Charlotte Gabris, la drole de Suisse (Le Soir 23/11/2010)

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Charlotte a écrit son premier one woman à 18 ans ! Lauréate du prix François Silvant en Suisse, de celui de la découverte du festival « Paris fait sa comédie » ou encore de la route du rire 2008, elle est la plus jeune chroniqueuse de l’équipe de Laurent Ruquier sur les ondes d’Europe 1 dans l’émission on va s’gêner. Alors que son premier spectacle « Bonsoir, deux places pour Charlotte » a cartonné au théâtre de Dix heures à Paris, Charlotte est également devenue une habituée des plateaux de télévision (Comédie !, France 2, France 4) et des plateaux d’humoristes puisqu’elle participe chaque année aux grands galas du festival du rire de Montreux. Elle revient avec un nouveau spectacle tout autant corrosif que charmeur en 2010.

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22/11/10 20:43 - LE_SOIR du 23/11/10 - p. 35

! « Essential kil-ling », Prix spécial dujury et Prix de la meil-leure interprétationpour Vincent Gallo àla Mostra de Venisen’a pas de distribu-teur en Belgique.! La Cinematek offrel’occasion unique dele découvrir surgrand écran, en pré-sence du réalisateur.

ENTRETIEN

I nvité de la Cinematek, quilui rend hommage dès cemercredi et pendant une

bonne partie du mois de décem-bre, Jerzy Skolimowski intro-duit publiquement, ce mercredi,l’avant-première de son dernierfilm, Essential killing, récem-ment auréolé du Prix spécial dujury et du Prix de la meilleure in-terprétation pour Vincent Galloà la Mostra de Venise. De façonstupéfiante, ce film d’une grandepuissance n’a à l’heure où nousécrivons toujours pas trouvé dedistributeur belge. De sorte quece sera, qui sait, l’unique occa-sion pour les amoureux du ciné-ma de le découvrir en salle.

Dans Essential killing, Vin-cent Gallo campe un terroristetaliban, qui fuit ses ravisseurs oc-cidentaux à la suite de l’accidentde route que subit le convoi danslequel il est placé. S’ensuit unechasse à l’homme haletante etpratiquement muette, où notreévadé ressemble moins à un ter-roriste qu’à un frère humain s’ac-

crochant sauvagement à ses ins-tincts de survie. Skolimowskinous en parle.

Pourquoi raconter cette histoireaujourd’hui ? D’où vient-elle ?C’est une histoire très contempo-raine. A priori, ça ressemble àdes titres de Une qu’on pourraitretrouver dans de grands jour-naux. Mais pour moi, l’intérêtporté concerne moins l’aspect po-litique que l’état de la condi-tion humaine. Il s’agit d’unfilm sur la dégradationd’un homme, qui retour-ne progressivement àl’état sauvage et ani-mal, avec la nécessitéde tuer afin de survi-vre.Est-ce une questionqui vous est personnel-le ?Personnelle, non, mais laquestion est bonne, dans lamesure où cette histoire m’est

en effet venue à la suite de quel-que chose de précis. Je vis à lacampagne, en Pologne, dans la fo-rêt profonde. Près de chez moi, ily a un aéroport militaire, tout àfait secret, où des avions de laCIA sont censés atterrir et ame-ner des prisonniers du Moyen-Orient. Je savais cela depuis desannées, mais n’avais jamaisimaginé que cela deviendrait un

sujet de film un jour,

dans la mesure où je me sens éloi-gné des sujets politiques. Maispar une nuit d’hiver, alors que jerentrais chez moi, en traversantla forêt, ma voiture se mit à déra-per terriblement dans la neige,jusqu’à presque basculer dansun fossé et à me faire passer devie à trépas. Je me suis arrêté audernier moment… et me suis ren-du compte que j’étais à deux pasde l’aéroport secret. J’ai aussicompris que cette route devaitêtre celle prise par les convois em-menant les prisonniers vers les si-tes secrets. Je me suis dit que sicet accident avait failli m’arri-ver, il aurait pu en être de mêmepour l’un de ces convois de pri-sonniers, en leur offrant la possi-ble chance d’une évasion. J’aipoussé l’hypothèse plus loin, enpensant que l’évasion aurait dé-

bouché sur une folle traver-

sée dans la neige, le froid glacial,les éléments déchaînés. Le filmest né de cela.Pourquoi en avoir fait un filmpratiquement muet ?Je ne voulais pas que l’on puisseidentifier le prisonnier. Est-il af-ghan, irakien, pakistanais ? Sonaccent l’aurait trahi. Cela auraitété grotesque. Non, je voulais unedestinée universelle.C’est un terroriste, mais aufond, on peut ressentir à sonégard la compassion pour unfrère humain !Disons qu’il est le mauvais typeau mauvais endroit au mauvaismoment, embarqué dans uneaventure à la suite d’un acci-dent. Et donc, oui, on peut le con-sidérer comme un innocent.Mais d’un autre côté, nousvoyons le même homme tuer et re-tourner à l’état animal.On s’interroge, après avoir vu lefilm, sur le tournage : éprou-vant ?Oui, et pas un peu. Nous tour-nions par une très faible tempé-rature. Certaines nuits, par – 35

