
o Les rapatriés sont confrontés principalement aux problèmes d’abris et NFI (beaucoup de
maisons détruites pendant la crise ou délabrées suite à une longue période d’abandon – voir la
photo ci-dessus), d’accès aux semences et outils agricoles, et de restriction de mouvements
(multiplicité des barrières).
Santé et Nutrition
Nutrition :
La situation nutritionnelle dans l’ensemble de la Sous-préfecture de Zangba est jugée
préoccupante. Selon divers acteurs, la situation devrait être encore plus préoccupante dans la
commune de Yabongo (une des deux communes de la SP) qui n’avait pas été touchée par la
dernière enquête SMART d’ACF. Aucun dispositif de prise en charge n’existe au niveau de la
Sous-préfecture actuellement.
Cordaid Alindao a informé la mission que le processus est très avancé pour la mise en œuvre d’un
projet de prise en charge de la malnutrition dans la zone de Zangba. Le projet en question, financé
par le CHF, devrait être mis en œuvre en partenariat avec CODIS (une structure relevant du
Diocèse Catholique d’Alindao). Le démarrage de ce projet serait prévu pour juillet prochain. Le
collègue de Cordaid rencontré par la mission n’avait pas plus de détail sur la couverture
géographique du projet, mais la mission juge indispensable que celui-ci s’étende sur l’ensemble de
la SP de Zangba (y compris la Commune de Yabongo).
Santé :
La SP de Zangba compte 10 formations sanitaires (centres de santé et postes de santé) dont 2 sont
actuellement non-fonctionnelles2. Il s’agit du CS Catholique de Zangba et le Poste de santé de
Malegbassa (à l’arrêt depuis les événements d’Août 2015 au cours desquels son responsable aurait
été tué).
Quant aux 8 FOSA qui fonctionnent actuellement, elles sont confrontées à de multiples difficultés,
notamment :
o Problème de personnel (sous-qualification des prestataires + nombre insuffisant): tous les
responsables des FOSA sont des Agents de Santé Communautaire (ASC). La zone ne compte
aucun IDE (Infirmier Diplômé d’Etat) ni Assistant de Santé.
o Problème d’approvisionnement en médicaments : fonctionnant toutes sous le régime de
recouvrement de coûts, les FOSA s’approvisionnent (très difficilement) en médicaments et
autres intrants généralement à partir de la RDC, mais aussi à partir de Mobaye qui lui-même
2 Voir la liste exhaustive des FOSA (fonctionnelles et non-fonctionnelles) du District Sanitaire de Mobaye (couvrant également la SP de
Zangba), en annexe.
Illustration de la problématique des abris chez les rapatriés
spontanés de la RDC dans la SP de Zangba.
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s’approvisionne au dépôt pharmaceutique du CSP Elim de Kongbo (SP d’Alindao). Il n’existe
pas un dépôt préfectoral de médicaments essentiels. Au dépôt d’Elim/Kongbo, tous les
médicaments commandés ne sont souvent pas disponibles ; et il est fréquent que les
médicaments livrés par cette structure soient à quelques mois de péremption. Ce qui ne permet
pas à l’hôpital et autres formations sanitaires de les évacuer rapidement avant la péremption ;
d’où des pertes pour les COGES. Enfin, sur leur parcours pour l’approvisionnement en
médicaments, le personnel de santé serait confronté également au problème de barrières
payantes.
o L’absence d’un système de référencement et de contre-référence au niveau de la SP de
Zangba : Ainsi le transfert des cas graves vers Mobaye est assuré par les familles elles-mêmes,
souvent par pirogue (le moyen le moins coûteux, mais cela prend environ 6-8 heures), parfois
à moto (financièrement inaccessible pour beaucoup, car plus coûteux). Il a été fait état de
beaucoup de cas de décès enregistrés lors de ces transferts.
o Les taux de fréquentation relativement faibles : Cette situation serait liée notamment aux
facteurs culturels (préférence pour le recours aux tradi-praticiens ou à la religion), aux
difficultés financières (paiement de la consultation et des médicaments – Voir les tarifs ci-
haut), mais aussi aux barrières payantes qui restreignent significativement les mouvements de
la population.
