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L’impôt entre justice et globalisation

Marcel GérardUniversité catholique de 

Louvain

Objectif

• Proposer une méthode pour réfléchir sur l’impôt sachant qu’on le veut “juste” mais qu’on évolue dans un monde marqué par la globalisation…– Où certains agents sont plus mobiles internationalement que d’autres

– Où certaines bases imposables sont …– Où les états sont moins mobiles sauf si des accords internationaux élargisssent leur aire de souveraineté Marcel GERARD ‐ 2014 2

Objectif

• Proposer une méthode pour réfléchir sur l’impôt sachant qu’on le veut “juste” mais qu’on évolue dans un monde marqué par la globalisation …et par différents niveaux de pouvoir– Quel impôt maintenir au niveau local, e.g. la région Wallonne ou Bruxelloise, la Belgique ?

– Quel impôt monter au niveau fédéral, européen ?

Marcel GERARD ‐ 2014 3

Objectif

• Le focus de l’exposé est sur l’impôt des personnes physiques mais on peut répéter l’exposé– Pour la sécurité sociale– La TVA– La consommation énergétique– La fiscalité verte– La proposition Picketty d’imposition du capital– Des impôts “spéciaux” e.g. sur les passagers Marcel GERARD ‐ 2014 4

Quel impôt ?

• Entre justice et globalisation

Marcel GERARD ‐ 2014 5

Introduction• L’impôt est indissociable de l’état et du financement des biens et des services publics (cf. le débat dans la bible entre le peuple et Samuel, arbitré par Yahvé, 1 Samuel, 8 ).

Marcel GERARD ‐ 2014 6

• Les anciens d'Israël allèrent voir Samuel: « Désigne nous un roi comme chez les autres peuples. » Mécontent Samuel pria le Seigneur qui répondit : « Accepte mais dis‐leurs les droits du roi: 

• Il prendra parmi vos fils des soldats pour conduire ses chars de guerre, et d'autres pour labourer ses champs et rentrer ses moissons. Il prendra vos filles comme parfumeuses, cuisinières ou boulangères, prélèvera dix pour cent sur les produits de vos champs et de vos vignes, et une bête sur dix dans vos troupeaux. » 

• Les Israélites dirent: « Tant pis, nous voulons un roi pour être comme les autres peuples, un roi qui rende la justice parmi nous, marche à la tête de notre 

Marcel GERARD ‐ 2014 7

Introduction

• Le Tribunal fédéral suisse prohibe la dégressivité de l’Impôt sur le revenu

• Les Lois belges interdisent aux régions d’atténuer la progressivité de l’IPP

=> Une préoccupation moderne est que l’impôt soit justement distribué entre les contribuables, voire qu’il contribue à l’amélioration de la distribution des revenus.

Marcel GERARD ‐ 2014 8

Qu’est‐ce qu’un impôt juste ?

• On se rallie généralement à ceci : – « un impôt juste fait contribuer de même des contribuables de même capacité contributive et davantage des contribuables de capacité contributive plus élevée ».

– C’est le critère de justice distributive basé sur la capacité contributive des résidents

– Il s’oppose au critère du bénéfice– Il pose des questions telles que…

Marcel GERARD ‐ 2014 9

Qui est le contribuable ?

• La famille ou l’individu ?– Le cumul des revenus des époux– La taxation séparée– Le coefficient conjugal allemand et notre spliting– Le coefficient familial français– …un débat « classé » chez nous mais qui opposa chaudement « cathos » et « pas cathos »

Marcel GERARD ‐ 2014 10

Qui est le contribuable ?

• L’entité juridique ou la réalité économique?– Chez nous l’entité juridique –la société belge – ou l’établissement belge de la société étrangère

– Dans de nombreux pays : la consolidation des entités économiques dans le pays => compensation des pertes des uns et des bénéfices des autres …Pourquoi pas chez nous ?

– La consolidation européenne ou mondiale: par exemple selon le modèle italien ou le modèle UE de consolidation et répartition

Marcel GERARD ‐ 2014 11

Comment mesurer la capacité contributive ? 

