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Séminaireélectif«Leadership-Espritd’équipe»,août-octobre2017
La concurrence galvanise-t-elle un groupe lors d'une
action collective ou, au contraire, le déstabilise-t-elle ?
Mémoireprésentéparlegroupe31,section3IdrisARAB-TANIAymericAZEMAClémentGOUTARDSolèneHAMOUDATravauxencadrésparleprofesseurAstridApert.
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Sommaire
1. LE PROLOGUE 3
1.1. Le fait déclencheur
2. LA DEMARCHE DE RECHERCHE ADOPTEE 4
2.1. La question de recherche 2.2. L’hypothèse de recherche 2.3. L’enquête envisagée 2.3.1. L’expérience 2.3.2 L’observation 2.3.3. Le sondage 2.3.4. Les interviews 2.4. Les références théoriques
3. CE QUI RESSORT DE L’ENQUETE REALISEE 14
3.1. Manifestement, la concurrence est initialement déstabilisatrice pour un groupe 3.1.1. La concurrence provoque une déstabilisation qui varie en intensité selon plusieurs facteurs 3.1.2. Les causes de cette déstabilisation 3.1.3. Si la concurrence provoque bel et bien une première phase de déstabilisation, celle-ci est bien souvent acceptée par le groupe qui ne la voit pas comme un frein 3.2. La concurrence se révèle être féconde pour l’ensemble du groupe 3.2.1. Car la concurrence permet à chacun de ne pas s’endormir sur ses lauriers 3.2.2. Car la concurrence pousse chacun à dépasser ses limites 3.2.3. Car la concurrence aide le leader à perfectionner son groupe 3.3. La concurrence: point d'appui à tout succès futur 3.3.1. La concurrence: phénomène omniprésent qui ne peut nous laisser complètement indifférents 3.3.2. Réussir, c’est vivre la concurrence comme un moteur, et non comme un frein 4. BILAN 29 4.1. Retour sur la question de recherche, l’hypothèse, l’enquête réalisée. 4.2. Perspectives, limites, interrogations, apports 4.3. Prospective 5. ANNEXES 33 5.1. L’observation 5.2. L’expérience 5.3. Le sondage 5.4. Interviews 5.4.1. Interview de Noémie Pilo et Robin Bourgeois, étudiants à l’Ensad 5.4.2. Interview de Julien Kauffmann, directeur du pôle transformation de Disneyland Paris 5.4.3. Interview de François de Mazières, maire de Versailles 5.4.4. Interview de Sébastien Michot, entraîneur du club d’aviron de HEC 5.5 Bibliographie
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1. PROLOGUE
1.1 Le fait déclencheur
« Attendez, attendez ! Regardez leur idée ! », s’est écrié l’un des membres de notre
groupe, alors que, depuis plusieurs minutes, nous hésitions sur la stratégie à suivre pour
passer la mythique épreuve du radeau – épreuve consistant à traverser en un temps limité un
étang situé sur le camp de Saint-Cyr-Coëtquidan. En effet, à une trentaine de mètres à notre
gauche, un groupe voisin venait de mettre son radeau à l'eau, ce qui était alors loin d'être notre
cas, et avait de plus étendu une corde le long du lac, corde qui, accrochée à deux arbres
opposés, leur permettait d'avancer. La concurrence d'un groupe tiers nous déstabilisait et
commençait à nous faire perdre nos moyens. Nous étions sans cesse en train de jeter des
coups d'oeil au groupe voisin, au lieu de nous concentrer sur notre propre travail.
C'est alors que plusieurs personnes de notre groupe prirent conscience du temps
précieux que nous perdions. Nous étions à l'arrêt ! Dans ces conditions, une seule chose était
sûre : nous ne remporterions pas cette épreuve. Après un bref moment de déstabilisation,
l'esprit de compétition que nourrissaient les groupes voisins et le désir de l'emporter se mirent
à exalter le groupe. Tout le monde se remit au travail et cessa d'être passif, comprenant qu'il
était désormais trop tard pour changer de stratégie. Nous cessâmes de regarder à droite et à
gauche pour nous focaliser sur la construction de notre propre radeau. Peu à peu, ce dernier
prenait forme, alors même que les radeaux des autres groupes, déjà à l'eau, depuis plusieurs
minutes, se révélaient être bancals. Lorsque notre radeau fut mis à l'eau, nous nous aperçûmes
très vite que la victoire était à notre portée. Galvanisés par la concurrence des autres groupes,
nous nous dépêchâmes d'effectuer des allers-retours afin de transporter les douze personnes
de notre groupe de l'autre côté de l'étang. Lorsque le douzième homme de notre équipe eut
enfin posé le pied sur la berge opposée, nous sautâmes dans les bras les uns des autres :
moment inoubliable de notre séminaire, la délivrance la plus totale. Nous avions tant douté de
nous au début de cette épreuve que la victoire était d'autant plus belle. Le fameux mot de
Corneille dans Le Cid résonnait alors dans nos têtes : « à vaincre sans péril, on triomphe sans
gloire ».
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A la suite de cette épreuve, notre sous-lieutenant – beaucoup plus lucide quant au
résultat de cette épreuve – nous fit asseoir en cercle autour de lui afin de tirer les conclusions
de cette mission. Nous nous accordâmes sur le fait que la concurrence des autres groupes nous
avait complètement déstabilisés au début de l'épreuve alors que, dans un second temps, elle
nous avait motivés, exaltés, galvanisés. A la fin de ce debriefing, nous étions pleins
d'interrogations sur les effets de la concurrence sur un groupe, lors d'une action collective.
Mais si cet atelier du radeau a véritablement représenté un fait déclencheur pour nous,
c'est aussi parce que, tout au long de notre séminaire, les effets de la concurrence se sont de
nouveau manifestés à nos yeux. Le parcours du combattant que nous avons dû opérer en un
temps chronométré tout en portant un brancard en est un exemple probant : sans le discours de
notre sous-lieutenant qui s'attacha à sous-estimer nos concurrents et à valoriser notre groupe,
nous n'aurions sans doute pas fait preuve d'un tel acharnement, d'une telle abnégation et ce, en
groupe, lors de l'épreuve. Que ce soit par pur hasard ou parce que l'expérience du radeau nous
avait rendus plus sensibles à cette thématique qu'est la concurrence, une chose est sûre : le
questionnement sur la concurrence nous habitait.
2. LA DEMARCHE DE RECHERCHE ADOPTEE
2.1 La question de recherche
La concurrence galvanise-t-elle un groupe lors d'une action collective ou, au contraire,
le déstabilise-t-elle ?
Nous n'avons pas hésité longtemps quant au thème de notre mémoire : nous voulions
absolument travailler sur la concurrence tant celle-ci avait été puissamment observée au sein
de notre section.
En effet, si l'épreuve du radeau a bel et bien été un fait déclencheur pour nous, la
question relative à la concurrence nous a, quant à elle, suivis tout au long de notre séminaire à
Saint-Cyr – lors du parcours d'obstacles ou de la course d'orientation, par exemple. En
revanche, la question de recherche et sa formulation ont été plus difficiles à définir: quels
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verbes utiliser ? Doit-on mentionner la concurrence au sein d'un groupe ou doit-on
uniquement s'en tenir à la concurrence entre différents groupes ? Ces quelques questions
suffisent à saisir la difficulté du sujet. Après de multiples débats au sein de notre groupe de
recherche, nous avons jugé utile et fécond de nous en tenir à la concurrence entre différents
groupes – comme c'était le cas lors de l'épreuve du radeau – afin que notre sujet soit
suffisamment restreint pour être traité dans son intégralité en deux mois. Si le point précédent
a soulevé beaucoup de questions au sein du groupe, le choix des verbes de la question –
galvaniser et déstabiliser – s'est révélé être une évidence pour l'ensemble du groupe, tant ces
sentiments de motivation et de déstabilisation ont été forts durant le séminaire à Saint-Cyr –
lors de différentes épreuves mais également lors d'une même épreuve. S'il est vrai que la
concurrence est un thème qui a largement été observé et analysé, il était néanmoins très
intéressant de constater à quel point, à la fin de chaque épreuve, lors du debriefing, les mots :
concurrence, motivation ou encore déstabilisation étaient abondamment employés par notre
section et par notre sous-lieutenant – une manière de souligner la pertinence de notre question
de recherche.
2.2 L’hypothèse de recherche
L’hypothèse de recherche vers laquelle nous avons finalement convergé exprime ce
que nous avons ressenti lors de l'épreuve du radeau (notre fait déclencheur). En effet, une
étude sur la concurrence implique nécessairement de s'intéresser aux effets que celle-ci
produit sur des personnes. Bien que nous concevions parfaitement la possibilité que des
personnes réagissent de manière très différente, nous pensons que l'étude des effets sur un
groupe de personnes peut être analysée dans une perspective assez tendancielle, sans se
soucier d'éventuels rares cas particuliers. Les expériences que nous avons vécues au séminaire
Saint-Cyr nous ont conduit, tous les quatre, à distinguer différentes phases de réaction à la
concurrence - l'expérience illustrant le mieux cela étant bien sûr celle du radeau. Nous avons
assez rapidement convenu qu'il y avait eu une phase de déstabilisation dans un premier temps.
C'est à ce moment précis que les mécanismes du travail en groupe interviennent ; alors qu'un
individu seul pourrait ne pas supporter la pression de la concurrence et réagir de manière
compulsive, nous avons jugé qu'un groupe est, lui, galvanisé par cette concurrence. C'est une
source de motivation considérable pour un groupe que de faire face à de la concurrence. Ces
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éléments que nous avons ressentis, à plusieurs reprises, lors du séminaire, nous ont donc
amenés à inclure le facteur temps dans notre hypothèse de recherche.
2.3. L'enquête envisagée
2.3.1 L'expérience
Afin d'évaluer les effets de la concurrence sur un groupe et leur temporalité, nous
avons décidé de réaliser une expérience consistant à mettre en opposition deux groupes de
trois personnes sélectionnées au sein de la promotion (n'ayant pas forcément effectué le
séminaire à Saint-Cyr). Après de multiples interrogations sur l'épreuve à réaliser (course,
sport ou encore énigme), un membre du groupe a proposé comme épreuve le «spaghetti
marshmallow challenge» - réaliser la construction la plus haute avec pour seuls objets, des
spaghetti, un marshmallow et du scotch. Cette proposition a été validée à l'unanimité par le
groupe, car cette épreuve pouvait se révéler extrêmement féconde pour nous. En effet,
contrairement aux épreuves sportives ou intellectuelles, elle ne nécessite aucune connaissance
préalable, i.e. les deux groupes sont sur un même pied d'égalité. Ainsi, la concurrence et ses
effets sur les deux groupes participants peuvent être pleinement observés, analysés et
exploités. Nous nous attendions à ce que les deux groupes s'observent mutuellement après
quelques instants de réflexion et de discussion afin de constater l'avancée, les idées ou la
cohésion du concurrent. Dès lors, très vite, l'un des deux groupes prendra l'ascendant sur
l'autre, tandis que l'autre sera déstabilisé, perturbé et troublé. Tout l'enjeu de l'expérience
résidera alors dans l'attitude du groupe dit faible après ce moment de déstabilisation : sera-t-il
galvanisé ou, au contraire, laissera- t-il l'autre groupe gagner sans aucune espèce de révolte ?
2.3.2 L'observation
Pour notre observation, nous avons choisi de nous rendre sur un marché de fruits et
légumes afin de voir comment se comportaient les différents étalages selon la présence ou non
de concurrents. En effet, nous avons pensé qu’un marché serait un lieu où non seulement la
concurrence serait forte mais en plus très intense. D’autre part, afin d’étudier les effets de
cette même concurrence sur des groupes et non sur des individus, nous avons prévu
d’observer des étalages où plusieurs personnes travaillaient ensemble.
Nous nous attendions à ce que la présence de nombreux étalages concurrents galvanise
l’ensemble des commerçants. En somme, nous pensions que la concurrence forcerait les
commerçants à vendre leurs produits avec plus de vigueur et d’énergie. Ainsi, nous pensions
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que moins il y aurait d’étalages, moins les commerçants seraient actifs. Nous nous attendions
donc à ce que l’activité des commerçants soit proportionnelle au nombre de leurs concurrents
sur le marché.
Il est également vrai que nous croyions que certains commerçants seraient, au premier abord,
déstabilisés, lorsque d’autres viendraient s’installer sur un emplacement, avant d’être, dans un
second temps, encore plus déterminés dans la vente de leurs produits.
2.3.3. Le sondage
Le sondage que nous avons élaboré visait à nous donner une idée de la perception
qu'ont les gens de la concurrence. Cette dernière peut concerner plusieurs secteurs, mais nous
nous attendions tout de même à ce que le monde de l'entreprise soit au coeur du sondage. En
effet, c'est souvent un lieu de concurrence entre différents groupes, concurrence très souvent
inévitable. Nous avons adopté, en ce qui concerne les questions de notre sondage, une
démarche progressive pour tenter de vérifier (ou non) notre hypothèse de recherche. Ainsi,
alors qu’au début, nous avions prévu de demander, dès les premières questions, si le terme de
concurrence était davantage associé au terme de « déstabilisation » ou de « galvanisation »,
nous avons préféré interroger les sondés sur leur première réaction face à la concurrence, afin
de saisir de manière spontanée chaque effet que pouvait susciter la concurrence chez ces
personnes. Par ailleurs, nous avons choisi de diffuser ce sondage sur internet en le partageant
avec des membres de nos entourages, afin d’obtenir un échantillon plus grand. Certes, la
probabilité que ce soit avant tout des étudiants qui répondent à notre sondage était forte, mais
nous avons tout de même cru en la visibilité qu’offrent les réseaux sociaux. De plus, nous
avons tenté de partager le sondage avec des personnes de notre entourage appartenant à des
catégories socio-professionnelles différentes, afin que le sondage ne soit pas faussé.
2.3.4 Les interviews
Afin de poursuivre notre étude sur les effets de la concurrence sur un groupe
d'individus, l’idée de faire passer des entretiens à des personnes appartenant à des milieux
différents (sportif, entrepreneurial ou encore artistique) nous est apparue comme une
évidence. En effet, cette approche nous a semblé pertinente dans le sens où elle nous
permettrait d’analyser les divers effets que la concurrence peut avoir sur des groupes
n’appartenant pas aux mêmes environnements. Le but étant, selon nous, d’obtenir le panel le
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plus large possible de réactions vis-à-vis de la concurrence, afin de dégager une tendance et
de nourrir ainsi notre Mémoire en confirmant ou non, notre hypothèse de recherche.