Les pathologies principales enregistrées au niveau du CS de Zangba au courant du mois de mai
dernier sont : le Paludisme (60 cas enregistrés dont 1 décès), la diarrhée (21 cas dont un sanglant),
et les IRA (16 cas). La prise en charge du paludisme est assurée gratuitement grâce à l’appui en
intrants de l’UNICEF via le District sanitaire de Mobaye.
Vaccination : Le PEV de routine est fonctionnel à
Zangba, notamment grâce à l’appui de l’UNICEF
(via le DS de Mobaye). La mission a pu constater
le bon fonctionnement de la chaine de froid
(présence d’un frigo en marche) au niveau du CS
de Zangba. Il a toutefois été mentionné la rupture
de certains antigènes (BCG, VAT et VAA) depuis
décembre 2015. Au niveau de Mobaye, le District
sanitaire a informé la mission que les antigènes en
question venaient finalement d’être réceptionnés (depuis le 15 juin 2016), et que Zangba allait être
réapprovisionné aussi dans les jours à venir.
En marge de la mission, OMS Bambari a remis un lot important de médicaments au Centre de
santé de Zangba (Voir la photo ci-dessus). Ces médicaments sont destinés à être distribués aux
FOSA de la zone. Des discussions ont également été menées avec le District Sanitaire de Mobaye
et les autorités locales sur les mécanismes de suivi
appropriés en vue d’une meilleure gestion de cette
assistance.
Cordaid aurait des pourparlers assez avancés avec
la Banque Mondiale pour une éventuelle mise en
œuvre d’un projet en Santé (avec l’approche Achat
des performances/PBF) qui pourrait couvrir
l’ensemble de la Préfecture de la Basse-Kotto (y
compris la SP de Zangba). La date de démarrage
de ce projet n’est pas encore connue. Il s’étendrait
toutefois sur une période de deux ans. La
matérialisation de ce projet serait particulièrement
salutaire pour la relance durable du système de
santé dans la Préfecture de Zangba.
Les tarifs appliqués au CS de Zangba
Remise des médicaments OMS au CS de Zangba
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Wash
La SP de Zangba est confrontée à un sérieux
problème d’accès à l’eau. Selon les autorités, la SP
compte en tout 3 puits aménagés (par le CICR et le
CRRCA, depuis 2007). Et les trois ouvrages sont
concentrés dans la commune de Ouambé (Zangba
centre). Ainsi la majorité de la population utilise soit
les puits traditionnels sommairement aménagés, soit
l’eau du Fleuve et/ou des rivières. Un échantillon
d’un des puits traditionnels a été prélevé (par OMS)
pour examen bactériologique au niveau de Bambari.
La mission recommande l’organisation d’une
évaluation approfondie par les acteurs spécialisés, en
vue de cerner la situation dans ce secteur de manière plus exhaustive.
Sécurité alimentaire
Après plusieurs saisons agricoles perdues suite à l’instabilité, la population qui tente de reprendre
une vie normale exprime le besoin d’une assistance en semences et outils agricoles. Pour la saison
agricole débutante, des semences FAO ont été distribuées dans la zone de Zangba par l’ONG
CADAPI ; mais à 9 seulement groupements alors que c’est presque toute la population qui en ont
besoin.
Il a par ailleurs été signalé le problème d’accès aux champs et aux marchés pour la population au
niveau de la SP de Zangba. Cette situation serait liée à la multiplicité des barrières sur les
différents axes, mais aussi suite à l’insécurité.
Les denrées alimentaires et autres biens de premières nécessités sont rares sur les marchés ; ce qui
explique l’augmentation significative des prix. Par exemple, la mesure (le Ngawi) du manioc
(aliment de base de la population) qui revenait à environ 250 Francs CFA avant la crise se vend
actuellement à 1 500 Francs (6 fois le prix initial). Les denrées qui sont vendues sur les marchés
de Zangba proviennent de Mobaye et Alindao principalement.
En général, pour faire face à ces problèmes d’accès et de disponibilité alimentaire, les ménages ont
développé des stratégies d’adaptation inadéquates qui consistent à réduire le nombre de repas par
jour (1 repas par jour en général) et ils sont obligés de manger les aliments non préférés : dans la
plupart des ménages, le repas journalier est composé de feuilles de manioc avec l’huile de palme
et la boule de manioc. Cette alimentation expliquerait en grande partie la malnutrition qui sévit
dans cette Sous-préfecture.