• Le revenu global: chez nous de 1964 à 1983• Le revenu global élargi• L’approche cédulaire et l’imposition duale

– Le modèle belge post 1983 et le modèle nordique– Le modèle danois

• L’impôt – direct – sur la dépense– Imposition au moment de la dépense et non plus au moment du revenu

• La flat tax des pays ex‐communistesMarcel GERARD ‐ 2014 12

Taxer le revenu global

• Imposer tous les revenus d’un contribuable, indépendamment – de leur usage (consommation, épargne) et– de leur origine (revenus professionnels, revenus du capital mobilier ou immobilier, revenus intérieurs, revenus étrangers) 

– … avec le cas échéant exemption ou crédit si impôt payé à l’étranger 

• Un modèle idéal mais est‐il réaliste?Marcel GERARD ‐ 2014 13

Taxer le revenu global

• Un modèle idéal ?– Chaque résident est imposé sur l’ensemble de ses revenus au taux et selon la progressivité décidée par le gouvernement et le parlement de son pays de résidence

– Juste et démocratique– Le rêve de François Hollande– Les accords internationaux ambitionnent de le rendre faisable mais…

Marcel GERARD ‐ 2014 14

Taxer le revenu global

• Un modèle réaliste ?– Nécessite la connaissance des revenus étrangers

• Moralité fiscale forte menant à la déclaration volontaire• Echange systématique d’information sur tous les revenus étrangers

• Approche OCDE, directive européenne sur l’épargne et son élargissement, QI et FATCA, G20 et proposition US…

– Inefficace si des revenus plus mobiles / discrets que d’autres = ont davantage de substituts dans l’espace des biens, de la discrétion  ou des pays Marcel GERARD ‐ 2014 15

Taxer le revenu global

• Cet impôt juste est‐il compatible avec l’efficacité dans un monde global où la mobilité est un fait ?– Si pour tous ses revenus le contribuable est également captif de son ministre des finances, l’impôt sur le revenu global peut être efficace

– Si certains revenus échappent plus facilement que d’autres à l’impôt parce qu’ils sont plus mobiles internationalement, il y a conflit avec l’équité 

Marcel GERARD ‐ 2014 16

Malheur à l’immobile…car il paye l’impôt

• La mobilité dans l’espace des produits et surtout de la géographie fait que le débiteur économique de l’impôt n’est pas nécessairement son débiteur juridique

• A négliger cela on commet des erreurs économiques et politiques

Marcel GERARD ‐ 2014 17

Malheur à l’immobile…car il paye l’impôt

• Si le gouvernement augmente l’impôt sur les intérêts et que le “capitaliste” peut bouger son épargne, – il échappera à l’impôt– il en passera la charge sur le payeur des intérêts, qui monteront

– et le plus important payeur d’intérêts est l’Etat– …qui devra taxer davantage le travail pour les payer   Marcel GERARD ‐ 2014 18

E

E’’

E’

Demande avant taxe

Offre

x x’

p

p’(1-t)

p’

Demande après taxe

M. GERARD 2013 19

Épargnant immobile

E

E’’

E’Demande avant taxe

Offre

x x’

p

p’(1-t)

p’

Demande après taxe

M. GERARD 2013 20

Épargnant mobile

Efficacité vs. Equité

• Exemples : – les revenus du capital mobilier ; – les financiers de haut vol qui peuvent donner leurs conseils de n’importe où dans le monde et pour qui déménager ne coute pas grand‐chose, voire ne coute rien ; 

– les brevets (80% de revenus exonérés) => taxer moins ces revenus pour éviter qu’ils ne fuient et pour les attirer (concurrence fiscale)

Marcel GERARD ‐ 2014 21

• Règle de Ramsey : taxer moins les bases mobiles que les bases immobiles 

conflit avec l’équité  arbitrage entre efficacité et équité par excellence le rôle du politique mais globalisation tire vers l’efficacité

• Exemples d’arbitrage : – le précompte mobilier libératoire en Belgique (+ taxation favorable des revenus de brevets, et centres de coordination devenus intérêts notionnels) ; 

– box 3 aux Pays‐Bas ; Marcel GERARD ‐ 2014 22

Rendre efficace l’équitable…

• Remède 1 : rendre les contribuables captifs de leur ministre des finances au travers des frontières : idéal mais appelle l’échange d’information.

• Remède 2 : rendre les contribuables captifs d’Ecofin ou du G20 dans leur ensemble : une taxation européenne à base et taux harmonisés.

Marcel GERARD ‐ 2014 23

Le Remède 1 nécessite l’échange d’information

• On ne peut se fier à la seule « morale fiscale » ou déclaration volontaire de revenus étrangers ou intérieurs auxquels l’administration n’a pas accès => problème du secret bancaire

• L’échange d’information est moins douloureux si fait par un tiers (exemple : une banque)

• Exemples: voir slide suivant

Marcel GERARD ‐ 2014 24

Le Remède 1 nécessite l’échange d’information…

• Exemples :– la Directive européenne sur l’épargne (échange d’information limitée aux intérêts mais en voie d’élargissement)

– le mécanisme QI américain et son prolongement le FATCA (arrangements directs entre les banques et l’IRS)

– la proposition américaine de FATCA coopérative (2012, le retour des – grands – états) et sa généralisation

Marcel GERARD ‐ 2014 25

…qui n’est pas sans question

• Vanuatu et autres : transmettre l’information minimale pour ne pas être sur liste noire ? Comment en contrôler la qualité ?