Nous avons d’abord cherché une personne appartenant au monde de l’entreprise. En
effet, il s'agit sans doute de l'un des secteurs – si ce n'est le seul - où la concurrence se
manifeste le plus, suscitant de multiples et diverses réactions – axiome que nous avons
d'ailleurs tenté de vérifier à travers le sondage que nous avons proposé. Mais plutôt que de
chercher à interroger un quelconque chef d'entreprise ou un salarié, nous avons voulu
interroger une personne dont le poste impliquait une certaine confrontation à la concurrence.
C'est ainsi que le profil de Julien Kauffmann, vice-président du Groupe Disneyland Paris, en
charge de la branche « Transformation » de l'entreprise nous a semblé particulièrement
intéressant pour notre Mémoire. D'une part, parce que le poste qu'il occupe est intimement lié
à la gestion de la concurrence : chargé de renouveler l'organisation, les stratégies culturelles et
digitales du groupe Disney. Nous nous attendions ainsi à ce que M. Kauffmann puisse nous
faire part d'expériences en équipe au cours desquelles il aurait cherché à faire face aux
concurrents de Disney – sans doute le parc Astérix, par exemple – par l'élaboration de
nouvelles méthodes et stratégies visant à permettre au groupe de se démarquer à nouveau.
D'autre part, si nous avons pensé qu'un entretien avec M. Kauffmann pourrait spécifiquement
répondre à nos interrogations et nourrir notre Mémoire, c'est de par la position particulière
qu'occupe Disneyland Paris sur le marché : proche d'une situation de monopole en ce qui
concerne le secteur des parcs d'attractions, nous nous sommes, de fait, dit qu'il serait d'autant
plus intéressant d'étudier les effets de la concurrence sur un tel groupe. Le groupe Disneyland
Paris fait-il face à une concurrence moins importante que les entreprises travaillant dans
d'autres secteurs, comme nous aurions tendance à le penser ? Est-ce le peu de concurrence que
rencontre le groupe Disneyland Paris qui fait sa réussite ou, au contraire, le groupe rencontre-
t-il des difficultés du fait de cette situation particulière ? Autant de questions qu'il nous tardait
de poser et auxquelles M. Kauffmann semblait pouvoir répondre.
D’autre part, sachant que notre hypothèse de recherche supposait la manifestation de
deux effets consécutifs de la concurrence sur un groupe d'individus : la déstabilisation et la
galvanisation, nous nous sommes dit qu'en interrogeant des personnes venant du milieu
artistique, nous pourrions observer des réactions vis-à-vis de la concurrence, radicalement
différentes de celles observables dans le milieu sportif ou entrepreneurial, et, par ailleurs, plus
prévisibles. C'est pourquoi nous avons décidé d'organiser un entretien avec des étudiants en
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école d'art, notamment à l'EnsAD (Ecole nationale supérieure des Arts Décoratifs, ou plus
communément appelée « Arts Déco »). Le but de cet entretien était donc de voir si la
concurrence était également présente dans le milieu artistique et, si oui, d'étudier les effets de
cette dernière. Si nous avons choisi des étudiants et non des artistes, c'est dans le but de porter
notre étude sur des groupes d'individus et non des individus seuls – les travaux en groupe
étant plus fréquents dans un cadre scolaire, selon notre hypothèse. De plus, la possibilité
d'interroger deux étudiants représentait l'opportunité d'avoir potentiellement deux visions
différentes, deux impressions, peut-être, diamétralement opposées vis-à-vis de la concurrence,
nous permettant, ou bien de fondamentalement confirmer notre hypothèse initiale, ou bien de
la réfuter radicalement. Quant au choix des questions à poser à ces deux étudiants, une partie
d’entre elles rejoignait certaines des questions que nous comptions poser dans d'autres
interviews (afin, précisément, de comparer les réponses obtenues de personnes appartenant à
différents secteurs), mais nous comptions également, à travers d'autres questions, avoir plus
d'informations sur la spécificité de la concurrence qui peut se manifester dans le secteur
artistique, la spécificité des travaux de groupes qui s'y réalisent, et enfin la spécificité des
réactions obtenues vis-à-vis de la concurrence.
Par ailleurs, nous avons choisi d’effectuer un entretien avec une personnalité du
monde politique, afin d’avoir un aperçu de la concurrence qui peut s’y exercer et de savoir si
la succession entre un effet de déstabilisation et un effet de galvanisation était également
présente dans ce secteur. C’est pourquoi nous avons choisi d’interviewer le maire de
Versailles.
François de Mazières, appartenant au groupe « Les Républicains » a, en effet, selon
nous, fait face à une forme de concurrence, lors de la montée du parti d’Emmanuel Macron,
« La République En Marche ». Nous nous attendions donc à ce que M. de Mazières et son
équipe aient été déstabilisés par ce concurrent – voire par d’autres personnalités ou groupes
du monde politique. Cela nous a donc semblé particulièrement intéressant d’interroger M. de
Mazières pour savoir tout d’abord si nos attentes étaient justes mais aussi pour voir quelles
ont été les réactions de M. de Mazières et de son équipe face à cette concurrence, notamment
pour voir si l’effet galvanisateur dont nous avions supposé l’existence s’était manifesté.
La vie politique ayant la réputation d’être particulièrement rude, il nous semblait
possible que cet effet galvanisateur n’existe pas. Cependant, il était pour nous difficile de
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croire que M. de Mazières soit arrivé à un tel poste sans avoir fait preuve d’une grande
motivation et d’une grande habileté pour faire face à ses concurrents.
Pour finir, afin d’élargir notre domaine de recherche, nous avons décidé d’interroger
une personne appartenant au monde du sport. Le problème qui s’est alors imposé à nous a été
de choisir le sport adéquat, et surtout le métier de la personne interrogée. Sachant que notre
Mémoire porte sur l’action collective, avant tout, et que nous étudions notamment les effets de
la concurrence sur différents groupes, nous avons immédiatement pensé que des sports tels
que le football ou encore le rugby ne seraient pas les plus efficaces pour répondre à nos
interrogations, étant donné que seules deux équipes s’affrontent. C’est pourquoi nous avons
pensé à l’aviron : mettant en concurrence plusieurs équipes simultanément, nous nous
sommes dit que ce sport était sans doute celui où les effets de la concurrence étaient les plus
manifestes. Finalement, une course d’aviron semblait s’apparenter à la situation de notre fait
déclencheur. D’autre part, nous avons décidé, par la suite, d’interroger non pas un sportif,
mais plutôt un entraîneur. En effet, nous avons pensé que les interviews précédentes
interrogeaient déjà des personnes vivant la concurrence et subissant directement ses effets, et
c’est pourquoi nous avons voulu changer de perspective en interrogeant un entraîneur qui doit
prendre en compte la concurrence, et ne pas en faire un frein, mais une source de motivation
pour l’équipe qu’il entraîne. C’est ainsi que nous avons décidé d’interroger l’entraîneur de
l’équipe d’aviron de HEC, et de lui poser des questions, notamment sur ses discours à une
équipe, avant une course : parle-t-il des équipes concurrentes ? Si oui, les dévalorise-t-il ou,
au contraire, valorise-t-il l’équipe à laquelle il s’adresse ? La place de la concurrence dans les
discours d’un entraîneur sportif à son équipe nous intriguait et semblait pouvoir enrichir notre
Mémoire.
2.4. Références théoriques
Après avoir consulté de nombreux ouvrages concernant les effets de la concurrence,
nous avons constaté que peu d’études se centraient spécifiquement sur notre hypothèse de
recherche. C’est pourquoi nous avons préféré nous intéresser plus généralement aux différents
effets que la concurrence peut avoir sur des groupes d’individus lors d’une action collective.
Afin de saisir ces derniers dans leur majorité, nous avons décidé d’orienter notre travail
autour de trois grandes notions : la vie quotidienne, l’économie et la politique.
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2.4.1. La concurrence et ses effets dans la vie quotidienne
Il est indéniable que la concurrence fait partie intégrante de la vie de tout un chacun ;
que ce soit dans le sport ou à l'école – les deux grandes activités qui rythment la vie de
chacun, a fortiori des étudiants –, la concurrence est omniprésente.
Dans le sport, la concurrence peut avoir deux effets : ou bien elle joue un rôle
d'aiguillon, c'est-à-dire qu'elle stimule les membres de l'équipe, ou bien elle est nuisible
(crainte, ressentiment, paralysie). Le fameux documentaire sur l'épopée de l'équipe de France,
lors de la Coupe du monde 1998, Les Yeux dans les Bleus, montre très bien la place
prépondérante qu'occupe la concurrence au sein d'une équipe de football – il convient de
rappeler que la Coupe du monde est un tournoi se déroulant pendant un mois, au cours duquel
plusieurs équipes s'affrontent afin de gagner le trophée final.
Les discussions d'avant match, i.e. quand le coach (ici, Aimé Jacquet) motive ses
joueurs, quelques minutes, avant le coup d'envoi, est un exemple probant des effets positifs
que peut avoir la concurrence sur une équipe. En effet, par exemple, avant la demi-finale
France-Croatie (le 8 juillet 1998, au Stade de France), Aimé Jacquet soulignait les qualités
techniques des Croates (« de très bons joueurs de football ») pour que son équipe ne sous-
estime pas l'adversaire, et rappelait à certains joueurs de l'équipe de France qu'il ne faut pas
perdre ses moyens au cours du match (« il ne faut pas disjoncter mais il ne faut pas avoir peur
de les provoquer » répétait-il inlassablement) – et Laurent Blanc aurait sans doute dû écouter
davantage Aimé Jacquet... La situation fut très semblable, pendant le discours d'Aimé Jacquet,
avant la finale France-Brésil, quand ce dernier rappela les faiblesses de l'adversaire sur les
coups de pieds arrêtés – Z. Zidane, lui, a bien écouté les conseils d'Aimé Jacquet... Ici, on le
voit bien, l'entraîneur a su analyser la concurrence, afin de tirer les bénéfices de celle-ci et
d’amener son équipe à la victoire finale.
Enfin, il est évident que les joueurs discutent sans cesse entre eux, avant les matches
de la concurrence, i.e. ils essaient toujours de se renseigner sur les qualités des joueurs
adverses. C'est le cas lors de la veille de la finale France-Brésil lorsque F. Leboeuf demande
des conseils à L. Thuram sur les prises de balle de Ronaldo – que L. Thuram a côtoyé, quand
il jouait en Italie. Ici, le fait de jouer contre l'un des meilleurs joueurs du monde de cette
époque, Ronaldo, a sans doute galvanisé F. Leboeuf et l'équipe de France, montrant
suffisamment les effets positifs que peut avoir la concurrence dans le domaine du sport.
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A l'école, il va sans dire que les effets de la concurrence sont plus difficiles à analyser.
C'est pourquoi, afin de mieux argumenter cette partie, nous avons décidé de nous appuyer sur
une étude évaluant les effets de la concurrence à l'école (Coopération et compétition dans les
classes nombreuses, Conseil ontarien de la qualité de l'enseignement supérieur).
Contrairement à l'hypothèse émise par les chercheurs qui ont mené cette étude, il s'est avéré
que la compétition (entre classes) n'a, en aucun cas, (même si, selon les chercheurs, d'autres
facteurs, l'attitude des étudiants, notamment, ont pu influencer les résultats finaux) influé sur
la réussite des étudiants aux tests hebdomadaires – soulignant, ici, le fait que certains peuvent
rester indifférents face à la concurrence.
2.4.2. La concurrence et ses effets dans le monde politique
Il convient de replacer notre question de recherche portant sur la concurrence dans son
contexte en nous intéressant aux effets de la concurrence dans le monde politique. Dans son
film documentaire 1974, une partie de campagne, Raymond Depardon retrace la campagne de
Valéry Giscard d’Estaing à l’élection présidentielle de 1974. Ce film tente d’apporter une
réponse à la question suivante : comment les équipes de campagne des différents candidats à
des élections s’organisent-elles pour l’emporter ? Tout au long du film, nous voyons l’équipe
de campagne du candidat s’adapter, évoluer en fonction des décisions prises notamment par le
Parti Socialiste emmené par François Mitterrand. Pourtant, au début du film, à la question de
savoir si la ferveur, lors des meetings du candidat socialiste, le déstabilisait, Valéry Giscard
d’Estaing répond : « J’ai passé Polytechnique. Quand je passe un concours, je prépare ma
copie, moi, je ne m’occupe pas de celle du voisin. ». Il donne ainsi l’impression que son
équipe et lui-même se désintéressent de la concurrence. Or, lorsqu’il fait un déplacement à
Montpellier, il ne peut s’empêcher de demander au maire de la ville si les autres candidats
sont déjà venus. Signe qu’il n’est pas hermétique à la concurrence. Ce film documentaire nous
révèle le double discours de l’homme politique vis-à-vis de ses concurrents. Il dit ne pas s’en
soucier, mais il est, tour à tour, déstabilisé, puis galvanisé par la compétition électorale. Pour
illustrer cela, on peut penser à François Mitterrand. Nombre d’analystes politiques
s’accordent à dire qu’il a été déstabilisé, lors du débat de l’entre-deux-tours de 1974, puis
galvanisé, sept ans plus tard, lors du même débat en 1981.
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Certes, la concurrence dans le monde politique est forte, notamment, lors des
campagnes électorales où plusieurs partis se font face. Mais, pour un gouvernement élu, elle
est toute aussi présente, lorsque vient le moment d’exercer le pouvoir. Il est soumis à une
forme de compétition, puisqu’il est sans cesse comparé à ses homologues étrangers. Dès lors,
une question se pose : un gouvernement est-il déstabilisé ou galvanisé par la concurrence
incarnée par ses voisins ? Dans son essai La France au défi (2014), Chapitre 3 : « Serions-
nous uniques ? », Hubert Védrine explique que la réussite de l’économie allemande, depuis
les lois Hartz, au début des années 2000, a davantage déstabilisé les gouvernements français
qu’elle ne les a galvanisés. Il regrette que la concurrence allemande, au sein de l’UE, n’ait pas
poussé la France à adopter des réformes similaires à celles prises de l’autre côté du Rhin. Son
livre entier est un appel à réformer certains pans de l’économie française pour pouvoir être au
même niveau économique que l’Allemagne. A la fin de son essai, il espère que la concurrence
qu’impose Berlin à Paris galvanisera le gouvernement français et le poussera à avoir un
comportement plus réformiste.