Les difficultés de survie (notamment l’accès difficile à la nourriture) obligent les rapatriés
spontanés à faire des va-et-vient entre leurs villages de provenance et les camps de réfugiés RD
Congo afin de bénéficier des vivres qui y sont distribués.
Education
Sur les 40 écoles du niveau fondamental que compte la SP de Zangba, 24 seulement ont ouvert
pour l’année scolaire 2015-2016, avec un effectif total de 3 944 élèves dont 2 788 garçons et 1 056
filles.
Le non-fonctionnement des 14 écoles restantes serait essentiellement lié à la précarité de la
situation sécuritaire dans les villages concernés au début de l’année scolaires. Il s’agit des écoles :
Gbangorongba, Ngbanzoumbou, Togbo-Ndombale, Gbakouloutoko, Gbanzoumba, Yahou, Gbele,
Un des trois puits aménagés qui existent dans la SP de
Zangba.
Mission IA Axe Bambari–Kouango–Zangba–Mobaye-Alindao-Bambari, du 20 au 25 Juin 2016
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Gbokoro, Kangawangawe, Greyanda, Douba, Malebassa2, Gabou et Loumakouzou. Toutefois,
selon le secteur scolaire de Zangba, grâce à l’accalmie qui s’observe actuellement dans certaines
de ces villages, certaines écoles envisagent déjà de relancer leurs activités à la prochaine rentrée
scolaire.3
A Zangba il existe également un collège fonctionnel. Avec environ 150 élèves au début de
l’année, celui-ci compte actuellement environ 100 élèves dont 7 filles (soit une déperdition
d’environ le tiers des effectifs).
Parmi les problématiques majeures dans le secteur Education dans la SP de Zanbga, il est
mentionné :
o Le déficit criant d’enseignants qualifiés : La zone compte 55 enseignants (tous des hommes)
dont 4 seulement sont qualifiés. Les autres sont des maitres-parents ;
o Le manque de manuels scolaires ;
o Le problème des infrastructures : sur les 40 écoles que compte la Sous-préfectures, seules
quatre (4) auraient des bâtiments en dur. Cinq (5) seraient construites en matériaux semi-
durables, et les autres en matériaux non-durables (généralement des hangars en paille) ;
o Le phénomène de mariage précoce, très répandu dans la zone : Ceci expliquerait la très faible
présence des jeunes filles à l’école (le taux d’abandon serait élevé chez les filles).
Accès :
Le travail d’ACTED (dans le cadre du Projet Brigade
mobile) a considérablement contribué à l’amélioration
de l’accès entre sur les axes Bambari-Kouango (via
Grimari) et Alindao-Mobaye.
L’accès à Zangba à partir de Kouango (environ 170
Km) est, par contre, particulièrement compliqué suite
au délabrement de ponts et à la présence de nombreux
bourbiers. Au cours des dernières années cette route
était fréquentée essentiellement par les motos et par les
camions des trafiquants de café en période de
campagne caféière.
Sur l’axe allant de Kouango à Mobaye (en passant par
Zangba), la mission a inventorié 28 ponts dont 4
seulement sont en bon état. Les 24 autres sont soit en
mauvais état (20) soit totalement délabrés (4)4. Une
intervention sur les ouvrages délabrés et sur les
différents points difficiles s’avère indispensable en vue
de désenclaver cette zone et permettre un meilleur
accès des acteurs humanitaires à sa population5.
Par ailleurs, la problématique de barrières affecte aussi
parfois les mouvements des humanitaires. La présente
mission a, elle-même, fait l’objet de tracasseries à deux
reprises (à l’entrée de Zangba et à l’entrée de Mobaye).
3 La liste exhaustive des écoles (fonctionnelles et non-fonctionnelles) de la SP de Zangba se trouve en annexée du présent rapport.
4 Voir la carte, plus bas
5 Les coordonnées GPS des différents ponts et points difficiles sont disponibles.
Une des nombreux passages à gué suite au délabrement des
ponts
Un bourbier sur l’axe Kouango-Zangba
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Carte de la zone visitée avec l’état des ponts6
6 Les distances présentées sur la carte ont été prélevées en partant de Kouango