• Quel est l’intérêt des petits états ?– Les compenser pour ne plus être des paradis fiscal ?

– Le Luxembourg a adhéré à l’harmonisation de l’imposition des revenus de l’épargne parce que le package comprenait aussi le code de conduite … qui faisait mal aux BelgesMarcel GERARD ‐ 2014 26

Le Remède 2, des revenus …mais pas de noms

• L’état de la source prélève et transmet (en partie) mais sans révéler de nom => exemples : le Luxembourg, l’Autriche, la Suisse, le Lichtenstein… Est‐ce une solution suffisante ? 

• Finalement, que voulons‐nous ? – Des sous ou des noms ? – Transmettre de l’information aussi sensible à des états non‐démocratiques ?

– Ce qui est bon pour les grands pays doit‐il l’être aussi pour les petits états ? ou : le G20 champion de la morale internationale ou serviteur des

Marcel GERARD ‐ 2014 27

Référence théorique

• Les travaux de Richard Musgrave qui reconnaissent à l’impôt trois fonctions :– L’efficacité allocative– L’équité distributive– L’incitativité macroéconomique, régionale ou sectorielle

Marcel GERARD ‐ 2014 28

Quel niveau de pouvoir ?

• Entre justice et globalisation

Marcel GERARD ‐ 2014 29

Référence méthodologique proposée : la subsidiarité

• Référence méthdologique : test proposé par Jacques Pelkmans et co‐auteurs, reposant sur le principe de subsidiarité

• Procédure en trois étapes• Application : quel impôt à quel niveau de pouvoir?

Marcel GERARD ‐ 2014 30

Rappel

• Subsidiarité : – maintenir la compétence au niveau le plus décentralisé

– Ne la “monter” que si exercée plus efficacement à un niveau “supérieur”

Marcel GERARD ‐ 2014 31

Etape 1 : faire en commun

• Faire en commun = monter une compétence si– Permet d’internaliser une externalité (e.g. route transfrontalière, contrôle de qualité des aliments importés)

– Permet d’exploiter des rendements d’échelle (e.g. incinérateur)

– A contrario respecter la variété des préférences sociales (incinérateur vs. enfouissement)

Marcel GERARD ‐ 2014 32

Gérer en commun l’Isoc ou l’IPP ?

• IPP sur les revenus du travail est prélevé à la résidence (pour les revenus belges) que des barrières culturelles rendent difficilement transférable dans une région de langue différente => garder / mettre décentralisé pour financer les régions

• ISoc (et TVA) = l’inverse => centraliser au niveau du pays, monter au moins l’organisation à UE

• IPP sur les revenus du capital =>gérer Marcel GERARD ‐ 2014 33

Etape 2 : Comment faire en commun ?

• Comment faire en commun ?– Intergouvernementalité ou interrégionalité est la solution la plus en phase avec la subsidiarité

• Réunion régulière des ministres ou des présidents

– Si elle n’est pas crédible / soutenable, établir une institution commune

• Une agence spécialisée• Une commission voire un gouvernement fédéral• Plus un parlement commun …où les minorités sont protégées ? Marcel GERARD ‐ 2014 34

Etape 3 : Que faire en commun

• Que faire en commun ?– Etablir des normes communes ?

• La politique européenne de la concurrence• Un code fiscal commun pour les multinationales en UE• La directive sur l’épargne

– Dépenser ensemble ?• La politique agricole commune

– Aussi collecter ensemble le financement ?• Recueillir des ressources propres pour l’UEMarcel GERARD ‐ 2014 35

Conclusion• Se méfier ds idées reçues• Celui qui paye in fine n’est pas toujours celui qu’on croit – …malheur à l’immobile dans l’espace des produits, des facteurs, de la discrétion

– …malheur à l’immobile géographique

• Donc malheur aux Etats– Immobiles sauf si accords élargissent leur aire de souveraineté

– Notamment en leur fournissant l’informationMarcel GERARD ‐ 2014 36

Conclusion• Quel impôt à quel niveau de pouvoir ?

– Décentralisé : IPP travail– Centralisé : Isoc et organisation IPP capital– A discuter dans le cadre belge, le cadre UE

• Mais l’UE (ou la Belgique) est‐elle la “bonne” aire de centralisation ? Où est‐ce l’OCDE ? Le monde ?

• Merci pour votre attention …et bonne réflexion !

Marcel GERARD ‐ 2014 37