2.4.3 La concurrence et ses effets dans le monde économique
La concurrence est omniprésente dans le monde économique. Elle est devenue, au fil
des siècles, un des piliers de notre modèle économique. La concurrence se définit en
économie par « l’existence d’une rivalité entre les vendeurs et/ou les acheteurs d’un même
produit » et se traduit, selon les théories classiques, par une situation d’équilibre économique
universel. Il convient, dès lors, de s’intéresser aux effets de la concurrence dans le monde
économique.
Dans Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Adam Smith
place la concurrence au centre de sa théorie de la « main invisible » ; elle a, selon lui, un effet
bénéfique pour l’économie d’un pays. En effet, l’ensemble des individus est en concurrence
dans la mesure où chacun cherche à améliorer sa situation économique. Les individus sont
alors, selon l’économiste, conduits malgré eux par une « main invisible », qui agit, grâce à la
concurrence, comme un mécanisme autorégulateur du marché permettant une utilisation
optimale des ressources productives. La mise en concurrence des individus a donc, selon lui,
un effet galvanisateur pour l’économie toute entière. Cela implique toutefois une concurrence
dite « pure et parfaite » avec l’ensemble des individus sur un pied d’égalité et sans
interférence d’acteurs extérieurs.
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A l’échelle des entreprises, la concurrence n’agit pas uniquement de manière
bénéfique, elle est aussi à l’origine de troubles pour les différentes entreprises qui se trouvent
dans l’obligation de s’adapter et de s’ajuster en fonction de la concurrence. Dans sa revue
économique, Raymond Courbis consacre un volume à la concurrence étrangère et à son
impact sur l’économie : Développement économique et concurrence étrangère. Dans ses
analyses, la concurrence étrangère est une source de déstabilisation profonde pour les
entreprises d’un pays, parce qu’elle perturbe notamment la tendance à l’égalisation des prix.
D’autant plus qu’un groupe de producteurs est moins en mesure de suivre les mouvements de
la demande ou de réagir rapidement à la politique des concurrents. C’est donc, à l’échelle de
l’entreprise, un véritable danger. La concurrence étrangère menace la pérennité de ces
entreprises qui sont parfois forcées de baisser leur prix, de licencier en masse, de trouver de
nouvelles sources d’innovation… En effet, puisque la concurrence étrangère pèse sur les
producteurs nationaux en leur imposant leurs prix, il s’ensuit une limitation financière de leur
possibilité de croissance. Raymond Courbis analyse alors les possibilités de réaction qu’ont
les entreprises confrontées à la concurrence étrangère. Il faut alors, à son avis, nécessairement
prendre en compte l’environnement et les contraintes qui pèsent sur l’entreprise. De manière
plus générale, il affirme que la concurrence étrangère permet, dans de nombreux cas, à une
entreprise d’améliorer sa productivité, ses coûts et sa situation financière. Le comportement
d’autofinancement, c’est-à-dire l’équilibre adopté entre autofinancement de l’entreprise et
investissements, est fondamental pour faire face à la concurrence étrangère. Cette analyse de
la concurrence étrangère est assez proche de notre hypothèse de recherche, dans la mesure où
l’on retrouve bien un premier temps de déstabilisation, puis un temps de galvanisation pour
les entreprises. Ces dernières s’adaptent et répondent à la concurrence étrangère par différents
mécanismes.
3. CE QUI RESSORT DE L’ENQUETE REALISEE
3.1. Manifestement, la concurrence est initialement déstabilisatrice pour un groupe
3.1.1. La concurrence provoque une déstabilisation qui varie en intensité selon
plusieurs facteurs
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Au cours de notre enquête, nous avons pu constater divers effets de la concurrence sur
un groupe d’individus. Cependant, l’un de ces effets nous a semblé si récurrent qu’il nous est
apparu comme pertinent d’en dégager une tendance : lorsqu’un groupe est confronté à la
concurrence, il est tout d’abord déstabilisé – observation qui s’accorde avec notre hypothèse
de recherche. En effet, que ce soit dans le milieu artistique, politique ou encore sportif, la
déstabilisation est toujours présente initialement, la seule différence réside dans la façon dont
elle se manifeste. La déstabilisation que connaît un groupe d’individus peut effectivement
varier selon différents facteurs que nous avons cherché à distinguer.
D’une part, il semble que l’intensité de la déstabilisation connue par les groupes mis
en concurrence dépend avant tout de l’enjeu lié à la tâche que ces derniers accomplissent.
Lors de son entretien avec nous, Robin Bourgeois, étudiant en école d’art en a témoigné :
selon lui, la concurrence a beau ne pas avoir beaucoup d’effet dans le domaine artistique – du
fait de la difficulté à comparer objectivement deux œuvres d’art sans se baser uniquement sur
la technique, la maîtrise des deux artistes – et donc au sein de son école- elle crée néanmoins
davantage de tensions en deuxième année et pour cause, les enjeux deviennent plus
importants pour chaque étudiant – spécialisation, préparation à l’entrée dans le monde
professionnel, création d’un réseau (particulièrement dans le secteur artistique), et la volonté
de réussir se lie souvent à des craintes que les autres fassent mieux. Noémie Pilo, l’autre
étudiante en école d’art que nous avons interrogée, confirme cette observation en soulignant
que, souvent, ce sont les projets ayant une récompense à la clé qui les exaltent le plus, elle et
ses camarades, mais qui créent également une pression sur eux, en les déstabilisant.
D’autre part, la déstabilisation causée par la concurrence peut être plus ou moins forte,
selon le groupe. Cela s’est vérifié, lors de la réalisation de notre expérience : quand le groupe
B ne prêtait aucune attention au groupe A et se contentait d’essayer de réaliser la structure la
plus haute possible, le groupe A, lui, était particulièrement inquiet du fait des avancées de
l’autre groupe. Les phrases que nous avons pu relever au cours de l’expérience, telles
que « C’est pas mal leur idée », ou encore « Arrêtez de regarder en face ! Concentrez-vous
sur ce que, nous, on fait ! Réveillez-vous ! » en sont un exemple probant – qui n’est pas sans
rappeler la situation de notre fait déclencheur. Le groupe peut donc être plus ou moins
dérangé par la concurrence et, a fortiori, plus ou moins déstabilisé. De plus, notons que
certains groupes sont plus habitués à être en concurrence et se voient donc moins touchés par
16
la première phase de déstabilisation dont nous avons supposé l’existence. Par exemple, les
maraîchers, comme nous avons pu le voir, au cours de notre observation, semblent être assez
peu déstabilisés par la concurrence que représentent les autres maraîchers, et pour cause : ils
se connaissent et sont habitués à travailler en concurrence.
Enfin, il semble également que le degré de déstabilisation qu’un groupe peut connaître
lors d’une situation de concurrence varie selon le secteur. En mettant en relation l’interview
des deux étudiants en école d’art, et l’interview de M. Sébastien Michot, entraîneur du club
d’aviron de HEC, nous nous sommes, en effet, rendu compte que si la concurrence avait
généralement des effets similaires dans la plupart des domaines – politique, artistique,
sportif…- ces effets étaient loin de s’exprimer de la même manière. En effet, dans le milieu
artistique par exemple, la déstabilisation causée par la concurrence a tendance à engendrer des
tensions : « Le groupe scénographie a été scindé en trois, par des idées contradictoires,
incompatibles. Cela a fait stagner l'action, puis, quand on a tranché, les gens ne participaient
même plus au montage et critiquaient la proposition. » explique Noémie Pilo. En revanche,
dans le domaine sportif, cette même déstabilisation peut entraîner une paralysie des membres
du groupe. L’anecdote racontée par l’entraîneur que nous avons interviewé en témoigne :
suite au départ particulièrement rapide d’un autre bateau, le bateau que notre entraîneur avait
préparé a été déstabilisé et n’a su que faire ; situation qui s’est finalement soldée par un échec.
3.1.2. Les causes de cette déstabilisation
Si les causes de la déstabilisation engendrée par la concurrence semblent multiples,
nous avons tenté de les réunir en deux principaux points.
La première source de déstabilisation dans un cadre de concurrence semble être l’effet
de surprise qu’une action du groupe concurrent peut produire. Que cette action consiste en
une idée novatrice, ou tout simplement en un geste inattendu, elle déstabilise l’autre groupe en
le prenant au dépourvu. Cette idée s’est vérifiée plusieurs fois au cours de notre enquête, à
commencer par la réflexion que nous avons portée sur notre fait déclencheur : c’est bel et bien
l’idée de tendre une corde d’un bout à l’autre du lac pour s’en servir, afin de traverser plus
rapidement, qui nous a surpris et perturbés. A partir du moment même où nous avons pris acte
de cette technique qui nous semblait presque révolutionnaire en comparaison de la nôtre, nous
sommes entrés dans une phase de déstabilisation. Mais cet effet de surprise, si déstabilisateur,
17
peut être d’une toute autre nature ; François de Mazières, maire de Versailles, nous en a en
effet donné un aperçu à travers une anecdote qui leur est arrivé, à lui et à son équipe, au cours
de la campagne qu’il a menée pour devenir maire. En effet, peu de temps avant l’élection, un
faux sondage a été publié, annonçant des résultats diamétralement opposés à ce que la
situation réelle semblait présager. Ce sondage a été relayé dans la presse et, notamment, dans
« Le Parisien ». En prenant de l’importance, il a d’autant plus déstabilisé l’équipe de M. de
Mazières. De même, comme nous l’avons évoqué précédemment, c’est le départ
particulièrement – et étonnamment – rapide d’un autre bateau qui a déstabilisé le bateau
qu’entraînait Sébastien Michot. Finalement, peu importe l’origine de l’effet de surprise, c’est
bien ce dernier qui déstabilise le groupe, lors de l’action collective, et ce, indépendamment du
domaine dans lequel la concurrence est présente. En effet, comme l’expliquait M. de
Mazières, les motifs de concurrence peuvent être très différents : dans le cas d’une élection
présidentielle, ce sont souvent les partis qui s’affrontent, tandis que, dans une élection
municipale, ce sont davantage les idées et projets pour la municipalité qui prévalent. Ainsi, la
nature du concurrent varie, mais la cause de la déstabilisation que celui-ci produit est toujours
la même : c’est l’effet de surprise.
Outre cette première cause qui s’avère être primordiale, il nous a semblé que d’autres
facteurs rendent plus accrus les effets de la concurrence et, notamment, la déstabilisation que
cette dernière peut engendrer. En effet, au cours de notre enquête, nous avons constaté que les
conditions dans lesquelles se déroule une situation de concurrence peuvent être plus ou moins
propices à déstabiliser les groupes participants. Ces conditions sont en particulier le fait que
les différents groupes se voient : en effet, lors de l’expérience, c’est bien parce qu’ils étaient
face à face que les deux groupes – et plus particulièrement le groupe A - étaient tant
influencés et affectés par la concurrence. Par exemple, lorsque le groupe A a monté sa
structure avec quelques minutes d’avance sur le délai imposé, les membres du groupe ont
commencé à regarder l’autre groupe et ses avancées, avant de se rendre compte que ce dernier
allait peut-être produire une structure encore plus haute. C’est ainsi que le groupe A s’est
remis au travail pour tenter d’élever encore sa structure, par peur de perdre l’épreuve. Le fait
que les deux groupes se soient vus pendant l’épreuve – comme c’était le cas lors de l’épreuve
du radeau qui a constitué notre fait déclencheur – nous est apparu comme étant largement la
cause de la déstabilisation constatée dans les deux groupes. A l’inverse, lorsque les groupes
ne se voient pas, les effets de la concurrence semblent plus faibles ou du moins atténués.
Prenons l’exemple de l’étude de HECQ que nous avons citée dans nos références théoriques :
18
les élèves ont subi diverses expériences dans le but de stimuler, puis d’évaluer les effets que
la concurrence pouvait avoir sur eux, et les résultats n’ont montré aucun changement notable
par rapport à la situation habituelle des élèves. On peut donc supposer qu’en l’absence du
« face à face » évoqué précédemment, les effets ne sont pas les mêmes. Mais cette condition
n’est pas unique. Au cours de notre enquête, nous avons également constaté, notamment, lors
de notre observation, qu’une autre condition existait et renforçait, elle aussi, les effets que la
concurrence pouvait avoir sur des groupes, et plus précisément l’effet de déstabilisation. Cette
autre condition est le fait que les groupes mis en situation de concurrence réalisent exactement
la même action. C’est le cas, lors des compétitions d’aviron, ou encore lors des campagnes
électorales, telles que celle décrite par M. de Mazières, mais dans le cas du marché, ce n’est
pas toujours vérifié : les primeurs vendent, en effet, les mêmes produits, et nous avons pu
ainsi constater que la concurrence entre eux était forte et déstabilisatrice (les gestes et les
appels pour attirer les clients sont multiples et variés), mais les vendeurs d’écharpes, par
exemple, s’intéressent peu à leurs concurrents pour la simple raison qu’ils ne vendent pas les
mêmes écharpes (différents matériaux, différents motifs…). Il en va de même dans le cas d’un
même projet artistique réalisé par différents groupes, mais dont chacun a la liberté de choisir
la direction à suivre : comme le soulignent Robin Bourgeois et Noémie Pilo, les œuvres
diffèrent tant qu’il est impossible de les comparer et donc pour les artistes d’être déstabilisés
par les concurrents. C’est un peu comme si, lors de notre fait déclencheur, nos concurrents
avaient eu un bateau motorisé à leur disposition : impossible de se laisser perturber par leur
technique, puisque nous n’aurions, en aucun cas, pu les imiter.
