Post on 21-Jan-2020
Le bassin du Danube
son peuplement
donne quelques clés
pour comprendre le présent
Jean-Paul BOURGÈS
Situons tout d’abord,
d’un point de vue de la géographie physique
le bassin du Danube.
Partant de la Forêt Noire, il couvre :
le sud de l’Allemagne,
l’Autriche,
le sud de la Tchéquie,
la Slovaquie,
la Hongrie,
une partie
de la Slovénie,
de la Croatie,
de la Bosnie,
la quasi totalité de la Serbie,
de la Bulgarie,
et de la Roumanie.
Ce fleuve de 3.020 km de long
(Soit environ trois fois plus long que la Loire)
a un débit fort important à son embouchure,
sous forme de delta sur la Mer Noire,
avec une moyenne de 6.500 m3 /s (Soit à peu près quatre fois le débit du Rhône).
De Vienne à Budapest,
lors de notre croisière, nous n’en parcourons donc
qu’une toute petite partie.
Le bassin du Danube
Rideau de fer
Le Danube
Les limites du bassin
Notre trajet n’en parcourt qu’une petite partie
Cet immense bassin versant comprend la bagatelle
de 9 capitales entre lesquelles il a servi, au cours des
millénaires, de liaison et de voie de pénétration
des hommes, des idées et des marchandises …
mais aussi de chemin pour des armées.
Et quand je parle en millénaires, je n’exagère pas,
car c’est bien par la vallée du Danube,
comme aussi par la Méditerranée,
que la technique du cuivre, se diffusa
il y a 4.000 ans.
Il y a 4.000 ans le cuivre remontait le Danube
Au début de notre ère c’est du sud de l’Allemagne
que les Celtes se répartirent vers l’ouest sur la Gaule,
l’Espagne, le nord de l’Italie … mais aussi vers l’est,
par la vallée du Danube jusque vers son delta.
Ils ont formé l’une des composantes majeures
du peuplement de cette région,
à peu près au moment où la poussée romaine,
plus orientée vers la colonisation que le peuplement
prenait le contrôle de ces mêmes territoires
L’expansion des Celtes en Europe
Cette caractéristique typiquement colonisatrice
se voit aisément par la présence de places-fortes
en plein cœur de territoires non peuplés par les Romains
sur le haut-bassin du Danube
Zone de contact entre Celtes et Romains
Au début de notre ère
on voit que la vallée du Danube est principalement
une zone de contact entre :
Celtes,
Thraces,
Slaves
Les grandes composantes européennes
Les Huns déferlèrent alors au Vème siècle sur l’Europe
Ils furent arrêtés en Gaule par les Francs
aux Champs catalauniques (Vers Châlon-en-Champagne)
Attila,
qui cuisait son steak entre son corps et son cheval …
pas comme l’Attila de l’équipage …
avait installé sa capitale
à proximité de ce qui est maintenant Budapest.
Avant de se casser le nez
aux Champs catalauniques
Attila avait sa capitale en Hongrie
Cette région est également marquée par l’irruption,
peu avant l’an mille, d’un peuple dont l’origine exacte
est encore incertaine mais rattaché au sud de l’Oural :
les Maggyars ( Honnan jöttek ? D’où venaient-ils ?).
Ils s’installent dans ce qui est aujourd’hui la Hongrie
avec cette langue étrange qui ne ressemble
à aucune des langues germaniques, romaines ou slaves.
Avant de s’assagir ils menèrent au Xe siècle
De multiples razzias éclair jusqu’au nord de l’Espagne.
Incursions maggyares au Xème siècle
Les grands apports de population étaient
à peu près stabilisés sur ces bases
aux environs de l’an mille
et dans le cadre d’une organisation de l’Europe
comportant, en son centre,
le Saint Empire Germanique.
Mais à côté de la France, de l’Angleterre, de l’Espagne;
qui constituent de vastes bloc,
on voit une mosaïque de couleurs sur le Bassin du
Danube.