degrés. Vincent Gallo a dégusté.Mais pas seulement lui. Toutel’équipe ! Nous tournions parmoments dans la montagne,avec la nécessité de monter tousensemble avec des transports deneige. Ce fut vraiment un film af-freusement difficile à tourner.Vincent Gallo est-il fidèle à sa ré-putation : grand comédien, ac-teur compliqué ?C’est un homme très intelligentet talentueux. Mais ce n’est pasfacile de travailler avec lui. Cecidit, qu’importe tout ce que tunous avons eu de pénible à tra-verser ensemble, et il y en eut, àl’arrivée sa performance est phé-noménale. Personne n’aurait étémieux que lui dans ce rôle.En quoi est-ce si spécial de tra-vailler avec lui ?C’est un réalisateur lui-même. Ila ses propres idées, convictions,qui ne sont pas forcément lesmiennes. J’ai dû par momentslui rappeler qu’il tournait dansmon film, pas dans le sien. Maisj’accepte cette pression. Les ac-teurs ambitieux ont toujours desidées et des obsessions qu’ils ontenvie de pousser, parfois par laforce.Emmanuelle Seignier fait unebrève apparition, mais me sem-ble-t-il d’une importance capita-le.Je connais Emmanuelle depuisplus de vingt ans. (ndlr : elle estla femme de Polanski, avec quiSkomilowski a écrit le scénariodu couteau dans l’eau, en 1962).Son rôle est extrêmement impor-tant. C’est la seule qui apporteune forme de compassion chré-tienne. "

Propos recueillis par NICOLAS CROUSSE

Rétrospective Skolimowski, du 24 no-vembre (avant-première de Essential kil-ling) au 19 décembre. Infos à la Cinema-tek : www.cinematek.be

Q uand on lui demande s’il estplus difficile de trouver une

femme drôle ou un Suisse drôle,Charlotte Gabris, fille, suisse etdrôle, répond : « J’admets que jecumule deux handicaps ».

Pour tout dire, depuis l’ances-trale Zouc, gravement malade,on n’avait pas mémoire d’une hu-moriste venue de ce côté-là desAlpes. A 23 ans à peine, Charlot-te Gabris a réussi son entrée dans

ce petit monde à force d’opiniâ-treté. Cette Lausannoise a copré-senté La grosse émission sur Co-médie, s’est produite en Belgiqueavec les Kings of Comedy, a faitpartie de l’éphémère aventure duBelge comme Eddy Show sur laRTBF où Pirette-Van Caubergvoulait driver quelques jeunes co-miques et arrive la semaine pro-chaine avec son one-woman-show. Elle est aujourd’hui présen-te chaque semaine dans l’émis-sion de Laurent Ruquier sur Eu-rope 1.

Dans Le Belge comme EddyShow, Gabris a montré une éten-due du personnage qu’elle inter-prète, sorte d’ado hystérique à larépartie assassine. Mais son regis-tre ne se limite pas à ça. « J’es-saye, dit-elle, d’apporter un cer-tain décalage et une dose de cynis-me. Je veux aller là où on ne m’at-tend pas nécessairement. On est àmi-chemin entre les sketches et lastand-up, entre le cynisme et la lé-gèreté. Je démarre tout de mêmeen parlant de l’euthanasie enSuisse, qui fait grimper le touris-me sauf que les gens ne prennentjamais de billet retour. Je parleaussi des mecs mais il y a côtétrop évident quand on est unefille à faire cela, alors je parle parexemple de mon mec qui fait sonservice militaire car vous savezqu’on a un service militaire en

Suisse alors qu’on n’a jamais étéattaqués par personne !»

Comme nombre de ses confrè-res, Charlotte Gabris trouve, avecson coauteur Laurent Cohen (quiécrit pour le Belge Kody aussi),son inspiration dans la vie quoti-dienne, qu’il s’agisse des formu-les toutes faites (« Qu’est-ce

qu’on s’en fout de savoir la distan-ce à vol d’oiseau, on n’est pas desoiseaux ! ») ou des clichés sur laSuisse (« Ce n’est pas la Suissequi est chère, c’est vous qui n’avezpas les moyens »).

A cheval entre deux univers,Charlotte Gabris cite à la fois par-mi ses références Patrick Timsit

et les shows américains de stand-up de Jim Carrey ou Robin Wil-liams. Il faut dire qu’après un anaux USA, elle a, toute seul, pris à19 ans son baluchon pour allervendre son rêve de one-woman-show entièrement artisanal à Pa-ris. A force de multiplier les demi-heures dans les cafés-théâtres, el-

le a rencontré un producteur, uncoauteur et Laurent Ruquier lorsdu festival de Montreux. C’estaux Belges à la découvrir à pré-sent. " J.-F. Lws

Charlotte Gabris, du 25 au 27 novembre,aux Ecuries de la Vénerie à Watermael-Boitsfort ; www.lavenerie.be

Vanessa Paradis s’installera, du 24 au 29 janvier 2011, au Théâtre des FoliesBergère à Paris. La chanteuse s’y produira à guichets fermés dans le cadre de satournée acoustique. Elle sera accompagnée d’un quatuor à cordes. © EPA.

Humour / One-woman-show aux Ecuries de la Vénerie à Watermael-Boitsfort

Skolimowski retourne à l’état sauvage

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A CHEVAL en-tre deux uni-vers, Charlot-te Gabris citeparmi ses ré-férences Pa-trick Timsit.© D.R.

JERZY Skoli-mowski intro-duit ce mercre-di l’avant-pre-mière de « Es-sential kil-ling ».© C. ONORATI/EPA.

laculture

Charlotte Gabris, la drôle de Suisse

L’ESSENTIEL

Cinéma / Rétrospective Skolimowski à la Cinematek de Bruxelles

Le Soir Mardi 23 novembre 2010

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www.lesoir.be 1NL