3.1.3. Si la concurrence provoque bel et bien une première phase de
déstabilisation, celle-ci est bien souvent acceptée par le groupe qui ne la voit pas
comme un frein
Après avoir montré comment la déstabilisation provoquée par une situation de
concurrence pouvait se manifester chez un groupe d’individus lors d’une action collective,
puis avoir analysé les causes à l’origine de cette déstabilisation, nous avons cherché à montrer
que cette dernière était quasiment systématique et, de fait, acceptée par le groupe. En d’autres
termes, selon nous, chaque groupe se préparant à être confronté à une situation où la
concurrence est présente, est conscient qu’il va sûrement être déstabilisé par ses concurrents,
mais ne s’en effraie pas.
19
Tout d’abord, il convient de souligner les données apportées par notre sondage : à la
question « votre groupe a-t-il éprouvé une forme d’appréhension ou d’inquiétude face à la
concurrence [lors d’une action collective à laquelle vous avez participé] ? », plus de 70% des
sondés répondent « oui » ou « plutôt oui », attestant du fait que la déstabilisation – intimement
liée à l’inquiétude et à l’appréhension – est quasiment indissociable de la concurrence.
Cependant, en s’attardant sur la question « quel mot associeriez-vous aux effets que la
concurrence peut avoir sur vous ? » qui laissait le choix entre « galvanisation » et
« déstabilisation », on note que c’est « galvanisation » qui l’emporte avec 66,7% des votes
des sondés. En mettant en relation les deux questions, on peut donc en déduire que la
déstabilisation, si elle est bien majoritairement présente chez les groupes d’individus en
concurrence lors d’une action collective, n’est pas l’effet retenu par ces mêmes groupes, en
définitive. Cela semble signifier, comme supposé en introduction de cette sous-partie, que la
déstabilisation constitue une phase inévitable pour beaucoup, mais sans être pour autant
insurmontable, au contraire.
Dans le prolongement de cette idée, si, à première vue, la déstabilisation pouvait apparaître
comme une épreuve difficile, voire décourageante, notre enquête a révélé que, dans la plupart
des cas, les groupes d’individus en concurrence ne voient pas cette déstabilisation comme un
frein. Au contraire, tous –à quelques exceptions près - sont pour la concurrence en dépit de
cette première phase de déstabilisation. Certes, les raisons ne sont pas les mêmes, mais
chaque fois que nous avons demandé à nos interlocuteurs – au cours de l’enquête – s’ils
préféraient travailler sur un projet avec des concurrents ou sans, la réponse s’est avérée
positive. Ainsi les étudiants en école d’art ont affirmé préférer avoir un concurrent sur un
projet pour en apprendre plus sur d’autres méthodes, d’autres points de vue et ce, en dépit de
la déstabilisation causée par ce potentiel concurrent. De même, de manière encore plus
tranchée, M. Michot répond à cette question « Pour moi, la concurrence est très clairement
un facteur de galvanisation. Certes, elle déstabilise un peu, au début, mais il faut passer
outre. C’est la force des grands champions qui ne se laissent pas submerger par la peur
d’échouer mais sont, au contraire, encore plus motivés par l’idée de battre leurs
adversaires. ». Enfin, M. de Mazières va plus loin dans ces propos en expliquant que dans le
monde politique, nombreux sont ceux qui souhaitent faire campagne, parce qu’ils sont exaltés
par la concurrence et tous les effets qu’elle implique, y compris la déstabilisation : en effet, la
concurrence peut déstabiliser le participant, mais c’est aussi le participant qui peut déstabiliser
ses concurrents, rendant ce jeu compétitif d’autant plus stimulant. Finalement, plus qu’un
20
frein ou qu’un repoussoir, cette phase de déstabilisation apparaît comme un challenge, un défi
à relever pour quiconque décide de se confronter à la concurrence.
Enfin, pour aller plus loin, notons que cette phase de déstabilisation peut
paradoxalement être féconde. D’une part, parce qu’elle est source d’erreur – comme dans le
cas du bateau entraîné par M. Michot, qui n’a pas eu le succès escompté, du fait d’une trop
forte déstabilisation par l’équipe adverse – et qu’elle permet à tout groupe d’individus de
rebondir sur ses erreurs, d’apprendre à mieux gérer le stress, l’appréhension et l’inquiétude
engendrées par la concurrence et, d’autre part, parce que cette même déstabilisation peut
pousser les groupes à faire de leur mieux. Ce fut le cas, lors de l’expérience, lorsque le groupe
A, déstabilisé par la progression du groupe B, a repris la construction de sa structure pour
l’élever encore plus. Ce fut aussi le cas, lors de notre observation : nous avons pu voir que les
maraîchers, déstabilisés par leurs concurrents, redoublaient d’efforts (à travers l’emploi de
nombreuses formules et offres de produits à leurs clients) pour attirer les clients à leur stand.
3.2. La concurrence se révèle être féconde pour l'ensemble du groupe
Si la partie précédente servait à montrer que le premier effet que provoquent –
chronologiquement – la concurrence et la déstabilisation, cette deuxième partie se concentrera
sur l’effet qui lui succède. En effet, au cours des diverses recherches que nous avons pu mener
lors de la réalisation de notre Mémoire, nous sommes rapidement arrivés à la conclusion
suivante : si la déstabilisation prévaut d’abord chez des groupes d’individus mis en
concurrence, elle est tendanciellement suivie d’une phase de galvanisation. Cette
galvanisation s’explique par différentes raisons que nous avons cherché à présenter dans cette
partie.
3.2.1. La concurrence permet, en effet, à chacun de ne pas s'endormir sur ses
lauriers
Il est un fait communément admis que la concurrence peut jouer le rôle d'un
électrochoc au sein d'un groupe, i.e. elle rappelle sans cesse aux membres du groupe (a
fortiori aux favoris et à ceux qui manquent de modestie) qu'il ne faut jamais s'endormir sur ses
lauriers. Telle l’épée de Damoclès, la concurrence est donc ce qui pousse un groupe à toujours
21
se surpasser, en dépit de précédentes victoires, aussi nombreuses soient-elles. En effet, sans
concurrence, le défi – quel qu’il soit – peut paraître plus fade et moins stimulant, et il peut, de
fait, manquer de motiver le groupe qui y est confronté, rendant les résultats de l’action
collective d’autant plus médiocres. A l’inverse, face à la concurrence, une forme de promesse
– aux autres ou à soi-même – de se surpasser apparaît chez chacun des individus composant le
groupe. Ainsi, à plusieurs reprises, les personnes que nous avons interviewées mentionnent
cet effet positif de la concurrence.
C'est le cas de Sébastien Michot, entraîneur du club d'aviron de HEC, qui, à l'instar
d'un Aimé Jacquet, lors de la Coupe du Monde 1998, rappelant aux stars de l'équipe de France
(Z. Zidane ou L. Blanc) de ne pas sous-estimer l'Arabie Saoudite, rappelle, lors de ses
discours, le bonheur de battre une équipe comme celle de Centrale, afin de motiver même les
plus performants. D’autre part, si cet aspect de la concurrence est visible dans le domaine du
sport, il se vérifie également dans le domaine de l'entreprise. C'est ainsi que Julien
Kauffmann, directeur de la branche stratégie de Disneyland Paris, affirme, lors de l’entretien
que nous avons réalisé avec lui, que l'un des dangers pour nous (Disneyland Paris) c'est de
nous endormir sur nos lauriers. En effet, une entreprise hégémonique comme Disneyland
Paris ne redoute pas la concurrence, compte tenu de sa puissance économique et de son
ampleur mondiale, mais la concurrence, même modeste, des croisières, concerts et autres
animations pouvant attirer le même public que celui de Disneyland Paris, joue bel et bien le
rôle d'un électrochoc qui pousse sans cesse l’entreprise à inventer de nouveaux produits et
plus généralement à renouveler ses idées. Enfin, l'expérience que nous avons réalisée est, elle
aussi, extrêmement utile pour montrer cet aspect positif de la concurrence. Si, lors de la
majeure partie de l'expérience, le groupe B (le groupe fort de l'expérience) a survolé l'épreuve,
et n'a donc pas eu besoin d'observer la concurrence et de la « copier », à la fin de l'épreuve,
lorsque le groupe A avançait, un membre du groupe B a cependant commencé à stimuler ses
camarades du groupe – afin qu'ils ne s'endorment pas sur leurs lauriers – à l'aide d’injonctions
types comme Réveillez-vous ! ».
Le risque de se reposer sur ses lauriers a beau être connu de tous, certains ont tout de
même tendance à l'oublier. C'est le cas des partis politiques français traditionnels (LR, PS,
entre autres) qui se sont très probablement endormis sur leurs lauriers et ont, en conséquence,
subi de plein fouet la concurrence de LREM. François de Mazières, par exemple, évoque, lors
de son interview, la défaite de François-Xavier Bellamy « qui ne devait avoir aucun problème
22
pour être élu », soulignant suffisamment la certitude d'une grande majorité des politiciens
quant à sa victoire face au candidat LREM. Les partis de Droite et du Centre étaient certains
de la victoire de leur candidat, ils n’ont ainsi pas su appréhender la menace que le parti LREM
pouvait représenter pour leurs partis et, pour reprendre les mots de François de Mazières « là,
il a été battu par les membres de LREM ».
Ainsi, en rappelant sans cesse la possibilité qu’un groupe adverse sorte vainqueur, la
concurrence remet sur le droit chemin tout individu s’étant égaré, rêvant de ses victoires
passées. En cela, elle se trouve donc être galvanisatrice pour le groupe impliqué dans une
action collective.
3.2.2. La concurrence permet, d'autre part, à chacun de dépasser ses limites
« Je connais mes limites, c'est pourquoi je vais au-delà » disait S. Gainsbourg. Si
certains artistes, sportifs ou encore entrepreneurs n'ont pas besoin de la concurrence pour
dépasser leurs limites, force est de constater que, la plupart du temps, la présence de
concurrents derrière soi au cours d'une course, par exemple, permet à chacun de courir plus
vite (et a fortiori plus vite que ce que le coureur pensait) et donc de dépasser la supposée
limite fixée. Et c'est précisément pour cela que, à en croire Sébastien Michot, les temps en
têtes de rivières (il s'agit de courses contre la montre) sont inférieurs à ceux en compétition
quand les équipes sont en concurrence les unes contre les autres. L’exemple des équipes
d’aviron est d’ailleurs d’autant plus pertinent que les bateaux sont en concurrence directe,
c’est-à-dire qu’ils se voient pendant l’action, et peuvent ainsi juger de la puissance technique
et de l’avance de leurs adversaires.
Par ailleurs, les discours des coaches sportifs avant un match sont un exemple probant
de cet aspect positif de la concurrence. Ce n’est pas un hasard si les entraîneurs de sport
évoquent la concurrence dans leurs discours ; au contraire, ils sont conscients des vertus de
cette dernière. En effet, les meilleurs coaches savent parfaitement manier l'art oratoire et
utiliser la concurrence (les qualités des équipes adverses « En face, c'est le Brésil ») dans le
but de motiver leurs joueurs. Par exemple, Sébastien Michot, entraîneur du Club aviron de
HEC, organise très souvent des courses lors des entraînements pour pousser chacun à se
transcender. En effet, sans courses ou sans jeux motivants (c’est-à-dire avec concurrence), il
est très facile de lasser ses joueurs – soulignant suffisamment les effets positifs que peut avoir
23
la concurrence sur un compétiteur. D'une façon très similaire, Aimé Jacquet rappelle sans
cesse à ses joueurs, lors du fameux documentaire, Les Yeux dans les Bleus, le bonheur de
jouer contre de belles équipes comme le Brésil, en finale, afin de les galvaniser et de les
transcender (c’est d’ailleurs peut-être pour cela que la France a gagné : comment l’entraîneur
du Brésil a-t-il pu motiver une équipe qui a déjà presque tout gagné ?).
A.Jacquet cherchait à ce que le fameux proverbe « A vaincre sans péril, on triomphe
sans gloire » résonne dans la tête des joueurs français.
Et la gloire fut complète.
Les joueurs de l'équipe de France écoutant attentivement Aimé Jacquet
Dans le domaine politique, Hubert Védrine espère que la concurrence de l'Allemagne
au sein de l'UE poussera la France à dépasser ses limites traditionnelles (cette réticence face
au réformisme, contrairement à l’Allemagne), c'est-à-dire celles imposées par son histoire,
son passé et ses coutumes afin d'adopter plus de réformes. Dans ce cas précis, il y a bien
transcendance, car si la France veut dépasser l'Allemagne, elle doit bien dépasser ses limites,
c'est-à-dire qu'elle doit complètement modifier et transformer son modèle économique et
social afin de trouver sa place au sein de la mondialisation. La concurrence avec l'Allemagne
peut être bénéfique pour la France – si elle s'adapte et modifie son modèle –, ce qui rejoint la
24
théorie d'Adam Smith et sa main invisible. La concurrence avec l’Allemagne poussera-t-elle
la France à se transcender ? L’avenir nous le dira.
3.2.3. La concurrence aide enfin le leader à perfectionner son groupe
Ce fait est souvent ignoré, mais la concurrence aide bel et bien le leader (le capitaine,
le chef, l'entraîneur etc.) à améliorer les performances de chacun et donc in fine de l’ensemble
du groupe. Noémie Pilo, étudiante aux Arts Décoratifs, rappelle à cet égard que la
concurrence, lors du projet qu’elle et sa classe avaient à réaliser, lors des portes ouvertes, a
poussé son groupe à faire la proposition la plus esthétique le plus rapidement possible.
Il est parfaitement banal pour un leader d'observer la concurrence et de se renseigner
sur l'adversaire, afin d'être plus efficace. Là encore, le documentaire Les Yeux dans les Bleus
est très utile pour comprendre cet aspect délicat de la concurrence. Le fait que L. Thuram (ici
occupant une place de leader de la défense au sein du groupe) utilise ses connaissances sur
Ronaldo et donc sur la concurrence avant le match France-Brésil afin d'aider ses coéquipiers
(et surtout F. Leboeuf qui connaît très peu Ronaldo) à mieux défendre sur «Il fenomeno »
indique suffisamment l'utilité qu'a la concurrence pour un leader qui cherche à perfectionner
son groupe. Même les meilleurs leaders se renseignent sur la concurrence afin d'améliorer
leur efficacité. C'est le cas de Valéry Giscard d'Estaing – qui rappelle avoir brillamment réussi
le concours de Polytechnique et donc qu'il n'a « pas besoin de copier » sur les autres – et de
son équipe qui observe sans cesse la concurrence, afin de pouvoir mieux s'adapter face à elle
et remporter l'objectif final : gagner les élections.