Les Juifs présents en France, en Espagne
sont chassés entre 1306 (Philippe le Bel)
et 1492 (Ferdinand et Isabelle la catholique)
et ils émigrent en Europe centrale
et surtout en Pologne
Le XIVème siècle fut encore marqué
par l’arrivée des Roms, qui, sept siècles plus tard,
ne sont toujours pas admis et intégrés.
Installés jusqu’au sud de l’Espagne où leur présence
marqua fortement la culture ibérique,
Ils s’installèrent surtout
en Roumanie, en Bulgarie, en Hongrie …
où ils continuent d’être traités en sous-hommes
et beaucoup d’entre eux moururent dans les camps nazis.
Le parcours des Roms
aussi
suivit le Danube au XIVème siècle
La fin du XVe siècle, est marquée en 1453
par la prise de Constantinople par les Turcs (Ottomans).
L’avancée de ceux-ci suivit là encore le bassin du Danube
et l’apogée de cette expansion se situe sous Louis XIV,
avec le siège de Vienne en 1683.
L’échec des Ottomans nous est resté
par l’existence parmi les viennoiseries
du croissant de nos petits-déjeuners.
Apogée de l’ empire ottoman … sous Louis XIV
Les Ottomans ne se sont arrêtés qu’à Vienne
en 1683 … croissants des viennoiseries
Le siège de Vienne par les Ottomans en 1683
Durant trois siècles l’Autriche domine alors
le centre de l’Europe et devient une puissance majeure.
Cette puissance est bien mise en évidence lorsque
Marie-Thérèse exerce le pouvoir (1717-1780)
sans être, d’ailleurs impératrice
(Fonction non ouverte aux femmes).
Cela se traduira par de nombreux
mouvements de population « d’Allemands »
vers d’autres parties de l’Empire Austro-Hongrois.
Marie-Thérèse d’Autriche
qui fit s’installer des germanophones
en divers points de son Empire
L’empire austro-hongrois
La domination autrichienne sur l’Europe centrale
ne cesse qu’après la guerre de 14.
C’étaient les fissures internes à cet Empire
qui avaient servi de prétexte au déclenchement
(Attentat de Sarajevo contre l’Archiduc-héritier) …
mais le bateau faisait déjà eau de toute part …
et l’éclatement s’est poursuivi jusque maintenant,
avec la création de nombreux Etats
souvent hostiles les uns aux autres
L’Europe à la veille de la guerre de 1914
Répartition des groupes ethniques en 1914
L’architecture de Sibiú (Roumanie)
met bien en évidence l’influence germanique
… qui ne cessa qu’en 1989
Cluj-Napoca depuis 1974
Cluj,
Kolozsvár pour les Hongrois,
Klausenburg pour les Allemands,
dénommée Claudiopolis, par les Romains,
s’est appelée Kaloşvar du temps des Turcs
Au-delà du strict bassin du Danube,
on voit bien que toute l’Europe centrale est
une mosaïque d’origines comprenant
des enclaves ethniques, linguistiques, religieuses …
qui ne cessent de s’affronter
dans la recherche d’un nouvel équilibre
où chacun pousse son avantage.
La carte des religions en Europe le montre bien
(cujus regio, ejus religio).
Une zone de contact entre religions
On l’a vu avec l’éclatement de la Tchécoslovaquie,
on l’a vu avec les guerres de Yougoslavie,
on l’a vu avec des revendications hongroises sur la
Trans-Sylvanie,
on le voit avec l’Ukraine.
De nombreux micro-nationalismes ressurgissent
présentant un risque majeur
pour une Union Européenne
si peu sûre déjà de ses raisons d’être unie.
Presque tout ce que nous verrons
au cours de ces quelques jours sur le Danube
mettra en évidence cette exceptionnelle complexité
qui est la source d’une grande richesse culturelle
mais aussi
d’une difficulté majeure
à investir plus l’avenir que le passé.
Presque tout ce que nous verrons
au cours de ces quelques jours sur le Danube
mettra en évidence cette exceptionnelle complexité
qui est la source d’une grande richesse culturelle
mais aussi
d’une difficulté majeure
à investir plus l’avenir que le passé.