25
Valéry Giscard d'Estaing dans 1974, une partie de campagne
Il convient cependant de nuancer cette partie tant la forme de leading peut varier d’une
personne à l’autre et d’une situation à une autre. Si Aimé Jacquet et Lilian Thuram ont
fortement utilisé la concurrence afin de perfectionner leurs groupes lors de certains matches
(notamment face au Brésil), cela n’a pas forcément été le cas tout au long de la compétition.
Au cours de certains matches moins importants ou face à des adversaires plus fragiles, Aimé
Jacquet ne mentionnait même pas la concurrence et les joueurs de l’équipe de France ne
discutaient pas des qualités techniques de l’adversaire. C’est sans doute là que réside la force
du leader d’un groupe : savoir reconnaître les situations favorables, afin d’utiliser la
concurrence à bon escient. De la même manière – et Julien Kauffmann le souligne –, certains
leaders de grandes entreprises n’ont pas besoin d’observer la concurrence tant leur position
sur un marché est dominante et certains chefs d’étalage, remarqués au cours de l’observation,
n’ont pas besoin de se soucier des autres stands – ils se contentent de vanter la qualité des
produits qu'ils vendent – tant leurs produits sont rares et uniques.
Finalement, la concurrence permet majoritairement d’améliorer les performances
d’individus impliqués dans une action collective. Certes, un concurrent peut à première vue
effrayer ses adversaires, mais représenter aussi une source de motivation, un défi, un
challenge pour tous ses adversaires. En cela, on peut dire que la concurrence est
indéniablement liée à cet effet qu’est la galvanisation.
26
3.3. La concurrence : point d’appui à tout succès futur
3.3.1. La concurrence : phénomène omniprésent qui ne peut nous laisser
complètement indifférents
La concurrence se trouve être un sujet particulièrement intéressant à étudier, puisqu’il
s’agit là d’un concept occupant un place centrale dans de nombreuses activités (milieu sportif,
milieu artistique, milieu scolaire, milieu professionnel). Dès lors, nous ne pouvons y être
indifférents, i.e. faire comme si elle n’existait pas, comme si on pouvait y être parfaitement
hermétique, c’est ce que nous a enseigné l’expérience que nous avons réalisée, suite à notre
expérience terrain à St-Cyr Coëtquidan. Lors de cette dernière, nous avons mis deux équipes
de trois étudiants d’HEC, chacune derrière une table face-à-face, avec un même objectif :
celui de construire avec des spaghettis et des chamallows la construction la plus haute
possible, en un temps limité. Mais, dès le début de l’épreuve, les membres de l’un des deux
groupes ne cessaient de jeter des coups d’œil à leurs adversaires pour voir ce qu’ils
réalisaient. Ils étaient extrêmement préoccupés par les prises de décision de leurs adversaires.
Puis, dans la seconde partie de l’épreuve, chaque équipe a été galvanisée, motivée par la
présence de l’autre comme l’illustrent les citations ci-après que nous avons relevées : « il faut
qu’on se dépêche ! », « mais plus vite, ils sont plus rapides que nous ! », « ils vont être plus
hauts que nous ! ». La concurrence qui était présente dans cette épreuve a véritablement
poussé chaque équipe à surmonter ses difficultés, à se transcender. Ainsi, l’expérience que
nous avons menée nous a permis de comprendre que la concurrence agit toujours sur nous,
que nul ne peut y être complètement hermétique.
Nous venons de voir que nous ne pouvons pas faire abstraction de la concurrence,
qu’elle influence notre comportement, nos prises de décision, notre façon d’agir, de penser, de
réfléchir. L’interview que nous avons réalisée avec Julien Kauffman (directeur de la branche
transformation de Disneyland Paris) a renforcé cette idée notamment lorsqu’il a évoqué la
concurrence que vit son entreprise sur le marché local. L’expression « marché local » voulant
ici signifier le marché de l’Ile-de-France. Il nous a expliqué que le parc Disneyland basé à
Marne-la-Vallée dans l’est parisien a créé des évènements (soirées d’Halloween, de Noël, du
Nouvel An) en réaction aux nombreuses activités qui ont lieu dans la capitale (concerts,
27
cinémas, rencontres sportives, fêtes foraines, musées) et qui constituent, en fin de compte, les
principaux concurrents du parc d’attraction de Marne-la-Vallée. Ainsi, la concurrence à
laquelle doit faire face le parc Disneyland Paris est somme toute assez étrange. En effet, ses
concurrents ne sont pas comme lui des parcs d’attraction Nous comprenons donc que la
concurrence ne nous laisse pas indifférents, mais que, plus précisément, elle nous pousse à
nous adapter, à évoluer, à nous réinventer sans cesse. L’innovation est donc ce qu’on pourrait
appeler le fruit de la concurrence.
Ainsi, nous arrivons donc à la conclusion que la conclusion est un phénomène
omniprésent qui ne peut nous laisser indifférents. La concurrence influence nos
comportements, nos réflexions, nos prises de décision. L’observation a été, en la matière,
riche d’enseignements, puisque, dès de le début, nous avons pu voir que chaque stand se
comparait aux autres avec des formules telles que : « ici, nous vendons les meilleurs
champignons du marché ! » ou encore « venez, venez, vous ne trouverez pas moins cher ! ».
Chaque commerçant essayait de se démarquer des autres, de montrer en quoi ses produits
étaient différents des autres, uniques. Par exemple, dès que l’un d’entre eux organisait des
dégustations gratuites pour les clients, certains se mettaient à faire la même chose. Ils se
copiaient les uns les autres. Nous voyons donc que la concurrence peut nous galvaniser, nous
motiver, nous permettre de nous transcender mais elle peut aussi avoir l’effet inverse. C’est là
tout son côté ambigu. C’est ce que nous a enseigné la discussion, très enrichissante, que nous
avons eue avec Sébastien Michot (entraîneur d’aviron à HEC Paris). Il nous a très clairement
raconté l’histoire d’un bateau HEC lors des championnats de France d’aviron qui, en 1/2 de
finale, avait complètement perdu pied du fait de la concurrence des bateaux voisins. Le départ
très rapide des autres équipages avait complètement déstabilisé l’équipage qu’il entraînait,
alors que si l’on se fiait aux temps réalisés, le matin-même, l’embarcation HEC avait vraiment
toutes ses chances de se qualifier pour la finale nationale. Ce qui ne fut malheureusement pas
le cas, au grand dam de tous les membres de l’association sportive HEC Aviron.
3.3.2. Réussir, c’est vivre la concurrence comme un moteur et non comme un
frein
La concurrence est un phénomène ambigu qui se révèle être déstabilisateur au début,
mais qui, par la suite, peut devenir source de galvanisation. Nous avons tiré de l’interview
avec Sébastien Michot une conclusion encore plus forte. « Elle n’est pas simplement une
28
source de galvanisation potentielle » : elle doit le devenir, elle doit pousser les membres d’un
groupe à se surpasser. Certes, l’appréhension qui existe lorsque nous sommes face à la
concurrence, il ne faut pas la nier, mais il faut qu’elle s’estompe pour laisser place à une
émulation et une stimulation collectives. Il faut se servir de la concurrence pour être encore
plus motivés, plus déterminés. Pour S. Michot, « la force des grands champions » est
précisément d’arriver très vite à vivre la concurrence non pas comme un frein - possible
entrave à la performance et à la réussite - mais comme un moteur. Ainsi, nous comprenons
que la réussite - au sens d’atteindre un objectif que l’on s’est fixé au préalable - dépend de
notre capacité à ne pas subir la concurrence mais à la vivre comme un tremplin pour se
dépasser. On ne doit pas, si l’on veut réussir, voir la concurrence comme un mur gigantesque
qui se dresse face à nous mais comme un outil qui nous permettra d’atteindre nos objectifs. La
peur de l’échec doit disparaître au profit d’une volonté farouche de faire mieux que
l’adversaire, de le surpasser. Sébastien Michot nous a raconté ses meilleures courses, lorsqu’il
était sur la ligne de départ, ses coéquipiers et lui-même ne pensaient plus qu’à une seule
chose : faire mieux que les autres bateaux, eux-aussi prêts à en découdre.
Lorsque la concurrence n’est plus perçue que comme une entrave, elle inhibe tout le
groupe et nuit gravement à sa réussite. Par exemple, S. Michot a rencontré dans sa carrière
d’entraîneur à HEC, mais aussi dans des clubs affiliés à la Fédération Française d’Aviron, des
personnes avec un très bon niveau d’aviron mais qui ne souhaitaient pas faire de la
compétition, car ils vivaient très mal le fait d’être mis en concurrence. Ils n’ont donc jamais
participé à quelque compétition que ce soit et n’ont jamais pu montrer pleinement leur
potentiel hors des séances d’entraînement. L’interview menée avec François de Mazières
(maire de la commune de Versailles) va également dans ce sens. Il nous a expliqué que tout
candidat à une élection politique, qu’elle soit locale ou nationale, vit à la fois la concurrence
comme une source de déstabilisation et comme un facteur de galvanisation. Cependant, il
existe certaines personnes avec parfois d’excellents projets qui n’oseront jamais se présenter à
n’importe quelle élection car ils ont trop peur de l’échec. La peur d’échouer est ainsi, pour
certaines personnes, plus forte que le désir de mener campagne pour pouvoir appliquer son
projet politique.
Une fois cette peur de l’échec passée, la concurrence peut véritablement pousser tout
un groupe à se dépasser et à se réinventer, c’est l’une des nombreuses conclusions que nous
avons pu tirer de notre rencontre avec Julien Kauffman (directeur de la branche
29
transformation de Disneyland Paris). Il nous a, par exemple, expliqué que la présence
d’Europa Park en Allemagne ou des croisières en Méditerranée poussaient le parc Disney à
créer de nouveaux évènements et donc à diversifier son offre, afin d’attirer encore plus de
visiteurs européens.
4. BILAN
4.1 Retour sur la question de recherche, l’hypothèse, l’enquête réalisée.
Après près de deux mois d’enquête et de réflexion, notre question de recherche nous
paraît toujours pertinente. Celle-ci s’est révélée être d’une grande richesse tant les réponses
possibles peuvent être variées. S’il est toujours impossible d’apporter une réponse tranchée et
se vérifiant en toute situation, nous avons quand même pu dégager des tendances générales.
Avant de réaliser un bilan de l’enquête, rappelons notre question de recherche ainsi que notre
hypothèse de recherche : la concurrence galvanise-t-elle un groupe lors d'une action collective
ou, au contraire, le déstabilise-t-elle ?
Dans une situation de concurrence, on remarque une phase de déstabilisation, dans un
premier temps. C'est alors à ce moment que les mécanismes du travail en groupe
interviennent, alors qu'un individu seul pourrait ne pas supporter la pression de la concurrence
et réagir de manière compulsive, un groupe est alors galvanisé par cette concurrence.
Après avoir réalisé notre sondage, nos entretiens, notre expérience et notre
observation, nous constatons que notre hypothèse de recherche peut être confirmée dans une
assez large mesure. Nous avons, bien sûr, fait face à des situations où notre hypothèse n’était
pas fidèle à la réalité, nous avons donc dû distinguer certaines situations particulières pour
lesquelles l’hypothèse ne fonctionne pas comme dans le cas des projets menés au cours de la
première année par les étudiants à l’EnsAD, Robin Bourgeois et Noémie Pilo. Mais au-delà
de ces quelques inflexions que nous avons apportées à l’hypothèse, les personnes
interviewées et sondées nous ont globalement confirmé que notre intuition de départ était
assez juste. L’aspect chronologique de notre hypothèse est l’élément de l’hypothèse le plus
souvent remis en question. En effet, mis à part les rares cas où un groupe (ou une personne)
n’est absolument pas déstabilisé par la concurrence, nous avons remarqué que la concurrence
est toujours déstabilisatrice et/ou galvanisatrice. C’est donc l’ordre dans lequel ces
30
phénomènes interviennent qui est déterminant. Cet ordre chronologique que nous avons établi
dans notre hypothèse nécessite un certain nombre de conditions, pour qu’il soit bien effectif.
L’interview avec Julien Kauffmann nous a montré qu’il était nécessaire que le rapport
de force entre des entreprises qui se font concurrence soit à peu près équilibré. La Walt
Disney Company ne peut pas véritablement être déstabilisée par un concurrent, puisqu’il
n’existe pas d’entreprise à peu près comparable. Dans ce cas précis, nous ne pouvons donc
pas véritablement parler d’une forme de concurrence qui déstabilise réellement la Walt
Disney Company ou bien leur filiale en France. En revanche, Julien Kauffmann reconnaissait
parfaitement que la concurrence à laquelle ils font face a permis à Disneyland Paris de
devenir ce qu’ils ne seraient très certainement jamais devenus sans elle. C’est ce qui l’a
amené à affirmer : « La concurrence ne nous a jamais déstabilisés, parce qu'on est vraiment
hégémoniques, mais on a besoin de la concurrence. Un des dangers pour nous, c'est de
s'endormir sur nos lauriers. Finalement, heureusement qu'on a Europa Park, les croisières en
Espagne et les événements sur Paris. Sans eux on aurait probablement jamais créé les soirées
techno, le semi-marathon… cela nous a clairement poussé à nous réinventer et ça a
forcément joué sur les résultats de l'entreprise. »
Pour sa part, l’interview avec Robin Bourgeois et Noémie Pilo nous a montré qu’un
domaine comme l’art ne vérifie pas véritablement l’hypothèse, du moins dans certains cas,
puisque la beauté d’une œuvre relève d’un critère subjectif et qu’il est par conséquent peu
fréquent d’être déstabilisé à la vue d’une œuvre d’un artiste concurrent. Mais c’est là encore
la concurrence des autres artistes qui pousse un artiste à se réinventer et à travailler toujours
plus.
Nous nous voyons donc dans l’obligation de nuancer quelque peu notre hypothèse de
recherche. On distingue bien un temps de déstabilisation et un temps de galvanisation dans la
majeure partie des cas, mais cela doit se faire dans un certain cadre, un schéma où plusieurs
groupes sont en concurrence les uns avec les autres avec un rapport de force à peu près
équivalent et où un évènement marquant provoque une situation déstabilisatrice pour un
groupe. Dans ce contexte, notre hypothèse de recherche semble bien se vérifier, nous avons
pu le constater avec notre expérience ou encore avec les interviews du maire de Versailles
François de Mazières et de l’entraîneur du club d’aviron de HEC, Sébastien Michot.
L’observation nous a, quant à elle, montré que lorsque des groupes d’individus sont en
concurrence en l’absence d’un évènement marquant mettant un groupe en difficulté, notre
hypothèse ne se vérifie pas tout à fait. Cela s’explique très certainement par le fait que nous
avions au départ surtout pensé à notre fait déclencheur, où s’est bien produit un évènement
31
marquant de la sorte. Et donc, trop focalisés sur notre fait déclencheur, nous n’avons pas
parfaitement mesuré la complexité de la question et les situations diverses sur lesquelles elle
peut déboucher. Notre bibliographie a eu en quelque sorte le mérite de nous ouvrir les yeux
là-dessus. En effet, dans notre bibliographie, nous avons creusé le sujet de la concurrence
dans quatre domaines assez différents (la concurrence dans la vie quotidienne, dans le sport,
dans la politique et dans l’économie) et nous avons alors constaté l’étendue et la richesse du
sujet. Cela nous a amené à reconnaître que notre hypothèse aurait peut-être dû être encore
plus précise, pour être davantage pertinente. Toutefois, cette étude approfondie de la
concurrence que nous avons été amenés à faire n’a, en aucun cas, remis en question nos
résultats pas plus qu’elle ne nous a fait douter de la démarche réalisée.
4.2 Perspectives, limites, interrogations, apports
Pour revenir sur certains aspects de l’enquête qu’il aurait été possible d’améliorer ou
de réaliser différemment, nous pouvons évoquer notre expérience. Il aurait très certainement
été possible de modifier quelques détails pour tenter de reproduire exactement le schéma
concurrentiel décrit dans le bilan ci-dessus. En effet, en mettant les groupes à une distance un
peu moins éloignée, nous aurions très certainement créé le contexte idéal pour obtenir le
résultat qu’on attendait. Nous aurions aussi pu donner quelques consignes supplémentaires
pour renforcer le contexte de concurrence. Aussi, en ce qui concerne notre observation, il
aurait été certainement encore plus intéressant qu’un évènement marquant mettant un des
groupes en difficulté intervienne. En effet, si, par exemple, un des groupes avait bénéficié
d’un emplacement qui le favorisait sur le marché ou encore si un groupe avait eu plus de mal
que les autres à attirer des clients, notre observation aurait, à n’en pas douter, été plus riche et
plus cohérente avec notre hypothèse.
De même, nous pouvons également regretter que la grande majorité des gens ayant
répondu à notre sondage ait eu entre 18 et 25 ans. Il était pour nous beaucoup plus facile
d’obtenir des réponses d’étudiants via les réseaux sociaux que de personnes d’une catégorie
socioprofessionnelle différente de la nôtre. Nous aurions souhaité avoir des profils plus
différents et nous pouvons ainsi soulever une forme de biais dans notre sondage. La part des
plus de 45 ans est notamment très faible, ce sont pourtant des personnes qui ont
théoriquement plus d’expériences professionnelles et nous ne pouvons que regretter de
n’avoir eu que peu de réponses de cette classe d’âge. Nous avons été confrontés à la difficulté
32
d’obtenir des réponses de profils variés, élément pourtant nécessaire à la constitution d’un
sondage.
Au terme de l’enquête et de son exploitation, nous avons pu constater que nous avons
pris certains risques en étudiant la concurrence en tant que telle et sans nous restreindre à la
concurrence dans un domaine spécifique. Nous avons, en effet, interviewé des personnes
travaillant dans des milieux très différents (monde de l’entreprise, du sport, de l’art, de la
politique) et nous avons réussi à tirer de ces moments passés avec eux suffisamment
d’éléments pour pouvoir répondre à notre question de recherche. C’est d’ailleurs le fait
d’avoir interviewé des personnes aussi différentes et d’avoir étudié la concurrence sous des
angles aussi différents qui nous a permis de dégager un schéma plus précis dans lequel notre
hypothèse semble se justifier parfaitement. Cela nous a permis de continuer d’avancer, malgré
la présence d’éléments qui allaient en partie à l’encontre de notre hypothèse de recherche.
En somme, malgré les contraintes auxquelles nous avons dû faire face, l’enquête réalisée
nous a permis de répondre à notre question de recherche. En affinant notre hypothèse de
recherche, nous sommes arrivés à la conclusion que celle-ci se vérifie. Nous conservons donc
notre hypothèse de départ, mais nous ajoutons deux précisions :
- Le contexte concurrentiel ne doit pas être très nettement favorable à un des groupes
en concurrence, sinon la concurrence ne peut pas véritablement être source de
déstabilisation pour le groupe en question.
- Il est nécessaire qu’un fait perturbateur pour un groupe intervienne, et c’est à partir de
là que notre hypothèse va se mettre en place.
4.3Prospective
Si nous avions eu plus de temps, nous aurions pu effectuer de nombreuses autres
interviews, tant dans des domaines que nous avions déjà explorés que dans de nouveaux
domaines. Cela nous aurait alors permis de continuer à rechercher si notre hypothèse se
vérifiait dans les domaines déjà étudiés et d’observer si elle se vérifiait encore dans d’autres
domaines. Nous aurions notamment aimé interviewer un sociologue. En effet, les
conséquences de la concurrence dans le domaine sociologique, la pression qu’un groupe peut
subir à cause de la concurrence ou encore les différentes réactions que peut avoir une
33
population étudiée, selon sa personnalité, ses expériences, son passé… nous paraissaient très
intéressantes à étudier.
Nous aurions également aimé approfondir notre étude dans les domaines déjà étudiés pour
comparer avec plus de précisions les effets de la concurrence dans les différents domaines que
sont le sport, la politique.... Par exemple, nous aurions pu essayer de réaliser des sondages en
fonction du domaine dans lequel les gens travaillent : un sondage pour les personnes
travaillant dans le milieu du sport, un autre pour la politique… Cela aurait cependant été une
tâche longue et difficile.
5. ANNEXES
5.1. L’observation
L'observation d'un marché s'est déroulée comme ce que nous avions prévu à quelques
détails près, nous permettant de confirmer en partie notre hypothèse de recherche. En effet,
nous sommes arrivés lors de l'ouverture du marché et de l'installation des différents étalages
afin de pouvoir observer l'évolution du comportement des primeurs au fur et à mesure de la
matinée et il s'est avéré que leur comportement vis-à-vis de la concurrence a bel et bien
changé. Tôt dans la matinée, le flux de clients étant faible, les vendeurs ont eu tendance à
davantage se comparer aux autres stands, avec des formules telles que « ici, nous vendons les
meilleurs champignons du marché ! » ou encore « venez, venez, vous ne trouverez pas moins
cher ! » mais aussi des techniques de ventes telles que le fait de proposer aux clients de goûter
certains produits ou d'emporter gratuitement des herbes ou épices en plus de leurs achats. En
revanche, vers midi, le flux de clients était beaucoup plus important et les vendeurs ne
s'attardaient pas tant à valoriser leur étalage par rapport à ceux de leurs concurrents, mais
plutôt à vendre le plus possible et le plus rapidement possible. Le souci d'efficacité dont les
vendeurs font preuve est d'ailleurs flagrant : se répartissant chacun un côté de leur étalage, ils
maximisent ainsi les ventes et ne font pas trop attendre leurs clients. Ce premier constat nous
a ainsi permis de valider une partie de notre hypothèse : le rapport d'un groupe d'individus –
nous avons en effet pris soin d'observer les stands où plusieurs primeurs travaillaient
34
ensemble, afin de rester dans le thème de l'action collective – à la concurrence évolue bel et
bien avec le temps. Cependant, notre hypothèse supposait une première phase de
déstabilisation, puis une seconde phase de galvanisation, tandis que, dans les faits que nous
avons observés, il semble que la première phase par laquelle passent les primeurs – lorsque le
flux de client est faible – soit une phase de déstabilisation et de galvanisation à la fois. En
effet, c'est à la fois parce qu'ils sont préoccupés et motivés par la quantité de concurrents qui
les entourent que les primeurs agissent en tentant d'attirer les clients à leurs étalages par des
formules comme celles citées plus haut. Quant à la deuxième phase par laquelle passent les
primeurs – lorsque le flux de clients est devenu plus important – elle semble bel et bien
s'apparenter à une phase de galvanisation, mais cette dernière est aussi bien due à la présence
d'étalages concurrents qu'à la présence de nombreux clients.
Un autre point que nous avons pu analyser lors de cette observation et qui nous en a
appris sur les effets de la concurrence sur un groupe d'individus est le suivant : alors que les
primeurs qui vendent les mêmes produits sont très actifs vis-à-vis de la concurrence – comme
nous l'avons précédemment décrit – les vendeurs dont les produits sont uniques (écharpes à
motifs particuliers, par exemple) ne se soucient pas des autres stands et se contentent de
vanter la qualité des produits qu'ils vendent, sans invoquer les autres étalages. De ceci, nous
avons tiré la conclusion suivante : si les effets de la concurrence peuvent se manifester de
façon tendancielle suivant les étapes que nous avons décrites dans notre hypothèse de
recherche, ces étapes ne sont que tendancielles et non pas universelles. La concurrence n'agit
pas toujours de la même façon sur un groupe d'individus, puisqu'elle n'est pas toujours directe.
En effet, dans le cadre des écharpes, le vendeur qui les possède n'a pas de concurrent
immédiat, puisque son produit n'existe que chez lui.
Cependant, avec du recul, nous avons trouvé deux points négatifs à notre observation.
Le premier est le fait que, dans un marché, les différents primeurs se connaissent pour la
plupart et cela modifie de fait leur rapport à la concurrence. En effet, contrairement à la
situation de notre fait déclencheur, dans laquelle nous faisions véritablement face à une
concurrence pour la première fois, depuis le début de notre séjour sur le camp de Saint-Cyr –
lors des précédentes épreuves, les autres groupes n'étaient pas si proches de nous, et nous ne
pouvions ainsi pas comparer notre avancée à la leur – les maraîchers, eux, se connaissent et
sont habitués à la concurrence qui leur est voisine. Le deuxième point qui a faussé notre
observation est le fait que nombre de clients achetant leurs produits sur un marché ont leurs
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étalages favoris. De fait, dans certains cas, les maraîchers n'ont même plus à se soucier de
leurs concurrents, puisqu'ils sont conscients du fait que leurs habitués reviendront chez eux.
Cette observation est cependant à nuancer, car nous avons pu assister à la plainte d'une cliente
qui avait acheté un mauvais melon, la semaine d'avant. Le primeur responsable de cette
mauvaise vente a donc dû, pour éviter de perdre cette habituée, lui faire un geste commercial
et lui offrir un nouveau fruit.
Finalement, cette observation nous a permis de montrer que notre hypothèse de
recherche était en grande partie légitime, répondait véridiquement à notre question de
recherche. Aussi, nous a-t-elle permis d'affiner nos suppositions. Le bilan que nous pourrions
ainsi tirer au terme de cette observation est le suivant : la concurrence ne produit pas
nécessairement un effet de déstabilisation suivi d'un effet de galvanisation sur un groupe
d'individus, mais en cas de concurrence directe, c'est-à-dire, lorsque plusieurs groupes ont le
même objectif et cherchent à l'atteindre simultanément et à proximité, une tendance se
dégage : celle d'une première phase de déstabilisation, et d'une seconde de galvanisation.
5.2. L’expérience
Dans le cadre de notre Mémoire qui s’articule autour de la question : « La concurrence
galvanise-t-elle un groupe, lors d’une action collective ou, au contraire, le déstabilise-t-
elle ? », nous avons tenu à réaliser, nous-mêmes, une expérience qui ne nécessitait aucune
connaissance préalable, de manière à ce que les deux groupes qui la réalisent soient sur un
parfait pied d’égalité. Ainsi, nous avons placé deux groupes de 3 étudiants d’HEC face-à-face.
Le défi était simple : chaque équipe devait construire avec des spaghettis, un chamallow et du
scotch la construction la plus haute possible. Nous avons réalisé cette épreuve dans une salle
de classe. Les deux groupes avaient chacun leur bureau, de manière à ce qu’ils puissent voir
très vite ce qu’était en train de réaliser leur adversaire. Nous avons pensé qu’avec cette
disposition spatiale la concurrence se ferait véritablement sentir dans chaque équipe. Nous
avons fixé la durée de l’épreuve à 15 minutes et nous avons laissé aux deux groupes la
possibilité de surveiller le temps qu’il leur restait.
Au début de l’épreuve, la concurrence de l’équipe adverse influençait chacun des 2
groupes. En effet, tout le monde chuchotait afin de ne pas se faire prendre ses idées par le
groupe adverse. Très vite, des regards furtifs vers l’autre bout de la pièce étaient visibles.
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Chacun des deux groupes essayait de voir quelle stratégie adoptait l’autre. Nous sentions de la
tension dans une équipe en particulier que nous appellerons l’équipe A. Les avancées de leur
concurrent semblaient les déstabiliser car ils n’arrêtaient pas de changer de stratégie. Parfois,
ils voulaient assembler les spaghettis un par un. Et, quelques minutes après, ils décidaient
d’utiliser des groupes de spaghettis attachés par du scotch. Ils n’arrêtaient pas de changer
d’avis. L’un des membres du groupe A a dit alors : « c’est pas mal leur idée », signe qu’ils
étaient, décidément, en pleine hésitation.
Le groupe A semblait valider le début de notre hypothèse de recherche, à savoir que la
concurrence déstabilise un groupe, lors d’une action collective. Mais, ce n’était pas le cas
pour l’autre groupe que nous appellerons le groupe B. En effet, ce groupe a très vite choisi sa
stratégie et ne semblait ni perturbé ni dérangé par la présence d’une équipe concurrente. Les
trois membres de ce groupe étaient relativement sereins, sûrs que les décisions prises étaient
les bonnes et qu’elles pouvaient les mener jusqu’à la victoire, lors de cette épreuve.
Vers le milieu de l’épreuve, c’est-à-dire au bout de 7-8 minutes, il y a eu un changement
au sein du groupe A. Alors que 2 membres de l’équipe sur 3 passaient la plus grande partie de
leur temps à observer le groupe B, le troisième membre a tapé du poing sur la table en
s’exclamant « Arrêtez de regarder en face ! Concentrez-vous sur ce que, nous, on fait !
Réveillez-vous ! ». A partir de ce moment-là, le groupe A s’est véritablement mis à être plus
efficace et à ne plus changer sans arrêt de tactique. Les regards vers l’équipe B ont cessé, et
chacun s’est attelé à la tâche qu’on lui avait confiée. L’un des membres s’occupait de couper
du scotch, tandis que les deux autres s’occupaient de la construction en elle-même. Nous
avons également senti qu’à ce moment-là le groupe A mettait plus d’énergie et
d’enthousiasme dans leur réalisation. Ils commençaient à être galvanisés par la mise en route,
certes tardive, mais très efficace, du groupe B. Nous avons pu relever les phrases suivantes au
sein de l’équipe B : « il faut qu’on se dépêche ! », « mais plus vite, ils sont plus rapides que
nous ! », « ils vont être plus hauts que nous ! ».
Ainsi, c’est véritablement dans la seconde moitié de notre expérience que les choses se
sont vraiment accélérées et ont commencé à être, dans le cadre de notre travail de recherche,
intéressantes. A la fin, les deux groupes étaient vraiment galvanisés par la concurrence. Le
groupe A voulait à tout prix rattraper le groupe B qui l’avait dominé globalement tout au long
de l’épreuve, tandis que l’équipe B ne souhaitait surtout pas être rejointe par leur adversaire.
En résumé, ils avaient tous les deux envie de dépasser leur adversaire. Ils s’encourageaient,
s’entraidaient, se motivaient pour battre le groupe qui les défiait. Nous avons relevé les
phrases suivantes : « On est plus haut qu’eux ! C’est bon ! », « Leur construction va tomber !
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Elle bouge !», « Mince…les gars…ils sont plus haut que nous ! ». Dans les toutes dernières
minutes de l’épreuve, les idées fusaient au sein des deux équipes. Et comme les deux groupes
étaient espacés d’une petite dizaine de mètres, dès qu’un d’eux avait une idée pour sa
réalisation, l’autre était au courant et essayait d’en trouver une pour sa propre construction. A
la fin de l’épreuve, c’est le groupe A qui a gagné. Sa construction ne dépassait pourtant celle
du groupe B que de 5 centimètres.
L’issue de cette épreuve semble valider notre hypothèse de recherche, à savoir que la
concurrence, dans un premier temps, déstabilise un groupe, lors d’une action collective, puis
qu’elle le galvanise. C’est exactement ce qui s’est passé pour le groupe A. Les membres de ce
groupe ont véritablement connu une phase de déstabilisation, au début, puis ils ont été
galvanisés par la concurrence de l’équipe B.
Cependant, nous pourrions émettre certaines critiques quant à notre protocole
expérimental. Nous aurions peut-être dû rapprocher les deux groupes l’un de l’autre, pour
qu’ils ressentent davantage la pression et la concurrence de leur adversaire, dès le début de
l’épreuve. Nous pensons que le groupe B a été peu affecté par la présence du groupe A, au
début de l’épreuve, à cause de cet éloignement spatial. 5 mètres d’écart auraient peut-être été
plus pertinents que 10 ? Enfin, pour accentuer encore le sentiment de concurrence entre les
deux équipes, nous aurions pu les forcer à observer ce que réalisait le groupe adverse, disons
toutes les 4 minutes. Libre aux participants, dès lors, de tenir compte des observations sur la
construction de l’équipe adverse pour leur propre réalisation. Nous aurions sans doute
davantage pu mesurer le degré de déstabilisation ou de galvanisation des 2 groupes
participants de l’épreuve
5.3. Le sondage
Afin d’obtenir plus de réponses, nous avons préféré diffuser le sondage sur internet,
notamment sur les réseaux sociaux, mais aussi par envoi de mails à des membres de notre
entourage, dans le but de diversifier les catégories socio-professionnelles de nos sondés
notamment. Voici les résultats que nous avons obtenus.
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5.4. Interviews
5.4.1. Interview de Noémie Pilo et Robin Bourgeois, étudiants à l’ENSAD
1) Pourriez-vous vous décrire ainsi que ce que vous faites actuellement ?
NOEMIE : « Je m’appelle Noémie Pilo, j’ai 19 ans et j'entre en troisième année à l'Ensad
(Ecole Nationale des Arts Décoratifs de Paris) ou " Arts Déco " dans la spécialité « Art
Espace » qui concerne la mise en espace, la sculpture, l'installation et la performance. Ça
prépare aux métiers comme artiste commissaire d'exposition, curateur, scénographie
d'exposition etc. »
ROBIN : « Je m’appelle Robin Bourgeois, je suis étudiant en 3ème année à l'EnsAD, section
design objet. Avant ça, j’ai fait un bac S (sport-étude), puis un an en classe préparatoire
publique aux écoles d'art. »
2) Avez-vous déjà participé à des projets/activités de groupe dans le cadre de votre
scolarité aux Arts Décoratifs et si oui, en quoi consistaient ces activités ?
NOEMIE : « Nous avons eu des "workshops" : en première année, par exemple, nous avons
dû penser une scénographie pour les portes ouvertes (comment montrer les projets de la
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promo dans nos salles…). Nous étions en groupes, puis un jury a choisi une proposition que
nous avons ensuite dû réaliser tous ensemble, donc en réorganisant les groupes.
Deuxième exemple de workshop en deuxième année, cette fois : nous avons dû créer de petits
groupes pour réaliser des affiches de métro pour les 250 ans de l'école. Le but était de
montrer certaines réalisations des élèves de l'école au public ainsi que de mettre en avant
l’anniversaire de l’école. Certaines des affiches seulement seraient choisies (150 en tout).
En deuxième année encore, nous avons dû organiser la scénographie d'une exposition
collective autour du thème des « objets perturbés » (d'après le terme d'André Breton) au
MacVal (musée d'art contemporain du Val-de-Marne). Nous avions donc réalisé par petits
groupes de 10-15 les pièces à exposer sur ce thème. »
ROBIN : « Pour ne pas reprendre les projets cités par Noémie, je me concentrerai sur les
projets en équipe que nous avons faits en deuxième année (puisque je n’ai pas la même
spécialité). En bazar, selon ma mémoire récente et faillible : un projet sur un trimestre en
duo, consistant en la réalisation d'un banc avec matériaux imposé ; un projet de sculpture en
duo en cours de couleur : un acte plutôt artistique, disons plastique. »
3) Au cours de ces travaux de groupes, diriez-vous que vous avez déjà ressenti une forme
de concurrence avec les autres groupes ? Si oui comment s'exprimait cette concurrence
(aviez-vous peur que les autres fassent mieux...?)
NOEMIE : « Je dirais que cela dépend des projets. J'ai surtout ressenti les effets de la
concurrence, lors du premier projet : nous étions en tout environ 70, mon groupe avait gagné
le concours et quelques perdants ont choisi de ne pas nous aider ou l'ont fait mais avec de la
mauvaise volonté. Nous avons subi l’humeur des mauvais perdants, à qui la concurrence ne
réussissait visiblement pas ! De même, pendant les différents rendus que nous devons faire
pendant l’année, il y a parfois des tensions dues à la concurrence (chacun veut accrocher sa
pièce là où la lumière est la plus valorisante etc.).
Pour les affiches de métro, nous étions chacun dans notre coin, mais nous avons plutôt été
aidés par les conseils des autres (à part pour le matériel : il faut véritablement batailler sans
pitié pour se l’approprier !). »
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ROBIN : « La concurrence a quelque chose de délicat dans le domaine artistique, car, bien
souvent, les projets que nous devons réaliser laissent libre cours à notre imagination et il n'y
a souvent pas de critères de comparaisons dans ces cas-là. D’autre part, beaucoup des
projets que nous avons à réaliser ont pour but de promouvoir l’école, et dans ce cas, l'envie
de "tous bien faire" est plus forte que "faire mieux que". C’est une histoire d’image, que ce
soit de l’école, ou de notre professeur vis-à-vis des partenaires. Enfin, parfois les différentes
équipes partent dans des directions si différentes qu’il est impossible d’établir une
comparaison, et c’est davantage une forme d’émulation collective qui en ressort.
Cependant, en deuxième année, on choisit son secteur, il y a déjà plus d'enjeux. On est censés
être dans notre futur domaine, celui de notre vie professionnelle à venir, c'est assez
angoissant. Il y a parfois un regard envieux de la part de certains. »
4) La concurrence a-t-elle déjà eu un effet déstabilisateur sur votre groupe, si oui dans
quelle mesure ?
NOEMIE : Pour le projet au Mac Val ! La concurrence a entraîné du stress qui lui-même a
donné lieu à des conflits. Le groupe scénographie a été scindé en trois, par des idées
contradictoires, incompatibles. Cela a fait stagner l'action, puis, quand on a tranché, les gens
ne participaient même plus au montage et critiquaient la proposition.
5) Pensez-vous que la concurrence puisse vous motiver, vous galvaniser et si oui, dans
quelle mesure ?
NOEMIE : Je dirais que quand il y a un enjeu à la clé, oui. Dans le cas des portes ouvertes
par exemple, pour la première partie du workshop qui consistait à penser et dessiner la
scénographie les systèmes d'accrochage etc. la concurrence nous a poussés à faire la
proposition la plus pratique, la plus esthétique, la plus rapide et la moins coûteuse en
matériaux, la plus minimale et qui va mettre en valeur les objets, dessins, sculptures de la
façon la plus compréhensible possible (signalétique, graphisme etc.) car les visiteurs devaient
se déplacer facilement et comprendre les thèmes et sujets que nous avions traités rapidement.
Et ce, tout en restant originaux. Finalement le fait que la victoire soit associée à la réalisation
de notre projet nous a poussés à faire mieux que les autres. Le scénario est le même pour le
workshop qui concernait les affiches dans le métro.
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6) Comment a évolué votre rapport à la concurrence depuis votre intégration en
première année ?
NOEMIE : Je ne peux pas vraiment noter une évolution mais plutôt un changement, car les
activités collectives n'ont plus les mêmes enjeux. En première année, c'était plutôt un travail
d'équipe contre d'autres équipes, tandis qu’en deuxième année c'est un travail d'équipe pour
la réussite collective, pour un objectif commun, une entraide plutôt qu'une compétition. Je
dirais que je suis plus en compétition avec moi-même aujourd’hui qu'avec les autres.
6 bis) Dans ce cas, en première année, au fur et à mesure que vous réalisiez des projets
en équipe contre d’autres équipes, votre rapport à la concurrence a-t-il changé ?
Je pense que oui, car lors des premiers workshops de première année, j’avais assez peur des
autres groupes, tandis que, lors des workshops suivants, cette peur s’est atténuée. Cependant,
il me semble que mon envie de battre les autres (essentiellement venue du fait qu’il y avait
souvent un enjeu important lié à la victoire) est restée la même depuis le début.
ROBIN : J'ai l'impression qu'au sein de la classe, malgré la maladresse et l’orgueil de
chacun, l'on essaye tous de préserver cette émulation qui se substitue à la concurrence, plutôt
inhibitrice et peu productive. En fait, dans nos études, on valorise surtout la recherche,
l'investissement et l'expérimentation au résultat final. Or, la concurrence pousse plus (dans le
design en tout cas) à faire de l'image, du marketing, que de pousser nos recherches. Et les
professeurs/élèves ne sont pas dupes.
7) A choisir, si vous travailliez en groupe sur un projet, préféreriez-vous que d'autres
groupes travaillent également, à leur façon, sur ce même projet, ou au contraire,
privilégieriez-vous le fait d'être le seul groupe à travailler sur ce projet ?
NOEMIE : Avec l'expérience que j'ai, peut-être que je préférerais que plusieurs groupes
travaillent sur le même projet, car cela peut justement créer un esprit de compétition
bénéfique. De plus, le fait qu’il y ait d’autres groupes permet de comparer les projets et
d’étudier les propositions des autres notamment sur un même sujet : c'est toujours intéressant
et formateur de voir comment d'autres peuvent répondre à une même question, ce sur quoi ils
mettent l'accent etc. »
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ROBIN : Je préfère que plusieurs groupes travaillent sur un même sujet. On attaquera tous
les sujets avec des angles différents, on prendra ensuite des partis différents, on utilisera des
moyens différents etc. »
5.4.2. Interview de Julien Kauffmann, directeur de la branche transformation de
Disneyland Paris
1) Pourriez-vous vous présenter ainsi que votre parcours professionnel ?
« Je suis diplômé de l'ESSEC et j'ai également fait un master à Kellog School or
Management. J'ai ensuite débuté dans le consulting, j'ai fait 6 ans de conseil en management
chez Oliver Wyman. Puis j'ai travaillé 4 ans chez Nurun avant d'arriver à Disneyland Paris
en 2003. Je suis aujourd'hui directeur de la branche transformation de Disneyland Paris, qui
est donc une filiale de la Walt Disney Company. L’État français a longtemps possédé des
parts de capital chez Disneyland Paris, mais c'est aujourd'hui une société de droit français
qui est filiale à 100% de la Walt Disney Company, depuis l'été dernier. »
2) Comment votre société fait-elle face à la concurrence ?
« Chez Disney on a des concurrents. On est dans un cas de figure un peu unique avec des
concurrents très différents en fonction des marchés parce que le parc est consommé de
manière très différente. À Paris, on peut y aller pour la journée avec un billet à 50 €, les
concurrents vont être les autres grosses sorties familiales (concerts pour les ados, sortie au
château de Versailles…). On a beaucoup de concurrents très variés sur ce marché local, donc
il faut que nous suscitions l'envie chez nos clients de venir là, il faut créer des prétextes
(Halloween, Noël, nouvel an, soirée techno…). Ces évènements ont été créés, il y a un
moment, mais il a fallu en faire de plus en plus pour faire face à la concurrence. On essaie
toujours de trouver quelque chose et même les évènements qu'on répète doivent avoir une
part d'innovation. Ça c'est sur le marché local, c'est une concurrence qui est assez diffuse. En
Espagne, ce n’est pas du tout la même concurrence. Les gens qui viennent en famille pour un
séjour de 4-5 jours, ils vont passer 4-5 nuits, ils vont aller à la piscine, c'est des vacances en
famille. Dans ce cas, les concurrents vont être les croisières, les destinations au sud de
l'Espagne… c'est comme ça que les Espagnols font leur choix. Il faut donc se battre sur des
histoires de prix et d'images. On fait beaucoup de promotions en Espagne, parce que c'est
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quand même assez cher, on a dû baisser les prix pendant la crise. En Angleterre, le principal
concurrent de Paris c'est Walt Disney World en Floride, il y a plein de vols low-cost et la
question d'aller à Paris ou en Floride se pose vraiment pour les Anglais. Le concurrent ici
c'est nous-même, c'est compliqué, parce que c'est exactement le même positionnement. À
Paris on a choisi de se positionner plus jeune, sur des plus jeunes enfants. On a créé une
différenciation un peu artificielle pour ne pas se tirer de balles dans le pied. Après, en
Allemagne et au Pays Bas, c'est les seuls endroits où on a des concurrents directs (Europa
Park en Allemagne et un équivalent en Hollande). Là on est dans la vraie concurrence, car ce
sont des gens qui te vendent un même produit mais moins cher, ils ont tout copié mais ils l'ont
bien copié. Du coup on a beaucoup de mal sur l'Allemagne. On a choisi alors de se
positionner premium en Allemagne, on assume qu'on est plus cher et les Allemands sont très
Starwars, donc on a choisi d'être agressifs sur Starwars sur le marché allemand. L'affinité à
la marque Disney n’est pas très forte en Allemagne. »
3) Pensez-vous que sans la concurrence, Disney aurait pris cette dimension ? En d'autres
termes, pensez-vous que la concurrence a galvanisé votre entreprise ?
« La concurrence ne nous a jamais déstabilisés, parce qu'on est vraiment hégémoniques, mais
on a besoin de la concurrence. Un des dangers pour nous c'est de s'endormir sur nos lauriers.
Finalement, heureusement qu'on a Europa Park, les croisières en Espagne et les événements
sur Paris. Sans eux, on n’aurait probablement jamais créé les soirées techno, le semi-
marathon… cela nous a clairement poussé à nous réinventer et ça a forcément joué sur les
résultats de l'entreprise. »
4) Certaines équipes de votre groupe ont-elles déjà été déstabilisées par une forme de
concurrence ? Si oui, dans quelle mesure : ces équipes ont-elles rebondi ou perdu pied ?
« En Allemagne on a été vraiment en difficulté et la personne en charge de l'Allemagne a un
boulot un peu compliqué et cela se sent dans les équipes. Mais après, quand on est Disney, on
est beaucoup plus gros que tous les autres. Quand on fait des plans à long terme, on se
compare aux autres parcs Disney. Ce n'est pas pour autant que, lorsqu'on ouvre un nouveau
parc, nous sommes déstabilisés. »
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5) Souhaiteriez-vous que le marché sur lequel se trouve Disney soit plus concurrentiel
ou êtes-vous en faveur d'une situation plus monopolistique ?
« Les marchés sur lesquels se trouve Disney sont tous assez concurrentiels dans une certaine
mesure. Mais c'est vrai que le fait de ne pas avoir de concurrent comparable est bénéfique
pour notre entreprise. »
6) Avez-vous déjà, vous et votre équipe, été déstabilisés par une forme de concurrence ?
« Disney est une entreprise d'une hégémonie telle que je ne me suis jamais retrouvé dans une
telle situation de déstabilisation, mais la concurrence fait partie de notre quotidien, et c'est
parfois difficile de lutter. »
5.4.3. Interview de François de Mazières, maire de Versailles
1) Tout d’abord pourriez-vous vous présenter brièvement ?
« Je suis François de Mazières, maire de Versailles et ancien député. J’ai travaillé plusieurs
années dans des cabinets ministériels. J’ai la caractéristique d’être non inscrit depuis
plusieurs années. J’ai été apparenté au groupe LR lorsque j’ai été député, mais j’ai été élu
maire en étant non inscrit. »
2) Pensez-vous qu’il existe une forme de concurrence dans le monde politique, par
exemple, entre les différents partis politiques ?
« Il y a une concurrence évidente au moment des élections. Tout processus électoral est une
concurrence dans son principe même. Dire qu’il n’y a pas de concurrence serait se mentir,
par définition, il y a une concurrence. »
3) Le PS représente-t-il par exemple un concurrent pour vous ?
« Une élection municipale est différente d’une élection présidentielle. Quand j’étais député, je
me suis présenté en étant soutenu notamment par l’UMP à l’époque, et il y avait effectivement
un candidat du PS. Mais quand j’ai été élu pour la première fois maire, j’ai constitué une
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liste où j’étais non inscrit et je revendiquais cette non appartenance. J’avais dans ma liste
plusieurs partis (surtout de centre droit allant jusqu’au Modem). Et donc les élections locales
de maires, peuvent être moins marquées par des partis et plus sur des enjeux locaux et aussi
des enjeux de personnes. En fait la concurrence qui s’est manifestée pendant cette campagne
était une concurrence entre les idées, entre les personnalités plus qu’entre les partis. Moi je
n’étais soutenu par aucun parti et on a tout de même été élus, alors qu’en face il y avait les
listes politiques habituelles avec les soutiens des partis de droite et de gauche. On était plus
sur un raisonnement de programmes et de personnalités. »
4) Au cours de cette campagne, comment avez-vous vécu la concurrence avec les autres
listes ? Vous-a-t-elle galvanisé ou déstabilisé ?
« Dans une carrière vous avez toujours des moments où vous êtes en concurrence, même avec
des personnes que vous aimez bien, c’est ainsi. A l’époque, ma liste et moi nous nous basions
sur un programme en essayant de ne pas attaquer les autres listes, et nous avons d’ailleurs
plutôt réussi ; les gens appréciaient cette démarche. Cela dit, ce n’est quand même pas
toujours facile, car vous pouvez toujours être attaqué. Et puis c’est difficile de maîtriser une
campagne, car il faut vous maîtriser vous-même mais aussi vos collègues : il y a souvent des
tensions en politique. Outre les attaques des autres listes, vous pouvez être déstabilisé par des
tas de choses dans une campagne, c’est pour ça d’ailleurs qu’il y des gens qui adorent les
campagnes électorales – ce n’est pas vraiment mon cas, d’ailleurs. Il y a un côté exaltant, une
compétition stimulante. Il peut y avoir un candidat en face de vous qui aura une très bonne
idée lui attirant l’intérêt des médias et un engouement réel. Lors de ma première campagne,
par exemple, on a monté contre nous un faux sondage : le Parisien l’a relayé et effectivement
je peux dire que mon équipe a été déstabilisée, car c’était l’inverse de la réalité qui était
montré dans ce sondage. Dans ce genre de cas, chacun réagit avec son propre tempérament :
un candidat peut être en pleine forme physique à un moment ou complètement découragé, il
n’y a pas de règle finalement. Il y a aussi des circonstances qui peuvent faire que même un
candidat très combatif peut avoir des moments de faiblesse. »
5) Tendanciellement, pensez-vous que les candidats qui se lancent dans une campagne
électorale sont ceux qui sont exaltés par l’esprit compétitif de cette dernière ?
« Il y a plusieurs motivations, quand vous faites une campagne politique. La motivation du
candidat « politicien » c’est-à-dire quelqu’un qui a toujours été passionné par le monde
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politique, engagé très tôt dans un parti, qui va s’engager dans un combat politique avec une
certaine expérience et donc avec un peu moins de grandeur que quelqu’un qui va se
présenter, parce qu’il a envie que tel ou tel projet se réalise. Les motivations sont très
différentes selon le parcours de l’individu. Il y a des gens pour qui c’est vraiment un objectif,
et ils réalisent donc tous leur parcours autour de ça : je connais des élus qui ont élaboré une
stratégie depuis l’âge de onze ans ! Pour certaines personnes la concurrence est un moteur,
pour d’autres, c’est un frein : il y a des personnes qui ne se présenteront jamais, parce
qu’elles sont rebutées par cet aspect-là. Mais je pense que le fait d’être galvanisé et
déstabilisé au cours d’une campagne est la tendance la plus générale : tout le monde passe
par ces deux phases. »
6) A votre avis, quel effet l’émergence du parti d’Emmanuel Macron, LREM, a eu sur
les partis traditionnels ?
« Ça a représenté pour certains une opportunité extraordinaire, car on ne devient
normalement pas député du jour au lendemain. Là, on fait face à un mouvement qui s’est créé
extrêmement rapidement, ce qui est unique dans l’histoire de la Vème République. Cela a
permis à des personnes loin de la politique d’être propulsées au niveau national en tant que
députés, ce qui est exceptionnel. Pour ceux qui ne se voyaient pas du tout rejoindre le parti
d’Emmanuel Macron, c’est différent. J’avais préparé par exemple ma succession pour
François Xavier Bellamy qui ne devait avoir aucun problème pour être élu, car il était
soutenu par les partis de droite et de centre droite. Et là, il a été battu par les membres de
LREM. C’est l’étiquette qui l’a fait battre. Sur les 12 députés des Yvelines par exemple, il y a
eu 11 députés En Marche dont beaucoup d’inconnus qui ont pu profiter de la vague alors que
d’autres personnes plus anciennes ont été battues. »
5.4.4. Interview de Sébastien Michot, entraîneur du club d’aviron de HEC
1) Pouvez-vous vous présenter ? (Depuis combien de temps êtes-vous entraîneur
d’aviron à HEC ? Avez-vous entraîné des bateaux (HEC ou non-HEC) lors de
compétitions ? Si oui lesquelles ?)
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« Je m’appelle Sébastien Michot et suis entraîneur d’aviron à HEC Paris. Auparavant, j’ai
été rameur puis coach au club d’aviron d’Evry. L’objectif du club aviron HEC est de disputer
les championnats de France universitaires qui ont lieu en mai. Depuis plusieurs années,
j’encadre les équipages lors de ce grand évènement qui vient clôturer la saison sportive. Bien
évidemment, tout au long, nous participons à des compétitions en Ile-de-France pour nous
préparer. »
2) Pensez-vous que la concurrence entre plusieurs bateaux pousse chaque équipage à
progresser lors des entrainements ?
« Très clairement, je pense que la concurrence pousse chaque bateau à être meilleur que qui
ce soit lors des entraînements ou des compétitions. C’est pourquoi j’organise toujours des
courses, des challenges entre équipages à l’entraînement pour pousser chacun à se
transcender. »
3) Est-ce qu’il vous est arrivé de rencontrer des équipages préférant s’entraîner seuls ?
Si oui, avaient-ils de bons résultats ?
« A vrai dire, cela m’est arrivé très rarement. Il s’agissait de personnes qui ne souhaitaient
pas faire de l’aviron en compétition. Ils vivaient mal d’être mis en concurrence avec d’autres
sportifs. J’ai, pour ma part, du mal à expliquer cette peur de la compétition, car, pour moi,
elle était la récompense de tous les efforts que je fournissais lors des entraînements. »
4) Lors de l’entraînement, effectuez-vous des courses au temps (sur le modèle du contre-
la-montre au cyclisme) ? Si oui, les temps réalisés sont-ils inférieurs ou supérieurs aux
temps réalisés en course ?
« Oui, bien sûr, nous appelons cela des « têtes de rivière ». Les temps réalisés sont très
souvent inférieurs aux temps réalisés en compétition. Je crois que la volonté de battre l’autre
est tellement forte que rien ne peut la remplacer, le mental joue vraiment un rôle essentiel
dans la réussite sportive. »
5) Avez-vous un souvenir marquant d’un équipage ayant été complètement déstabilisé
(réciproquement galvanisé) par la concurrence lors d’une course ou d’un
entraînement ?
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« Oui, c’était lors des Championnats de France universitaires d’aviron à Bourges. Un de nos
bateaux était qualifié en 1/2 finale et visait d’accéder à la finale. Ils avaient fait un temps le
matin qui devait leur permettre de passer ce stade de la compétition. Il fallait simplement
qu’ils réalisent une aussi bonne course que quelques heures auparavant. Mais, ils sont
complètement passés à côté de leur course car au lieu de se concentrer sur leur effort, ils ont
passé leur temps à regarder ce que faisaient leurs adversaires. A la fin, ils ne se sont pas
qualifiés en finale et nous avons tous été très déçus. Très clairement, c’est le départ plus
rapide que prévu des autres bateaux qui les a complètement déstabilisés. »
6) En compétition, la concurrence (présence de plusieurs bateaux) est plus un facteur de
déstabilisation ? De galvanisation ? Les deux (dans quel ordre ?) ?
« Pour moi, la concurrence est très clairement un facteur de galvanisation. Certes, elle
déstabilise un peu au début mais il faut passer outre. C’est la force des grands champions qui
ne se laissent pas submerger par la peur d’échouer, mais sont, au contraire, encore plus
motivés par l’idée de battre leurs adversaires. »
7) Lorsque vous motivez votre équipage avant une compétition, évoquez-vous les
équipes adverses?
« Oui, je leur parle des autres bateaux. Je leur dis qu’ils représentent HEC et que battre
Centrale ou Polytechnique doit être une source de motivation pour eux. J’adapte toujours
mon discours aux écoles représentées. Le désir de faire mieux que les autres doit être ce qui
anime tout équipage sur la ligne de départ et c’est le rôle de l’entraîneur de le transmettre. »
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5.5 Bibliographie
Ouvrages théoriques :
- La France au défi, Hubert Védrine
- Recherches sur la nature et les causes de la richesse des Nations, Adam Smith
- Développement économique et concurrence étrangère, Raymond Courbis
Œuvres cinématographiques :
- Les Yeux dans les Bleus, Stéphane Meunier
- 1974, une partie de campagne, Raymond Depardon
Etude : - Coopération et compétition dans les classes nombreuses, Conseil ontarien de la qualité de
l'enseignement supérieur